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Aux Philippines, une mangrove et ses villages de pêcheurs menacés d'assèchement pour un vaste projet d'aménagement

samedi 9 juin 2018 à 20:17

Le village de Taliptip aux Philippines. Photo : Kalikasan PNE, utilisation autorisée

Cet article écrit par Leon Dulce provient de Kodao, un site d'information indépendant aux Philippines, et paraît sur Global Voices dans le cadre d'un accord de partage de contenu.

Obando Fishport, situé au nord de Manille, la capitale des Philippines, grouille d'activité à 6 heures du matin. Une flottille colorée et une foule compacte se sont rassemblées, les bateaux de pêche glissent bord à bord précautionneusement pour accoster chacun à son tour.

L'agitation fait place à un marigot idyllique quand on se rend en banka, un bateau traditionnel en bambou, au village côtier de Taliptip, dans l'agglomération de Bulakan, province de Bulacan. Dans ses mers environnantes, quelque 5.000 pêcheurs et sauniers vivent des poissons, moules, crabes, crevettes et krill, don de ces eaux et corridors de mangrove paisibles.

Au milieu de cette ribambelle de petites communautés insulaires, la San Miguel Corporation poursuit agressivement un projet d'aménagement de 2.500 hectares, qui menace de tout métamorphoser sur son passage en ce qui se veut un ‘complexe aérotropolis’ d'aéroports, d'autoroutes et d'urbanisation.

Le projet était un secret bien caché aux habitants de Taliptip, jusqu'à ce que des défenseurs de l'environnement et des ecclésiastiques en parlent dans les villages, et que le Président Rodrigo Duterte apparaisse aux informations, déjà en train de signer la transaction du projet.

Les habitants, surtout ceux qui vivent dans le village depuis plus de 80 ans, s'inquiètent des menaces du projet sur leur vie et leurs moyens d'existence.

Un pêcheur relève ses filets à Taliptip. Photo et texte de Leon Dulce/Kalikasan PNE, utilisation autorisée

“Tant que la mer est là, il y a de l'espoir…Qu'est-ce que nous pêcherons quand tout ça sera devenu du béton ?” demande Arthur*, un pêcheur de Sitio Kinse, un hameau insulaire de Taliptip enveloppé d'épaisses mangroves.

Arthur indique que les prises de poisson journalières moyennes rapportent environ 500 pesos philippins (PHP, soit10 dollars US). De ce montant, il faut défalquer l'essence et les autres frais, et payer sa part à l'armateur du bateau. Pendant les saisons sèches, certains pêcheurs travaillent dans les marais salants et reçoivent de 154 à 254 PHP [3 à 5 dollars) en paiement par sac selon la qualité du sel.

Une journée avec une bonne pêche est pourtant devenue chose rare. Gloria*, une habitante de Sitio Dapdap à Taliptip, explique que les familles de pêcheurs ont coutume de stocker leurs prises vivantes dans des enclos de fortune et de les vendre une fois par semaine. Un aller et retour quotidien au marché central d'Obando est simplement trop coûteux par rapport aux prises journalières en baisse.

Le projet d'aménagement menace de destruction ce village de pêcheurs et de sauniers. Photo Kalikasan PNE, utilisation autorisée

Les temps devenus durs poussent par nécessité les gens de Taliptip à vivre de façon éco-responsable. Non reliés au réseau, les habitants ont mutualisé leurs ressources pour installer des panneaux solaires et des batteries couvrant les besoins élémentaires en électricité. Ils prennent soin des mangroves car les crustacés qu'ils récoltent vivent entre les racines, qui servent de barrières naturelles aux hautes vagues.

Une section de l'éco-parc des mangroves de Bulakan. Photo et texte de Leon Dulce/Kalikasan PNE, utilisation autorisée

Outre un éco-parc de 25 hectares créé par le Département de l'environnement et des ressources naturelles (DENR en anglais), diverses autres étendues de mangroves parsèment les eaux de Taliptip. Une énorme population d'oiseaux, tels que sternes, aigrettes, martin-pêcheurs et alouettes nichent dans ces arbres.

