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La Russie restreint la liberté d'expression sur Internet – sauf pour l'EI ?

samedi 13 septembre 2014 à 15:33
Is the "Islamic State" now recruiting its fighters on Russian social networks? Image by Nils Henriks from Demotix.

L’ “Etat Islamique” recrute-t-il à présent ses combattants sur les réseaux sociaux russes ? Photo Nils Henriks Copyright Demotix.

L'armée internet de l’ “Etat Islamique”, après quelques revers en Occident, s'est tourné vers le réseau social russe VKontakte pour recruter et financer ses combattants, à en croire l'enquête d'un organe de média en Russie.

Dans un long article en une, Apparat, un site web russe d'informations sur l'Internet et les technologies, révèle les preuves selon lui d'une infiltration massive de l'EI dans l'espace “libre” et “confortable” des réseaux sociaux russes, après les pressions exercées sur leurs comptes Facebook et Twitter.

Selon l'article, il existe maintenant un large réseau clandestin de l'EI sur VKontakte, avec des comptes et des pages en arabe et en russe. Le réseau s'active à des actions de recrutement, de propagande et de collecte de fonds pour l'EI. Apparat indique que les premières pages ont éclos sur Vkontakte, quand Twitter et Facebook se sont mis à bloquer les comptes tenus par l'EI. Parmi les premières pages apparues sur VK de trouvent celles des branches de propagande de l’ “Etat Islamique” : en arabe, al-Itisam et en anglais, al-Hayat [à ne pas confondre avec le quotidien pan-arabe du même nom, NdT]. L'EI a également créé plusieurs clones des communautés sous la marque commune “Actualités de l'Etat Islamique”, fait ressortir l'enquête d'Apparat.

Apparat a découvert que VKontakte abrite aujourd'hui de nombreuses pages publiques de provinces du “califat”, ainsi que des comptes appartenant à des combattants et partisans de l'EI. Les journalistes relèvent que les “groupes de fans” de l'EI n'ont rien de nouveau sur VKontakte : la plus grande communauté russophone d'EI, ShamToday, est présente depuis l'automne 2013, et compte aujourd'hui plus de 12.000 abonnés.

Au cours d son enquête, Apparat dit avoir pu contacter des collecteurs et recruteurs de l'EI, à l'aide de la messagerie VKontakte et des numéros de téléphone publiés sur les communautés VK. Découvrir comment soutenir financièrement ou même rejoindre l'EI a été relativement aisé, disent les reporters d'Apparat. (Le site web prétend avoir parlé à des recrues habitant la Russie, qui disent que l'on peut atteindre l'Etat Islamique en passant par la Turquie).

Au début de ce mois, l'EI a publié une vidéo adressée au président russe Vladimir Poutine, affirmant qu'il se dirigeait vers le Nord-Caucase pour libérer la région russe et faire la guerre à la Russie. D'où la réaction du dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov, qui a déclaré sur Instagram que quiconque menace la Russie ou mentionne le nom de Poutine “sera détruit sur place”.

Apparat affirme que cette photo provient de la page VKontakte d'un des combattants russophones collaborant avec l'Etat Islamique. Source image : Apparat.cc.

VKontakte, le plus grand réseau social russophone du monde, couvre de nombreux pays post-soviétiques, et beaucoup de ces recrues proviendraient du Kazakhstan et d'Ouzbékistan. Mais il y a aussi des Russes qui rejoignent l'EI, écrit Apparat, citant “un diplômé d'institut pédagogique à Oufa, un jeune père de Derbent, et un étudiant d'université de Kazan” parmi les profils trouvés sur VKontakte.

Apparat dit avoir sollicité pour commentaires le service de presse de VKontakte et Roskomnadzor, le chien de garde des communications russes. Ce dernier n'a pas répondu à la requête, tandis que VKontakte a décliné : “Nous regrettons de ne pas commenter cela”.

