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Bangladesh : Jibontari, l'hôpital flottant des pauvres

dimanche 6 janvier 2013 à 21:04

Le Bangladesh compte 160 millions d'habitants, dont la majorité vit dans les régions rurales, à proximité des rivières. Le pays entier est traversé par des rivières de toutes tailles, dont le nombre s'élève à près de sept cents. Elles se rejoignent toutes dans la Baie du Bengale. Ces rivières constituent un réseau fluvial de 15 000 miles (soit 24 140 km) de long, l'un des plus importants de la planète. C'est sur ce réseau que vogue un bateau-hôpital, conduisant vers les régions les plus pauvres et les plus isolées du Bangladesh les médecins, les infirmières et les médicaments pour les soins des personnes dans le besoin. Il s'appelle le Jibontari, le “Bateau qui transporte la Vie”, inspiré d'un poème du poète Rabindranath Tagore.

Le Jibontari a commencé son aventure en tant qu'hôpital flottant le 10 avril 1999 sur les bords de la rivière Mawa à Munshiganj. Son objectif était de soigner toutes les personnes pauvres vivant à proximité des rivières et qui, en temps habituel, n'ont pas accès à des soins.

Le Jibontori ayant jeté l'ancre dans une région isolée, emmenant des médecins, des infirmières et des médicaments. Photo publiée sur la page Facebook de l'Impact Foundation Bangladesh.

L'Impact Foundation Bangladesh est l'organisation à vocation humanitaire qui a mis en place cette initiative. Cette fondation correspond à la filiale d'une organisation d'aide britannique, qui permet l'accès aux soins à des personnes handicapées des pays en voie de développement.

Le Jibontari est un hôpital flottant de trois étages, sans aucun moteur, qui circule en étant tracté par des remorqueurs. Il propose tout type de matériel et d'équipement moderne. Tous les jours, des milliers de personnes peuvent ainsi recevoir des soins médicaux et chirurgicaux dans cet hôpital flottant. Sur ses 40 mètres de longueur et 10 mètres de hauteur, le bateau propose des salles d'opération climatisées avec 3 tables d'opération, 3 lits de réanimation post-opératoire, un quartier de 12 lits, un appareil à rayons X, un laboratoire d'analyses et une clinique externe. De plus, au dernier étage, se trouvent toutes les dispositions nécessaires pour les personnes hospitalisées et un centre de formation ultramoderne. De plus, les médecins, infirmières et chirurgiens bénévoles ainsi que tous les autres employés disposent tous des dispositions nécessaires pour y résider. (voici la vidéo d'un reportage de CNN couvrant ce sujet).

Mita est une petite fille issue d'une famille pauvre d'une zone rurale de Bangladesh. Elle souffrait d'une fissure labiale. Elle a été soignée à l'hôpital flottant de Jibontari. L'histoire de cette fillette a été diffusée par le blog HelpThemSmile :

Un jour, un pharmacien a dit au père de Mita qu'il existait un bateau-hôpital quelque part qui soignait gratuitement ce type de difformité. (…) Il s'est renseigné sur la localisation du Jibontari, qui se trouvait alors à Chamrarghat, dans le district de Kisoregonj. Fazlul Haque s'est de nouveau alarmé. C'était trop loin, presqu'à 500 km de son domicile. Mais déterminé à tenter le coup pour sa fille, il a commencé son voyage un matin en emmenant sa fille.

Le médecin alors en service au Jibontari a examiné Mita et a informé son père qu'elle devait être opérée de toute urgence. (…) L'opération a été menée et les sutures ont été enlevées une semaine plus tard. Fazlul Haque était aux anges lorsqu'il a vu le nouveau visage de sa fille bien-aimée.

Des opérations sont réalisées sur les ponts du bateau. Photo prise sur le site de l'Impact Foundation Bangladesh.

