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La Colombie cherche sa voie après le “Non” au référendum sur l'accord de paix

dimanche 30 octobre 2016 à 19:55
Imagen compartida por Elmer Montaña en su cuenta de Facebook y compartida con su aprobación.

Marche pour la paix à Bogotá. Photo publiée par Elmer Montaña sur son compte Facebook et reproduite avec son autorisation.

[Billet d'origine publié en espagnol le 22 octobre 2016] Lorsqu'on a su que les résultats du référendum du 2 octobre qui devait ratifier l'accord de paix entre le gouvernement et les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC) étaient en faveur du “Non”, le pays se trouva plongé dans une incertitude inattendue car aucun côté n'était préparé à ce dénouement, que beaucoup ont appelé le Brexit colombien.

L'éditorialiste Luis Fernando Álvarez a rapproché les deux événements dans le journal “El Colombiano”:

El Gobierno Británico lo convocó convencido que podía obtener un gran apoyo popular para legitimar su permanencia en la Comunidad Europea; sin embargo, cuando se dieron a conocer los resultados, los más sorprendidos fueron quienes votaron por la salida de la Unión (Brexit). Ningún sector tenía un plan B para enfrentar dicho resultado, cuyo principal efecto político fue la renuncia del Primer Ministro.

En Colombia la situación parece similar, con la salvedad de que no es prudente ni conveniente solicitar la renuncia del Presidente.

Le gouvernement britannique l'avait convoqué convaincu qu'il pourrait obtenir un large appui populaire pour légitimer son maintien dans la communauté européenne ; pourtant, lorsque les résultats se sont fait jour, les plus surpris furent ceux qui avaient voté pour la sortie de l'Union (le Brexit). Aucun côté n'avait de plan B pour faire face à un tel résultat, dont l'effet politique principal fut la démission du Premier Ministre.
En Colombie la situation paraît similaire, sauf qu’il n'est ni prudent ni souhaitable de demander la démission du Président.

Le résultat a surpris, car les sondages donnaient le “Oui” victorieux ; pas plus qu'on ne s'attendait au niveau des abstentions, le plus élevé de l'histoire de la Colombie : 37,43 % seulement des inscrits ont voté. En outre, l'écart minime de 53.894 voix a réaffirmé la polarisation qui caractérise historiquement la société colombienne et qui s'est intensifiée depuis le début des processus de paix avec les FARC.

Avec le “Non” qui s'est ensuivi et l'échec de la feuille de route des deux camps, de nombreux questionnements ont été générés dans la population : La paix est-elle possible ? La confiance était-elle excessive ? Est-ce la vague de désinformation qui a gagné ? Quel a été le poids des groupes chrétiens et des Eglises évangéliques ? L'idéologie du genre a-t-elle eu un rôle ? La volonté de paix de la guérilla se vérifiera-t-elle ? Santos a-t-il été sanctionné pour ses échecs dans d'autres domaines ? Etait-il nécessaire d'exposer les Colombiens à un référendum ? Le passage de l'ouragan Mathew a-t-il eu un impact sur le vote de la région caraïbe colombienne ? Est-ce la haine des FARC qui l'a emporté ? Ou la peur d'un “Castro-Chavisme” infondé ? Faut-il une nouvelle constitution ?… Et que va-t-il se passer maintenant ?

Le pays reprend ses esprits

L'Accord final avec les FARC pour la fin du conflit et l'instauration d'une paix stable et durable signé le 26 septembre à Carthagène garde sa validité malgré le résultat du référendum. S'il traduisait une obligation politique pour le président colombien, M. Santos a décidé de son propre chef de le convoquer sans y être obligé, confiant dans la démocracie.

Malgré le résultat inattendu, toutes les parties intéressées se sont prononcées en faveur de la continuation du processus de paix : le gouvernement, les partisans du “Non” et les FARC. Ce qui a facilité la rencontre entre le président Santos et les opposants, qui une semaine après le référendum ont commencé à travailler à des propositions pour un projet ultérieur d'accord. Ceux qui avaient voté “Non” ont souligné qu'ils n'avaient pas refusé la paix, mais cherché un “meilleur” accord.