En Russie, l'EI et son chef Abou Bakr al-Baghdadi sont sur la liste des organisations et individus extrémistes et terroristes. D'après la législation anti-terroriste russe, toute page de ces entités sur Internet encourt un blocage ou retrait immédiats. Pourtant, Apparat a constaté que Vkontakte n'a bloqué que deux sur plusieurs centaines de pages liées à l'EI et coupables de publier des appels à la violence.

La découverte par Apparat d'un réseau massif de l'EI sur VKontakte, existant sans entraves sur un RuNet par ailleurs de plus en plus sujet à restrictions, ne laisse pas d'étonner, surtout si on se souvient des contenus plutôt anodins qui ont mis en branle les censeurs publics dans le passé. Il y a juste un mois, par exemple, les services du Procureur de Russie ont bloqué la page VK de la “Marche pour la fédéralisation de la Sibéria” sur des accusations de séparatisme. Et en avril de cette année, Roscomnadzor a bloqué un certain nombre de pages en rapport avec le mouvement ukrainien “Secteur de Droite”, taxé d'extrémiste.

En attendant que les autorités russes publient plus d'éléments sur leur politique envers les contenus en ligne en rapport avec l'EI, difficile de nier le deux poids, deux mesures du Kremlin, qui au mieux semble relever d'une ignorance délibérée.

Mise à jour du 11 septembre 2014 : Quelques heures après la publication de l'article d'Apparat, le directeur des relations publiques de VKontakte George Lobouchkine a exprimé la position officielle du réseau social au sujet des pages “Etat Islamique”. “Nous bloquons toutes les communautés EI connues (y compris celles évoquées par l'article) qui contiennent des appels au terrorisme”, a dit M. Lobouchkine.

Un décryptage des nouvelles règlementations chinoises sur les messageries instantanées sur mobiles

samedi 13 septembre 2014 à 08:53

Hu Yong, professeur associé de l'Ecole de journalisme et communication de l'Université de Pekin, explique sur Chinafile ce qui est en jeu avec les dernières règlementations en Chine pour les messageries instantanées sur mobiles. Les règlementations interdisent aux détenteurs de comptes (à l'exception des comptes des médias enregistrés comme tels) de republier des articles sur l'actualité. Le résultat peut en être une application hautement sélective de la loi, tout commentaire pouvant tomber dans la catégorie ”commentaires sur l'actualité”.

Le combat désolant et paradoxal des Nord-Caucasiens en Ukraine de l'Est

vendredi 12 septembre 2014 à 19:41
Ukrainians, Georgians and Chechens rally at Berlin's Alexanderplatz against the Russian invasion in eastern Ukraine. 30 August 2014 by Thorsten Strasas, Demotix.

Des Ukrainiens, Géorgiens et Tchétchènes manifestent sur Alexanderplatz à Berlin contre l'invasion russe en Ukraine orientale. 30 août 2014, par Thorsten Strasas. Demotix.

Des récits courants, sans oublier des images vidéo, corroborent la présence en Ukraine de combattants du Nord-Caucase. Des régions comme la Tchétchénie et l'Ingouchie, où la Russia est indubitablement déjà en guerre, font désormais le lien entre Moscou et le récent conflit à Donetsk et Louhansk. Autrement dit, une des régions les plus violentes de la Russie contribue à présent au bain de sang de la toute nouvelle zone de guerre en Europe.

Des miliciens tchétchènes auraient rejoint les groupes séparatistes pro-Russes en Ukraine, plus précisément le bataillon Vostok, dont le nom recycle celui d'un bataillon [anglais] qui a combattu les extrémistes islamistes en Tchétchénie entre 1999 et 2009. Il s'agit des “Kadyrovtsy,” une milice d'irréguliers bien entraînés, loyale au dirigeant actuel de la Tchétchénie, Ramzan Kadyrov.

Info opérationnelle. Il s'avère que les Tchétchènes installés à Slaviansk, Kramatorsk, et apparus à Marioupol sont [du] bataillon Vostok de Kadyrov.

