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L'assurance-smog, dernière solution de fortune contre la pollution en Chine

lundi 24 mars 2014 à 13:29

[Liens en chinois] En Chine, purificateurs d'air et masques semblent une maigre consolation à une population souvent irritée par des flambées périodiques de pollution de l'air. C'est maintenant la société d'assurance publique Ping An qui aide des gens à combattre l'air toxique. La société promet d'indemniser les assuré(e)s lorsque l'indice de pollution de l'air dépasse des niveaux fixés.

smog insurance

Le smog recouvre Pékin en Janvier. Photo Owen.

L'assurance – smog, la première en son genre, cible les visiteurs et habitants de sept villes. Pour certaines des villes désignées, y compris Pékin et Shijiazhuang, le smog est un vrai fléau depuis des années.

Le projet prévoit que des assuré(e)s à Pékin peuvent recevoir jusqu'à 1500 yuans (environ 240 dollars américains) d'indemnisation, s'ils doivent être hospitalisés en raison du smog. À Pékin, lorsque l'Indice de Qualité d'Air (IQA) dépasse 300 pendant cinq jours d'affilée – un niveau considéré comme dangereux – les assuré(e)s peuvent recevoir 300 yuans (environ 48 dollars américains). L'IQA mesure la quantité de polluants tels que des particules fines et le dioxyde de soufre. 

Des examens des poumons ou oto-rhino-laryngologiques gratuits sont aussi offerts lorsque l'IQA se tient au-dessus de 300 pendant sept jours d'affilée. La société a aussi fièrement déclaré sur son site Web que si l'IQA sort du graphique, les assuré(e)s peuvent gagner des voyages gratuits à Hainan, une île tropicale, souvent surnommée le Hawaï de la Chine, pour « nettoyer leurs poumons ». 

L'annonce de la police d'assurance est venue des semaines après que les autorités chinoises avaient admis que seulement trois villes en Chine respectaient les normes de qualité d'air nationales.

L'ampleur de la pollution de l'air a été mise à nu, cette année, dans le discours inaugural du premier ministre Li Keqiang au Congrès National du Peuple, le Parlement chinois. Dans ce discours, le premier ministre a déclaré la guerre à la pollution de l'air. 

La plupart des Chinois ont accueilli avec scepticisme cette idée d'assurance. 

Bingren Kemilu l'a mise en doute sur le site populaire de microblogging Sina Weibo : 

冰人_可米陸 : 但愿不是什么噱头

J'espère que ce n'est pas pas un bidule.

 Shen Pinglunyuan a écrit :

如何诊断是雾霾引起的?这将肯定有争议,想得到保险理赔, 谈何容易。

Comment pouvons-nous déterminer quelles sont [les maladies] causées par le smog ? Il y aura beaucoup de contestations, il ne sera pas facile d'obtenir des indemnisations.

“Une version des années 70 Xu Wenqiang n'était pas du tout convaincu de l'idée :

70版许文强:博眼球而已,完全可以找空气好的线路

C'est juste quelque chose pour attirer l'attention, les [touristes] peuvent trouver des itinéraires avec du bon air. 

“Nuli Caishi Wangdao 1997″ a écrit : 

努力才是王道1997:如果真的有这个保险并且不是特别贵的话,是会考虑一下的,这毕竟可以为我们的健康买下一份保障 

 Si, en effet, une assurance pareille existe et elle ne coûte pas cher, ça pourra m'intéresser. Après tout, nous pouvons acheter une assurance pour notre santé.

«Forever_RickyQ» a soutenu que :

这种东西只是保险公司营销的噱头罢了,难道真的买个雾霾险就可以高枕无忧了吗?这种东西治标不治本,关键还是在于雾霾的治理,就像雾霾天中小学生放假一样,这只是在当前形势下衍生出的一种形式主义。只有政府多把精力投入在雾霾的治理上才能让环境变得更好

 C'est juste un truc de la compagnie d'assurance. Pouvons nous vraiment éviter les ennuis, si nous achetons une assurance-smog ? Cela guérit les symptômes mais pas la cause première. La clé est la maîtrise du smog en soi. C'est pour la forme que les étudiants sont mis en vacances pendant les journées de smog. C'est seulement quand le gouvernement consacrera plus d'énergie à la gestion de la pollution que nous pourrons vraiment améliorer l'environnement.

Brésil : “Je suis mort à Maré”, documentaire sur le quotidien de la favela confrontée à la violence policière

lundi 24 mars 2014 à 10:47
Comunidade da Maré, Rio de Janeiro. Imagem da Agência Pública para o documentário "Morri na Maré" sob licença  Creative Commons BY-ND.

