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Le photographe syrien Hamid Khatib : échapper à la mort, saisir la vie

samedi 28 décembre 2013 à 16:25

Ce billet est aussi publié [en anglais] sur Syria Untold.

“Il n'y a pas de Hamid le photographe sans la révolution. Espérons qu'il y en aura encore un quand la révolution sera finie.” Ainsi parle le jeune photographe syrien couronné de prix Hamid Khatib, qui a rejoint le soulèvement en octobre 2011, après avoir accompli son service militaire obligatoire. Avec son appareil, il a saisi une génération de jeunes gens descendue dans les rues, qui a étonné ses prédécesseurs en demandant l'impossible.

 

Boy makes weapon in Aleppo, by Hamid Khatib. Source: the author´s facebook page

Un garçon rebelle fabrique de l'armement à Alep, par Hamid Khatib. Source : Page Facebook de l'auteur

 

Les enfants de la guerre

Comme beaucoup d'autres Syriens, Hamid Khatib, 23 ans, se dit “ressuscité après le soulèvement”, dans un entretien avec Syria Untold.

Il a commencé par enregistrer des vidéos des manifestations et de la répression des contestataires par les forces du régime, et n'a pas tarder à se tourner vers la photographie. Sa photo “Un garçon fabrique de l'armement” a été choisie par Reuters comme l'une des meilleures de l'année 2013. Il travaille depuis lors pour cette agence de presse, et saisit les moments de destruction, d'espoir, de désespoir, de perte et de vie quotidienne en Syrie.

La photo récompensée montre un garçon de 10 ans, Issa, portant un obus de mortier dans un atelier d'armement de l'Armés Syrienne Libre à Alep.

“Depuis un moment je voulais saisir les effets de la guerre sur les enfants,” explique-t-il. “J'avais l'intention de faire une série avec différents enfants, mais quand j'ai rencontré Issa et son père, j'ai été frappé par leur histoire et n'ai plus pu penser à autre chose.”

“Issa travaille avec son père à l'atelier d'armement 10 heures par jour, tous les jours, sauf les vendredis. Son histoire en est venue à prendre un sens très fort pour moi, personnel,” dit Khatib.

“La situation en Syrie échappe au contrôle d'un journaliste,” dit-il. “Tout ce que pouvez faire, c'est vous adapter à l'évolution des événements sur le terrain. Mais je préfère personnellement dépeindre la vie au jour le jour dans le pays, et les effets collatéraux de la guerre sur les gens.”

A child in Raqqa, by Hamid Khatib. Source: The author´s Facebook page.

Un enfant à Raqqa, par Hamid Khatib. Source : page Facebook de l'auteur.

 

Un parcours de mort et d'amour

Né à Alep en 1990, Khatib a commencé à couvrir le soulèvement au moment où il se militarisait. Son propre service militaire terminé, il a cherché du travail aux Emirats Arabes Unis, avant de  bientôt revenir à Alep incognito. “Je voulais montrer au monde ce qu'était réellement l'état de terreur du régime syrien,” dit-il. 

Au cours de ces dernières années, il n'a pas seulement rencontré la mort et la destruction, il a aussi trouvé l'amour. Il est tombé amoureux de Nour Kelze, une ex-institutrice devenue photographe pour Reuters en 2012 après avoir pris des images avec son téléphone mobile. Ils sont maintenant mariés.

Syrian photographers Hamid Khatib and Nour Kelze, working in Aleppo. Source: Khatib´s facebook page.

Les photographes syriens Hamid Khatib et Nour Kelze, au travail à Alep. Source : page Facebook de Khatib.

 

Nour et Hamid travaillent main dans la main à Alep, et ils ont plusieurs fois frôlé la mort.

“Je me tenais au même endroit, mais elle m'a demandé de changer de place avec elle, pour prendre quelques photos de là,” raconte Hamid. “Elle est très forte et n'a peur de rien. Soudain j'ai entendu les obus, et vu la fumée sortir de partout, et n'ai plus pu penser à rien qu'à Nour, ‘Où est Nour…?'” Il a entendu sa voix l'appeler, et il l'a emmenée à un hôpital de campagne. Elle était blessée au pied gauche et souffrait d'éclats d'obus aux mains.

