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Le pape François visitera la Macédoine du Nord en mai, peu après l'élection présidentielle

jeudi 2 mai 2019 à 12:11
Pope Francis photo on the website papa.mk

Capture d'écran du site web papa.mk, mis en place par le gouvernement de la République de Macédoine du Nord à l'occasion de la visite du pape le 7 mai 2019.

Le pape François sera en visite en Macédoine du Nord en mai 2019, seulement deux jours après le second tour de l'élection présidentielle.

C’est la première fois qu’un pape se rend dans le pays ; cette visite fait partie d’une tournée régionale de trois jours, comprenant également une étape en Bulgarie.

Le gouvernement Nord-Macédonien a mis en place un site web, papa.mk, pour faciliter la visite. En adéquation avec le caractère multi-culturel du pays, le contenu du site internet est disponible en trois langues : macédonien, albanais et anglais.

Certains Nord-Macédoniens ont remis en question le fait que le gouvernement héberge le site internet car cela entre en contradiction avec le caractère laïc du pays.

Les citoyens macédoniens peuvent faire des demandes de billets gratuits d’accès à la Sainte messe du souverain pontife par l'intermédiaire des paroisses locales, tandis que les étrangers devront réserver leurs places via le site. La messe aura lieu le 7 mai sur la place principale de Skopje, la capitale.

Moins d’un pour cent de la population nord-macédonienne est catholique, alors que soixante-cinq pour cent se revendique de la foi orthodoxe et trente-trois pour cent de l’islam. En dépit de sa petite taille, la communauté catholique locale est extrêmement variée, comprenant des Macédoniens d’origine, des Albanais, des Croates, des Slovènes ainsi que des Polonais.

Par ailleurs, le catholicisme jouit d’une résonance religieuse particulière dans le pays car Skopje est le lieu de naissance de Mère Teresa (1910-1997), officiellement canonisée en tant que sainte Teresa de Calcutta. Cette missionnaire parmi les plus populaires du 20ème siècle et lauréate du prix Nobel de la paix est née au sein d’une famille d’origine albanaise dont la maison était située à l’endroit même où se trouve aujourd'hui la place principale de la ville.

Les aspects politiques de cette visite éclipsent néanmoins sa dimension religieuse : dans son rôle de chef d’État, le souverain pontife a dans son programme une rencontre avec le premier ministre ainsi qu’avec le président sortantdont le mandat prendra fin cinq jours plus tard.

Le public macédonien semble considérer la venue du pape comme une marque d’adoubement par l’Occident et comme un coup de pouce aux efforts du gouvernement pour rapprocher le pays d’une adhésion à l’OTAN et à l’Union Européenne. Un tweet d’un ancien général de la police, Stojanche Angelov, reflète ce sentiment. Ce dernier a réagi à la visite préliminaire au Vatican du chef du Bureau pour la sécurité publique de Macédoine (PSB).

Grâce à la sagesse, au courage et à l’opiniâtreté de la politique internationale de ce gouvernement, notre petit pays avance à grandes enjambées ! Le directeur du PSB Sasho Tasevski élabore une sécurité du plus haut niveau pour le séjour du pape François à Skopje.
Stevo [Pendarovski] président !

Un mois avant la tournée du Pape, le macédonien a été ajoutél à l’éventail de langues de Vatican News, l’organe de communication du Saint-Siège, devenant ainsi la trente-quatrième langue à rejoindre le portail d’information. Un geste que Kiro Stojanov, l’évêque de Skopje a qualifié de « prémices de la visite apostolique du pape François ».

En septembre, le pape se rendra au Mozambique, à Madagascar et à l’île Maurice. Un article sur les réactions au Mozambique quant à cette tournée est déjà disponible sur Global Voices.

En amont du voyage apostolique du pape François en Macédoine du Nord le 7 mai, @VaticanNews se dote d’une page consacrée à la langue macédonienne.

En septembre, le pape se rendra au Mozambique, à Madagascar et à l’île Maurice. Un article sur les réactions au Mozambique quant à cette tournée est déjà disponible sur Global Voices.

@ActLenguas : Netzahualcóyotl López diffuse le mixtèque sur Internet, du 29 avril au 5 mai

jeudi 2 mai 2019 à 10:52

Photographie fournie par Netzahualcóyotl López.

