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Les moines cambodgiens protestent contre la destruction de la forêt de Prey Lang

vendredi 9 octobre 2015 à 10:55
Les moines cambodgiens se rassemblent dans la ville de Battambang pour exiger la protection de la forêt de Prey Lang.

Les moines cambodgiens se rassemblent dans la ville de Battambang pour exiger la protection de la forêt de Prey Lang.

Les moines cambodgiens se mobilisent dans les rues depuis juillet 2015 pour exiger une action gouvernementale plus forte contre la déforestation rapide de Prey Lang, la plus grande forêt sèche sempervirente de plaine du Cambodge et de la péninsule indochinoise.

La jungle de Prey Lang a 3.600 kilomètres carrés de forêts,comprenant des arbres géants de bois de luxe, au moins 20 espèces végétales et 27 espèces animales menacées. Plus de 700.000 personnes vivent à moins de 10 kilomètres de la forêt. La majorité de ces habitants appartiennent à la tribu des Kuys, un petit groupe autochtone qui protège la jungle de Prey Lang depuis des siècles.

Au cours des dernières années, le gouvernement cambodgien a accordé des concessions foncières [fr] à des entreprises locales et étrangères afin de développer le potentiel agricole et l'exploitation minière du pays. Cependant, certains de ces concessions foncières couvraient des zones protégées comme Prey Lang. Le manque de transparence entourant les concessions des terres a également suscité divers litiges et des conflits violents à travers le pays.

Image extraite de la page Facebook de  'Prey Lang - It's Our Forest Too'  (Prey Lang - est notre forêt aussi'

“Protégez les forêts du Cambodge avant qu'il soit trop tard” Image extraite de la page Facebook du mouvement ‘Prey Lang – It's Our Forest Too’ (Prey Lang – c'est notre forêt aussi’

En 2011, les militants cambodgiens et les tribus indigènes ont mené une ‘manifestation Avatar‘ [fr] pour dénoncer la destruction de la jungle de Prey Lang. Habillés comme les membres de la tribu Na'vi du film hollywoodien Avatar, les manifestants ont demandé au gouvernement d'arrêter les projets de plantations industrielles d'hévéa à Prey Lang.

La campagne pour préserver la jungle de Prey Lang continue à ce jour car il n'y a pas eu de répit dans les activités d'exploitation forestière dans la région. Durant la même période, la déforestation du Cambodge s'est aussi aggravée [fr] avec l'octroi part le gouvernement de nouvelles concessions de terres.

“Le Cambodge connaît la plus forte accélération de déforestation au monde”

Au mois de juillet dernier, des moines appartenant au Monk Network for Social Justice (Réseau indépendant de moines pour la justice sociale) ont transmis en main propre à l'Administration des Forêts et à l'Assemblée nationale à Phnom Penh, la capitale du pays, cinq tronçonneuses confisquées pour illustrer la destruction continue de la jungle de Prey Lang.

Les moines ont envoyé une pétition à l'administration des forêts du Cambodge au sujet de Prey Lang.

Le leader du groupe, le Vénérable Buntenh, a expliqué pourquoi les moines ont décidé de tenir une manifestation :

Les moines ne peuvent pas rester silencieux étant donné la rapidité alarmante de la déforestation.

Ces agents de l'administration forestière sont des “agents dollars”, car ils ne se soucient pas de la forêt ou de Prey Lang et laissent de mauvais commerçants continuer à détruire la forêt jour après jour.

Les moines cambodgiens ont remis une lettre de protestation au gouvernement à Phnom Penh, la capitale du pays. Photo de la page Facebook du mouvement 'Prey Lang - It's Our Forest Too' (Prey Lang - est notre forêt aussi'

Les moines cambodgiens ont remis une lettre de protestation au gouvernement à Phnom Penh, la capitale du pays. Photo de la page Facebook du mouvement ‘Prey Lang – Prey Lang est notre forêt aussi’

Au cours de la dernière semaine du mois de septembre, les moines se sont réunis à nouveau dans les rues de Battambang pour rappeler à la population et au gouvernement que les entreprises agro-alimentaires continuent à détruire les forêts du pays.