A une autre occasion, Hamid a assisté à un bombardement par le régime pendant une des nombreuses manifestations auxquelles il a pris part à Bustan al-Qasr, une petite ville connue pour transformer les fêtes de mariage en manifestations de masse pour la liberté

Bustan al-Qasr a fait les titres des médias internationaux en janvier 2013, lorsque des dizaines d'hommes disparus à des barrages du régime ont été découverts dans le lit asséché de la rivière Queiq, tués d'une balle dans la tête et les mains liées dans le dos avec des cordes de plastique.

“La plupart de ceux qui ont manifesté à côté de moi ont été blessés ou tués ce jour-là, mais j'ai survécu,” se souvient Hamid. 

Il a aussi vu la mort de près le jour de son retour dans sa ville d'origine d'Azaz, au Nord d'Alep, où il n'était pas allé depuis trois ans. Toute sa parenté, cinq familles entières, partageait une maison de deux étages. Réveillé par le bombardement, il a dévalé l'escalier pour voir si les femmes et les enfants avaient survécu, il les a trouvés pleurant de peur que les hommes aient été tués à l'étage. Les missiles ont continué à tomber toute la nuit. Près de 150 voisins ont été tués à Azaz cette nuit, et 40 maisons réduites en décombres.

La mort a épargné Hamid, mais pas des amis et des confrères comme Molhem Barakat, un photographe de 18 ans tué en couvrant une bataille pour un hôpital à Alep le 20 décembre. Hamid s'engage à poursuivre son travail, afin d'honorer Molhem et tous les martyrs qui ont perdu la vie pour une Syrie meilleure. “Parce qu'il n'y avait réellement pas de Syrie avant la révolution,” conclut-il. “Il n'y a pas de Syrie sans la lutte pour la liberté à laquelle tant de vies ont été données.”

Ce billet est aussi publié sur Syria Untold.

 

GV Face : Le journalisme de solutions peut-il remplacer l'information ‘toxique’ ?

samedi 28 décembre 2013 à 16:24

Un conflit sanglant au Sud-Soudan. Des manifestants arrêtés et battus en Egypte. Des villes détruites par un typhon aux Philippines. Ce sont des informations que nous considérons comme importantes. Mais leur présentation ne devient-elle pas déprimante et toxique ? 

Notre but, chez Global Voices, est de parler des personnes qui sont impliquées dans les événements que relatent ces informations, dans le monde entier. Comme les autres médias, nous consacrons beaucoup d'articles à des actualités souvent dramatiques,  à la corruption politique, aux catastrophes écologiques. Nous éprouvons de l'empathie pour les personnes victimes de problèmes ou  tragédies, qui souhaitent faire entendre leur voix dans le monde entier. Mais nous connaissons nous aussi ces moments quand l'équipe éditoriale de Globla Voices préférerait s'installer confortablement pour lire sur Buzfeed ” Les 40 chats les plus maladroits de 2013” au lieu d'éditer les sombres récits qui nous parviennent des quatre coins du monde. Ce type d'informations inonde chaque jour tous les médias et il peut en résulter une vision très négative de notre monde.  Qui nous laisse avec un sentiment d'impuissance.  Mais peut-être n'est-ce pas inévitable ?  

Et si les informations nous permettaient de devenir des citoyens plus actifs, susceptibles d'avoir à terme un impact sur la marche du monde ? Existe-t-il un format qui permette de présenter des informations sur des événements, bons ou mauvais, de façon constructive ? Qui permette aux lecteurs de s'engager pour des situations difficiles, même s'elles se déroulent à l'autre bout du monde ? 

