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Maudits provocateurs contre libéraux mollassons : les nationalistes russes et l'intervention en Crimée

samedi 1 mars 2014 à 23:42
couchwars

“Super provocateurs contre libéraux mollassons” Montage photo de Kevin Rothrock.

[Sauf indication contraire les liens dirigent vers des pages en anglais]

Il y a différentes sortes de nationalistes en Russie. Comme l'indique leur étiquette, ils sont tous préoccupés par la protection des intérêts du peuple russe, qu'ils définissent par diverses expressions: ethnicité, langue, culture, tout ce qu'on voudra. Ils passent tellement de temps à construire une meilleure “collectivité imaginaire,” que l'on pourrait s'attendre à ce que les nationalistes russes parlent d'une seule voix sur la crise ukrainienne. Mais quand il s'agit des troubles actuels en Crimée, le nationalisme donne cependant des points de vue extrêmement différents sur ce que la Russie devrait faire.

On trouve même des désaccords fondamentaux sur la prochaine avancée de la Russie en Crimée parmi les critiques les plus convaincus de Vladimir Poutine. Par exemple, depuis le début de la crise politique à Kiev, Egor Prosvirnine, auteur du blog nationaliste “Sputnik & Pogrom,” a caressé l'idée de réintégrer l'Est de l'Ukraine à la patrie russe.

Aujourd'hui 28 février 2014, alors que les rumeurs d'intervention militaire de la Russie font la une des médias, Prosvirnine confirme le soutien de longue date de Sputnik & Pogrom au rétablissement de la souveraineté russe sur la Crimée. Prosvirnine a publié un éditorial [russe] où il s'oppose aux critiques qui, dit-il, accusent à tort son blog d'être “vendu” au Kremlin. “Contrairement à de nombreuses publications,” se vante-t-il, “nous [Sputnik & Pogrom] nous sommes fiers de ne pas avoir changé de point de vue depuis des décennies.” Prosvirnine poursuit en affirmant que l'unité ethnique russe est un préalable nécessaire pour faire tomber le “régime autoritaire” de Poutine et il explique que la chute de l'URSS a dispersé les Russes de souche en dehors des frontières post-soviétiques de la Russie et a vidé la “nation” des forces vives nécessaires à un “développement prospère, fort et libre”. Cela signifie que les Russes de Crimée (c'est vrai aussi pour la Biélorussie et le Nord du Kazakhstan) doivent être reconquis avant que les Russes ne puissent remettre en question Poutine.

Egor Prosvirnin, interview screenshot, April 29, 2013, YouTube.

Egor Prosvirnine, capture d'écran d'une interview du 29 avril 2013, YouTube.

Bien que Sputnik & Pogrom soit sans conteste un blog anti-Poutine, Prosvirnine garde le meilleur de son fiel pour ses confrères opposés à Poutine, et il traite les démocrates libéraux de dissidents “mollassons” qui font semblant de ne pas comprendre que l'intégration de la Crimée accélèrerait au bout du compte la consolidation de la nation russe (et par là même la chute du régime Poutine).

Au vu du mépris de Prosvirnine à l'égard des libéraux russes, Vladimir Milov -politicien de l'opposition et blogueur actif- n'a qu'un mot sur Twitter:

@KevinRothrock Réponse des libéraux : qu'il aille se faire foutre!

Milov est un ancien ministre de la Fédération Russe chargé de l'énergie, il dirige maintenant le parti politique d'opposition Choix Démocratique. Partisan de ce qu'il appelle le “nationalisme libéral [russe],” il a participé au mouvement “Arrêtez de nourrir le Caucase”, campagne pour la réduction des aides fédérales accordées à la Tchétchénie et sa région, avec sans doute l'objectif pour la Fédération Russe de se débarrasser de toute la région.

Sur la question du Nord Caucase, Milov et Prosvirnin sont d'accord. En réalité, leurs positions sur la Tchétchénie, et la pression qui en découle pour demander un visa d'entrée en Russie obligatoire pour les habitants du Caucase et d'Asie Centrale, sont la base du consensus nationaliste en Russie. Kirill Rodionov [russe], une autre personnalité de Choix Démocratique, a publié des articles qui vont dans ce sens, pour la promotion d'un système de visas et sur la nécessité [russe] de l'ethnicité russe en termes de développement économique et culturel au sens large. Rodionov a même publié [russe] dans Sputnik & Pogrom—huit fois [russe].