Les pays sud-américains les plus vulnérables se préparent à l'arrivée d'El Niño

vendredi 9 octobre 2015 à 10:41
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Vue d'El Niño, le 2 août 2015. Image tirée de NOAA par l'utilisateur de Flickr Stuart Rankin et utilisée sous Licence CC Attribution-NonCommercial 2.0 Generic (CC BY-NC 2.0).

Post publié à l'origine sur le blog Globalizado de Juan Arellano.

Un nouvel épisode du phénomène climatique El Niño se développe dans l'océan Pacifique et devrait atteindre son maximum en Amérique du Sud entre novembre prochain et l'été 2016. Les experts estiment que ce “niño”, qui se caractérise par le réchauffement des eaux océaniques, sera aussi intense que celui de 1997 qui avait provoqué des pertes économiques considérables dans plusieurs pays de la côte pacifique sud-américaine avec des répercussions au niveau mondial.

En effet, selon les informations dispensées par le comité multisectoriel chargé de l'Étude Nationale du Phénomène El Niño (Enfen), une augmentation de la température du Pacifique a déjà été constatée ces derniers jours en face de la ville de Paita, au nord du Pérou, proche du point le plus à l'ouest d'Amérique du Sud.

Alors, que fait-on dans cette région pour atténuer les effets du “niño” lorsqu'il frappe à la porte ? D'autant plus quand on se remémore qu'en 1997 le phénomène climatique avait causé des pertes économiques d'environ 7,5 milliards de dollars dans les pays andins. Des pertes principalement dues aux inondations et aux glissements de terrain provoqués par la montée des eaux de pluie à certains endroits et émanant de sécheresses en d'autres lieux. La pêche avait aussi enregistré des pertes à cause du changement de température et de salinité de l'eau, ce qui avait éloigné certaines espèces marines des côtes du Pacifique.

PÉROU

QU'EST-CE QUE LE PHENOMENE “EL NIÑO”? ► En savoir plus sur le phénomène qui s'attaque à beaucoup de pays dont le Pérou

Le Pérou a été le pays le plus touché de la région par El Niño en 1997, avec des pertes estimées à 3,498 milliards de dollars. Fort de cette expérience, le pays dispose de différents organismes pour intervenir en cas d'urgence : entre autres, l’Enfen, mentionné précédemment qui date de 1977 mais qui est plus actif à l'heure actuel, et le Centre des Opérations d'Urgence Nationale du Phénomène El Niño. Ce dernier bénéficie d'un budget et du personnel apte à répondre aux urgences, par voie aérienne essentiellement, car, en cas de pluies (qui pourraient être huit fois plus intenses qu'en temps normal) et de glissements de terrain, les routes sont les premières touchées.

Les routes et les aéroports sont d'ailleurs les éléments parmi les plus vulnérables selon l’article d'un média local, surtout dans le nord du pays. Il a aussi été noté que la majorité des entreprises du secteur privé n'avait pas encore pris de mesures à ce sujet. D'autre part, les collectivités locales se plaignent de ne pas avoir encore reçu les budgets alloués à la gestion des urgences par l'administration centrale. L'état d'urgence a été déclaré dans 15 régions soit 1.264 districts face au risque élevé qui les menace avec l'arrivée d'El Niño.

Un phénomène intense de #ElNiño diminuera de 2 points la croissance prévue pour 2016

Un autre point sensible est l'important patrimoine architectural et culturel du Pérou présent dans les régions à risque. Le Ministère de la Culture a pris des dispositions dans ce sens, malgré cela, la Ministre en personne, Diana Álvarez Calderón, a déclaré que les ressources étaient insuffisantes. Enfin, le secteur patronal qui devrait également en être affecté, a signalé qu'il était prêt à apporter son aide mais qu'il avait un mauvais souvenir quant à la gestion des dons et à leur centralisation ainsi qu'aux retards de l'organisme collecteur des impôts (SUNAT) à comptabiliser les dépenses.