Kadyrov dément la présence en Ukraine de bataillons tchétchènes organisés, mais admet que des Tchétchènes sont sur le terrain et combattent de leur propre chef, en volontaires. Il y a quelques semaines, Kadyrov a reconnu que 14 combattants tchétchènes avaient pu être tués au combat en Ukraine en mai dernier.

Alors que les preuves s'accumulent d'un nombre réel de combattants tchétchènes en Ukraine très certainement bien plus important, le paradoxe de Tchétchènes se battant pour la Russie n'a pas échappé aux internautes russes :

Les Tchétchènes venus dans le Donbass protéger les Russes des Ukrainiens. Même Dieu n'aurait pas cru possible une chose pareille. Un monde fou, fou, fou !

Les Tchétchènes ne sont pas les seuls Nord-Caucasiens vus participer aux combats : le président de l'Ingouchie, Younous-Bek Yevkourov a récemment admis que certains des nouveaux combattants volontaires en Ukraine proviennent de son territoire, et on en signale en provenance d'Ossétie du Nord.

Difficile de savoir si des branches locales des services de sécurité, en mal de quotas à remplir, ont contraint des militaires du Nord-Caucase à participer à la guerre d'Ukraine, ou si ces hommes y sont allés de leur propre initiative. Le portail web Kavkazcenter a publié un article sur des centres de recrutement de volontaires qui ont ouvert à Grozny et fermé subitement. En mars 2014, Oleg Leoussenko a publié sur LiveJournal une lettre d'une Tchétchène prénommée Elmira, affirmant que les volontaires tchétchènes de Grozny sont menacés et intimidés s'ils refusent de se battre en Ukraine. Le Conseil russe des Droits de l'Homme indique aussi que des mercenaires du Daghestan opèrent en Ukraine. Selon cet organisme, les miliciens sont payés 250.000 roubles, une somme coquette pour les habitants de la république la plus pauvre de Russie. 

Ces dernières années, la Russie a augmenté les effectifs de la police et des services secrets locaux dans la région, les nouveaux arrivés en Ukraine ont donc probablement l'expérience du combat irrégulier. De force ou avec un salaire, la Russie a clairement hâte d'utiliser en Ukraine l'entraînement et l'habilité des Nord-Caucasiens au combat (et surtout au combat urbain [en anglais], dont sont dépourvus la plupart des ex-appelés et des volontaires). Et les Nord-Caucasiens militairement entraînés aperçus à présent en Ukraine proviennent très probablement de ces formations irrégulières, puisque les rangs de l'armée officielle russe comptent étonnamment peu de membres de minorités ethniques.

Tous les Tchétchènes ne combattent pas pour autant contre Kiev. Il existe au moins un groupe : une brigade portant le nom du premier président de la république tchétchène d'Ichkérie, Djokhar Doudaev, composée de membres de la diaspora tchétchène en Europe revenus pour résister à la Russie, dit Mairbek Vatchagaev.

Beaucoup d'Ukrainiens ont déployé une remarquable capacité à distinguer entre les Tchétchènes comme nation et les “Kadyrovtsy” pro-russes qui sont apparus dans l'Est. Ainsi, sur Facebook, un utilisateur ukrainien a écrit du bataillon Doudaev :

Это настоящие чеченцы, а не кадыровцы. Это как украинцы и сепаратисты.

Ce sont des vrais Tchétchènes, pas des Kadyrovtsy. C'est comme [la différence entre] Ukrainiens et séparatistes.

Movladi Oudougov, un idéologue de l'Emirat du Caucase, a récemment redéfini les Kadyrovtsy dans le contexte du conflit ukrainien, en affirmant que les hommes de Kadyrov n'étaient pas de vrais Tchétchènes : 

Что касается кадыровцев, то это не наемники, а путинские собаки, русские марионетки без рода, без племени. В Чечне русские оккупанты называют их “разовыми”, потому что их используют как расходный материал в боях против муджахидов. 

