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Le dilemme des Vénézuéliens : rester ou partir ?

jeudi 24 novembre 2016 à 22:28
gimme-shelter

“Le coeur brisé n'est pas même un début d'explication. Je vis à Berlin, mais la situation de mon pays perturbe ma petite bulle de confort ici dans le premier monde”. Image du graphiste vénézuélien Leonardo González, utilisée avec autorisation.

Le Venezuela connaît en ce moment le taux d'inflation le plus élevé du monde, assorti de pénuries alimentaires et médicales chroniques. Pendant que le gouvernement et l'opposition se rejettent mutuellement la responsabilité de l'état catastrophique de l'économie, les Vénézuéliens de la diaspora s'adressent par les médias sociaux à leurs compatriotes au pays pour leur dire qu'il y a une vie hors de leur patrie assommée par la crise.

Cette crise, à laquelle les médias internationaux identifient désormais le Venezuela, s'est aggravée ces dernières années et a, par ricochet, ouvert la voie à d’alarmantes violations des droits fondamentaux, qui résonnent tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays.

En réaction, un nombre croissant de Vénézuéliens réfléchissent s'ils doivent rester dans leur pays, ou le quitter pour chercher des opportunités ailleurs. Le média en ligne indépendant Efecto Cocuyo publie des chiffres avec le raisonnement qui les sous-tend, commentés par des spécialistes au Venezuela :

[…] Los momentos de migración en Venezuela en los últimos 15 años pueden ser divididos en tres períodos. En el primero, fue la élite venezolana la que emigró entre 1999 y 2003 debido a los cambios de carácter político que trajo la llegada del presidente Hugo Chávez […] En el segundo, comprendido entre 2004 y 2009, fueron los talentos y saberes los que abandonaron el país. Ahora, desde 2010 hasta la actualidad, los jóvenes y la clase media son quienes se despiden en [el aeropuerto internacional de] Maiquetía [debido a] las condiciones políticas, sociales y económicas de Venezuela.

Les moments de migration des 15 dernières années au Venezuela peuvent être divisés en trois périodes. Dans la première, c'est l'élite qui a émigré entre 1999 et 2003 à cause des changements politiques amenés par l'arrivée du président Hugo Chavez […] Avec la deuxième, entre 2004 et 2009, ce sont les talents et les savoirs qui ont abandonné le pays. A présent, depuis 2010, ce sont les jeunes et la classe moyenne qui font leurs adieux à l'aéroport international de Maiquetía [à cause des] conditions politiques, sociales et économiques au Venezuela.

Pourquoi c'est dur

Les voix de ceux qui sont partis sont très présentes sur les médias sociaux, et expriment les différentes façons dont les migrations ont été difficiles à vivre pour les Vénézuéliens. L’acceptation par la collectivité, les incompatibilités culturelles et la connexion à la crise politique du pays imprègnent les discussions et témoignages sur internet, des thèmes partagés sur le blog collectif Caracas Chronicles sous le mot-dièse #TheCrisisInsideMe (La crise en moi) :

Juan Cristóbal Nigel, qui écrit depuis le Chili, décrit comment la mésentente au Venezuela blesse quand elle contraste avec ce qui semble en comparaison une vie sans histoire :

Mon coeur est en plomb, alourdi par l'impossibilité de mettre le Venezuela derrière moi.

Chaque jour, la scène se répète cinq, six fois. Que ce soit pendant une réunion de travail, une phrase d'un étudiant au restaurant universitaire, ou l'appel d'un ami, les questions des gens sont toujours les mêmes : “c'est affreux, qu'est-ce qui va se passer ?” L'autre jour j'ai adressé la parole à un clochard. Il m'a demandé d'où j'étais. “Du Venezuela ? Noon !, là-bas ça va maaal…” Et de me regarder avec commisération.

J'ai la même réaction. Quand j'en parle, je suis parti pour une demi-heure de gueule de bois émotionnelle persistante.

Je suis reconnaissant aux gens de leur inquiétude, mais je ne peux réfréner un peu de jalousie. Leur vie continue. Ils ne se sentent pas coupables chaque fois qu'ils vont au supermarché. Ils n'ont pas à dépenser des centaines de milliers de pesos en médicaments à envoyer à leurs proches au pays. Ils ne passent pas des heures et des heures loin de leurs familles à écrire sur la crise au Venezuela.

Nous sommes chanceux. Nous ne vivons pas directement cette crise. Mais un tout petit peu quand même.

Dans un autre billet, Alejandro Machado raconte comment il ressent que sa famille reste connectée grâce à la technologie, bien que cela ne lui suffise pas à les sentir proches :

Nous restons informés, mais pas vraiment en contact. Nous sommes divertis, mais pas vraiment comblés. Ma famille est maintenant éclatée sur plusieurs continents, avec les tchats de groupe et les appels vidéo comme seuls outils pour maintenir notre communication importante. J'apprécie ces ponts précaires que permet de garder la technologie numérique, mais quand on a connu la vraie vie, ils ne la valent pas.

