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Burkina Faso : #Justeunpourcent, un hashtag pour agir contre la pauvreté

vendredi 17 octobre 2014 à 12:34

Un nouvel hashtag a fait son apparition sur les réseaux sociaux africain, depuis le Burkina Faso: Justeunpourcent. Des ONG locales réclament des députés qu'un pour cent des revenus miniers soit reversé aux collectivités locales, afin d'améliorer les conditions économiques des Burkinabés.

 

La Chine interdit un autre festival de films indépendants

vendredi 17 octobre 2014 à 10:25
Poster of the 11th Beijing Independent Film Festival. via @johndjinggang’s Facebook

Affiche du 11ème Festival du film indépendant de Pékin via le profil Facebook de @johndjinggang 

Tous les liens de ce post renvoient vers des pages en anglais, sauf indication contraire.

Les autorités chinoises ont interdit la 11ème édition du Festival du film indépendant de Pékin et arrêté les organisateurs du festival le samedi 23 août. Le festival est organisé annuellement par le Fonds cinématographique Li Xianting, situé en périphérie de la ville de Pékin dans le quartier Songzhunag de la commune de Xiaobao.

Les dirigeants chinois ont fait part publiquement de leur désir de promouvoir la culture locale, mais des interdictions comme celle-ci montrent une réalité complétement différente de la rhétorique.

Promouvoir la culture

La nouvelle direction du parti communiste chinois sous le Président Xi Jinping s'est engagée à promouvoir le “soft power” de la Chine en soutenant l'industrie culturelle. Au cours des dernières années, des sociétés de cinéma controlées par l'Etat ont investi dans un certain nombre de grands films en réalisant des partenariats avec leurs homologues à Hong Kong et Taiwan, établissant ainsi un marché panchinois du film.

De plus, le quota pour les films étrangers importés n'arrête pas d'augmenter. Les co-productions USA et Chine sont encouragées, à condition que les films produits dans le cadre de cette collaboration soient soumis au mécanisme de censure de la Chine.

Alors que la Chine est effectivement devenue le plus grand marché mondial de produits culturels, le gouvernement n'a pas pour projet d'assouplir son controle sur la production. En réalité, la répression sur les activités artistiques indépendantes n'a jamais été aussi dure.

Fermeture du Festival du Film Indépendant de Pékin

Le 23 août, des officiers de police ont bloqué trois routes menant aux bureaux du Fonds cinématographique Li Xianting. Les forces de sécurité ont mobilisé des habitants locaux pour faire une descente au bureau du Fonds cinématographique Li Xianting, ont bousculé les participants au festival de film et ont confisqué leurs téléphones portables. La video ci-dessous montre la confrontation:

Les autorités ont également coupé l'électricité au bureau du Fonds cinématographique Li Xianting et confisqué les prospectus du festival et les archives de films accumulées par le fonds au cours des dix dernières années.

La police a ensuite arrêté trois organisateurs du festival, Li Xianting, Wang Hongwei et Fan Rong, et les a placés en garde à vue jusqu'à ce qu'ils signent des documents annonçant l'annulation du festival. Pour le moment, la police n'a pas porté plainte.

Li Xianting est un précurseur de l'art indépendant, un critique et programmateur. Il a dirigé un groupe d'artistes avant-gardistes dans la construction de la communauté Songzhuang après la fermeture de la communauté d'artistes Yuanmingyuan en 1995. Li avait fondé le Fonds cinématographique Li Xianting en 2006 et une école de cinéma en 2008 afin de cultiver une nouvelle génération de réalisateurs de films avec “un esprit de production créatif indépendant.”

Li Xianting, founder of Li Xianting Film Fund and Film School, was arrested and detained for several hours on the festival’s opening day. Photo from Huang Wehhai's Facebook

Li Xianting, fondateur du Fonds cinématographique et de l'école de cinéma Li Xianting, a été arrêté et détenu pendant plusieurs heures le jour de l'ouverture du festival.  Photo de Huang Wehhai Facebook 

“Le jour le plus sombre de l'histoire du film indépendant Chinois”

Film director Huang Wehai called the crackdown "the darkest day in the history of Chinese independent film.”