Communauté de Maré, à Rio de Janeiro. Photo de l'Agência Pública pour le documentaire “Je suis mort à la Maré” sous licence Creative Commons BY-ND.

Tous les liens mènent à des pages en portugais.

Ça s'est passé dans la nuit du 24 juin 2013. Le monde suivait la vague de manifestations qui avait commencé au début du mois et se répandait dans tous le Brésil.  Cette nuit-là, à Rio de Janeiro, après l'arrastão (NdT: souvent traduit comme “razzia urbaine”, il s'agit d'une technique de vol où, plusieurs dizaines de personnes, en général des jeunes des favelas, en bande ou pas, se lancent dans une course effrénée au cours de laquelle ils arrachent tout ce qui dépasse, portefeuille, téléphone etc. sur des plages ou dans des centres commerciaux) organisé, dans le quartier de Bonsucesso, à la suite d'une manifestation, des agents du Bataillon des Operations Speciales (BOPE) de la police militaire ont investi l'ensemble des favelas de Maré. Les policiers ont soutenu qu'ils avaient pénétré dans la communauté à la poursuite des voleurs, mais vers 19 heures, des grenades lacrymogènes ont commencé à être lancées sur les habitants. L'une d'entre elles a atteint l'immeuble de l’Observatoire des Favelas, une institution qui fait circuler l'information à l'intérieur de la communauté. Personne ne savait exactement ce qui était en train de se passer, la confusion régnait et la fusillade a continué jusqu'au bout de la nuit. Résultat de l'opération le jour suivant: 13 morts. La favela s'est réveillée au matin, occupée par le BOPE, la Troupe de Choc et la Force Nationale. 

L'épisode a donné lieu à des protestations contre la violence soutenue par l'Etat et a mis un coup de projecteur sur la vie telle qu'elle est vécue à la Maré. Voilà le point de départ du mini-documentaire  “Morri na Maré”, ou “Je suis mort à Maré”, lancé par l’Agência Pública le 11 mars 2014. Le travail de Marie Naudascher et Patrick Vanier, deux journalistes français qui vivent à Rio, a pu être réalisé grâce à une campagne de financement collectif qui a compté jusqu'à 808 collaborateurs. Dans ce documentaire, les conséquences de la guerre qui oppose la police aux trafiquants sont vues à travers les yeux des plus touchés: les enfants.

Parmi les confidences des habitants, le coordonnateur de l'Observatoire des Favelas, Jailson de Souza, critique la forme que prennent les interventions de la police : 

É uma ação irresponsável que trata a favela como arena de guerra. Não tem nenhum sentido a polícia agir como agiu hoje pela madrugada, hoje pela manhã e está agindo durante o dia. Não tem nenhum sentido a polícia permanecer aqui com essa força bélica e monstruosa.

C'est une intervention irresponsable qui traite la favela comme une arène de guerre. Cela n'a aucun sens de voir la police agir comme elle l'a fait cette nuit, ce matin et continue à le faire aujourd'hui. Cela n'a aucun sens que la police reste ici avec toute cette force belliqueuse et monstrueuse. 

Favela avec UPP, favela sans UPP

L'ensemble des favelas de Maré est l'un des plus grands de Rio de Janeiro. Plus de 130.000 habitants, partagés entre les trois principales factions du narcotrafic – Amigos dos Amigos, Comando Vermelho e Terceiro Comando – et des milices. Elle ne dispose pas d’Unité de Police Pacificatrice (UPP). Le projet du Secrétaire d'Etat à la Sécurité Publique de Rio de Janeiro a été lancé dans le but  “d'instituer des polices communautaires dans les favelas, surtout dans la capitale de l'Etat, pour contrer les gangs”. Si pour les gouvernements (NdT: de l'Etat et fédéral), la présence des UPPs et la pacification des favelas sont les navires amiraux des préparatifs de la coupe du Monde cette année, pour les collectivités et les policiers, une telle pratique ne fait certainement pas l'unanimité.

La semaine dernière, suite à la vague de violence provoquée par l’occupation par des policiers de la favela Vila Kennedy – où sera installée la 38è UPP – certains journaux internationaux ont commencé à cibler les contradictions du plan de pacification. Le journal espagnol El País a publié un article dans lequel il est dit que Rio se trouve maintenant “devant un choix inquiétant”: il lui faut se décider entre maintenir sa politique de sécurité “qui commence à présenter des trous noirs et reprendre la vieille (et dépassée) stratégie de traque et d'anéantissement du narcotrafic armé”. 

