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La Chine bloque l'édition en chinois du Wall Street Journal

mardi 6 août 2013 à 09:40

L'édition en chinois du Wall Street Journal est bloquée en Chine depuis le 3 août 2013. La raison du blocage de ce site n'est pas très claire. L'édition en anglais du site reste accessible et le compte Weibo du Wall Street Journal en chinois est toujours actif. Shanghaiist donne des informations complémentaires.

 

Depuis leur retour d’ex RDA, d’anciens employés réclament des arriérés de salaires promis au Mozambique

mardi 6 août 2013 à 08:28

Chaque mercredi, des dizaines de Mozambicains manifestent dans les principales rues de la capitale, Maputo avec des drapeaux allemands. On les appelle les « Magermans » : ceux qui sont rentrés d'Allemagne. Cela fait plus de 20 ans, qu’ils manifestent pour des salaires qui leur seraient dus car après l’indépendance le gouvernement socialiste d’alors avait envoyé environ 18.000 Mozambicains dans l'ex-Allemagne de l'Est.

Après l'indépendance en 1975, ils y ont été envoyés « pour se former, travailler et acquérir des compétences pour reconstruire », sa vidéo [Anglais] Adam Thomas explique:

Lorsque le mur de Berlin est tombé en 1989, beaucoup sont retournés chez eux. Ils n'ont pas trouvé ce qu'ils espéraient et manifestent depuis.

Un article [Anglais] de Louise Sherwood sur IPS News précise qu’« ils ont perçu 40 % de leur salaire en espèces tandis que les 60 % restants ont été envoyé au Mozambique » :

Un document [de 2002], en possession des Magermans, publié par le ministère fédéral allemand des Finances, montre que 74.4-millions de dollars de salaires et 18.6 millions de dollars de cotisations de sécurité sociale ont été payés par l'ex-RDA, des chiffres qui équivaudraient à environ 5 000 dollars par employé. Le gouvernement mozambicain a accepté de rembourser des montants beaucoup plus faibles et a commencé à verser des sommes allant de 10.000 à 15.000 meticais (entre 370 à 550 dollars) à certains Magermans.

Les élections cambodgiennes soupçonnées de fraudes massives

mardi 6 août 2013 à 00:04

C'était prévu : le parti au pouvoir au Cambodge a été déclaré vainqueur des élections à l'Assemblée Nationale, mais l'opposition a rejeté les résultats et accusé le pouvoir de tricherie généralisée [liens en anglais].

Le parti du peuple cambodgien (PPC) dirigé par le premier ministre Hun Sen détient le pouvoir depuis 28 ans. Il a obtenu 68 sièges tandis que l'opposition du parti du sauvetage national du Cambodge (PSNC) a réussi à en obtenir 55.

C'est peut-être le tweet d'Andy Brouwer qui résume le mieux ces élections :

La fièvre électorale est passée, les résultats sont sortis et rien ne change au final, malgré les gains massifs de l'opposition.

Ecrivant pour le Bangkok Post, la blogueuse cambodgienne bien connue et auteur pour Global Voices Kounila Keo a reconnu la participation active des jeunes dans la campagne électorale :

…On ne peut nier qu'il y a eu une participation active des jeunes Cambodgiens sur l'internet et les médias sociaux. Ils sont aussi assoiffés de changement dans leur vie et celle de la génération qui les suit.

Peu importe qui a remporté cette élection. Malgré les irrégularités du scrutin, les électeurs plus jeunes ont surmonté leur peur pour faire entendre leurs voix par leurs bulletins de vote. Et ils veulent le changement.

Comme jeune électrice, j'ai été vraiment touchée par la volonté des jeunes pour la première fois de participer activement et montrer leur courage.

Pendant les 30 jours de campagne électorale, les jeunes par centaines de milliers sont sortis dans les rues de Phnom Penh et ont utilisé les médias sociaux pour exprimer sans crainte leurs opinions et convictions. Je me suis soudain sentie la force de discuter librement sur le fond de questions politiques, en sachant que je ne serais plus seule à le faire.

Tharum a observé que les médias sociaux sont devenus une source d'information sur les élections plus fiable que les médias traditionnels :

Grâce à la médiocrité de information à la télévision, et la diffusion radio intermittente, mon père se met à regarder les actualités sur YouTube avec son smartphone.

