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Ces programmeurs indiens créent un détecteur de messages factices pour WhatsApp et Facebook

mercredi 5 avril 2017 à 22:00

Hackathon Mozilla L10N dans le Pendjab, en Inde. Photographie de Subhashish Panigrahi via Wikimedia (CC BY-SA 4.0)

Deux programmeurs indiens ont créé un site internet qui aide à détecter les messages factices largement partagés sur WhatsApp et Facebook. Le site, check4spam.com, s'appuie à la fois sur la recherche et sur les enquêtes de l'équipe et d'usagers bénévoles.

Le groupe espère étendre les capacités de leur portail afin de fournir certains services grâce à des outils techniques. Ils décrivent leur projet ainsi :

We verify any known posts with the below actions:

1. Contact the person/organization mentioned in the post
2. Do an extensive search (online and offline) to find any further fine information about the news

- How We Work, check4spam.com

Nous vérifions n'importe quel billet publié par les actions suivantes :
1. Contacter la personne / l'organisation mentionnée dans le billet
2. Procéder à une recherche approfondie (en ligne et hors ligne) pour trouver plus d'informations sur la nouvelle.

- Comment travaillons-nous, check4spam.com

(SPAM) Les dix partis politiques les plus corrompus au monde en 2017 par la BBC

L'Inde connaît une rapide augmentation de l'utilisation d'Internet, y compris parmi les personnes âgées. Ces nouveaux utilisateurs ne savent en général pas différencier les sources d'information authentiques de celles factices ou malveillantes. Les pièges à clics, canulars et programmes de type “cheval de Troie“, construits pour dérober des informations aux utilisateurs, sont d'autres menaces avec lesquelles il faut compter.

Bal Krishn Birla and Shammas Oliyath, les créateurs du site, sont deux experts basés à Bangalore, dans le sud de l'Inde. Armés de la vision d'un “service inconditionnel pour l'humanité” et d'une mission “de simplifier la vie des gens ordinaires et de la rendre difficile aux spammeurs”, ils se sont engagés à éduquer les Indiens victimes de messages factices sur les médias sociaux et qui les font circuler.

Une certification typique. Image via le site internet de Check4Spam.

En août 2016, ils ont créé un numéro WhatsApp pour que les gens puissent envoyer des messages à vérifier. D'après Shammas, ils reçoivent jusqu'à cent messages par jour. Shammas les lit pendant sa pause déjeuner et commence à en remonter la piste.

Check4Spam est un projet auto-financé. Les publicités sur le site génèrent quelques revenus qui couvrent les coûts de fonctionnement, dont des publicités sur Facebook.

#Check4Spam
1. Ajoutez le numéro +9035067726 sur votre téléphone
2. Copiez le contenu dont vous doutez
3. Envoyez-le sur WhatsApp. Ils vous diront si c'est factice ou pas.

Check4Spam accepte actuellement les messages au format texte, image ou d'un mélange des deux. L'équipe utilise également le crowdsourcing pour la détection des spams en demandant aux utilisateurs de rapporter les spams qu'ils découvrent eux-mêmes. Les spams détectés sont catégorisés en tant que rumeurs, accidents, jobs, médical, perdus, initiatives gouvernementales ou promotions.

Le site reçoit un demi million de vues par mois.

#Instameet 2017 au Sri Lanka : images, créativité, rencontres et… appareils photo au lieu de smartphones

mercredi 5 avril 2017 à 20:32
Le pouvoir des citoyens: des affiches pour un prochain groupe Janatha Vimukthi Peramuṇa qui aura lieu à l'extérieur du marché de Negombo sur Sea Street. Photo par @amaliniii. Prises à l'Instameet de cette année tenu à Negombo.

Le pouvoir des citoyens : des affiches pour un prochain groupe Janatha Vimukthi Peramuṇa qui aura lieu à l'extérieur du marché de Negombo sur Sea Street. Photo par @amaliniii. Prises à l'Instameet de cette année tenu à Negombo.