Quant à l'autre guérilla insurgée de gauche, l'Ejercito de Liberación Nacional (ELN), le gouvernement a annoncé des pourparlers publics pour le 27 octobre en Equateur. L'ELN qui compte approximativement 1.300 militants, est né en 1964 à San Vicente de Chucurí, dans le département de Santander (Nord de la Colombie), d'intellectuels marxistes partisans de la révolution cubaine, et mêle les idées révolutionnaires à celles de la théologie de la libération.

Pour ce qui est du cessez-le-feu, le président en a annoncé la prolongation jusqu'au 31 décembre de cette année et affirmé qu'il était renouvelable.

S'ajoutant à cela, un nouvel ingrédient a fait briller l'espoir d'un nouvel accord : le prix Nobel de la Paix décerné à Santos, qui en se l'entendant annoncer a réaffirmé qu'il continuerait à travailler pour l'obtenir. Il annonça même sur Twitter qu'il ferait don de l'argent du prix en faveur des victimes de la guerre.

Le Nobel de la Paix est aux Colombiens, surtout à ceux qui ont souffert de la guerre. Ma famille et moi avons décidé de donner l'argent aux victimes

Le tweet de l'écrivain Héctor Abad Facio Lince, en réponse à celui publié par le président, a résumé le sentiment d'une partie de la population sur l'utilité du prix pour le processus :

Dans le jeu d'échecs aussi il y a des coups brillants qui changent toute la situation sur l'échiquier quand la situation paraissait perdue. Merci la Norvège !

Néanmoins, scepticisme et contrariété ont aussi accueilli le timing de la récompense :

Je ne comprends pas ??? Juan Manuel Santos prix nobel de la paix que la majorité du peuple colombien a refusée démocratiquement dans les urnes

Bonjour pays sans la paix mais avec le Nobel, avec des accords sans approbation, et avec une opposition mais sans arguments et/ou honnêteté.

Pour sa part, l'opposition menée par l'ex-président et sénateur Álvaro Uribe Vélez joint aux autres membres de son parti politique, le Centre Démocratique, est mise sur la sellette à travers une plainte pour délit de fraude électorale s'appuyant sur sa campagne alléguée de discrédit contre l'accord de paix, à partir des malencontreuses déclarations de son directeur Juan Carlos Vélez Uribe dans un entretien avec le journal “La República”.

Mouvements sociaux après le “Non”

Les populations qui ont vécu au plus près de la guerre, comme celles des départaments de Cauca, Chocó, Putumayo et Vaupes, entre autres, ont voté majoritairement “Oui” au référendum, donnant une leçon de pardon et de réconciliation au reste des Colombiens. Beaucoup saisirent l'occasion de montrer leur solidarité et indignation après l'annonce des résultats :

Qui va aller dans les régions qui ont voté Oui, leur expliquer quelle est la route à suivre après la victoire du Non au scrutin national ?

Cette indignation a précisément été une des motivations des jeunes, étudiants, peuples premiers et divers secteurs de la société civile, pour descendre dans les rues, défiler et crier des slogans variés reflétant la volonté des citoyens colombiens que cesse la guerre. Les marches sont devenues une constante de diverses régions.

“Pas de pas en arrière, nous voulons la paix !” a été la clameur de milliers de Colombiens qui sous le hashtag #PazALaCalle (Paix dans la rue), improvisèrent le 3 octobre, au lendemain du référendum, une manifestation dans plusieurs villes du pays pour défendre la paix, ou selon leurs termes, le pays qu'ils méritent. Voici le témoignage vidéo de l'utilisateur de Youtube jacastillo9101 :

Cette autre vidéo, de Ricardo Galán, montre une marche à Bogotá le 12 octobre. La foule crie son principal slogan : “L'accord maintenant !”