Cette semaine, nous disons adieu à  2013 avec un numéro spécial de GV Face, notre série de débats en vidéo. Il réunit cette fois-ci uniquement des membres de Global Voices : le co-fondateur Ethan Zuckerman, les rédactrices en chef Solana Larsen et Sahar Habib Ghazi, autour de Ellery Roberts Biddle, l'éditrice de notre site pour les libertés numériques, Advocacy. Le thème : le concept de  ”journalisme de solutions” et de “good news” (bonnes nouvelles). Nous avons mis en parallèle ce journalisme de solutions et la démarche traditionnelle du journalisme. Nous parlons aussi des mutations du paysage médiatique et de nos propres pratiques éditoriales ici, à Global Voices. Ensemble, nous envisageons quelques alternatives, pour que l'actualité ne soit plus destinée uniquement à informer, mais pour qu'elle propose d'agir et de nous exprimer en tant que citoyens du monde et cybercitoyens.  

Pour aller plus loin

Problématiques :
The psychological impact of negative TV news bulletins (L'impact psychologique nocif des journaux télévisés)
The Evening's Bad News: Effects of Compelling Negative Television News Images on Memory (Les mauvaises nouvelles du soir : les conséquences de la présentation accrocheuse et négative d'images télévisées sur la mémoire 

Solutions :

En français : 

Le journalisme de solution (Forum mondial de la démocratie, Strasbourg, 2013)

Pour un journalisme constructif 

En anglais : 
Blog d'Ethan Zuckerman : Saving the News with Advocacy Journalism (Sauver les informations par le journalisme de plaidoyer)
Innovating News Journalism through Positive Psychology
Solutions Journalism Can Change the World
Why We Need Solutions Journalism
News Doesn't Reflect the Real World
A New Mainstream Solutions Journalism
Solutions Journalism: What it is and what it is not

Arte en el Trole : Occupons les espaces publics de Quito

samedi 28 décembre 2013 à 11:34
El juego de lo imprevisto. Proyecto seleccionado de Arte en el Trole.

Le jeu de l'imprévu. Projet sélectionné par Arte en el Trole.

Tous ces moments passés à se déplacer d'un lieu à l'autre dans une grande ville donne souvent l'impression de perdre son temps. Si bien que les wagons du métro ou les bus, pourtant interconnectés, sont souvent considérés comme des “non-lieux”, tout comme les stations qui permettent cette interconnectivité. A Quito, en Equateur, le projet Arte en el Trole (“Art dans le Trolleybus”) a décidé d'insérer un peu d'art et de culture dans ces espaces citadins, représentés à travers le trolleybus [espagnol] ou le service de transports en communs.

Arte en el Trole a débuté ses activités en 2006, expliquant [espagnol] qu':

il s'agit d'un projet indépendant qui demande à être pratiqué, permettant la démocratisation de la culture à travers l'art sous toutes ses formes, et donnant la possibilité à des artistes locaux, nationaux et étrangers d'exposer leurs œuvres dans de nouveaux espaces. Elles bénéficient directement aux habitants, et vont à la rencontre de ceux qui sont habituellement exclus de la richesse culturelle et artistique qui se développe en Equateur et ailleurs dans le monde.

En mai dernier, Daniel Pazmiño a eu la gentillesse de nous parler de l'histoire et des activités d'Arte en el Trole.

L'objectif d'Arte en el Trole, selon ses propres mots, est “d'établir une plateforme de diffusion artistico-culturelle à la portée des habitants de la ville. Parmi les interventions réalisées dans les stations figurent de multiples artistes, des créateurs, des gérants, des dirigeants, des organisations etc., qui démontrent toute la maîtrise de leur art à travers les contraintes d'un tel système (le trolleybus transporte plus de 250 000 personnes chaque jour)”.

Dans la vidéo suivante, Daniel nous raconte certaines interventions et performances réalisées ou prochainement réalisées par l’association dans le trolleybus ou les diverses stations:

 

Actuellement, Arte en el Trole étend [espagnol] ses activités au-delà du réseau de trolleybus et “travaille conjointement avec des étudiants et des représentants des écoles, des collèges, des universités, des quartiers etc., parvenant ainsi à promouvoir et fortifier la création, la production, la diffusion et la circulation de biens culturels et à construire éventuellement des espaces exceptionnels de dialogue interculturel, qui visent à renforcer une politique culturelle intégrée”.