Cette publication de Raisa Wickrematunge est apparue à l'origine sur le site Web de recherche sur le patrimoine, Sri Lanka. Une version éditée est publiée ci-dessous dans le cadre d'un accord de partage de contenus avec Global Voices.

Le 26 mars 2017, un groupe de 13 personnes a créé une certaine confusion parmi les vendeurs du vieux marché de Sea Street, dans la ville de Negombo sur la côte ouest du Sri Lanka.

“D'où venez-vous ?” était une question souvent répétée. Armé d'appareils photo et de smartphones, peut-être que le groupe ressemblait à des touristes.

En fait, le groupe participait à Instameet Sri Lanka – faisant partie d'un événement mondial où les utilisateurs d'Instagram dans un pays ou une localité particuliers se connectent. Il y a généralement deux Instameets qui se tiennent chaque année, et à travers le monde, les utilisateurs d'Instagram organisent leurs propres réunions à cette date.

Pourtant, alors que le groupe aurait pu ressembler à des touristes, les participants d'Instameet avaient tous des points en commun : un désir de non seulement rencontrer des personnes qu'ils ne connaitraient autrement que par leur journal de médias sociaux, mais aussi d'explorer et de documenter l'emplacement choisi – Negombo.

“I personally think Negombo is a great place [to have an Instameet] because it’s very diverse. The architecture and its landmarks are testament to its rich culture and history.” – participant and resident of Negombo, Aadil Marzook (@aadil.marzook)

“Personnellement, je pense que Negombo est un excellent endroit [pour avoir un Instameet] car la ville est très diverse. L'architecture et les monuments témoignent de sa riche culture et de son histoire.”- Participant et résident de Negombo, Aadil Marzook

Pendant la promenade certains des compagnons d'Aadil Marzook ont révélé beaucoup sur les aspects culturels et historiques de Negombo qui ne se trouveraient pas dans un guide touristique et qui souvent ne retiennent pas par l'attention d'un touriste.

Quelques participants de la rencontre de cette année :

Thank you @amaliniii ❤ Creating memories with this bunch is always a pleasure 😊 #srilanka #wwim15❤️ #WWIM15 #WWIMSriLanka #negombo #fire #WWIM15SriLanka

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La façade du St. Mary's College, par exemple, a été couverte des mots “No Hair Cuts” (Pas de coupe de cheveux). Il s'agit en fait de représailles de la part des étudiants, a expliqué Aadil.

“Beaucoup d'étudiants qui fréquentent cette école proviennent de la communauté des pêcheurs. Ils réagissent aux règles strictes relatives aux uniformes. L'école n'autorise pas les cheveux hérissés ou les pantalons trop serrés – parfois ils coupent les cheveux de l'élève en guise de punition “, a expliqué Aadil.

Des bribes d'informations comme celle-ci font la particularité des Instameet. Les participants s'occupent non seulement de fixer des lieux symboliques ou des couchers de soleil, mais aussi des tranches de la culture de la région ainsi que la vie quotidienne des habitants.

Ces conversations en ligne ont longtemps constitué une partie du chapitre sri-lankais d'Instameet, qui a débuté lorsque Abdul Halik Azeez (@colombedouin) a lancé l'idée en 2013 à des personnes qui assistaient, ironiquement, à un autre événement basé sur une plate-forme de médias sociaux – TweetUp, pour les utilisateurs de Twitter.

Jouer avec l'idée de faire un #instameet au Sri Lanka, ça vous dirait ?

“Le Sri Lanka a une tradition de communautés en ligne se rencontrant dans la vraie vie … tels que les événements de micro ouverts pour les utilisateurs de l'agrégateur de blogs Kottu”, a déclaré Halik. “J'ai vu des gens qui participaient à des rencontres dans le monde entier sur Instagram, et j'ai pensé qu'il serait intéressant d'en avoir un ici aussi, alors j'ai demandé aux internautes s'ils seraient intéressés”. La réponse était oui.

