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A Alep déchirée par la guerre, rien ne remplace un chez soi

lundi 6 octobre 2014 à 12:56
Photo by Flickr user Vincent Ferron (CC BY-NC 2.0)

Photo de Vincent Ferron sur Flickr (CC BY-NC 2.0)

Ce billet fait partie d'une série spéciale d'articles par la blogueuse et militante Marcell Shehwaro, décrivant la vie en Syrie pendant la guerre qui se poursuit entre les forces loyales au régime actuel, et ceux qui veulent le renverser.

Encore peu de Syriens ont eu à subir un déplacement obligatoire, le fait d'avoir à déménager d'un endroit à un autre et abandonner une réalité présente tout en ruminant sur ses souvenirs jusqu'à l'épuisement. Et comme beaucoup de Syriens, j'ai aussi des histoires de maisons à raconter – j'ajouterais “heureusement”, car pour des centaines de milliers de gens une pauvre tente est maintenant tout ce qu'ils ont.

Toute ma vie -je veux dire “avant la révolution”- j'ai habité dans une maison, une jolie maison familiale. Mes parents ont déménagé dans cette maison quand ma mère était enceinte de moi. Une petite maison dans l'un des meilleurs quartiers d'Alep, où j'ai vécu pendant 28 ans, et où j'ai partagé ma chambre avec ma soeur aînée pendant presque toutes ces années.

Dans notre maison c'est le vert qui prédominait. Ma mère, qui était fascinée par cette couleur, en mettait partout dans la chambre : les draps d'été, les couvertures d'hiver, la cuisine, la salle de bains, et la plupart des petits objets de décoration. Quant à mon père et moi, nous nous battions pour trouver dans toute la maison une place sur les étagères où mettre nos livres.

Vingt-huit ans dans la même maison m'ont fait développer des habitudes bizarres, comme celle de m'endormir aux heures les plus bruyantes parce que j'étais habituée aux bruits de la rue.

Je l'ai quittée il y a environs deux ans pour aller étudier au Royaume-Uni et passer un master. Je n'ai pris que deux grosses valises de vêtements, pensant que je reviendrais pour prendre le reste de mes affaires. Quelle erreur !

Peu de temps après mon départ, je suis devenue l'une des centaines de milliers d'activistes recherchés par les services de sécurité d'Etat à cause de mes activités politiques. Les agents de la sécurité d'Etat sont venus deux fois chez moi, et heureusement ils n'ont trouvé personne. Cependant, après cela, toute visite de ma part aurait été prendre un risque insensé équivalent au suicide.

Avant que ma soeur aînée ne quitte le pays pour la Turquie – sa sécurité étant menacée pour le simple fait d'être ma “soeur”- elle a enfermé nos vies dans des caisses. Nos photos, nos livres, les photos de mes parents (c'était tout ce qui nous restait d'eux), leurs lettres d'amour, leurs vêtements, nos vêtements, nos jouets d'enfants, nos bibelots verts, les accessoires féminins que ma mère m'avait achetés un fois en pensant que je me marierais un jour, la montre de mon père que j'avais promis de donner à l'homme qui m'aimerait autant que j'aimais mon père. Bien que j'aie enfin trouvé cet homme, je n'ai pas tenu ma promesse : la montre est là dans un carton quelque part avec les exemplaires du livre que j'ai un jour publié mais dont il ne me reste aujourd'hui aucun exemplaire.

Tout mon passé est emballé dans des caisses, des caisses ordinaires qui ne dévoilent pas leurs merveilleux contenus. Et tout comme nous, nos caisses attendent d'avoir la chance d'être sauvées ou d'être brûlées par un missile ennemi ou ami – peu importe. Ou alors elles seront violées comme tout dans ce pays, volées par un fou protégé par son arme.

Après ces 28 années, mon expérience des maisons a pris un tour différent, car j'ai déjà dormi dans près de 50 maisons différentes au cours des deux dernières années.

