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Le plus surprenant des festivals d’été au Japon

vendredi 21 octobre 2016 à 23:10

Aomori Nebuta est l’un des festivals annuels les plus grands et les plus populaires au Japon. Comme son nom l’indique, il se déroule à Aomori, la capitale de la préfecture d’Aomori à la pointe nord de Honshu (mais on le retrouve aussi dans le vieux village médiéval de Hirosaki, où il porte le nom de festival Nebuta). Pendant trois jours en août, on peut y voir des douzaines de chars illuminés de neuf mètres de haut représentant de célèbres personnages historiques et mythologiques japonais. C’est spectaculaire à voir et bien sûr, cela donne des billets tout aussi incroyables sur les réseaux sociaux.

Le Nebuta d'Aomori est l'un des trois plus grands festivals au Japon. Cette énorme marionnette de guerrier est vraiment incroyable!!! . . #三井寺合戦 新田四天王大暴れ 作: 北村 蓮明 #Nbuta #青森ねぶた #festival #ねぶた祭 #KSUKETRIP

A video posted by KSUKE (@ksuke_jpn) on

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Le Nebuta d'Aomori ast l'un des 3 plus grands festivals du Japon. Cette énorme marionnette de guerrier est vraiment incroyable !!

Il existe diverses théories concernant l’origine du festival Nebuta. Certains avancent que le festival pourrait être une variation du festival Tanabata, couramment célébré à de nombreux endroits à Tohoku durant le mois d’août. Une autre théorie suggère que les chars, tambours et danses remontent à plus d’un millénaire, à l'époque où les armées de l’ouest du Japon voyagèrent vers le nord-est pour assujettir les autochtones Emishi de la région.

ねぶた〜〜めっちゃ良い席で見れて良かったよ〜〜迫力も凄かった〜〜. . #青森#ねぶた#ねぶた祭#お祭り#祭り#最高

Photo publiée par yuka (@ukyuka) on

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Nous sommes au festival Nebuta à Aomori. Nous avons dégoté de bonnes places pour avoir une belle vue. C’était vraiment intense ! #AomoriNebutaFestival #summerfestivals #thebest!

L’événement début août dans la ville d’Aomori attire des visiteurs venant de tout le Japon, mais aussi de par le monde.

It's hard to imagine how big these things are… ねぶたの大きさがInstagramあまりわからないけど…

A photo posted by Jerel Henderson (@jerelh) on

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Difficile d'imaginer l'énormité de ces trucs…

Le festival est bien plus encore que des chars géants formidablement illuminés ; flûtes, tambours et danses se combinent pour créer un événement inoubliable. Cette année, un utilisateur de Youtube a publié une vidéo d’une heure de long qui donne un bon aperçu de ce qui s'y passe :

En prime, pour le festival Nebuta de cette année, les Tokyoïtes ont pu apprécier l’événement sans avoir à faire le déplacement jusqu’à Aomori. Un espace communautaire de la capitale, Meguro Gajoen, a accueilli pendant deux mois une exposition dédiée à la « Wa no Akari » (l'illumination à la japonaise) dans une aire importante culturellement, le Hyakudan Kaidan (escalier aux cent marches).

和のあかりねぶた祭 #和のあかり #百段階段 #和のあかり百段階段展2016 #目黒雅叙園 #ねぶた祭 #目力 #迫力満点 #写真好きな人と繋がりたい #日本の夏 #夏の思い出 #夏の風物詩 #nikond600 #light #wp_japan #tokyo #airy_pics #instagramjapan #team_jp_flower #pics_jp #まつり #見応えたっぷり #retro_japan_ #pics_jp2016 #retro

A photo posted by Raka*(らか) (@rakafleur) on

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Festival d’illumination à la japonaise au Hyakudan Kaidan à Meguro, Tokyo (2016). #wp_japan #tokyo #airy_pics #instagramjapan #team_jp_flower #pics_jp #retro_japan_ #pics_jp2016 #retro

久しぶりの目黒雅叙園 其の2 #四角い写真 #ねぶた祭 #目黒雅叙園

Photo publiée par akinori.tsuru (@darknoid) on

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Je visite le Meguro Gajoen pour la première fois depuis longtemps : deux chars en présentation. #MeguroGajoen #NebutaFestival

Néanmoins, pour les nombreuses personnes faisant le voyage jusqu’à Aomori, le festival Nebuta reste ce qu'il y a de plus authentique, et une façon remarquable de passer l’été.

