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Economie : l'entreprenariat féminin au service du développement africain

jeudi 24 septembre 2015 à 23:33
Photo by Jšran Maaswinkel (@JeeeM)

Photo by Jšran Maaswinkel (@JeeeM)

Marqué par de forts taux de croissance et une économie en expansion permanente, le continent africain tente d'attirer des investisseurs et des capitaux venus de l'étranger. De plus en plus, la société civile, et notamment les femmes, souhaitent prendre part à cet essor en se mobilisant grâce à l'entreprenariat. Et les exemples de réussites individuelles et collectives ne manquent pas.

Il y'a quelques mois, le think-tank Terangaweb, organisme indépendant se présentant comme le lieu de rencontre de “l'Afrique des idées”, publiait un classement des 30 jeunes entrepreneurs africains à suivre. Dotés d'un sens de l'entreprise et d'une volonté d'agir concrètement, ces jeunes entrepreneurs montent des projets innovants, souvent destinés à répondre aux besoins immédiats et aux aspirations des populations africaines. Parmi eux, des femmes, et notamment la Nigérienne Ola Orekunrin, médecin et fondatrice de la première société d'ambulances aériennes en Afrique de l'ouest. Citons encore la Sud-africaine Rapelang Rabana, à l'origine de Yeigo Communications, jeune société développant des services de messagerie instantanée et de messagerie texte. De plus en plus, une tendance à l'entreprenariat féminin s’affirme dans beaucoup de pays africains et, dans bien des cas, avec le soutien des pouvoirs publics.

C'est aussi le cas en Côte d'Ivoire, où Dominique Ouattara, Première Dame du pays, a lancé un Fonds d'Appui aux Femmes de Côte d'Ivoire (FAFCI). Cette initiative vise à promouvoir l'entreprenariat des femmes du pays par des prêts à taux très faibles, permettant aux ivoiriennes de se constituer un capital de départ pour se lancer dans une activité professionnelle. “Le FAFCI a permis à 100 000 femmes de devenir autonomes” a affirmé Dominique Ouattara, rappelant ainsi le bilan de la structure. La Banque Mondiale prône elle aussi une adaptation de l'entreprenariat aux femmes africaines, par le développement d'un système de crédit généralisé et la mise en place d'un soutien technique. Dans ses recommandations, la Banque Mondiale encourage également le développement de l'éducation primaire, secondaire et supérieure pour les filles africaines, un meilleur accès des femmes aux moyens de production ou encore une protection juridique et un accompagnement plus poussé.

Rebecca Enonchong - CC-BY-20

Rebecca Enonchong – CC-BY-20

Là encore, la société civile a son rôle à jouer. Certaines associations, comme “Oser l'Afrique”, proposent ainsi des conférences sur l'entreprenariat féminin, afin d'encourager les femmes à s'investir et à investir, donnant parfois l'exemple de carrières réussies et de projets concrets. C'est ainsi le cas de Rebecca Enonchong, primée par Forbes et le World Economic Forum, créatrice du “Africa Technology Forum”, organisation non-lucrative destinée à la promotion de l'entreprenariat, notamment centrée sur les nouvelles technologies et le développement des jeunes startups africaines spécialisées dans les TIC (Technologies de l'Information et de la Communication). Autre invitée, Céline Victoria Fotso, promotrice de “Je Wanda Magazine”, dont l'objectif est de proposer une nouvelle image de l'Afrique. Loin des guerres, de la misère sociale et économique et de l'instabilité politique qui sont autant de lieux communs souvent erronés à propos du continent africain, le magazine promeut une Afrique jeune, souriante et surtout talentueuse.

Mais l'entreprenariat féminin en Afrique ne saurait se limiter aux nouvelles technologies, être réservé aux femmes diplômées et/ou des classes supérieures. Au contraire, un esprit d'entreprise semble devoir se développer au sein des populations africaines. C'est le sens du FAFCI de Dominique Ouattara, qui tend ainsi à embrasser toute les catégories de femmes ivoiriennes, exerçant dans tout un panel d'activités différentes, englobant des réalités professionnelles diverses. Si, partout en Afrique, ces projets doivent se développer, ils devront allier une politique volontariste menée par les pouvoirs publics aux actes concrets d'une société civile, désireuse de contribuer activement au développement économique du continent. Le défi n'est pas mince, mais le continent africain ne pourra se passer de ses entrepreneurs.