Mais Tith Chandara a déploré le comportement peu correct de certains internautes :

L'engagement de certains utilisateurs de médias sociaux au Cambodge dans le soutien à leur parti favori a des aspects violents et contraires à l'éthique, alors qu'apparaissent injures, répliques agressives et graphiques fabriqués depuis que la campagne a démarré. Les internautes partagent des images et des graphiques sans vérifier et confirmer les sources, même s'ils savent parfois que l'information n'est pas (encore) officielle.

Jinja a analysé les résultats des élections et a cité des irrégularités dans le scrutin :

Pour l'anecdote : c'est la première fois que j'ai vu des amis khmers venir vers moi et relever que leur nom n'était pas sur les listes électorales, ou qu'il avait été utilisé par quelqu'un d'autre pour voter. Les organisations internationales de surveillance sont de cet avis… pour la plupart.

Election Day. Photo from Facebook page of CPP Cambodia

Jour d'élection. Photo de la page Facebook du PPC Cambodge

Casey Nelson a décrit comment les personnes d'origine vietnamienne ont été traînées dans la boue pendant la campagne :

Les Vietnamiens sont les étrangers des Khmers, la première minorité sur qui tombe le blâme en période de tension politique et sociale.

Les relations entre le Vietnam et le Cambodge sont complexes, et l'antagonisme ethnique traditionnel est profondément entrelacé de haines historiques et politiques qui ne sont pas tout à fait injustifiées, mais lorsque cela va mal au Cambodge, ce sont souvent, sinon toujours, les Vietnamiens d'origine, pauvres et impuissants, qui en subissent le violent contre-coup.

Ecrivant pour Asia Times Online, Sebastian Strangio a invité l'opposition à user de son bon score dans les sondages pour se forger un plus grand poids politique :

Alors que le pays entre dans un meilleur des mondes politique, l'opposition, auréolée de succès, devra exécuter un ballet compliqué si elle veut transformer sa performance électorale en réformes réelles et pouvoir concret.

Mais Caroline Hughes, co-auteur d'un article pour Asia Sentinel, doute que l'opposition ait une réelle alternative à offrir :

…difficile de jauger à partir des déclarations du parti d'opposition comment il pourrait produire pour le Cambodge une stratégie de développement qui différerait substantiellement de celle à laquelle a présidé le PCC. En matière de développement, le Cambodge n'a fait que suivre ses voisins plus avancés du Sud-Est asiatique, avec le dépeçage des campagnes et l'absorption des ruraux pauvres dans les emplois urbains à bas salaires de l'industrie et des services.

Brad Adams de Human Rights Watch a fait état de la prolifération de documents électoraux falsifiés qui a subverti le processus électoral :

Les cadres dirigeants du parti au pouvoir paraissent avoir trempé dans l'émission de documents électoraux falsifiés et l'inscription frauduleuse d'électeurs dans de multiples provinces. Et les gens du parti semblent avoir fait leur apparition dans des endroits où il était évident qu'ils n'habitaient pas et ont insisté pour voter – sans parler des nombreuses autres fraudes invoquées à travers le pays.

Le procédé de votes multiples évoque la possibilité de fraude électorale systématique par le PCC et pose des questions sérieuses sur la crédibilité de l'élection.

Tandis que d'autres observateurs internationaux décrivaient les dernières élections cambodgiennes comme ‘libres, équitables et transparentes’ :

…un triomphe de la volonté populaire et une victoire des Cambodgiens dans leur effort pour construire un avenir meilleur fondé sur la suprématie et la sacralité du bulletin de vote.

Pour Nikitung91, il faut une coalition pour améliorer la situation dans le pays :

Je persiste à penser qu'une coalition serait une bonne solution… mais aucun parti n'en veut…

Au final, qui dirigera le pays m'indiffère vraiment, tout ce que je veux, c'est un pays sain et fort qui progresse. Il n'y aura pas de guerre à l'intérieur si nous écoutons la population, pas besoin de frauder les élections, de manipuler les média.