Nous sommes partis parce que la crise est devenue trop terrible, les opportunités ont surgi ailleurs, et nous les avons saisies. Nous avons énormément de chance d'être nés dans une famille aimante et de ne pas avoir été victimes des tragédies réelles qui atteignent les Vénézuéliens chaque jour.

Hélas, la crise a fait de ma famille une famille virtuelle, et ça fait mal.

“La plupart du temps, nous réussissons malgré notre nationalité plutôt qu'à cause d'elle”.

Le vécu est souvent chargé de colère, mais s'accompagne aussi de questionnements sur les notions de pays, nation et identité. Hector médite là-dessus dans un article partagé sur Medium où il explique ses raisons de quitter le pays et la colère provoquée par le système et le conflit politique :

Pienso que hay que desechar esa tontería de sentirse orgulloso del país en donde uno nació sólo por eso. O sentir orgullo por los logros de connacionales excepcionales que se destacan alrededor del mundo en las distintas disciplinas. Si más bien dichos logros es porque se desprendieron de esa prisión moral y social que es atarse a una nacionalidad y actuar acorde a ella y a sus expectativas. No es casualidad que los grandes escritores o pensadores venezolanos cargaran sus obras con tanta crítica social hacia la identidad nacional, porque muchas veces los logros no son por el gentilicio sino a pesar de él.

Je pense qu'il faut chasser cette bêtise d'être fier du pays où on est né rien que parce qu'on y est né. Ou de se sentir fier des réussites de compatriotes exceptionnels qui se démarquent à travers le monde dans différentes disciplines. Ces succès sont dus au fait qu'ils se sont défaits de cette prison morale et sociale qu'est l'attachement à une nationalité et l'action conforme à elle et à ses attentes. Ce n'est pas un hasard si les grands écrivains ou penseurs vénézuéliens ont chargé leurs oeuvres de tant de critique sociale de l'identité nationale, parce que maintes fois ces réussites ne se font pas grâce à la nationalité mais malgré elle.

Guides de survie pour les Vénézuéliens à l'étranger

De nombreux autres usagers de réseaux sociaux ne se contentent pas de parler de ce qu'ils vivent et de partager des histoires de nostalgie. Ils donnent aussi des conseils à ceux qui voudraient comme eux s'expatrier. Il leur semble souvent que les Vénéuéliens vivent ce que de nombreuses communautés ont traversé au 20ème siècle en Amérique Latine et en Europe, et le choc engendre à la fois empathie et réflexion. Comme toujours, les récits sont variés, comme on peut le voir sur la chaîne YouTube Diáspora Venezolana:

Uno siempre piensa que su país es el mejor, que su cultura es la mejor, la verdad es que todas las culturas son muy bonitas. No somos de ninguna parte, sino que somos del mundo. La gente tiene que atreverse, a viajar. Yo pienso que la vida es conocer, ir a otros lados, conocer otras personas, conocer otras culturas. Ver el mundo.

On pense toujours que son pays est le meilleur, la vérité est que toutes les cultures sont très belles. Nous ne sommes pas d'un seul lieu, nous sommes du monde. Il faut oser, voyager. Pour moi, la vie c'est connaître, aller ailleurs, connaître d'autres gens, connaître d'autres cultures, voir le monde.

L'élection de Trump vue par les pays de la Communauté de Langue Portugaise

jeudi 24 novembre 2016 à 21:46

Image d’archive de GV. Photo: Gage Skidmore / CC 2.0

[Tous les liens sont en portugais]

[article d'origine publié en portugais le 16 novembre] Le 8 novembre 2016 restera certainement dans l’Histoire comme l’une des dates les plus marquantes de la politique internationale du XXIème siècle. L’élection de Donald Trump comme 45ème Président des Etats-Unis a capté l’attention des médias du monde entier (persuadés de connaître l’issue du scrutin, ils ont dû réviser leur jugement). La plupart des gens ont alors eu le sentiment d’être victimes d’une « aberration ».

Dans cet article, vous constaterez de quelle façon a été reçue la victoire de Trump face à la candidate démocrate Hillary Clinton dans les pays de la Communauté de Langue Portugaise (CPLP). Du Mozambique au Timor-Oriental, voici un panorama des commentaires des citoyens et des leaders politiques parus sur les réseaux sociaux.

Filipe Nyusi, Président de la République du Mozambique, a souhaité beaucoup de succès au « Président élu » :

Queira aceitar, Senhor Presidente eleito, os meus melhores votos de boa saúde e êxitos no desempenho das vossas nobres funções na liderança dos Estados Unidos da América, na sequência do mandato a si confiado pelo Grande Povo Americano.

Filipe Jacinto Nyusi – Presidente da República de Moçambique

Veuillez croire, Monsieur le Président élu, en mes meilleurs vœux de bonne santé et de succès dans l’accomplissement de vos nombreuses fonctions, durant le mandat que vous a confié le Grand Peuple Américain.

Filipe Jacinto Nyusi – Président de la République de Mozambique

Le journaliste Rafael Ricardo, également mozambicain, a lâché ceci :

Quando te sentires tolo, lembre que a maior potencia económica e militar pode votar no Donald Trump para presidência.

Quand tu te sens idiot, rappelle-toi que la plus grande puissance économique et militaire peut choisir Donald Trump comme président.

