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Lusofalante, un programme de radio pour les lusophones du monde entier

samedi 22 février 2014 à 10:40

[ Cet article a été écrit par Elizabeth Rodrigues, responsable du programme lusophone.]

Alors que nous avons en commun une langue, pourquoi en savons-nous si peu sur les autres “lusophones” ?  Pourquoi au Brésil nous arrive-il si peu de nouvelles des artistes africains ou portugais (en dehors des plus connus) ? Pourquoi si peu de livres des pays lusophones se retrouvent sur nos rayonnages ? Pourquoi en savons-nous si peu sur les langues qui ont forgé notre propre langue ? Nous manquons de curiosité sur les constituants de cet être organique et vivant qu'est une langue et sur ce qu'il transporte intrinsèquement pour notre façon d'être et de comprendre le monde.

Lusofalante indica...

Lusofalante présente…

Ce constat à fait naître le projet Lusofalante, un programme radiophonique qui vise à devenir un point de rencontres et d'échanges  entre les pays lusophones, à présenter la diversité culturelle, littéraire et linguistique qui s'est développée à partir de racines communes et sur des continents à la fois tellement différents et pourtant similaires. 

Considérant la langue comme un facteur faciliteur de rapprochement, le programme invite tout spécialement le Brésil à se regarder un peu moins souvent dans un miroir, et à se tourner vers l'Afrique, le Portugal et les autres pays lusophones. Des ponts doivent être  restaurés, c'est ce que souhaite démontrer le blog du projet.

 LUSOFALANTE propose des interviews, de la musique, des informations historiques et culturelles sur les divers pays où on parle le portugais. C'est un programe où alterneront des informations locales et musicales des pays d'origine des personnes interviewées, une machine à diffuser les fruits des métissage et les emprunts qui rendent la langue portugaise si riche et dynamique.

Clique para ouvir o teaser do programa de rádio Lusofalante

Cliquez ici pour entendre la présentation du programme de rádio Lusofalante

Il s'agit d'établir des échanges entre artistes, compositeurs, poètes, écrivains, linguistes, acteurs culturels, parlant tous le portugais. Nous sommes persuadés que le fait d'être attentif à ce qui se passe autour de nous, à la vie des autres, augmente notre capacité à remettre en question nos propres certitudes. La raison d'être de Lusofalante est cette curiosité qui nous aide à observer le monde sous des angles variés, à nous enrichir et nous redécouvrir au contact de l'autre. 

Comme l'écrit le poète et compositeur brésilien Siba :

Chaque fois que je fais un pas, le monde est remis en question.

La fascination de l'écoute de l'autre

“Nous nous consacrons aux couleurs, rythmes et parlers divers de tous ces pays qui sont d'une certaine façon, un bien commun. On trouve, entre autres, parmi les personnes interviewées les Mozambicains  Malangatana NgwenyaPaullina Chiziane, Stewart Sukuma et Costa Neto, les chanteurs Zeca Baleiro, du Brésil, et Lura, du Cap VertJoel Rufino dos Santos e Vitor Ramil, Filipe Mukenga, Alemberg Quindins e Aureliano Souza, Nei Lopes, Ruth Monserrat, Calane da Silva. Elles sont 22 au total”.

Ce programme illustre par la musique cette recherche de connaissance mutelle, il fait connaître des artistes qui, tout en étant très proches en terme de liens musicaux culturels et linguistiques, voient leurs œuvres peu diffusées dans les pays de langue portugaise.

Durant chaque entretien, nous recueillons des informations faisant découvrir la même histoire sous des aspects différents, c'est ce qui est passionant dans l'écoute de l'autre. Chaque rencontre est  porteuse d'informations précieuses sur un processus de construction historique  et politique. 

Oiça a entrevista com Ruth Monserrat, do Brasil, no primeiro programa Lusofalante

Écoutez l'interview de Ruth Monserrat, au Brésil,  dans la première émission Lusofalante

Parler de langues qui disparaissent, de langues interdites, ou de langues invisibles, est une manière de mettre en évidence l'histoire de peuples qui ont été décimés, de libertés qui ont été conquises. Et ce sont toujours des versions d'une même histoire avec le regard toujours différent de celui qui les raconte.

Par exemple, Ruth Monserrat, linguiste au Brésil, nous a raconté que dans une langue indigène, l'absence de pronoms possessifs ne permet pas de dire:”mon épouse”. Dans cette langue, on l'exprime en parlant de “celle que je “fais être” à mon côté” 

Derrière chaque langue se cache des façons diverses et vivantes  d'être au monde.