L'Aussi Bangla Smile réunit des infirmières, des chirurgiens et des anesthésistes. Venus d'Australie, ils sont arrivés au Bangladesh en ayant pour mission de soigner les personnes souffrant des fissures labiales et palatines. Les membres de l'équipe réalisent ces missions lors de leurs congés annuels, en payant eux-mêmes leur billet d'avion. De plus, ils aident aussi à la récolte des fonds pour le matériel et l'équipement utilisé lors des soins.

Hasan Sarwar a rapporté comment les membres de cette équipe ont changé la vie d'une petite fille nommée Marium en l'opérant d'une fissure labiale à l'hôpital Jibontari :

Née avec une fente labiale et palatine bilatérale, le bébé Marium, âgée peut-être d'un jour seulement, a été abandonnée dans un bus public. Elle a été trouvée par des passagers, puis la police l'a placée dans un orphelinat à Mymensingh, Bangladesh.

Une bonne amie (…) a ainsi emmené Marium à l'hôpital flottant Jibontari, auprès de l'équipe Aussi Bangla Smile, après un trajet de deux heures depuis l'orphelinat. (…) Lorsqu'elle a été opérée, Marium était âgée d'environ cinq mois. En raison de sa difformité, elle ne pouvait pas s'alimenter correctement. Elle était anémique, malnutrie et pesait seulement 4 kg.

L'opération a été menée par le Dr Sarwar. La récupération post-opératoire s'est faite sans incidents, et le matin suivant, Marium semblait heureuse et elle commençait à afficher un sourire qui atteignait tout son entourage en plein coeur.

Le chef d'équipe Judy Barlow et le reste de son équipe ont été tellement émus qu'ils ont décidé de parrainer Marium jusqu'à ses 10 ans. Dix membres de l'équipe ont immédiatement donné 360$ australiens (soit 27 720 takas (monnaie bangladaise) ou 286€) pour ses dépenses en lait et autres besoins pour une année.

 

Depuis sa fondation, l'hôpital flottant Jibontari a déjà fourni les premiers soins à 377 416 personnes. Grâce à lui, 31 099 patients ont pu recevoir des soins orthopédiques, de chirurgie plastique, d'ophtalmologie et d'oto-rhino-laryngologie. Il a permis 70 853 analyses médicales de différentes sortes. 19 090 patients ont obtenu des lentilles intra-oculaires et 7 546 patients ont été soignés par physiothérapie. Par ailleurs, 335 381 personnes ont pu recevoir des conseils pour surmonter leurs handicaps physiques. 2 376 femmes ont eu accès à des soins et conseils de maternité anté- et post-natal. 1841 employés d'ONG, d'enseignants d'écoles et de chefs de communauté ont pu assister à des formations concernant la bonne nutrition. (réf)

Andrina Schwartz était venue visiter cet hôpital flottant et elle a réagi en publiant sur son blog un post intitulé “Bateaux d'espoir” :

L'hôpital flottant ressemble à n'importe quel autre bâtiment de trois étages quand vous l'apercevez de loin. Mais lorsque vous vous en rapprochez, vous réalisez qu'il n'est pas sur la terre - il est comme posé au milieu d'une rivière entouré de rizières. (…)

Jibontari restera sur son lieu actuel pour 3-6 mois. Dans cette période, les maux les plus simples seront guéris, la vue sera rétablie, les pieds bots seront soignés et les sourires remplaceront les fissures labiales. Tout ce qui, finalement, ramènera de l'espoir à la population rurale de Bangladesh.

Iran : La police cherche un “contrôle intelligent” des réseaux sociaux

dimanche 6 janvier 2013 à 19:34

Le Commandant-en-chef de la police iranienne, Esmaeil Ahmadi Moghaddam, annonce [farsi] que la police est à la recherche d'un “contrôle intelligent” des réseaux sociaux. Il pense que ce “contrôle intelligent” est préférable à un blocage total et que les internautes pourraient utiliser les “contenus utiles”.

Des chats, des armes et des prises de guerre à Idlib, en Syrie

dimanche 6 janvier 2013 à 13:16

Dans le cadre de notre partenariat avec Syria Deeply, nous traduisons et reproduisons une série d'articles qui décrivent la vie des civils syriens pris entre deux feux, et donne également des points de vue d'auteurs du monde entier sur ce confit.