Dans la dernière vidéo, Daniel nous parle de la démocratisation de l'espace public à Quito grâce au projet Arte en el Trole.

Afin de nous faire une idée des activités et interventions réalisées par Arte en el Trole, voici une vidéo en deux parties. La première est une compilation de photos de leurs principales activités durant 2013 :

La seconde vidéo, intitulée “Incursion onirique dans le trolleybus”, a été enregistrée lors d'une intervention d'Arte en el Trole dans un des trolleybus de Quito.

Avant de conclure, il convient de rappeler que ce qu'a mentionné Daniel : l'appel d'Arte en el Trole à des projets artistiques et culturels est toujours ouvert, ainsi que les regroupements (de ces initiatives) en Amérique latine. Vous pouvez voir davantage de vidéos d’Arte en el Trole [espagnol] sur leur chaîne YouTube et les suivre sur Facebook et Twitter.

La Chine s'émeut du sort d'un agriculteur qui a tué les démolisseurs de sa maison

samedi 28 décembre 2013 à 10:41
Fan's head was broken

L'avocat des droits de l'Homme Liu Xiaoyuan a téléchargé le photo de Fan au tribunal sur Weibo. Sa famille et lui ont été attaqués par les responsables chargés de la démolition. Fan a subi une fracture du crâne.

L'arrestation d'un agriculteur dans l'est de la ville chinoise de Suzhou qui a tué deux personnes pour s'opposer à son expulsion forcée a suscité un tollé sur les médias sociaux chinois.

Le journal Southern Metropolis Daily relate que Fan Mugen, un agriculteur retraité de 64 ans, a tué deux responsables de la démolition avec un couteau. Les faits sont avenus après que lui, sa femme et son fils aient été frappés et blessés, dans une banlieue de Suzhou, une ville proche de Shanghai, le 3 décembre 2013. Plusieurs internautes sur le réseau chinois Weibo, similaire à Twitter, avancent que ces meurtres pouvaient être qualifiés d'auto-défense et avertissent que Fan pouvait être passible de la peine de mort.

Plus de cinquante avocats et citoyens à travers le pays se sont rendus à l'hôpital [chinois,zh] pour voir l'épouse de Fan, blessée et détenue, mais en ont été empêchés par des policiers le 22 décembre.

Le Southern Metropolis Daily écrit [zh] que la maison de Fan est la seule à n'avoir pas été détruite dans le village en raison d'un litige sur le montant faible du dédommagement. Il a lancé une pétition en 2004 et s'est rendu à Beijing par deux fois pour faire signer sa pétition par le bureau spécial des réclamations des citoyens cette année. Fan disait avoir été forcé de signer l'accord de démolition en novembre. Fan est aussi membre du Parti communiste.

Cela a rappelé à beaucoup d'internautes la peine de mort de Xia Junfeng, un vendeur ambulant reconnu coupable du meurtre de deux chengguan, des agents de police chargés de la gestion urbaine [du Bureau de l'administration d'affaires urbaines]. Il a été exécuté en septembre dernier malgré les appels à la clémence, ce qui avait indigné de nombreux militants, reprochant au système  chinois de ne pas  protéger les plus faibles et de les punir trop sévèrement. Beaucoup étaient aussi d'avis que l'acte de Xia était assimilable à  de l'auto-défense parce qu'il avait été victime de violences graves.

Le centre des droits civils de Suzhou tient informé les internautes des derniers développement via son compte Weibo :

律师和公民五十余人来到苏州市高新区人民医院探望范木根的妻子顾盘珍,范木根因反抗入侵者保护家人正当防卫刺死两名入室行凶者,现被以故意伤害罪名刑事拘留,范妻被入侵者打断胳膊正在住院治疗。苏州辅警在医院列队 严阵以待!!

Plus de cinquante avocats et citoyens vont voir Gu Panzhen, la femme de Fan Mugen, à l’hôpital du peuple du district de haute-technologie, à Suzhou. Fan a été arrêté  après avoir tué deux agresseurs pour protéger sa famille. Gu est soignée à l'hôpital pour un son bras cassé par les intrus. La police municipale de Suzhou est en train de cerner l'hôpital !