Le projet est remis en question par les policiers eux-mêmes. Rien que cette année, 4 agents ont été assassinés dans des zones couvertes par les UPPs. Danillo Ferreira, collaborateur de Global Voices, afirme dans un texte publié sur le blog Abordagem Policial, ou Approche Policière, que “ni les policiers ni les communautés ne parviennent à entrevoir de ligne directrice juste, entre ce que la propagande gouvernementale publie et ce qui est réellement vécu dans la pratique”. Et il rappelle :

Sob a pressão para a realização ordeira da Copa do Mundo e das Olímpiadas é bem possível que o governo do Rio de Janeiro mantenha os esforços de financiamento da política das UPPs, que até 2016 pode servir de medida emergencial de contenção das favelas.

La pression pour une réalisation en bon ordre de la coupe du Monde et des Jeux Olympique monte, et il est bien possible que le gouvernement de l'Etat de Rio de Janeiro s'entête dans ses efforts de financement de la politique des UPPs, qui peut ainsi servir de mesure d'urgence dans le contrôle des favelas jusqu'à 2016.

Réseau de résistance 

Les organisations Réseau de Développement de Maré et Observatoire des Favelas se sont joints à Amnesty International pour rapporter le quotidien fait de violence venant de l'Etat, dans la favela. Le travail réalisé par des journalistes et des photographes professionnels, avec la collaboration des habitants, “a pour objectif de montrer les faits selon le point de vue de ceux qui habitent, vivent et élèvent leurs enfants dans le plus grand ensemble de favelas de Rio de Janeiro”.

Dans l'article “Pourquoi la police est-elle forcément si violente?”, publié dans le cadre du projet, Eliana Sousa Silva, directrice des Réseaux, demande de repenser les formes d'interventions prises par la sécurité publique jusqu'à aujourd'hui :

Nos primeiros 55 dias de 2014, tivemos pelo menos 45 mortos em operações policiais em favelas do Rio de Janeiro, sem contar feridos. São números que propõem a toda sociedade, com urgência, o desafio de refletir e questionar as ações de segurança pública no Rio, especialmente nas favelas.

Como alguém que se constituiu no mundo a partir da Maré, busco compreender as práticas das forças policiais na favela a partir do olhar dos agentes diretamente envolvidos nessa problemática: policiais, integrantes dos grupos criminosos armados e moradores. Meu esforço é pensar caminhos para ampliar o diálogo com as autoridades, que muitas vezes não conseguem envolver no debate a população diretamente atingida pela falta de políticas abrangentes de segurança pública.

Dans les 55 premiers jours de 2014, nous avons compté au moins 45 morts au cours d'opérations de police dans les favelas de Rio de Janeiro, sans parler des blessés. Ce sont des chiffres qui suggèrent de toute urgence à la société le défi de réfléchir et de remettre en question les interventions de la sécurité publique à Rio, et plus spécialement dans les favelas.

Comme personne qui s'est construite à la Maré, je cherche à comprendre les pratiques des forces policières dans la favela au travers du regard des agents directement concernés par cette problématique : des policiers, des membres de groupes criminels armés et des habitants. Je m'efforce de penser à de nouveaux chemins pour développer le dialogue avec les autorités, qui ne parviennent que rarement à inclure  dans le débat la population directement concernée par le manque de politiques de sécurité publique globales.

Le clip “Happy” montre l'autre face de Rio de Janeiro

dimanche 23 mars 2014 à 22:31

Inspiré par le ”bonheur contagieux mondial” déclenché par le clip viral  “Happy“, de Pharrell Williams, comme dans des centaines de clips de danse dans le monde entier, Jeitinho Carioca, un groupe brésilien de réalisateurs de vidéos, a réalisé une version locale pour Rio de Janeiro avec un ton satirique.

En plus de montrer des gens heureux en train de danser, le clip met également en avant les actualités de la ville beaucoup moins réjouissantes, comme le coût élevé de la vie, les problèmes de racisme, les vols et la violence, ainsi que les travaux pour la Coupe du monde et les Jeux olympiques.

Regardez  ”We Are Rio“:

Global Voices a également écrit des billets sur les clips “Happy” au Moyen Orient et en Afrique du Nord, à Hong Kong et la poursuite du bonheur en Afrique.

Quel avenir pour les médias d'information en Russie ?

dimanche 23 mars 2014 à 21:48
The face of the Russian media. What will it be tomorrow? Images mixed by Kevin Rothrock.

Le visage des médias russes. Quel sera-t-il demain ? Montage photographique de Kevin Rothrock.