 Maaret Misreen - Syria–Omar -, ancien étudiant en marketing dans une université privée de Damas, vit une vie qu'il n'aurait jamais imaginé vivre. Il est originaire de Idlib, une ville syrienne située au coeur des oliveraies du Nord-Ouest. Aujourd'hui, il vit sur la ligne de front en tant qu'activiste reporter d'images, il tourne des reportages et escorte des journalistes étrangers ainsi que les personnes qui travaillent pour des associations pour les droits humains sur le terrain, en Syrie.

L'activiste-reporter Omar Abu Al Huda joue avec son chat dans sa cache, dans la campagne autour de la ville de Idlib Crédit photo : Mohammed Sergie

Ce rôle d'activiste reporter d'image s'est beaucoup développé en Syrie. Pour des dizaines de jeunes syriens, la façon la plus utile de servir durant ce soulèvement est essentiellement de devenir cameraman itinérant, de tourner des séquences sur les champs de bataille et de les télécharger en ligne pour accéder à une audience mondiale. Beaucoup sont devenus ‘fixeurs' (organisateurs) pour des agences de presse étrangères, pour gagner de l'argent. Omar, pour son compte, ne demande pas d'argent. Il est juste content d'avoir la compagnie d'un journaliste étranger, surtout si celui-ci a des origines syriennes, durant le trajet.  Dans la province d'Idlib, où Omar réalise la plus grande partie de son travail, le régime Assad a maintenu son contrôle sur le chef-lieu mais a perdu les zones environnantes. Son armée, ses forces de sécurité et les milices informelles, ou shabiha, se sont repliées dans la capitale provinciale. La population de la ville a gonflé de 200 000 à 750 000 personnes, car les rebelles qui se battent pour le contrôle de villes et villages autour de Idlib ont aussi mis leur famille en relative sécurité là. Ils ne peuvent pas s'y exprimer ouvertement, mais ils sont protégés du pilonnage du régime et des frappes aériennes qui harcèlent les zones tenues par les insurgés. Omar, dont le nom de guerre est Abu Al Huda, a mémorisé la topographie de la province depuis le début du soulèvement et connait les chemins de campagne et les villages. C'est un guide loquace, il pointe du doigt les traces des grandes batailles pour les bases militaires dans la campagne et fait remarquer les dégâts des frappes des avions Mig et des bombes. “Vous avez pris place dans la voiture d'un martyr”, dit-il, expliquant que le trou dans le siège du conducteur a été fait par la balle qui a tué son frère de 27 ans, Mouayad Al Ghafeer, en juin. Omar avait sa propre voiture mais elle a été volée il y a quelques mois par d'autres rebelles, ou peut-être par un gang de voyous. Il cherche sans relâche cette voiture et ses amis l'alertent quand ils en voient une de la même marque et du même modèle sur une route. “C'était ma voiture, avant la révolution, que j'ai payée à la sueur de mon font”, dit-il. Mouayad, son frère décédé, est inhumé sur la ferme de ses parents, située dans un hameau à la sortie de la ville d'Idlib. A quelques centaines de mètres, une autre tombe fraîchement creusée, celle de Abdullah Allawi, tué le 27 décembre, quelques heures avant notre arrivée, après des échanges de coups de feu avec l'armée syrienne à un point de contrôle de la périphérie de Idlib. Les rebelles disent que l'armée a pénétré sur leur territoire à la recherche de déserteurs et qu'elle a ouvert le feu sur Abdullah, qui avait 25 ans et deux enfants, avant de se retirer (la vidéo de ce combat).

