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Un journal népalais donne la parole aux minorités ethniques à Hong Kong

dimanche 10 mars 2013 à 20:38

Cet article a été publié le 21 février 2013 en chinois par Feifei sur mediahk.net. Il a été traduit et republié avec la collaboration de Ronald Yick, qui y a inclus quelques explications, dans le cadre d'un accord de partage.

Selon le recensement de 2011 [pdf], approximativement 451 000 personnes issues de minorités ethniques vivent actuellement à Hong Kong, dont plus de 63 000 sont originaires de l'Asie du Sud (Inde, Népal et Pakistan). La plupart d'entre elles ne comprennent pas le chinois, qui est, avec l'anglais, la langue la plus pratiquée dans la ville. Sans radios ni chaînes de télévision, les minorités ethniques ont du mal à accéder aux informations locales et à se tenir au courant des questions d'actualité. De plus, les médias grand public et la société en générale leur prêtent peu d'attention.

Voix absentes de Hong Kong

Certaines minorités ethniques ont décidé d'avoir leurs propres médias, pour relayer les informations à leurs compatriotes et jeter un pont entre les différents groupes ethniques. La communauté népalaise est une des plus importantes à faire paraître ses propres publications. Il y a actuellement 3 journaux népalais à Hong Kong. L'un d'entre eux s'intitule Ethnic Voice. Publication hebdomadaire, il contient des reportages en népalais et en anglais, et a aussi une chaîne YouTube.  L'hebdomadaire organise également des ateliers afin d'encourager les Népalais à devenir des journalistes citoyens.

Pun Magar J. B., editor-in-chief of Ethnic Voices

Pun Magar J.B., rédacteur en chef de Ethnic Voice

J.B, éditeur en chef de Ethnic Voice a obtenu sa maîtrise en journalisme au Népal. Il a plusieurs années d'expérience dans la radio-télévision. Il y a un an, un ami l'a invité à Hong Kong pour lancer Ethnic Voice. Situé dans le quartier Jordan, le journal emploie des étudiant locaux à temps partiel pour la traduction. Le public ciblé est la population népalaise locale. Il est disponible, au prix de $5 HK ($0,64 US) dans plus d'une centaine d'épiceries gérées par des minorités ethniques. ” Les Népalais ne liront pas des informations gratuites. Ils préfèrent lire ce qu'ils achètent” explique J.B.

Un nombre important de Népalais étaient des Gurkhas ayant servi dans l'armée anglaise à Hong Kong avant son rattachement à la Chine. Les soldats et leurs familles habitaient dans les quartiers avoisinant la caserne, mais par la suite ils se sont dispersés dans d'autres quartiers.

Les médias indépendants, favorables au changement

J.B. est d'avis que les médias indépendants peuvent favoriser le changement social. Selon lui, instaurer le dialogue par le biais d'un journal est un moyen d'encourager la participation active des minorités ethniques dans la société. Ethnic Voice est rédigé principalement en népalais mais aussi en anglais. Lorsque l'information concerne de près les Népalais à Hong Kong, elle est rédigé en népalais. Les informations concernant les minorités ethniques et la politique locale sont rédigées en anglais. Cette stratégie permet d'encourager l'entente entre les différentes communautés.

Le tirage hebdomadaire du journal varie entre 1000 et 5000. Il a même attiré l'attention d'une société de bijouterie pour faire sa publicité. “La société trouve que ce que nous faisons est significatif, et voulait faire quelque chose pour la communauté. Quand je leur ai parlé de publicité, ils étaient tout de suite d'accord”  explique J.B. Le journal est largement apprécié par la communauté. Pendant notre entretien dans le quartier Jordan, de nombreuses personnes se sont arrêtées pour le saluer.

Grocery stores run by ethnic minorities are major distribution outlets for Ethnic Voices.

Les épiceries gérées par les minorités ethniques sont les principaux points de vente de Ethnic Voice

Les occasions pour le gouvernement de Hong Kong, la communauté chinoise locale et les minorités ethniques de communiquer face à face se présentent rarement. Ethnic Voice cherche à en être un facilitateur. Ainsi, par exemple, J.B  se fait un devoir de faire parvenir le journal aux partis politiques, ainsi qu'aux autres groupes ethniques. Il a même demandé aux bibliothèques publics de s'abonner au journal pour accroître le lectorat, mais sa démarche n'a pas abouti du fait d'une procédure administrative compliquée.

Préjugés courants contre les minorités ethniques

J.B.remarque que quand les médias locaux rapportent des informations à propos des pays de l'Asie du sud, l'information est souvent erronée du fait que les journalistes locaux ne comprennent pas suffisamment le contexte. Ainsi, les habitants de Hong Kong se forgent des opinions fausses voir franchement discriminatoires à l'encontre des Sud-Asiatiques. J.B se souvient qu'un journal local a un jour employé l'expression “conflit ethnique” en gros titre pour décrire une dispute entre deux personnes.