Le réalisateur Huang Wehai a qualifié cette répression de “jour le plus sombre de l'histoire du film indépendant chinois.”

Les organisateurs s'attendaient à un certain niveau de harcèlement policier, la police de sécurité de l'état ayant pertubé le festival au cours des dernières années. En 2012, la police avait coupé l'électricité lors de la cérémonie d'ouverture, mais le festival avait survécu de façon itinérante, réalisant des projections dans différents ateliers d'artistes à Songhunag.

Cette année, les organisateurs ont essayé de négocier avec la police le droit de diffuser les films dans un lieu isolé. Pour permettre la possibilité de projections, les documents promotionnels n'ont intentionnellement pas mentionné les lieux exacts des projections.

Les négociations ont échoué. Le festival a du faire face à la pression de différentes autorités gouvernementales, incluant le ministère de l'Education, le Bureau de l'Industrie et du Commerce, et le Bureau des Impôts. Même le Bureau de l'Immigration est intervenu, attendant à l'aéroport des réalisateurs étrangers, venus à Pékin pour le festival, pour les interroger.

Après  la fermeture du festival, les autorités de propagande chinoises ont donné des consignes de censure strictes aux principaux médias en Chine afin de supprimer toute information sur l'incident.

Les festivals tombent dans une zone grise

En Chine, tous les films prévus pour une sortie en salles doivent être approuvés par l'administration d'Etat de la Presse, de la Publication, de la Radio, du Film et de la Télévision. Etant donné que les films du festival allaient être diffusés pour une audience ciblée d'amateurs et de réalisateurs de films plutôt que diffusés largement, les festivals de films comme le BIFF tombent dans une zone grise de la censure. Si le festival est autorisé ou non dépend du climat politique du moment.

La descente au BIFF n'est pas un incident isolé. Deux autres festivals de films – le Festival Visuel Multi Culturel de Yunnan et le Festival de Films Indépendant de Nanjing ont été fermé en mars et novembre 2013. De plus, les autorités chinoises ont forcé l'école de Film de Li Xianting à fermer son programme de formation en Juillet 2013.

Li Xianting a souligné dans une interview [chinois] le 24 Août que les films indépendants sont une forme d'art, et que les films montrés expriment des émotions plutôt que des positions politiques. “Nous ne nous sommes pas impliqués dans la politique” a dit Xianting, “c'est la politique qui s'est impliqué avec nous.”

schedule of 2014 film festival - 2014 festival selections were mainly experimental films from young directors from the pan-Chinese region which were being screened publicly for the first time.

Le programme du festival de film 2014. La sélection du festival 2014 était majoritairement composée de films expérimentaux de jeunes réalisateurs de la région panchinoise, projetés publiquement pour la première fois. 

Yang Lina, une réalisatrice de documentaires indépendante, a dit a l'AP qu'elle croyait que la répression était une suppression de la liberté individuelle.

They just want us to make films about food, clothes, entertainment. They don't want people to think, they don't want people to have the freedom to express themselves, they don't want people to have independent and free ideas.

Ils veulent juste que nous réalisions des films sur la nourriture, les habits, les divertissements. Ils ne veulent pas que les gens pensent, ils ne veulent pas que les gens aient la liberté de s'exprimer eux mêmes, ils ne veulent pas que les gens aient des idées indépendantes et libres.

Eye-shut protest. Photo from Zhang Zhen's Facebook

Protestation des yeux fermés. Photo du profil Facebook de Zhang Zhen

Afin de protester contre la répression, un certain nombre d'artistes et activistes ont mis en ligne des photos d'eux même avec les yeux fermés. Des organisateurs de festivals de films à l'étranger ont également protesté. Plus de 30 organisateurs de festivals de films aux Etats Unis, en Europe, en Asie et en Amérique Latine ont co-signé une pétition exprimant leur profonde inquiétude au sujet de la confiscation par la police des archives de films, et ont exhorté les autorités chinoises à autoriser le BIFF à “poursuivre sa mission de soutien et d'exposition… des voix cinématographiques alternatives en Chine, de permettre au festival de fonctionner sans ingérence, et de permettre au Fonds cinématographique Li Xianting de continuer sa mission vitale d'archivage et de soutien des réalisateurs de films indépendants chinois.”