Omar a filmé cet accrochage et monte ses images durant la soirée. Il montre la vidéo à des combattants qui se sont groupés autour de son ordinateur – ils se regardent eux-même, en action. Les combattants vont ensuite de ferme en ferme, le long de la route où l'accrochage meurtrier a eu lieu quelques heures auparavant, et dînent chez  l'une des familles. Les pères rayonnent de fierté de la gloire imaginée de leurs fils au combat. Les pères tentent de distiller leurs conseils sur les stratégies, comme des entraîneurs de foot depuis le banc de touche, mais la plupart des combattants les ignorent. Une ligne électrique est tombée durant les opérations. Les pères parlent de comment la remettre en état eux-mêmes. Mais il n'y a pas d'urgence car il y avait rarement de l'électricité dans cette ligne dernièrement, la distribution de courant étant la plupart du temps interrompue.

Les rebelles disent avoir saisi ce camion quand l'armée syrienne a attaqué une de leurs places fortes,  fin décembre. Crédit photo : Mohammed Sergie

En arrivant dans encore une nouvelle  maison (celle-ci appartient à un officier de l'armée syrienne, mais est maintenant considérée comme une prise de guerre), ils se connectent à  internet par satellite pour télécharger les vidéos du jour. La connexion est plus rapide que celle des principaux fournisseurs d'accès américains. Des armes sont nettoyées et rechargées pendant que les combattants se détendent et parlent du futur. Omar est pessimiste, il prédit un cycle de violences après la chute du régime Assad. “Je veux quitter la Syrie quand ce sera fini et finir mes études” dit-il. Mais il est aussi partagé en raison de ses liens avec le pays et les Syriens, liens qui se sont renforcés avec son travail de vidéaste, qui ne montre pas seulement les violences, mais aussi les problèmes humanitaires et des sites archéologiques syriens. Outre la guerre, la vie quotidienne est dure pour tous les Syriens. Les rebelles, les reporters-activistes, comme le reste de la population, se battent pour trouver de la nourriture et de l'essence à des prix raisonnables.

Les stations-service ont depuis longtemps disparu au nord de la Syrie. Crédit photo : Mohammed Sergie

Le prix de l'essence utilisé pour les transports et pour produire de l'électricité fluctue entre $12 et  $15 le gallon d'un jour à l'autre. Les stations-services n'existent plus dans la plus grande partie de la Syrie. Le manque d'électricité rend les pompes inutilisables et les réapprovisionnements sont très sporadiques. L'essence est maintenant vendue à la sauvette dans la rue et par des commerçants qui n'ont plus d'autres produits à vendre. Le diesel, qui était surtout utilisé pour le chauffage des maisons, est  un luxe que la plupart des Syriens ne peuvent plus se permettre. Les nuits sont froides et sombres, et souvent traversées par le fracas des tirs d'artillerie tirés depuis la ville d'Idlib vers la campagne. Certains combattants se lèvent tôt pour rejoindre une bataille à proximité, tandis que d'autres, qui ont fait le guet durant la nuit, vont dormir un peu. Après avoir bu un petit verre de thé et joué avec le chat de la maison (tous les insurgés syriens semblent avoir un chat), Omar a sanglé le ceinturon de son pistolet et repris sa dangereuse tournée quotidienne : route, combats et vidéos sur Internet.

Chine : Fermeture du site web d'un journal politique libéral

dimanche 6 janvier 2013 à 10:27

Le site web du journal Yanhuang Chunqiu, une publication libérale qui publia un audacieux article intitulé “La constitution est en elle-même un consensus pour une réforme politique” a été fermé le 4 janvier 2013. Le compte officiel du journal sur Sina Weibo [chinois] dit qu'ils ont reçu des SMS et emails du Ministère de l'Industrie et des Technologies de l'Information chinois le 31 décembre, leur apprenant que le site avait été supprimé. CHINA DIGITAL TIMES [en anglais] donne plus de détails.