L'avocat des droits de l'Homme Liu Xiaoyuan explique la situation de la famille de Fan et estime que ce fait divers est un acte d'auto-défense :

“2013”年度人物候选人:范木根,苏州农民,年轻时在内蒙古参军。因房屋被强拆,他在2013年10月底出外躲藏一个月。2013年12月2日回到家中。2013年12月3日,拆迁公司人员又到家中逼迁。他在头部被打破,儿子头部被打伤,妻子右手骨头被打断时,拔打刺死两名逼迁人员。这是今年最大的一起血迁事件。

Candidat au prix de la Personne de l'année 2013, Fan Mugen, un agriculteur de Suzhou, a rejoint l'armée de la région autonome de la Mongolie intérieure lorsqu'il était jeune. Il s'est éloigné de sa maison pendant un mois pour éviter la démolition depuis fin octobre et est rentré chez lui le 2 décembre. Le 3 décembre, les employés de la société de déménagement se sont de nouveau rendus chez Fan pour l'obliger à partir. Il a tué deux intrus quand il a eu le crane facturé, son fils  a été blessé à la tête et sa femme a eu le bras droit cassé. C'est l'opération de démolition la plus sanglante de l'année.

Le journaliste indépendant Wang Qingfu trouve que Fan est un héros :

范木根,典型的正当防卫。范木根是不畏强权的英雄!

L'acte de Fan Mugen constitue de la légitime défense. Il est un héros de la résistance face au pouvoir !

L'utilisateur de Weibo “Jiang Nan school kid” est d'accord avec Wang :

苏州范木根是一个了不起的军人!当老范面对暴徒,三刀两命。有多少人拍手称快?有多少人从内心里佩服老范的勇气!他做了许多人想却不敢做的事情。全国掀起了新一轮范木根无罪浪潮!因为他们很多在拆迁中都体会到那种无奈与绝望。拆迁办的黑社会化,政府的推皮球,公安的冷漠。

Fan est un grand combattant. Il a osé tuer deux truands avec un couteau. Beaucoup applaudissent son action ! Beaucoup de gens ont du respect pour son cran ! Il a fait ce que beaucoup de gens veulent faire mais n'osent pas. Plusieurs victimes d'expulsions forcées se sont senties perdues une fois confrontées à ce qui s'apparente à un gang organisé de la démolition , à un rejet de la responsabilité sur les autres par le gouvernement, et à l'indifférence de la police.

Yang Cuifang encourage les internautes à s'intéresser à cette affaire :

关注。关注这个保护妻儿保卫家园的血性汉子。关注这个时代里草民抗暴事件以及这起事件最终的走向。见证每一个个体活在当下的不易

Prêtez attention à cet homme courageux qui a essayé de protéger sa femme, ses enfants et sa maison. Voyez la violence contre le peuple et ce qui sous-tend ce problème. Observez l'importance qu'ont  pour chaque personne ses propres biens.

Les démolitions forcées sont un sujet de profonde discorde en Chine depuis ces dernières années. Les autorités locales comptent, pour une part importante de leurs revenus, sur les ventes de terrains. La convoitise pour le foncier conduit à expulser les propriétaires de logements et les petites entreprises pour lancer les projets de développement.

Les internautes ukrainiens mènent l'enquête pour dénoncer les brutalités lors des manifestations Euromaïdan

vendredi 27 décembre 2013 à 20:55

 [sauf mention contraire, les liens renvoient vers des contenus en ukrainien]

En Ukraine, le mouvement Euromaïdan amorce son second mois de protestation. Plusieurs centaines de milliers de manifestants se rassemblent quotidiennement à Kiev et dans d'autres villes. Le mouvement a débuté comme une manifestation pro-Union Européenne [Global Voices FR] menée principalement par les jeunes en réaction à la suspension de l'accord entre l'U.E. et l'Ukraine qui aurait  considérablement rapproché l'Ukraine de l'Europe. Après la répression brutale [Global Voices EN] d'étudiants et d'autres manifestants, au petit matin du 30 novembre 2013, par la section de police anti-émeute connue sous le nom de “Berkut”, les rassemblements quotidiens se sont progressivement étendus à tout le pays sous la forme de manifestations contre le gouvernement ukrainien.