Photos du premier Instameet dans la gare de Mardana à Colombo en 2013

Photos du premier Instameet dans la gare de Mardana à Colombo en 2013

Nazly Ahmed (@nazlyahamed), l'un des organisateurs d'Instameet de cette année relève que l'”Instameet n'a pas été commercialisé. Les marques essaient souvent de détourner un événement, mais nous tentons simplement de le garder simple : c'est se connecter avec la communauté et explorer. Vous pouvez essayer beaucoup plus de choses ensemble en tant que groupe que si une marque était impliquée “, a ajouté Nazly.

Depuis cette première rencontre, il y a eu des changements, pas seulement en termes de participation, mais aussi dans la façon dont Instagram même a été utilisé.

Un autre changement a été le passage de l'utilisation des smartphones aux appareils pour prendre des photos. Le résultat a été qu'il y avait moins de photos téléchargées instantanément à l'aide des hashtags de cette année. “Je pense que lorsque les gens sont en mouvement, il devient encombrant de s'arrêter et de télécharger des photos. En outre, il s'agit de montrer ce qui intéresse chaque utilisateur. Personnellement, j'essaie de saisir les émotions. J'aime me rapprocher de mes sujets – et un capteur photographique électronique m'aide à capter cela”, a expliqué Nazly.

Hashinika Abeygunasekara (@hashiabey) a déclaré que c'était effectivement après avoir assisté à un Instameet, tenue à Kompannaveedya, qu'elle a eu l'inspiration d'acheter un appareil photo et continuer plus sérieusement a photographie.

Photos de l'Instameet à Kompannaveedya dans l'île des esclaves en 2015

Photos de l'Instameet à Kompannaveedya dans l'île des esclaves en 2015

“Je trouve que l'utilisation d'un appareil photo donne un meilleur cadrage et une meilleure perspective. On arrive aussi à une bien meilleure mise au point. Parfois, je trouve que les gens se sentent un peu gênés, voire effrayés lorsque j'utilise mon téléphone pour prendre des photos. Alors que, maintenant, quand je me promène dans Pettah, par exemple, je trouve que les gens sont contents que je les prenne en photo quand ils voient mon appareil”.

InstaMeet #SriLanka 2016
Suivez # WWIMI14SriLanka pour voir les clichés fantastiques des personnes ci-dessus dans Colombo. Nous espérons…

Bien qu'il y ait eu des changements dans la façon dont les gens utilisent Instagram, un aspect reste le même – et c'est le désir des participants de capturer l'essence des lieux qu'ils visitent. Au-delà des Instagrammers se connectant les uns avec les autres, les participants se sont également connectés à l'environnement et aux différentes personnes qu'ils ont rencontrées le long du chemin.

Amalini de Sayrah (@amaliniii), un des organisateurs de Instameet de cette année a déclaré:

Instagram est destiné à l'expression de la créativité. La beauté de la plate-forme, et de l'Instameet lui-même, est que c'est une fenêtre donnant sur de nombreux points de vue différents. Lorsque nous avons annoncé cet Instameet, plusieurs personnes nous ont demandé si c'était réservé aux photographes professionnels : les rencontres et l'application elle-même sont pour tout le monde et la plupart de ses utilisateurs sont des passionnés de photographie, des autodidactes et des curieux qui veulent explorer. Instagram est un endroit qui permet aux gens de raconter leur histoire, quel que soit l'appareil utilisé ou accessible.

Photos de l'Instameet de cette année à Negombo

Photos de l'Instameet de cette année à Negombo

L'événement de cette année a débuté près de la lagune de Negombo. Les participants ont visité l'ancien marché de Sea Street, St. Mary's Church (l'église Sainte Marie) et le marché aux poissons avant d'aller marcher le long du canal, en terminant par la plage pour le coucher du soleil.

Graffiti

Le reste des photos de l'Instameet de cette année peut être visualisé à travers le hashtag #wwim15srilanka.

Comment Fukushima, Miyagi et Iwate se remettent du tsunami, six ans plus tard

mercredi 5 avril 2017 à 12:02

Des dizaines de milliers de personnes restent sans abri et pour certains, la vie est beaucoup plus dure depuis la catastrophe.