 

Salvador de Bahia, des vélos pour la ville

dimanche 6 janvier 2013 à 10:25

Le mouvement international Massa Crítica ou Bicicletadas (dénomination populaire dans les pays de langue portugaise), est devenu tendance chez les Brésiliens du fait de la saturation en automobiles des grandes villes. A Salvador, Thiana Biondo, correspondante de Global Voices, a essayé d'en savoir plus sur Bicicletada Massa Crítica. Elle nous offre ensuite des moments de la première partie de sa rencontre avec Roques Junior, un étudiant en urbanisme à l'université de l'Etat de Bahia, et avec Rosa Ribeiro qui prépare un doctorat d'architecture et d'urbanisme à l'Université fédérale de Bahia.

Global Voices (GV) : Quand avez vous commencé à pédaler dans la ville de Salvador ?

Roque Júnior (RJ) : J'habite à Salvador depuis plus de 20 ans et j'y pédale depuis 10 ans. Quand j'ai commencé à pédaler ici, je n'avais pas encore pris conscience des problèmes de cette ville, du trafic, et de tous le reste, que j'ai compris et étudié après de façon empirique avec un ami. Je roulais avec lui, mais jamais de longs parcours, j'allais faire un truc ici ou là  dans le centre ville ou les quartiers proches, jamais sur des routes très encombrées, je n'avais pas encore pris conscience du moyen de déplacement que l'on appelle le vélo. Le virage a eu lieu il y a environ trois ans. Un changement dans mon lieu de travail quotidien. 15,5 km à faire du quartier Barra jusqu'au quartier Imbuí. Ce changement m'a beaucoup ennuyé, des histoires de bus, la voiture qui me tentait pas beaucoup…Un beau jour, j'ai eu envie de tenter l'aventure, de tester l'itinéraire pour voir ce que ça donnait. J'ai vu qu'il n'y avait pas de problème parce que le parcours n'était pas celui que la voiture ou le bus prendrait. Je roulais presque toujours sur la “Orla” (boulevard de bord de mer à Salvador) ou sur une piste cyclable. Je m'habituais physiquement à le faire quotidiennement, le vélo est devenu ainsi pour moi un véritable moyen de transport.

Imagem da página de Facebook Bicicletada Salvador Massa Crítica (com 5.302 likes)

Image sur la page Facebook Bicicletada Salvador Massa Crítica (5.302 likes)

 

Rosa Ribeiro (RR) :

J'utilisais déjà le vélo à Pituaçu, j'avais l'habitude d'emmener mon vélo dans la voiture jusqu'à Pituaçu ou jusqu'au boulevard du bord de mer (la Orla). J'utilisais le vélo comme un loisir, mais mon virage (rire)  pour parler comme Roque, a été pris il y a 7 ans. En 2004, j'ai commencé à travailler sur ma thèse de doctorat (TFG) à la faculté d'Architecture. Je suis tombé en panne sur la route, et j'ai demandé de l'aide à des personnes qui ont réussi à sortir ma voiture de la Paralela et la faire entrer dans le Bairro da Paz (quartier de la paix). Cette mésaventure a été l'occasion d'une prise de contact avec les gens qui m'ont aidée, on a parlé, et j'ai fini par me dire que j'avais trouvé là le sujet de ma thèse. J'ai commencé alors à déambuler dans ce quartier, à observer tout….J'ai vu passer dans ce coin des tas de gens à bicyclette, des adultes et des enfants. J'ai demandé à quelqu'un où allaient tous ces vélos : une rencontre, une compétition, un parc du coin ?  Il m'a répondu : “Non, je n'ai entendu parler de rien de tout ça….” Par la suite, j'ai appris en m'adressant à ceux qui semblaient utiliser quotidiennement leur vélo que c'était tout à fait habituel et qu'ils utilisaient ce véhicule comme leur moyen de transport principal.