Concernant les Kadyrovtsy, ce ne sont pas des  mercenaires mais les chiens de Poutine, des marionettes russes sans attaches ni tradition. En Tchétchénie, les occupants russent les appellent les “aller-simple”, parce qu'ils les utilisent comme du matériel consommable dans leurs batailles avec les moudjahidines.

Oudougov n'a peut-être pas tort de parler du caractère “jetable” des Kadyrovtsy aux yeux de Moscou. Alors que le conflit s'éternise en Ukraine de l'Est, des témoignages épars font état de Tchétchènes qui ont déserté les séparatistes à cause de mauvais traitements.

Dans le Nord-Caucase, l'insécurité permanente et les régimes répressifs locaux installés par le Kremlin sont un fardeau ancien pour la population. Hélas, la violence structurelle de cette région essaime désormais aussi en Ukraine.

A Porto Alegre, histoire d'un squat enfin transformé en logements sociaux

vendredi 12 septembre 2014 à 08:31
The building was unoccupied for 20 years before being expropriated. Photo: Ocupação Saraí/Facebook

L'immeuble est resté inoccupé pendant 20 ans avant d'être saisi. Photo: Ocupação Saraí/Facebook

[Tous les liens renvoient vers des pages en portugais.]

Au cœur de Porto Alegre, au Brésil, environ deux douzaines de familles ont squatté un immeuble vide pendant dix mois avant que leur séjour ne touche à sa fin au début de l'été. Non pas par une intervention de la police, comme pour les précédentes occupations de l'immeuble, mais par un décret, le 4 juillet, saisissant la propriété pour en faire un logement social. Leur mobilisation a eu le mérite de “sensibiliser le gouvernement de l'état”, qui a attribué au bâtiment un rôle social.

Toujours lieu de résidence pour les familles, il a aussi été transformé en un espace culturel du centre ville de Porto Alegre. Le mouvement, appelé “Occupons Saraí”, a utilisé Facebook pour attirer l'attention et se lier avec des squats d'autres régions du pays, ainsi que YouTube pour montrer la vie au sein de leur communauté, et le hashtasg #OcupaSaraiEuApoio (#JeSoutiensOccuponsSarai) pour permettre aux abonnés de les suivre sur Twitter. Une pétition en ligne soutenant l'occupation de la propriété a également vu le jour.

Soixante jours avant que le gouvernement de l'état décide de signer ou non le décret d'expropriation, une vidéo expliquant les raisons d'être du squat de Saraí a circulé. Parmi celles-ci figure le fait que le bâtiment fut initialement construit pour loger quarante familles, mais est demeuré vacant pendant près de dix ans, “ne remplissant aucune fonction sociale”. La vidéo essaie de faire prendre conscience de la situation des habitants du squat et de la façon dont le public peut soutenir leur cause.

Além de residência, edifício virou espaço cultural no centro de Porto Alegre. Foto: Ocupação Saraí/Facebook

L'un des enfants vivant dans le squat prend part à une manifestation organisée par les résidents de Saraí. Photo: Ocupação Saraí/Facebook

L'histoire d'un immeuble dans lequel personne n'a vécu

Construit pour faire office de logement abordable avec des financements de la National Housing Bank [Banque Nationale pour le Logement], une compagnie d'état brésilienne qui finançait des investissements immobiliers, l'immeuble n'a jamais été utilisé dans ce but. Après avoir abrité les bureaux de la banque publique brésilienne Caixa Econômica Federal, il est resté à l'abandon pendant presque vingt ans.

D'après une enquête  spéciale du journal indépendant local Jornal Tabaré, une important entreprise immobilière l'a racheté à la banque au début des années 2000 pour 600 000 réals (environ 271 000 dollars américains). Environ deux ans après avoir acheté l'immeuble et ne lui ayant trouvé aucune utilité, l'entreprise l'a revendu au prix de 1,2 millions de réals (450 000 dollars, soit le double du montant de l'achat initial), à un homme agissant au nom de la plus grande organisation criminelle brésilienne, le PCC (Primeiro Comando da Capital [Premier commando de la capitale]).

