PROJET AUTOBLOG


Global Voices (fr)

Archivé

source: Global Voices (fr)

⇐ retour index

Un journaliste remercié pour avoir critiqué l'occupation de la Crimée sur Facebook

dimanche 16 mars 2014 à 23:00
An "unidentified" soldier is defending this Russian-speaking cat. "Thanks for the fact that I'm no longer a "kit"" (Ukrainian for "cat" (kit) is a homonym of Russian for whale (kit)). Anonymous image found online.

Un soldat russe “non identifié” défend un chat russophone. “Merci, je ne suis plus une baleine.” (Le mot “chat” en ukrainien (kit) est l'homonyme du mot “baleine” en russe.) Image anonyme trouvée en ligne.

A un moment où l'on parle beaucoup de la censure du gouvernement sur les médias et l’internet russes, parlons un peu de l'autocensure, bien plus en vogue dans les agences d'information, au moins au niveau local. Avec ce fait récent : un journaliste de Perm a été licencié pour avoir re-posté un post Facebook plutôt anodin, quoique un peu incisif.

L'original date du 4 mars 2014, et il est l'oeuvre de Roman Romanenko, de la région de Volgograd. Romanenko, qui lui aussi travaille dans les médias, s'adresse ironiquement à Poutine lui demandant d'”envoyer des soldats” dans la région de Volgograd pour défendre les droits des habitants “russophones”. Romanenko fait bien sûr allusion à l'occupation de la péninsule de Crimée par les troupes russes (les fonctionnaires russes niant alors que leurs troupes s'y trouvent). Voici ce qu'il écrit:

Мы тут все сплошь русскоязычные и наши права очень ущемляются. Наши больные не могут получить нужных им лекарств и лечения, уровень нашего образования падает с каждым годом [...] А еще мы узнали, что вы собираетесь потратить много денег, чтобы нормализовать жизнь в Крыму. Стесняемся спросить: можно ли потратить эти деньги на нормализацию жизни в Вологодской области. А то наша область в такой долговой яме, что ни на что денег не хватает. А нам очень нужны мосты, дороги, спортивные сооружения, промышленные объекты, новые рабочие места…

Tous tant que nous sommes ici, nous sommes russophones, et nos droits sont réellement bafoués. Nos malades ne peuvent pas recevoir les soins et les médicaments dont ils ont besoin, notre niveau d'instruction chute un peu plus tous les ans [...] Et voilà qu'on nous apprend que vous allez dépenser beaucoup d'argent pour normaliser la vie en Crimée. Ne pourrait-on consacrer cet argent à normaliser la vie dans la région de Volgograd ?, oserons-nous demander. La dette de notre région est si abyssale qu'il n'y a de fonds pour rien. Pourtant il nous faut des ponts, des routes, des équipements sportifs et industriels, de nouveaux postes de travail…

Alexandre Erenko, un journaliste de Perm, a reposté ce texte sur son mur Facebook, en remplaçant la région de Volgograd par la sienne propre. Bien que sa note n'ait été partagée que 44 fois, à comparer aux 3323 reposts de l'original de Romanenko, il est clair qu'elle a fini par arriver jusqu'à l'un de ses supérieurs. Erenko a été licencié dans l'heure, fait savoir  ”L'Echo de Perm” (édition locale de “L'Echo de Moscou”).

En même temps, Romanenko n'a pas été le seul à voir une différence entre la façon dont Moscou défend ses ressortissants potentiels en Crimée et ses propres citoyens. Cet tweet de la blogueuse Irina Petrovaïa a été retweeté presque mille fois, et en particulier par l'opposant russe Alexeï Navalny (bien qu'il soit assigné à résidence et théoriquement privé de lien avec le monde extérieur):

Le gouverneur de la région de Moscou qui prélève 40 millions de roubles sur le budget de la région pour les affecter à la reconstruction d'un hôpital en Crimée. Dingue !! Est-ce ce qu'il a déjà mis les pieds dans un hôpital de la banlieue moscovite ???