Comment se fait-il que l'un des membres du parti de Milov collabore avec un homme que Milov qualifie de “super provocateur” ?

La première chose à remarquer c'est que Milov a déclaré publiquement [russe] qu'il admettait une diversité d'opinions sur la politique ukrainienne en Russie au sein de Choix Démocratique. “Nous n'avons pas créé ce parti pour débattre des problèmes de politique étrangère,” écrit-il dans un article du LiveJournal le 23 février 2014, et il ajoute “notre objectif est de travailler à démocratiser la Russie.”

Vladimir Milov, interview screenshot, October 31, 2011, YouTube.

Vladimir Milov, capture d'écran d'une interview du 31 Octobre 2011, YouTube.

L'apparente ouverture d'esprit de Milov sur ce sujet est étrange, en particulier étant donné sa position sur la crise en Crimée, dont il a fait état dans un article [russe] sur Slon.ru le 24 février. Dans cet article, Milov soutient que les Russes ne doivent pas s'attendre à ce que l'élite ukrainienne -y compris les Ukrainiens de l'est de langue russe- accepte de se “faire piétiner sous la botte dictatoriale de Poutine.” De fait, il dénonce ouvertement la politique étrangère du Kremlin qui “exporte la dictature”. En d'autres termes, Milov rejette la réintégration de l'Ukraine de l'est en partie en raison d'un problème essentiellement de politique intérieure: la démocratie non stabilisée en Russie.

La discussion entre les nationalistes sur l'intervention en Ukraine devient curieusement un débat d'opinions sur la nature de la démocratie en Russie. C'est étrange car les nationalistes de l'opposition russe ont tendance à être d'accord sur la nature du régime Poutine et s'entendent à l'unisson sur la corruption du Kremlin et sa mauvaise volonté à protéger les Russes ethniques. Quand il s'agit d'aider la Crimée, cependant, certains (Prosvirnine) se réjouissent de prendre ce qu'ils peuvent aujourd'hui et démocratiser demain, alors que d'autres (Milov) sont partisans de faire le ménage chez eux d'abord.

Le financement de la recherche scientifique en question

samedi 1 mars 2014 à 18:14

L'importance du rôle de la recherche scientifique dans l'économie des pays dans le monde est le plus souvent incontestée. Cependant, cet impact est le plus indirect, soit direct mais avec un impact seulement sur le long terme, grâce aux retombées des découvertes scientifiques. La problématique de la rentabilité de la recherche reste donc entière pour l'économie de nombreux pays sur le court et moyen terme. Le financement de la recherche obéit forcement à des règles différentes, avec des fonds qui proviennent de fonds publics ou privés. Pour la recherche publique, l'Agence Nationale de la Recherche explique en quelques chiffres comment la recherche est financée en France :

Les laboratoires de recherche publics sont en partie financés par les crédits budgétaires des universités, des organismes de recherche publics et des agences de financement, dont l'Agence nationale de la recherche (A.N.R.). Ils bénéficient d'autres dotations provenant des régions françaises, des associations caritatives, de l'industrie et de l'Europe. [..] 7 000 projets financés rassemblant plus de 22 000 équipes de recherche publiques et privées entre 2005-2009 et le montant cumulé des financements 2005-2009 est de 3 milliards d'euros.

Financement de la recherche publique en  France - Domaine public

Financement de la recherche publique en France – Domaine public

Malgré les efforts conséquents du gouvernement pour redynamiser ce secteur, la recherche française souffre de la comparaison avec ses voisins anglo-saxons et affiche un essoufflement patent. David Larousserie pose le postulat suivant dans un article intitulé : “L'efficacité limitée du financement public de la recherche” :  La recherche scientifique en France est compétitive mais rapporte peu :  

Les experts soulignent aussi “les bonnes performances en recherche de la France” mais les jugent “moyennes en termes d'innovation et de retombées économiques”. La France publie beaucoup (6e rang mondial) et dépose bon nombre de brevets (4e rang sur les dépôts en Europe), mais des indicateurs “d'innovation” la placent au 24e rang.