Les premières vacances de Noël qui ont suivi mon départ, nous savions parfaitement que j'étais recherchée par les services de sécurité, mais j'ai pris le risque de revenir discrètement dans ma ville, Alep. Et pour éviter les forces de sécurité j'ai dormi dans 20 maisons, une maison différente par jour. Je retrouvais ma soeur chez des amis en secret, j'embrassais ses enfants furtivement, sans pouvoir leur expliquer mon invisibilité et l'importance de garder le secret sur nos rencontres.

Je me déplaçais chaque jour avec ma valise et mon ordinateur portable “qui ne devait rien contenir de compromettant pour moi au passage des contrôles”. Je me déplaçais d'une maison à une autre, poursuivie par le regard interrogateur et terrifié des parents de mes amis, ce dont je ne peux pas les blâmer.

Finalement, toutes ces errances ont été inutiles car elles n'ont pas écarté le danger imminent des services de sécurité. A cause de mes visites nocturnes mes amis ont été interrogés. J'ai alors décidé de quitter cette partie de la ville et de ne jamais y retourner, en laissant derrière moi ceux que j'aimais, et de recommencer une nouvelle vie ailleurs dans un endroit libére par l'Armée Syrienne Libre.

Jeune femme qui cherche une maison où habiter seule, je suis une étrangère avec une religion et une tenue différentes. Une femme désarmée face à tous ces gens armés qui pourraient utiliser leurs armes à mauvais escient. Voilà les peurs habitent maintenant la femme activiste que je suis, qui a choisi de vivre seule.

C'est alors que j'ai connu mon premier conflit avec moi-même : dans une société en guerre, je suis une femme vulnérable qui a besoin de la protection d'un homme. Cette seule idée est terrifiante et débilitante.

Mes compagnons révolutionnaires et moi-même avons décidé de chercher un appartement dans le même immeuble pour qu'ils puissent venir à mon aide rapidement en cas de besoin. Nous avons alors trouvé en peu de temps un appartement à partager à Alzibdiya. Mon appartement était au 4ème étage de l'immeuble, ce qui pouvait être dangereux à cause des frappes aériennes. C'était un espace vide, seulement meublé d'une vieille télévision qui, la plupart du temps, ne fonctionnait pas à cause des coupures d'électricité, quelques matelas sur le sol et un lit de guingois dans la chambre que les garçons avaient décidé de m'attribuer. Nous avions aussi une petite cuisinière que je les avais convaincus d'acheter, après de longues discussions sur la nécessité de remplacer les sandwiches qu'ils achetaient tous jours par des plats cuisinés à la maison.

Dans cet appartement, j'ai appris à  cuisiner des grosses quantité, assez pour nourrir une dizaine d'amis masculins. Dans cet appartement on veillait très tard en discutant politique et en partageant les histoires personnelles de nos familles. J'ai appris à connaître leurs familles et ils ont appris à connaître la mienne. Ensemble on a beaucoup pleuré sur le balcon en attendant le retour de nos amis téméraires. Dans cet appartement toujours en activité, plein d'activistes sans domicile, j'ai appris qu'en temps de guerre on n'a plus d'intimité.

Rapidement on a dû déménager à cause de voisins râleurs et de l'arrivée de l'Etat Islamique dans le voisinnage. Deux très bonnes raisons de se remettre en chasse pour une nouvelle habitation. On a fini par trouver deux appartements dans le même immeuble, et de mon côté je me suis installée dans une maison à Almashhad. La protection de mes amis n'a jamais cessé, jusque dans les moindres détails, comme la liste des courses. Cette maison avait une petite cour où j'ai installé un jasmin. J'ai acheté des rideaux et des placards pour la maison et j'ai décidé d'en faire ma maison. Comme n'importe quel Syrien, je voulais quelque chose de plus personnel, de plus intime, qu'une valise à déménager.