ÉQUATEUR

L'Équateur a été le deuxième pays le plus sinistré par le phénomène El Niño en 1997, avec des pertes de l'ordre de 2,9 milliards de dollars. Cette fois, le gouvernement a attribué environ 850 millions de dollars (à comparer aux 276 millions prévus par le Pérou) à des programmes et projets destinés à minimiser les effets néfastes d'El Niño sur l'infrastructure et l'économie du pays. Le secteur agricole pourrait être fortement touché, puisqu'on estime que la production de riz blanc devrait baisser de 16 %, celle de maïs de 22 %, celle de sucre de 40 % et de 30 % pour la production de bananes.

#TemaDelDía :Trois communes de #Manabí se préparent pour ‘El Niño’

Le bureau de gestion des risques est l'organe du gouvernement équatorien qui coordonne les différents programmes de lutte contre les effets du phénomène. A cette fin il a été créé des groupes de travail, développé des formations, préparé des plans d'intervention et d'autres activités encore. Par exemple, le calendrier scolaire a été modifié pour que les écoles puissent servir de refuge en cas de besoin.

Comme exemple de réalisations plus concrètes, on peut citer les travaux de dragage des sédiments menés sur le chenal du Guayas à Guayaquil. Mais certaines personnes affirment que cela ne sera pas suffisant car le dragage du fleuve n'a pas été effectué depuis des décennies. Plusieurs fleuves en Équateur auraient besoin de ces travaux et beaucoup de communes ne nettoient pas leurs systèmes d'évacuation des eaux de pluie, pour éviter les inondations. Parmi les différentes solutions proposées, on imagine aussi de déplacer les personnes vivant en zones à risque pour leur éviter les incidents et de mener une grande campagne de prévention.

Équateur : El Niño va modifier le quotidien des pêcheurs

COLOMBIE

En 1997/98, la Colombie a subi des pertes de 564 millions de dollars environ, ce qui la place au troisième rang des pays les plus atteints dans la région. A la différence du Pérou et de l'Equateur, on s'attend plus à des sécheresses qu'à des pluies en Colombie, surtout dans les régions andines et dans les Caraïbes. Associées à une hausse des températures, les sécheresses entraînent des incendies forestiers, phénomène qui s'est déjà produit et à cause duquel des zones comme les Caraïbes, le nord-est, les plaines orientales et l'altiplano cundiboyacense sont en alerte depuis des mois.

L'Unité Nationale pour la Gestion des Risques et Catastrophes a élaboré une brochure qui explique comment se préparer et faire face au phénomène El Niño et à ses effets, que l'on soit un particulier, une entreprise ou une administration. De plus, le gouvernement a signalé que les plus touchés par El Niño seront les agriculteurs et les éleveurs et a donc centré ses efforts de prévention sur ces secteurs de production, assignant 143 millions de dollars à des opérations préventives et d'urgence.

#Recommandé Comment faire face au phénomène El Niño qui frappe plusieurs régions de Colombie ?

BOLIVIE

Avec 527 millions de dollars de pertes provoquées par El Niño, la Bolivie fut le quatrième pays connaissant le plus de dommages dans la région en 1997. Le gouvernement bolivien a donc réservé 11 millions à la prévention, au suivi des urgences et catastrophes et à la reconstruction. Selon le Service national de Météorologie et d'hydrologie (Senamhi), les hausses de température du phénomène El Niño peuvent atteindre des zones dans les départements de la Paz, Beni et Pando. On attend également des sécheresses et des inondations dans différentes parties du pays. Des médias ont demandé de mettre plus d'accent sur la prévention, ce qui manquerait actuellement.

“El Niño” touchera la Bolivie avec des sécheresses et des inondations

Comme on peut le remarquer, les pays de la région se préparent, chacun à leur niveau, à recevoir “El Niño. Il ne reste plus qu'à espérer qu'il sera plus badin que destructeur.