En 2019, nous avons décidé d'inviter différents hôtes à piloter le compte Twitter @ActLenguas (activisme linguistique) et à partager leur expérience sur la revitalisation et la promotion de leur langue natale. Cette semaine, nous nous sommes entretenus avec Netzahualcóyotl López (@tunchakua).

Rising Voices (RV): Pouvez-vous nous parler de vous ?

Soy originario de Yucuhiti, Oax. Hablo el Mixteco del suroeste, entusiasta por el desarrollo de software, ayudo en la localización del navegador Firefox para mixteco del suroeste en la versión móvil y web, en un tiempo atrás desarrollé una App para aprender mixteco.

Je viens de Yucuhiti, dans l'État d'Oaxaca, au Mexique, et je parle le mixtèque du sud-ouest. Je suis un fan de programmation et je suis en train d'aider à localiser les versions internet et mobile du navigateur Firefox en mixtèque du sud-ouest. Il y a quelque temps, j'ai aussi développé une app pour apprendre le mixtèque.

RV : Quel est l'état actuel de votre langue sur et en dehors d'Internet ?

El mixteco cada vez tiene más presencia en sitios web, desde campañas en Facebook hasta traductores en línea, sin embargo es una integración continua que evolucionara constantemente. No obstante, con la presencia del mixteco en la red aún es necesario concientizar a los hablantes nativos para revitalizar el uso del mixteco en las comunidades, principalmente con las generaciones nuevas.

La langue mixtèque est de plus en plus présente sur des sites internet comme des campagnes Facebook et des logiciels de traduction en ligne. C'est une intégration qui évolue constamment. Cependant, même si le mixtèque est présent sur Internet, il est nécessaire de sensibiliser les gens de façon que les locuteurs natifs revitalisent son usage dans les communautés, en particulier auprès des nouvelles générations.

RV : Sur quels sujets allez-vous communiquer sur @ActLenguas ?

Lenguas indígenas con presencia en las tecnologías.

La présence des langues autochtones dans la technologie.

RV : Qu'est-ce qui motive votre militantisme linguistique pour le mixtèque ? Qu'espérez-vous pour votre langue ?

Lo estupendo que es visualizar contenidos en mi lengua en la red. Que las nuevas generaciones continúen hablándola y la sigan preservando de generación en generación.

C'est super de voir du contenu dans ma langue sur Internet. Que les nouvelles générations continuent de le parler et de le préserver de génération en génération.

De l'art de promouvoir le soft power russe dans les Balkans à travers des magazines de santé alternatifs

jeudi 2 mai 2019 à 10:00

Des conseils banals sur la santé vendus comme “conseils russes”

Les magazines Le docteur russe (Руски доктор), Meilleure vie (Бољи живот), L'encyclopédie russe de la santé (Руска енциклопедија здравља) et L'herboriste russe (Ruski travar). Photo de Meta.mk News Agency, CC BY-NC.

Ceci est la version remaniée d'un article de Meta.mk News Agency, un projet de la fondation Metamorphosis. Elle est publiée ici dans le cadre d'un accord de partage de contenu.

Le docteur russe. L'herboriste russe. L'encyclopédie russe de la santé. Dans les kiosques à journaux à travers les Balkans, il est devenu de plus en plus facile de trouver des magazines de médecines alternatives du même ordre ces dernières années.

Ils ciblent paraît-il les personnes âgées, et au moins une demi-douzaine d'entre eux sont publiés en serbe d'après leur ours [N.d.T. encadré d'un journal où figurent les principales informations le concernant], puis distribués dans les pays voisins. Le magazine Le docteur russe possède par exemple quatre éditions différentes en fonction du pays.

Dans quasiment tous ces magazines, la palette de couleurs emprunte celle du drapeau russe, et une version miniature du drapeau actuel est souvent représentée dans leur logo ou se déploie dans les pages intérieures en tant qu'élément de design.

On y trouve en guise de contenu des conseils de santé prosaïques, tels que faire de l'exercice et manger des légumes, mais toujours qualifiés de “conseils russes”. “Efforcez-vous de ne pas dépendre des autres,” suggère un article intitulé “Les conseils russes de longévité” publié dans Élixir russe : Thés et baumes, “Vous devriez éprouver de la passion pour quelque chose. Avoir de bon amis est important. Riez davantage.”