Ces ceintures vertes côtières ont une immense valeur d”écosystèmes en équilibre. Pourtant l'Autorité nationale du développement économique (NEDA en anglais), l'organisme de tête qui a approuvé le projet d'aménagement, ne voit pas les choses ainsi.

San Miguel a déclaré pouvoir prendre en charge la totalité de l'investissement de 735,6 milliards de PHP (14 milliards de dollars] de l’ ‘aérotropolis’, une addition salée et une énorme manne financière pour la NEDA, assez pour justifier le déplacement de milliers de personnes lorsque la végétation écologiquement cruciale cèdera la place.

Début 2018, le gouvernement Duterte a également signé un protocole d'accord avec le gouvernement des Pays-Bas pour élaborer en collaboration le Plan directeur de développement durable de la baie de Manille (MBSDMP en anglais). C'était cependant mettre la charrue avant les bœufs, puisque des projets comme l'aérotropolis progressaient rapidement en l'absence de supervision  par un cadre global de développement et de gestion durables.

Près de 30.000 hectares de tels projets couvrent à présent la longueur totale de la baie.

Portion d'une étendue de mangroves qui aurait été coupée par du personnel de San Miguel. Photo et texte de Leon Dulce/Kalikasan PNE, utilisation autorisée

C'est du personnel de San Miguel qui serait à l'origine d'abattages massifs d'arbres des mangroves à Taliptip en mai 2017. Les villages ignorent si les responsables possédaient un permis spécial d'abattage des arbres du DENR, comme l'exige la loi.

Pour Arthur, défendre le seul moyen d'existence qu'il connaisse de la menace réelle des aménageurs est non négociable. Et de préciser : “Nous ne quitterons pas nos maisons. Nous nous battrons aussi longtemps qu'il y aura des gens pour nous soutenir et nous donner la force de nous battre”.

Mouvements écologistes et églises sont profondément aux côtés des villageois dans la lutte pour sauver Taliptip et les diverses autres collectivités autour de la Baie de Manille. M. Duterte soutiendra-t-il le peuple, pour rester fidèle à son discours anti-aménageurs, ou bien s'inclinera-t-il une nouvelle fois devant les intérêts du grand business ?

Leon Dulce est le coordinateur national du Réseau du peuple Kalikasan pour l'environnement. Suivez la lutte de la population locale pour sauver Taliptip, sur Facebook, ou avec le mot-clic #SaveTaliptip sur Twitter.

*Les noms ont été changés pour raisons de sécurité. 

Qui sont les prisonniers politiques de la Chine ? La situation des droits humains, 29 ans après Tiananmen

vendredi 8 juin 2018 à 17:05

“La police rappelle : Pas de distribution de pensées ou d'objets malsains.” Un panneau trilingue (tibétain – chinois – anglais) au-dessus de l'entrée d'un petit café dans la ville de Nyalam, au Tibet, 1993. Par John Hill. CC BY-SA 3.0.

Écrit par Pong Lai

Le 29e anniversaire de la répression sanglante des manifestations de la place Tiananmen approche [NdT : la version en anglais de cet article a été publiée le 2 juin]. Le 4 juin 1989, les forces armées chinoises ont ouvert à plusieurs reprises le feu sur un mouvement dirigé par des étudiants exigeant la liberté d'expression et des réformes politiques au lieu de la corruption et de la domination du parti unique.

À l'époque, la Croix-Rouge chinoise estimait que 2 700 civils avaient été tués, mais d'autres sources font état d'un nombre beaucoup plus élevé. Un document confidentiel du gouvernement américain, révélé en 2014, indiquait qu'une évaluation interne chinoise estimait que 10 454 civils avaient été tués. Récemment, un autre rapport écrit par l'ambassadeur américain d'alors en Chine a été déclassifié ; il cite une source du Conseil d’État chinois qui a déclaré que l'estimation minimum des civils tués était 10 000.