Un internaute de la Guinée-Bissau fait référence au Président de son pays, José Mário Vaz, par le biais d’une question :

Guiné-Bissau está na agenda de Trump: ‘vou acabar com a ditadura em África’ [prometeu Trump durante a campanha] e como é que o Presidente guineense vai enfrentar este monstro?

La Guinée-Bissau est dans l’agenda de Trump : ‘je mettrai fin à la dictature en Afrique’ [a promis Trump pendant la campagne], comment le Président guinéen affrontera-t-il ce monstre ?

En Angola, le chef de l’Etat José Eduardo dos Santos espère que les relations avec les Etats-Unis se renforceront encore :

Le gouvernement espère “un meilleur dialogue et une meilleure coopération internationale” avec l'élection de Donald Trump

Pedro Filipe, journaliste et blogueur portugais, n’entrevoit aucun changement avec l’élection du Trump :

O mundo vai continuar a girar nos eixos em que sempre girou e daqui a uns tempos nem nos vamos lembrar quem está sentado na Casa Branca, porque será bussiness as usual em política internacional, e ainda mais nos aliados de sempre (não, ele não vai cobrar aos países da NATO por segurança, tal como 90% do que diz era bu***hit).

Le monde continuera de tourner comme il a toujours tourné, et dans quelques temps, personne ne se rappellera qui résidait à la Maison-Blanche, et plus encore nos alliés de toujours (non, il ne fera pas payer les pays de l’OTAN, une fausse information comme 90% de ses déclarations).

Le premier ministre portugais, António Costa, évoque même une « mauvaise nouvelle » qui a secoué le monde le matin du 9 novembre.

António Costa insinue que la nomination de Donald Trump est une mauvaise nouvelle

Jorge Carlos Fonseca, président du Cap-Vert, a pour sa part félicité les Etats-Unis lors d’une conférence de presse, et souhaité « du succès au nouveau président et des progrès pour les Etats-Unis d’Amérique, un pays ami et partenaire du Cap-Vert ».

Le Cap-Vert félicite Donald Trump

Actuel chef d’Etat du Brésil, Michel Temer ne s’attend à aucun changement majeur avec la nomination de Donald Trump :

Michel Temer complimente Donald Trump et affirme qu'aucun changement n'interviendra dans les relations entre le Brésil et les Etats-Unis.

Un message de félicitations a également été envoyé par Taur Matan Ruak, Président du Timor-Oriental, pays du sud-est asiatique :

Como Presidente da República e em nome do povo e do Estado Timorense, quero felicitar o Senhor Donald Trump por ter sido eleito Presidente dos Estados Unidos da América. Quero também felicitar o povo Americano pela realização das eleições presidenciais que correram em conformidade e com um resultado que reflecte a maioria dos votos.

Tenho grande esperança que com este seu mandato novo, o Presidente eleito irá fortalecer ainda mais a nossa relação através da cooperação dos dois Estados como já tem acontecido e que continue a fortalecer ainda mais o trabalho conjunto para a construção da paz e prosperidade no mundo inteiro.

En tant que Président de la République et au nom du peuple de l’Etat timorais, je voudrais féliciter Monsieur Donald Trump pour son élection au poste de Président des Etats-Unis d’Amérique. Je souhaite également congratuler le peuple américain pour la bonne tenue des élections présidentielles dont le résultat reflète la majorité des votes.

J’espère grandement qu’avec ce nouveau mandat, le Président élu renforcera davantage nos relations à travers la coopération de nos deux Etats, comme c’est déjà le cas, et qu’il consolidera le travail conjoint pour la construction de la paix et de la prospérité dans le monde entier.

A Sao Tomé-et-Principe, le premier ministre Patricie Trovoada a ainsi félicité Donald Trump :

Felicito o povo americano e o Donald J. Trump pela sua vitória como Presidente dos Estados Unidos da América. Vamos continuar a trabalhar da mesma maneira com a nova administração que entrará em Janeiro de 2017.

Agora um desabafo….
Não se trata de ser politicamente correto e democrata reconhecendo uma eleição justa e transparente, trata-se de admitir que o “establishment” de Washington ou de Bruxelas, os medias, os intelectuais e comentadores políticos e em suma os políticos tradicionais estão cada vez mais afastados das preocupações e das angústias da maioria das pessoas simples…

Je félicite le peuple américain et Donald J. Trump pour sa victoire à l'élection présidentielle des Etats-Unis. Nous continuerons à travailler avec la nouvelle administration qui prendra ses fonctions en janvier 2017.

Voici une observation personnelle… Il ne s’agit pas d’être politiquement correct et démocrate en reconnaissant une élection juste et transparente, il s’agit d’admettre que « l’establishment » de Washington ou de Bruxelles, les médias, les intellectuels et les commentateurs politiques, et plus généralement les politiciens traditionnels, sont à chaque fois plus éloignés des préoccupations et angoisses du peuple…

Muhongo Gola, un internaute santoméen, a réagi à la publication de Trovoada avec une alerte envoyée aux pays africains :

Muitos estão com medo mas digo cada pais tem que trabalhar criar condições para andar com próprias pernas e não estar rebocados por isso que muitos países africanos estavam com medo dessa Vitória agora vamos exigir dos nossos governos o trabalho e se possível pedir cabeça deles se não cumprir com o que prometeu ao povo.