Le président russe Vladimir Poutine semble être incontournable en une. Il apparaît par exemple en couverture du n°5 de L'herboriste russe accompagné d'un article intitulé “En exclusivité : la thérapie à base de champignons de Vladimir Poutine.” L'article en pages intérieures s'intéresse en fait aux bénéfices des champignons sur la santé selon des spécialistes russes. On trouve dans le même numéro un autre article sur la guérison par les cristaux, intitulé “Pourquoi Poutine utilise des malachites.”

Il arrive que ces principes russes de bon sens paraissent quelque peu détachés de la réalité dans les Balkans. Il y a parfois des articles sur les bénéfices du thé fait à partir de plantes que l'on ne peut trouver que dans la taïga à l'est de la Sibérie ou dans les steppes russes, ou sur la manière dont le lait de jument [fr] est utilisé dans la médecine traditionnelle yakoute.

Soit dit en passant, toutes les rubriques de ces magazines ne parlent pas de santé. Le docteur russe possède par exemple une rubrique intitulée “Les grands esprits russes” consacrée à des célébrités telles que la cosmonaute Valentina Terechkova [fr]. Sa version macédonienne comprend même un “horoscope russe”, qui ne diffère en rien d'un horoscope quelconque.

Logos et pages intérieures de plusieurs magazines qui intègrent la promotion de symboles de la Russie dans leur conception graphique. Photo de Meta.mk, CC BY.

Si la plupart des contenus relèvent du bon sens, ils peuvent présenter un risque lorsqu'ils vendent à des personnes vulnérables des remèdes non testés contre des maladies mortelles.

Ainsi, dans le cinquième numéro de L'herboriste russe, un article intitulé “Traitement russe contre l'hypertension en mars” laisse entendre que se tracer des lignes sur le corps avec de l'iode certains jours du mois fait office de remède à l'hypertension en “complément de la thérapie médicale officielle.” Quelques pages plus loin, un autre article prétend qu'une teinture d'une certaine herbe “augmente les chances de guérir” du cancer du sein, mais sans qu'il ne soit fait mention d'essais cliniques.

Parfois, ce genre de conseils peut réellement causer des dommages corporels. Un autre article dans la même publication s'interroge : “Le kérosène peut-il tuer le cancer ?” et il recommande de boire le carburant, en commençant par quelques gouttes puis en augmentant progressivement l'apport quotidien à quelques cuillères, tout en avertissant du fait “qu”il y a eu dans certains cas des effets négatifs et d'auto-intoxication.”

Dans des pays où le système de santé publique est médiocre, de telles assertions peuvent donner de faux espoirs à des gens qui ne peuvent se permettre d'accéder à un traitement de qualité dans le système de santé privé tout en mettant leur vie en danger. “Il existe un remède à toutes les maladies !,” proclame L'herboriste russe en une de son premier numéro.

Dans les magazines, on trouve des publicités pour des produits médicinaux et pharmaceutiques locaux et alternatifs. Ces magazines veillent à se dégager de toute responsabilité en choisissant soigneusement leurs mots et en faisant paraître des clauses de non-responsabilité en petits caractères. Certaines de ces clauses de non-responsabilité indiquent : “Nos articles ont seulement vocation à informer et ne devraient pas être utilisés en remplacement de la thérapie ou des médicaments prescrits par votre médecin” ou “l'éditeur décline toute responsabilité en ce qui concerne la véracité des publicités et des promotions” et “la responsabilité pour ce qui est de la qualité des produits liés à certaines maladies incombe uniquement à ceux qui les recommandent en guise de traitement. L'entreprise et la salle de rédaction ne sont pas tenus de fournir de plus amples explications.”

Pour certaines personnes sur les réseaux sociaux, ces publications s'apparentent à du charlatanisme.

Lisez Le docteur russe et enduisez-vous de Zelyonka (un colorant), pendant que les Chinois et les Américains déchiffrent le code génétique à l'aide du système CRISPR et s'apprêtent chaque jour un peu plus à trouver un remède contre le cancer…

Leurs éditeurs

Tous les magazines sur lesquels nous avons enquêté sont publiés par deux entreprises situées en Serbie. Ils sont distribués dans des points de vente en Bosnie-Herzégovine, au Monténégro, en Macédoine, en Croatie et en Slovénie.