[やってまれ、やってまれ〜〜] 北国の #夏祭り 、 #ねぶた祭 見に行きました .。. . 地上20メートルの #立ねぶた が、大迫力でしたよ〜.。. . 今週も夏を楽しみましょうね♡.。. . #北の国から2016 #祭 #夜祭り .。.

A photo posted by aiko (@hondaaiko0810) on

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« N'hésitez pas ! N'hésitez pas ! » #Festivald’Été dans le nord. On est allé voir le #FestivalNebuta. Le site avec le char de dix-huit mètres de haut était génial. Profitons du reste de l’été. »

Tombouctou : “Justice pour les monuments, mais pas pour les femmes violées”

mercredi 19 octobre 2016 à 15:40

 

femme-violee.jpg

Georges, journaliste et blogueur malien, pousse un cri du coeur pour dénoncer le fait que tandis que les monuments ont été restaurés, on note une absence totale de jugement pour les violences sexuelles que les instances juridictionnelles maliennes et internationales semblent vouloir oublier.

Il a écrit sur son blog au nom très long, “AU GRIN Il se dit beaucoup de choses autour d'un verre de thé“, dans un article intitulé Tonbouctou : Elles sont aussi innocentes que les mausolées » ! :

Si vous suivez l’actualité internationale la condamnation de Ahmed Al Faqi Al Mahdi à neuf ans de prison n’a pas dû vous échapper. La Cour Pénale Internationale (CPI) a reconnu coupable ce djihadiste malien de la destruction en 2012 de la  mosquée Sidi Yahia de Tombouctou ainsi que de 9 mausolées. Ahmed Al Faqi est le premier à être jugé pour des crimes commis au plus fort de la crise malienne, sous l’occupation des régions nord du pays.

Mais les crimes commis ne se limitent pas uniquement à la destruction de biens culturels. Les groupes armés qui occupaient les lieux ont aussi perpétré des viols ainsi que d’autres formes de violences sexuelles sur des femmes et des jeunes filles. Malgré les 171 victimes recensées et les 113 plaintes portées pour les crimes de violences sexuelles personne n’a été inquiété par la justice à ce sujet. Ces victimes sont aussi innocentes que les mausolées, comme la porte de la mosquée Sidi Yahia. Mais où est passé l’important ?…

Les mausolées détruits ont été restaurés et réhabilités avec l’aide de l’UNESCO. Il restait alors la porte de la mosquée Sidi Yahia, qui a elle aussi a été restaurée en septembre 2016 en présence de notables, d’habitants de Tombouctou, du représentant de l’UNESCO et de la MINUSMA … Je ne dis pas que la restauration de ces biens culturels, classés patrimoine culturel de l’humanité, n’est pas important. D’ailleurs je me réjouis pour la justice rendue aux édifices de Tombouctou. Mais ça ne doit pas se limiter à ça et s’arrêter là….

Après avoir rappelé que sous l’occupation des régions nord du Mali, les djihadistes et d’autres groupes armés avaient commis des violences sexuelles de diverses formes, notamment des viols, le blogueur Georges ajoute:

Comme l’atteste un rapport établi en 2012 par le Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme sur la situation des droits humains au Mali. L’ONG Wildaf-Mali (Women In Law and Development/ Femme – Droit et – Développement en Afrique) a recensé 171 femmes victimes de violences sexuelles venant des régions du nord du Mali. Selon Bintou Bouaré, présidente de Wildaf-Mali« sur ces 171 femmes, 113 ont accepté de porter plainte. En trois ans, 30 femmes seulement ont été écoutées par le procureur de la commune 3 de Bamako ».