Il ajoute que :

Pour expliquer la réduction des marges de manœuvre en dépit d'une enveloppe globale en croissance, les magistrats rappellent que la cause essentielle est l'augmentation des frais de personnel dans les organismes de recherche. Au CNRS, avec des effectifs de fonctionnaires stables, la subvention publique a augmenté de 293 millions d'euros entre 2006 et 2011

D'autres estiment que d'autres facteurs sont en cause, comme Patrick Fauconnier qui estime que la coordination entre les divers organismes de recherche laisse à désirer :

Quand on veut monter une Unité mixte de recherche (UMR), la structure qui permet de partager des contrats de recherche, par exemple entre une université et le CNRS, beaucoup de temps et d’argent sont gâchés en gestion de problèmes administratifs complexes.

 

Chercheurs de la NASA sur le projet Stardust - Domaine public

Chercheurs de la NASA sur le projet Stardust – Domaine public

 

La recherche en Afrique

Si le recherche connait des difficultés de financement en France, elle en est encore à ses balbutiements dans la plupart des pays africains. Ainsi seule l'Afrique du Sud figure dans le top 30 des pays en termes d'investissement dans la recherche et le développement (R&D). Pire, aucun pays africain francophone ne figure dans le top 70 des pays investissant dans la recherche.  Et pourtant, Julian Siddle explique que le continent africain a tous les atouts pour devenir le prochain grand hub scientifique mondial :

The groundwork is there – knowledge, ingenuity, willingness to learn and adapt, coupled with the rapid expansion of digital technology. All of this is really allowing Africa to play a major part in global scientific collaborations.

Les bases sont déjà là – le savoir-faire, l'ingéniosité, la volonté d'apprendre et de s'adapter,  à cela s'ajoute l'expansion rapide de la technologie numérique. Tout cela devrait permettre à l'Afrique de jouer un rôle majeur dans les collaborations scientifiques internationales.

Calestous Juma, profeseur en développement  international à l'Université de Harvard ajoute que le contexte pour le continent africain est différent : 

The strategic focus for Africa should therefore be on generating research that has immediate local use. It is through such strategies that Africa will be able to make its own unique contributions to the global scientific enterprise

 L'orientation stratégique pour l'Afrique devrait donc être sur de produire de la recherche qui aura une utilisation locale immédiate. C'est grâce à ces axes stratégiques de ce type que l'Afrique sera en mesure d'apporter ses propres contributions à la recherche scientifique mondiale

Cours de chimie au Kenya sur un.org avec leur permission

Cours de chimie au Kenya sur un.org avec leur permission

Aidons-nous vraiment la recherche ?

 Mais peut-être que malgré les promesses de soutien de nombreux gouvernements, la recherche scientifique est tout simplement en manque de vrais soutien de la part de l'opinion publique, un soutien qui permettrait de mettre la pression sur les politiciens pour aider de manière durable la recherche. C'est ce qu'argumente John Skylar, dans un article qui réagit sur le fait que la page “I fucking love science” (Que j'adore la science) est un phénomène viral sur le web mais que dans la réalité, peu de pays sont près à investir pour de la recherche de qualité : 

The pattern you’re seeing is a steady drop in funding of science by the government over the last 10 or 20 years. [..] You know what budget doesn’t match this trend? U.S. defense spending. [..] If you loved science, you’d vote based on candidates who want to increase funding for it. You’d make it an issue that actually generates media debate, that sees equal time with the wars we fight

La tendance que l'on observe est une baisse constante du financement de la science par le gouvernement au cours des 10 ou 20 dernières années [..] Vous savez quel budget ne suit pas à cette tendance? Les dépenses de l'armée américaine. [..] Si vous aimez la recherche scientifique, vous voteriez pour les candidats qui veulent augmenter le financement de la recherche. Vous feriez en sorte que cette question génère un vrai débat médiatique, que ce débat soit présent sur les ondes autant de fois que toutes les guerres que nous menons.

10 choses que vous devez savoir sur les langues en danger

samedi 1 mars 2014 à 14:38

Ce post est initialement paru sur le blog Living Tongues (Langues vivantes) et est republié avec l'autorisation.

A l'occasion de la Journée internationale de la langue maternelle promue par l'UNESCO (21 février), je voudrais attirer l'attention sur certaines questions clés liées à la perte d'une langue. Avec l'amplification du mouvement pour la préservation et la revitalisation des langues partout dans le monde, les médias accordent une attention de plus en plus positive aux langues en voie de disparition. Ce qui est un grand pas pour les militants pour les langues autochtones qui veulent que leurs langues soient objet de plus de respect et de reconnaissance. Cependant, il existe encore de nombreux défis auxquels les militants des langues sont confrontés. Je veux partager cette liste pour aider le grand public à prendre conscience des difficultés de la lutte pour la revitalisation des langues, peut-être dissiper certains des mythes autour des langues en danger, en aidant à comprendre ce qui est en jeu quand une langue est perdue. 