Malgré les antécédents de haine et d'insultes déversées sur les réseaux sociaux et la prolifération encore des affrontements verbaux, même avec moins d'intensité, entre “Ceux du Non” et Ceux du Oui”, à présent il y a de tous côtés des gens qui souhaitent la paix, sous les hashtags  et (Paix sur le web). Voici une des propositions de Mauricio Jaramillo :

Je viens de plonger la tête la première dans #PaixSurLeWeb. Ce qui ne veut pas dire s'abstenir de critiquer ou de défendre des idées. La paix n'est pas l'absence de différence ni de débat. S'unir ?

Il y a eu des journées intenses, mais on a vu les jeunes s'approprier leur avenir et celui des nouvelles générations. Ils continuent à sortir dans la rue et appeler à rejoindre les manifestations, désormais sous un nouveau hashtag #EnLasCallesLaPazRenace (Dans les rues la paix renaît) :

Demain mardi 14 octobre à 19h ! Toute la ville est cordialement invitée à l'Assemblée de #PaixDans laRue ! Faire passer!

Ils réclament du gouvernement et de l'ex-président Uribe qu'ils unissent leurs efforts pour arriver à l'accord qui permettra de terminer un processus en gestation depuis 2012.

Quelle suite ?

Le paysage qui se dessine, ce sont les dialogues du gouvernement avec toutes les parties pour et contre cet accord de paix. Le président et son équipe ont tenu des pourparlers tant avec les détracteurs de l'accord de paix qu'avec ceux qui ont répondu oui au référendum. Des propositions ont été présentées, qui seront négociées avec les FARC.

Cette possible union politique et sociale vers laquelle s'acheminent une grande partie des Colombiens pourrait être la solution pour trouver l'accord final tant désiré. Mais cette unité est-elle à portée de main ? En tous cas, les Colombiens sont las de la guerre et veulent la paix.

Chine, Indonésie, Timor Oriental… Découvrez le hip hop d'Asie

vendredi 28 octobre 2016 à 19:38
Anuku Lorosae. Screenshot from his music video for "Kata Intimida".

Anuku Lorosae. Capture d'écran de sa vidéo musicale pour “Kata Intimida”.

Le hip-hop n'est pas né d'aujourd'hui en Asie, même si c'est un art presque toujours catégorisé comme un genre non mainstream ou indie. Dans la plus grande partie de l'Asie, les traditions orales constituent une forme artistique populaire mais en voie de disparition. Un contexte où le hip-hop est devenu une façon non conventionnelle de raconter des histoires apte à séduire la jeunesse.

Indonésie

Premier exemple : la rappeuse Take Yacko, également chargée de cours à l'université et mère. Depuis plus de dix ans elle brise les stéréotypes de l'activité et de l'habillement de la femme musulmane indonésienne. Sa dernière chanson “Thang” dit comment elle va faire les choses qu'elle aime hors de la pression ou du jugement d'autrui. Yacko rappe presque exclusivement en anglais.

Brian Imanuel (a.k.a Rich Chigga) n'a que 17 ans, et habite Jakarta. Son single “Dat Stick” lancé cette année a atteint la 4ème place au classement du Billboard Bubble Up dès sa première semaine. Ce qui fait de lui le premier youtubeur indonésien à s'introduire dans le Billboard Chart. Son vidéo-clip auto-produit où on le voit se balancer en polo blanc boutonné et sac banane, puis rebondir sur le canapé probablement familial a reçu les éloges du célèbre rappeur américain Ghostface Killah. Un peu plus tard, ce dernier, l'un des membres fondateurs du groupe rap de la côte Est Wu Tang Clan, est apparu dans la version remix de Dat Stick.

Timor Oriental

Le monde lusophone s'est enrichi de Anuku Lorosae. Contraint par la guerre à quitter sa ville natale du Timor Oriental à l'âge de 9 ans, Paulo Egidio Carvalho Dos Santos (son vrai nom) vit aujourd'hui au Royaume-Uni.

Il s'est mis au rap au Portugal en 2002, avec un groupe appelé Rap Firma ; c'est alors qu'il a pris le surnom Anuku Lorosae. Son petit nom à la maison est Anuku. “Lorosae” est un mot tetun [NdT : La langue du Timor oriental] qui veut dire “soleil levant”, une allusion au Timor-Oriental, aussi appelé Pays du soleil levant.