Mário Lopes de São Tomé et Príncipe, un ami récent de Lusofalante, à créé un projet appelé “Nous sommes tous cousins”. Ces jours-ci, en regardant les gens marcher dans les rues de Rio de Janeiro, je me suis répété à voix basse “Nous sommes tous cousins”. J'aime penser de cette façon. Cela me donne un sentiment d'appartenance, un certain confort inexplicable devant la folle et merveilleuse aventure de ma vie sur cette planète, à la fois si vaste et si petite.

Joel Rufino dos Santos de Lusofalante s'exprime sur une réalité : “Nous ne nous connaissons pas les  Africains”. Comment la culture africaine et par voie de conséquence la langue africaine imprègne intrinsèquement notre manière de nous comporter, d'être, de parler ? Il observe combien cette amnésie historique nous accompagne encore et nous empêche de prendre pleinement conscience de qui nous sommes.

Pode ouvir Joel Rufino dos Santos, e também Vitor Ramil, ambos do Brasil, no sexto programa Lusofalante.

Vous pouvez entendre  Joel Rufino dos Santos, et  Vitor Ramil, tous les deux du Brésil, dans le sixième programme Lusofalante.

La connaissance par l'autre, l'être par l'autre, nous le découvrons par “les langues que nous ne savions pas connaître” : c'est ce qu'écrit Mia Couto, un écrivain du Mozambique.

Vous pouvez en savoir plus et écouter tous les programmes Lusofalante sur le blog. Le contenu se retrouve également sur : iTunes de l'Université de Coimbra et sur Radiotube. Suivez la page Facebook pour les mises à jour.

Lusofalante est produit par Elizabeth Rodrigues, Marcelo Brissac et Paulo Brandão, au Brésil ; au Mozambique par  Stewart Sukuma et au Portugal par Costa Neto, avec l'aide de Lílian Gomes pour la partie blog au Brésil. Le contenu de Lusofalante peut-être utilisé comme un matériel didactique et peut-être retransmis sur des radios privées universitaires et culturelles. Il a été récompensé par le Prix Roquette-Pinto de l'association des radios privées du Brésil  (ARPUB) .

Vous pouvez lire également d'autres articles écrits pour la Journée mondiale de la radio de Global Voices Lusophonie :
13 fev 2014 – Des histoires de narco trafic dans la musique rap de Guinée-Bissau
14 fev 2014 – Une journaliste portugaise parle des radios communautaires de l'Australie et du Timor oriental

Des manifestations violemment réprimées au Venezuela

vendredi 21 février 2014 à 16:53
Manifestantes esquivan gases lacrimógenos lanzados por la Guardia Nacional. 19 de febrero, 2014. Altamira, Caracas. Foto de Sergio Alvarez, copyright Demotix.

Le 19 février dernier, des manifestants tentent d'éviter les gaz lacrymogènes utilisés par la garde nationale dans le quartier résidentiel d'Altamira à Caracas. Photographie de Sergio Álvarez, copyright Demotix

Après que le président vénézuélien Nicolás Maduro ait annoncé [espagnol]  sur une chaîne nationale qu'il continuerait de réprimer par tous les moyens à sa disposition les manifestations [anglais] qui ont lieu dans l'état de Táchira, des internautes ont commencé, dans plusieurs villes, à faire état d'abus commis par des officiers de police, par la garde nationale et par des groupes de civils armés qui se déplacent en deux roues.

Le Venezuela traverse une crise économique, politique et sociale, et des milliers de citoyens sont descendus dans la rue pour exprimer [espagnol] leur mécontentement. Depuis plus d'une semaine, les Vénézuéliens ont participé à des manifestations de masse qui ont, jusqu'à maintenant, fait cinq morts, des centaines de blessés et envoyé de nombreuses personnes en prison.

Le 19 février, des manifestants et des témoins de la répression quotidienne exercée par les forces de sécurité ont commencé à poster leurs commentaires sur Twitter et Facebook. Quoique ce n'est pas la première fois que la répression est mentionnée sur internet : le service de recherche du magazine Últimas Noticias a publié une vidéo dans laquelle on voit des membres de la police secrète connue sous le nom de SEBIN (les services de renseignements boliviens) au moment et à l'endroit même où plusieurs personnes ont été retrouvées mortes le 12 février dernier.  

Cette vidéo postée sur Youtube prouverait que des membres de la garde nationale bolivienne à Valencia, capitale de l'état de Carabobo, à 250 km de Caracas, ont détruit tout ce qu'ils trouvaient sur leur passage.

Les frères Ortega ont partagé une photo des événements à Valencia.

A Caracas, les témoignages proviennent essentiellement de l'est et du centre de la ville. La répression a d'ailleurs commencé dans le quartier d'Altamira, qui abrite la plupart de ces manifestations. Sur son compte Twitter, José Márquez ne fait pas que raconter sa version des faits, il accuse également la garde nationale bolivienne d'avoir jeté des bombes lacrymogènes périmées sur les manifestants.