Cependant, tant que le Parti Communiste Chinois verra la culture comme un instrument de promotion de l'image de la nation, “comme un pays civilisé avec une histoire riche, une unité ethnique et une diversité culturelle, et comme un pouvoir d'Asie avec un bon gouvernement, une économie développée, une prospérité culturelle, une unité nationale et de magnifiques montagnes et rivières”, les esprits indépendants qui sont en désaccord avec cette vision seront vues comme des forces d'opposition à supprimer, ou à réformer. Tant que le projet de “soft power” nationaliste chinois adopte une approche autoritaire, le futur de l'art indépendant chinois est plutôt compromis.

Cet article a été commandé par Freemuse, un mouvement de défense des musiciens dans le monde, et Global Voices pour Artsfreedom.org. Cet article peut être republié par des média non-commerciaux, mentionnant l'auteur Oiwan Lam, Freemuse et Global Voices et pointant vers l'article original.

Pourquoi la Turquie n’intervient pas en Syrie ?

jeudi 16 octobre 2014 à 13:52
Manifestation pro-kurde à Paris par Jiel beaumadier - CC-BY 3.0

Manifestation pro-kurde à Paris par Jiel beaumadier – CC-BY 3.0

C’est l’interrogation du moment au sein de la sphère internationale : la ville syrienne de Kobané va-t-elle passer aux mains de l’organisation de l’Etat islamique ? Situé dans une région frontalière avec la Turquie, Ankara a déjà voté un dispositif permettant une intervention militaire. Pourtant l’armée turque n’est toujours pas intervenue au secours de Kobané. Pourquoi ?

 Des tensions entre Turcs et Kurdes

Kobané est une ville située au nord-est de la Syrie, dans une région principalement peuplée de Kurdes et qui a proclamé son indépendance vis-à-vis du régime syrien en novembre 2013. Les Kurdes représentent entre 30 et 40 millions de personnes vivant en Turquie, en Irak, en Syrie et en Iran. C’est un peuple sans pays. Or, depuis maintenant quelque temps, l’on parle de plus en plus de la création d’un Kurdistan totalement indépendant.

À la tête de cet embryon de pays se trouve un mouvement armé, le Parti des travailleurs du Kurdistan, le PKK. Ce sont d’ailleurs les forces armées du PKK, les Unités de protection du peuple kurde (YPG), qui défendent Kobané. Le PKK a été créé en 1978 en Turquie et mène depuis une guerre d’indépendance contre l’armée turque qui a déjà fait plus de 40 000 morts en trente ans.

Voilà pourquoi l’armée turque n’intervient pas à Kobané. Ankara craint qu’un Etat kurde autonome, dirigé par le PKK, ne voie le jour aux frontières de la Turquie. Pour le président turc, Recep Tayyip Erdogan, et son gouvernement « l’Etat islamique et le PKK, c’est la même chose ». Les Kurdes qui représentent pas moins de 20 % de la population de Turquie ont toujours beaucoup de mal à s’intégrer dans le régime autoritaire turc ou l’armée a toujours été prépondérante.

Un double jeu dangereux

À la frontière avec la Syrie, les chars et les combattants turcs restent inactifs alors que le Parlement de Turquie a voté le 2 octobre dernier, un dispositif autorisant une intervention militaire en Irak et en Syrie dans le but de lutter contre l’Etat islamique. Néanmoins, depuis le début des affrontements, la Turquie a déjà accueilli 200 000 réfugiés kurdes de la région de Kobané. De plus, les combattants kurdes blessés lors des affrontements à Kobané sont transférés en Turquie pour être soignés.

Des centaines de familles sont parquées ici. Nous sommes contraints de dormir à même le sol et nous ne recevons qu’un seul repas par jour de la part d’ONG, comme le Croissant-rouge turc. Ankara a autorisé ceux qui le souhaitent à traverser la frontière, mais elles refusent toujours catégoriquement de laisser passer les cheptels, les véhicules et autres engins agricoles

explique un réfugié.