Il rappe en trois langues : tetun, portugais et créole. Dans sa chanson récente “Kata Intimida,” Anuku parle de son combat personnel et de l'histoire du Timor Oriental face à l'occupation indonésienne. Les paroles expriment son indignation contre les politiciens violents et la disparité scandaleuse entre les élites et les pauvres dans un pays démocratique libre.

Quand on lui demande quel message il souhaite faire passer avec sa musique, Anuku répond :

A vida é assim prega nos supresas, a minha vivência, experiências q tive é óbvio relatar a realidade que ronda em nosso redor principalmente na minha pátria timor Leste. Quero fazer que poucos hoje fazem hoje em dia que é tentar abrir mais visões para os mais novos.

La vie est ainsi, elle nous joue des tours, mon vécu, les expériences que j'ai eues, à l'évidence racontent la réalité qui nous entoure, surtout dans mon pays le Timor oriental. Je veux faire ce que peu font aujourd'hui : tenter d'ouvrir plus de visions pour ce qui est nouveau.

Philippines

Les artistes d'ascendance philippine ont probablement été les premiers à percer dans le courant général du hip hop. Les Filipino-Américains stars (en abrégé Fil-Am) sont Chad Hugo de N.E.R.D et Allan Pineda Lindo (son nom de scène est apl.de.ap) des Black Eyed Peas.

Philippines MC Mike Swift, né Michael Olave, conjugue son amour du rap et du basket-ball au militantisme. Avec son projet Pinoy Hoops, il a fait venir des superstars du basket comme Lebron James, Jordan Clarkson et Paul George à Tenement, une zone urbaine miséreuse de Taguig City, aux Philippines.

Chine

Le groupe hip hop de Chine continentale Higher Brothers suscite l'euphorie de la scène underground malgré les censeurs du web.

Ils font partie de ces quelques talents chinois à pratiquer le dialecte du Sichuan, la province du sud-ouest loin de l'épicentre du hip hop qu'est Pékin.

Leur dernière oeuvre, Isabellae, parle d'ambition et de travail acharné. La chanson a été produite par Ernest Brown alias Charlie Heat, qui travaillait précédemment avec les champions des hit-parades comme Kanye West, Ty Dolla $ign et Pusha T.

Japon

Grandi en logement social, le rappeur Kohh dit qu'il s'est mis au hip hop pour échapper à la violence de rue et aux drogues. Bien que le hip hop soit mal vu au Japon, il est déterminé à faire mieux accepter ce genre au public. Il rappe sur son vécu personnel et les difficultés au milieu desquelles ses amis et lui ont grandi.

Koreatown, USA

Dumbfounded (‘éberlué”, NdT), d'origine coréenne, introduit des sujets percutants dans ses textes, comme le blanchiment par Hollywood dans sa chanson ‘Safe‘ et la violence des armes à feu dans son tube ‘Harambe’. Ce dernier a été dans les premiers du classement Global Spotify Viral.

Equateur : Pour la promotion de la langue Kichwa sur Internet, un atelier d'activistes numériques

vendredi 28 octobre 2016 à 13:49
Group photo from the Kichwa language digital activism workshop. Photo by E. Avila

Photo de groupe de l'atelier d'activisme digital de la langue Kichwa. Photo de E. Avila

Les membres de la communité Kichwa en Équateur, rassemblés dans la ville d’Otavalo du 17 au 19 août afin de participer à un atelier de 3 jours pour discuter du statut de leur langue, ont développé de nouvelles compétences digitales et partagé leurs expériences afin de promouvoir leur langue maternelle sur internet.

Plus connu pour son marché hebdomadaire de plein air haut en couleur, qui attire aussi bien les locaux de la province de Imbabura que les touristes, Otavalo est situé à 90 km de la capitale équatorienne Quito. La ville est également connue pour son adhésion à la culture et à la langue Kichwa, et l'on peut apercevoir dans les rues du centre des habitants vêtus du costume typique, et où l'on entend parler Kichwa chaque jour sur les lieux de travail et dans les foyers. On peut également entendre le Kichwa dans certains bâtiments publics où la signalétique renforce le message de l'influence de la langue dans la vie de tous les jours.