Ce 19 février à Altamira, la garde nationale bolivienne a jeté des bombes lacrymogènes périmées depuis 2010.

Des internautes ont également publié des vidéos dans lesquelles on les voit subir les attaques des forces de sécurités et d'hommes armés à moto.

Dans le même temps sont apparus d'autres témoignages dénonçant les violences subies par la population dans une autre zone résidentielle à l'est de Caracas. Carlos Bruguera a écrit sur Twitter que des gens qui ne manifestaient pas ont été attaqués malgré tout.

La garde nationale bolivienne déferle à travers l'avenue Rómulo Gallegos, jetant des bombes lacrymogènes et tirant sur les immeubles. A signaler qu'il n'y a aucun manifestant. Qu'est-ce que ça veut dire? 

Jorge Estevez décrit également ce qu'il se passe: 

Il y a à peine quelques minutes, un contingent de la garde nationale bolivienne a traversé l'avenue Rómulo Gallegos en tirant des coups de feu.

D'autres personnes ont affirmé qu'il y avait des groupes armés qui attaquaient les bâtiments.

 Carmela Longo a appelé à l'aide tout en décrivant la scène à laquelle elle assistait: 

Au secours! Des hommes sont en train de tirer sur les habitations dans le quartier d'Horizonte

En revanche, Luigino Bracci explique que certains manifestants ont provoqué la garde nationale:

Il y a à peine quelques minutes, à Montechristo, des groupes de l'opposition ont provoqué la garde nationale en jetant des pétards aux agents postés dans l'avenue Rómulo Gallegos

Le centre-ville de Caracas a souffert encore plus que les autres quartiers. Dans la nuit, des internautes ont partagé deux vidéos dans lesquelles on semble voir les forces de la garde nationale tirer sur des civils, laissant un homme blessé à terre (Attention: la vidéo suivante contient des images violentes).

 

Malgré qu'aucune information officielle n'ait été communiquée en ce qui concerne ces civils, le compte Twitter El Universitario [espagnol] affirme que deux personnes ont bien été tuées lors d'une manifestation

La mort de deux personnes au cours des manifestations de ce soir à Caracas (l'une à La Candelaria, l'autre dans l'avenue Panteón) a été confirmée.

Mise à jour: Alba Ciudad [es] signale que “le journaliste du magazine de l'opposition El Nuevo País, Altagracia Anzola, a déclaré sur son compte Twitter que ces deux personnes étaient en vie et que l'une d'elles était sortie de l’hôpital.”

D'autres états connaissent également la même tension. Des vénézuéliens affirment que l'état de Táchira est en état de siège [espagnol], et des internautes expliquent que leur connexion internet a été suspendue.

Marc Bonet évoque la situation.

En ce moment même, de nombreuses zones de Táchira n'ont plus accès à internet et sont privées d'éclairages. L'armée est dans les rues. L'état de siège est un fait, même s'il n'est pas déclaré.

Frases Únicas a partagé une photo prise à Táchira. 

Barricades dans l'avenue Carabobo à Tachira. On attend l'attaque de la garde nationale à partir de Faro. Táchira ne cédera pas.

Certains citoyens ont utilisé leur compte Twitter pour offrir leur analyse de cette escalade de violences. C'est le cas de Sinar Alvarado, qui affirme que la répression pourrait se durcir si le gouvernement venait à se sentir trop menacé.

Plus ils se sentiront menacés, plus les chavistes [anciens soutiens pro-gouvernementaux de Chavez] feront preuve de violence.

Certains accusent la chaîne de télévision publique Venezolana de Televisión (VTV) de ne pas avoir correctement couvert ces événements. C'est ce qu'affirme Victor Amaya (@VictorAmaya) sur Twitter:

Sur la VTV, on dénonce des attaques de bus commises par des fascistes de droite. Pas un mot sur les blessés et les morts. Pauvres bus !

Pour conclure, voici ce qu'écrit Audrey M. Dacosta sur le blog Caracas Chronicles [anglais] sur les manifestations du 19 février:

Une ligne rouge a été franchie. La vraie violence, réelle et physique, semble remplacer la violence rhétorique et latente que nous connaissons depuis 1999.

Nous avons passé 15 années à craindre que ce moment n'arrive un jour.

Ce moment est arrivé.

Parlez-vous français ? Apprendre le français selon des traducteurs de Global Voices

vendredi 21 février 2014 à 16:40
Bangui, Central African Republic. The French language retains some of its former influence in the former French colonies in Africa.

Bangui, République Centrafricaine. La langue française garde une partie de son influence dans les anciennes colonies françaises en Afrique. Image de Wikimedia Commons.

Je n'avais jamais vraiment compris le défi d'apprendre le français jusqu'à ce que ma compagne décide de s'attaquer à cette langue. Elle me posait – à moi un francophone de naissance – des questions pour lesquelles je n'avais pas de réponse. 