C'est aussi dans cette maison que j'ai passé un arbre de Noël, à la barbe de l'Etat Islamique, pour fêter Noël avec mes amis. C'est dans cette maison que j'ai pleuré de froid, parce que les fenêtres étaient cassées et que je n'avais pas réussi à réchauffer la maison. Et au moment même où je me donnais l'illusion que ce lieu pouvait devenir ma maison, une patrouille de l'EI m'a arrêtée dans une rue voisine. Grâce à l'aide et au courage de mes amis de l'Armée Syrienne Libre je leur ai miraculeusement échappé. Pour leur sécurité et pour la mienne nous avons dû nous remettre à déménager de maison d'amis en maison d'amis pour éviter l'EI.

Ensuite j'ai passé quelques temps à aller et venir entre Alep et Ghazi Aintab, à avoir des vêtements ça et là. A un moment j'avais des sacs de vêtements dans six endroits différents, mais cela a fini par me sauver la vie. Mais après qu'Alep a été libérée de l'EI, nous y sommes retournés pour trouver une nouvelle maison.

Je leur ai dit que je cherchais une maison qui ressemble à celle de ma famille. On a cherché et on a trouvé une jolie petite maison. C'était la maison de jeunes mariés qui avaient dû fuir en Turquie. Je leur ai dit qu'ils pouvaient mettre toutes les affaires auxquelles ils tenaient dans une chambre fermée à clé, et je leur ai promis de respecter leurs souvenirs. Et c'est ce que j'ai fait.

J'ai passé deux mois dans cette maison, jusqu'à ce que je me fasse arrêter par la police d'Alep pour avoir refusé de porter le foulard. Ce jour-là ils ont aussi fait une descente dans la maison, et mes amis ont pensé qu'il valait mieux que je quitte Alep, et une fois encore -une fois encore- j'ai dû partir pour ne jamais revenir.

Aujourd'hui je vis dans une petite chambre que je n'ai pas les moyens d'agrandir, et sans doute par nostalgie, je l'ai peinte en vert, et je rêve encore, comme tous les Syriens, de revenir, de retrouver mes caisses, mes affaires, de retrouver un lieu quelque part sur cette terre que je puisse appeler en toute sécurité “ma maison”, où je puisse à nouveau vivre et retrouver mes racines et mon histoire.

Marcell Shehwaro blogue sur marcellita.com et tweete sous @Marcellita, essentiellement en arabe. D'autres articles de la série ici.

Etre Portoricain, selon Oscar López Rivera, plus ancien prisonnier politique portoricain aux États-Unis

lundi 6 octobre 2014 à 00:14

À une époque où il y a plus de Portoricains vivant à l'extérieur de l'île que dans le pays, les questions sur ce que cela signifie d'être Portoricain deviennent essentielles. Une lettre écrite par le prisonnier politique portoricain Oscar López Rivera traite justement de cela.
Dans ce document, il offre son point de vue sur les identités portoricaines. Cette lettre est la première publication dans une 
nouvelle rubrique du magazine en ligne La Respuesta [La Réponse] consacrée aux écrits de et sur ​​Oscar López Rivera. En voici un extrait :

Photo de la page Facebook Free Oscar López Rivera (Libérez  Oscar López Rivera).

Photo de la page Facebook Free Oscar López Rivera (Libérez Oscar López Rivera).

Etre Portoricain signifie pour moi mener à bien toutes les responsabilités qu'exigent notre  citoyenneté. Cela signifie se battre pour garder vivantes notre culture, notre langue, notre histoire, nos particularités, notre musique, nos danses, nos talents culinaires et nos racines ainsi que décoloniser nos esprits et notre patrie. Cela signifie que nous devons lutter pour protéger et préserver tout ce qui définit la nation portoricaine.

Les identités de la diaspora ne sont pas synonymes de l'identité portoricaine. Je ne suis pas un Nuyoricain. J'ai vécu dans ce pays plus de cinq décennies et demie. je parle les deux langues, mais l'espagnol reste ma langue maternelle. À la fin des années 60  une poignée de Portoricains ont créé un journal appelé “the Rican.” J'ai pensé que le nom était mal choisi. Il n'a pas survécu parce qu'à peine une poignée de [Porto]ricains le lisaient et s'y identifiaient. J'utilise le spanglish comme beaucoup d'autres Portoricains de la diaspora. J'apprécie la poésie de Pedro Pietri et les pièces de théâtre écrites par Miguel Piñero. Je crois que beaucoup de Boricuas de la diaspora peuvent s'identifier dans le spanglish, et nous pouvons être sûrs qu'il continuera de se former et d'évoluer. 