Sans plus tarder, voici le top 10 des choses qu'on doit savoir sur les langues en voie de disparition:

10. Depuis le début du 20e siècle, les langues minoritaires ont cédé face aux langues dominantes à un rythme accéléré et sans précédent.

Ça va vite, surtout dans les anciennes colonies de peuplement. L'abandon des langues indigènes en faveur des langues étrangères se passe rapidement, et le processus est le résultat de la colonisation, de l'assimilation culturelle, de l'urbanisation et de la mondialisation. Quand il y a une réduction de la diversité locale, elle conduit à l'érosion culturelle, la perte des langues minoritaires, et peut même conduire à la perte de l'identité culturelle au fil du temps.

9. Jusqu'à la moitié des 7105 langues du monde peut être à risque de disparition

Plusieurs milliers de langues connaissent actuellement un certain niveau de menace. Il est important de noter que non seulement beaucoup de langues individuelles sont en danger, mais des familles entières de langues sont également en voie d'extinction, ce qui est une perte incommensurable pour l'humanité.

En termes d'évaluation des dangers encourus par des langues individuellement considérées, on ne peut pas toujours déterminer si une langue est stable seulement sur la base du nombre de ses locuteurs. Parfois, il y a des langues qui ont toujours de très grandes populations d'utilisateurs, mais dont l'âge moyen est supérieur à 50 ans. C'est un indicateur que ces langues ne sont pas transmises aux enfants. Ces langues ne sont donc pas stables, et le nombre de personnes les parlant couramment va bientôt diminuer. Une langue peut être perdue en une génération ou deux. Dans d'autres cas, le nombre de locuteurs d'une langue peut être faible, mais avec suffisamment de locuteurs de tous les groupes d'âge qui l'utilisent. C'est une indication qu'elle est encore transmise aux plus jeunes membres de la communauté. Elle pourra encore survivre pendant de nombreuses générations à venir.

8. Beaucoup de langues en voie de disparition n'ont jamais été enregistrées ni écrites.

C'est vrai. Il y a beaucoup de langues à travers le monde qui n'ont pas d'enregistrements audio. Avoir des enregistrements audio de haute qualité de mots et de phrases dans une langue est un outil essentiel pour une communauté qui n'a plus de survivants qui la parlent, et souhaitent préserver sa prononciation correcte après la disparition des derniers locuteurs, si cela signifie la fin du processus de d'adoption d'une autre langue que la communauté connaît. Les prochaines décennies constituent une période cruciale pour l'enregistrement des derniers locuteurs des langues les plus gravement menacées, et pour soutenir les militants des langues en danger et des langues indigènes qui font un excellent travail pour relancer certaines qui sont relativement moins menacées dans leurs communautés. Des enregistrements de haute qualité sont également essentiels pour les linguistes qui souhaitent analyser les sons et la structure des langues, et aider les collectivités à élaborer des outils linguistiques appropriés pour la transmission des langues.

En outre, de nombreuses cultures ont transmis leur héritage à travers des traditions orales, sans l'utilisation de systèmes d'écriture pour la transmission des connaissances. Cependant, la nécessité d'une orthographe convenable se pose lorsque des locuteurs souhaitent que leurs langues soient enseignées dans les écoles, ai une présence dans les médias et soient reconnues par les autorités publiques. Dans certains cas, si le système d'écriture est créé trop vite, il pourrait ne pas saisir avec précision des sons complexes trouvés dans cette langue. Les meilleurs systèmes d'écriture sont créés lorsque ceux qui parlent couramment les langues travaillent avec des éducateurs les maitrisant et d'autres spécialistes. A condition qu'ils prennent tous le temps de créer un système d'écriture qui fonctionne bien pour les besoins de la communauté, et qui peuvent également être facilement utilisés sur les interfaces informatiques modernes. La création de bons systèmes d'écriture et la technologie d'accompagnement pour accueillir des caractères spéciaux, exige du temps, de la diligence, de la patience, de la coordination et de l'argent pour payer des gens pour travailler sur les projets.

