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Les succès de l'extrême-droite européenne confortent les Russes

jeudi 5 juin 2014 à 20:17
French politician Marine Le Pen has filled many Russians with the hope that they aren't alone in skepticism about the EU. Images mixed by Kevin Rothrock.

La politicienne française Marine Le Pen renforce de nombreux Russes dans leur euroscepticisme. Photomontage de Kevin Rothrock.

Alors que les relations entre Moscou et l'Europe n'ont jamais été aussi détestables depuis vingt ans, les Russes suivent avec intérêt les récents succès électoraux des partis d'extrême droite au Parlement européen. Si cette évolution inquiète à l'intérieur de l'Europe, beaucoup de Russes saluent dans cette vague d'euro-scepticisme la justification de la posture anti-Union Européenne de Moscou.

Le lendemain des scrutins en Europe et Ukraine, le blogueur et éditorialiste pro-Kremlin Maxim Kononenko écrivait sur Facebook :

Общечеловеческие ценности это, конечно, прекрасно, но в первую очередь у людей существуют свои собственные ценности, которыми они не хотят поступаться неизвестно ради чего. И процент, получаемый партиями евроскептиков от года к году неизменно растет. То есть, Украина голосует за интеграцию с Европой, а Европа в тот же день голосует за собственную дезинтеграцию. И не знаю, как вам, а лично мне кажется, что это движения в несколько разных направлениях.

Les valeurs humaines universelles, c'est très bien, évidemment, mais les gens ont en premier lieu leurs valeurs personnelles, auxquelles ils ne veulent pas renoncer pour de l'inconnu. Et le pourcentage obtenu par les partis eurosceptiques augmente d'année en année. C'est-à-dire que l'Ukraine vote pour l'intégration à l'Europe, alors que l'Europe, le même jour, vote pour sa propre désintégration. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais cela me semble personnellement être des mouvements dans des directions opposées.

La femme politique française Marine Le Pen s'était gagné une large attention sur l'Internet russe en mars 2014, quand elle avait reconnu les résultats du référendum sécessionniste de Crimée. En l'espace de quelques heures après sa déclaration, le microblogueur populaire russe Konstantin Rykov avait lancé une campagne Twitter “Merci Marine !” invitant ses abonnés à lui adresser des mots de remerciement. Selon un portail d'information basé à Kharkov, des milliers de Russes ont apporté un soutien actif à l'initiative de Rykov en envoyant une avalanche de “merci” sur la timeline Twitter de Mme Le Pen. Depuis, la popularité de la présidente du Front National ne se dément pas chez les blogueurs russes. Et Rykov a même créé un compte Twitter spécial, où il cite les propos favorables à la Russie de Mme Le Pen. D'autres utilisateurs russes de Twitter se plaisent à traduire ses déclarations sur le droit du “grand peuple russe” à viser sa “réunification.” Une traduction de ce genre (voir ci-dessous) le 26 mai 2014 a ainsi attiré près de 300 retweets.

Marine Le Pen : Les Français ont voté voté pour le rejet de l'Union Européenne. [Sur l'image : "Nous devons tous reconnaître le droit à la réunification du grand peuple russe vivant tant en Russie que sur la rive gauche du Dniepr."]

Dans l'enthousiasme général, peu de Russes font preuve d'une compréhension totale des programmes réels des politiciens d'extrême-droite européens. Les médias russes minimisent soigneusement l'islamophobie, l'antisémitisme, et autres aspects déplaisants. Apparemment, de nombreux experts commentateurs, plutôt que d'explorer les nuances complexes des “euro-conservateurs pro-Russie,” préfèrent dépeindre simplement cette droite européenne comme des patriotes défenseurs de la souveraineté nationale. Des articles d'opinion paraissent sous des titres comme “Fête de l'indépendance britannique” ou “La libération d'une ‘Europe des Nations'’”.