La justice russe condamne Google pour «lecture de correspondance privée» sur Gmail

jeudi 24 septembre 2015 à 20:12
Российский суд решил, что нацеленная реклама Google нарушает права пользователей на частную переписку. Изображения: Email Martha Ormiston и видеонаблюдение Ji Lee от Noun Project. Обработано Татьяной Локоть.

La justice russe a admis que la publicité ciblée de Google violait le droit des usagers à la confidentialité. Illustration : email de Martha Ormiston et caméras de surveillance de Ji Lee de Noun Project. Collage de Tatiana Lokot’.

Après délibération du tribunal de la Ville de Moscou, Google devra acquitter une amende de 50 000 roubles (676 euros) pour « violation de la confidentialité d'une correspondance » via la publication d'une annonce ciblée qui, aux termes du jugement, était basée sur le contenu de mails d'utilisateurs de comptes Gmail.

C'est un habitant d'Ekaterinenburg, Anton Bourkov, qui a décidé de poursuivre la société Google début 2015, quand il s'est mis à la soupçonner de lire sa correspondance privée. M. Bourkov, directeur adjoint de la chaire de droit européen à l'Université d'Ekaterinenburg, qui projetait de se rendre à la Cour européenne des droits de l'homme, échangeait des mails avec ses amis à ce sujet. C'est alors qu'il a remarqué que Google lui suggérait un hôtel à Strasbourg et des précisions sur l'obtention d'un visa.

Я обнаружил это совершенно случайно, с правой стороны всех моих писем я увидел рекламу и понял, что она содержит данные из моих писем. То есть, их роботы запрограммированы так, чтобы собирать информацию о пользователях и выдавать контекстную рекламу.

J'ai découvert cela tout à fait fortuitement, en voyant cette publicité en colonne de droite sur tous mes mails, et j'ai compris qu'elle se basait sur le contenu de mes mails. Ce qui veut dire que leurs robots sont programmés de façon à recueillir des informations sur les utilisateurs et à leur proposer des publicités adaptées.

Le 21 avril 2015, le tribunal de la Région de Moscou a rejeté la demande de M. Bourkov. Celui-ci s'est alors tourné vers l'instance supérieure, au motif que Google violait ses droits constitutionnels à une correspondance privée. Le tribunal de la Ville de Moscou a, lui, rendu un jugement favorable à M. Bourkov, même si le service de presse a mentionné uniquement une amende de 50 000 roubles, sans préciser si sa demande initiale serait satisfaite, à savoir interdire à Google d'utiliser des informations contenues dans les mails de ses usagers.

Les conditions d'utilisation de Gmail et sa politique de confidentialité présentent des explications détaillées sur le type de données et d'informations recueillies. Elles incluent les données personnelles de l'utilisateur fournies lors de la création du compte Google, mais aussi celles de l'historique de recherche, du registre du matériel utilisé (modèle, système d'exploitation, etc.) et d'autres données telles que la géolocalisation. D'autre part, à la rubrique «Publicité sur Gmail» des informations fournies par le site, Google fait remarquer ceci : «La publicité ciblée proposée sur Gmail est totalement automatisée, et personne ne lit vos mails ni ne regarde vos données sur votre compte Google pour déterminer quelles publicités et quelles informations vous proposer».

Google n'a pas communiqué pour le moment la façon dont il compte réagir au jugement de la justice russe et à cette amende. Au mois d'avril, le représentant de la filiale russe de Google (ООО «Гугл») avait déclaré à l'agence d'information Ria Novosti que la compagnie russe n'était pas responsable des conditions d'utilisation de Gmail et que les plaintes éventuelles devaient être adressées à la société mère de Google aux Etats-Unis.