Le groupe est basé à São Paulo mais possède des filiales dans tous les états du Brésil, ainsi qu'au Paraguay et en Bolivie. Les membres du gang avaient l'intention de creuser, sous l'immeuble abandonné de Porto Alegre, un tunnel menant au siège social d'une banque à quelques mètres de là. D'après l'enquêteTabaré, à la suite du scandale que ce cas a généré, “le bâtiment est revenu sous le contrôle de la compagnie [immobilière] bien que le transfert de propriété de l'immeuble à la Caixa Econômica Federal n'ait jamais été effectué”.

Parmi les occupations organisées depuis 2005 par le Movimento Nacional de Luta pela Moradia (MNLM) (Mouvement National de la Lutte pour le Logement) :

Photo: Ocupação Saraí/Facebook

Le coin de l'immeuble où se trouve Occupons Saraí à Porto Alegre au Brésil. Photo: Ocupação Saraí/Facebook

Duas delas foram ações de denúncia pela situação do prédio, com duração de um ou dois dias. A ocupação de moradia que mais durou teve 4 meses, de 20 de novembro de 2006 a 23 de março de 2007. A maneira como foram removidos também é simbólica – mas da repressão.

Deux furent des mouvements de protestation pour dénoncer la situation de l'immeuble et ont duré un ou deux jours. L'occupation la plus longue a duré quatre mois, du 20 novembre 2006 au 23 mars 2007. La façon dont les occupants furent évacués fut elle aussi symbolique, mais à cause de la répression.

En août 2013, des familles du MNLM ont une fois de plus occupé l'immeuble inutilisé et vide du centre ville. Un matin de septembre, la police militaire est intervenue. Alors qu'ils réparaient un tuyau de l'immeuble, quelques résidents ont déclaré avoir été harcelés et battus par des officiers de police qui passaient par là. Le propriétaire lui-même a été jusqu'à reconnaître le caractère “irrégulier” de l'intervention.

Mais Saraí a résisté. Dix mois allaient s'écouler avant la décision de l'état. La notion de propriété, fortement débattue et analysée parmi les squatteurs, a été expliquée dans une vidéo par Gloria Maria, une petite fille pour qui Saraí a été sa maison pendant les derniers mois. Elle a l'appelée “le droit de posséder”. Après avoir dressé la liste des choses qu'une personne peut posséder, Gloria Maria fait le lien entre la propriété et le “droit de posséder” une nationalité, qu'elle appelle “un endroit temporaire”.

La logique du marché

Le droit à un logement décent est inscrit dans la constitution brésilienne. Malgré cela et selon un rapport publié par le Programme des Nations unies pour les établissements humains [UN-Habitat], trente trois millions de brésiliens sont sans logement. D'après les données du recensement effectué par l'Instituto Brasileiro de Geografia e Estatística (Institut brésilien de géographie et statistiques, IBGE) :

Existem hoje no Brasil, segundo o censo, pouco mais de 6,07 milhões de domicílios vagos, incluindo os que estão em construção. O número não leva em conta as moradias de ocupação ocasional (de veraneio, por exemplo) nem casas cujos moradores estavam temporariamente ausentes durante a pesquisa. Mesmo assim, essa quantidade supera em cerca de 200 mil o número de habitações que precisariam ser construídas para que todas as famílias brasileiras vivessem em locais considerados adequados: 5,8 milhões.

D'après le recensement, il y a aujourd'hui au Brésil environ 6,07 millions d'habitations vides, en comptant celles qui sont en construction. Ce nombre n'inclue pas les logements occasionnels (par exemples les maisons de vacances) ni les maisons dont les habitants étaient temporairement absents pendant l'étude. Malgré cela, ce nombre excède d'environ 200 000 celui des habitations qu'il serait nécessaire de construire pour que tous les Brésiliens vivent dans des logements adéquats: 5,8 millions.