Avec pareille présentation, les Russes voient communément la droite populiste européenne sur le chemin d'une coalition unique, qui entreprendrait des réformes majeures dans l'UE. Que pareille conjecture soit réaliste ou pas, la société civile russe est déjà prête à applaudir ce tournant.

Il est sans doute vrai aussi que cette année a été la première dans l'histoire où les Russes ont suivi les élections au Parlement Européen avec un intérêt notable. Petit exemple, Tutuskania, une Russe qui blogue sur LiveJournal depuis Paris, est devenue momentanément populaire le jour des élections, quand elle a publié un photo-reportage satirique avec images de militantes des Femen prêtes à “vacciner” contre le “fascisme” de Marine Le Pen.”

До ее прихода, около школы, где был избирательный участок, полуобнаженные представители Фемен со шприцами уговоривали избирателей сделать прививку против расизма. Когда Марин пришла голосовать, их уже не было. Журналисты забросали ее вопросами, видела ли она Фемен. “Вам повезло, а мне нет”, отшутилась Марин.

Avant son arrivée [de Mme Le Pen], près d'une école servant de bureau de vote, des représentantes à demi-nues des Femen avec des seringues persuadaient les électeurs de se faire vacciner contre le racisme. Quand Marine est venue voter, elles n'étaient plus là. Les journalistes l'ont étourdie [Marine Le Pen] de questions pour savoir si elle avait vu les Femen. “Vous avez eu de la chance, et pas moi,” a esquivé Marine d'un bon mot.

Tutuskania conclut son billet sur LiveJournal en proposant :

Если интересно, могу поподробнее рассказать, как Францию и Европу колотит от этой победы ; отмечайтесь в каментах.

Si ça vous intéresse, je peux vous raconter en détail comment l'Europe et la France sont secouées par cette victoire [de Marine Le Pen]. ; mettez-le dans les commentaires.

Des dizaines de lecteurs de Tutuskania ont répondu, affirmant qu'ils souhaitaient effectivement en savoir plus sur les conséquences des succès de l'extrême-droite dans l'UE. Même si ces discussions de RuNet sur la droite populiste en Europe restent au ras des pâquerettes, l'intérêt tout neuf des Russes pour la politique européenne est indéniable. Dans cette nouvelle ère de tensions plus fortes entre la Russie et l'Union Européenne, on peut raisonnablement s'attendre à ce que l'intérêt des Russes pour ce sujet ne soit pas près de retomber.

Sahar Habib Ghazi succède à Solana Larsen en tant que directrice éditoriale de Global Voices

jeudi 5 juin 2014 à 09:07
Outgoing Managing Editor, Solana Larsen (L) will be succeeded by Sahar Habib Ghazi (R)

 Solana Larsen (à gauche) directrice éditoriale de Global Voices sera remplacée par  Sahar Habib Ghazi 

En cette fin de mois de mai, nous saluons le départ de notre directrice éditoriale, Solana Larsen, et accueillons la même Solana Larsen comme nouvelle auteure de Global Voices. 

Solana quitte les fonctions de directrice éditoriale de Global Voices qu'elle occupe depuis sept ans. On cite souvent des “raisons personnelles” pour expliquer un départ, mais dans le cas de Solana, il s'agit vraiment d'une volonté de pouvoir consacrer plus de temps à sa vie de famille, et en particulier à sa petite fille de deux ans.  ”C'est mieux à la fois pour moi et pour Global Voices” a-t-elle écrit dans un email adressé à la communauté des auteurs et traducteurs de Global Voices “de me retirer maintenant et de permettre ansi à des choses nouvelles de naitre.”

Solana a conduit d'une main sûre la rédaction de Global Voices durant une période de rapide mutation des nouveaux médias, durant laquel le blogging a été éclipsé par les réseaux sociaux comme principale plateforme d'expression des internautes. Nous sommes heureux qu'elle reste parmi nous en tant qu'auteure mais également pour travailler sur des projets annexes et qu'elle nous représente lors d'interventions dans des conférences. 