Shizugawa, Minami Sanriku (Miyagi)

“Vue de Shizugawa, Minami Sanriku (Miyagi) depuis le lycée de Shizugawa.” Shizugawa a été dévastée par le tsunami en mars 2011 et la région est encore en pleine reconstruction. Photographie prise en octobre 2016 par l'utilisateur Flickr Cheng-en Cheng. Licence : Attribution-ShareAlike 2.0 Generic (CC BY-SA 2.0).

Le Kahoku Shimpo, quotidien japonais de la région nord-est du Japon, a publié début mars 2017 un reportage sur les progrès qui ont été faits dans les six dernières années pour reconstruire les vies des gens touchés par la “triple catastrophe” de mars 2011 : un gigantesque tremblement de terre, un tsunami et l'accident nucléaire de Fukushima.

Le Kahoku Shimpo a son siège à Sendai, dans la préfecture de Miyagi, qui fut l'une des préfectures du nord-est du Japon à avoir subi à la fois le tremblement de terre et le tsunami qui a suivi. Des villes côtières ont été complètement rayées de la carte par le tsunami et des centaines de milliers d'habitants de Miyagi et des communes voisines de Fukushima et Iwate ont été contraints d'évacuer les lieux. La préfecture de Fukushima a aussi vécu un accident nucléaire qui à lui seul a forcé 160 000 habitants à quitter leur foyer.

Six ans plus tard, le numéro spécial du Kahoku Shimpo fournit un point de vue local sur les progrès réalisés pour reconstruire les vies des habitants de la région. Le reportage détaillé du journal contient notamment des statistiques du Ministère japonais de la reconstruction ainsi que des enquêtes sur les personnes évacuées.

La question du logement à Fukushima, Miyagi et Iwate

Le Kahoku Shimpo rapporte qu'en décembre 2015, 77 % des travaux de réhabilitation des logements (災害公営住宅, saigai kouei juutaku) avaient été réalisés dans les préfectures de Fukushima, Miyagi et Iwate. C'est à Iwate que les travaux ont le plus avancé, avec 80 % des réhabilitations réalisées, contre 75 % à Iwate et seulement 70 % à Fukushima.

Mais six ans après la catastrophe, il reste encore beaucoup à faire pour que les personnes évacuées quittent leur préfabriqués temporaires (仮設住宅, kasetsu juutaku) pour un logement permanent. Près de 80 000 personnes avaient été contraintes de vivre dans des préfabriqués après la catastrophe. En décembre 2016, elles étaient encore 36 000.

Près de 40 % des habitants de Fukushima évacués en 2011 vivent encore dans des logements temporaires. Miyagi a fait mieux puisque 75 % des habitants de la préfecture ont pu être relogés de façon permanente. A Iwate, ils sont 34 % à ne pas avoir été relogés.

Situation de l'industrie et vie quotidienne dans les trois préfectures touchées

D'après le Kahoku Shimpo, 1 074 des 1 100 écoles (soit près de 98 %) des trois préfectures touchées par le désastre de mars 2011 étaient à nouveau ouvertes en décembre 2016.

Six ans après la catastrophe, il est certain que la relance de l'activité dans ces préfectures a été plus difficile. Bien que près de 100 % des ports de pêche d'Iwate et de Miyagi soient aujourd'hui opérationnels, seuls 30 % des ports de Fukushima ont rouvert.

Le tsunami et l'accident nucléaire ont touché une grande zone de terrains agricoles dans les trois préfectures. Miyagi est parvenue à réhabiliter 93 % des terres agricoles impactées, mais seulement 66 % des terres d'Iwate et moins de 50 % de celles de Fukushima sont aujourd'hui exploitées.

Ceci ne s'explique peut-être pas seulement par l'accident nucléaire, dans la mesure où seuls 690 des 5 400 hectares de terres agricoles affectées par le désastre dans la préfecture de Fukushima sont situés dans la “zone d'exclusion nucléaire”.

Le tourisme a bien repris dans deux des trois préfectures, mais là encore, Fukushima est à la traîne. A Iwate et Miyagi, le tourisme atteint maintenant environ 90 % de son niveau d'avant la catastrophe, pour seulement 75 % à Fukushima.