López Rivera, 71 ans, est emprisonné depuis 33 ans aux États-Unis sous l'accusation de “conspiration séditieuse” ainsi que de “complot d'évasion” et condamné pour une peine de 70 ans. C'est un combattant pour l'indépendance de Porto Rico, une colonie des États-Unis. Des politiciens, des artistes, et beaucoup de gens de différentes confessions se sont unis pour demander au Président Barack Obama de gracier López Rivera, qui a été qualifié de plus ancien prisonnier politique détenu dans l'hémisphère occidental.

Pour en savoir plus, lisez nos articles précédents ici [fr], ici [fr], ici et ici.

Les manifestants pro-démocratie de Hong Kong accusent la police de laisser des ‘malfrats’ les attaquer

dimanche 5 octobre 2014 à 18:52
A pro-democracy protester attacked by thugs in Mongkok. He accused the police for keeping a blind eye to the attack act. Photo from inmediahk.net

Un manifestant pro-démocratie agressé par des voyous à Mongkok. Il a accusé la police d'avoir laissé faire. Photo : inmediahk.net

Les adversaires du mouvement Occupy Central ont agressé et molesté des manifestants le 3 octobre, une semaine après le début de l'occupation massive du centre de la ville par les pro-démocratie, qui réclament des élections libres et équitables à Hong Kong. 

Les malfrats pro-Pékin, comme les appellent certains, ont accusé les contestataires de perturber leur travail quotidien, et se sont mis à arracher les banderoles et stands. Les manifestants qui ont tenté de les en empêcher se sont fait attaquer. Certains des agresseurs portaient des rubans bleus, un signe de ralliement apparu à une récente manifestation pro-gouvernementale de soutien aux policiers et à leur utilisation de gaz lacrymogènes.

The thug was safeguarded to the police vehicle after attacking pro-democracy protesters. Photo taken from inmediahk.net

Cet homme a été mis à l'abri dans le véhicule de police après avoir attaqué des manifestants  pro-démocratie. Photo : inmediahk.net

La confrontation de Mongkok a fait plusieurs blessés parmi les pro-démocratie. Ling Nan a relaté sur le site de média citoyen inmediahk.net comment les hommes en quête de bagarre sont entrés dans la zone du campement :

下午三時左右,約百位中年漢於旺角彌敦道貌似散步,慢慢一團一團包圍不同位置的佔領人士,並高聲叫囂:「警察你地隻眼開隻眼閉啦,俾我地打柒佢﹗」,中年漢邊撕走路上爭取普選的橫額,邊指罵帳幕及物資站旁義工,他們明反佔中立場,逐漸步向彌敦道阿皆老街佔領區要塞推進,其間對佔領區人士拳打腳踢。

[…] 有途人怕兩位青年遇險,嘗試走前隔開該名反佔中人士,卻被刀片指向面孔:「咩啊﹗夠贍你同我去天安門丫,屌你老母﹗」,該名「和事佬」見反佔中人士情緒激動,先自行離開現場,但被追隨約一個街口,不停被重複指罵:「「咩啊﹗夠贍你同我去天安門丫」,引來大群反佔中人士包圍叫囂。

Vers 15h, une centaine d'hommes d'âge mûr flânaient sur Nathan Road et ont peu à peu encerclé à divers endroits les protestataires du campement. Puis ils ont crié : “Policiers, fermez un oeil et laissez-nous les tabasser !” Les hommes d'âge mûr ont arraché la banderole et insulté le service d'ordre volontaire qui gardait le matériel dans les stands. Ils ont dit être contre Occupy et ont marché sur le campement au carrefour de Nathan Road et Argyle Street. En chemin, ils ont agressé les manifestants du sit-in.