Ma compagne parle mandarin et anglais, et comme elle me posait toujours plus de questions, j'ai commencé à réaliser à quel point la langue avec laquelle j'avais grandi à Madagascar était riche en exceptions. Apprendre une nouvelle langue peut s'avérer décourageant pour des débutants, mais pour ceux qui débarquent en France et qui partent de zéro, apprendre le français peut être particulièrement ardu. 

Le français était important en tant que lingua franca jusqu'au milieu du 20e siècle, mais son influence a diminué depuis. Certains experts attribue le déclin relatif du français à travers le monde [anglais, en] à la complexité de la langue. 

Il y a eu plusieurs tentatives au cours des années pour réformer et simplifier la langue française, notamment au niveau de l'orthographe, mais elles ont pour la plupart été ignorées. Une révision introduite en 1990 a institué des règles générales et des listes de mots modifiés, bien que les institutions aient été lentes à les adopter [en]. 

Toutefois, l'influence globale de la langue française dans le monde ne doit pas être ignorée. On estime que le français, parlé comme langue maternelle en France, à Monaco, dans la région romande de la Suisse, en Wallonie et à Bruxelles en Belgique, et dans certaines parties du Canada et des États-Unis, a 115 millions de locuteurs natifs. 190 millions de plus parlent français comme seconde langue, et il est enregistré comme langue officielle dans 29 pays. Le plus grand nombre de locuteurs du français en tant que seconde langue réside en Afrique Francophone, le plus grand contingent venant de la République Démocratique du Congo (32 millions) et du Cameroun (7,2 millions). 

Un bon exemple de son influence est l'envergure de l’Alliance Française, une organisation internationale à but non-lucratif qui vise à promouvoir la langue et la culture françaises à travers le monde. Chaque année, 450 000 personnes de tous âges assistent à des cours de français dans les Alliances Françaises dans 136 pays.

La question demeure : comment est-ce d'apprendre le français, comparé à d'autres langues ?  Nous avons posé la question à quelques membres de la famille Global Voices, et leur avons aussi demandé de partager quelques conseils pour les débutants. Voici ce qu'ils ont dit :

 Carol Bidwell :  

As an English native speaker who has learnt both French and German, I have to say both are tricky for different reasons. French pronunciation can be quite tricky if you aren't coming from an Romance language background, and I have found that in some situations (mainly dealing with official/ government stuff) French people can be quite dismissive if your pronunciation isn't perfect, which can be demoralizing. In terms of grammar too, French is full of exceptions to rules, so as soon as you feel like you've learnt something there is more to learn! I don't want this to sound too negative though, because it does get easier and sticking at it is definitely worth it!

En tant qu'anglophone de naissance qui a appris le français et l'allemand, je dois dire que les deux sont difficiles pour différentes raisons. La prononciation peut être assez délicate si vous ne venez pas d'un milieu ou l'on parle une langue romane, et j'ai trouvé que dans certaines situations (principalement dans les milieux officiels/gouvernementaux) les Français peuvent être assez dédaigneux si votre prononciation n'est pas parfaite, ce qui peut être démoralisant. En termes de grammaire aussi, le français est plein d'exceptions aux règles, donc, dès que vous avez l'impression que vous avez appris quelque chose, il y a davantage à apprendre ! Je ne voudrais pas que cela sonne trop négatif néanmoins, parce que ça devient plus facile à la longue et persévérer en vaut vraiment la peine ! 

Andrew Kowalczuk 

French is one of the most idiomatic languages, and there are thousands of them, too many to study, so you have to learn gradually from context.

Le français est l'une des langues les plus idiomatiques, et il y en a des milliers, trop à étudier, donc vous devez apprendre petit à petit selon le contexte.

Thalia Rahme : 

French is my second language after Arabic. In Lebanon, at home or in the streets, Lebanese people speak basic French. Nevertheless, I think that my Lebanese English-educated friends training have had some difficulties because they only start taking French as a third language in schools when they are 11. 
 
But I notice many don't retain much of what they have learned [and they] also tend to feel embarrassed when speaking in public [especially] the pronunciation…Still, the French taught in schools in Lebanon is the formal one,so if you go to France you will feel as if in another planet when hearing some of the local idioms or slang. Also we have developed our Lebanized French i.e. by turning some of the Lebanese expressions into French.