Le sultan de Brunei menace ceux qui critiquent la Charia

dimanche 16 mars 2014 à 22:35
Sultan Omar Ali Saifuddin Mosque in Brunei. Image from Flickr page of Jim Trodel (CC License)

La mosquée du Sultan Omar Ali Saifuddin. Image de la page Flickr de Jim Trodel (CC License)

Le sultan de Brunei Hassanal Bolkiah a averti ceux qui critiquent la Charia sur le Net qu'ils pourraient faire face à des poursuites judiciaires quand le nouveau Code pénal prendra effet, le mois prochain : 

Il ne leur est plus donné la liberté de poursuivre leurs moqueries et si il y a des éléments pour les amener devant un tribunal, alors, la première phrase de la loi Syariah (loi pénale) applicable à partir d'avril leur sera applicable. 

Le Sultan a fait cette déclaration lors de la 30ème fête nationale, après les nombreuses critiques des cyber-citoyens qui ont réagi négativement à la décision du gouvernement de mettre en place la Charia dans le Code pénal.

Le Brunei est un pays majoritairement musulman. C'est une monarchie où le Sultan est également le premier ministre et exerce un pouvoir absolu sur le gouvernement et la société. Le sultan est aussi l'un des hommes les plus riches du monde. 

La Charia est actuellement appliquée dans le pays mais est limitée aux questions personnelles et familiales. Mais à partir du 1er avril, le périmètre des sanctions sera étendu, incluant la lapidation pour adultère, l'amputation des membres pour vol, la flagellation pour des atteintes à la Loi telles que l'avortement, la consommation d'alcool et l'homosexualité. On y trouve également la peine capitale pour le viol et la sodomie. Le sultanat de Brunei est le premier pays d'Asie du Sud-Est à appliquer la Charia au niveau national. 

Le Sultan semble avoir été contrarié par les commentaires sur les réseaux sociaux qui critiquaient la Charia. Dans son discours, il a mis en garde son peuple, lui demandant de se méfier des internautes qui insultent les lettrés et responsables gouvernementaux islamiques du Sultanat :

 Nous devons être sage et prudent en récoltant ses bénéfices. Autrement, si nous sommes négligents et abusons (de cette technologie), les effets néfastes ne seront pas uniquement visibles sur les individus mais sur la nation dans son intégralité.

Ils utilisent de nouveaux médias commes des blogs, WhatsApp, etc. qui ne sont pas uniquement accessibles par les citoyens de Brunei, mais également par l'étranger.

…(…) cela constitue un challenge pour la nouvelle génération qui doit se tenir solidement en ligne avec les aspirations du pays et ne doit pas être influencée par ces éléments irresponsables qui souhaitent provoquer un désordre international ou instiguer un conflit, et qui ne respectent pas leurs responsables ou leur gouvernement. 

Réagissant au discours du Sultan, Sam Zarifi de la Commission Internationale des Juristes (ICJ) a exhorté le sultanat de respecter les points de vues dissidents de ses citoyens : 

La déclaration du Sultan Hassanal Bolkiah montre que les droits de l'homme, en particulier la liberté d'opinion et d'expression, sont largement méprisés par les autorités à Brunei. 

Des débats libres et ouverts sur des sujets comme la promulgation d'une loi sont les pierres angulaires d'une société démocratique. 

Plus tôt, le ICJ avait déclaré que le Code pénal était incompatible avec l'engagement du Brunei à adhérer à des accords internationaux sur les droits de l'homme. Notament, l'ICJ est profondément déçu de la réintroduction de la peine de mort dans le pays : 

Si elle était mise en place, la loi mènerait à de sérieuses violations des droits de l'homme en réintroduisant la peine de mort et en imposant d'autres châtiments cruels et inhumains, dont la lapidation, pour des comportement qui ne seraient même pas considérés comme criminels.

Le sultanat de Brunei n'a pas appliqué la peine de mort depuis 1957.

L'ICJ a aussi envoyé une lettre au gouvernement demandant la clarification sur des dispositions qui pourraient, selon eux, restreindre leur liberté d'expression :

……nous notons, cependant, que les dispositions du Code pénal 2013, pénalisent à la fois les musulmans et les non-musulmans pour l'impression, la dissémination, l'importation, la diffusion et la distribution de publications “contraire à la Charia” (Articles 213, 214, et 215). Nous considérons que ces dispositions constituent des restrictions injustifiées de la liberté de religion et violent les droits à la liberté d'expression et d'opinion.