[…] Un passant a tenté d'empêché un individu anti-Occupy Central de molester deux jeunes. Le voyou lui a brandi une lame au visage, et dit, “Tu as quelque chose dans le ventre ? Viens avec moi à Tiananmen, enfoiré !” Le passant a voulu s'en aller, mais le type lui a couru après en hurlant “Tu as quelque chose dans le ventre ? Viens avec moi à Tiananmen, enfoiré !” et une autre bande d'anti-Occupy Central lui a barré le chemin.

A high school student in school uniform was attacked by thugs in Mongkok. Photo uploaded by facebook user Dereck Eu.

Un lycéen en uniforme scolaire attaqué par des voyous à Mongkok. Photo chargée sur facebook par Dereck Eu.

Une travailleuse sociale, Mme Lam, volontaire du service d'ordre à Mongkok, a accusé la police de fermer les yeux sur l'attaque :

六點至七點左右,反佔中人士的確愈來愈多。在場的佔中人士感受到威協愈來愈嚴重。林小姐表示,那些反佔中人士都目露凶光,指住示威者罵,丟水樽等。[...]後來情況幾乎失控,當時警察極少,完全無法控場,在場義工有借出大聲公給警察做協調。與警方協調後,有十多名示威者由警方開路離開。但是後來,有個警員突然走進來,向示威者發出警告:示威者的聚集已經造成了危險,如不離開將會被捕。在場示威者感到不憤,為什麼受害者成了危險,包圍和挑起矛盾的反佔人士卻不被警告。結果更令到大部分示威者十分憤怒,大家認為警方不公,都認為應該留下來。

A partir de 18 – 20 heures, de plus en plus de voyous anti-Occupy Central sont arrivés. Les manifestants du campement ont pris peur. Mme Lam a dit qu'ils avaient l'air violents et ne cessaient d'insulter les manifestants et de leur jeter des bouteilles d'eau. […] La situation était incontrôlable. Les policiers étaient rares et les volontaires [du service d'ordre] devaient prêter leur mégaphone à la police pour gérer la situation. Une dizaine de manifestants ont décidé de partir et les policiers ont ouvert la voie. Mais plus tard un policier est venu au campement et a averti les protestataires que leur rassemblement avait mis d'autres en danger, et que s'ils ne s'en allaient pas ils seraient arrêtés. Les manifestants restants étaient très en colère. Ils étaient victimes d'une violente agression et c'est eux que les policiers accusaient maintenant d'être dangereux. Les malfrats anti-Occupy Central, qui avaient provoqué l'affrontement n'avaient, eux, même pas reçu d'avertissement. Les protestataires ont alors refusé de partir vu l'injustice de la police, ils ont décidé de rester où ils étaient.

Les policiers restant les bras croisés, des milliers de manifestants pro-démocratie ont afflué à Mongkok pour affronter les agresseurs. Certains ont découvert que des policiers avaient discrètement relâché un des hommes qui avaient initié les violences et l'avaient mis à l'abri dans un taxi. Indignés, ils ont encerclé la station de police de Mongkok en exigeant des arrestations.

Thugs with face masks appeared in Causeway Bay sit-in site at around 6pm.  Photo taken by Cheung Ka Man.

Des voyous masqués sont apparus au campement de Causeway Bay vers 18 h. Photo Cheung Ka Man.

Des faits similaires se sont produits à Causeway Bay, mais à plus petite échelle. Chu Hoidick a décrit la scène pour inmediahk.net :

傍晚六點多,一班戴口罩的流氓殺入SOGO對出的怡和街及渣甸街,毆打參與佔中市民及拆走鐵馬陣。
我們當時最差的評估是,旺角的情況將在銅鑼灣重複,因此我們在大台旁邊設立第二防線,預備如果被暴徒圍困時就返回第二防線留守。
到七點多,來聲援的市民愈來愈多,流氓開始撤退,但另一邊廂,有隊警察突然從地鐵站口冒出來,形勢大逆轉,我們面對的對手由流氓變成警察。
對於警察清場,我和戰友們的立場很清楚,就是在銅鑼灣留守到底,於是我和另一位同學,就以揚聲器呼籲市民留守。
到晚上八點多,仍然有零星三兩人在叫罵和掛藍絲帶,但局面大致穩定下來。其時我們也聽到旺角示威者重奪佔領區,大家士氣大振,我們一定可以堅守下去。