Beaucoup ont peur mais chaque pays doit travailler pour créer les conditions permettant d’aller de l’avant. Beaucoup de nations redoutent cette Victoire, mais désormais, nous allons exiger de nos gouvernements qu’ils travaillent, et exiger des élus qu’ils respectent leurs promesses.

Dalia Kiakilir et Mário Lopes, tous deux auteurs pour Global Voices, ont collaboré à cet article.

Le directeur d’un média d’Etat chinois critique l’emprise du groupe Tencent sur l’information en ligne

jeudi 24 novembre 2016 à 14:34
Newsstand in Beijing. Photo by Ernie via Flickr (CC BY 2.0)

Un kiosque de journaux à Pékin. Photo publiée par Ernie sur Flickr (CC BY 2.0)

Le compte WeChat du site d'information chinois News Breakfast a récemment été suspendu pour « diffusion de fausses rumeurs ». Avec plus de 400 000 abonnés sur WeChat, News Breakfast est administré par East Day, un média affilié au gouvernement local de Shanghai.

Les rumeurs en question ont été publiées dans un article de News Breakfast au titre racoleur : « Révélations : pourquoi trouve-t-on des canards rôtis vendus à 19 yuan ? La vérité va vous choquer ».

Cet incident a poussé le directeur général de l’East Day, Xu Shiping, à adresser deux lettres ouvertes à Ma Huateng (dit Poney Ma), le président de la société-mère de WeChat, Tencent. Dans ces lettres, il questionne le monopole du géant de l'Internet et son pouvoir arbitraire sur les contenus en ligne et leur censure. Comme beaucoup de médias chinois, News Breakfast réserve certains articles à la publication sur WeChat, au lieu de les publier sur son site web et d'en faire ensuite la promotion sur les médias sociaux.

Xu, qui cumule 33 ans d'expérience dans le monde des médias, exprime désormais ouvertement son inquiétude de voir les entreprises du Net gagner en puissance au détriment de l'Etat et du Parti.

La rumeur des canards infectés

Le cœur de la controverse réside dans cet article racoleur, destiné à recueillir un maximum de vues. L'article soutient que la plupart des canards rôtis vendus dans les rues de Shanghai proviennent d'animaux malades, et que c'est la raison pour laquelle ils ne sont vendus qu'à 19 yuan l'unité [soit environ 2,50€].

Il y a quelques années de cela, le Quotidien du peuple rapportait que ce type d'affirmations avaient causé du tort à un vendeur de canards rôtis qui fournissait sa viande à bas prix pour les plus pauvres tandis qu'il vendait le foie et les intestins des canards à un prix bien supérieur pour les plus riches. Mais l'article n'avait pas pu écarter la possibilité que certains canards rôtis vendus dans la rue soient contaminés. Beaucoup d'articles similaires continuent de circuler sur la Toile.

Quand l'apparatchik d'un média affilié à l’État conteste la censure des entreprises

En Chine, où tous les médias entretiennent des liens avec l’État ou le Parti, il est commun pour les gestionnaires de médias de négocier directement avec l'administration en charge de la censure pour faire lever le blocage d'un site Internet après la suppression de contenu sensible. Mais alors que la presse s'appuie de plus en plus sur les médias sociaux pour relayer son contenu, le pouvoir de décision repose en grande partie entre les mains des entreprises du Net, qui ont toutes leurs propres règles en la matière.

Dans une première lettre ouverte adressée au PDG de Tencent et publiée le 4 novembre, Xu soutient que les règles de Tencent sont plus rigides que celles du Parti et des autorités de censure étatiques :

这两天,我睡不着了。因为,我认为我碰到了一件重大的事情。这件事,看上去不算什么。然而,它关系到中国的舆论生态和新闻尊严。不能不说。
掐指算来,我从事新闻媒体工作33年了。1982年从中国人民大学新闻系毕业,分配进入中国历史最悠久的报纸《新民晚报》工作,体育部、新民体育报、评论部,后来又参与东方网建设,长期担任总编辑。这样的经历,让我明白,无论是过去的“同仁报纸”,还是现在的媒体机构,新闻和媒体的生态,都是有管理秩序的,行业管理也好,导向管理也罢,总之,我们都认,也都服。毕竟,管理者都是专业的。
可悲与可叹的是,不知道你马先生是志存高远呢?还是狂妄无知?你领导下的腾讯,也开始准备充当行业管理者的角色了。是的,你的企业足够大,微信足够牛,许多地方政府和众多媒体,天天都在拍你的马屁,但这不说明你有行业管理者的能力和资格。因为,你至少不专业。

Cela fait deux jours que je ne dors plus. Je pense qu'il s'agit d'une affaire très sérieuse. Cela n'a peut-être l'air de rien en apparence, mais cela porte atteinte à la protection de l'opinion publique et à la dignité du journalisme chinois. Je ne peux garder le silence.