Le gouvernement turc a aussi demandé la création d’une zone de tampon entre la Syrie et la Turquie afin d’accueillir les déplacés. Cette idée a d’ailleurs reçu le soutien du président français, François Hollande. À cette demande vient aussi s’ajouter l’idée de la création d’une zone d’exclusion aérienne dans le nord de la Syrie afin de protéger les secteurs tenus par l’opposition au régime syrien.

Ils (les présidents turcs et français NDLR) ont constaté leur pleine convergence de vues sur la nécessité d’aider davantage l’opposition syrienne modérée en lutte à la fois contre Daech et contre le régime de Bachar el-Assad. Le Président de la République a insisté sur la nécessité d’éviter le massacre des populations au Nord de la Syrie. Il a apporté son soutien à l’idée avancée par le Président Erdoğan de créer une zone tampon entre la Syrie et la Turquie pour accueillir et protéger les personnes déplacées

a déclaré l’Elysée.

Le gouvernement turc va vite devoir sortir de ce double jeu. Le refus de venir en aide aux habitants de la région de Kobané a provoqué des manifestations prokurdes en Turquie ce qui a obligé Ankara à mettre en place un couvre-feu dans le sud-est du pays. Si elle continue dans cette voie, la Turquie risque d’être désignée comme la responsable de ce qui pourrait être la chute de Kobané.

Le super-typhon Vongfong a fait 2 morts et plus de 70 blessés au Japon

jeudi 16 octobre 2014 à 11:42
A destroyed house saw its walls and roof on the second floor collapse due to the strong winds in Makurazaki region in Japan. 13 October 2014. Photo by rieko uekama. Copyright Demotix.

Une maison en ruines après que le toit et les murs de l'étage se sont effondrés sous les  vents violents dans la région de Makurazaki au Japon. 13 octobre 2014. Photo rieko uekama. Copyright Demotix.

Le typhon Vongfong (aussi appelé typhoon 19) a balayé le Japon, laissant derrière lui au moins deux morts et plus de 70 blessés.

Le super typhon, décrit comme l’un des plus puissants de l'année dans le Pacifique ouest, a touché terre sur la pointe sud de Kyushu, la plus méridionale des îles principales du Japon, avant de remonter tout l'archipel et de repartir en mer au matin du 14 octobre.

L'itinéraire prévu du typhon 19 au 13 octobre à 8 h. (Alertes catastrophes NHK)

Quelque deux millions de personnes ont été évacuées, et les dégâts, bien que limités, ont tout de même été importants dans les préfectures rurales isolées comme Okinawa :

Le typhon 19 provoque des dégâts étendus dans tout Okinawa, on annonce des blessés et des inondations – 12 octobre 12 (ANN News)

Les utilisateurs de Twitter de tout le Japon ont partagé des images du typhon.

Cet utilisateur, habitant d'Okinawa, s'est servi d'une vidéo en accéléré pour faire voir concrètement la chute impressionnante de la pression atmosphérique précédant l'arrivée du typhon  :

Voilà comment un sac de chips se déforme à l'approche du typhon 19… Cool !

Lorsque le typhon était au-dessus de Kyushu, il a rendu pratiquement invisible depuis l'espace la moitié occidentale du Japon :

Le Super Typhon 19 au-dessus de la préfecture de Kagoshima, vu de l'espace.

A Fukuoka, la plus grande ville de l'île de Kyushu, la tempête a été assez puissante pour déraciner des arbres :

Des arbres ont été renversés devant les magasins de Fukuoka.

De nombreuses petites villes, telles que Saiki dans la préfecture d'Oita à Kyushu, ont été menacées d'inondations par les rivières et caniveaux transformés en torrents.

Les rivières débordent à Saiki dans la préfecture d'Oita, nécessitant l'évacuation. Les rivières ne peuvent que continuer à monter avec de fortes probabilité de dégâts dans leur voisinage.

La ville de Beppu a vu passer une cataracte en fureur :

En allant à la rivière c'était un torrent furieux ! Notre petit parapluie en plastique s'est envolé et nous sommes tout trempés (MDR). Si vous tombiez dans la rivière à présent c'en serait fait de vous, il vaut mieux rester à distance !