 

Le racket des prostituées de Hong Kong passe par les “bonnes critiques” en ligne

lundi 5 août 2013 à 17:16

Beaucoup sont d'avis que Internet a permis aux individus et aux minorités de se faire entendre. Pour les prostitué(e)s, c'est une autre histoire. La loi à Hong Kong sanctionne ”la publication de publicité pour des services sexuels” et la “conspiration pour vivre des gains de la prostitution d'autrui”. Les prostituées ne peuvent donc ouvrir leur propre site et sont exploitées par ceux qui peuvent gérer de tels sites depuis l'étranger. 

Mavis Siu, qui travaille pour inmediahk.net à Hong Kong, a enquêté sur le racket des prostituées par le site sex141.com, le portail le plus important, qui propose des services sexuels à Hong Kong. L'article est d'abord paru sur le site inmediahk.net le 24 juillet 2013 en chinois. Une version en anglais plus courte a été traduite par Alpha Au pour être publiée sur Global Voices, dans le cadre d'un partenariat d'échanges d'articles.

JJJ association set up counter to help local sex workers at TST district. Photo taken from inmediahk.net (CC: AT-NC)

L'association JJJ  a ouvert un stand pour rencontrer les travailleurs du sexe dans le quartier  TST. Photo parue sur le site  inmediahk.net (CC: AT-NC)

Certains journaux ont déjà relevé que le site sex141.com profite du “Money-Drop Review”, des commentaires laissés par les clients, pour racketter les prostituées. Celles-ci sont mal notées en ligne par des internautes anonymes ou des personnes payées pour cela, à moins de payer, ce qui leur permet alors d'avoir de bonnes “critiques” rédigées par des rédacteurs que le site recommande. JJJ Association [chinois], une association qui défend les droits des travailleurs du sexe, a alerté les journalistes sur cette situation.

Pourtant, beaucoup s'interrogent encore : pourquoi des travailleuses du sexe exploitées s'inscrivent-elles toujours et mettent-elles leur profil sur sex141?

Le Monopoly du sexe en ligne 

L'arnaque dont sont victimes les prostituées vient du monopole de la pornographie en ligne à Hong Kong.

On dénombre trois grands sites porno à Hong Kong, et sex141 est le plus actif, avec son répertoire de “bordels à une seule femme”, l'expression en vigueur pour les prostituées qui travaille en appartement, en général des studios en ville. sex141 a été ouvert en  2002 par un diplômé d'une université locale [chinois]. Le site permet aux travailleuses du sexe de faire de la publicité et propose aussi un forum. A l'origine, le site était domicilié à Hong Kong, mais quand son propriétaire a été condamné pour “conspiration pour vivre des gains de la prostitution d'autrui” en 2006, le serveur du site a été délocalisé aux Etats Unis, où il est géré par une société appelée Black Lotus Communications. Ces dernières année, la société à ouvert des sites similaires en Asie, en  Chine, à Taiwan et à Macao.

Le site qui cible le marché de Hong Kong a “une base de données VIP de filles”, qui classe les prostituées par  lieu de travail, pour que les recherches des clients soient plus aisées. Une personne chargée des campagnes de l'association JJJ dit que ce site porno est très professionnel. Ils emploient par exemple une équipe de juristes pour éviter tout ennui découlant de leur activité.

Leur classement sur les moteurs de recherche et leur popularité sont très bons, et c'est ainsi qu'ils ont institué un monopole de fait à Hong Kong. Selon le site de classement des sites alexa.com, sex141 était classé 126ème site en termes de trafic à Hong Kong, alors que deux autres sites porno similaires “Miss 148″ et “161 Sex” sont classés 1 088 et 1 638ème respectivement.

Miss Ho, une prostituée inscrite sur sex141 depuis plus d'un an, croit que les bons résultats de sex141 sont dus à ses techniques de marketing. Outre le site principal, sex141 gère aussi un forum [zh].  Le contenu du forum ressemble à celui de beaucoup d'autres forums, mais il présente beaucoup de publicités de sex141 pour des escort girls et d'autres services et produits de nature sexuelle. Le forum est classé 148ème sur Alexa.

Comme d'autres sites porno, sex141 propose un abonnement de “membre payant” sous le nom de “Programme sponsorisé”. Les abonnés qui payent 300, 1 000 ou 8 800 dollars HK ont différents privilèges, comme voir ou prendre des photos des prostituées, lire les critiques, visionner des vidéos, faire des recherches et d'autres fonctionnalités. Les abonnés peuvent aussi gagner des points de crédit sur le forum pour accéder à plus de droits.