Aux alentours de 18h, une bande de voyous munis de masques respiratoires sont venus à pied dans Yee Wo Street et Jardin Street devant le  [grand magasin] SOG. Ils ont attaqué les manifestants du campement et arraché les barricades.
Nous nous attendions à ce que les incidents de Mongkok se répètent à Causeway Bay, nous avions donc édifié une autre barricade près du podium pour mettre les manifestants à l'abri si les malfrats nous encerclaient.
Les citoyens sont venus en nombre croissant après 19h pour nous protéger, et les malfrats ont commencé à se retirer. Un groupe de policiers est sorti du métro et nous nous sommes retrouvés face à face avec la police au lieu des malfrats.
Notre position était claire : nous allions rester et nous battre contre les tentatives des policiers de nous disperser. Un étudiant et moi tour à tour avons incité au mégaphone les citoyens à rester sur le campement.
Vers 20h, seuls quelques voyous à rubans bleus [en soutien à la police] étaient encore là, à insulter les manifestants. Le calme était revenu. Nous avons appris que les manifestants du sit-in de Mongkok avaient récupéré leur campement. Nous avions retrouvé le moral et poursuivrions notre sit-in.

Les manifestantes ont été la cible de harcèlement physique et verbal, mais les policiers ont ignoré leurs plaintes et refusé d'intervenir. Un collectif de 30 organisations de défense des femmes a publié une déclaration commune condamnant la violence sexuelle :

Nous avons déjà reçu de nombreux appels à l'aide de concitoyennes devenues les cibles de harcèlement sexuel verbal, du genre, “si vous sortez manifester, ne vous étonnez pas de vous faire tripoter !” et “vous avez des gros nichons, laissez-nous donc les caresser !” et ainsi de suite. Il y a aussi eu de nombreuses femmes qui ont subi des agressions obscènes directes, et des rumeurs que les voyous du mouvement anti-occupy se sont organisés en une “brigade pelotage”. Ce genre d'agression sexuelle et d'obscénités naît à l'évidence de l'inégalité de genre, qui traite les femmes comme des inférieures. Nous sommes scandalisées par un comportement aussi éhonté ! Ensemble, nous :

1. Condamnons fermement l'usage de violence sexuelle contre les femmes par les malfrats du mouvement anti-occupy.

2. Exhortons les personnes agressées à ne pas rester silencieuses, et à ne pas se laisser démoraliser par la violence sexuelle. Tous les protestataires doivent se lever et défendre les droits corporels et l'autonomie de chaque femme.

3. Appelons les policiers à immédiatement enquêter et maintenir la loi et l'ordre, ils doivent empêcher la délinquance concertée du camp du mouvement anti-occupy ; il faut qu'ils arrêtent les suspects sur-le-champ.

Dans la soirée, le Chef de l'Exécutif Leung Chun-ying a publié une vidéo demandant aux manifestants de quitter les campements et coopérer avec la police, mais il s'est abstenu de condamner les violences des malfrats.

La veille, la Fédération des Etudiants de Hong Kong, une des principales organisations à la tête du mouvement pro-démocratie, avait accepté l'offre de discussions de la Secrétaire en Chef du gouvernement Carrie Lam. Après les nombreux témoignages, dont ceux des blessés, rapportant que la police, au lieu d'empêcher les attaquants, menaçait d'arrêter les participants des campements, la fédération a annulé le dialogue.