La purge politique de Lenta.ru est accomplie, a écrit [russe, comme les liens suivants sauf mention contraire] récemment le premier créateur du site, Anton Nosik, qui affirme que l'équipe éditoriale restante a connu son dernier jour. La prise de contrôle de Lenta [voir l'article de GV, fr] par un rédacteur en chef proche du Kremlin n'est qu'un maillon d'une “chaîne” de tentatives en sous-main de censurer le RuNet.

Ainsi, le 6 mars 2014, Roskomnadzor a interdit une vidéo de YouTube, un “Appel aux armes” aux Ukrainiens, pour raison d'extrémisme. Conséquence, plusieurs FAI russes ont brièvement bloqué tout YouTube, et la vidéo elle-même reste inaccessible aux internautes de Russie. Dans l'actuel climat d'incertitude (surtout avec le conflit en Crimée), les rédactions sont plus attentives que jamais au contenu et aux articles en ligne, une pression qui a déjà conduit plusieurs journalistes à donner leur démission. Et ce n'est peut-être que le début : en plus de la quarantaine de personnes qui quittent Lenta.ru, cinq sont parties du portail d'information RussPlanet, et une rédactrice en chef a démissionné de Bolchoï Gorod. Egor Skovoroda, un ancien de RusPlanet, a écrit :

В общем, да, сегодня написал заявление и уволился из “Русской планеты” (то же самое сделали Паша Никулин, Маша Климова, Митя Ткачев и Юлиана Лизер). Не хочу расписывать всякие подробности, но если коротко, то “Крым расставил все по местам.”

En gros, oui, aujourd'hui j'ai donné mon congé et démissionné de RussPlanet (Pavel Nikouline, Maria Klimova, Mitya Tkatchev et Julian Leeser ont fait de même). Je ne veux pas entrer dans les détails, mais en peu de mots : “La Crimée a tout mis à sa place.”

Pavel Nikouline (cité plus haut) a aussi donné son point de vue sur sa page VKontakte, citant également le rôle de la Crimée dans l'avancée de la censure :

Оказывается, издание чуть не закрыли после моего первого репортажа из Севастополя.

Il s'avère que la publication [RussPlanet] était quasi fermée après mon premier reportage depuis Sébastopol.

Le reportage de Nikouline sur la Crimée était relativement favorable à l'Ukraine, et son auteur accuse la censure éditoriale de lui avoir refusé la possibilité de raconter comment les forces d'auto-défense de Crimée l'ont passé à tabac pendant son travail.

L'ex-rédactrice en chef de Bolchoï Gorod a aussi commenté sa démission du 12 mars :

В устных беседах в течение последнего месяца он [Винокуров] неоднократно настаивал на моём уходе. За это время было произнесено так много аргументов, которые противоречат друг другу, что об истинной причине я могу только догадываться.

Dans des conversations au long du mois dernier, [le propriétaire Alexandre Vinokourov] a insisté à plusieurs reprises pour que je m'en aille. Durant ce temps, tellement d'arguments se contredisant les uns les autres ont été énoncés qu'il me reste à deviner la véritable raison.

Maintenant que Moscou a formellement annexé la Crimée, après un plébiscite controversé, il est probable, sinon presque certain, que les journalistes russes vont connaître des difficultés encore plus grandes. La profession est maintenant prise en étau, et beaucoup de ses représentants les plus talentueux pourraient se trouver prochainement forcés à partir ou perdre courage. Si cela continue ainsi très longtemps, la face des médias russes pourrait bientôt être irrévocablement changée. Probablement l'est-elle déjà.

Un poème pour les contestataires qui occupent le Congrès à Taïwan

dimanche 23 mars 2014 à 20:14
A protester in #CongressOccupied. Kong Fu Panda, a reporter at UDN.com, has granted Global Voices permission to republish. CC: NC.

Un artiste à #Occupons le Congrès. Photo de Kong Fu Panda, journaliste de zorgloob.com. Reproduit avec permission.

Le mouvement de protestations au parlement de Taïwan, ou Yuan Législatif, contre sa décision de ratifier le controversé accord commercial sur les services trans-détroit avec la Chine continentale, a gagné le soutien du milieu artistique.

Le poète, cinéaste et artiste Hung Hung [chinois] a dédié un poème aux manifestants. Le poème s'appelle « Une chanson pour les manifestants violents – En entendant les médias et les législateurs appeler les étudiants protestataires à #Occupons le Congrès ‘populace’ ». Hung Hung a lu le poème à la foule à l'extérieur du Yuan Législatif et l'a publié sur Facebook. Le poème a été partagé plus de 800 fois :

Hung Hung reading his poem in the public gathering outside legislative yuan in Taipei. Photo from Hung Hung's Facebook

Hung Hung lit son poème à la foule à l'extérieur du Yuan Législatif à Taipei. Photo de la page Facebook de Hung Hung.