Des soldats israéliens infiltrent des manifestants palestiniens avant de leur tirer dessus

jeudi 8 octobre 2015 à 17:50
The undercover Israeli protesters seen pointing guns at Palestinian stone-throwers in a still from a video taken by AFP and shared on YouTube today. Still shared by @joeyayoub on Twitter

Les “manifestants” israéliens infiltrés tiennent en joue des manifestants palestiniens, arrêt sur image d'une vidéo prise par l'AFP et partagée hier

Des images de soldats israéliens vêtus en Palestiniens au milieu d'une manifestation sont apparues en ligne. La vidéo, prise par l'agence d'information AFP, montrerait un certain nombre de militaires israéliens en civil jetant des pierres sur les troupes des Forces de Défenses israéliennes (FDI) aux côtés de manifestants palestiniens devant Beit El, en Cisjordanie occupée. Un des soldats infiltrés tient même un  drapeau du Hamas.

On voit ensuite les soldiatrs dégainer leurs pistolets et tirer sur les manifestants qui tentent de s'enfuir. Tous fuient, sauf un, que l'on voit frappé au sol par les soldats infiltrés, bientôt rejoints par leurs camarades en uniforme. La vidéo montre aussi un manifestant en T-shirt noir, attrapé par les FDI et laissé sur le sol, blessé.

Selon l'AFP, trois manifestants ont été blessés par l'armée israélienne lors de l'incident.


Sur la vidéo suivante, on voit un des soldats infiltrés tirer dans la jambe d'un manifestant.

Selon Al Jazeera, citant un porte-parole de l'armée israélienne, “quelque 350 Palestiniens avaient affronté les troupes israéliennes à proximité de la colonie [israélienne] de Beit El, ajoutant que les soldats israéliens étaient attaqués à coups de cocktails molotov et de pierres, et que les deux blessés ont été emmenés dans des hôpitaux”.

L'article poursuit :

Les Palestiniens accusent régulièrement Israël de placer des infiltrés parlant arabe parmi les manifestants en vue d'effectuer des arrestations.

La flambée de hier a suivi de quelques heures deux agressions à l'ame blanche, dans Jérusalem-Est occupée et dans la cité israélienne de Kiryat Gan. Les affrontements entre Palestiniens et colons israéliens — les habitants des implantations israéliennes construites dans des zones occupées de Palestine et considérées comme illégales par le droit international — sont continuels depuis trois semaines, à la suite des récentes escarmouches sur le complexe de la mosquée Al-Aqsa et dans la Vieille Ville attenante.

Fadi Arouri partage sur Facebook et Twitter d'autres photos du même incident impliquant les infiltrés israéliens :

Une unité infiltrée attaque et arrête des manifestants palestiniens aujourd'hui près de Ramallah.

Il explique sur Facebook :

Un ensemble d'images montre une unité israélienne en civil attaquant des manifestants palestiniens et en arrêtant trois, un des manifestants reçoit une balle dans la tête à courte distance, ceci pendant des affrontements près du check-point DCO / Beit Eil au nord de la ville de Al-Bireh en Cisjordanie occupée

Diana A. qualifie de “répugnante” une autre vidéo du même incident, partagée sur Facebook par l'agence d'information Shehab :

Cette vidéo de la police secrète tirant et arrêtant des jeunes blessés est sérieusement répugnante. A BeitEl heurts en ce moment – 3 blessés

La vidéo de l'agence d'information Shehab a déjà été vue plus de 100.000 fois.

Selon le quotidien israélien Haartez, des colons étaient impliqués dans l'incident :

Deux jeunes Palestiniens ont été signalés blessés, dont l'un grièvement, à balles réelles de soldats des FDI et de colons à l'est de Bethléhem mercredi matin. On ne sait pas à ce stade si les jeunes ont été atteints par le tir des FDI ou des colons.

L'incident s'est produit quand des colons se sont joints aux militaires pour tenter de dégager des Palestiniens lanceurs de pierres de la route menant à la colonie de Tekoa.

Le réseau Palestine News décrit quant à lui les “manifestants” infiltrés comme étant des agents spéciaux israéliens :

Il y a eu au moins trois blessés graves ensuite enlevés par les FDI et les agents spéciaux infiltrés (Musta’ribeen) lors d'une manifestation qui se dirigeait vers le check-point militaire de Beit Eil à l'est de Ramallah mercredi après-midi.