Je travaille dans le domaine du journalisme depuis 33 ans. En 1982, j'ai été diplômé du département de Journalisme de l'Université du Peuple et ai été assigné à travailler pour le plus ancien journal du pays, le Xinmin Evening News. J'ai longtemps alimenté les pages sport du journal. Quelques années plus tard, j'ai participé à la fondation du site East Day, où j'occupe depuis lors le poste de rédacteur en chef. Cette expérience m'a fait comprendre que dans tout média, qu'il s'agisse de journaux conventionnels ou de nouveaux médias, il existe des tactiques d'encadrement [autrement dit, de censure], qui visent à façonner l'environnement de l'information et des médias, que nous devons les respecter. Les administrateurs qui s'en occupent sont des professionnels.

Je ne saurais dire si cette regrettable affaire révèle votre intention, Monsieur Ma, de franchir une nouvelle étape, ou si vous êtes simplement téméraire mais ignorant. Sous votre direction, Tencent s'apprête à devenir l'administrateur de l'industrie journalistique. Alors oui, votre empire est immense, tout le monde adore WeChat, et beaucoup de gouvernements locaux et de médias doivent vous faire des courbettes et tenter de vous séduire. Mais cela ne veut pas dire que vous avez la possibilité et les qualifications nécessaires pour devenir administrateur. Vous n'êtes pas un professionnel.

Le 2 novembre dernier, News Breakfast a vu son compte suspendu pour une semaine, sans que la sanction ait pu être levée via les canaux officiels des organes de propagande :

我的手下很天真,赶紧通过网络进行申诉。我当然知道,这种申诉是没有用的。[…]
毕竟,我曾经担任过上海网宣机构的负责人,希望通过正式行文的方式,请腾讯帮忙解决这件事。我知道,这事很无奈,也很可悲,一家媒体的命运,就这样握在他人之手。[…] 但是,我还是决定去做。没办法,环境如此。“两微一端”,现在都被官方认可,也成为转型融合的标志,各种官方的排名,都用微信说事 […] 毕竟,我们还都端着饭碗,要养家糊口,要活下去。

Mes employés sont si naïfs qu'ils se sont empressés de remplir le formulaire de réclamation en ligne. Mon expérience m'a appris que ce genre de réclamation est inutile…

Comme j'ai dirigé par le passé le site d'une autorité de propagande à Shanghai, je souhaite demander de manière officielle à Tencent de résoudre cette affaire. J'ai bien conscience qu'il est pathétique que le destin d'un média dépende de la bonne volonté d'une telle organisation […] mais je vais tout de même le faire. Les circonstances me forcent à le faire. La politique officielle est que le gouvernement et les autorités du parti doivent s'emparer des nouveaux moyens de communication en utilisant des supports mobiles d'information tels que Weibo et WeChat. Et l'impact des médias d'informations est principalement basé sur leur nombre d'abonnés sur WeChat […] Après tout, nous devons tous nous nourrir et subvenir aux besoins de notre famille.

Afin d'accroître leur influence dans l'environnement très compétitif des médias en ligne, de nombreux sites web affiliés à l’État ou au Parti usent des stratégies similaires à celles des « fermes de contenus » pour augmenter leur base d'abonnés.

Xu a fini par faire appel à deux de ses amis employés par les autorités de la censure pour tenter de résoudre son problème. En vain :

朋友们都回复,将信息转达了。打完这个电话,我才放下心,睡觉了。当然,我也天真了。第二天睡来,第一时间去看“新闻早餐”,依然没有解封。我很失望,只得安慰手下:“耐心等吧”。我希望公文能起到效果。

Mes amis m'ont dit qu'ils avaient transmis ma demande [à Tencent]. Soulagé, je suis allé me coucher. Quelle naïveté. Le lendemain, le compte de News Breakfast était toujours suspendu.

WeChat censor. Remix image.

WeChat censuré. Montage photo.

Le monopole de Tencent remet-il en question les pouvoirs de l’État en matière de censure ?

Critique, le directeur de News Breakfast a également laissé entendre que le monopole du groupe Tencent serait néfaste à l’État :

腾讯是什么,只是一家互联公司而已,他的资本结构,不能代表全民的利益吧?[…]这两年,你马先生成为地方政府的“座上客”,轻松地将许多本应属于全民的数据资原,以各种高大上的名目,纳入旗下,最要拿的是,这种交换,并没有评估和对价。[…] 一个一统天下的腾讯,对国家绝对是一种危害。不信走着瞧。它今天可以对媒体露出狰狞威权,明天就会对国家权威提出挑战。[…]

写这封信,我很犹豫。许多人劝我,还是算了,息事宁人吧,毕竟《新闻早餐》还是要活下去,东方网还是一堆的公号,要呆在微信的平台上,你的业绩,还需要数据的支撑。等等。但是,我最终还是想明白了,我是媒体人,媒体人应该有尊严,不应为五斗米折腰。如果有朝一日,中国的媒体,都成为腾讯的走卒,我们还会有“中国梦”的美好期许吗?