Une fois que la Charia prendra effet, les non-musulmans n'auront plus le droit d'utiliser 19 mots pour parler des autres religions. Parmi ces mots, on trouve “Allah“, “mu’min” (croyant) et “masjid” (mosquée).

Le blog Malaysian Insider a mis en avant le commentaire d'un lecteur qui s'inquiète de la stricte application de la Charia le mois prochain : 

C'est vraiment effrayant de penser que nous pourrions potentiellement être lapidés pour avoir été amants, que nous pourrions avoir une amende à cause d'une orientation sexuelle différente et que notre tenue sera réglementée.

Mais le professeur Najibah Mohd Zin, une femme universitaire, croit qu'une mise en place adéquate de la loi ne créera pas de problèmes sociaux : 

Nous devons accorder l'attention adéquate à sa mise en place. Nous ne souhaitons pas voir de divergences ; sinon, ce ne sera pas juste. Nous voulons atteindre la justice mais si ce n'est pas juste ce sera un revers pour les pays musulmans.  

Je pense que la population devrait très bien connaitre la loi. Les gens devraient apprendre la façon dont ça fonctionne dans un contexte moderne, plutot que de la regarder d'un point de vue négatif. Nous n'appliquons pas la loi à notre époque, c'est pour ça que nous avons de nombreux problèmes sociaux.

Le discours du Sultan révèle un réel danger d'instrumentalisation de la Charia, non pour promouvoir l'harmonie au sein de la société mais pour réprimer la liberté d'expression et les débats. 

Un drone filme la beauté des paysages cambodgiens

dimanche 16 mars 2014 à 16:47
Cambodian countryside

Paysage cambodgien

Alors qu'il tournait un documentaire au Cambodge, le réalisateur Roberto Serrini a pris le temps de visiter plusieurs villes et villages à travers le pays. Son équipe a utilisé un drone DJI Phantom et une caméra GoPro pour capturer la beauté fascinante du Cambodge. Il décrit le tournage comme étant une “expérience extraordinaire” :

À Phnom Penh et au village de Anluk Leak, j'ai pu explorer la beauté cinématographique de cette terre depuis le ciel.

Ce fut une expérience vraiment extraordinaire parce que la plupart de ces enfants n'avait jamais vu une télévision en état de marche et encore moins un drone en plein vol ; quel régal de voir sur leurs visages ce mélange d'excitation, d'appréhension et d'étonnement émerveillé.

Voici ci-dessous par ailleurs quelques-unes des photos sur Flickr du voyage de Roberto au Cambodge :

A rural scenery in Cambodia

Paysage rural au Cambodge

A temple in Phnom Penh, Cambodia's capital

Un temple de Phnom Penh, capitale du Cambodge

A monk walking in a community plaza

Un moine bouddhiste traversant une place publique

Cambodia's tuktuk, a popular mode of transport

Le tuk-tuk cambodgien, un mode de transport populaire

A temple in Phnom Penh

Un temple de Phnom Penh

Cambodia's tuktuk, a three-wheeled public vehicle

Le tuk-tuk cambodgien, un taxi à trois roues

*Vidéo et photos de Roberto Serrini, utilisées avec autorisation.

Où en est la tech africaine ?

dimanche 16 mars 2014 à 14:38

Longtemps délaissé, le continent africain apparaît comme la nouvelle frontière mondiale du développement numérique. Ce développement provoque une nouvelle impulsion entrepreneuriale en Afrique, et notamment en Afrique francophone. Mais ce potentiel reste très largement méconnu en Europe ainsi qu'en France, y compris au sein de la communauté Tech nationale, la French Tech. 

Pour y remédier, Samir, auteur du blog spécialisé sur les start-ups des pays émergents Startup BRICS, organise une mission de terrain en financement participatif, dans le cadre du projet TechAfrique, pour identifier et recenser les initiatives tech, les start-ups, les Fablabs, et autres lieux de créativité tech en Afrique francophone et au Kenya.