7. La disparition de langues se constate dans presque tous les pays du monde.

Ça se passe près de chez vous. À l'exception des pays monolingues comme l'Uruguay (où de nombreuses langues autochtones ont été éradiquées), en Corée et dans une poignée d'autres pays, vous pouvez observer la perte des langues dans la plupart des pays dans le monde. Si vous habitez au Canada, aux États-Unis ou en Australie, vous pourriez être surpris de découvrir que la perte d'une langue n'est pas un phénomène exotique, mais il est aussi local. Beaucoup de langues autochtones dont vous avez entendu parler, celles des Premières nations, amérindiennes et les langues aborigènes sont en danger de disparition, à moins que leurs locuteurs ne mettent en place les ressources et l'infrastructure nécessaires pour garder leurs langues vivantes. Dans le cas de l'Europe, il y a aussi beaucoup de langues minoritaires locales dans diverses régions qui sont à risque d'être perdues.

Bien qu'il existe des langues menacées dans presque tous les pays, il est important de noter le changement de langues n'est pas uniformément distribué à travers le monde. On peut identifier des zones d'urgence, des Language Hotspots, qui sont les régions du monde ayant le plus haut degré de diversité linguistique, des niveaux les plus élevés de danger, et les langues les moins étudiées. Les régions à risque pour les langues sont les lieux dans lesquels l'enregistrement des langues est le plus plus urgent pour les générations actuelles.

 

6. Les langues minoritaires sont une partie importante du patrimoine culturel immatériel de l'humanité. 

Dans notre monde diversifié et multilingue, les langues sont une source de richesse culturelle. Façonnée par les lieux dans lesquels elles sont implantées, les langues minoritaires du monde codifient des systèmes de connaissances précieuses relatives à l'adaptation culturelle des peuples aux paysages locaux. Intimement liées à la diversité écologique, ces diverses langues locales sont des réservoirs de taxonomies et des connaissances environnementales accumulées au fil des générations. L'extinction d'une langue peut aussi conduire à la disparition d'anciennes traditions spirituelles. Des pratiques autrefois exécutées dans cette langue pourraient ne plus se perpétuer de la même façon que précédemment, et donc le maintien de la langue est également nécessaire pour maintenir intactes des traditions spirituelles.

5. Les militants pour les langues autochtones et leurs alliés linguistiques professionnels peinent souvent dans l'obscurité, pour peu ou pas de salaire.

Les militants pour les langues autochtones sont des locuteurs qui peuvent aider dans la conservation de leurs langues. Ils peuvent être impliqués dans l'enseignement des enfants et des adultes à parler la langue, l'enregistrement des connaissances des aînés, en organisant des ateliers, des événements culturels, etc. Ils sont souvent sous-estimés par la communauté, et en fonction des circonstances, ils travaillent étant payés peu ou prou. Bien sûr, il y a aussi de nombreuses communautés où les militants et les éducateurs linguistiques sont bien rémunérés pour leurs efforts, cela dépend, donc, vraiment de la situation locale. Le militantisme pour les langues est un travail à temps plein. Si les militants se fatiguent sans salaire, ils méritent d'être indemnisés.

Les alliés des spécialistes des langues sont généralement des chercheurs, des linguistes et autres travailleurs des médias ou des ONG qui utilisent leurs compétences et expérience pour aider les militants dans la conservation de leurs langues. Dans de nombreux cas, ces personnes font également don de leur temps, et ce sans être payés pour le temps qu'ils mettent dans les projets linguistiques. Assurer le financement des projets de documentation linguistique est très difficile et peut être problématique, car il ne peut être garanti d'année en année.

4. La documentation sur les langues est un travail fastidieux, mais fascinant.

Une documentation scientifique appropriée d'une langue nécessite des années pour sa réalisation et les meilleurs projets de documentation impliquent une collaboration fructueuse avec ceux qui la parlent couramment et d'autres membres concernés de la communauté. Le processus se trouve toujours renforcé par la participation de plusieurs linguistes formés pouvant apporter chacun son expertise.

3. Les programmes de revitalisation des langue sont des projets à long terme.

Réaliser un projet de revitalisation d'une langue n'est pas qu'un projet pour des stages d'été. Une véritable revitalisation n'est possible qu'avec un engagement à long terme de ses locuteurs, des éducateurs et des militants de cette langue au sein de la communauté. Les linguistes ne sauvent pas ou ne maintiennent pas des langues autochtones, et il n'y a pas de chemin simple pour la revitalisation des communautés.