Solana confie la direction éditoriale de Global Voices aux mains excellentes de Sahar Habib Ghazi, qui nous a rejoint en tant que rédactrice-en-chef adjointe en juin 2012.

Sahar est journaliste et blogueuse, elle vit entre les Etats-Unis et le Pakistan. Elle a contribué à la création de Dawnnews TV et a écrit pour le New York Times. Durant ses études à Stanford en tant que boursière de la fondation John S. Knight pour le journalisme, elle a créé Hosh Media, une plateforme en ligne de journalisme pour les jeunes.  

Sahar a beaucoup fait pour la création de la nouvelle charte éditoriale de Global Voices, pour rationaliser nos multiples processus internes d'édition, et a créé une équipe d'éditeurs adjoints. Elle est avant tout très compétente et très attachée à la communauté Global Voices. Nous lui faisons entièrement confiance pour accompagner notre rédaction vers de nouveaux horizons.

Le Yémen est aussi “Happy” !

mercredi 4 juin 2014 à 19:53

Malgré des conditions de vie difficiles, de longues et fréquentes coupures de courant, l'insécurité et la vie politique instable et une réputation médiatique négative, un groupe de Yéménites a réussi à montrer au monde qu'ils sont la preuve vivante du nom du pays dans l'Antiquité : “Arabia Felix” ou Arabie heureuse. Le Yémen était appelé Arabie Felix, Arabie heureuse, Arabie fertile – un nom donné par le géographe grec Ptolémée. Ce nom fait référence à ses hautes montagnes qui attiraient la pluie et faisaient de ses terres les plus fertiles de la péninsule d'Arabie. 

Le reprise du tube Happy de Pharrell William a été créée avec une touche yéménite, mettant en évidence la créativité et le talent, l'esprit positif et le sens de l'humour de la jeunesse du pays. 

La vidéo a été produite en coopération avec Support Yemen et Gabreez et a été co-réalisée par Abdurahman Hussein et Ameen Alghabri, deux réalisateurs nomminés aux Oscars.

Fazli Corman, ambassadeur turc au Yémen, a tweeté : 

Quel pays sur Terre peut se prévaloir d'avoir Happy dans son nom antique… Le Yemen, bien sûr ou Arabia Felix

— Fazli Corman (@FazliCorman) May 24, 2014

Mareike Transfeld, chercheuse au centre d'étude Yemen Polling, a tweeté au chanteur Pharell :

Pharrell, regarde ça ! La vidéo officielle #Happy du Yemen par des nominés aux Oscar @AfroHussain & @AmeenAlghaberi, soutenons le Yemen

— Mareike Transfeld (@projectyemen) May 23, 2014

Awssan Kamal, membre de SupportYemen, tweete :

La vidéo Happy du Yemen met aujourd'hui la lumière sur la jeunesse yéménite. Soutenez le Yemen sur Youtube
— awssan kamal (@awssan) May 24, 2014

Mohammed Jamjoum de CNN ajoute :

Encore une nouvelle preuve que le peuple du Yemen est  incroyable, leur version de “#Happy”, magnifiquement montée avec la technique des ‘pauses durant les coupures de courant'.
— Mohammed Jamjoom (@JamjoomCNN) May 24, 2014

La blogueuse yéménite Afrah Nasser, vivant en Suède, voit les choses différemment. Elle tweete :

Nouvel article sur le blog : Le Yémen est plus résilient qu'heureux.
— Afrah Nasser (@Afrahnasser) May 24, 2014

Rooj, un cofondateur de Support Yemen, qui connaît les difficultés de la vie au Yémen et apparaît également dans la vidéo, commente avec enthousiasme : 

Alors que les médias nous décrivent comme déprimés et devant être secourus, voilà notre réponse. #HappyYemen https://t.co/LPrk3B40na
— Rooj (@Rooj129) May 23, 2014

“Malgré nos difficultés notre bonheur ne s'arrêtera pas” est un message clair témoignant de la détermination des Yéménites. 