Les autorités avaient également arrêté des centaines de personnes en relation avec les manifestations de la place Tiananmen. Mais ils n'étaient pas les premiers prisonniers d'opinion à entrer dans les prisons chinoises – ni les derniers, non plus. À l'occasion de l'anniversaire de la répression, beaucoup de Chinois se souviennent de ceux qui ont été emprisonnés pour avoir exprimé leurs idées.

Il n'y a aucune trace officielle du nombre de prisonniers politiques en Chine : le gouvernement chinois nie qu'il en existe.

Cependant, la base de données sur les prisonniers politiques de la Commission exécutive du Congrès américain sur la Chine (CECC), qui suit des cas dans ce pays depuis 1981, fournit des détails importants sur la situation. Une lecture croisée de ces données avec l'histoire politique de la Chine continentale au cours des trois dernières décennies peut également nous aider à présenter une image plus claire de l'état des droits humains en Chine.

Qui sont les prisonniers politiques en Chine ?

Le CECC définit un prisonnier politique comme :

un individu détenu pour avoir exercé ses droits fondamentaux en vertu du droit international, telles que réunion pacifique, liberté de religion, liberté d'association, liberté d'expression, y compris la liberté de préconiser des changements sociaux ou politiques pacifiques, et de critiquer la politique gouvernementale ou des agents publics.

La base de données compte 9 116 cas de prisonniers politiques en Chine continentale de 1981 à 2018. Cependant, la commission n'a commencé à tenir des registres qu'en 1987, de sorte que le nombre réel de cas peut être supérieur à ce que montrent ses dossiers.

La plupart des prisonniers de la base de données ont été libérés, mais plus de 1 000 auraient été derrière les barreaux en 2017.

En jetant un coup d'œil à leurs profils, il y avait plus de détenus hommes que femmes (figure 1).

Figure 1. Répartition par sexe des prisonniers politiques en Chine de 1981 à 2017. Graphique élaboré à partir de la base de données sur les prisonniers politiques de la Commission exécutive du Congrès des États-Unis sur la Chine.

Près de la moitié des personnes derrière les barreaux (4 012) étaient des Tibétains. Avec une population de six millions de Tibétains en Chine, où la population totale dépasse le milliard, leur nombre dans les prisons est disproportionné.

Seulement environ la moitié des dossiers contiennent des informations sur l'âge du détenu au moment de son arrestation. Parmi les données disponibles, le plus jeune prisonnier politique n'avait que 6 ans au moment de son arrestation, tandis que le plus âgé en comptait 84. Environ 65 % des détenus avaient entre 20 et 45 ans (figure 2).

Figure 2. Age des prisonniers politiques en Chine de 1981 à 2017 au moment de l'arrestation. Graphique élaboré à partir de la base de données sur les prisonniers politiques de la Commission exécutive du Congrès des États-Unis sur la Chine.

Dissidence et répression au Tibet

La figure 3 montre le nombre de prisonniers politiques détenus par année et les événements auxquels leurs détentions correspondaient. Nous pouvons voir plusieurs pics significatifs.

Figure 3. Nombre de prisonniers politiques détenus en Chine par année, avec des moments historiques importants annotés. Les couleurs correspondent à la personnalité politique la plus puissante de l'époque : rouge pour Deng ; orangé pour Jiang ; vert pour Hu ; et bleu pour Xi. Les événements sont, de gauche à droite : Mouvement de 1989 ; Rétrocession de Hong Kong à la Chine ; J.P. de Pékin ; Mouvement des Parapluies. Graphique élaboré à partie de la base de données sur les prisonniers politiques de la Commission exécutive du Congrès des États-Unis sur la Chine.

Le premier pic est survenu en 1989 à l'époque de Deng Xiaoping (fr) (représenté en rouge) et correspond à la répression de la place Tiananmen le 4 juin 1989.