Quand le typhon avait atteint Kanto et la région de Tokyo, il s'était dissipé, laissant derrière lui un magnifique temps d'automne :

Fujisan depuis Kawaguchiko. Beau temps après la tempête

Pourquoi autant de césariennes au Mexique ?

mercredi 15 octobre 2014 à 20:02
Privado-público

Nombre de césariennes effectuées dans les cliniques privées (gauche) et dans les hôpitaux publics (droite).

Cet article a été écrit par Daniela Guazo pour l'organe de journalisme d'investigation Fundacion MEPI, et a été publié sur leur site le 4 septembre 2014.

Quand Gabriela Ramirez a appris qu'elle était enceinte de son premier enfant, elle a décidé d'accoucher par césarienne bien qu'elle n'en ait pas eu besoin. Elle avait entendu sa mère raconter des histoires horribles sur ses trois accouchements et ne voulait rien de tout cela. Comme elle, presque la moitié des femmes du Mexique, de toutes classes sociales, ont des césariennes.

Le pays est le quatrième au monde pour le nombre de césariennes opérées en l'absence d'urgence médicale, après la Chine, le Brésil et les États-Unis. Cette opération est conçue pour les accouchements à risque et consiste à enlever le bébé par une incision chirurgicale de l'abdomen et de l'utérus.

L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ne recommande cette méthode que dans un cas sur dix. En effet, effectuer une césarienne quand elle n'est pas nécessaire triple le risque de décès ou de maladie chez la mère et augmente le risque que l'enfant développe des problèmes respiratoires.

En revanche, au Mexique, cette pratique explose, à la fois à cause du manque d'information sur les options d'accouchement naturel et des intérêts des cliniques privées et de leurs médecins, qui gagnent beaucoup d'argent à provoquer la majorité des accouchements par césarienne. 

D'après les chiffres du Système National d'Information sur la santé (SINAIS), neuf naissances sur dix se font par césarienne dans les cliniques privées et quatre sur dix dans les hôpitaux publics.

“Ces chiffres ne sont pas justifiés”, dit le docteur Christian Bayron Mera, obstétricien et directeur de la Maternité et Hôpital pour enfants Vicente Guerrero, dans l'Etat de Mexico. “80 % des mères pourraient accoucher naturellement. Il y a également plus de risques de complications après une césarienne.”

Le premier enfant de Gabriela Ramirez est né en janvier 2010 par césarienne. Malgré ses attentes, la naissance s'est mal passée. Elle a été admise dans une clinique privée dans laquelle personne ne lui a expliqué la procédure. “Je me suis sentie comme une vache. Ils vous déshabillent entièrement, ils vous nettoient, et ils vous mettent mille choses à l'intérieur. Ensuite, quelqu'un a grimpé sur moi pour presser et extraire le bébé.” Elle en est sortie traumatisée, victime d'une dépression post-partum et incapable d'allaiter son bébé. Quand elle s'est plainte, les infirmières lui ont dit : “Rien à faire.”

“Le secteur de la santé ne s'est pas soucié de créer des campagnes d'information pour les mères sur les implications d'une césarienne”, affirme Xaviera Cabada de l'organisation civile “le Pouvoir du consommateur”.

Le facteur économique

Les raisons derrière l'augmentation du nombre de césariennes sont en grande partie économiques : les césariennes sont faciles à planifier et à réaliser. Les cliniques privées facturent jusqu'à 100 000 pesos (environ 5 900 euros) pour une césarienne, dont l'opération prend un maximum de deux heures au médecin. D'un autre côté, un accouchement naturel requiert en moyenne 18 heures de travail et coûte environ 20 000 pesos (environ 1 200 euros). Les cinq Etats avec le plus grand nombre de césariennes sont le Yucatan, Nuevo Leon, Distrito Federal, Sinaloa et Tlaxcala.  

2010-2013

Dans quel Etat y a-t-il le moins de naissances naturelles ? Entre 2010 et 2013, seul un enfant sur dix est né sans intervention chirurgicale dans ces Etats.