Le français est ma seconde langue après l'arabe. Au Liban, à la maison ou dans les rues, les Libanais parlent un français basique. Néanmoins, je pense que mes amis libanais élevés dans la langue anglaise ont eu quelques difficultés parce qu'ils n'ont commencé l'apprentissage du français que comme troisième langue à l'école quand ils avaient 11 ans. 
Mais je remarque que beaucoup ne retiennent pas ce qu'ils ont appris [et qu'ils] ont aussi tendance à se sentir embarrassés quand ils parlent en public [particulièrement] pour la prononciation… Et le français enseigné à l'école au Liban est l'officiel, donc si vous allez en France vous vous sentirez comme sur une autre planète quand vous entendrez certains des idiomes ou mots d'argot locaux. Nous avons aussi développé notre français libanaisé, par exemple en traduisant certaines expressions libanaises en français.

Alison McMillan cite une phrase d'un blog qui illustre le combat que représente l'apprentissage d'une nouvelle langue :

You speak your native language. It is organized in certain ways: the grammar with its subject, verb and object in a certain order; different levels of politeness; and your culture mirrored in this structure as well as in idiom and metaphor. You express yourself in terms of it; you came to yourself through it; in effect, you are it. When you learn another language, you learn a different way to organize reality. When you grow fluent in this new language, you can say and even do things in ways you could not previously; certain new aspects are highlighted, and some things that you originally could more precisely formulate are now missing.

Vous parlez votre langue maternelle. Elle est organisée d'une certaine manière : la grammaire avec ses sujet, verbe et objet dans un certain ordre ; différent niveaux de politesse ; et votre culture, reflétée dans cette structure ainsi que dans des idiomes et métaphores. Vous vous exprimez en ses termes ; vous vous êtes construits à travers elle ; en fait, vous êtes elle. Quand vous apprenez une autre langue, vous apprenez une manière différente d'organiser la réalité. Quand vous parlez de plus en plus couramment cette nouvelle langue, vous pouvez dire et même faire des choses d'une façon que vous ne pouviez pas auparavant ; certains aspects nouveaux sont mis en lumière, et certaines choses que vous pouviez à l'origine formuler de manière plus précise vous manquent désormais.

Danielle Martineau :  

French has its quirks like all languages. I started learning French when I was 9 and like anything else it's just commitment and practice and pushing through the hard part in the beginning. I do recommend this video. It is a TED talk by the Fluent in three months guy, Benny Lewis. He says something that I think is really accurate about people learning a new language. Usually they are shy and afraid to make mistakes so they never really jump right in from the beginning for fear of being judged. They think other people will be offended by their imperfect language skills when most people are just thrilled that you are making an effort and taking an interest in their culture and language. Also a lot of French people will correct you when you make mistakes in speech – it's not considered rude, and I actually really love it.  Nothing like making a mistake to learn how to do things right!

Le français possède ses bizarreries comme toutes les langues. J'ai commencé à apprendre le français quand j'avais 9 ans et comme pour toute autre chose c'est juste de la persévérance et de la pratique et dépasser la période difficile du début. Je recommande vraiment cette vidéo. C'est une conférence TED de Benny Lewis, un gars qui a appris une langue en trois mois. Il dit quelque chose que je pense exact à propos des gens qui apprennent une nouvelle langue. Généralement ils sont timides et ont peur de faire des erreurs alors ils ne sautent jamais vaiment le pas dès le début par peur d'être jugés. Ils pensent que les autres personnes seront offensées par leur compétences linguistiques imparfaites quand la plupart des gens sont juste ravis que vous fassiez un effort et vous intéressiez à leur culture et à leur langue. En outre, beaucoup de Français vous corrigeront quand vous ferez des erreurs en parlant – ce n'est pas considéré comme impoli, et en fait, j'adore vraiment ça. Rien de tel que faire des erreurs pour apprendre comment faire les choses correctement !

Suzanne Lehn 

As a French person, my experience with the issue is an indirect one. I know a Chinese lady who married a Frenchman and they live in the US, so the language they have in common is English. [..] The big difference between Chinese and French languages: the grammar, it seems! Almost non-existent in Chinese and cumbersome in French. Also one must be aware that one can/should learn the oral language first. I know a lady who speaks perfect oral French from having lived in France for 2 years, but still cannot write it at all.

En tant que Française, mon expérience est indirecte. Je connais une Chinoise qui a épousé un Français et ils vivent aux USA, donc leur langue commune est l'anglais. [..] La grande différence entre les langues chinoise et française : la grammaire, il semble ! Quasi inexistante en chinois et encombrante en français. De plus on doit être conscient que l'on peut/doit apprendre le langage parlé en premier. Je connais une femme qui parle parfaitement français pour avoir vécu en France pendant 2 ans, mais elle ne peut pas l'écrire du tout.

Georgia Popplewell :

I come from staunchly Anglophone Trinidad and Tobago, but I enjoy learning languages, and didn't find French particularly difficult. After studying it for three years in secondary school, I changed to Spanish, then somehow decided to major in French at university. I don't think I'd still be speaking French fairly fluently today, however, if I hadn't spent five months living and working in Martinique shortly after graduating. Having to communicate exclusively in French for that period seems to have locked the language into my brain.