Pour comprendre les problèmes que rencontrent les femmes violées dans leur société du nord du Mali, il ajoute :

Le viol est un sujet tabou au Mali. Les lèvres des victimes sont scellées par le regard de la société. Parmi les 171 femmes et filles victimes recensées de violences sexuelles, 58 n’ont pas voulu porter plainte. “Certaines se sentent responsables de leur sort. Tandis que d’autres ont peur de témoigner parce qu’elles vivent dans la même localité que leurs violeurs qui errent librement dans la nature” me confie Bintou Bouaré, présidente de l’ONG Wildaf-Mali.

 

Au milieu des amas d’ordures, deux musiciens jouent Bach en signe de protestation

mercredi 19 octobre 2016 à 11:02
Classical music concert at the illegal dump in Tetovo, Macedonia. Photo byNgadhnjim Mehmeti, EcoGuerilla.mk , used with permission.

Concert de musique classique à la décharge sauvage de Tetovo, en Macédoine. Photo Ngadhnjim Mehmeti, EcoGuerilla.mk, utilisée avec autorisation.

Revêtus de leur tenue de scène et portant des masques pour se protéger de la puanteur due à la décomposition, deux musiciens classiques originaires de Tetovo ont joué la célèbre Suite pour orchestre « Air » de Bach en signe de protestation contre la pollution.

Les musiciens ont joué au milieu de la plus grande décharge sauvage située à l'entrée de leur ville, Tetovo, plus grande ville de l'ouest de la Macédonie et l'une des plus polluées d'Europe. Certains prétendent qu'il s'agit de la zone urbaine la plus polluée au monde.

La manifestation était organisée par une organisation de la société civile, Eco Guerilla, qui a filmé le concert de protestation et a utilisé la vidéo comme outil d'activisme digital. La vidéo s'est propagée sur différentes plateformes, attirant ainsi l'attention sur le problème.

L'inaction du gouvernement face à ce problème a provoqué un certain nombre de manifestations au sein de la ville et dans la capitale Skopje.

Parmi les facteurs participant à la pollution de Tetovo, on peut noter l'absence de filtres dans l'enceinte du complexe métallurgique Jugohrom tout proche, l'importation de voitures d'occasion en provenance de l'Union européenne, l'augmentation de l'utilisation du bois comme moyen de chauffage et le manque d'infrastructures pour la collecte des déchets, ce qui oblige les habitants à jeter leurs ordures dans des décharges sauvages. Le concert a eu lieu dans la plus grande décharge de la ville, sur laquelle les autorités ferment les yeux depuis des années. Cette décharge est située à l'entrée de la ville, à proximité des grands silos à grains (que l'on peut voir en arrière-plan dans la vidéo).

Dans une déclaration pour Global Voices, Arianit Xhaferi, représentant d'Eco Guerilla, a expliqué :

Депонијата на влезот на градот постои едно подолго време. Актуелната градоначалничка, г-а Теута Арифи кога се кандидираше ни вети дека депонијата ке биде дислоцирана од градот и дека овој проблем ке биде решен на брз и ефикасен начин. До ден денеска депонијата е тука, како знак за ДОБРЕДОЈДЕ ВО ТЕТОВО – и ни служи како центар на срамот.

Тетово веќе подолго време се наоѓа на врвот на најзагадени градови во светот, и освен Југохром како најголем загадувач во регионот, депонијата исто така е загадувач на градот, од каде се шират различни болести и зарази.

Cette décharge à l'entrée de la ville existe depuis longtemps. Pendant sa campagne électorale de 2013, la maire actuelle, Mme Teura Arifi, avait promis de l'éliminer. Elle avait promis de régler le problème de manière rapide et efficace. Pourtant, à ce jour, la décharge est toujours là, jouant le rôle du panneau BIENVENUE À TETOVO et au coeur de notre honte.