Des sources ont indiqué que les agents spéciaux masqués et armés ont ouvert le feu, aux côtés des FDI, sur les manifestants. La manifestation est partie de l'Université Birzeit près de Ramallah, et se dirigeait vers le check-point militaire de Beit El au nord de Ramallah.

Un des trois blessés a reçu une balle dans la tête, et a été traîné sur le sol par les soldats. Des informations non confirmées le donnent pour mort car sa blessure est très critique.

Voici Droncita, premier drone tagueur, au Mexique

jeudi 8 octobre 2015 à 09:24

Le collectif mexicain d'artistes de rue Rexiste, célèbre pour avoir graffé “C'est l'Etat qui l'a fait” sur la place Zocalo à Mexico city en octobre 2014, a présenté un nouveau membre de son collectif d'artistes anonymes, le drone Droncita.

Lors du premier anniversaire de l'enlèvement des étudiants d'Iguala, la première oeuvre de Droncita a été un portrait du président mexicain Enrique Peña Nieto et de demander sa démission. “Il est temps de tout changer” déclare le graffiti.

Les 43 élèves enseignants d'Ayotzinapa, disparus depuis le 26 septembre 2014 après leur arrestation par la police locale, restent introuvables. Les autorités ont conclu qu'ils avaient été assassinés par un cartel de la drogue, qui a ensuite incinéré leurs restes. Mais les parents des victimes ne croient pas aux conclusions de l'enquête officielle.

L'affaire d'Ayotzinapa a mis en évidence la violence et la corruption au Mexique et l'échec du président Peña Nieto

La vidéo ci-dessus est sous-titrée en anglais.

Kaboul Taxi est bloqué sur Facebook, vive Kaboul Taxi !

mercredi 7 octobre 2015 à 22:48
The cover of the Kabul Taxi facebook page which was closed by the social media service on ______

La photo de couverture de la page Facebook Kabul Taxi, retirée par Facebook le mois dernier

“La vie est amère, l'avenir inconnu” dit le message sur la glace arrière d'un taxi de Kaboul, la petite Toyota jaune devenue le nouveau visage de la satire politique jusqu'à sa disparition de Facebook le mois dernier.

Un message à la fois sagace et ironique, évoquant autant l'existence brève et précaire dont a profité le taxi imaginaire préféré des Kabouliens que la destinée imprévisible de l'Afghanistan lui-même, tout cela condensé en une page Facebook.

L'auteur anonyme de la page écrivait des récits imaginaires de sa vie de chauffeur d'un taxi de fiction qui ‘prenait en charge’ des passagers de marque — souvent de hauts responsables gouvernementaux — et convertissait, en route vers leurs destinations, leurs discussions politiques en billets lapidaires.

Même si ces discussions n'avaient jamais eu lieu, elles étaient souvent inconfortablement réalistes et révélatrices pour les hommes sur la banquette arrière.

L'utilisation croissante des médias sociaux en Afghanistan, parallèle au déclin de la confiance dans les médias traditionnels, souvent compromis politiquement, a fait émerger des organes satiriques tels Kabul Taxi, où les Afghans peuvent donner libre cours à leur mécontentement contre la voie suivie par leur pays.

La colère des citoyens face à la corruption, au népotisme, à l'insécurité et au chômage s'est sentie chez elle dans ce véhicule parodique qui les a fait rire et leur a permis des coups de gueule. Les 13.000 fans de la page sont devenus 600.000 dans le mois où le Washington Post a fait consacré trois articles consécutifs à ce taxi.

Mais au moment même où Kabul Taxi prenait son envol, quelqu'un a serré les freins.

Facebook a bloqué la page peu après qu'elle s'est attaquée à Hanif Atmar, le Conseiller à la Sécurité nationale du président Ghani, et à ses 27 jeunes comparses, portraiturés par Kabul Taxi en enfants gâtés des seigneurs de guerre et de l'élite politique afghane.

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La lettre deHanif Atmar au NDS. Largement diffusée.