En Macédoine, aggravation des conditions de vie déjà déplorables dans les résidences universitaires

jeudi 24 septembre 2015 à 20:04

L'assemblée plénière étudiante, un mouvement populaire qui se bat pour les droits des étudiants d'université en Macédoine, a publié de nouvelles photos des conditions de vie intenables des étudiants de la capitale macédonienne Skopje. Le mouvement suit attentivement la situation dans les résidences universitaires publiques et en a appelé à plusieurs reprises à l'Etat pour qu'il améliore l'hygiène et les conditions sanitaires de base dans les lieux de vie des étudiants. L'assemblée plénière étudiante a récemment informé le public que les conditions de vie et la sûreté des structures d'au moins une des plus grandes résidences universitaires de Skopje s'étaient depuis dégradées et a rappelé que le gouvernement avait promis de reconstruire entièrement les lieux il y a plus d'un an, après avoir essuyé des critiques dans les médias internationaux [en français].

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Dans le texte joint, l'assemblée plénière étudiante s'adresse indirectement à la nouvelle institution du procureur spécial de la République, qui est censé s'occuper des affaires de corruption ignorées par le procureur général de Macédoine.

Домовите се распаѓаат исто како и системот во државата, но ние сè уште немаме добиено нов специјален студентски дом за да се спасат студентите живи од бедата во која живеат и која се руши околу нив.

Ова е блокот В во студентскиот дом “Гоце Делчев”, во кој пред некој ден како што може да се види на сликите се срушил дел од кровот во еден од ходниците.

Овојпат немало повредени. Дали и наредниот пат нашите колеги ќе бидат еднакво среќни или пак до тогаш ќе добијат нов (специјален) студентски дом?

Les résidences universitaires tombent en miettes tout comme le système étatique et nous n'avons pas reçu de nouveaux dortoirs étudiants spéciaux pour préserver la vie des étudiants de la misère dans laquelle ils se trouvent et qui s'effondrent autour d'eux.

C'est le bloc V de la résidence universitaire “Goce Delchev”. Le plafond est tombé dans l'un des couloirs il y a quelques jours.

Personne n'a été blessé cette fois. Nos camarades seront-ils aussi chanceux la prochaine fois ou auront-ils alors une nouvelle résidence universitaire (spéciale)?

Réfugiés et policiers ne sont plus seuls aux prises dans les Balkans

jeudi 24 septembre 2015 à 20:01
Refugees arrive to transit camp in Opatovac, Croatia, Spetember 21, 2015. Photo by Beata Zawrzel, copyright Demotix.

Arrivée de réfugiés au camp de transit d'Opatovac, Croatie, le 21 septembre 21 2015. Photo Beata Zawrzel, copyright Demotix.

Mardi 22 septembre, des affrontements mineurs se sont produits entre réfugiés et policiers dans un camp de transit dans l'est de la Croatie. On attend encore les explications officielles sur la cause de l'échauffourée.

D'après Sven Milekić, un reporter de Balkan Insight, 33 réfugiés ont fui le camp sitôt après les violences et on ignore où ils se trouvent actuellement. Sven Milekić cite aussi l'ONG croate Centre d'Etudes pour la Paix, affirmant que la police croate a usé de gaz lacrymogènes contre les réfugiés et blessé au moins deux enfants, qui auraient été pris en charge par la Croix Rouge de Croatie.

Pendant ce temps, les dirigeants de plusieurs Etats balkaniques ont ouvert des discussions à plusieurs niveaux sur la crise actuelle des réfugiés, tandis que la tension monte entre Serbie et Croatie.

Hungarian military seen patrolling the border beside the newly built fences to control the flow of refugees crossing into Hungary. Photo by Geovien So, copyright Demotix.

Un militaire hongrois patrouille la frontière à côté de la nouvelle clôture érigée pour contrôler le flux des réfugiés pénétrant en Hongrie. Photo Geovien So, copyright Demotix.

Une tension à laquelle contribue la décision du gouvernement hongrois d'édifier un nouveau mur et plusieurs clôtures le long d'une partie de ses frontières, pour essayer d'enrayer le flux des arrivants.