Crimée : La fraude russe au bulletin de vote qui n'en était pas une

dimanche 16 mars 2014 à 13:30

 

The Kremlin's ballot scheme in Crimea that probably never happened. Images mixed by author.

La manipulation électorale du Kremlin en Crimée qui n'a sans doute pas eu lieu. Photomontage de l'auteur.

[Liens en russe] En Crimée se tient aujourd'hui dimanche, 16 mars 2014, un référendum qui doit déterminer si la république autonome restera dans le giron ukrainien sous un statut d'autonomie élargie ou si elle demandera son absorption dans la Fédération de Russie. Ces deux dernières semaines, les nouvelles autorités de Kiev fulimnaient contre le scrutin, avec l'argument que le parlement de Crimée n'est pas compétent pour enclencher la sécession sans participation du gouvernement central.

Des internautes russes ont déduit d'images circulant en ligne que des hauts-fonctionnaires sembleraient vouloir exclure également leur propre électorat de la procédure de vote.

La photo au centre du scandale de falsification des bulletins de vote.

Le 12 mars, le blogueur Rustem Adagamov publiait des photos d'un reportage pour Itar-Tass de Sergueï Fadeïchev sur les préparatifs du référendum à travers la Crimée. Sur une des photos (ci-dessus), un jeune homme déplace ce qui ressemble à une pile de bulletins de vote. A peine ces images publiées par Adagamov, des lecteurs attentifs ont rapidement remarqué que les feuilles de couverture sur les paquets étaient imprimées avec les votes sécessionnistes déjà cochés.

Le site web freejournal.biz s'est emparé du bavardage sur le blog d'Adagamov, et en a fait un article titré “Les bulletins de vote en Crimée déjà complétés dans le bon sens.” Le texte citait également un entrée sur Facebook du député à la Rada ukrainienne Oleksandr Briginets, où il reprenait une information de seconde main que des ressortissants russes étaient amenés en bus à Simféropol pour bourrer les urnes en faveur de la sécession. “Maman et beaucoup de gens qui habitent Feodossia [fr] ont vu ces bus !!!” a écrit M. Briginets le 13 mars.

Selon le moteur de recherche de blogs de Yandex, il y a 780 pingbacks distincts du billet de freejournal.biz, autrement dit, des centaines de blogueurs russes, écrivant pour la plupart sur Vkontakte et Twitter, ont partagé cet article, en exprimant généralement leur indignation contre la fraude électorale apparemment planifiée pour ce dimanche.

Agrandissement des tracts sécessionnistes du référendum de Crimée.

A y regarder de plus près, pourtant, les bulletins de vote falsifiés de la photo sur le blog d'Adagamov pourraient n'être autres que des tracts réalisés par des agitateurs pro-russes. Le jour de la publication des images par Adagamov, le quotidien RBK Daily faisait paraître sa propre photographie—un agrandissement—des mêmes documents (ci-dessus), qu'il identifiait comme des tracts produits par une section locale du Parti des Régions.

Certes, les tracts ont été conçus pour être presque identiques aux véritables bulletins de vote. A deux importantes différences près toutefois. Contrairement au bulletin de vote officiel annoncé au début de la semaine par le président de la consultation de Crimée Mikhaïl Malyshev, les tracts ont été imprimés sur papier blanc. (Les véritables bulletins de vote le sont sur papier jaune.) La dimension des tracts semble également supérieure à celle publiée par M. Malyshev mardi. Et enfin, bien sûr, il y a la marque d'un rouge tonitruant sur les tracts. Si on regarde attentivement l'image de RBK, on verra que la case autour de la marque n'est pas tout à fait fermée. Il y a un tout petit espace blanc, qui rend impossible de même croire que le vote a été effectué après l'impression du bulletin.

Cela veut-il dire pour autant que la Russie n'essaiera pas de voler le référendum dimanche ? Absolument pas. Mais cette photographie particulière et la réaction qu'elle provoque en ligne laisse prévoir que les Russes ne tomberont pas des nues si le vote est arrangé. Ils sont maintenant prêts à croire le pire, même sur des preuves risiblement indirectes.