J.B. souligne que la plupart des Népalais à Hong Kong travaillent de longues heures pour joindre les deux bouts et que par conséquence ils manquent de conscience politique. Ils témoignent rarement d'un intérêt pour l'actualité ou les politiques publiques ni d'ailleurs pour les campagnes visant les droits des minorités. Le gouvernement a tendance à négliger les minorités ethniques tandis que que les minorités elles-mêmes n'ont pas la motivation de rentrer en contact avec la société. J.B. espère voir le gouvernement de Hong Kong fournir des services de soutien afin de faciliter l'intégration dans la société et réduire la discrimination. Il espère aussi voir les Sud-Asiatiques manifester leur solidarité et leur volonté de faire entendre leurs voix.

Le pasteur Silas Malafaia, ou la tentation homophobe du Brésil

dimanche 10 mars 2013 à 14:33

[tous les liens mènent vers des articles en portugais]

Pour ceux qui luttent pour les droits des homosexuels au Brésil, leur principal ennemi porte un nom : Silas Malafaia. Ce pasteur, formé en psychologie, est le leader de l'Eglise évangéliste Assembleia de Deus Vitória em Cristo [Assemblée de Dieu Victoire dans le Christ] et porte en étendard ses valeurs conservatrices contre le mariage entre personnes du même sexe. Même s'il doit faire face à une opposition massive à ses idées, le pasteur peut aussi compter sur un nombre très important d'adeptes.

Le 3 février 2013, Silas Malafaia a accordé une interview sur une chaîne publique à la journaliste brésilienne Marília Gabriela. A cette occasion, il s'est exprimé sur des sujets polémiques. Il a défendu le paiement d'une dîme (correspondant à 10% du salaire réel ou “souhaité”) par les fidèles des institutions évangélistes. Il s'est ensuite érigé avec véhémence contre la criminalisation de l'homophobie – prévue dans le Projet de Loi complémentaire 122 - et contre le mariage civil pour tous, invoquant l’article 5 de la Constitution Brésilienne, qui garantit la liberté d'expression pour tous les citoyens.

L'affaire a beaucoup divisé les Brésiliens, mais Danilo Thomaz, le 12 février, dans l'Observatoire de la Presse (émission de télévision), a jugé qu'une controverse sur les réseaux sociaux est “l'équivalent virtuel d'une dispute sur le trottoir devant le café du coin”:

La discussion sur les libertés publiques et l'égalité des droits – des valeurs sur lesquelles s'appuie la question des homosexuels – s'est transformée en une hystérie partagée dans laquelle les deux camps, avec leurs 140 caractères, se différencient sur le contenu de leurs propos mais sont identiques dans la façon de les présenter. Ils en arrivent, de la même manière, a annuler le débat et à délégitimer la question. Les populistes et les escrocs, à droite et à gauche, en plus, en profitent pour faire leur auto-promotion.

Pour justifier son opposition aux gays, Malafaia en a appelé à la génétique. Il soutient que le choix d'être homosexuel est uniquement comportemental et que “il n'existe pas de gène de l'homosexualité”. La polémique s'est installée sur les réseaux sociaux, et le sujet s'est placé en tête des Trending Topics de Twitter. Le blog BHAZ reproche au pasteur de se référer à des sources inconnues pour justifier son point de vue. Le texte du 6 février décrit :

Cette fois, le pasteur, grâce à son discours enflammé contre la criminalisation de l'homophobie et contre la légalisation du mariage civil pour tous, est parvenu à en appeler à ce qu'il appelle “la science”. Son objectif, en se servant d'arguments soi-disant “scientifiques” était, en somme, d'affirmer que l'homosexualité n'est en réalité rien d'autre qu'un comportement “appris ou imposé” et que personne ne naît homosexuel. En conséquence de quoi, les militants LGBT n'auraient pas le droit de lutter pour légaliser le mariage civil pour tous, ou de demander la criminalisation des manifestations de haine et de préjugés, vis-à-vis de l'orientation sexuelle et l'identité de genre.

Le jour suivant l'émission de la journaliste Marília Gabriela (le 04/02), Eli Vieira, généticien brésilien doctorant de l'Université de Cambridge, a enregistré une réponse scientifique par vidéo, démontant point par point la démonstration de Malafaia. La vidéo a été visionnée plus d'1,5 million de fois sur YouTube :

Le 16 février, souhaitant mettre un point final à la discussion, Malafaia a répondu par vidéo à Eli Vieira, qu'il appelle “pseudo-docteur” en génétique :

Sur la toile, les réactions d'opposition à Malafaia et à ses propos homophobes n'ont pas cessé. Le 8 février,<a ” href=”http://http://www.avaaz.org/en/”>Avaaz.org a lancé une pétition qui demande la radiation de Silas Malafaia du registre des psychologues. Elle a rassemblé plus de 82 000 signatures.