Miss Ho souligne que les prostituées constituent la plus importante source de revenus pour le site sex141. “Nous payons 1 300 dollars de Hong Kong  [environ 180 US dollars] chaque mois pour des publicités” dit-elle. Actuellement, plus de 3000 travailleuses du sexe sont sur le site. Les revenus mensuels peuvent donc s'estimer en millions de dollars de Hong Kong.

Le coût des mauvaises critiques

Miss Ho reconnait que sex141 est un support très efficace pour faire de la publicité. Cela l'aide dans ses affaires. “Je ne parviens pas à comprendre pourquoi les clients sont si dépendants du site, mais de toute façon, ça nous aide à trouver plus de clients” dit-elle.

Mais sex141 veut extraire encore plus d'argent de ses clientes que leur cotisation mensuelle. Miss Ho explique que sex141 a “de nombreuses façons d'exploiter les prostituées”. Par exemple, la “Star du jour – Boite à fleurs” sur la page d'accueil. Un bouton permet aux clients d'acheter des fleurs virtuelles pour les filles. Dans la plupart des cas, ce sont elles qui paient 300 dollars HK (environ 40 US dollars) pour s'offrir à elles mêmes des fleurs, ce qui fait monter leur cote.

“Ces choses-là sont compliquées, mais rien n'est pire que la “Money-Drop Review”, dit-elle.

“Money-Drop Review” est une nouvelle fonctionnalité. Elle encourage les abonnés à écrire des critiques, comme ‘la prestation était nulle', ou même que la prostituée avait une maladie vénérienne. Les auteurs ne sont pas responsables de leurs écrits et on ne leur demande pas non plus de présenter des preuves. Les critiques se contentent donc de diffamer les fille, qui pour avoir de bonnes critiques doivent payer.

“ça coûte 200 dollars de faire supprimer une mauvaise critique. Si la fille qui est mal notée n'est pas une abonnée payante de sex141, elle doit payer 1 300 dollars HK [180 US dollars] pour devenir membre, et encore 1 000 dollars HK [environ 130 US dollars] pour FeiLung [un rédacteur recommandé par le site], pour qu'il rédige trois bonnes critiques, pour avoir une bonne image et que les affaires continuent”, Miss Ho ajoute.

L'arnaque du “Money-Drop Review” n'oblige pas uniquement les filles à payer plus, mais les oblige aussi à s'abonner au site.

“141 pourrait augmenter le prix des pubs, à, disons, de  3 000 à 4 000 dollars UK [environ 400 à 520 US dollars], les prostituées pourraient alors choisir de continuer à l'utiliser ou non” s'indigne Miss Ho. Le système actuel de la “mauvaise critique” a perturbé les prostituées tant psychologiquement que financièrement.

Miss Ho a entendu dire qu'une fille aurait dépensé 10 000 dollars HK (environ 1 300 US dollars) par mois en rédaction de bonnes critiques, et certaines tombent dans la dépression ou sont proches du suicide après de mauvaises critiques. Quand l'une est accusée d'avoir une maladie vénérienne, son chiffre d'affaires s'effondre immédiatement.

Etant donné la nature de leur travail, les prostituées ne peuvent pas empêcher ces mauvaises critiques de paraitre, ou se défendre de fausses accusations. Si elles veulent avoir des mots flatteurs, elles doivent en passer par le rédacteur payant. Miss Ho se demande pourquoi sex 141 ne protège pas les abonnées prostituées : “Après tout, nous sommes celles qui payent pour les pubs ! Pourquoi la Money-Drop Review ne cible que nous ? Les autres pubs sur le site, comme celles pour des services financiers, des accessoires de sex-shop et des numéros de tchat sexy n'ont pas ce genre de critiques.”

Le site défend sa rubrique critiques en invoquant la liberté d'expression. Mais les “mauvaises critiques’ ne peuvent pas être vérifiées, et les auteurs ne sont pas responsables pour leurs fausses informations”. La “liberté” a indubitablement fait du mal aux prostitués.Miss Ho demande : “‘Quand les informations comprennent l'adresse, les noms et numéros de téléphone, leur influence ne peut pas ne pas avoir d'impact dans le monde réel”.