Des expressions typiques du Venezuela illustrées et traduites en anglais

mercredi 4 juin 2014 à 16:19

Tous les liens renvoient vers des pages en anglais, sauf mention contraire.

Sur son blog Venezuelan Sayings, l’illustratrice Daisy Patton met en images des expressions vénézuéliennes typiques, qu’elle traduit aussi en anglais. Ses illustrations, pleines de couleurs et d’humour, laissent transparaître une interprétation personnelle des expressions locales, une vision candide d’une culture qui cherche à en comprendre une autre à travers l’usage du langage familier.

Dans la description de son blog, on peut lire :

My Venezuelan husband often uses colloquialisms from his culture to describe situations we find ourselves in. These are my illustrations of them. Consider them “más criollo que una arepa” ["more local than an arepa"]

Mon mari est vénézuélien et utilise souvent des expressions familières tirées de sa culture pour décrire les situations dans lesquelles nous nous trouvons. Ces expressions, je les ai illustrées et publiées sur ce blog. Figurez-vous qu’elles sont encore « plus typiques et représentatives du pays que l’arepa [en français] ».

Nous avons pu échanger quelques mails avec Daisy. Dans l'extrait suivant, elle nous en dit un peu plus sur la création du blog ainsi que sur les difficultés et le plaisir de traduire non seulement la langue mais aussi le contexte :

I've been with my husband for almost 8 años [years], and he would frequently translate dichos [sayings] into English, leaving me very confused. Because the Venezuelan sayings are so distinctive, I started writing them down to share with our friends, since they seem so different but wonderfully imaginative. The project has grown from just being the refranes he's said to suggestions from Venezuelans all over the world now. I see it now as a collaborative project that is collecting this cultural ephemera, with the understanding that I'm of course an outsider looking in.

Cela fait maintenant 8 ans que je suis avec mon mari. Il a pour habitude de traduire des expressions vénézuéliennes en anglais, ce qui me laisse à chaque fois perplexe. C’est parce les expressions vénézuéliennes sont si particulières que j’ai commencé à les mettre par écrit pour pouvoir ensuite en faire part à nos amis ; elles ont quelque chose de différent mais sont de vraies merveilles d’originalité. Alors que le projet ne consistait au départ qu’en un recueil d’expressions de mon mari, il est désormais alimenté par les suggestions de Vénézuéliens du monde entier. C’est pour moi un projet collaboratif ayant pour but d’immortaliser des fragments de mémoire culturelle.  Je me positionne, bien sûr, comme un observateur extérieur.

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Image utilisée avec l’accord de Daisy Patton.

Pour ce qui est du travail de traduction, Daisy explique :

It's hard to explain puns, slang, or things that reference something historically or locally known, like games, locations, or historical figures, regardless of language. Much of the time, when my husband Enrique has said a dicho [phrase], I have no idea what he means at all without some explanation (such as me dieron gato por liebre/I was given cat instead of hare), while others make sense once you hear them (like la última coca-cola del desierto/last Coke in the desert).

Ce n’est pas toujours évident d’expliquer, quelle que soit la langue, les jeux de mots et l’argot, ou encore les références historico-culturelles comme les jeux, les lieux et les personnages historiques. La plupart du temps, quand mon mari Enrique utilise une expression, je n’ai pas la moindre idée de ce qu’elle signifie jusqu’à ce qu’il me l’explique (comme me dieron gato por liebre/on m’a donné un chat au lieu d’un lièvre). D’autres expressions sont plus transparentes (comme la última coca-cola del desierto/le dernier Coca du désert).

Daisy nous parle de la multiplicité et des différences des expressions :

I've learned a great deal about how variable and interesting Venezuelan culture is just from [the variety of sayings]. Anything from exact meaning, to wording, can be slightly or completely different, depending on generation and location. I've had many people contact me to either tell me that I was wrong, or that they've never heard of one, or that they're common in other Latin American countries (which makes sense). In some posts, I've literally had someone state that the saying was incorrect or didn't exist and another five people sharing it and stating how they use it all the time and thought it was hilarious!