Data displaying the names of alternative medicine magazines branded as Russian with dates of first issue.

Tableau : publications de médecines alternatives estampillées “russes” et la date de leur premier numéro

Color Media, aussi connu sous le nom de Color Press Group, possède le plus large portefeuille de magazines : Le docteur russe, tout comme ses éditions spécialisées Meilleure vie (Бољи живот), Élixir : thés et baumes (Еликсир: Чајеви и мелеми) et L'encyclopédie russe de la santé (Руска енциклопедија здравља).

La version serbe du Docteur russe s'appuie sur la publication Médecin populaire russe (Народный лекарь), alors que L'encyclopédie russe de la santé est une publication autorisée d'un mensuel appelé Encyclopédie de la santé (Энциклопедия здоровья) en Russie.

Les antennes de Color Media publient une édition en macédonien du Docteur russe (Руски доктор) depuis mars 2016 ainsi que des versions en croate (Ruski doktor) et en slovène (Ruski zdravnik) depuis juillet 2017. Le PDG de l'entreprise, Robert Coban, en fait la promotion sur les réseaux sociaux :

Tout le monde aime la médecine russe :) édition slovène et croate du magazine Le docteur russe @ Color Press Group…

L'herboriste russe (Ruski travar) est publié par une autre grosse entreprise serbe du secteur des médias du nom de Novosti.

Sur les réseaux sociaux, certains en Serbie commentent la relation entre promotion de la Russie et nationalisme local :

Les quatre piliers de l'identité serbe :
1. Delije Sever [supporters du club de l'Etoile rouge de Belgrade]
2. Le parrain [liens familiaux]
3. Paralija [lieu de villégiature en été sur la côte grecque]
4. Le docteur russe

Réalité contre propagande

Vodka against toothache:
Take a sip of vodka and hold it on the aching tooth, jumble and then spit it out. Repeat three times with short pauses to prevent irritation of the gums. (Russian Herbalist #5)

De la vodka contre le mal de dents :
Prenez une petite gorgée de vodka et mettez-la contre la dent douloureuse, mélangez puis recrachez-la. Répétez à trois reprises avec de courtes pauses pour éviter l'irritation des gencives. (L'herboriste russe #5)

Contrairement à l'image véhiculée par ces magazines, la Russie n'est pas particulièrement exemplaire en ce qui concerne la santé de sa population. L'espérance de vie moyenne est ainsi parmi les plus basses d'Europe. Avec 71,6 ans (77 pour les femmes et 66 pour les hommes selon les données de l'Organisation mondiale de la santé de 2016), elle se place derrière tous les pays des Balkans en dehors du Kosovo.

Les pays des Balkans s'en sortent en fait mieux que la Russie à cet égard. L'espérance de vie moyenne à la naissance en Serbie et en Macédoine du Nord est respectivement de 75,2 et de 75,7 ans tandis qu'en Croatie et en Slovénie, les seuls États de l'ex-Yougoslavie qui font partie de l'Union européenne, elle est respectivement de 78 et de 80,8 ans.

Des recherches médicales publiées en 2014 ont révélé que la probabilité pour un homme russe de mourir avant l'âge de 55 ans était de 25%. L'étude pointe du doigt l'alcoolisme comme raison majeure, et l'addiction au tabac arrive en second. Selon un article publié dans le New York Times au sujet de cette étude, le taux de mortalité a chuté au cours de la perestroïka lorsque Gorbatchev a mis en place une prohibition partielle de l'alcool [fr], mais a augmenté de nouveau suite à l'effondrement de l'URSS.

Aucun des magazines sur lesquels nous avons mené l'étude ne mettait en garde contre l'abus d'alcool ou de tabac.

La garde à vue de Gaspard Glanz symptomatique de la dérive autoritaire française contre les journalistes

mercredi 1 mai 2019 à 15:17

Inquiétude et solidarité autour de la liberté d'informer en France

Capture d ecran d'une video de l'arrestation de Gaspard Glanz le 20 Avril 2019 par Taranis News

Gaspard Glanz est un journaliste vidéo indépendant français qui a créé en 2011 son agence d'images Taranis News pour couvrir les mouvements sociaux en France. Le 20 avril 2019,  il a été arrêté pour avoir filmé une manifestation sur la place de la République à Paris. Suite à son arrestation, Glanz a été placé en garde à vue pour “insulte à un représentant de l'autorité publique” et “participation à un groupe en vue de provoquer des actes de violence et des dégradations”.