Sur Twitter, Marcelo Arantes (@dr_marcelo) appuie la démarche (13/02) et relaie la pétition :

Tu as déjà exercé ton pouvoir de citoyen aujourd'hui ? Signe la pétition pour la radiation de Silas Malafaia du registre des psychologues. avaaz.org/po/petition/Pe…— Marcelo Arantes (@dr_marcelo) 13 février 2013

Cependant, les sympathisants du pasteur ont posté des messages de soutien sur le même réseau social, demandant que la pétition ne soit pas signée, comme l'a fait @CASSIANECANTORA le 15 février :

J'ai déjà signé…On va voter pour la NON radiation de l'inscription du Pr Silas Malafaia au registre des psychologues. Voyez le lien avaaz.org/po/petition/Pe…— CASSIANE (@CASSIANECANTORA) 15 février 2013

L'Eglise Igreja Assembleia de Deus Vitória em Cristo a ouvert officiellement sur sa propre page un recueil des noms de ses sympathisants qui soutiennent la non-radiation de son enregistrement comme psychologue. Silas Malafaia a également fait part de sa volonté de de poursuivre en justice Avaaz.org. Le texte ci-dessous l'explique :

Après la polémique générée par l'interview du Professeur Silas Malafaia dans l'émission “De frente com Gabi” (Face à Gabi), une pétition publique a été lancée en ligne visant à radier le psychologue du registre des psychologues. Cependant, dans aucun de ses entretiens accordés à la presse Silas Malafaia ne se présente comme psychologue, il se présente comme pasteur, ce qui ne justifie pas une pétition qui implique le Conseil Fédéral de Psychologie.

Le blogueur Sandro Decottignies sur son blog démonte cet argument :

Il faut savoir que Malafaia viole de front les dispositions de la résolution N° 001/99 du Conseil Fédéral de Psychologie, qui interdit explicitement aux psychologues de considérer l'homo-affectivité comme une pathologie et de tenir des discours publics contre elle.

Maria Berenice Dias, juriste qui agit en faveur des droits de la population LGBT, s'est aussi exprimée sur YouTube le 7 février. Elle démonte le fondement biblique des arguments de Malafaia, et rappelle l'importance d'une loi visant à garantir l'égalité de tous les citoyens brésiliens :

Le pasteur Silas Malafaia a également comparé les homosexuels à des bandits. “J'aime les homosexuels comme j'aime les bandits” a-t-il déclaré. Le blog Pragmatismo Político a dénoncé cette déclaration le 5 février :

La corrélation entre “homosexuels” et “bandits” est odieuse. Elle vise à renforcer le lien entre l'homosexualité et les déviances, soutenant subrepticement l'idée que l'homosexualité, comme les phénomènes de délinquance, porte atteinte et préjudice à la société. En d'autres termes, l'analogie nous dit la chose suivante : les bandits existent, c'est un fait de société, mais il faut les changer, les punir et les “re-socialiser” pour qu'ils ne nuisent pas la société. Sans l'affirmer directement, Malafaia pense la même chose des homosexuels : ils sont un fait social, ils existent mais il faut les corriger pour qu'ils ne nuisent pas à la famille, aux bonnes moeurs, aux lois naturelles, à la parole de Dieu, etc…

Le leader religieux a également été critiqué pour avoir utilisé le terme “homosexualisme”, alors que le mot correct est “homosexualité”. Mais Marlus Ápyus précise à propos de cette correction, dans un post sur Facebook du 5 février :

Avant tout, je crois que vous devriez laisser tomber cette absurdité de condamner le terme “homosexualisme” parce qu'il serait synonyme de maladie. Quelqu'un de très mal informé, dans le passé l'a utilisé dans ce sens, l'OMS a corrigé l'erreur en 1990, et, sans explication probante, vingt ans après, nous avons été “obligés” de parler d'”homosexualité”, qui renforce juste un terme équivoque déjà corrigé. Je vais continuer à parler d'homosexualisme. Parce que le communisme n'est pas une maladie, parce que le romantisme n'est pas une maladie et parce que le lesbianisme n'est pas une maladie. C'est parce que l'homosexualisme ne devrait jamais être considéré comme une maladie.

Grève des producteurs de café : la crise du café colombien

dimanche 10 mars 2013 à 01:01

Tous les liens renvoient à des sites en espagnol.