Qu'est-ce que Tencent après tout ? C'est une entreprise du Net, qui possède une structure capitalistique et ne peut en aucun cas représenter les intérêts du peuple. […] Ces deux dernières années, M. Ma a été l'invité des gouvernements locaux qui lui ont fourni un accès privilégié à des données qui devraient appartenir au domaine public. Il n'existe aucune estimation de la valeur d'un accès à ce genre de données. […] Le monopole de Tencent représente une menace pour l’État. Si vous ne me croyez pas encore, vous verrez. S'il peut aujourd'hui faire usage de son funeste pouvoir sur les médias, demain il défiera l'autorité de l’État. […]

J'ai beaucoup hésité à écrire cette lettre. Nombreux sont ceux qui ont tenté de m'en dissuader. « Ne t'emporte pas, m'ont-ils dit, News Breakfast doit passer outre, East Day dispose encore de toute une myriade de comptes publics sur WeChat, votre modèle économique dépend grandement des données WeChat, etc… ». Mais je suis une personne de média, et en tant que telle, j'ai une dignité. Je ne devrais pas avoir à courber l'échine pour gagner ma vie. Si un jour tous les médias de Chine se retrouvaient sous la coupe de Tencent, pourrions-nous encore vivre notre « rêve chinois » ?

Les administrateurs de WeChat n'ont pas tardé à répondre en quatre points brefs à la lettre ouverte de Xu :

1. Les contenus relatifs aux « canards rôtis » ont été signalés par de nombreux médias officiels depuis 2014 comme étant des rumeurs et sont susceptibles de déclencher des troubles sociaux.

2. Ce n'est pas la première fois que News Breakfast enfreint les règles relatives aux rumeurs et aux contenus copiés-collés. En cas de violation de ces règles, l'article sera supprimé et le compte automatiquement suspendu.

3. Tencent dispose d'un mécanisme de recours interne. La réclamation a été étudiée et la sanction maintenue.

4. L'administrateur applique la même grille de jugement à l'ensemble des médias. Jusqu'à présent, WeChat a supprimé plus de 2000 articles et sanctionné 1000 comptes pour du contenu relatif aux « canards rôtis ».

Un rapport du groupe Tencent datant du début de l'année 2016 révèle que WeChat compte 762 millions d'utilisateurs actifs chaque mois. Environ 80% de ces utilisateurs sont abonnés à des comptes publics.

La première lettre ouverte de Xu ayant été mal reçue sur la plupart des plateformes de médias sociaux, le directeur en a rédigé une seconde [lien en chinois], faisant état de ses arguments sur un ton plus modéré.

Comment la nouvelle loi sur la cybersécurité chinoise affecte le système de censure

La suspension du compte du site News Breakfast semble être la conséquence du vote récent de la loi sur la cybersécurité, qui donne aux entreprises la responsabilité de censurer leurs contenus. En vertu de cette loi, tous les fournisseurs de services Internet doivent mettre en place un dispositif interne de censure. Tencent associe à un tel dispositif de censure un système permettant aux utilisateurs de signaler des abus ou des contenus problématiques, comme c'est le cas sur les plateformes de médias sociaux étrangères telles que Facebook.

De nombreux analystes considèrent la loi sur la cybersécurité comme le fondement juridique de la Grande Muraille Électronique de Chine et de la systématisation des pratiques de censure. Le texte de loi fournit également un cadre législatif permettant aux entreprises d'établir un mécanisme d'autocensure, dans le but de réduire les coûts liés à la censure, actuellement à la charge du gouvernement.

La censure peut-elle être codifiée en Chine ?

Bien que de nombreux internautes chinois critiquent la censure qui leur est imposée en ligne, ils sont aujourd'hui loin de prendre le parti de Xu, soupçonnant bien que seule la détention du pouvoir de censurer lui importe. C'est ce que souligne cet utilisateur Weibo :

East Day’s CEO is shameless. Many have misread his open letter. It’s main argument is not only that “Only Dad can hit me, you don’t have the power to do so” but “You son of bitch don’t leave the back door open to me. This is a lawless act against one party rule.”

Le directeur de East Day n'a vraiment pas peur du ridicule. Nombreux sont ceux qui n'ont pas compris le sens de sa lettre. Son principal argument, en plus de sonner comme un « Seul Papa a le droit de me taper sur les doigts, pas toi », s'apparente également à « Comment osez-vous ne pas faire une exception pour moi ?! C'est un acte illégitime à l'encontre du règne du parti unique ! »

Bien que la loi sur la cybersécurité ait été la cible de nombreuses critiques de la part des entreprises du Net étrangères, certaines considèrent qu'un arsenal de lois écrites plus clair sur les pratiques de censure en ligne (bien souvent arbitraires et incohérentes) pourrait les aider à construire une stratégie juridique avant d'intégrer le marché chinois. Mais dans un pays où le parti est encore au-dessus des lois, et alors qu'un apparatchik exprime ouvertement son mécontentement face au système d'autocensure basé sur les signalements d'abus, de nouvelles règles peuvent en permanence apparaître.

La Cour suprême brésilienne n'impose pas le droit à l'oubli à Google

jeudi 24 novembre 2016 à 14:10
Youtube screenshot by JP Low. Fair use.

Copie d'ecran de Youtube par JP Low, pour usage raisonnable.

[Tous les liens de cet article sont en portugais, sauf mention contraire.]