Workshop participants. Photo by E. Avila

Participants à l'atelier. Photo E. Avila

Otavalo est aussi le lieu de nombreuses initiatives digitales, pionnières en la matière, qui cherchent à promouvoir la langue Kichwa à travers internet et les médias numériques, avec l'espoir d'attirer une nouvelle génération de locuteurs qui assureront la pérennité de la langue. Un de ces projets, Kichwashun, qui gère plusieurs comptes de réseaux sociaux et le site d'enseignement Kichwa.net, était l'un des premiers organisateurs de l'atelier organisé avec la municipalité d'Otavalo et en partenariat avec Global Voices, au travers de l'initiative d‘activisme linguistique de Rising Voices’.

Ce qui en a fait un atelier unique, c'est que les présentations, débats et enseignements, tout au long des trois jours, ont eu lieu entièrement en langue Kichwa, brisant la croyance que cette langue native est incompatible avec la technologie. S'il est vrai qu'il manque des mots pour certains termes techniques, les organisateurs proposent l'utilisation de la phrase “Zirma atiriy” pour parler de l'activisme digital.

encuentrokichwa

L'atelier qui a eu lieu à Otavalo était le premier de cette série à s'être focalisé sur l'activisme digital en une seule langue, en comparaison avec d'autres rassemblements co-organisés par Global Voices au Pérou, Colombie, Mexique et Bolivie, qui eux étaient ouverts à l'activisme digital dans les langages indigènes de tous ces différents pays.

Participants et animateurs

À la suite d'un appel à participants sur internet et par téléphone, 30 individus ont été sélectionnés sur la base de leur engagement solide à la redynamisation de la langue Kichwa et sur leur connaissance d'internet. Les organisateurs assurent la même proportion d'hommes et de femmes et une diversité des zones géographiques représentées, avec la présence de plusieurs communautés Kichwa tels que Karanki, Puruhá, Salasaka, ou encore Quisapincha.

Les premiers animateurs qui ont participé comme activistes digitaux sont Imbaya Cachiguango and Sacha Rosero Lema, tout deux ayant travaillé sur Kichwashun et sur d'autres projets soutenant le peuple Kichwa.

Cérémonie Kichwa

Panoramic view of Kichwa ceremony prior to the start of the workshop. Photo by E. Avila.

Vue panoramique d'une cérémonie Kichwa avant le début de l'atelier. Photo de E. Avila.

Comme de coutume avant l'inauguration de n'importe quelle activité de groupe, l'équipe organisatrice invite un “yachak” (chaman local) à réaliser une cérémonie Kichwa appelé “Wakcha kary”. Après avoir formé un cercle de fleurs sur le sol, le meneur du rituel préside la cérémonie de gratitude à la terre mère, impliquant les quatre éléments : feu, air, terre, et eau. Pour ceux qui prenaient part à cette cérémonie, ce fut l'opportunité de faire un voeu et d'invoquer les bonnes ondes pour le déroulement de l'événement.

Forum public

Pour atteindre un public plus vaste, le matin du premier jour de l'atelier était ouvert au public afin qu'il découvre les idées fondamentales de l'activisme digital de la langue Kichwa. Les intervenants ont aidé à poser le contexte du rôle fondamental que peut jouer Internet dans la stratégie d'ensemble de la redynamisation des langues oubliées. Plusieurs participants à l'atelier ont présenté leur propre projet digital, citons :

Atelier de compétences

Après la présentation publique, deux jours et demi d'ateliers intensifs ont eu lieu dans le laboratoire d'informatique d'une des écoles locales.