Les deuxième et troisième pics en 1993 et ​​1995 sont principalement liés à la répression croissante de la dissidence politique au Tibet, qui abrite un mouvement indépendantiste. La figure 4 montre qu'à partir de 1987, le nombre de Tibétains détenus a commencé à augmenter.

Quarante-quatre manifestations en faveur de l'indépendance ont été signalées au Tibet en 1993 et ​​environ 400 Tibétains ont été emprisonnés. En 1994, au moins 19 manifestations ont eu lieu au Tibet et le nombre de prisonniers politiques tibétains a atteint 628. Selon un rapport d'un haut-fonctionnaire du ministère chinois de la Justice de janvier 1995, 200 des 800 Tibétains détenus ont été reconnus coupables de crimes “contre-révolutionnaires”.

Figure 4. Prisonniers politiques en Chine par ethnie. Graphique élaboré à partie de la base de données sur les prisonniers politiques de la Commission exécutive du Congrès des États-Unis sur la Chine.

Le Dalaï Lama, qui vit en exil, est considéré comme le leader politique et spirituel du Tibet. En 1995, il a reconnu la 11ème incarnation du Panchen Lama [fr], l'une des figures les plus importantes du bouddhisme tibétain. Cependant, le comité de recherche reconnu par le gouvernement a choisi une autre personne. Le gouvernement chinois a placé Gedhun Ghoekyi Nyima, reconnu par le Dalaï Lama comme Panchen Lama, en “détention protectrice”. Des centaines de moines et nonnes ont été arrêtés parce qu'ils ne reconnaissaient pas le Panchen Lama choisi par Pékin.

Le quatrième pic s'est produit en 2008, lorsque la Chine se préparait à accueillir les premiers Jeux olympiques de son histoire. Un grand nombre de manifestations ont eu lieu cette année-là, en particulier au Tibet [fr] (voir la figure 5). Les Tibétains ont profité de ce moment sous les projecteurs internationaux pour manifester contre les politiques économiques [fr] et de développement [fr] qui avaient entraîné l'inflation, la pollution de l'environnement et les saisies de terres dans la région. Le resserrement du contrôle idéologique de Pékin au Tibet, où le système éducatif enseignait aux Tibétains à haïr le Dalaï Lama et à prêter serment de fidélité au gouvernement chinois, a été également un sujet de discorde.

En réponse à l'agitation, la Chine a sévi. Sur la base du rapport de la Cour populaire suprême de Chine pour l'année 2009, le nombre d'affaires de “mise en danger de la sécurité de l'État” est passé à environ 760 cette année-là contre seulement 460 en 2008. La base de données du CECC indique le nombre total de prisonniers politiques en 2008 et 2009 comme étant 1 220.

Religion, politique et pensée

Figure 5. Prisonniers politiques en Chine selon le motif de la détention. Graphique élaboré a partir de la base de données sur les prisonniers politiques de la Commission exécutive du Congrès des États-Unis sur la Chine.

Le pic de 1999 à 2002 est principalement dû à la répression contre le groupe religieux Falun Gong [fr] (voir “FG” dans la figure 5) et des partis politiques.

Le gouvernement chinois a commencé à réprimer la pratique publique du Falun Gong au milieu des années 1990. En 1999, environ 10 000 pratiquants de Falun Gong se sont rassemblés près du complexe du gouvernement central à Pékin pour demander une reconnaissance légale. La manifestation a entraîné l'arrestation d'au moins 111 membres, selon un rapport de Human Rights Watch.

En 1998, un groupe de militants pour la démocratie a tenté d'enregistrer un nouveau parti politique appelé Parti démocrate chinois [fr]. Les militants actifs ont alors été arrêtés ou exilés.

L'augmentation du nombre de prisonniers politiques entre 2009 et 2010 pourrait être liée au mouvement de la Charte 08 [fr] lancée par Liu Xiaobo, lauréat du prix Nobel de la paix, et signée par des centaines d'intellectuels exigeant une réforme politique et une garantie des droits humains.