2. Internet n'est pas en train de tuer les langues minoritaires.

Il y a une fausse idée répandue qui présente Internet comme un monstre tentaculaire puissant de la mondialisation, contribuant à la disparition des langues minoritaires. Toutefois, c'est le contraire qui est vrai. Internet offre une opportunité sans précédent pour les voix minoritaires de se faire entendre, grâce aux médias citoyens. En outre, les outils d'apprentissage des langues en ligne non seulement, aident à créer une visibilité pour les langues minoritaires sur le Web, mais aussi ils aident les intervenants à partager leurs connaissances pour maintenir des réseaux sur de grandes distances.

1. La technologie numérique ne remplacera jamais une communauté vivante de locuteurs, mais elle peut aider à préserver et enseigner les langues, ainsi que les communications entre les locuteur.

Les innovations dans la technologie audio et d'enregistrement vidéo aident à préserver les enregistrements; elles peuvent servir comme une aide à l'apprentissage et pour connecter des personnes à d'autres locuteurs de leur langue sans qu'ils vivent nécessairement dans le même endroit. Des communautés de locuteurs de langues en voie de disparition peuvent maintenant créer des espaces virtuels où ils peuvent écouter leur langue, peu importe où ils sont dans le monde. Des applications, des réseaux sociaux, des blogs et des forums de langue sont un excellent outil pour faciliter et améliorer la communication, mais bien sûr, ils ne peuvent pas remplacer les locuteurs eux-mêmes.

Merci de nous avoir lu. N'hésitez pas à partager cet article!

Les “Olympiens” d'Asie du sud-est accueillis en héros

samedi 1 mars 2014 à 13:59
Yohan Goncalves Goutt representing East Timor in the Men's Slalom event.

Yohan Goncalves Goutt représentant le Timor Oriental lors du slalom masculin.

Ce ne sont pas deux pays réputés pour leurs chutes de neige, mais les Philippines et le Timor Oriental, situés en Asie du sud-est, étaient représentés lors des derniers Jeux Olympiques d'hiver de Sotchi. Yohan Goncalves Goutt, qualifié pour l'épreuve de slalom masculin, est ainsi devenu le premier athlète timorais à se présenter aux Jeux Olympiques d'hiver. Prouesse également réalisée par le Philippin Michael Martinez, premier patineur artistique d'Asie du sud-est qualifié pour les Jeux.

Pour réaliser son rêve, Yohan a crée la Fédération de Ski du Timor Oriental et a réuni 75 000 dollars pour accomplir son rêve olympique. Il a pris part aux Jeux, a fini la course, et a terminé 43ème sur 117 participants. 72 autres skieurs n'ont pas fini la course ou ont été disqualifiés durant la compétition.

Yohan a partagé ses sentiments après avoir terminé la course:

WOW quelle expérience pour moi !!!! Cette course restera gravée à jamais dans ma mémoire, et le Timor Oriental dans l'Histoire. Partir en dernière position lors de la course de ma vie fut difficile, mais je l'ai fait et terminé ! 43 sur 117 !!!

Vous êtes formidables, merci de m'avoir soutenu !!!!

Après ces Jeux Olympiques j'ai le sentiment d'avoir beaucoup appris et je sors de ces Jeux grandi !!!

Avant les Jeux, il a reçu une lettre de félicitations de la part du Premier Ministre du Timor Oriental. Les Timorais sont naturellement fiers des exploits de Yohan, et certains de ses fans ont posté quelques messages sur son compte Facebook:

Popo Lay: Si fier de toi Yohan!! Félicitations d'être devenu la première personne à représenter notre nation aux Jeux Olympiques d'hiver et à écrire l'histoire. Tu es un véritable héros timorais et un modèle pour les futures générations!

José Antonio G. Casimiro: Terminé dans le top 50 est un grand exploit. J'en ai vu tellement avant vous chuter et ne pas finir la course. J'ai prié pour que vous réalisiez une manche propre, et vous l'avez fait. Merci d'avoir mis notre petit pays sur le devant de la scène internationale.