Mené par Imbaya and Sacha, les participants ont montré un large éventail d'outils digitaux, allant de la création de mèmes en kichwa jusqu'à aller interviewer dans la rue d'autres participants afin de créer un podcast audio. Les animateurs ont aussi montré comment l'on peut créer une vidéo simple et la mettre en ligne sur YouTube, ainsi qu'une introduction basique à Wikipedia en kichwa. Les participants ont également créer un groupe sur Telegram afin que les participants gardent le contact et puissent demander de l'aide lorsqu'il en ont besoin, et partager leur travaux ou bien organiser des activités futures.

Imbaya Cachiguango leading a workshop on digital video. Photo by E. Avila.

Imbaya Cachiguango dirigeant l'atelier sur la vidéo digitale. Photo de E. Avila.

L'un des ateliers les plus populaires est celui où l'on apprend à créer des mèmes en Kichwa et à les partager sur le groupe très apprécié de Kichwa memes.

Prochaines étapes

Logo of the Kichwa Memes Facebook group.

Logo du groupe facebook de Memes Kichwa.

L'intérêt porté par les médias locaux a aidé à passer le mot sur l'atelier en cours, ce qui a donné lieu à une recrudescence des demandes de participation. Les organisateurs espèrent maintenant en faire un événement annuel et monter de nouvelles activités similaires au sein d'autres communautés Kichwa telles que Cotacachi, Saraguro, Azuay, Riobamba, mais aussi travailler avec des écoles bilingues locales. Les participants ont également proposé d'organiser des concours et d'autres activités sur internet comme une manière amusante d'entretenir l'intérêt des gens.

Une autre idée serait de relier l'activisme digital de cette langue à d'autres formes traditionnelles d'expressions culturelles telles que l'artisanat et les connaissances sur l'agriculture. Bien que les jeunes soient les plus habitués à utiliser internet, il faut également trouver le moyen d'encourager des publics plus âgés à continuer à utiliser la langue Kichwa d'autres façons.

Cachiguango résume : “La véritable vie dans le monde Kichwa n'est pas présente que sur les réseaux sociaux, c'est seulement un outil qui nous aide à pratiquer le Kichwa. Aussi longtemps que ceux qui le parlent continuent de le faire, Le Kichwa ne disparaîtra pas”

Au Venezuela, le gouvernement bloque le référendum révocatoire, l'opposition crie à la dictature

jeudi 27 octobre 2016 à 19:02
"Danger: High Pressure." Photo by Flickr user Alejandro Forero Cuervo. Used under licence (CC BY 2.0)

“Danger Haute Tension” Photo sur Flickr d'Alejandro Forero Cuervo. Utilisée sous licence CC BY 2.0

Tout au long de 2016, le calendrier politique vénézuélien aura tourné autour d'un possible référendum révocatoire contre le président Nicolás Maduro. Une issue désormais verrouillée — définitivement selon toute apparence — par le gouvernement, qui a averti à maintes reprises qu'il ne le laisserait pas advenir.

La route du référendum révocatoire a été pavée d'obstacles. Le Conseil national Electoral vénézuélien (CNE) a multiplié les embûches de procédure, repoussé les délais légaux et créé des exigences qui ne figuraient pas à l'origine dans les textes. Malgré cela, les tenants de la révocation ont finalement réussi à ce que le Conseil national Electoral convoque la phase suivante de la procédure : la collecte des signatures de 20% des électeurs pendant la semaine du 24 octobre 2016.

Mais, coup de théâtre, la pétition a été suspendue le 20 octobre lorsque, suite aux décisions simultanées de six tribunaux, l'autorité électorale annonça sa décision de “se conformer par des mesures conservatoires” et d'ajourner le processus sine die.

La mesure controversée intervient alors que le CNE a décidé unilatéralement de suspendre jusqu'en 2017 les élections régionales — celles des gouverneurs fédérés — , qui en vertu des délais constitutionnels auraient dû intervenir cette année.

Pour le journaliste Alberto Rodríguez, inutile de tourner autour du pot :

Il faut dire les choses telles qu'elles sont, les appeler par leur nom.
Bien sûr qu'il y a une dictature au Venezuela.
Faut-il une preuve de plus ?