Nous pouvons également constater un nombre accru de détentions en 2014 et 2015, qui pourrait être lié au Mouvement des parapluies pro-démocratie de Hong Kong et à la répression des avocats [fr] des droits de l'homme du 9 juillet, 2015 (voir le bleu dans la figure 3). Au cours du Mouvement des parapluies, plus de 200 citoyens de Chine continentale auraient été arrêtés pour avoir exprimé leur soutien. Et le 9 juillet 2015, environ 300 avocats et militants des droits humains ont été arrêtés et interrogés.

Prisonniers à domicile

La base de données sous-estime le nombre de prisonniers politiques parce que certains ne sont pas détenus dans une cellule de prison, mais à leur domicile ou dans une “prison clandestine” sans jugement.

Le père de Xiaodan Wang est un pratiquant de Falun Gong. Il a été en prison pendant 15 ans. Wang a déclaré dans une déclaration à une audition du CECC à propos de son père :

When he finally made it home it was to video surveillance and neighborhood watch programs. Police regularly visited and on “sensitive days” he was advised to stay home and out of sight. By no means had he truly returned to a normal life.

Quand il est finalement rentré à la maison, c'était pour la vidéo-surveillance et les programmes de surveillance de quartier. La police venait régulièrement et, les « jours sensibles », on lui conseillait de rester à la maison et de rester invisible. En aucune manière il n'était vraiment revenu à une vie normale.

Des « programmes de surveillance de quartier» similaires ont été appliqués à des militants persécutés bien connus comme Hu Jia [fr].

Depuis des décennies, les autorités chinoises détiennent des personnes à cause de leur combat pour des droits humains comme la liberté d'expression et la liberté de religion. Moines tibétains, pratiquants du Falun Gong, étudiants, avocats, ou survivants du massacre de la place Tiananmen, leur courage et leur vision d'une société meilleure les ont amenés en prison. Mais ils ne seront pas oubliés.

Une artiste anichinabée crée l'émoticône de l'Île tortue pour le Mois de l'histoire autochtone au Canada

vendredi 8 juin 2018 à 12:30

Chaque nation, groupe linguistique, clan, autochtone possède une histoire distincte

L'un des mots-clics permettant d'utiliser l'émoticône de l'Île tortue conçue par Chief Lady Bird. Via Twitter Canada.

En juin, les utilisateurs de Twitter canadiens pourront partager une émoticône spécialement conçue pour la commémoration du Mois national de l'histoire autochtone. Créée par l'artiste anichinabée Chief Lady Bird, elle représente une tortue, un arbre et le soleil et symbolise “l'Île tortue” [en], traduction du nom du continent nord-américain dans plusieurs langues autocthones.

Chief Lady Bird a expliqué sa démarche dans une série de tweets. Elle y affirme avoir pris soin de lancer un appel à idées aux membres d'autres Premières Nations sur Twitter à cause du défi que représente la réalisation d'une image qui englobe la diversité des communautés du pays.

Avant de me mettre à créer cette émoticône, j'ai voulu m'assurer d'un certain degré de consultation communautaire. Comme ce dessin est censé représenter ma communauté, je ne voulais parler au nom de personne. De plus, je voulais donner vie à une vision collective.

Bien que les délais aient été assez serrés, je suis allée sur Twitter, Instagram et Facebook pour rassembler des suggestions ! Sur la base des informations reçues, j'ai créé un sondage officiel sur Twitter avec les quatre options les plus populaires.

Il est important de noter que je ne crois pas qu'un seul symbole puisse représenter l'étendue des peuples autochtones. Chaque nation, chaque groupe linguistique, chaque clan, chaque personne autochtone possède une histoire distincte et il serait injuste d'impliquer que nous appartenons à une seule et même catégorie.