Suppression de la première tranche de l’impôt sur le revenu, une réforme juste ?

dimanche 5 octobre 2014 à 18:43
Comment l'impôt sur le revenu sera réparti ? via le SNUL - CC BY 3.0

Comment l'impôt sur le revenu sera réparti ? via le SNUL – CC BY 3.0

C’est l’annonce politique du moment, un jour après son second discours de politique générale devant les députés, le premier ministre Manuel Valls a proposé mercredi 17 septembre de supprimer la première tranche de l’impôt sur le revenu. Revenons sur les enjeux de cette annonce et les changements que cela peut apporter.

9 millions de foyers concernés

Selon Christian Eckert, le secrétaire d’Etat chargé au budget, cette mesure sans précédent devrait s’appliquer à neuf millions de Français qui pourront bénéficier d’un impôt allégé. La première tranche de l’impôt regroupe les personnes qui gagent entre 6 011 (seuil de non-imposition) et 11 991 euros par an. Le revenu imposable par part dans la première tranche de l’impôt sur le revenu est de 5,5%.

Tout d’abord il convient de rappeler que les citoyens français sont imposés à un taux donné uniquement sur la part de revenu comprise dans la tranche à laquelle correspond ce taux. C’est à dire qu’un individu gagnant 15 000 euros par an aura 11 991 euros imposés à 5,5% et 3 009 euros imposés à un taux de 14% (taux correspondant à la seconde tranche de l’impôt sur le revenu).

Supprimer la première tranche de l’impôt s’est en fait s’attaquer à la seconde tranche qui deviendrait la première payable. Autrement dit, notre individu gagnant 15 000 euros par an ne serait plus imposés à 5,5% sur ses 11 991 premiers euros mais directement à 14% sur l’intégralité de ses revenus. Au final, cela reviendrait donc à augmenter les impôts pour tous les contribuables recevant plus de 11 991 euros par an.

Une mesure difficile à mettre en place

Emmanuel Macron, Ministre de L'Economie

Emmanuel Macron, Ministre de L'Economie – Domaine public

 Vu sous cette angle, cette mesure apparait comme complètement injuste et peut être assimilée comme un moyen détourné d’augmenter les recettes de l’impôt sur le revenu tout en réduisant le nombre de contribuables. C’est pourquoi le gouvernement de Manuel Valls serait en train de mettre en place une réforme qui supprimerait purement et simplement la première tranche. Dans ces cas là, les revenus jusqu’à 11 991 euros ne seraient tout bonnement pas taxé et la première tranche à 14% ne débuterait pas avant.

Mais cela pose un autre problème : les personnes les plus fortunées bénéficieront alors elles aussi d’une baisse d’impôt alors que cette mesure devait aider les contribuables les plus pauvres. Pour remédier à cette interrogation, le gouvernement avance un financement de la mesure par une hausse des taux pour les tranches supérieures, reste à savoir à partir de quel seuil. 

Rappelons-nous qu’en 2009, le Président de la République Nicolas Sarkozy avait essayé de supprimer la première tranche de l’impôt mais il s’était confronté à une problème de constitution et avait alors avorté son projet. À cette époque, il avait été chiffré qu’une telle mesure représenterait un manque à gagner compris entre 3 et 5 milliards d’euros pour l’Etat (3,3 milliards selon Bercy). Une somme non négligeable dans une période ou l’exécutif traque toutes les économies possibles. Aujourd’hui sur 37 millions de foyers fiscaux, seulement 16 millions sont imposables et c’est 9 millions de ménages qui seraient concernés par la baisse envisagée.

 Ce projet pose une question de cohérence. L’impôt sur le revenu est un impôt citoyen conçu et mis en place pour que chacun puisse contribuer, en fonction de ses revenus, à la vie en communauté. Ces dernières années, on ne compte plus les mesures d’exemptions d’impôts, de niches fiscales, de réductions du revenu imposable… A force de ces réformes, l’impôt sur le revenu n’est plus qu’une ressource faible pour l’Etat contrairement à d’autres taxes telle que la TVA. Le comble de tout ça c’est que ces mesures sont faites pour créer un impôt plus juste mais elles augmentent l’importance de la TVA, une taxe plus injuste, car payée par tous sans distinction de revenus. Enfin, avant que tout cela entre en vigueur, il faudra au préalable que l’Assemblée valide le texte…