Rien qu’à partir de la multiplicité d’expressions, j’ai appris tout un tas de choses sur la culture vénézuélienne et ai mesuré à quel point celle-ci pouvait être diversifiée et intéressante. Leur signification précise, leur formulation peuvent s’avérer légèrement ou parfois même complètement différentes selon la génération ou la région. De nombreuses personnes m’ont contactée pour me dire soit que ma traduction était fausse, soit qu’elles n’avaient jamais entendu l’expression en question, soit que cette dernière était aussi utilisée dans d’autres pays d’Amérique latine (ce que je veux bien admettre). Il est déjà même arrivé qu’une personne commente une publication en disant que l’expression est incorrecte ou qu’elle n’existe pas, et à laquelle cinq autres personnes ont répondu qu’elles l’utilisaient sans arrêt tant elles la trouvaient drôle !

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Image utilisée avec l’accord de Daisy Patton.

L’illustratrice reçoit régulièrement des suggestions et continue à illustrer des expressions ainsi qu’à les traduire. Le blog est mis à jour fréquemment et prend peu à peu la forme d’un catalogue d’images typiques, utilisées et disséminées par le langage dans les différentes régions du pays.

Linda Jaivin : sexe, sinologie et traduction

mercredi 4 juin 2014 à 11:19
Linda Jaivin

Linda Jaivin – Photographie : Jade Muratore

Linda Jaivin aurait pu être une femme de la Renaissance, et se définit comme une ‘humaniste séculière'. Elle est née à New London, dans le Connecticut (États-Unis), et est citoyenne australienne depuis plus de vingt ans, après avoir étudié et travaillé de nombreuses années à Taïwan et en Chine.

L'activité de Linda est extraordinaire. La liste des casquettes qu'elle endosse inclut : traductrice, interprète, éditrice d'anthologies, poète, romancière et dramaturge. Ses œuvres écrites englobent des nouvelles, des essais, des romans parmi lesquels le comico-érotique “Eat Me”, de la fiction historique, comme son “A Most Immoral Woman” ; et des oeuvres biographiques comme “Confessions of an S & M Virgin” qui a fait scandale.

Les adjectifs qui décrivent Linda : intéressante, stimulante, excentrique, provocatrice, originale, salace, “graphomaniaque”. Ses écrits et conversations nous entraînent sur des terrains complètement inhabituels et inattendus. Même si à un moment donné elle a pu choquer une grande partie de son lectorat, Linda a contribué à développer une plus grande franchise dans le débat public. Comme le montre l'interview filmée du Wheeler Centre [en], elle peut se montrer indiscrète, mais de la manière la plus amicale qui soit.

Il y a bien plus que du sexe, de la drogue et du rock ‘n’ roll dans la boîte à malice de Linda. Qu'elle soit en train d'explorer la place Tiananmen ou d'examiner le traitement réservé aux réfugiés, sa façon d'allier la sphère personnelle à celle de la politique ne laisse pas de place au politiquement correct. Elle apparaît régulièrement dans des débats et des interviews, en tant qu'écrivain mais aussi en tant qu'éditorialiste dans des émissions nationales sur les affaires publiques australiennes comme Q&A [en] sur ABC.

En tant que traductrice, Linda aime particulièrement travailler sur des films. Parmi ses travaux de sous-titrage en anglais de films chinois bien connus, on pourra citer “Adieu ma Concubine” et “The Grandmaster”.

“Le défi consiste à rendre la traduction aussi concise, directe et simple que possible tout en retranscrivant à la fois le sens et l'émotion. Il faut aussi tenir compte des informations que les téléspectateurs retiendront de la bande-son et des images. C'est comme un puzzle. C'est très plaisant de voir son nom apparaître à la fin de la liste des crédits du film de quelqu'un comme Wong Kar Wai ou Chen Kaige, même si personne à part votre mère ne reste jamais assis jusqu'au bout pour le voir.”