Tetovo est inscrite depuis longtemps sur la liste des villes les plus polluées au monde. Avec Jogohrom, principale source de pollution de la région, la décharge contamine également la ville en favorisant la propagation des maladies et des infections..

Chaque année au mois d'octobre, la municipalité de Tetovo finance un festival de poésie en l'honneur du poête albanais Naim Frashëri, intitulé « Ditët e Naimit » (« Les journées de Naïm »). Les organisateurs de ce festival ont prévu de diffuser la vidéo du concert comme interlude au festival, « pour lequel de nombreux artistes et amoureux des arts sont attendus à Tetovo ».

L'Islande veut élire des politiciens qui “savent pour qui ils travaillent”

lundi 17 octobre 2016 à 19:47

The Kitchenware-Revolution in Iceland was organize by Hördur Torfason and "Raddir Fólksins". It started in the wake of the collapse of the banking system followed by the decimation of Icelandic economy in the beginning of October 2008. It resulted in the resignation of Geir H. Haarde and his cabinet on January 26. 2009. The protest meetings were held every Saturday at the Austurvöllur square in front of Alþingishús - the Icelandic parliament house. The first meeting (week 1) was dated Saturday 11. October 2008. The 16th meeting dated January 24. 2009 By OddurBen (Own work) [CC BY-SA 3.0 (http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0) or GFDL (http://www.gnu.org/copyleft/fdl.html)], via Wikimedia Commons

Manifestation des Islandais durant la “Révolution des casseroles”, en janvier 2009. PHOTO : OddurBen (CC BY-SA 3.0) via Wikimedia Commons.

Par Lawrence Lessig

Je suis en Islande ce trimestre — en congé sabbatique avec ma famille, donnant à mes enfants l'impression d'être aux Etats-Unis en écrivant des tonnes de trucs pour geeks juristes — et j'assiste à l'incroyable bataille politique qui se joue à l'approche des élections parlementaires du 29 octobre. On sait que la démocratie a des problèmes partout — sauf qu'ici, un extraordinaire mouvement citoyen cherche à les résoudre.

Une petite mise en contexte s'impose : vous vous souvenez de la crise financière de 2008. Cette crise a durement frappé l'Islande. Si durement que des dizaines de milliers de personnes ont manifesté devant le Parlement en tapant dans des ustensiles de cuisine (“La révolution des casseroles“) pour exiger le changement.

Certains ont fait un lien entre cette crise et un échec de la constitution islandaise. Leur réaction à cet échec fut de lancer la création collaborative d'une nouvelle constitution. Au début, ce processus n'était pas en lien avec le gouvernement. Mais le Parlement a ensuite reconnu ce mouvement et lui a donné forme. Un millier de personnes (choisies au hasard) seraient chargées d'identifier les valeurs de la nouvelle constitution, puis un Conseil constitutionnel serait élu pour rédiger une constitution fondée sur ces valeurs.

Plus de 500 personnes se sont présentées, 25 ont été élues. Durant quatre mois, elles ont travaillé sur un projet de nouvelle constitution — en public, en postant leur version sur Facebook et tenant compte des commentaires provenant du monde entier. Le Parlement a ensuite soumis le projet à un vote (un vote non contraignant, demandant s'il fallait une nouvelle constitution “fondée sur” le projet du Conseil). Il y a quatre ans, plus des deux tiers des votants approuvèrent ce projet. (Blueberry Soup est un excellent documentaire sur tout ce processus).

Aussi incroyable que cela puisse paraître, le Parlement n'a plus rien fait ensuite. La proposition de loi sur l'adoption de la constitution “fondée sur” le projet est restée bloquée. Tout le monde (en tout cas au Parlement) semblait l'avoir oubliée.

Mais le scandale des Panama papers et la démission du Premier Ministre rappelèrent aux Islandais que leur gouvernement avait des problèmes qu'il était important de résoudre. Un incroyable mouvement citoyen a donc commencé à se développer pour faire de cette question un sujet central des élections parlementaires.