Le Tribunal supérieur de justice (TSJ) du Brésil a décidé à l'unanimité que le droit à l'oubli ne peut être imposé à Google ou à d'autres moteurs de recherche.

Selon la juge Nancy Andrighi, forcer les moteurs de recherche à examiner les demandes de suppression et supprimer certains liens des résultats de recherche donnerait trop de responsabilités aux moteurs de recherche et ressemblerait à une censure numérique.

We can't interfere with the search engine otherwise we will lose the context of the information. We can't establish the responsibility of this provider. The presence [of the content] will remain, but when this provider links to the place where the photos are, then this other provider will bear the responsibility.

Nous ne pouvons pas nous immiscer dans les moteurs de recherche, faute de quoi nous perdrons le contexte de l'information. Nous ne pouvons pas établir la responsabilité de ce fournisseur. [Le contenu] restera présent, mais quand ce fournisseur renverra vers l’endroit où sont les photos, dans ce cas cet autre fournisseur sera tenu responsable.

L'information sur l'affaire elle-même n'a pas été rendue publique, étant donné que l'action en justice est traitée sous le secret de la justice.

Cette décision va à l’encontre de celle de 2014 de la Cour de justice européenne qui a statué [anglais] que tout individu a le droit de demander aux moteurs de recherche la suppression de ses informations personnelles des résultats de recherche. Cette décision a été vivement contestée dans l’Union européenne et ailleurs, notamment dans les cas où des personnalités publiques ont cherché à faire retirer des résultats de recherche des informations qui ternissent leur image.

Bien que cette loi protège plusieurs individus de l'examen public pour des affaires telles que les infractions routières ou les dettes pouvant etre rendues publiques, elle soulève également des questions cruciales sur l’accès à l’information sur les activités des employés du gouvernement et autres personnalités influentes.

L'année dernière, la Cour suprême du Brésil a également statué en faveur de Google dans un procès opposant le moteur de recherche à la célèbre présentatrice de télévision Maria das Graças Meneghel, plus connue sous le nom de “Xuxa”. Dans les années 1980, avant son ascension vers la gloire, elle avait joué dans un film dans lequel son personnage avait une relation sexuelle avec un adolescent de 12 ans. Xuxa poursuivit Google en justice, demandant au moteur de recherche de retirer tous les résultats l'associant à ce film.

Selon des recherches informelles menées par un journal brésilien, dans près d’un tiers des cas de diffamation en ligne au Brésil, les tribunaux d'État se prononcent en faveur du droit de supprimer d'internet des informations qui associent l'intéressé à des faits diffamatoires, offensants ou à un crime dont la personne a été acquittée.

La Cour suprême du Brésil – qui est une cour supérieure au TSJ – va bientôt juger une autre affaire concernant le droit à l'oubli impliquant TV Globo, le plus grand réseau de télévision du Brésil. L'affaire est portée en justice par des proches d'Aida Cury, une jeune fille de 18 ans qui a été brutalement violée et assassinée en 1958. Ce cas n'a jamais été élucidé. En 2008, TV Globo a diffusé un reportage sur cette affaire. Les proches ont porté plainte contre le groupe disant que ce reportage « a ramené la famille à une période douloureuse » et leurs avocats plaident le droit à l'oubli.

Selon Mariana Melo e Cunha, avocate au bureau qui représentait Google, les deux cas sont différents. “Le Tribunal suprême fédéral (TSF) traitera l'affaire sur le plan matériel : une personne a-t-elle le droit d’interdire au public de parler de certains faits ? Par contre, le Tribunal supérieur de justice traite l'affaire sur sa forme procédurale : une personne peut-elle demander qu'on supprime d'un moteur de recherche des informations qui la concernent ?”, explique-t-elle à Global Voices.

Les décisions des TSF et TSJ, ainsi que celle, à venir, de la Cour suprême, constitueront un précédent pour les autres juridictions brésiliennes qui jugent des affaire similaires.

Encore un jeune écologiste assassiné au Guatemala

jeudi 24 novembre 2016 à 12:57
Guatemala's future seems to receive a blow with the murderer of Jeremy Barrios, a young member of the Center for Social, Legal and Environmental Action (In Spanish, CALAS) Foto taken from Pixabay. From the Public Domain.

La jeunesse du Guatemala reçoit un nouveau coup de massue avec la mort de Jeremy Barrios, jeune adhérent au centre d'action légal, environnemental et social du Guatemala (CALAS) Photo prise chez Pixabay, domaine public.

Le meurtre de Jeremy Barrios, jeune écologiste guatémalien de 22 ans suscite de plus en plus de préoccupations vis-à-vis des menaces ciblant les défenseurs de l'environnement et souligne l'incapacité de l'Etat à protéger les organisations menacées.

L'assassinat de Jeremy Barrios, tué par balle le 12 novembre dans la capitale est considéré comme le symbole de la période obscure que le pays est en train de traverser. Le Guatemala fait partie des dix pays les plus vulnérables au changement climatique. C'est un pays dans lequel l'âge moyen de la population s'élève à 22 ans et dans lequel non moins de dix militants écologistes, pour la plupart indigènes, ont été assassinés en 2015.