Elle ne s'est pour l'instant jamais retrouvée sous les feux des projecteurs. “Les écrivains, même ceux qui comme moi ont tendance à ‘faire le show', ne seront jamais aussi ‘people’ que le sont les rock stars. Nous sommes rarement abordés lorsqu'on va faire les boutiques, et les paparazzi n'essayent même pas de prendre des photos de nous mal vêtus (des écrivains mal habillés,ce n'est pas vraiment un scoop; beaucoup d'entre nous travaillent en pyjama). Parfois au restaurant, les gens m'offrent des verres pour me dire qu'ils apprécient mes romans, et certains s'approchent pour venir me parler dans le bus. En somme, rien de bien embêtant.”

Elle n'a pas de genre préféré. “Lorsque j'écris un roman érotique, je suis passionnée par le genre érotique. Ensuite je me mets à écrire un essai et je m'épanouis dans cet art là. Et ainsi de suite. J'adore tous les styles d'écriture. Chacun présente subtilement différents types d'enjeux et offre des plaisirs distincts. J'ai la sensation que mon dernier roman, The Empress Lover (paru en avril 2014 chez Fourth Estate HarperCollins), bien qu'il soit une fiction, réunit un certain nombre de mes amours littéraires que sont la traduction, l'histoire, et l'essai.”

Son côté comique et satirique est un de ses points forts. “J'imagine que je suis une espèce d'optimiste infernale. Mais je crois que c'est parce qu'écrire des choses qui font rire les gens, ça me fait rire au moment où je les écris. J'aime me divertir.”

Ses opinions en matière de politique et de sujets de société la placent clairement dans le camps des progressistes. “Je me considère comme une humaniste séculière. Je crois qu'en tant qu'individus, nous devons à nos semblables respect, considération, et compassion et qu'en tant que société nous nous devons de protéger les plus faibles et vulnérables d'entre nous. Lorsque les gouvernements affichent un manque de respect et de compassion envers les faibles et les vulnérables, ça me bouleverse (d'ailleurs les visites à des demandeurs d'asile en détention ont été pour moi une expérience profondément révélatrice et bouleversante). Je veux me servir de l'influence dont je jouis en tant qu'écrivain et individu pour essayer de pousser d'autres personnes à réfléchir sur ces problématiques et peut être même à agir.”

Lorsqu'on lui demande comment va se dérouler sa vie de traductrice dorénavant, elle répond : “De la même façon que je l'ai menée jusqu'à maintenant; un mélange de projets à long terme, d'idées et d'opportunités aléatoires. Je suis en train d'écrire tout cela depuis Pékin, où un rockeur chinois vient juste de me demander de traduire les paroles de toutes ses chansons avec l'idée que certaines pourraient être chantées en anglais. Ce n'est pas quelque chose que j'aurais envisagé de faire, je suis déjà bien occupée et il s'agit d'une tâche complexe. Alors j'ai dit oui.”

Son conseil aux jeunes d'aujourd'hui, blâmés parce qu'ils ne se battent pas pour arranger le désordre environnemental et social dans lequel ils sont nés, est clair et précis. “Sachez que certains d'entre nous ont voulu essayer d'arranger le désordre tout au long de leur vie. Mais il s'agit d'un désordre assez conséquent. Choisissez vos combats. Faites de votre mieux. Bonne chance.”

Si vous ne connaissiez pas Linda avant, vous pouvez visiter son site internet [en] et choisir parmi l'une de ses nombreuses propositions. Sa page Goodreads [en] propose également de nombreuses informations et liens précieux.

Ses dernières publications incluent l'essai Found in Translation: In Praise of a Plural World [en] écrit pour le site Quarterly Essay, et un roman historique sur la Chine intitulé The Empress Lover [en].

Found in Translation