Gaspard Glanz, fiché S (un fichier de personnes recherchées dans le cadre des dispositions anti-terroristes) est resté en garde à vue jusqu'au 22 avril, et en attendant la décision du tribunal correctionnel, prévue en octobre 2019 sur son interdiction de venir à Paris pour couvrir les prochaines manifestations de Gilets jaunes, il se serait trouvé dans l'impossibilité partielle de faire son travail et de gagner sa vie.

Il a affirmé, avec son avocat, son intention de contester la mesure, finalement annulée par le tribunal correctionnel de Paris lundi 29 avril pour insuffisance de motivation. Gaspard Glanz pourra donc se rendre à Paris le 1er mai et les prochains samedis, jours de manifestations des Gilets jaunes.

Glanz est devenu connu du grand public en France initialement suite à ses reportages vidéos sur les mouvements sociaux et protestations telles que les manifestations contre la loi travail, le mouvement Nuit debout ou les manifestations des Gilets jaunes mais aussi ses reportages sur les conditions de vie des réfugiés à Calais.

Les motifs de son arrestation sont les suivants selon la police:

Gaspard Glanz par Claude Truong-Ngoc sur Wikimedia Commons – CC-BY-SA 4.0

Glanz raconte les conditions de sa garde à vue sur le site d'actualités Reporterre:

La garde à vue s’est passée assez mal, j’ai des bleus partout. Quand je me suis fait arrêter, je me suis fait écrabouiller par terre, je n’ai rien mangé depuis samedi. J’ai pu boire, mais ce n’était pas facile, il a fallu se battre, et je pense que par ma notoriété, j’ai pu boire, alors que d’autres, dans ma situation, ne pouvaient pas le faire. Je sens encore l’odeur d’urine qui doit couvrir mon corps, pour vous donner une idée de l’ambiance du commissariat.

Il explique aussi les vrais raisons de son arrestation, selon lui :

Quand il y a eu les attentats de Strasbourg et qu’on filmait leurs unités, ils étaient bien fiers de montrer leurs casques, leurs boucliers, leurs pistolets, là on était journalistes, on faisait leur promotion. Quand par contre, on montre leurs bavures, ce qui se passe dans les rues, la vérité de ce qui se passe dans Paris, alors on est interdit de tourner, parce qu’on pourrait montrer des choses qui ne doivent pas être vues. On a atteint un point de non retour très grave.

Solidarité avec Glanz

La presse nationale et les organisations de défense du droit de la presse se montrent solidaires avec le vidéo-journaliste.

Reporters sans frontières et les Sociétés de Journalistes de Libération dénoncent ainsi des « atteintes à la liberté d'informer ».

Des avocats ont pointé les incohérences juridiques du ministre de l'Intérieur :

Les réseaux sociaux aussi ont lancé des campagnes de soutien pour Glanz, sans s'arrêter à l'argument souvent invoqué par le ministère de l'Intérieur et certains médias, de sa non-possession d'une carte de presse. Cette carte, dont la délivrance implique de travailler pour un employeur, n'est pas obligatoire pour exercer la profession de journaliste. Et cette fois, la solidarité des journalistes des grands médias a été quasi unanime.

L'éditorialiste politique de la radio France Inter donne la définition d'un journaliste, en expliquant en quoi Gaspard Glanz lui correspond en tous points :

Nouvelle victime de l'entrave à la liberté d'informer : le site d'investigation Disclose

Preuve que la couverture des mouvements contestataires n'est pas seule visée par les autorités, le 24 avril, quatre jours après l'interpellation de Gaspard Glanz, c'était au tour de deux journalistes du média en ligne d'investigation Disclose et d'un journaliste de Radio-France d'être convoqués à la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI, le service de renseignements du ministère de l'Intérieur) pour révélation de documents secret-défense, dans le cadre de leur enquête “Made in France” sur l'utilisation massive d'armes létales françaises dans la guerre menée au Yémen par l'Arabie saoudite et sa coalition.

enquête Disclose

Capture d'écran de la page d'accueil du site de Disclose affichant leur enquête “Made in France” sur l'utilisation d'armes offensives françaises dans la guerre actuelle au Yémen

Là aussi, la solidarité de la profession a été affirmée haut et fort (ici par Rue89 Strasbourg):

Aujourd’hui, pour avoir exposé ces informations, trois journalistes se retrouvent sous la menace d’une procédure, pour un délit puni d’une peine d’emprisonnement, dont l’objectif manifeste est de connaître les sources à l’origine de leur travail.