I also have a far larger vocabulary in French than in Spanish, and I attribute that to the fact that I've read more widely in French. Gaining a solid grasp of a language, in my opinion, entails engaging with both living, contemporary examples of the language, such as you encounter in films, newspapers and magazines, and the more formal kind of language you'd find in literary works as well.

Je suis originaire des îles résolument anglophones de Trinidad et Tobago, mais j'adore apprendre les langues, et je n'ai pas trouvé le français particulièrement difficile. Après l'avoir étudié pendant 3 ans au collège, j'ai changé pour l'espagnol, pour ensuite décider de me spécialiser en français à l'université. Néanmoins, je ne pense pas que je pourrais parler assez couramment français aujourd'hui si je n'avais pas passé cinq mois à vivre et travailler en Martinique juste après avoir obtenu mon diplôme. Devoir communiquer exclusivement en français pendant cette période semble avoir enfermé la langue dans mon cerveau. 
J'ai aussi un vocabulaire bien plus étendu en français qu'en espagnol, et j'attribue ça au fait que j'ai lu davantage en français. Acquérir une connaissance solide d'une langue, à mon avis, implique d'intégrer à la fois des exemples vivants, contemporains de la langue, tels que vous en rencontrez dans des films, journaux et magazines, et la forme plus formelle de la langue que vous trouvez dans des travaux littéraires.

Jane Ellis :

French is a language where, the more you know, the harder it gets. One of the hardest things is definitely the grammar. In particular, I have found the passé simple very hard to use, as well as the subjunctive. I am getting a lot better at the subjunctive, but it is very difficult for a British person who has never even been taught about the existence of the subjunctive in English (!) to compute/process a whole new way of theoretical thinking.

Also, for me, the speaking is definitely the hardest. I freely admit to being hopeless as speaking French! I am confident on paper, but not orally. Lack of practice since I have been living in a Spanish-speaking country for the past three years and learning the local lingo, plus, I have to say, also due to rebuffs when trying to speak French to French-speakers.
As a result, although my Spanish is garbled and pretty hopeless, I am MUCH more confident about trying to speak it because the locals are so encouraging and friendly.

Le français est une langue où, plus vous en apprenez, plus difficile c'est. L'une des choses les plus difficiles est définitivement la grammaire. En particulier, j'ai trouvé le passé simple très difficile à utiliser, ainsi que le subjonctif. Je m'améliore beaucoup avec le subjonctif, mais c'est très difficile pour une Anglaise qui n'a jamais entendu parler de l'existence du subjonctif en anglais (!) de élaborer/développer un mode de pensée théorique complètement nouveau.
De plus, pour moi, parler est vraiment le plus dur. J'admets franchement désespérer de pouvoir parler français un jour ! Je suis confiante à l'écrit, mais pas à l'oral. Manque de pratique depuis que je vis dans un pays hispanophone depuis trois ans et apprends le jargon local, plus, je dois dire, aussi à cause de rebuffades en essayant de parler français à des francophones.
Par conséquent, bien que mon espagnol soit confus et assez désespérant, je suis BEAUCOUP plus confiante quant à son usage oral parce que les habitants sont très encourageants et amicaux.

Lova Rakatomalala est un rédacteur de Global Voices pour la région francophone. Quand il arriva pour la première fois de Madagascar aux USA en tant qu'étudiant de première année à l'Université de Tulane, sa peur de parler anglais avec un accent français était si écrasante qu'il sélectionna les cours sur un seul critère : qu'ils ne requièrent pas de parler en public. Il tweete — en français, malgache et anglais ! — à @lrakoto.

Les écoles nord-coréennes au Japon font face à une hostilité grandissante

vendredi 21 février 2014 à 15:31

Les “Coréens vivant au Japon” est une appellation vague qui rassemble des groupes très disparates sous le même terme générique. Selon leur origine, de Corée du Nord ou du Sud, et l'ancienneté de leur diaspora (avant ou après l'occupation japonaise durant la Seconde Guerre mondiale), chaque sous-groupe a un nom différent, et ne partagent que peu de points commun. Une division sévère qui se trouve renforcée par le système éducatif ; les Nord-Coréens vivant au Japon fréquentent des écoles spéciales pour étrangers qui ressemblent aux établissements nord-coréens. Markus Bell, après avoir visité l'une de ces écoles au Japon, a publié un  article détaillé sur les nombreuses menaces auxquelles ces écoles font face, donnant des informations de fond sur les groupes ethniques concernés, alors que les aides financières de leur pays d'origine ont considérablement baissé et que les subventions du gouvernement japonais ont récemment été coupées.