Un collectif de producteurs de café colombiens est en grève depuis le 25 février en raison de la baisse du prix d'achat du café. Ce problème a entraîné l'appauvrissement systématique des producteurs.

Le groupement subit une crise qui dure depuis plus d'un an. Selon un article publié par le journal colombien El Espectador  cette crise est “due au faible prix d'achat du café, à la réévaluation du peso colombien par rapport au dollar, ainsi qu'à la baisse des exportations, à l'augmentation du prix des engrais et des insecticides, et à une faible récolte en raison de fortes pluie et d'une épidémie de rouille [qui touche les grains de café].

Les producteurs de café se plaignent de ce que le gouvernement n'a pas donné toutes les garanties pour les protéger de la situation, et malgré  un accord signé entre le gouvernement et la Fédération Nationale des Producteurs de Café, de nombreux agriculteurs continuent de bloquer les routes du pays, prétextant qu'ils ne se sentent pas bien représentés par la Fédération.

Une quantité de photos ont circulé sur Facebook en soutien à la grève des producteurs de café, comme celle de la page de l’Université Publique de Colombie qui traite les agriculteurs en héros :

Los héroes en Colombia si existen.

“Oui, il y a des héros en Colombie!”. Photo partagée sur Facebook par l'Université Publique de Colombie.

La photo suivante, posté par L'information rebelle fait allusion à la récolte :

"Yo apoyo el paro cafetero"

“Je soutiens la grève des producteurs de café”. Photo partagée sur Facebook par l'Information Rebelle.

Weimar Ospina Muñoz a partagé une photo qui a fait le tour de tous les réseaux sociaux et qui dénonce l'agression des agriculteurs par les forces de police.

Cafetero herido en enfrentamientos con la policía.

Un producteur de café blessé par la police lors d'une confrontation. Photo partagée par Weimar Ospina Muñoz et d'autres abonnés de Facebook.

Weimar dit:

Un país donde la fuerza publica no tiene respeto por nadie. Acaso creen que lo que se sientan a almorzar lo producen la oligarquía o el gobierno???… No … lo producen sus víctimas el campesino que horror.

Un pays où les forces de l'ordre ne respectent personne. Croient-il que ce qu'ils ont dans leur assiette est produit par l'oligarchie ou le gouvernement ???… Non… c'est produit par les paysans, leurs victimes. Quelle horreur.

Comme Facebook, Twitter est devenu une plateforme où l'on s'exprime sur la grève des producteurs de café avec les  mots-clés #Parocafetero [la grève des producteurs de café], #Colombiadicecafeterostienenrazon [la Colombie dit que les producteurs de café ont raison] and #yoapoyoelparocafetero [je soutiens la grève des producteurs de café].

Derly Fraco (@franco_derly) fait référence au processus de paix engagé entre le gouvernement et les guerrilleros des FARC :

@franco_derly: Lastimosamente Tenemos Un Presidente Que Prefiere Hablar Con Asesinos, Que Con Campesinos..! #YoApoyoElParoCafetero

@franco_derly: Malheureusement nous avons un président qui préfère parler à des tueurs plutôt qu'à des paysans…! #YoApoyoElParoCafetero

Teto (@johnceta) est d'accord :

@johnceta: Los terroristas piden indultos y pensiones vitalicias! Nuestros campesinos sólo piden que les paguen lo que trabajan #yoapoyoelparocafetero

@johnceta: Les terroristes demandent le pardon et des pensions à vie ! Nos paysans ne demandent que la rémunération de leur travail  #yoapoyoelparocafetero

De son côté Nury Rivera (@Nury_Rivera) dit:

@Nury_Rivera: Si nosotros mismos no apoyamos las causas de justicia en nuestro país entonces quien

@Nury_Rivera: Si nous ne défendons pas la cause de la justice, qui le fera 

Et Leszly Kálli (@leszlykalli) partage une vidéo qui a fait le tour des réseaux sociaux, où un paysan nous explique la situation avec beaucoup d'émotion :

@leszlykalli: Inevitable el sabor amargo del café con el sufrimiento de nuestros campesinos caficultores

@leszlykalli: Le café a forcément un goût amer avec la souffrance de nos agriculteurs

 

A l'heure où nous publions ce billet, les producteurs de café ont annoncé qu'ils allaient entreprendre une marche sur la capitale Bogota, mardi 12 mars, si le gouvernement ne leur faisait aucune proposition d'ici là.

L'artiste Omar Banuchi trouve sa place sur le Net portoricain (1ère partie)

dimanche 10 mars 2013 à 00:35

Premier article d'une série sur l'art digital du Portoricain Omar Banuchi.