Régression en France de la liberté d'informer

Dès son arrivée au pouvoir, les relations du président français Emmanuel Macron – et de son équipe –  avec les médias ont toujours été, au mieux, distantes, au pire, détestables. Cet article du quotidien Le Parisien retrace l'historique d'un désamour.

« Ce n’est pas du mépris ou de la détestation, il veut installer une relation directe avec les Français », analyse un interlocuteur régulier. Raison pour laquelle il est si féru des réseaux sociaux.

La France est actuellement 32e sur 180 pays au classement 2019 de la liberté de la presse de RSF, en recul d'une place et de 0,34 points au score par rapport à 2018.

‘Je reste silencieuse et endure la situation’ : Survivre aux violences domestiques en Arménie

mercredi 1 mai 2019 à 12:46

Une nouvelle loi progressiste reste un concept abstrait.

Image shutterstock par Kamira.

“Nous nous sommes mariés fin 2017. Le mariage n'était pas luxueux mais notre amour était fort,” raconte Sona (ce n'est pas son vrai nom).

Une semaine à peine, après la fête du mariage, le mari de Sona l'a attaquée pour la première fois, lui demandant de lui parler de son “sombre passé”.

“Je ne sais pas comment l'idée lui est venue que j’avais eu des copains dans le passé, que j’avais été dans une relation intime mais il n'avait aucune preuve attestant de cela. Il était le premier homme de ma vie mais le doute rongeait son âme.”

“Il me battait durement. Il disait qu'il allait me tuer si je ne lui disais pas avec qui j'avais eu une relation intime mais je n'avais rien à dire.”

Sona a finalement quitté son mari.

“Je suis allée voir mes parents mais mon mari est immédiatement venu me chercher. Il s'est excusé, m'a supplié de revenir, promettant de ne plus jamais boire ne serait-ce qu'une goutte d'alcool… mais je n'y suis pas allée.”

“Quelques semaines plus tard, j'ai découvert que j’étais enceinte. Ça a changé ma vie. Je lui ai dit que j'étais enceinte et il m'a encore demandé de revenir vers lui et j'ai décidé de ne pas laisser mon fils sans père.”

Peu après être revenue vers lui, Sona et son mari ont déménagé en Russie. Il voulait s'en aller pour oublier son “sombre passé” en Arménie.

“Évidemment, je ne savais quel passé il voulait oublier mais j'y suis quand même allée avec lui. Je souhaiterais n'y être jamais allée… En Arménie, mes beaux-parents me protégeaient mais en Russie, j'étais complétement seule. Il n'y avait pas un jour où il ne buvait pas. Il me jetait contre les murs comme une balle.”

“Un jour qu'il me battait, ma main s'est cassée. on me l'a plâtrée; j'étais enceinte de 8 mois. Après avoir accouché, on a opéré ma main mais comme le plâtre avait été mal posé, il y a eu quelques problèmes.”

Sona est restée en Arménie après avoir donné naissance à un garçon, alors que son mari a continué de vivre en Russie. Bien que le bébé soit âgé de deux ans, elle n'a pas trouvé la force de divorcer.

“Chaque jour de ma vie est une nouvelle violation de mes propres principes. Je connais très bien mes droits mais je ne les protège pas. Je me tais et j'endure la situation. Je ne veux pas que mon fils grandisse sans père. Comme mari c'est un salaud mais c'est un bon père”, dit Sona.

‘La violence continue’

En décembre 2017, l'Arménie a adopté une nouvelle loi, entrée en vigueur juillet 2018, pour lutter contre les violences domestiques.