J'ai pu observer ce mouvement se développer. Et, en tant que démocrate qui considère que le plus urgent est de réparer la démocratie, je l'ai observé avec une grande admiration (et un brin de jalousie). Les responsables de ce mouvement sont tous des non-politiciens. Il y a aussi des héros politiques, comme Birgitta du Parti Pirate et Katrin Jakobsdóttir du Mouvement des Verts et de Gauche, mais les véritables activistes, ici, ne sont pas des gens cherchant à se faire élire. Ce sont juste des citoyens qui veulent avoir un gouvernement qui sait pour qui il travaille — parce qu'après quatre ans durant lesquels le gouvernement a tout simplement ignoré un référendum, on est en droit de se poser la question.

Il y a quelque jours, ces citoyens ont lancé une campagne sur les réseaux sociaux pour que l'élection se joue autour de cette problématique. Le message de la campagne est un remake intelligent d'un mème familier : “Vous [au Parlement] nous entendez [le peuple] maintenant ?” Quatre vidéos (deux en anglais, deux en islandais) ont présenté les termes du débat, et deux vidéos (les premières d'une série de 10) en islandais traitent des 10 principaux problèmes que la nouvelle constitution devra résoudre. Les versions anglaises sont ci-dessous.

La campagne demande aux électeurs — “de droite ou de gauche” — de ne voter que pour des partis qui s'engagent à “faire de la ratification d'une nouvelle constitution fondée sur le projet du Conseil constitutionnel une priorité du prochain parlement.” Aujourd'hui, les quatre principaux partis d'opposition ont fait part de leur engagement en ce sens — le Parti Pirate, le Mouvement des verts et de gauche, le parti social-démocrate et le parti Avenir Radieux. Ces quatre partis vont sans doute obtenir la majorité au nouveau Parlement.

Si ce mouvement arrive à prendre de l'essor, son potentiel sera énorme, que ce soit en Islande ou à l'international. La Société pour la constitution islandaise (qui organise la campagne) a promis de dépenser l'argent récolté dans des actions de sensibilisation démocratique en Islande. Mais tout l'argent récolté au-delà du nécessaire sera utilisé dans des actions démocratiques au niveau international.

Pouvez-vous imaginer que cette campagne — “Vous nous entendez ?” — soit appliquée dans toutes nos démocraties ? (J'ai déjà réservé CanYouHearUs.US). Mon slogan favori, tiré de l'une de leurs vidéos : “Nous sommes locaux, mais la démocratie est globale. Montrons-leur ce que cela veut dire.”

Ces élections pourraient être une des rares victoires de la réforme démocratique — une victoire qui pourrait en inspirer beaucoup d'autres.

Je suis déjà convaincu.

Lawrence Lessig est un universitaire américain, juriste et militant politique. Une version de cet article a été publiée précédemment sur Medium. La présente version est publiée sous licence Attribution 4.0 International (CC BY 4.0). 

Après les ravages de l'ouragan Matthew, la dette de la France envers Haïti à nouveau évoquée

dimanche 16 octobre 2016 à 20:05

Service members from Joint Task Force Matthew and representatives from the United States Agency of International Development delivered relief supplies to areas affected by Hurricane Matthew to Jeremie, Haiti. Photo via the official U.S. Navy Page, from United States of America Capt. Tyler Hopkins/U.S. Navy [Public domain], via Wikimedia Commons

Des employés de la Joint Task Force Matthew et des représentants de l'U.S.AID livrent des approvisionnements de secours dans les zones affectées par l'ouragan Matthew à Jérémie, Haïti. Photo Page officielle de la marine des USA, par le capitaine (USA) Tyler Hopkins/U.S. Navy [domaine public], via Wikimedia Commons

Une semaine le passage ravageur de l'ouragan Matthew sur Haïti, beaucoup écrivent sur les réseaux sociaux que le moment est venu pour la France de rembourse sa dette à ce pays.