 

Le mouvement #Euromaïdan gagne toute l'Ukraine après l'explosion de violence

vendredi 21 février 2014 à 11:45

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Ce billet fait partie du dossier spécial de Global Voices sur le mouvement #Euromaidan en Ukraine.

Les manifestations d'Euromaïdan en Ukraine ont tourné au pire le 18 février 2014, quand les Berkout ou forces de police spéciales ont lancé à Kiev leurs opérations les plus violentes jusqu'à présent contre les citoyens et les sympathisants de l'opposition politique. Loin de calmer la contestation, cela a aussitôt renforcé les manifestations qui se sont même propagées à de nouvelles villes et régions du pays. Le gouvernement a annoncé une loi martiale de fait, quand le Ministère ukrainien de la Défense a fait savoir que l'armée était désormais habilitée à fouiller et détenir les civils, et même à faire feu sur eux.

Dans la journée, les représentants de l'opposition avaient tenté de remettre au Parlement une requête qui aurait limité le pouvoir présidentiel mais l'accès au bâtiment leur a été refusé pour ce faire. Peu après avoir appris cela, les manifestants ont marché sur le bâtiment du Parlement. La situation a alors dégénéré quand les forces de police ont violemment chargé les manifestants aux alentours de 20h, avec des résultats dévastateurs. Le lendemain matin, plusieurs médias indépendants et étrangers ont rapporté que l'offensive policière de plusieurs heures a fait 25 morts et plus de 1.000 blessés, mais le nombre de victimes continue à augmenter. Un journaliste a rapporté qu'au moins 40 personnes ont été brûlées vives rien que dans la Maison des Syndicats à Kiev.

Pendant ces événements, les nouvelles de la répression se sont rapidement propagées par les réseaux sociaux et d'autres canaux, et les faits étaient suivis en direct dans toute l'Ukraine et le monde par plusieurs flux en temps réels. Les protestataires à la fureur ravivée défilaient à nouveau sur l'épicentre de la contestation depuis novembre 2013, la Place de l'Indépendance, mais sont également descendus dans les rues de plusieurs autres villes grandes et petites des 24 régions administratives de l'Ukraine. Les images et informations partagées par les usagers de Twitter et d'autres réseaux sociaux, comme celle ci-dessous de @slava_slav, ont mis les citoyens en colère dans tout le pays et provoqué de nouvelles manifestations :

La Maison des Syndicats sur la Place de l'Indépendance [à Kiev]

La communauté internet de développeurs informatiques la plus populaire d'Ukraine s'est jointe aux autres Ukrainiens en présentant sa position sur les événements du 18 février. Le fondateur de la communauté, Max Ischenko, a écrit :

Вчера украинская власть наконец-то приняла решение. Обьявила открытую войну гражданам Украины. Рубикон пройден.
Всего два выхода для честных ребят: перестать быть гражданами Украины, променяв кафкианскую реальность на нормальный мир или же остаться гражданами, приняв навязанную войну. Третий, трусливый вариант, не рассматриваем — это default route.
Голыми руками на БТР идти не надо, это не наши методы. Программисты лучше действуют головой. Я за ненасильственное сопротивление.

Hier, le pouvoir ukrainien a finalement pris sa décision. Il a déclaré une guerre ouverte aux citoyens d'Ukraine. Le Rubicon a été traversé.

Il n'y a que deux issues pour les honnêtes gens : cesser d'être des citoyens d'Ukraine en troquant la réalité kafkaïenne contre le monde normal, ou rester des citoyens et accepter la guerre imposée. La troisième, une variante lâche, nous ne la considérerons pas : c'est un itinéraire par défaut.

Il ne faut pas aller à mains nues contre les blindés, ce n'est pas nos méthodes. Les développeurs agissent mieux avec leurs têtes. Je suis pour la résistance non-violente.

Après l'information sur la tuerie à Kiev, de nombreuses manifestations ont été revivifiées dans les autres régions, dont certaines viennent de basculer en faveur de la contestation. Les démonstrations les plus radicales de résistance civile, ailleurs qu'à Kiev, proviennent maintenant de la ville de Lviv en Ukraine occidentale,  active dès les débuts dans le mouvement Euromaïdan. Pendant la nuit du 18 au 19 février, plusieurs institutions gouvernementales sont tombées sous le contrôle des insurgés, comme le Service local de la Sécurité Ukrainienne à Lviv et l'Administration d'Etat Régionale.