Le 11 février, à deux jours de la Saint-Valentin, une série d”images [en espagnol] aussi colorées qu'étranges a commencé à circuler sur les réseaux sociaux. En fait, il s'agit de différentes cartes postales qui continuent à réapparaître dans mon fil d'information, partagées à maintes reprises par mes relations Facebook. Une d'elles représente un gros plan d'un médium pointant vers le spectateur. Ce qui frappe l'oeil, c'est le rouge foncé de l'ongle verni, et ce même rouge est sur le coeur de la bague visible sur le dessin. Les fonds sont lumineux et vifs ; les lignes, d'une carte à l'autre, suivent le même trait épais.

La postales de Omar Banuchi con el tema de San Valentín se difundieron rápidamente por el internet en Puerto Rico.

Les cartes postales d'Omar Banuchi sur la Saint Valentín se sont répandues rapidement sur Internet à Porto Rico.

Quelques-unes de ces cartes portent un message, comme si c'était un mème bizarre se moquant d'une carte de voeux de la marque Hallmark. Voilà, par exemple, une carte avec

le chat couleur vert néon [es] qui se lèche entre les pattes, avec une bulle qui serait tout à fait à l'aise dans n'importe quelle BD et qui proclame : “Cette Saint-Valentin ne sera pas si nulle après tout…”.

Sur une autre carte, un animal fantastique vert [es] avec  une trompe d'éléphant et les yeux démesurés  -  sur un fond jaune auquel le mot “criard” ne fait pas justice – se promène sous la devise “l'amour animal est ce qu'il est”.

Entre-temps, la page Facebook de l'artiste [es], qui a mis ces cartes en circulation, déclare : “Elles sont un peu vieilles, je le sais. J'ai toujours eu envie d'en faire de nouvelles, mais bon… Utilisez-les sagement. Téléchargez et partagez”.

Bienvenue dans le monde d'Omar Banuchi. La sensibilité, la manière de prendre une distance ironique pour se moquer de l'amour lors de la journée nationale des cartes postales et des chocolats bon marché et au même temps l'hommage au sentiment, continuent d'être la signature de l'artiste. D'ordinaire, ses dessins laissent la même impression légèrement fantasmagorique, comme si l'on pouvait accéder à la vraie image de ses sujets en décortiquant tout simplement cette couche du pop clairement tracé qui ne cesse jamais d'être joueuse. Mais c'est sur la surface que son art oeuvre, soit la surface brillante saturée de couleurs complémentaires, soit la surface de la tablette de la marque Wacom qui lui sert de canevas. Banuchi est un illustrateur numérique et son métier se nourrit des outils apportés par les nouveaux médias. Ce qui est sûr, c'est que sous la plupart de ses oeuvres il y a une photo ou un photomontage, sur lesquels l'artiste a dessiné ou peint.

Grandement influencé par la culture de fan boy des bandes dessinées comme Marvel ou DC, Banuchi s'est inséré pleinement dans la scène indépendante de Puerto Rico, où ses lignes faites de pixels rencontrent un public petit mais croissant. Il s'agit d'une scène où l'artiste produit des bandes dessinées comme “Jours”[es], une série autobiographique qu'il a réalisée ensemble avec Rosaura Rodriguez, sa partenaire créative la plus proche. D'un autre côté, il est devenu l'artiste officiel de “Nous avons perdu le contrôle”[es], le dernier projet musical et multimédias de Eduardo Alegría, un vétéran de la mouvance indépendante à San Juan. Ajouter à cela la partie de son travail qui tend plus vers les beaux arts, où l'artiste maintient sa présence par l'intermédiaire de la Galería Yemayá [es], un espace réunissant plusieurs créateurs portoricains influencés par l'art urbain. Il existe aussi des boutiques alternatives comme Executive Manolo à Santurce, où l'on peut acheter régulièrement ses pin's et cartes. Mais avant tout, son art se partage sur le Net ; ses pages sur Facebook et Tumblr sont le chemin le plus facile pour une première découverte.

Omar Banuchi

Son travail défie les formats et préjugés sur le dessin : Banuchi se sent à l'aise quand il crée des oeuvres qui seront accrochées au mur d'une galerie et aussi quand il imprime des pin's qui se retrouveront sur le sac à dos d'un branché de San Juan. Il n'y a ni papier, ni fusain, ni huile, ni canevas. Au lieu de cela, le dessin se produit avec un jouet en plastique similaire au système utilisé pour la signature digitale lors d'une transaction par carte de crédit. Certains ne voient pas d'art dans cette approche, à quoi Banuchi répond avec plus d'illustrations sur le Net. Le reste, on pourrait dire, c'est un amour digital.

La toile plastique

[Cliquez sur ce lien pour accéder à une vidéo qui montre Omar Banuchi au travail.]