Beaucoup d'internautes ont été émus de voir Yohan défiler lors de la cérémonie d'ouverture sous les couleurs du Timor:

Jacinta Barreto: Vous nous avez montré comment porter le tais traditionnel par ce temps d'hiver… cool et branché. Bonne chance Yohan..

Carla Araujo Machado: Félicitations! Quel moment émouvant lorsque tu portais le drapeau du Timor Oriental! Nous en sommes tous très fiers!

Le ministre de l'Etat Agio Pereira a affirmé son soutien à Yohan:

Nous félicitons Yohan pour son engagement et sa fierté pour le Timor Oriental. Ses efforts, ainsi que ceux des autres athlètes qui représentent le Timor Oriental sur la scène internationale, ont accru la visibilité de notre nation et augmenté l'intérêt pour ce pays.

Yohan Goncalves Goutt at the Sochi Games

Yohan Goncalves Goutt aux Jeux de Sotchi

Pendant ce temps, le patineur philippin Michael Martinez était le seul représentant de son pays aux Jeux de Sotchi. Qualifié pour la finale, il a pris la dix-neuvième place.

Le parcours atypique de Michael a ému de nombreux Philippins. Il a ainsi appris à patiner seul dans un centre commercial et est parvenu à devenir un Olympien malgré son asthme.

Mais alors que les Philippins ont acclamé sa participation triomphante aux Jeux d'hiver, d'autres ont reproché au gouvernement le peu d'aide apporté au jeune patineur. La famille de Michael aurait même hypothéqué leur maison en vue de la préparation olympique du jeune athlète. La demande de soutien financier envoyée par la mère de Michael n'a apparemment pas été reçue par le président, car traitée comme un spam.

Michael Martinez patine de nouveau ce soir, à 23 heures sur TV5Manila. RT pour exprimer votre soutien!

Michael Martinez n'était qu'un enfant avec un rêve. Désormais il est un héros olympique. J'espère qu'aucun politicien actuel ne tirera profit de sa popularité

Michael Martinez est le Prince de la glace dans un pays où il ne neige jamais

Peu importe que ce gosse ne ramène rien chez lui. Sa présence seule suffit à faire de lui un héros.

L'écrivain Jessica Zafra a salué la mère de Michael pour avoir guidé le talentueux adolescent sur la route de ses rêves:

Je ne connais pas la mère de Michael, mais je sais qu'elle a encouragé son fils à poursuivre son rêve, aussi étrange que cela puisse paraître. Etre parent est difficile, plus particulièrement lorsque votre enfant a un véritable talent. Vous vous devez d'être honnête quant aux aptitudes de votre enfant et ne pas le laisser se bercer d'illusions. Vous devez estimer ses chances de réussite et faire le sacrifice qui s'impose. Félicitations, Mme Martinez, vous êtes la mère la plus incroyable qui soit.

De retour aux Philippines, Michael a été accueilli en héros par ses compatriotes:

Michael Christian Martinez revient à Manille en héros! Plus d'informations quant à son retour sur @Spotdotph

Un blogueur libanais parle du droit des femmes avec la Première Dame

vendredi 28 février 2014 à 19:01

[Sauf indication contraire les liens dirigent vers des pages en anglais]

Mario Macaron, blogueur et étudiant à l’Université Saint-Joseph [fr], a adressé une lettre ouverte à la Première Dame du Liban, Wafaa Sleiman, sur le problème du droit des femmes. Le problème du droit des femmes au Liban a récemment refait surface avec l'assassinat de Roula Yaacoub, Manal Assi et Christelle Abu Chakra par leurs propres maris et l’étonnante polémique qui entoure une séance photos ancienne de Jackie Chamoun. Malgré sa réputation de paradis libéral au milieu d'une région conservatrice, le Liban ne brille pas quand on parle du droit des femmes. Ces lacunes en ce qui concerne des droits fondamentaux se sont traduites de temps en temps localement par des mouvements populaires mais, dirons certains, cela n'a jamais atteint ce que l'on connaît aujourd'hui. Un manifestation massive organisée par l'ONG KAFA (assez)[arabe] est prévue pour le 8 mars [arabe] et fera l'objet d'un Dossier Spécial par Global Voices.