A la fin du mois d'avril de cette année, les occupants et les propriétaires se sont réunis pour tenter de résoudre cette situation. Après avoir affirmé qu'il allait vendre l'immeuble et rejeter l'offre du gouvernement de Rio Grande do Sul — 1,9 millions de réals (452 000 dollars) — le propriétaire est revenu sur sa décision et a prétendu réfléchir à l'utilisation de cette adresse comme siège social de son entreprise. Il a déjà demandé 4,5 millions de réals (1,8 millions de dollars).

Dans une autre vidéo de Saraí, l'architecte Claudia Favaro soutient que “la démarche d'évacuer de plus en plus de pauvres gens des centres urbains crée une polémique quant au développement des équipements. Le transport des équipements et infrastructures là où les gens sont amenés à vivre coûte bien plus cher”. Mais c'est ce qui se passe malgré tout.

Comment Saraí a fait descendre le quartier dans la rue

Alors que les résidents de Saraí poursuivaient leur lutte, les unes des principaux médias locaux n'ont fait aucune place à leurs efforts. Le mouvement a alors trouvé une façon de continuer en marge. Une série d'évènements publics, allant de la distribution de tracts à des spectacles artistiques et des manifestations devant le palais gouvernemental et des soirées clandestines dans le bâtiment, ont été organisées et rendues publiques sur la page Facebook de Saraí.

L'occupation a attiré de plus en plus de sympathisants chaque jour. Le public a découvert l'histoire des familles grâce aux réseaux sociaux, partagé d'une “timeline” à une autre.

La mobilisation des membres de Saraí sur internet est devenu un exemple de l'impact que les mouvements sociaux peuvent avoir grâce aux médias sociaux. Internet ne fonctionne pas sans une action dans le monde réel. En retour, ce dernier organise et débat sur internet. Réussir à atteindre un équilibre entre ces deux états est un facteur clé de succès (ou d'échec) de nombreux “nouveaux” mouvements sociaux, de Occupons Wall Street à Occupons Saraí.

Les familles qui occupent Saraí en ce moment ont jusqu'à la fin du mois pour quitter l'immeuble pour que l'état puisse entamer les démarches légales de saisie de la propriété. Les 70 personnes qui y vivent actuellement n'y bénéficieront pas toutes d'appartements, qui, selon les estimations, devraient être achevés dans deux ans. Le gouvernement de l'état doit aussi prendre en compte les gens déjà inscrits sur la liste d'attente pour un logement. Mais alors que la bureaucratie assume son rôle, on célèbre la victoire dans l'immeuble de Rua Caldas Júnior :

http://vimeo.com/100719064

Le Kirghizistan à nouveau dans l'obscurité cet hiver ?

vendredi 12 septembre 2014 à 08:12
One block of appartments finds itself the wrong side of a Bishkek blackout. Photo by Kloop.kg.

Un immeuble du” mauvais côté” de la ville lors d'une coupure d'électricité à Bishkek. Photo de Kloop.kg.

 

[Sauf indication contraire, les liens dirigent vers des pages en anglais.]

Les internautes du Kirghizistan l'ont surnommé leur “journée de la marmotte”, une parenthèse dans le temps, où l'on fait tout ce que l'on peut dans le froid hivernal d'une coupure d'électricité.

De fait, au cours des dernières années, les coupures d'électricité ont été régulières. Mais l'énergie électrique nationale dépend en grande partie d'un seul barrage [fr], et le niveau de l'eau étant particulièrement bas cette année, il y a tout lieu de penser que les coupures vont se multiplier.