Jeremy Barrios, défenseur de la justice sociale depuis son enfance, travaillait pour CALAS, une organisation se battant pour des causes environnementales, sociales et juridiques. Il était également le porte-parole d'un lycée public dans lequel il luttait sans cesse pour l'amélioration du système d'éducation.

Ce n'est pas la première fois que CALAS a été la cible de menaces. Yuri Melini, un des supérieurs de Jeremy Barrios, reçoit depuis des années de nombreuses menaces de mort et s'est même fait tirer dessus afin d'être réduit au silence. Yuri Melini est connu au Guatemala et à l'étranger pour être un fervent défenseur des droits de l'homme et des populations indigènes. Le directeur de CALAS, Rafael Maldonado a également été visé par des menaces de mort sur les réseaux sociaux.

The human rights defender was in the offices of CALAS on 29 July 2015 when an unknown gunman riding a motorcycle fired a number of shots outside. He also received a previous death threat in May 2015 when an unknown woman approached him at a bank and said “Soon you are going to pay for the work you are doing. You will see what will happen as a result of the work you are doing against the mining company, you are causing a lot of damage and so they will kill you”…

Le défenseur des droits de l'homme se trouvait des les bureaux de CALAS le 29 juillet 2015 quand un homme non identifié tira plusieurs coups de feu à l'extérieur depuis un deux-roues motorisé. Il avait déjà reçu une menace de mort quelques mois auparavant en mai 2015 lorsqu'une inconnue l'approcha dans une banque et lui dit : “Bientôt vous devrez payer pour tout ce que vous avez fait. Vous verrez ce qu'il se passera suite à vos actions contre l'entreprise minière, vous leur avez causé beaucoup de tort et ils vous tueront”…

Dans un rapport récent Erika Guevera-Rosas, la dirigeante d'Amnesty International, expliquait à quel point il était difficile de défendre la cause environnementale dans cette région d'Amérique centrale :

Defending human rights is one of the most dangerous professions in Latin America but daring to protect vital natural resources takes these risky jobs to a whole new, potentially lethal level.

Se battre pour la défense des droits de l'homme est une activité à haut risque en Amérique Latine mais oser vouloir protéger les ressources naturelles accroisse ce risque de manière exponentielle, à un niveau presque léthal.

Une menace qui pèse sur la jeunesse

Plusieurs organisations pour la défense de l'environnement ont pointé du doigt les partenariats à frais partagés entre pays riches, comme le Canada avec ses multinationales, et la complicité silencieuse des gouvernements qui accueillent des activités minières tout en négligeant de protéger ceux qui se battent pour la préservation de leurs terres.

Les militants écologistes vivent sous une menace permanente sur le continent tout entier : les intimidations et les atteintes au droit de manifester sont devenues monnaie courante du Canada jusqu'en Patagonie. La justice n'est que rarement accomplie et cette situation génère un effet paralysant qui ne mène bien trop souvent qu'à d'autres meurtres. Dans certains cas, comme au Honduras, tous les dirigeants de l'organisation COPINH gérée par Bertha Caceres ont ainsi trouvé la mort.

Le Guatemala est un des pays qui soutient la lutte contre le changement climatique et qui encourage le gouvernement canadien à réagir aux violences infligées aux militants des droits de l'homme s'opposant à la destruction de l'environnement imposée par certaines entreprises canadiennes. Le NISGUA, un réseau de solidarité pour le peuple guatémalien s'est avancé ainsi :

The Justice and Corporate Accountability Project’s report, The ‘Canada Brand’: Violence and Canadian Mining Companies in Latin America, was released on October 24, 2016 and looked at incidents of violence and criminalization in connection with twenty-eight Canadian companies in thirteen countries in Latin America from 2000 to 2015. It found that at least 44 people have been killed during this time, 30 of which were targeted killings, while more than 400 people were injured, not including work-related injuries. They also found that over 700 people were legally persecuted during this period, including arrests and detentions, for their work in defense of their territories, livelihoods, health and environment.

Un rapport daté du 24 octobre 2016 publié par la Justice and Corporate Accountability Project (JCAP) intitulé “Made in Canada: violence et entreprises minières canadiennes en Amérique Latine” s'est intéressé aux actes de violence et de criminalisation liées à vingt-huit entreprises canadiennes ayant opéré dans treize pays d'Amérique Latine entre 2000 et 2015. Il en est ressorti que pas moins de 44 personnes ont été tuées pendant cette période, dont 30 cas qui s'avéraient être des assassinats ciblés, et plus de 400 personnes ont été bléssées sans prendre en compte les incidents du travail. Il en est également ressorti que plus de 700 personnes ont subi des persécutions légales durant cette période, y compris des arrestations et des gardes à vue, pour s'être battu pour la préservation de leur territoire, de leur travail, de leur santé et de leur environnement.”

Alors que le pays fait face à ses responsabilités pour les crimes passés et s'engage à combattre les impunités, on s'attend à ce que le Guatemala, avec le soutien de la communauté internationale, puisse aussi être en mesure de défendre les militants des droits de l'homme dans l'intérêt de son propre avenir.