Sous le titre ‘Hanif Atmar’s Mantra Group’ [Le groupe incantatoire de Hanif Atmar], commentait les hauts salaires des jeunes conseillers et leur mode de nomination.

Atmar, qui a servi comme agent de renseignement pour le régime communiste dans les années 1980, n'a pas goûté la satire. Il a adressé une lettre à la Direction Nationale de la Sécurité (NDS) — le service national de renseignement de l'Afghanistan — lui demandant de se saisir de l'affaire.

Atmar se plaignait avant tout dans sa lettre — reproduite ci-contre par l'auteur de ce billet — que la satire dévoilait l'identité et les missions des agents du Conseil National de Sécurité d'une manière dégradrante qui mettait leurs vies en péril.

Si une telle allégation mérite consideration, il semble beaucoup plus probable que la motivation d'Atmar à écrire cette lettre était son honneur blessé.

Les 22 et 23 août, le NDS a convoqué les rédacteurs en chef d'un journal local à un interrogatoire, sous la suspicion de responsabilité de la page.

Même si les journalistes ont été relâchés, l'incident créé d'importants remous dans les médias sociaux.

Dès les premiers jours de septembre, Kabul Taxi était hors-service.

Un utilisateur de Facebook a écrit :

Kabul Taxi est fermé mais il faut être idiot pour croire que cela empêchera la pensée critique ou la prise de parole dans le monde d'aujourd'hui aux nombreux canaux de communication.

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“Le conseil dont l'instructeur est Atmar”, texte sous une photo de Hanif Atmar, Conseiller National à la Sécurité. Publié par Kabul Taxi.

Une fermeture qui a pu être vue comme un signe inquiétant de la déférence de Facebook devant la volonté de gouvernements nationaux, mais le réseau de médias sociaux n'a pas stoppé plusieurs pages aux noms et objectifs similaires écloses peu après la fermeture de Kabul Taxi.

Tous les nouveaux taxis prétendent être conduits par le même chauffeur. Parmi les prétendants à la couronne les plus crédibles, une page qui compte plus de 96.000 ‘j'aime’ et se dit le ‘véritable nouveau Kabul Taxi’.

La page a affiché une capture d'écran d'un courriel qu'elle dit provenir de Facebook. La compagnie y refuse de rétablir la page, apparemment après contact avec les responsables afghans de la sécurité :

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Bonjour,
Votre page “Kabul Taxi” a été retirée pour violation de nos conditions d'utilisation. Une page Faceook est une présence distincte utilisée uniquement à fins commerciales ou de promotion. Entre autres, les pages qui sont haineuses, menaçantes ou obscènes ne sont pas autorisées. Nous supprimons également les pages qui attaquent un individu ou un groupe, ou qui sont créées par un individu non autorisé. Si votre page a été retirée pour une des raisons précitées, elle ne sera pas rétablie. Un mauvais usage persistant des fonctionnalités de Facebook pourrait résulter dans la perte définitive de votre compte.
L'équipe Facebook

Un autre entrée de la page présentait une animation, ‘Atmar et Kabul Taxi’ montrant le conseiller à la sécurité charrié par un taxi jaune — Kabul Taxi. L'animation se conclut sur l'annonce ‘Je suis le chauffeur de Kabul Taxi.’

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Déroutés par le nombre de pages qui reproduisent le même texte, les utilisateurs afghans de Facebook ne savent plus reconnaître le vrai taxi de ses imitations.

Le vide laissé par la page en termes de contenu satirique peut être comblé, mais ce qui manque à beaucoup, c'est la tempête de discussions qui accompagnait chaque entrée sur la page originelle de Kabul Taxi.

Une perte sans doute irréversible, à moins que son inventeur soit prêt à assumer les risques d'un dévoilement de son identité.

Un mois tout juste après sa disparition, les Afghans ont la nostalgie de leur caisse préférée, priant qu'elle se cache quelle part, dans l'attente de reprendre entière possession d'un public sous le charme.

[Inscription en pachtou sur la vitre d'une voiture de Kaboul ] : Ça fait un bail !