C'est en 2008 que le pays a été plongé dans l'obscurité pour la première fois, avec un niveau de l'eau du barrage de Toktogul aussi bas que cette année. Ce barrage alimente la station hydro-électrique et le niveau d'eau avait provoqué des coupures alternées dans tout le pays. A cette époque, le Président Kurmanbek Bakiyev avait été accusé de provoquer la pénurie en exportant l'électricité. L'hiver suivant le régime avait ajouté de l'huile sur le feu du mécontentement social en annonçant des augmentations significatives  des montants des factures d'électricité. Au printemps suivant, les partisans de Bakiyev avaient violemment été écartés du pouvoir.

Comme l'explique Jocelyn Murphy, consultant énergétique indépendant envoyé par l'USAID (Agence des Etats Unis pour le Développement International), le système énergétique reste très fragile et risque de s'effondrer.

Entre 2002 et 2007, le Kirghizistan a exporté trop d'électricité. En conséquence, en 2008, le Kirghizistan a amené à son niveau “critique” le barrage de Toktogul d'une capacité de 5.5 milliards de m3. La recommandation la plus sage est d'imposer à la population une réduction sur sa consommation électrique. Si les autorités ne sont pas en capacité de le faire, la centrale hydro-électrique de Toktogul pourrait s'arrêter.

Kyrgyzstan's energy deficit has been on the front pages of local newspapers since July. Photo by Chris Rickleton.

Au Kirghizistan la pénurie d'électricité fait la une de tous les journaux locaux. Photo de Chris Rickleton.

Le planning d'approvisionnement sera-t-il conforme aux promesses gouvernementales ?

Au mois d'août, lors d'une réunion pour préparer la saison automne-hiver, le Premier Ministre Joomart Otorbaev [fr] a demandé à chaque région du pays de réduire [ru] sa consommation électrique. Selon Otorbaev, toute région qui dépassera la consommation qui lui est allouée sera rayée du planning d'approvisionnement.

Les résultats de ces conversations sont mal passés [ru] auprès des lecteurs du site Vecherny Bishkek:

За всё оплачено, а за газ даже вперед. на тепло на порядок больше платим и дерут с тех кто платит и ещё хотят содрать п.ч. платим за них и для них.как строились так строятся элитки, спрашивается какой они энергией питаются? кизяком? во многих нет ТЦ и газа, всё на ээ. кто давал согласование? 

Nous avons payé pour les installations que nous utilisons. Nous avons aussi payé une avance sur le gaz pour avoir chaud cet hiver. Pourquoi devons-nous payer pour ces nouveaux appartements de luxe qui sont construits partout dans la ville, dont la plupart sont équipés en tout électrique car ils ne sont pas reliés au chauffage urbain et ne sont pas alimentés en gaz. Qui a donné l'autorisation?

Le Ministre de l'Energie, Osmonbek Artykbaev [ru],  a promis [ru] un peu plus tard que les coupures d'électricité prévues cette année serait évitées, malgré un déficit d'approvisionnement [ru] d'environ 1.6 milliards KW/H.

En faisant référence à un projet des années 1990 qui a échoué, de faire du Kirghizistan une démocratie modèle de style européenne, Akmatbek Jumabaev, lecteur de Kloop.kg fait remarquer:

Швейцарию тоже обещали.

Ils avaient aussi promis que l'on deviendrait comme la Suisse.

гэс1

Le barrage hydraulique alimenté par le réservoir de Toqtogul. Photo from Wikipedia.

Et une autre internaute commente [ru]:

день сурка будет повторятся каждый год пока не будут достроены ГЭСы, пока не будет доведена работа по возведению подстанций и ЛЭП.

On va avoir notre Jour de la Marmotte chaque année jusqu'à ce que la nouvelle centrale électrique soit construite et que les travaux sur les lignes soient terminés.

Mais la construction de la plus importante centrale, Kambarata-1 [fr] financée par la Russsie, avance lentement. Si le barrage haut de 275 mètres est construit un jour, il devrait permettre au Kirghizistan d'exporter de l'électricité jusqu'en Chine et en Asie du Sud.