Cette vidéo [sur le site de Reuters, en anglais] recense plusieurs cas de violences lors de la grande manifestation à Kiev du 1er décembre 2013. De nombreux opposants ont été frappés par la “Berkut”, dont au moins une quarantaine de journalistes [en anglais].

Cela a conduit à plusieurs arrestations et détentions. Lors de ce rassemblement, neuf manifestants, sans doute arrêtés au hasard, ont été placés en garde à vue, sévèrement battus par la police pour être ensuite accusés d'avoir fomenté et organisé les émeutes [en anglais], et ce malgré l'absence complète de preuves sérieuses confirmant ces accusations. Peu après, trois personnes ont aussi été arrêtés pour les mêmes motifs : deux journalistes militants du “Dorozhnyi Control” [Le "Contrôle de la route" (lien Global Voices), qui incite les automobilistes à installer des caméras dans leurs voitures afin de filmer leurs échanges avec la police lors des contrôles routiers] et un photographe de la ville de Lviv en Ukraine, qui a photographié les brutalités de la police lors des incidents du 30 novembre 2013.

Soutien aux prisonniers de Bankova et aux autres victimes de la répression

Ces 9 détenus se sont fait connaître sous le nom des “prisonniers de Bankova”, nommés ainsi d'après le nom de la rue Bankova située en face de l'immeuble du cabinet présidentiel, où ont eu lieu les affrontements avec la police le 1er décembre 2013. Leur cas a été largement relayé par des journalistes ukrainiens et étrangers, des députés et des diplomates, et des rassemblements de soutien pour ces derniers ont été organisés. Trois d'entre-eux ont été jugés coupables et condamnés, cinq autres relâchés en attente de jugement, et trois ont vu leur détention prolongée de deux mois afin de poursuivre l'enquête.

La vidéo suivante [en ukrainien] montre un “lie-in” [rassemblement immobile comme le sit-in, mais les manifestants sont allongés] organisé par l‘Alliance Démocratique ukrainienne à l'entrée du bureau du procureur. Les activistes s'allongent sur les marches de l'immeuble, obligeant les employés à les piétiner littéralement de la même façon qu'ils ont “piétiné la loi”. Les manifestants crient “Honte à vous ! Honte à vous !” [en ukrainien].

Les cyberactivistes ukrainiens ont lancé une page Facebook et un site [en ukrainien et en anglais] destiné à apporter de l'aide aux prisonniers de Bankova.

Capture d'écran de la page Facebook dédiée aux prisonniers de Bankova. La légende indique : " Euromaïnad : Sutenez ceux qui sont accusés [à tort] des émeutes de Bankova".

Capture d'écran de la page Facebook dédiée aux prisonniers de Bankova. Légende : ” Euromaïnad : soutenez ceux qui sont accusés [à tort] des émeutes de Bankova”.

Un groupe de militants a lancé une autre page Facebook intitulée “Euromaïdan – SOS” afin de fournir une assistance juridique gratuite à tous ceux qui sont confrontés à des menaces liées à leur participation à ce mouvement.

Le rôle de telles initiatives demeurent extrêmement important, dans la mesure où la pression et le nombre d'agressions violentes commises sur les membres du mouvement Euromaïdan a augmenté de façon exponentielle. Ainsi, quelques jours après l'agression au couteau sur Dmytro Pypypets, l'organisateur de l'Euromaïdan dans la ville de Kharkiv,  on apprenait que Pavlo Mazurenko, organisateur du mouvement à Kiev, avait été battu à mort et que la journaliste et militante Tetyana Chornovil avait été violemment frappée. Malheureusement, les journalistes demeurent les premières cibles de tels incidents et les autorités semblent incapables ou peu désireuses de mettre un terme à de tels actes. Face à ces événements, les internautes sur les réseaux sociaux ont lancé des appels pour organiser leur défense, en suggérant notamment de fournir une protection physique aux porte-paroles et aux militants.