2013

Situation générale dans les cliniques privées du pays. Ces dernières années, 80 % des accouchements effectués dans les cliniques privées du Mexique l'ont été par césarienne.

Des raisons culturelles ont également contribué à étendre cette “épidémie” au Mexique. Des images très esthétiques de femmes enceintes, ainsi que des campagnes de publicité véhiculant une idée du corps de la femme après un accouchement, ont fait croire à beaucoup qu'une césarienne assurera aux femmes le même corps parfait que dans ces publicités.

“Hollywood nous apprend que donner naissance signifie qu'on perd les eaux, qu'on s'épuise, que l'apocalypse s'arrête et qu'on commence à pousser. Ce n'est pas ça, un accouchement,” affirme Jackie Filoteo, qui travaille au Mexique en tant que sage-femme et doula, c'est-à-dire une professionnelle qui a de l'expérience avec les accouchements et qui aide les parents pendant la naissance.

Et les hôpitaux publics ?

Le Ministère de la Santé a institué un maximum de 20 % de césariennes dans les institutions publiques. Malgré cela, 33 % des naissances dans les hôpitaux le sont par césarienne, et cette proportion augmente chaque année. Par exemple, à l'Institut de la Sécurité Sociale et des Services aux Fonctionnaires d'État (ISSSTE), sept enfants sur dix naissent par des procédés chirurgicaux.

SecretaríaSalud

Dans le SSA, trois naissances sur dix se font par césarienne, alors que sa propre norme fixe un maximum de 20 %.

La raison derrière ces chiffres élevés est différente pour les hôpitaux publics. Bien qu'il soit plus coûteux pour l'Etat de procéder à une césarienne qu'à une naissance vaginale, le facteur déterminant dans les institutions publiques est le manque de lits et de médecins : le déficit est estimé à 50 %. Pour s'occuper de l'ensemble de la population maternelle, les hôpitaux doivent procéder aux accouchements rapidement et le choix se porte toujours sur la césarienne.

Trois milliards de pesos (environ 176 millions d'euros) pourraient être économisés chaque année si l'Institut de Sécurité Sociale de Mexique (IMSS, s'occupant de trois mères sur dix se tournant vers le secteur public) réduisait à lui seul le nombre de césariennes pratiquées à une sur dix. D'après l'Étude Nationale Santé et Nutrition 2012, chaque césarienne coûte 21 600 pesos à l'Etat (environ 1 300 euros).

“Chaque femme a besoin d'une sage-femme, et certaines, d'un obstétricien.”

La Maternité et Hôpital pour enfants Vicente Guerrero de l'Etat de Mexico effectue 18 accouchements par jour, mais ne possède que cinq lits. Son infrastructure est saturée par l'importance de la population ayant besoin de ses services. Pour répondre à ces besoins, le Dr Christian a introduit un modèle qui utilise obstétriciens, sage-femmes, doulas et infirmières périnatales. Pour lui, l'intervention de ces professionnels est efficace pour les hôpitaux car ils gèrent les cas les moins compliqués, pendant que les obstétriciens-gynécoloques se concentrent sur les accouchements à risque.

Jackie Filoteo est l'une des doulas qui travaillent à l'hôpital Vicente Guerrero. Forte de six années d'expérience comme sage-femme et doula, elle explique qu'il y a plusieurs techniques pour améliorer les conditions de l'accouchement. Par exemple, mettre les mères dans différentes positions peut raccourcir la durée de l'accouchement.  

“Une sage-femme peut facilement s'occuper de tous les cas pour lesquels il n'y a aucun risque imminent”, dit-elle.

Gabriela a eu son second enfant il y a huit mois. Cette fois, elle a essayé un accouchement naturel. Sa doula était Jackie Filoteo. Malgré tout, sa situation est devenue délicate vers la fin : sa tension artérielle est montée et une césarienne est devenue nécessaire.

Jackie, sa doula, fut à ses côtés pendant toute la procédure. Elle lui a procuré des soins d'aromathérapie et a diffusé de la musique dans la salle d'opération, tout en lui expliquant chaque geste des médecins. “Ici, je me suis sentie humaine. Dans l'autre hôpital, je me suis sentie comme une vache,” dit la seconde-fois maman.