“J'ai commencé à dessiner ainsi en 2008″, m'a informé récemment l'artiste au Café Luna, un petit café à Rio Pedro près du Centre Médical, à l'ombre de l'immeuble Los Robles (Les Chênes) où Banuchi a longtemps vécu. C'est tout récemment qu'il a déménagé de cette copropriété à l'aspect d'immeuble socialiste aux Caraibes où sa mère vit encore, bien qu'il ne soit pas allé très loin. Il vit maintenant au coin de la rue, dans un appartement qui reste tout près du bâtiment où il a grandi.

“Mon ex-fiancée s'est achetée une tablette pour dessiner“, a-t-il continu”, racontant comment sa technique a rencontré la technologie. “Elle (l'ex-fiancée) est partie en voyage et m'a laissé avec la tablette, alors je me suis mis à dessiner avec celle-ci”.

Avant de connaitre Banuchi, j'ai connu son autoportrait. Il arrive assez souvent qu'on se dessine, et je me suis fait  l'impression qu'il s'agissait d'un gars noir à tête rasée. Celui que j'ai rencontré lors de notre rendez-vous était un petit Blanc sans prétentions, de 29 ans, à front haut et aux yeux clairs qui lui donnent un air rêveur.

“En réalité, j'ai un quelque chose de racial quand je me dessine”, m'a-t-il expliqué enfin avec son approche décontractée et sa parole parsemée de phrases en anglais. Banuchi tend à s'exprimer et  bouger à un rythme aussi détendu que ses images, et l'on remarque que les relations de couple sont un thème récurrent. De fait, la racine de son travail actuel, que l'artiste décrit comme une manière de faire un calque digital sur une photo, est apparue à l'époque où il étudiait les Beaux Arts à l'Université de Puerto Rico à Rio Piedras et son but était de devenir photographe. C'est déjà alors qu'il enquêtait sur sa vie sentimentale.

“Tout a vraiment commencé à partir de mon travail de fin d'études dans la classe de photographie numérique”, m'a-t-il dit. “J'ai fait un album numérique autobiographique. Il contenait toutes les histoires des copines que j'ai eues. Le fait est que je dessinais sur les photos avec Photoshop. L'aspect était assez laid, parce que j'utilisais la souris de l'ordinateur, mais le butt était d'obtenir un aspect mi-enfantin. Après, quand on m'a prêté la petite machine, ça a été comme ‘ouah, j'ai plus de contrôle et l'aspect est plus amusant'. J'ai continué comme ça jusqu'à finalement ôter la photo de dessous et seul le dessin est resté”.

Le côté enfantin est resté dans son travail, bien qu'elle se complique du regard – parfois lascif – d'un garçon qui n'a jamais cessé de collectionner les BD de Spiderman. Avec le mélange grotesque de désir et de besoin de capter la quotidienneté du monde  qui nous entoure. Il y a dans ses dessins un peu de l'agitation d'un homme dans la vingtaine, cette période où tout ce qui se passe est perçu comme grand et important. Derrière cela vient un clin d'oeil ironique, la distance que l'artiste impose devant le sujet, pour empêcher sa thématique de tomber dans la banalité ou le cliché.

“Les couleurs et la forme ont attiré mon attention', me dirait plus tard Rosaura Rodríguez [es] en parlant de sa première rencontre avec l'art de Banuchi. “C'est très accessible, n'importe qui peut le comprendre”.

Voir l'artiste au travail, avec un stylet qui sert de fusain sur le papier digital de l'écran, peut être révélateur. Ce qui attire l'attention c'est la façon dont il est complètement absorbé par la photo sur laquelle il dessine. J'ai eu récemment l'opportunité de le voir en action, quand je l'ai visité dans son nouvel appartement. L'endroit a encore l'apparence d'un dortoir, avec des BD qui occupent les étagères et un petit chauffage au gaz encore inutilisé. Une simple plaque chauffante en fait office à la cuisine.

“Sa nature se révèle à travers la photographie”, m'a expliqué plus tard  Beto Torrens, le directeur de la Galería Yemayá [es] où Banuchi expose ses oeuvres. “D'habitude, il commence d'une photo normale prise avec un appareil automatique, ce qui fait que beaucoup s'identifient avec la pièce. C'est la photo que tout le monde prend, mais avec le côté design graphique qui donne à la photo les couleurs et les lignes épaisses”.

Les images ont été publiées avec l'autorisation de l'artiste.