La décision finale de créer l'émoticône de l'Île tortue a été prise à la fois grâce au sondage officiel (1.727 votes, 50 % en faveur de l'Ile tortue) et au fait que l'Île tortue est une vision décoloniale du continent auquel nous appartenons tous.

L'émoticône rend aussi hommage à notre relation mutuelle avec la Mère nature, ainsi qu'à l'histoire de la création anichinabée, dans laquelle un rat musqué se sacrifie, plonge dans les profondeurs et ramène de la terre pour mettre sur le dos de la tortue, apportant vie et nourriture à tous les êtres.

En tant qu'artiste anichinabée, je fais attention à ne pas m'approprier [ce qui vient] d'autres nations, car je sais combien notre imagerie et nos histoires sont sacrées. Je me fait entendre haut et fort sur le sujet de l'appropriation culturelle, et j'aime faire ce que je dis.

Il y a eu beaucoup de supers dialogues pendant tout le processus de conception, et j'en suis très très reconnaissante. L'une des préoccupations majeures a été que les options de mon sondage ne reflétaient pas les Inuits – c'était le cas. Mais je ne me serais jamais senti le droit d'utiliser un symbolisme que je ne comprends pas.

L'émoticône peut être débloquée en utilisant les mots-clics associés : #IndigenousHistoryMonth [Mois de l'histoire autochtone, NdT], #IndigenousPeoplesDay [Journée des peuples autochtones, NdT], #FirstNations [Premières Nations, NdT], #Metis, #Métis, and #Inuit. Elle est le résultat d'un partenariat [en] avec Twitter Canada, que Chief Lady Bird considère comme un point de départ pour de futures collaborations :

Par exemple : cette année le graphisme a été créé par une artiste anichinabée (Je suis tellement honorée et excitée ! C'est tellement surréel !) et l'année prochaine ça pourrait être un artiste inuit, et l'année d'après un artiste haudenosaunee, puis métis, puis micmac etc etc

Ce projet peut potentiellement s'épanouir en quelque chose de plus grand, qui reconnaît les intersections de l'identité autochtone, et je suis vraiment impatiente de voir où il va aller !

Chi miigwech [merci] à tous pour votre constant soutien ! Mais, encore plus important, merci pour votre honnêteté. Pour tenir les gens responsables. Pour défendre une représentation culturelle exacte. Ce travail est important et ne peut être fait seul. Twitter autochtone est génial.

Une bière suisse soulève l’indignation au Népal

vendredi 8 juin 2018 à 12:28

Le timur ou poivre de Timut est utilisé comme condiment, épice et pour ses vertus médicinales. Image de Krzysztof Golik, Wikimedia Commons, CC By-Sa 4.0

La brasserie suisse Turbinenbräu a soulevé l’indignation parmi la population népalaise en utilisant le nom et l’image de l'ancien roi du Népal pour sa bière de saison.

La marque a utilisé du poivre de Timut, une variété proche du poivre du Sichuan, pour conférer une saveur spéciale à ce nouveau produit, qu’elle a baptisé Birendra en référence au roi qui régna sur le Népal de 1972 à 2001. L’étiquette présente une image du monarque, retouchée afin que celui-ci arbore un sourire et un verre de bière. Cette appropriation a rendu furieux de nombreux Népalais et tout particulièrement les partisans de la monarchie.

Le roi Birendra, considéré comme un monarque libéral, a été massacré avec d’autres membres de la famille royale lors d’un dîner en 2001.

Puisque la nouvelle bière contient une épice népalaise, la brasserie Turbinenbräu de Zurich a cru bon de lui donner le nom du roi Birendra, qui régna sur le Népal de 1972 à 2001, en jouant sur la ressemblance du nom du roi avec la prononciation du mot bière en anglais.

La bière est reine 😃

Quelques groupes royalistes ont organisé des manifestations devant l’ambassade de Suisse au Népal pour « insulte » à l’encontre de l’héritage du roi et une pétition en ligne contre la “bière Birendra”.