L'ouragan de catégorie 4 a frappé ce pays de la Caraïbe le 4 octobre 2016, et y a causé la plus grosse crise humanitaire depuis le tremblement de terre de 2010. La direction de la Protection Civile de Haïti a confirmé 473 morts, 339 blessés et 75 disparus, tandis que des articles de la presse internationale ont établi le bilan à plus de 1.000 morts. Pour les 1,4 millions de personnes ayant besoin de secours, des blogueurs donnent des liens vers des “organisations qui font discrètement du bon travail en Haïti sans remplir les poches des multinationales de l'aide ou continuer à engraisser l'élite de Port au Prince”.

A la suite de la catastrophe, le Bureau des Nations Unies pour la Coordination des affaires humanitaires a lancé un appel instantané à une levée de 119,8 millions de dollars de fonds d'urgence.

Mais les effets de l'ouragan ramènent aussi la question fréquente que la France devrait apporter son aide financière en remboursant enfin ses réparations coloniales à Haïti.

Comme l'a formulé sur Facebook Mandy Dalton :

L'ouragan et le tremblement de terre n'ont pas été les pires catastrophes subies par Haïti. La îre catastrophe est d'origine humaine. Haïti est toujours aux prises avec les conséquences d'une dette qu'il n'aurait jamais dû avoir à payer.

Leondra Saintil a ajouté [lien rompu, NdT] :

Les effets de l'ouragan sur Haïti brisent le coeur. Vous savez ce qui aiderait ? Que la France paye les 21 milliards de dollars qu'elle doit en réparations. Hum.

Haïti, aujourd'hui le pays le plus pauvre de l'hémisphère occidental, a été autrefois la possession la plus lucrative de l'empire colonial français. Saint-Domingue, son nom de l'époque, faisait commerce à grande échelle de café, coton et sucre, entre autres exportations.

Haïti a proclamé son indépendance en 1804, après avoir réussi une insurrection anti-esclavage et anti-coloniale, et est devenu le premier pays de l'histoire moderne à abolir officiellement l'esclavage. Mais le prix à payer pour la liberté a été écrasant : 150 millions de francs-or, réduits par la suite à 90 millions, pour indemniser les colons et propriétaires d'esclaves français de la perte de leurs plantations.

La somme était faramineuse, et elle a paralysé le pays. En réalité, ce n'est qu'en 1947 que Haïti a fini de la rembourser. En 2003, l'ex-président haïtien Jean-Bertrand Aristide estima que la “dette de l'indépendance”, comme on a fini par l'appeler, équivalait à 21 milliards de dollars US actuels, intérêts compris. Selon d'autres calculs, ce serait près de 17 milliards de dollars. Après l'ouragan dévastateur de 2010, 100 artistes et universitaires avaient signé une pétition pour tenter de forcer la France à reverser cette somme “en réparation d'une injustice bicentenaire“.  Une demande rejetée par la France à l'époque.

Puis en mai 2015, la question a ressurgi dans l'attention internationale lorsque le président français François Hollande a déclaré à un auditoire sur l'ile française de la Guadeloupe, “Quand j'irai en Haïti, je vais, pour ma part, m'occuper de la dette que nous avons”. Ses conseillers ont par la suite insisté qu'il se référait une dette morale et non pas financière. Dans sa visite consécutive en Haïti, Hollande a tenté d'esquiver le sujet en disant au pays, “Vous ne demandez pas de l'aide, vous voulez du développement”.

Cet échange a provoqué un déversement d'articles appelant la France à finalement dédommager Haïti en lui rendant son dû.

Depuis l'ouragan de la semaine dernière, de nombreux internautes re-publient ces articles de l'année dernière, en commentant souvent que le moment était maintenant venu de revoir la question.

L'utilisateur de Facebook Sol DjVaselli Duverne a été encore plus laconique : le titre de son partage d'article est : PASSEZ À LA CAISSE”.