Les administrateurs du forum de sex141 ont duggéré que “les rédacteurs recommandés “FeiLung” et “GwatZingKoeng” sont des rédacteurs agrées et ne sont pas des employés du site…Personne n'est autorisé à les faire payer au nom de sex141.”

Mais Miss Ho demande : “S'il n'y a pas d'intérêts cachés, pourquoi le service de la publicité de 141 nous recommande-t-il les deux rédacteurs ?” Un contributeur de Inmediahk.net a essayé de contacter le personnel de sex141, mais s'est vu répondre : “Vous connaissez la nature de notre site. Nous ne donnons pas d'interviews aux médias. Aucun commentaire.”

Un membre de l'association JJJ  dit qu'ils ont présenté les filles à d'autres sites du même genre, mais que ceux-ci ne marchent pas bien, et que leur nombre de visites ne leur permet pas de trouver des clients. L'association a même envisagé de lancer un nouveau site, mais ils se sont retrouvés confrontés à des risques juridiques, et à des problèmes techniques. Ils ont du abandonner cette idée. Il semble que les prostituées n'aient d'autre alternative que de continuer à ‘payer pour leur propre malheur’ si cette situation de monopole se prolonge.

Rewire: Sérendipité et cosmopolitisme vus par le web francophone

lundi 5 août 2013 à 16:53

Le livre Rewire : Digital Cosmopolitans in the Age of Connection écrit par Ethan Zuckerman, co-fondateur de Global Voices, analyse pourquoi le potentiel de communication attaché à la technologie ne conduit pas obligatoirement au renforcement du lien entre humains. Dans Rewire (reconnecter en français) Zuckerman décrit notamment l'importance du travail produit par les traducteurs pour permettre une meilleure compréhension des évènements mondiaux dans leurs contextes.

Rewire: Le cosmpolitisme à l'ère du numérique par Ethan Zuckerman

Rewire: Le cosmpolitisme à l'ère du numérique par Ethan Zuckerman

Rewire explique que même si grâce aux formidables progrès réalisés dans les technologies d'information, le monde entier nous est accessible en un click, il n'en demeure pas moins que le web que nous fréquentons est toujours aussi sérié et se réduit aux sphères qui nous sont les plus familières. Pour essayer de résoudre cette auto-ségrégation du web, Zuckerman propose quelques pistes pour reconnecter “le web”; l'une de ces suggestions est d'encourager la découverte de nouvelles sphères de réflexions en suivant ce qu'il appelle des “bridges figures”( personnes-ponts) ou des “curators”  (guides du web).

Sérendipité

La notion de sérendipité n'est pas évidente à cerner. C'est le processus qui permet la découverte de résultats par un concours de circonstances fortuits. De nombreuses découvertes scientifiques importantes sont les fruits de ce processus comme par exemple, la pénicilline, le Post-it, la pierre de rosette ou le Velcro.

La pierre de Rosette au British Museum découverte par hasard par   par un soldat français lors de la campagne d'Égypte de Napoléon Bonaparte - Wikipédia CC-BY-NC

La pierre de Rosette au British Museum découverte par hasard par par un soldat français lors de la campagne d'Égypte de Napoléon Bonaparte – Wikipédia CC-BY-NC

Hubert Guillaud, rédacteur en chef d'internetactu.net écrit ainsi dans un commentaire sur le billet de Christian Faure: “Comment savoir rapidement ce qu’on ignore ?:

J’aime aller dans les librairies que je ne connais pas et quand elles me perdent, c’est-à-dire quand je ne reconnais rien de ce que je connais dans leur rayon, alors je me dis qu’elle semble intéressante. Je vais souvent au rayon des essais et mon plus grand plaisir est d’y découvrir ce que je ne connais pas et plus il y en a, qui semble de qualité, et plus ça m’intéresse en fait ou plus je considère la librairie. Ca ne signifie pas qu’en faisant ainsi on ne procède pas pour autant par induction, effectivement. Nous avons tous une tendance forte à l’induction, mais peut-être plus parce que nous avons toujours un avis singulier (par essence), une première impression, qu’une expérience multiple. J’ai même tendance à penser que concevant le monde ainsi, nous avons forcément tendance à construire des outils dans lesquels nous nous reflétons ou qui voient le monde tel qu’on le voit. Nos outils d’agrégation, nos outils de personnalisation ont tendance à voir le monde par la lorgnette où on le regarde