Bicicleta em Piatã, Salvador da Bahia. Foto de DavidCampbell_ no Flickr (CC BY-NC 2.0)

Bicyclette à  Piatã, Salvador de Bahia. photo de DavidCampbell_ sur Flickr (CC BY-NC 2.0)

Ils faisaient de grands déplacements dans la ville. Et, fait remarquable, ce qui au début n'était que l'occasion d'économiser le coût du transport, est devenu la transformation de celui-ci en une monnaie échangeable contre du pain, du gaz et bien d'autres choses… Mais il y avait encore autre chose qui les poussait à faire cela. Dans la ville de Salvador le vélo est un moyen de transport plus souple et beaucoup plus rapide que la voiture. Emerson, une des premières personnes que j'ai interrogées, allait du Bairro da paz (quartier de la paix) à Sete Portas (les sept portes) en 35 mn, quel est aujourd'hui le bus ou la voiture capable de faire ce parcours en 35mn ? A cette époque, ceux qui se déplaçaient à vélo dans Salvador et, je le pense, dans les grandes villes brésiliennes, appartenaient aux populations à bas revenus et étaient fortement stigmatisés.

GV: J'ai bien compris que vous souhaitiez inciter la population à utiliser le vélo comme moyen de transport. De quelle façon envisagez-vous de promouvoir ce choix ? Par Facebook ou d'autres moyens de communication, par des rencontres ? Comment fonctionne le militantisme pour un “vélo mondial” ? 

 RJ : Il y a environ 3 ans, quand j'ai commencé à utiliser le vélo comme moyen de transport, j'ai également commencé à chercher de la documentation sur internet, dans des blogs, dans divers sites d'information… C'est incroyable de voir comment, quand on commence à s'intéresser à quelque chose, on rencontre facilement des personnes qui s'y intéressent aussi. J'ai donc rencontré quelques personnes, on a échangé des idées.

Un jour, je suis tombé sur un blog d'Eduardo Luedy qui venait d'ajouter un post où il racontait un incident survenu dans l'avenue ACM où il avait été poussé hors de la route par un bus roulant à vive allure. Je l'ai publié sur Facebook. Je me suis senti un peu gêné de l'avoir fait. Mais j'étais en même temps assez satisfait d'avoir trouvé cette histoire qui montrait très bien tout ce qui est susceptible d'arriver dans la rue à des cyclistes. J'ai conservé ce témoignage pour l'utiliser dans pas mal d'endroits. J'ai fait une liste de courriels des personnes qui n'étaient pas des amis mais des sympathisants à cette cause, qui se déplaçaient à vélo. Cette liste s'est vite démultipliée et je crois que ça a été un pas en avant important pour la création de “Bicicletada Salvador Massa Crítica“.

 

"Ontem, por volta das 14:00, um motorista de ônibus, na av. ACM, quase me atropela." O relato de Eduardo Luedy em seu blog, De Velo em Salvador, em agosto de 2010.

“Hier au environ de 14 h un conducteur de bus m'a quasiment heurté sur l'avenue ACM”
Un récit de Eduardo Luedy sur son blog, A vélo dans Salvador, août 2010

GV : Il y a combien de personnes actives dans cette organisation ?

RJ : Pendant un moment, au début, on a été environ 15 personnes pour organiser des réunions, faire les propositions et les affiches. Aujourd'hui pour la Bicicletada ici à Salvador il y a  plus de 90 personnes les jours où nous organisions quelque chose.

RR : Actuellement, c'est grâce a un effort personnel important que cette formation de 90 personnes a pu être maintenue depuis quelques mois, quasiment un an. La bicyclette est un phénomène social. Je ne sais pas si les gens iront beaucoup vers le militantisme. Je pense qu'il existe un désir chez beaucoup le rouler à bicyclette et d'être identifiés comme tels. Il y a un renouvellement très important et aujourd'hui les gens organisent des “Bicicletadas” qui rassemblent autour de 25 personnes.

Bicycletada Salvador” existe depuis 2010. On a annoncé pour la capitale de l'état de Bahia le projet Cidade Bicicleta : un réseau de pistes cyclables de plus de 200 km. Ce projet va-t-il se réaliser, sera-t-il un symbole d'orgueil pour les Bahianais ou une honte nationale (comme le métro qui après dix ans n'est toujours pas entré en service), nous le saurons dans les mois qui viennent. Dans la deuxième partie de l'entretien, Roque et Rosa nous feront mieux connaître la politique publique des déplacements à Salvador.