我們來了,夏天也來了
我們的腳步,可以溫柔也可以堅定
我們的聲音,可以優美也可以嘶啞
我們的拳頭,可以揮向天空也可以揮向不義
我們的心,可以是血的紅也可以是青草的綠
我們越過圍牆佔領這條街、這個廣場、這個堡壘
當別人把這裡當作提款機、當作傳聲筒、當作逃生梯
我們把這裡當作溫暖的搖籃,當作哺育稻米的農田,當作未來之歌的錄音間
我們歌唱,對,我們歌唱
我們用歌唱佔領一個原該屬於我們的國家,原該保護我們的政府,原該支持我們生存的殿堂
把它從墳墓變成子宮,從垃圾堆變成果園,從地獄變成天堂
甚至我們不奢求天堂,我們垂下眼睛,把這裡當作自己的家
今夜,原不相識的你我,在這裡多元成家
今夜,我們甘願做愛的暴民
就像五二0訴願農民那樣的暴民
就像六四天安門學生那樣的暴民
就像把美麗島當號角的那樣的暴民
就像用野百合、用茉莉花改變世界的那樣的暴民
就像以自焚為武器的鄭南榕那樣的暴民
不過今夜,我們不焚燒自己
我們焚燒這嚴寒的冬夜
讓夏天一夜之間,來到我們眼前!

Nous arrivons, quand l'été arrive
Nos pas peuvent être doux, nos pas peuvent être fermes
Nos voix peuvent être belles, nos voix peuvent être rauques
Nos poings peuvent être levés vers le ciel, nos poings peuvent être levés contre l'injustice
Nos coeurs peuvent être aussi rouges que le sang, nos cœurs peuvent être aussi verts que l'herbe
Quand nous traversons le mur et occupons cette rue, cette place et cette forteresse
Quand d'autres considèrent cet endroit comme un guichet automatique, un mégaphone ou une sortie de secours
Nous considérons cet endroit comme un berceau chaud, un champ de riz et une chambre d'enregistrement pour nos futures chansons
Nous chantons, oui, nous chantons
Nous chantons pour occuper un pays qui est censé nous appartenir
Nous chantons pour occuper un gouvernement qui est censé nous protéger
Nous chantons pour occuper un palais qui est censé soutenir notre vie
Nous le transformons d'une tombe en un utérus, d'un tas d'ordures en un verger, d'un enfer en un paradis
Le paradis pourrait sembler trop luxueux
Nous baissons nos paupières et nous aimerions considérer cet endroit comme une maison pour nous
Ce soir, des inconnus comme vous et moi, nous devenons une famille diversifiée
Ce soir, nous sommes prêts à être des foules violentes pour l'amour
Comme ces agriculteurs qui protestaient le 20 mai *
Comme ces étudiants qui résistaient sur la Place Tiananmen le 4 juin **
Comme ceux qui tenaient Formosa comme leurs cors ***
Comme ces foules violentes qui changeaient le monde avec les sauvages lily† et jasmine††
Comme Cheng Nan-Jung††† qui a employé l'immolation de soi comme une arme
Mais ce soir, nous ne brûlons pas nous-mêmes
Nous éclairons cette nuit d'hiver qui est extrêmement froide
Pour que l'été vienne chez nous à l'aube prochaine

*La Protestation des 520 agriculteurs  a eu lieu en 1988 à Taïwan contre un accord de libre-échange agricole. Elle a abouti à une confrontation violente ; 130 manifestants ont été arrêtés et 96 poursuivis en justice.

** Fait allusion au mouvement étudiant en 1989 à Pékin quiat abouti à une répression violente des manifestants pacifiques.

*** Fait allusion à l'incident de Formosa Magazine en 1979 à Kaohsiung, qui a abouti en poursuites judiciaires à grande échelle contre des forces politiques locales.

†Fait allusion au mouvement étudiant ‘Wild Lily’ (‘Lis Sauvage') en 1990 sur la Place de la Liberté à Taipei. Le mouvement a finalement mis un terme à la loi martiale et au système de parti unique à Taïwan.

††Fait allusion à une série de protestations et de soulèvements, connue comme le Printemps Arabe depuis 2010 jusqu'à aujourd'hui.

†††Cheng Nan-Jung s'est immolé par le feu en avril 1989, exigeant la liberté de parole à Taïwan.