 

Sylvie Catellin, maître de conférences en sciences de l’information et de la communication, explique comment la sérendipité est un facteur important dans toutes découvertes et est aussi un “outil de réflexivité permettant de penser les conditions de son émergence” :

L’intuition scientifique est définie comme une idée unifiante ou clarifiante, laquelle surgit dans la conscience en tant que solution d’un problème qui préoccupe intensément le chercheur. Elle survient de manière inattendue, de quelque étrange univers extérieur, lorsque l’on est absorbé par des problèmes urgents ou bien pendant le sommeil.  Parmi ces conditions, il faut notamment retenir le profond désir de savoir, le stock de connaissances en mémoire reliées au problème, le sentiment de liberté, l’aptitude à briser la routine, la discussion du problème avec d’autres chercheurs [..]  C’est peut-être justement lorsque les scientifiques réfléchissent à leur expérience de la créativité et de la sérendipité que les sciences dites « dures » sont les plus susceptibles d’entrer en dialogue avec les humanités, les arts, les sciences humaines et sociales, devenant plus réceptives à leurs discours et à leurs approches. La réflexivité (en supplément à la sérendipité) implique la liberté et l’émancipation par rapport aux dogmatismes épistémologiques.

Cosmopolitisme

Le cosmopolitisme est une notion mitigée sur le web francophone. Au sens très large, il désigne l'intérêt porté aux pays et populations étrangers. Ce qui n’apparaît pas dans cette définition, c'est le fait que cette notion ne renie pas l'appartenance à un communauté d'origine et d'en assumer la spécificité. Souvent taxé d'utopisme, les partisans d'une citoyenneté du monde sont souvent en faveur d'un monde uni sur des bases de coopération et non plus de concurrence.

Cette approche idéologique du monde n'est pas le propos de Zuckerman. Il met plutôt l'accent sur la nécessité de se rendre conscient de notre consommation sériée des médias et de s'ouvrir vers d'autres cercles de réflexion de manière progressive.

Rodrigue Coutouly, contributeur sur les échos,  note que vu la compléxité croissante des sociétés humaines, il serait peut-être judicieux d'essayer de s'ouvrir le plus tôt possible à sa diversité:

Il est devenu impossible de comprendre de l'extérieur, des organismes ou des sociétés humaines travaillés par des enjeux de plus en plus complexes et contradictoires, ayant accumulé des compétences et des modes d'actions foisonnants et d'une grande diversité.[..] La masse sans cesse renouvelée d'informations brutes finit en effet pour empêcher toute tentative cohérente d'analyse lucide des événements, elle renforce les stéréotypes et ne permet pas une compréhension distanciée, elle n'autorise aucune prise de hauteur, de prise de recul, dans le temps et dans l'espace.[..] (Il est primordial) de relier le particulier au général, le local au global.

 

Ulrich Beck, le sociologue allemand auteur de la société du risque et avocat d'une sociologie cosmopolitique, défend un nouveau visage du cosmopolitisme :

Le cosmopolitisme est la prise de conscience du destin commun qui lie désormais toutes les parties du monde dans le partage des mêmes risques. [..] Il ne s’agit donc pas là d’un cosmopolitisme qui vient d’en haut comme celui incarné par les Nations unies ou par la Cour internationale de justice. Cela ne veut pas dire non plus que tout le monde devient cosmopolite, amateur de diversité culturelle ou polyglotte, ou que nous sommes tous conscients de ce phénomène. Cela signifie simplement qu’il y a de fait une cosmopolitisation qui vient d’en bas et qui change notre vie quotidienne, notre mode de consommation, notre vie politique, ou nos relations à l’intérieur même de nos frontières nationales. On peut parler en ce sens d’un « cosmopolitisme banal ». [..] Le risque global peut être l’une des forces aptes à produire des institutions cosmopolitiques capables de surmonter les intérêts appréhendés seulement à l’échelle nationale. Car les gens et les États peuvent apprendre qu’il faut résoudre les problèmes nationaux dans une société cosmopolitique. Cette perspective cosmopolite est réaliste ; c’est le nationalisme qui dans ce contexte est idéaliste : il regarde en arrière et n’apporte pas de vraies réponses aux sociétés.