Le Kahoku Shimpo rapporte toutefois que près de la moitié des habitants des villes côtières considèrent que depuis la catastrophe, il est plus difficile de gagner sa vie.

Les habitants sont-ils préparés pour la prochaine “Grande catastrophe” ?

Le journal a également mené de nombreuses enquêtes auprès des habitants des trois préfectures et des personnes évacuées pour déterminer l'avancée de la reconstruction et ce qui a changé dans la perception des risques liés aux tsunamis. En introduction de son numéro spécial, le Kahoku Shimpo écrit :

住民の津波防災意識を探る調査を実施した。今後起きる地震や津波に備えて対策をしているとの回答が83.1%と意識の高さがうかがえる一方、実際の備えに不安を感じている人も55.9%と半数を超え、課題があることを示した。

Le Kahoku Shimpo a mené une enquête pour en savoir plus sur la sensibilisation aux tsunamis parmi les résidents. Il est apparu que 83,1 % des habitants ont pris des mesures en vue d'un futur tremblement de terre et d'un tsunami. Toutefois, 55,9 % des personnes interrogées (soit plus de la moitié) considèrent qu'elles ne sont pas suffisamment prêtes à affronter une nouvelle catastrophe.

Le sort des évacués de la préfecture de Fukushima

Dans son reportage anniversaire, le Kahoku Shimpo s'est également intéressé au statut des personnes évacuées de la préfecture de Fukushima. Cette région a non seulement vécu un violent séisme et un tsunami dévastateur, mais elle a aussi été témoin du pire accident nucléaire de l'histoire du Japon.

Près de 63 000 des 160 000 personnes évacuées de Fukushima ont été déplacées hors de la préfecture. Début 2016, un peu plus de 23 000 personnes ont pu être relogées dans des habitations permanentes à l'intérieur de Fukushima. En 2017, ce sont encore environ 40 000 habitants de Fukushima qui résident à l'extérieur de la préfecture.

La majeure partie des personnes évacuées des zones affectées par la catastrophe occupant encore des logements temporaires ont plus de 50 ans. Les projets de construction massifs réalisés dans le cadre des Jeux olympiques de Tokyo 2020, avec lesquels les préfectures de Miyagi, Iwate et Fukushima doivent rivaliser, seraient un des obstacles au relogement de ces populations dans des habitations permanentes.

Russie : L'écrivain-guerrier et le prêtre assoiffé de sang

mercredi 5 avril 2017 à 11:12

Photo: Pixabay.

Zakhar Prilepine n'est pas seulement un écrivain russe contemporain de premier plan, c'est aussi un bruyant idéologue politique. Adhérent du parti national-bolchevique, il anime un talk-show sur la chaîne nationaliste et ultra-conservatrice Tsargrad TV. Prilepin est aussi le rédacteur-en-chef de Svobodnaïa Pressa, un organe de média pro-Kremlin centré sur les sujets politiques, militaires et économiques.

Le 13 mars, Prilepine est apparu dans une surprenante vidéo en ligne.

C'est au courant de ce mois qu'il a annoncé la formation d'un nouveau bataillon de volontaires pour combattre en Ukraine orientale du côté de l'auto-proclamée “République populaire de Donetsk.” Le bataillon “fera son entrée sur un cheval blanc dans chaque localité que nous [les Russes] avons abandonnée”, déclarait-il.

Sur la vidéo, publiée par le tabloïd pro-Kremlin Life.ru, Prilepine, face à la caméra, montre une feuille de papier avec le symbole de la paix maladroitement dessiné. Il déclame alors d'une voix monocorde :

“Tous les écrivains du monde ont toujours été pour la paix. Shakespeare, Chenderovitch [animateur radio et télé et écrivain satirique], Dante, Andreï Makarevitch [rocker célèbre] — tous sans exception. Moi aussi je suis pour la paix. Merci à vous tous”.

Avec une expression d'extrême ennui, il demande alors au caméraman s'il a terminé, avant de se tourner vers un gros canon anti-aérien monté sur un camion derrière lui. “Au travail !” hurle-t-il, et l'artilleur tire plusieurs salves retentissantes vers l'horizon.