La brasserie aurait été contactée par l’ambassadeur de Suisse au Népal, qui aurait demandé le retrait de toutes les publicités en ligne pour ce produit. L’entreprise a par la suite décidé d’arrêter de le promouvoir.

Roi des bières ! Non. Birendra souffrait de la goutte, il n’aurait donc probablement pas apprécié l’honneur douteux d’être érigé en saveur du mois par une bande de hipsters suisses bornés ! https://t.co/2AIaP9EgbV

Cependant, tous les Népalais n’ont pas été offensés cette bière au timur.

Le peuple aime le défunt roi Birendra.
Le peuple aime la bière.
Alors, pourquoi le fait qu’une bière porte son nom offense les gens ?🤔
Je n’ai pas d’opinion à ce sujet, je suis juste curieux.

Le fondateur et propriétaire de la brasserie, Adrien Weber, a précisé que son entreprise n’avait jamais eu l’intention de porter atteinte au nom et à l’honneur du roi.

Dans un courriel envoyé à Global Voices le 15 mai 2018, il indique que la bière reste en vente, mais juste pour le printemps.

The Birendra Beer is still on sale. But it was only meant to be a seasonal beer for Springtime. Although we have undoubtedly great success also among our Nepalese customer in Zurich, we are looking forward to the next seasonal beer, the summer special. This beer called «Taifun» is spiced with Ginger and cooked with rice. It will be saleable by the end of this week.

La bière Birendra est toujours en vente. Mais il s’agit uniquement d’une bière de saison pour le printemps. Bien que nous connaissions indubitablement un grand succès également auprès de nos consommateurs népalais à Zurich, nous attendons avec impatience la prochaine bière saisonnière, à savoir la spécialité de l’été. Baptisée Taifun, ce produit est aromatisé au gingembre et cuit avec du riz. Il sera commercialisé d’ici la fin de la semaine.

Cette affaire tombe mal, car cette bière aurait pu être l'occasion de promouvoir le poivre de Timut, une épice appartenant au genre Zanthoxylum, récoltée dans la nature et utilisée comme condiment et comme médicament. Le Népal compte huit variétés de Zanthoxylum qui se trouvent en abondance dans 30 districts.

L'huile de Zanthoxylum est consommée dans plusieurs pays européens et l’utilisation du poivre de Timut en cuisine connaît un nombre grandissant d’adeptes dans des pays comme les États-Unis.

Développer une nouvelle saveur de bière grâce au poivre du Timut représente sans aucun doute une création innovante,  dommage que celle-ci ait été éclipsée par la controverse autour du nom et de l’étiquette de la boisson.

Colombie : “Nous ne sommes pas seulement des victimes, nous ne sommes pas seulement une minorité, nous sommes des femmes indigènes”

mercredi 6 juin 2018 à 22:43

Le projet Histoires recadrées [en] demande à ses participants de réagir aux thèmes dominant la couverture médiatique les concernant. Ces articles se concentrent sur les réflexions de personnes plus souvent représentées dans les médias par d'autres qu’elles-mêmes. La génération de nuages de mots sur la plate-forme de Media Cloud [en], qui effectue des recherches dans des collections de médias d'une région donnée du monde, peut donner un aperçu aux participants de leur représentation dans les médias et leur donner une occasion de l'analyser. Ce projet s'abstient de porter une quelconque conclusion sur les données, mais au contraire, fournit le point de départ d'une discussion sur la forme qu'ils peuvent donner à leur propre représentation dans les médias numériques.

Marbel Ina Vanegas Jusayu est dirigeante et porte-parole de la communauté wayuuu. Elle est aussi membre de l'équipe de communication de ll'Organisation nationale indigène de Colombie (ONIC). Ce qui suit est une transcription de la vidéo de son analyse du nuage de mots associés au syntagme “femmes indigènes”.

Mots dominants extraits de 103 articles, publiés de janvier 2017 à avril 2018 qui mentionnent le syntagme “femmes indigènes”, dans cinq collections de Media Cloud [en] issues de médias de langue espagnole colombiens. Cliquez pour agrandir l'image.