A la recherche de solutions

Au cours des années, les coupures d'électricité ont transformé les habitants en experts en énergie. Nurmat Nadyrbekov a envoyé un courrier [ru] aux éditorialistes des journaux de Vecherny Bishkek où il plaide en faveur de la construction de mini centrales électriques dans tout le pays:

Я думаю, нужно развивать энергетику нашей страны. В нашей стране очень много маленьких рек и каналов. Нужно их использовать правильно. Каждому району (селу, пригороду) построить свою мини-ГЭС, которая будет обеспечивать несколько тысяч домов электроэнергией.

Так мы сможем обеспечить энергией каждую область, каждый район, каждое село, каждый дом. Плюс ко всему сохраним нынешние ГЭС от перегрузок. А значит не будет веерных отключений и низкого качества электроэнергии.

Je pense que nous devons développer le secteur énergétique dans notre pays. Il y a beaucoup de petites rivières et de canaux au Kirghizistan et il faut les utiliser à bon escient. Chaque communauté (village, canton) doit construire sa propre mini-centrale hydraulique, pour alimenter quelques milliers de foyers. De cette façon on pourra fournir l'électricité à toutes les régions, toutes les circonscriptions, tous les villages, tous les foyers. De plus on évitera aux grosses centrales hydro-électriques une surcharge. Et il n'y aura plus de coupures d'électricité.

Le 8 septembre, Nurbek Toktakunov, juriste réputé et défenseur des droits humains, a posté [ru] sur le blog de sa société une autre solution pour ne pas souffrir du programme de coupures – des habitations et des bureaux mobiles.

Панические настроения в Правительстве КР по энергетическим проблемам, веерные отключения электроэнергии, повышение тарифов на свет и тепло подвигли команду Партнерской группы «Прецедент» на поиски энергетической независимости и в результате мы пришли к идее мобильного офиса и жилья, не привязанного к инфраструктуре. Мы приобрели просторную палатку, солнечную батарею, спальные мешки, накопители энергии, модем, котел и чайник, выехали в в село Тосор Иссык-Кульской области и два дня работали прямо на пляже, поддерживая связь со своим стационарным столичным офисом.

Le vent de panique qui règne au sein du gouvernement du Kirghizistan sur les problèmes énergétiques, les coupures d'électricité et l'augmentation des factures de chauffage et d'électricité pour les usagers ont incité le précédent groupe de partenaires à rechercher l'indépendance énergétique. Nous avons eu l'idée d'habitations et de bureaux mobiles qui ne soient pas liés aux infrastructures existantes. Nous avons acheté une grande tente, un panneau solaire, des sacs de couchage, une batterie pour stocker l'énergie, un modem et une théière et avons installé notre campement dans le village de Torsor au bord du lac Issyk-Kul. Nous avons travaillé sur la plage pendant deux jours tout en restant en contact avec notre bureau dans la capitale.

Mais malgré tout, la patience s'amenuise sur le front énergétique, comme dit [ru] Diesel, habitué d'un forum populaire:

Грузия, Армения, Молдова, Казахстан, да практически все бывшие республики СССР смогли это сделать. И теперь у них у всех со светом все нормально. Чем мы хуже? Мы что самые тупые? Ладно страны Европы или там азиатские тигры. Наши бывшие сограждане с таким же менталитетом и таким же прошлым как у нас смогли привести свои энергосистемы в порядок. Нам нужно просто тупо скопировать.

La Géorgie, l'Arménie, la Moldavie, le Kazakhstan, et presque toutes les anciennes républiques soviétiques ont pu résoudre ce problème. Et ils n'ont plus de problèmes d'électricité. Pourquoi faisons-nous moins bien qu'eux? Est-on bêtes à ce point? Je ne parle pas des pays de l'Union Européennes ni des “Tigres Asiatiques”. Nos anciens concitoyens, avec la même mentalité et le même passé que nous ont réussi à faire fonctionner correctement leurs systèmes énergétiques. Nous n'avons qu'à bêtement copier ce qu'ils ont fait.