Chantier du mur au poste-frontière de Beremend (Photo: Eugen Husak) pic.twitter.com/VrlL9qr3FT

— HRT Vijesti (@hrtvijesti) September 21, 2015

[VIDEO] Depuis le petit matin les Hongrois mettent des barbelés près [du poste-frontière] de Gola

Le Premier Ministre croate Zoran Milanović a “averti” les autorités serbes lors d'une conférence de presse le 23 septembre que “agir contre la Croatie reviendrait à agir contre l'UE”. Et M. Milanović de préciser :

La Croatie est membre de l'UE. La Serbie ne peut pas, même si elle veut, imposer des mesures contre la Croatie car elle a un accord avec l'UE. Tout ce que la Serbie ferait, ou voudrait faire, irait contre l'UE et je suis sûr que la Serbie s'en abstiendra.

Les propos de M. Milanović semblent avoir irrité le ministre serbe des Affaires Etrangères Ivica Dačić, qui a réagi en disant que la Croatie “n'a pas encore tiré les leçons des problèmes”, et en affirmant que M. Milanović “continue à provoquer la Serbie avec ses déclarations”.

A son tour, le Premier Ministre serbe Alexandar Vučić a qualifié la décision de la Croatie de fermer temporairement sa frontière avec la Serbie “de violation brutale et absolument unilatérale de l'ASA (L'accord de Stabilisation et d'Association) signé par la Serbie avec l'UE”.

Des observateurs et des membres de la communauté internationale commencent à arguer que l'Union Européenne exagère la crise représentée par l'afflux des réfugiés du Moyen-Orient. Les détracteurs affirment que l'UE laisse de côté les pays non-membres intéressés à l'affaire dans les plans et résolutions adoptés pour gérer la crise, et souffle peut-être ainsi sur les braises d'une région balkanique déjà troublée.

Le politologue et professeur d'études d'Europe du Sud-Est à l'Université de Graz (Autriche) Florian Bieber a écrit un article pour Balkan Insight, où il décrit la gestion par l'Union européenne de la crise du point de vue des Balkans :

Les dégâts causés par la réaction des gouvernements face aux réfugiés sont immenses. En quelques semaines, les frontières de toute la région sont devenues plus étroitement contrôlées et plus fermées qu'elles ne l'ont été en plus d'une décennie. […]

La réponse des pays balkaniques le long de la route de transit est le reflet des signaux contradictoires de l'Allemagne et des autres Etats principaux de l'UE, qui oscillent entre accueil et rejet.

Les réponses divergentes de ces gouvernements met sous pression les relations bilatérales, en particulier entre la Hongrie et ses deux voisins au sud, mais aussi entre la Serbie, la Croatie et la Slovénie.

Fredrik Wesslau, autre spécialiste de politique unternationale européenne et directeur du Programme Wider pour le Conseil Européen des Relations Extérieures, sensibilisait à ces questions dans un article publié deux jours à peine avant les déclarations antagonistes des responsables serbes et croates. Il écrivait :

On estime que 2.500 à 3.000 réfugiés entrent en Macédoine et Serbie chaque jour. Alors que le nombre total de réfugiés croît dans les Balkans, davantage de pays fortifient leurs frontières. Il y a un effet domino de fermetures de frontières et de constructions de barrières. Ce qui cause de nouvelles tensions entre pays de la région et conduit à de vilaines disputes entre Etats membres de l'UE.

Le journaliste indépendant Jorgen Samso, qui a passé quelque temps dans les Balkans juste avant l'explosion de l'actuelle crise des réfugiés, a forgé une expression qui exprime probablement le mieux ce que vivent en ce moment les réfugiés qui suivent la “route des Balkans” : la “gigue de la frontière balkanique”. Un engouement qui, en quelque sorte, va de frontière en frontière, sans retour possible. Samso décrit pour Politico la confusion supplémentaire qui attend désormais des réfugiés déjà désespérés :

La confusion a un effet cascade sur les réfugiés qui avancent vers le nord pour des destinations comme l'Allemagne. Malgré les smartphones avec accès aux informations, groupes de médias sociaux et cartes en ligne, les réfugiés étaient dans l'impossibilités de suivre [l'évolution des événements].