Con relación a lo que encontramos en esta nube de palabras y a lo que estamos trabajando [respecto al tema]de contenidos en cuanto a palabras relacionadas con mujeres indígenas, como mujer indígena creo que la representatividad de nosotros como pueblo y como toda una nación y a nivel también nacional, no nos sentimos identificados.

Yo no me siento identificada [con esta representación] porque no están los avances que se han hecho en el territorio colombiano.

No están los avances que se han hecho a nivel organizacional, lo que se ha hecho a nivel territorial, lo que se ha avanzando en los diferentes pueblos y comunidades indígenas, como [es el caso de] la población wayuu que están organizaciones como la Fuerza de Mujeres Wayuu [en donde] se ha ido avanzando en el tema [de participación de las mujeres], y se ha ido incidiendo en varios escenarios, tanto a nivel nacional como a nivel internacional.

Je considère, en tant que femme indigène, que ce nuage de mots associés à “femmes indigènes” et le contenu du travail réalisé [sur ce thème], ne représentent en rien notre identité de peuple, de nation à part entière dans notre pays.

Je ne m'[y] sens pas représentée parce que les avancées accomplies sur le territoire colombien n'y figurent pas.

On n'y retrouve ni les progrès réalisés au niveau des organisations, ni ceux réalisés au niveau du territoire, ni ce qui s'est amélioré dans les différents villages ou communautés indigènes, comme [c'est le cas] pour la population wayuu [où] ont été créées des organisations comme La force des femmes Wayuu qui a beaucoup travaillé sur le sujet [de la participation des femmes], et a eu un impact dans différents domaines, tant au niveau national qu'international.

Et elle ajoute :

Con relación a la actividad que desarrollamos, creo que incluir [en la nube de palabras] palabras como derecho propio, educación, inclusión, juventud indígenaque va relacionado al de mujeres indígenas, es algo que se debería tener en cuenta.

Creo que hay más que decir. No solo somos víctimas, no solo somos una población minoritaria, sino que somos mujeres indígenas, y somos cultura, somos tradición, somos autonomía en nuestros territorios, somos la preservación y la garantía de que conservemos a nuestra madre naturaleza.

Concernant l'activité mise en place, je crois qu'il serait bon de prendre en compte et d'inclure (dans ce nuage de mots) des mots comme droit propre, éducation, inclusion, jeunesse indigène en référence à femmes indigènes.

Je pense qu'il y a encore beaucoup à dire. Nous ne sommes pas seulement des victimes, nous ne sommes pas seulement une minorité, nous sommes aussi des femmes indigènes, et nous sommes la culture, nous sommes la tradition, nous sommes l'autonomie sur notre territoire, nous sommes la préservation et la garantie de la sauvegarde de notre mère Nature.

Quels mots ou quels termes devrait-on inclure dans un nuage de mots idéal pour qu'il représente les femmes indigènes dans les médias ? 

  • Territorio
  • Cultura
  • Identidad
  • Autonomía
  • Derecho propio
  • Educación
  • Organización
  • Tradición
  • Juventud
  • Seguridad
  • Comunicación
  • Desarrollo
  • Reconocimiento
  • Familia
  • Territoire
  • Culture
  • Identité
  • Autonomie
  • Droit propre
  • Éducation
  • Organisation
  • Tradition
  • Jeunesse
  • Sécurité
  • Communication
  • Développement
  • Reconnaissance
  • Famille

Cet article fait partie d'une série de Rising Frames réalisée et organisée dans le cadre d'une activité de narration numérique en atelier le 18 mai 2018, par Monica Bonilla au Centre Internet et de la société de l'Université du Rosaire -ISUR- à Bogota, en Colombie, réunissant les représentants des communautés indigènes arhuaca et wayuuu. 

Mónica Bonilla a collaboré à la transcription et à la traduction.