Le même jour, Prilepine publiait une tribune sur le site d'information pro-Kremlin REN-TV, où il anime un second talk show. Dans ce texte, il s'efforçait d'éclaircir le sens de sa “vidéo sur la paix”.

“La paix n'est pas un cadeau”, écrit mystérieusement Prilepine. “La paix est un travail. Quand il n'y a pas de paix, il faut se battre pour elle”.

Et d'affirmer sa confiance d'avoir l'histoire de son côté sur ce sujet. “Il est absolument évident que Léon Tolstoï, tout comme Pavel Katenine, Mikhaïl Lermontov, et des dizaines d'autres poètes étaient assurément engagés dans des ‘guerres de conquête’”, explique Prilepine, avant de nommer une autre poignée de poètes et écrivains célèbres : Pouchkine, Baratynski, Garchine, Batiouchkov, Sloutski et Loukonine.

“Je suis pour la paix. J'ignore pour quoi vous êtes”, dit Prilepine a ses lecteurs. “Et sincèrement ça m'est indifférent”.

Environ une semaine plus tard, il s'est fendu d'une autre tribune, cette fois pour la télévision russe de propagande RT (précédemment “Russia Today”), où il déclarait que “la littérature n'est pas de l'humanisme” et explique qu'il quitte de temps en temps sa base d'opérations de Donetsk pour gagner de l'argent en Russie. Il consacre le revenu qu'il en tire à l'achat de fournitures militaires pour les séparatistes, écrit-il.

En mars, l'écrivain-guerrier russe s'est trouvé une âme-sœur chez son compatriote prêtre-guerrier. Le 9 mars, Vsevolod Tchapline, l'ancien porte-parole de l'Eglise orthodoxe russe, a écrit un court texte sur Facebook énonçant le sort que le pays devrait selon lui réserver aux “traîtres”.

Réagissant à la nouvelle de l'assassinat de Kim Jong-nam en Malaisie, et comparant son traitement médiatique aux articles de 2006 sur celui d'Alexandre Litvinenko dont sont soupçonnés des agents russes, Tchapline déplorait que les “traîtres et félons” sèment à nouveau l'hystérie.

Arguant que ces vils individus devraient être privés de leur “confort psychologique”, Tchapline en déduit trois recommandations extrêmes : lever le moratoire de la sur la peine de mort en Russie, créer des“unités spéciales pour exécuter les verdicts des tribunaux”, et autoriser des “frappes de missiles guidés” contre les traîtres.

Les internautes russes se sont évidemment amusés de voir un prêtre plaider pour le meurtre d’État. Lentach, une communauté satirique populaire, a rappelé sur le ton du badinage à Tchapline un aspect négligé du christianisme appelé le cinquième commandement (“Tu ne tueras point”).

Ce n'était pas la première fois que Vsevolod Tchapline cautionnait le meurtre. En août dernier, il a parlé sur la radio Ekho Moskvy pour dire qu'il est parfois nécessaire d'“éliminer certains ennemis intérieurs”. Invité à préciser sa pensée, Tchapline a expliqué que certains individus “peuvent et doivent indiscutablement être tués”, dans l'intérêt de la société.

Retour à l'ère soviétique ? Selon ses détracteurs, un projet de loi au Kazakhstan met l’État au-dessus du droit

mardi 4 avril 2017 à 23:30

Joseph Staline et Kliment Vorochilov en 1935. Domaine public.

Les réseaux sociaux de l'ex-République soviétique du Kazakhstan ont été secoués cette semaine par la nouvelle que le ministre de la Justice travaillerait à un projet de loi [en kazakh] selon lequel les Kazakhs pourraient se voir condamner à la prison à vie, la peine de mort ou la privation de leurs droits civiques pour “atteinte aux intérêts nationaux et à la stabilité de l'Etat et de la société”.

Aux dernières nouvelles, le gouvernement retirerait ce projet, mais d’autres amendements au code criminel inspirent peu confiance quant à une avancée du Kazakhstan dans une direction démocratique.