Voici la lettre de Mario Macaron:

Madame,
Je suis étudiant libanais à Paris, j’ai eu l’honneur de faire partie de la délégation que vous présidiez à Tunis en Novembre 2010 à la conférence des droits de la Femme Arabe, et comme plusieurs j’ai fiévreusement applaudi votre discours prônant et défendant les droits de la Femme dans ce coin du monde. Vous considérant comme l’emblème institutionnel de la Femme libanaise, c’est à vous que je m’adresse, même si votre mandat touche bientôt à sa fin, peut-être mes propos résonneront dans les coulisses féminines.

Madame, il est vrai qu’en vous écrivant je me retrouve d’ores et déjà dans une situation compromettante : un homme prêchant à la Première Croyante sur un sujet annexé dans les annales du quotidien. Pourtant Madame, chaque fois que l’humiliation et parfois même le sang des femmes de notre pays font l’entête des journaux et la une des médias, j’ai honte et me demande qu’est ce qu’il manque encore aux libanaises, connues pour leur fort tempérament, de prendre les choses en main. Faudra-t-il attendre qu’à l’image de Beyrouth mère, nos dames se retrouvent sans foi ni espoir, et que surgissent des extrémistes qui noieront vos revendications dans du politiquement incorrect ?

Ne pensez-vous pas qu’il est temps que vous dirigez les femmes du Liban vers une révolution tant attendue ? Ne croyez-vous pas qu’il est temps d’imposer vos droits qu’aucune loi ne prévoit encore ? N’est-il pas temps que deux libanaises jouissent de droits égaux même si elles sont de rites différents ?

Vous ne menez pas votre combat seul Madame, tout homme digne de l’éducation d’une mère libanaise demeure indigné et révolté face aux injustices commises à votre égard et en son nom. Ces hommes, même si écrasés par une minorité retentissante de par sa misogynie croient en une société où le sexe ne différencie que biologiquement.

Toutefois, ce ne sont pas les hommes qui lanceront les manifestations pour vous, ils le feront avec vous certes, mais admettons que, du côté de chez nous, les droits de la femme ne sont pas, hélas, une affaire d’hommes. Heureusement d’ailleurs, notre Parlement et même nos gouvernements à majorité masculine ne peuvent pas vanter leur efficacité.

Madame, si vous invitiez chaque grand-mère, mère, fille, sœur, copine, fiancée ou amie à cesser d’être Femme pour un jour, un seul, si vous décidiez toutes de faire la grève à notre société faussement machiste, je crois Madame que non seulement vous feriez voter vos droits, mais vous pourriez même diriger notre pauvre Liban à bon port.

Nous sommes tous fruits de Femmes, et « ce que Femme veut, Dieu le veut »

Veuillez croire, Madame, en mes sentiments les plus respectueux.

Mario Macaron

Une semaine plus tard, la Première Dame a répondu:

Monsieur Mario Macaron

J’ai lu avec intérêt la lettre ouverte que vous avez voulu me transmettre à travers les réseaux sociaux. Je voudrais vous remercier et saluer vos collègues de Béryte – l’écho des Cèdres, la revue des étudiants de la Faculté de Droit et de l’Institut de Sciences Politiques de l’USJ, qui l’a publiée sur sa page web.

Vous savez que la femme libanaise est confrontée à nombre de défis. Dès les premiers jours du mandat du Président de la République le général Michel Sleiman, j’ai pris comme engagement de défendre sa cause dans tous les domaines et ce, dans le cadre de la Commission Nationale de la Femme Libanaise (CNFL) que je préside, et en collaboration avec les associations et mouvements sociaux pour les droits des femmes, de notre société civile si active. Cette cause n’est donc pas négligée. D’autant plus qu’elle est amplement soutenue par le Président de la République lui-même.

Vous m’appelez à une révolution, et je salue votre proposition. Toutefois une révolution, moi je ne l’entends pas dans le sens de l’effervescence d’un jour qui finirait aussi vite qu’un lever de soleil, mais dans le sens d’une mobilisation de solidarité effective et durable à laquelle je ne cesse d’appeler. Une mobilisation de solidarité agissante de ceux et celles, comme vous et vos collègues, sont animés de bonne volonté à poursuivre la démarche d’amélioration de la situation de la femme libanaise, déjà entamée dans la législation, les milieux du travail, la société….

Grâce à une pareille mobilisation vigilante, nous parviendrons, ensemble, à mettre fin aux injustices et aux inégalités que vous prélevez.

En vous renouvelant mes remerciements, veuillez croire, Monsieur, en mes meilleurs sentiments.

Wafaa SLEIMAN

Première Dame du Liban