La loi a instauré une base légale et institutionnelle pour empêcher les violences domestiques et protéger les victimes. Elle devait procurer le soutien psychologique, légal et social nécessaire  aux victimes de violences ainsi qu'un soutien financier temporaire.

Après l'adoption de la loi, beaucoup de gens étaient convaincus que cela pourvoirait à une protection pour les femmes persécutées.

Mais Marina Yeghiazaryan, psychologue clinicienne au Centre Arménien du Droit des Femmes, dit n'avoir noté aucune baisse dans le nombre de femme sujettes à des violences domestiques.

“Nous continuons de recevoir des milliers d'appels. La violence continue”, dit Yeghiazaryan.

“Encore aujourd'hui, de nombreuses femmes ne sont pas informées ; elles ne peuvent pas protéger leurs droits. De nombreuses personnes évitent aussi d'avoir recours à un centre des droits de l'homme, préférant plutôt rester silencieuses et ne pas parler de leurs problèmes,” dit-elle.

‘Je me suis sauvée pour sauver la vie de mon enfant’

Gayané dit que les problèmes dans sa famille ont commencé après la naissance de leur enfant.

“Il était perturbé par tout : quand je marchais, le son de mes pas; quand je faisais la vaisselle, le son de l'eau du robinet; quand je me coiffais, le son du sèche-cheveux. Il était encore plus en colère quand notre nouveau-né pleurait. Il disait toujours : “Fais-la taire, je dois dormir,” dit Gayané.

Elle dit que là où, dans une famille normale, la naissance d'un bébé réchauffe un couple, le rapproche, dans son cas, le contraire est arrivé et son mari est passé d'un homme calme à une bête.

“Ce qui lui était arrivé était un mystère pour moi. Quand il m'a frappée pour la première fois, j'ai été choquée, pas par la douleur, mais par son attitude. Il ne m'avait jamais frappée auparavant.”

“Une fois, alors que le bébé pleurait encore durant la nuit, il a menacé de nous tuer toutes les deux si je ne faisais pas taire le bébé rapidement. Plus tard, les exemples ne se sont pas terminés par des menaces. Il attaquait mon bébé.”

“Je couvrais mon bébé avec mon corps pour que les coups de pieds ne l'atteignent pas. Il nous a frappées comme ça pendant un mois. Un jour, pendant qu'il était au travail, j'ai pris nos habits et me suis enfuie.”

Un manque de ressources

Le Centre d'aide des femmes dirige le seul abri pour les victimes de violences domestiques en Arménie. Le centre offre aussi des soutiens psychologique et ljuridique.

“Dans notre abri, nous pouvons accepter un total de sept femmes et leurs enfants. L'adresse de la maison est confidentielle. Toutes les conditions sont réunies pour qu'une personne s'y sente en sécurité ; elle est équipée de toutes les conditions de vie nécessaires.” dit le directeur du centre, Hasmik Gevorgyan.

Aujourd'hui, cinq femmes vivent dans l'abri. Les résidentes peuvent rester jusqu'à trois mois, bien que leurs périodes de séjour puissent être étendues au cas par cas.

Selon Hovhannisyan, il n'y a pas assez de ressources pour aider toutes les femmes faisant face aux violences domestiques.

Quand Gayané a quitté son mari, elle n'avait aucun parent en Arménie ; ils étaient tous à l'étranger. Heureusement, la famille d'un proche lui a donné un endroit où rester.

“Une victime de violence domestique devrait porter plainte au commissariat, mais à ce stade, des problèmes peuvent apparaître, si la victime a besoin d'être mise à l'abri de son agresseur. L’État a adopté une nouvelle loi mais n'a pas créé de refuge pour le victimes”, dit-elle.

“Mon amie et son mari ont sauvé nos vies. Plusieurs fois, mon mari a essayé de pénétrer dans la maison et on a menacé d'appeler la police. Seul son frère a enfin réussi à le calmer et il m'a demandé de ne pas quitter mon mari”.

“Je ne pouvais pas lui pardonner et je n'étais pas sûre qu'un jour, durant mon absence, il ne ferait pas de mal à notre bébé”.

“Six mois ont passé depuis ces sinistres jours,” dit Gayané, repensant à son supplice. “Aujourd'hui j'y pense plus calmement et je regrette de ne pas l'avoir quitté plus tôt”.