Un collage anonyme circulant sur internet. La plus part des personnes photographiées sont des journalistes frappés par la police ou par des auteurs "non-identifiés".

Un collage anonyme circulant sur internet. La plupart des personnes photographiées sont des journalistes frappés par la police ou par des agresseurs “non-identifiés”.

Identifier et exiger la poursuite des responsables 

Presqu'un mois après l'agression violence de manifestants pacifiques dans les rues de Kiev, le 30 novembre et le 1er décembre 2013, le gouvernement n'a ni identifié ni engagé de poursuites à l'encontre les agents de police impliqués, et n'a fait qu'écarter deux agents de second rang, dans une tentative  d'apaiser les troubles, qui a échoué.

Comme les autorités ne parviennent pas à identifier les membres en cause de la section de police anti-émeute, la Berkut, ni d'autres membres de la force publique responsables des agressions, plusieurs initiatives en ligne, visant à faire ce travail d'identification; ont vu le jour. “Ne zabudemo”  ["Nous n'oublierons pas"] se décrit comme “un mouvement visant à restaurer la justice”. En recueillant des preuves photographiques et des vidéos prises par les manifestants ainsi que des témoignages sur leur site internet ou sur leurs comptes sur les réseaux sociaux, ils cherchent à découvrir et révéler l'identité des membres de la Berkut comme celle d'autres policiers, et celle des procureurs, enquêteurs, juges et de tous ceux impliqués dans les actes de brutalité et les tentatives pour les étouffer.

Capture d'écran du site "Ne zabudemo", visant à identifier les responsables des agressions des manifestants pacifiques de l'Euromaïdan. L'encart rouge sur la photo indique le nom d'un policier déjà identifié.

Capture d'écran du site “Ne zabudemo”, visant à identifier les responsables des agressions des manifestants pacifiques de l'Euromaïdan. L'encart rouge sur la photo indique le nom d'un policier déjà identifié.

Un autre blog, intitulé Les visages de la Berkut [en ukrainien et en anglais], se propose de suivre une démarche similaire,  mais ne cherche à identifier que les policiers de la Berkut ayant participé aux agressions et aux arrestations violentes.

 ”Lustration”, dentification, dénonciation

[la lustration vise notamment à exclure de l'administration les agents publics liés à la police politique]

L‘Alliance Démocratique, parti politique ayant activement participé à l'Euromaïdan, a lancé un site “Ne buty skotom” ["Ne faîtes pas la bête"] recueillant via le crowdsourcing les noms et les photos des policiers impliqués dans les agressions, des juges et procureurs interdisant les rassemblements pacifiques ou engageant des poursuite contres les militants, ainsi que des voyous commettant des actes de violence contre les manifestants de l'Euromaïdan et les journalistes.

Capture d'écran du site de "Ne buty skotom" de L'Alliance Démocratique, visant à identifier et lister les membres de la force publique empêchant les actions de l'Euromaïdan, enfreignant la loi et contraignant les droits et libertés des citoyens. Jusqu'à présent, 94 personnes coupables de tels actes auraient été identifiées.

Capture d'écran du site de “Ne buty skotom” de L'Alliance Démocratique, qui veut identifier et lister les membres de la force publique s'opposant aux actions de l'Euromaïdan, enfreignant la loi et  réduisant les droits et libertés des citoyens. Jusqu'à présent, 94 personnes coupables de tels actes auraient été identifiées.

L’UDAR, autre parti d'opposition lui aussi actif dans le mouvement Euromaïdan, mené par l'ancien champion de boxe Vitaliy Klychko, dresse ses propres listes de personnalités ou agents publics susceptibles d'être visés par la lustration [en français] lors du changement de gouvernement. La liste de lustration de l'UDAR issue de l'Euromaïdan comprend plus de soixante noms.

Dans la mesure où l'avenir des rassemblements Euromaïdan demeure incertain, de telles initiatives se proposent d'échanger des informations et d'aider les activistes à exercer une pression continue sur les autorités.