A Lviv, la police est injoignable par téléphone, elle a tout bonnement arrêté de décrocher. La majorité des postes de police de la région ont été emportés par les opposants au régime. Des informations courent aussi en et hors ligne disant que des bureaux de police de la ville ont été pillés et des armes à feu volées. L'agence de presse ukrainienne ZIK a rapporté dans un tweet :

A Lviv toutes les armes ont disparu des commissariats de police : A Lviv un certain nombre d'armes ont été volées dans les bureaux de police 

Dans la matinée du 19 février, les étudiants et professeurs de l'Université Nationale Ivan Franko de Lviv ont proclamé une grève illimitée et demandé aux autres universités de faire de même. En attendant, les étudiants s'activent à mettre sur pied des unités d'auto-défense pour protéger les personnes et musées des pillages et des violences. Le jeune utilisateur de Twitter @yostap de Lviv a écrit :

On a annoncé la création de l'unité d'auto-défense et du comité de grève des étudiants.

A Oujhorod, l'Administration d'Etat Régionale est maintenant occupée par les insurgés, et les habitants expriment nombreux leur soulagement que leur cité ait décidé de rejoindre ce que beaucoup appellent une révolution. L'utilisateur @mikekomar a tweeté une photo du bâtiment qui venait de passer aux mains des protestataires :

@ukrpravda_news L'Administration Régionale de Zakarpatska prise d'assaut, et est maintenant entre les mains du peuple ! Oujgorod a fini par se réveiller ! Photo [prise à] 12:35

La même chose s'est produite dans quelques autres capitales régionales. Ainsi à Loutsk, une ville d'une autre région d'Ukraine occidentale, l'Administration Régionale est aussi aux mains des protestataires d'Euromaïdan. Les utilisateurs locaux de Twitter, comme @deep_monday, ont tweeté des images et des informations sur le vif :

Le [Ministère de l'Intérieur] et [l'Administration d'Etat Régionale] sont vaincus, tout brûle, Bachkalenko [le gouverneur de la région de Volhynie Alexandre Bachkalenko] est aussi battu. Nous avons l'impression que ça n'arrive pas à nous 

Un des faits les plus cruels de ces deux jours s'est produit à Khmelnytskyi. Au siège du Service de Sécurité d'Ukraine de cette ville, une femme âgée a été tuée et deux autres personnes, blessées. Elles faisaient partie du groupe de protestataires venus là après avoir appris ce qui se passait à Kiev. Quelqu'un a ouvert le feu depuis le bâtiment du Service de Sécurité d'Ukraine. Selon les témoins, la femme n'était pas armée et se tenait agenouillée devant l'immeuble. L'affreuse image de ce meurtre a été largement partagée en ligne, y compris par le fil Twitter officiel de l'une des organisations du mouvement Maïdan, La Volonté du Peuple :

Khmenytskyi. Les SBU tuent leur peuple.

L’Alliance Démocratique Ukrainienne a précisé :

Nos militants ont transmis que les coups de feu sont venus de l'immeuble de la SBU [Service de Sécurité d'Ukraine] de Khmelnytskyi. Une femme a été tuée. Il y a quelques blessés.

Les régions orientales de l'Ukraine ont aussi perdu leur tranquillité. A Poltava, une manifestation s'est tenue dans le centre-ville. Un compte Twitter s'appelant Poltava Svoboda (Poltava Liberté) a tweeté cette image de manifestation sur place :

Poltava. Le nombre de personnes [rejoignant la manifestation] augmente.

Les gens s'unissent une fois de plus pour aider le mouvement Euromaïdan de toutes les manières possibles. Les uns collectent et apportent vêtements chauds et médicaments, les autres achètent et préparent à manger pour leurs camarades manifestants. Manger est devenu plus crucial que jamais sur les sites de manifestation à Kiev, depuis que la Maison des Syndicats, où la plus grande partie des vivres collectés pour les protestataires était stockée ces dernières semaines, a été incendiée lors de l'opération de police du 18 février, privant totalement les opposants de nourriture.

A Kiev et Lviv, les gens ont aussi donné du sang, et il faudrait plus de donneurs. L'information à ce sujet est aussi diffusée par les médias sociaux et un nouveau mot-dièse #ядонор (#JeSuisDonneur) est apparu aux côté du consacré #Euromaidan. La Twitteuse Ana Toliivna de Lviv est parmi les donneuses de sang et elle invite à faire de même :

#JeSuisDonneur RT @euromaidanlviv : Au 65, rue Pekarska on peut donner son sang pour ceux qui en ont besoin [à] #Euromaidan #Lviv

On collecte aussi de l'argent pour ceux qui sont victimes de la récente accélération des événements. Même ceux qui ont très peu à donner offrent ce qu'ils peuvent pour soutenir le mouvement. L'auteur et journaliste ukrainien Dmitry Gordon a publié cette image d'une vieille dame prouvant son soutien indéniable à la contestation dans son pays :

Cette grand-mère a apporté la moitié de sa retraite mensuelle pour les victimes d'Euromaïdan.

Ce billet fait partie du dossier spécial de Global Voices sur le mouvement #Euromaidan en Ukraine.