Une artiste haïtienne et son “Soliloque du Chaos”

samedi 9 mars 2013 à 21:20

[liens en anglais] Sophia Domeville est une peintre américaine d'origine haïtienne qui commence à faire des vagues dans le monde de l'art. L'an dernier, cette tenante de l’impressionnisme abstrait (diplômée du College of New Rochelle) a tenu sa première exposition en solo, “Soliloque du Chaos.” Tout récemment, Sophia Domeville était l'une des trente artistes sélectionnés pour exposer aux côtés de Janet Taylor Pickett “Generation Next à l’Atrium. (L’exposition a fermé ses portes le 8 mars). Outre la peinture, Sophia Domeville effectue aussi du travail non lucratif, notamment un programme de tutorat. Elle parle à Global Voices de sa carrière artistique, de son travail social et de ses projets. 

Global Voices: Qu'est-ce qui vous a fait devenir une artiste ?

Sophia Domeville: J'ai commencé à peindre à 5 ans. Ça a commencé avec mon obsession à dessiner sur TOUS les murs de chez moi. Au jardin d'enfants, on m'a fait découvrir l'aquarelle et je me rappelle la création de ma première oeuvre. Je me rappelle en particulier que je mélangeais les couleurs jusqu'à obtenir la nuance juste de vert pour les feuilles de mon arbre, que j'ajoutais de l'orange au jaune du soleil et une touche de blanc au ciel.

Ce n'est qu'en première année de lycée que je me suis rendu compte que j'adorais ça. Alors que tout les autres élèves dessinaient de la géométrie, j'expérimentais avec des contrastes d'ombres [et] en ajoutant de la profondeur à mes formes. Je n'y faisais pas attention, mais ma professeur d'art plastique l'a remarqué. Elle a proposé que je passe de la section d'Anglais à celle d'Art. C'est drôle, mais au début c'était l'écriture ma passion ; depuis l'école élémentaire, j'écrivais des nouvelles, je reliais moi-même mes livres faits maison avec du ruban et je dessinais une illustration élaborée en guise de couverture. J'ai fait Arts Avancés pendant les 3 années suivantes du lycée.

C'est vraiment devenu ma passion quand je suis entrée en première année à l'Ecole des Arts & Sciences du College of New Rochelle. Loin de mon père, pourvue d'une chambre pour être moi-même sans aucune restriction, conseillée par un des meilleurs départements d'art que je connaisse et ne rien faire d'autre que créer jusqu'aux petit matin, [tout cela] m'a aidée immensément à bâtir mon art. Je me rappelle toujours encore avoir dessiné sur un parchemin de 2 mètres sur 2 dans les salles du dortoir, réalisant dans la fièvre les images qui étaient dans ma tête. Le titre de mon travail était “Peau Noire, Masque Blanc”… à 18 ans j'évoquais le racisme, le sexisme et les masques que notre peuple porte au quotidien pour simplement survivre à l'intérieur de ce monde.

 

 

GV: Quelles ont été vos premières influences en tant qu'artiste ?

SD:  Mes influences ont toujours été dans ma culture haïtienne, sa musique, ma famille et ma vision du monde en tant que jeune femme.

"Re-Connection"

“Re-Connection”

GV: En quoi votre vision artistique a-t-elle évolué ?

SD:  Je dessine, peins et crée depuis que j'ai appris à lire et écrire. Ma vision a évolué à partir de la compréhension de la manière dont le monde autour de nous affecte notre point de vue d'êtres humains, de la recherche de thèmes de la Nature en rapport avec le corps humain, la démolition de l'image sur la place sociale de la femme noire, la première découverte de l'amour, pour utiliser mon art comme un outil contribuant à cultiver le monde qui m'entoure.

GV: Parlez-nous de votre exposition “Soliloque du Chaos.”

SD: Mon Soliloque du Chaos était ma première exposition après 8 années sans création.

Le Soliloque évoque mon vécu à l'âge de 28 ans, quand j'ai finalement décidé de suivre ma passion pour les arts plastiques, me suis découverte moi-même, suis tombée amoureuse pour la première fois, ai perdu mon chez-moi, la crainte de ne pas trouver de stabilité pécuniaire et de compréhension de mes objectifs d'artiste.

GV: Et l'exposition “Generation Next” ?

SD:  Generation Next (Génération Prochaine) est un événement géant tenu par Art in the Atrium, un organisme artistique à but non lucratif bénévole qui expose de l'art africain-américain dans tout le nord du New Jersey. Cette année j'ai été sélectionnée pour faire partie des trente artistes exposant aux côtés de l'artiste en titre, Janet Taylor Pickett pour l'exposition du 21e anniversaire d'Art in the Atrium.

Repercussion 48x60

“Repercussion”

"All Matter"

“All Matter”

 

GV: Quelles sont vos habitudes et techniques de travail ? Quand et comment peignez-vous habituellement ?