Dans un contexte de crise sociale, politique et économique, avec les taux de criminalité et d'inflation les plus élevés du monde (on prédit que l'inflation terminera l'année à 500 %), et sur fond de sévères et inextricables pénuries de nourriture et de médicaments, nombre de Vénézuéliens voyaient dans un référendum révocatoire le seul moyen pour le pays de recouvrer ses institutions à la dérive et de fonder un pacte de gouvernement.

Chef de l'opposition et gouverneur de l'Etat de Miranda, Henrique Capriles a qualifié de “coup d'Etat” la décision de mettre fin au référendum. Pendant ce temps, peu de temps avant d'annoncer la suspension de la procédure de destitution et juste avant de s'envoler pour une tournée en Iran, Azerbaïdjan, Arabie Saoudite et au Qatar, le Président Nicolás Maduro a exhorté dans un discours ses partisans à ne pas accepter “d'autres élections où l'oligarchie pourrait réussir un triomphe”.

Francisco Toro, rédacteur en chef du site web d'information Caracas Chronicles, a souligné dans une tribune pour le Washington Post l'effet de surprise pour la majeure partie du Venezuela :

Les Vénézuéliens ont beau être aguerris, ç'a été un vrai choc. une vaste opération de recueil de signatures pour activer officiellement le vote sur la révocation était prévue pour la semaine prochaine. Les militants d'opposition se préparaient activement à convaincre leurs électeurs de signer. Personne, pas même l'armée, ne paraît s'être attendu à ça.

Le président de l'Assemblée Nationale, Henry Ramos Allup, déclarait quant à lui par son compte Twitter :

Un gouvernement démocratique consulte le peuple. Une dictature fuit la consultation électorale. Ils tuent le RR (référendum révocatoire) parce qu'un gouvernement narco-corrompu c'est la dictature.

En réaction à la suspension, différentes parties du pays ont connu des manifestations tout le week-end, et l'Assemblée législative nationale, contrôlée par une coalition de partis d'opposition, s'est réunie en session extraordinaire dimanche dernier 23 octobre. Mais la séance du congrès a été interrompue par l'incursion dans l'hémicycle de groupes d”agitateurs pro-gouvernement.

Plusieurs partis de la coalition d'opposition ont demandé aux gens de s'unir en désobéissance civile. Dans le contexte du débat, les citoyens ont appelé les responsables politiques à se centrer sur les questions d'intérêt national :

Le problème n'est ni “la faim”, ni “le peuple”, ni “la majorité” ; c'est l'Etat de droit qui n'existe pas. Veuillez vous concentrer, MM. et MMes les députés.

Pendant la séance, l'Assemblée Nationale a décidé de procéder à la nomination immédiate des nouveaux conseillers du CNE et magistrats du Tribunal Suprême — premières étapes dans le processus de la possible mise en accusation de Nicolás Maduro. Mais il ne faut pas oublier que le Tribunal Suprême avait auparavant déclaré par avance nulles et non avenues toutes les dispositions prises par l'Assemblée Nationale.

L'accord approuvé par l'Assemblée Nationale comporte une série de points visant à restaurer l'ordre institutionnel du pays :

Tweet: Qu'établit l'accord que vient d'approuver l'Assemblée Nationale ?

Image: Accord pour la restitution de l'ordre constitutionnel

  1. Déclare la rupture de l'ordre constitutionnel et le coup d'Etat par le gouvernement Maduro.
  2. Demande l'activation des mécanismes internationaux.
  3. Officialise une plainte devant la Cour Pénale Internationale contre les fonctionnaires responsables de la suspension du référendum révocatoire.
  4. Procède immédiatement à la désignation des conseillers titulaires et suppléants du CNE.
  5. Procède immédiatement à la désignation des magistrats du Tribunal Suprême pour garantir l'indépendance des pouvoirs.
  6. Commence la procédure d'examen de la situation de Maduro à la Présidence.
  7. Forme une commission parlementaire spéciale pour le suivi du présent accord.
  8. Exige de la Force Armée qu'elle n'obéisse ni n'exécute aucun ordre à l'encontre du peuple vénézuélien.
  9. Appelle le peuple vénézuélien à défendre activement, constamment et courageusement la Constitution.