Selon de récents changements constitutionnels [en anglais], certains citoyens impliqués dans le terrorisme ou des conflits armés pourraient être déchus de leur citoyenneté. Le droit pénal fait actuellement l'objet d'une mise à jour pour être adapté à la nouvelle constitution.

L'aspect le plus controversé de ces amendements au code criminel proposés par le ministère de la Justice est l'article 184-1, qui statue qu'“une atteinte ou un grave dommage porté aux intérêts vitaux de l’État et menaçant la stabilité de l’État et de la société” pourrait être puni de mort, d'emprisonnement à vie et de déchéance de la citoyenneté.

Peut-on désigner comme ennemis des intérêts de L’État les gens qui laissent traîner leurs poubelles devant la porte de leur appartement, et leur retirer leurs droits civiques ?

Un post sur le projet de loi [en russe] sur Facebook signé de l'avocat kazakh Jokhar Utebekov a fait réagir les internautes.

Utebekov se moque aussi d'un employé du ministère de la Justice qui dit que ceux qui sont privés de leur citoyenneté ne pourront plus bénéficier d'”avantages sociaux” en tant que citoyens kazakhs.

“De quels avantages sociaux parle-t-il ? Avez-vous peur d'être privés de ‘tous les avantages à être un citoyen kazakh ?'” écrit-il sur sa page, allusion aux droits limités dont jouit le Kazakh moyen dans cet État autoritaire d'Asie centrale.

Inspiration stalinienne ?

Beaucoup ont remarqué le style soviétique de la formulation de l'article 184-1, rappelant l'“Ennemi de la nation” (Враг народа), formule célèbre de la Terreur stalinienne, quand des fusillades de masse étaient chargées de faire taire les dissidents.

Selon d'autres usagers de Facebook, ces modifications viseraient spécifiquement Moukhtar Abliazov, un opposant en exil à l'indéboulonnable président Noursoultan Nazarbaïev, accusé de détournement de fonds et jugé au Kazakhstan par contumace.

Le Conseil d'Etat français a bloqué l'extradition d'Abliazov [en anglais] vers la Russie en décembre 2016, jugeant qu'il s'agissait d'une demande à motivation politique.

La militante kazakh Bakhytzhan Toregozhina écrit sur Facebook:

Qu'est-ce qu'un grave dommage ? Qu'est-ce que les intérêts vitaux ? Comment mesurer l'atteinte à ces intérêts ? Une critique du gouvernement est-elle un grave dommage à la stabilité ?

L'opposant de longue date Sergueï Douvanov considère qu'emprisonner, exécuter et priver les citoyens de leurs droits civiques représente un retour en arrière au temps du totalitarisme soviétique:

L'article 184-1 proposé par le ministre de la Justice me rappelle l'article 58 de l'époque stalinienne qui a fait fusiller plus d'un demi-million de personnes.

Après les réactions sur les médias sociaux, le ministre de la Justice a retiré le projet de loi de son site web et organisé une conférence de presse. Durant cette conférence, le 28 mars, le représentant du ministre de la Justice a indiqué que ces amendements au code criminel étaient susceptibles d'être révisés.

Depuis, il semble que l'article 184-1 fauteur de scandale ait été supprimé, suivant une tendance récente [en anglais] des autorités kazakhes à faire marche arrière face au tollé public.

Toutefois, un ajout permettant la privation de citoyenneté a été fait à l'article 174 (“incitation à la discorde sociale, religieuse et nationale”), un libellé que beaucoup jugent aussi dangereusement vague que l'”atteinte aux intérêts vitaux nationaux et à la stabilité de l’État et de la société”.

De fait, l'article 174 a déjà été utilisé par les autorités pour réduire au silence et persécuter les militants de l'opposition au Kazakhstan. Comme lorsque le chef du parti d'opposition non officiel Alga! a été incarcéré [en anglais] durant sept ans et demi pour “incitation à la discorde sociale”. Depuis, aucun véritable parti d'opposition n'a vu le jour au Kazakhstan.

La version finale du code criminel amendé devrait être rendue publique après le 4 avril et envoyée pour signature au président Nazarbaïev, après approbation par le Parlement.