Le travail au noir, première cause de l'augmentation des fraudes aux cotisations sociales

dimanche 5 octobre 2014 à 17:55
Travail au noir - composition - Domaine public

Travail au noir – composition – Domaine public

Alors que la fraude aux prestations sociales est comprise entre 2 et 3 milliards d’euros par an, celle des employeurs serait près de dix fois plus importante. La Cour des comptes publie un rapport sur la fraude aux cotisations sociales : Une estimation à la hausse qui compterait, selon ses calculs, entre 20 et 24 milliards d’euros.

Depuis 2007, ces nouvelles formes de fraude ont doublé et sont, pour la Cour des comptes, de plus en plus difficiles à faire apparaitre au grand jour. La majorité de cette fraude relève du travail au noir, précise-t-elle dans son rapport annuel sur les comptes de la Sécurité sociale publié mercredi 17 septembre.

Une perte comprise entre 20 et 25 milliards d’euros

La Cour des comptes tire la sonnette d’alarme. Après avoir régulièrement dénoncé la gruge des assurés sociaux, l’institution remet les pendules à l’heure avec son analyse annuelle sur la Sécurité sociale, publiée mercredi 17 septembre.

En grande partie, cette fraude est « constituée du travail dissimulé, auquel s’ajoutent des irrégularités intentionnelles dans le calcul de l’assiette de cotisation » déplore la Cour. Le niveau de ces « irrégularités », s’est établi à un niveau record en 2012 avec un montant estimé entre 20 et 24,9 milliards d’euros. Des chiffres beaucoup plus élevés que ceux qui circulaient jusqu’alors ; en 2011, un rapport parlementaire évaluait entre 8 et 15 milliards d’euros, cette fraude au prélèvement – principalement le travail dissimulé – contre 2 à 3 milliards pour la fraude aux prestations.

Travail au noir en France par région via L’Acoss - Domaine public

Travail au noir en France par région via L’Acoss – Domaine public

Qui fraude en France ? Ce sont principalement les secteurs de la construction et du commerce, estimés respectivement à 22% et 12%, suivi par le transport. À l’inverse, les taux de fraudes seraient les plus faibles dans l’industrie et la finance. L’explosion du travail au noir en France s’explique par l’augmentation des charges et des impôts : on a accru la complexité de la machine administrative française, et incité au travail dissimulé.

Autre cause voisine, l’envolée des travailleurs détachés. Venant de Pologne, de Roumanie, ils sont déclarés aux conditions sociales de leur pays d’origine – beaucoup moins coûteuse – alors qu’ils travaillent en France et que leur employeur n’a pas d’activité dans ces pays.

Enfin, l’abus du statut d’autoentrepreneur, où l’on transforme une relation salariale en relation commerciale, avec moins de charges sociales pour l’employeur.

« Les redressements sont rares », le « recouvrement est dérisoire »

« Les redressements sont rares » et le « recouvrement est dérisoire » indique le rapport. « Malgré des progrès ces dernières années, l’efficacité des redressements apparaît très faible au regard des montants en jeu : le niveau des redressements est inférieur à 1 milliard d’euros en 2013. Le travail illégal, qui constitue la part massive de la fraude aux cotisations, n’en représente que 291 millions d’euros », reconnaît la Cour des comptes.

« Un renforcement de la lutte contre la fraude aux cotisations sociales s'impose », estime la Cour. « Elle passe par une professionnalisation des équipes, une diffusion de l'usage de techniques plus modernes, des moyens d'action et des sanctions accrus. »

Selon ces derniers chiffres, ce sont près de 5 % des recettes de la Sécurité sociale qui manqueraient chaque année dans les caisses. Le trou de la Sécu devrait être de 13,4 milliards d'euros en 2014. Résoudre la fraude aux prélèvements permettrait donc de résorber immédiatement le déficit.