Les désaccords entre dirigeants de l'Union Européenne se font plus visibles chaque jour. Comme le note Fredrik Wesslau, il faudra que les choses empirent beaucoup avant de s'améliorer, et pays membres ou non de l'UE affectés par l'énorme afflux de réfugiés sur le continent se tournent vers l'Union en quête de solutions. Pour l'instant, les récentes décisions des dirigeants dans l'UE semblent plus propres à rallumer de vieilles animosités qu'à résoudre la crise actuelle.

Les dessins de Charlie Hebdo sur la mort d'Aylan Kurdi lancent un nouveau débat sur la liberté d'expression

mercredi 23 septembre 2015 à 18:23
Charlie Hebdo's latest cartoons of Syrian toddler Aylan Kurdi, widely circulated on social media

Les dernières illustrations de Charlie Hebdo représentant le petit Aylan Kurdi, largement reprises dans les médias sociaux.

Une fois de plus, Charlie Hebdo a provoqué une controverse au niveau international. Le 2 septembre, l'hebdomadaire français publiait des dessins représentant Aylan Kurdi. Face à ces caricatures, les lecteurs n'ont pas su si le but était de se moquer de la mort de l'enfant, de la réponse de l'Europe face à la crise migratoire, ou ni l'un ni l'autre. De la sorte, le journal a lancé un nouveau débat sur la liberté d'expression.

Aylan Kurdi, ce petit Syrien âgé de 3 ans et dont le corps sans vie a été rejeté par la mer sur une plage de Turquie, est maintenant devenu un symbole de la crise en Méditerranée. Accompagné de sa mère, de son frère, et de 20 autres réfugiés, il était monté à bord d'un canot pneumatique direction l'île de Kos, en Grèce. Malheureusement le bateau n'a pas tenu et ce naufrage coûta la vie à Aylan, ainsi qu'à 11 autres réfugiés et à sa mère et son frère.

Une dizaine de dessins illustrant le petit Aylan Kurdi ont alors vu le jour, mais peu ont été largement diffusés dans les médias sociaux. L'actrice colombienne Mariana Cordoba a partagé deux illustrations de Charlie Hebdo sur Twitter, exprimant sa désapprobation face au point de vue illustré par le journal :

#CharlieHebdo Vous êtes allés trop loin, quelle déception. Il ne faut pas confondre liberté d'expression et discours haineux.

Le dessin de gauche montre un jeune garçon portant les mêmes vêtements que ceux d'Aylan lorsque son corps a été découvert, ainsi qu'un panneau publicitaire pour McDonald's sur lequel on peut lire : « 2 menus enfant pour le prix d'un ». Ce message pourrait être interprété comme faisant référence à Aylan et à son frère.

La légende indique : « Si près du but…»

Le dessin de droite a été quant à lui réalisé par un dessinateur ayant survécu à la fusillade perpétrée dans les locaux du journal Charlie Hebdo en janvier 2015. Il représente un personnage ressemblant à Jésus debout sur l'eau à côté de l'enfant la tête en bas. La légende principale explique :  « La preuve que l'Europe est chrétienne ».

Les deux légendes secondaires précisent : « Les chrétiens marchent sur les eaux » et  « Les enfants musulmans coulent ».

Un autre usager de Twitter nommé « A Common Lawyer » a partagé une illustration montrant un enfant (Aylan) et deux champions de natation. La légende est la suivante : « Lequel de ces trois nageurs n'a pas été champion de natation ? ».

Voici un autre dessin de #CharlieHebdo. « Lequel de ces trois nageurs n'a pas été champion de natation ? »

En janvier 2015, l'hebdomadaire Charlie Hebdo avait essuyé une fusillade faisant 12 morts, dont le directeur de la publication. En 2006, le journal avait republié des caricatures de Mahomet, réalisées quelques mois plus tôt par des dessinateurs danois. Ces caricatures avaient été alors largement critiquées par la communauté musulmane, qui voyait en ces dessins une insulte à l'islam, tandis que beaucoup dans le monde occidental y voyait une forme de liberté d'expression.