Ces dispositions n'ont pas satisfait certains citoyens qui trouvent insuffisante la riposte de l'Assemblée Nationale :

On a vendu aux gens qu'aujourd'hui serait la mère de toutes les batailles contre le régime à l'AN. elle méritait de se déclarer en session permanente

En réaction à la session extraordinaire de l'Assemblée, le député et homme fort du pouvoir Diosdado Cabello a écrit :

Le show de l'AN a pris fin : Maduro continue à être président, le pouvoir législatif touche le fond, le peuple chaviste a le moral et est combatif

L'autorité de l'Assemblée Nationale, dominée par la coalition d'opposition depuis les élections de 2015, est ignorée par le parti au pouvoir, qui contrôle les quatre pouvoirs publics restants et a même décidé d'approuver le budget national 2017 la semaine dernière sans l'autorisation de l'organe législatif.

L'avenir politique immédiat du Venezuela semble devenu une partie d'échecs où il reste très peu de possibilités de mouvements.

Le Sri Lanka paie les pots cassés de son gouvernement précédent

mercredi 26 octobre 2016 à 19:14
SriLankan Airlines - Airbus A330-243, 4R-ALG touches the runway at London Heathrow. Image from Flickr by Michael Garnett. CC BY-NC 2.0

L’ Airbus A330-243 4R-ALG de SriLankan Airlines touche la piste de l'aéroport de Londres-Heathrow. Photo sur Flickr de Michael Garnett. CC BY-NC 2.0

Cet article est initialement paru sur Groundviews, un site web primé de journalisme citoyen au Sri Lanka. Une version adaptée est publiée ici dans le cadre d'un accord de partage de contenu.

Le Sri Lanka a récemment déclaré qu’il devra débourser jusqu’à 170 millions de dollars (soit 25 milliards de roupies et plus de 156 millions d’euros) à la société de leasing AerCap Holdings, pour annuler le contrat d'acquisition de quatre avions Airbus A350 signé par le gouvernement Rajapakse en 2013.

Dans le cadre d’un « plan de restructuration », le gouvernement a également décidé de fermer la compagnie aérienne low-cost Mihin Lanka.

La compagnie aérienne nationale, SriLankan Airlines, croule sous les dettes depuis des années et ne génère plus de profit depuis 2009, soit un an après la revente des parts qu'y détenait Emirates. Plus récemment, Sri Lankan Airlines a déclaré avoir enregistré une perte nette annuelle de 16,33 milliards de roupies (soit plus de 103 millions d’euros).

Groundviews a réalisé une infographie montrant ce que le gouvernement aurait pu financer avec l’argent dépensé pour l’annulation du contrat de leasing des quatre Airbus.

Les chiffres sont tirés du rapport annuel 2015 du Ministère des Finances sri-lankais.

Infographic by Groundviews.

Infographie: Groundviews. 1 LKR = 0,00683338 USD

L’annonce du gouvernement a suscité la colère des Sri-Lankais sur les réseaux sociaux, une colère à la hauteur de la somme conséquente que représentent ces 25 milliards de roupies :

Folie aérienne @flysrilankan annule [la commande de] quatre A350, encourt 98 millions de dollars de pénalités (14 milliards de roupies). Nous payons la prodigalité de MR [Rajapakse] !

Comme le montre cette infographie, le capital versé pour annuler la commande des Airbus aurait pu être utilisé pour financer des pensions de retraite, le programme Samurdhi (l’équivalent sri-lankais de la sécurité sociale), des médicaments ou encore des fournitures scolaires. La compagnie aérienne Sri Lankan Airlines se débat avec ses dettes (dès 2009, les audits avaient d’ailleurs prévenu de la faible viabilité de la compagnie). Et pourtant, aggravant les pertes, le gouvernement s’est entêté à vouloir acheter de nouveaux avions.

Aujourd’hui, c’est donc tout le pays qui paie le prix de ces décisions gouvernementales irréfléchies… à coup de millions de dollars.