SD:  Mes habitudes et techniques de travail ne sont pas du tout routinières. Je peins quand je suis inspirée, émue, amoureuse, curieuse ou en colère. Il n'y a pas de formule ou de structure établies dans mon art parce qu'il est tout à fait naturel et jamais forcé. Depuis l'université, c'est entre minuit et 4 heures du matin que je peins le plus volontiers, une habitude nocturne que je garde depuis des années.

GV: Quels sont vos rapports avec la communauté artistique de la Caraïbe ? Comment la Caraïbe influence-t-elle votre travail ?

SD: Je me relie lentement aux artistes de la communauté caraïbe en me rapprochant de ma culture haïtienne et en voyageant hors de la métropole new-yorkaise. Je me suis aperçue que la Caraïbe [a] une importante influence dans mon travail par l'utilisation des couleurs, des formes et des techniques.

GV: Qu'en est-il des projets non lucratifs dans lesquels vous vous investissez ?

SDHalls That Inspire (HTI) [est] une organisation à but non lucratif qui se sert de l'art comme moyen d'encourager et élever les jeunes. A l'aide d'une approche ‘main à la pâte', ce programme intensif de quatre semaines enseigne le développement du leadership des jeunes, en même temps que les techniques artistiques nécessaires pour embellir les salles de classes et autres installations. En utilisant des messages positifs qui reflètent l'excellence scolaire, la fierté et le refus de l'agression comme points centraux, on peut être en meilleure résonance avec ce qu'ils sont, et avec leurs relations avec leurs collectivités et leurs écoles.

Je suis la vice-présidence actuelle, et je démissionnerai pour faire la transition cet été de nouveau directeur exécutif, pour superviser tous les projets artistiques, travailler avec de nombreuses écoles dans tout le pays et mettre en oeuvre de nouveaux programmes.

Ma passion [à] redonner à la communauté m'a apporté une opportunité de devenir tutrice/artiste enseignante et un des membres fondateurs de herDIVASpot, une association qui promeut la valeur et le développement personnel de jeunes femmes d'âge scolaire.

Pour poursuivre ma relation avec Haïti, je supervise aussi un programme artistique avec Art Day Celebration (Fête du Jour de l'Art), une initiative qui cultive et valorise les enfants pauvres et défavorisés à travers les arts en Haïti, où j'ai eu la possibilité, l'été dernier, d'enseigner à 150 enfants de trois orphelinats le pouvoir de l'art.

GV: Quel effet les nouveaux médias ont-ils eu sur votre carrière d'artiste ainsi que votre travail bénévole ?

SD: L'effet des nouveaux médias a été immense sur les deux. L'ère d'Instagram, Facebook, Twitter, Tumblr, Google+ et le reste peut être irrésistible pour une artiste en devenir qui fait quasiment la totalité de son travail seule. Cela demande donc beaucoup d'assistance d'amis, de programmation et surtout, de réflexion personnelle. J'essaie de ne pas trop me laisser absorber par le monde des médias sociaux mais qui m'a grandement aidée à faire connaître mon travail à un public beaucoup plus large.

GV: Y a-t-il un artiste contemporain dont l'oeuvre vous a fait grande impression ?

SDKara Walker a toujours fait une immense impression sur mon travail, depuis que l'ai découverte à 18 ans. Je suis fascinée par son usage des silhouettes, dessins, jeux d'ombres et sa mise au premier plan des tabous de l'esclavage. Elle garde aussi son actualité et sa fraîcheur depuis des années tout en montrant son oeuvre dans les principaux musées. J'espère faire de même un jour et peut-être Ia rejoindre en comprenant sa conception de la femme artiste.

"Intuition"

“Intuition”

GV: Comment voyez-vous votre avenir ? Dans quelles nouvelles directions voulez-vous emmener votre art ?

SD: Mes projets ? Créer d'une façon ou d'une autre une opportunité de vivre et enseigner en Afrique du Sud ou au Ghana pendant 6 à 12 mois. Je continuerai [à] avancer comme artiste, voyager hors du pays pour montrer mon oeuvre, me mettrai à la photo, à la gravure, vais expérimenter avec des matériaux comme le cuir, le tissu, la corde, et d'autres encore. Je cherche à déconstruire mon utilisation la toile et à repousser les limites de l'idée d'identité féminine avec ma nouvelle exposition, intitulée ‘Le Journal d'une soi-disant Femme'.

Enfin, je vais continuer mon travail de philanthrope, collaborer avec différentes écoles ici et à l'étranger, en présentant à nouveau l'importance de l'art dans les écoles et en transformant chaque collectivité que je rencontrerai.

Toutes les illustrations de ce billet ont été fournies par l'artiste, et utilisées avec autorisation. Vidéo de Francesca Andre, également utilisée avec autorisation.