Les caricatures représentant Aylan Kurdi divisent une fois de plus l'opinion publique : certains ne peuvent s'empêcher de s'en prendre au journal et à son humour manquant totalement de tact, tandis que d'autres reconnaissent là une forme de liberté d'expression et de la presse.

Dégoûtant…C'est ça qu'ils appellent liberté d'expression ? Se moquer d'un enfant mort ? Ils ne cherchent qu'à blesser des gens… Irréfléchi

Au nom de la satire, Charlie Hebdo parvient à se moquer de #Aylan Kurdi, le garçon mort noyé. Vous devriez avoir honte

Pour d'autres, le fait que l'hebdomadaire ose se moquer ainsi d'un problème d'aussi grande envergure, à savoir la crise migratoire actuelle, constitue une forme de journalisme irresponsable :

#CharlieHebdo nuit maintenant aux médias occidentaux en se moquant #Aylan. Il est grand temps que nous comprenions que ce journal ne représente rien d'autre que du journalisme irresponsable.

#CharlieHebdo nuit maintenant aux médias occidentaux en se moquant de #Aylan. Il est grand temps que nous comprenions que ce journal ne représente rien d'autre que du journalisme irresponsable.

Ces caricatures restent très ambiguës : tandis que certains se sont sentis blessés à la vue de l'image d'un enfant mort, d'autres ont analysé les dessins sous un autre angle et y ont vu une satire des pays occidentaux et leur position face à la crise migratoire, et non envers Aylan.

#CharlieHebdo ne se moque pas de #Aylan mais des pays capitalistes qui malheureusement ne se préoccuppent pas de la souffrance des réfugiés. Voilà mon point de vue.

Est-ce que le dessin de #CharlieHebdo sur #Aylan ne se moquerait pas plutôt des Européens ?

Plusieurs journaux, dont le New York Times, le New Yorker, Bloomberg View, etc. ont publié des articles expliquant un point de vue différent. Le New York Times, par exemple, défend l'idée que ces illustrations s'en prennent en premier lieu à « la réponse hypocrite de l'Europe face à la crise [des réfugiés] »

Un site internet appelé Comprendre Charlie Hebdo aide à analyser et à comprendre diverses caricatures parues dans le journal en montrant des exemples d'autres illustrations publiées par le passé. Ce site précise notamment :

Face au dogme, à l'hypocrisie et à l'hystérie (et ce quelle qu’en soit l'origine) Charlie Hebdo utilise la satire, d'une manière parfois brutale. La satire joue sur différents degrés d'interprétation (ironie) et représente une œuvre tout à fait subjective qui, lorsqu'elle est utilisée par Charlie Hebdo, laissera à coup sûr un arrière-goût amer. Le sens de l'humour n'est pas une condition pré-requise.

Malgré la tentative des grands médias de calmer le jeu en expliquant le but et le message caché de Charlie Hebdo, tous ne sont pas convaincus, comme par exemple la journaliste franco-algérienne Nabila Ramdani :

Mon article sur les dernières caricatures du journal : oui, j'ai bien compris la « blague » de #CharlieHebdo sur #Aylan. Et elle est répugnante.

Nabila Ramdani a rédigé une chronique pour Al Arabiya, déclarant notamment :

Une chose est sûre : il n'y a pas sujet à rire en ce qui concerne des enfants morts, et encore moins lorsque ces derniers ont été engloutis dans une telle crise des réfugiés. Ce point de vue vue n'est pas un point de vue minoritaire, extrémiste ou encore stupide présenté par des personnes adeptes de la censure. Tout comme Monsieur Herbert, un avocat très instruit, je « comprends » parfaitement ce que Charlie Hebdo essaye de faire et ce que ce journal représente. Et tout comme des millions d'autres personnes dans le monde, je trouve cela répugnant.