PROJET AUTOBLOG


Global Voices (fr)

Archivé

source: Global Voices (fr)

⇐ retour index

Au Suriname, une ONG se fait le porte-étendard des animaux dont les habitats disparaissent

vendredi 13 avril 2018 à 10:00

Un paresseux en liberté au Suriname. Photographie de Stellar Tsang, aimablement fournie par le Green Heritage Fund Suriname. Utilisée avec autorisation.

À Paramaribo, au Suriname [fr], un organisme de conservation se démène pour secourir la faune sauvage et préserver son habitat. Fondé en 2005 par Monique Pool, le Green Heritage Fund Suriname défend le droit des animaux à travers l'éducation de la société.

Bien que le Suriname soit un pays luxuriant, les zones urbaines touchées par la déforestation chassent les animaux. Le rôle de Green Heritage Fund est de protéger cette faune, principalement les paresseux, ainsi que de préserver les écosystèmes des dauphins et d'autres espèces marines.

Global Voices s'est entretenu avec Monique Pool pour discuter du travail crucial mené par son organisation.

Monique Pool, fondatrice et directrice du Green Heritage Fund Suriname. Photographie de Stellar Tsang, utilisée avec autorisation.

Global Voices (GV) : Parlez-nous du Green Heritage Fund Suriname. À quoi ressemble une journée de travail classique ?

Monique Pool (MP): I think most people think we are either running behind sloths and anteaters, or maybe watching dolphins all day. I wish…but actually, we have a lot of tasks. We plan for new activities and then in between, we get calls for rescues. Sometimes we have one rescue a week and sometimes we have two rescues in one day.

Monique Pool (MP) : Je pense que la plupart des gens nous imaginent soit en train de courir après des paresseux et des fourmiliers, soit passer notre journée à observer les dauphins. Si seulement… en réalité, nous avons beaucoup de tâches. Nous planifions nos nouvelles activités et entre-temps, nous recevons des appels d'urgences. Parfois nous avons un sauvetage par semaine et d'autres fois ce sera deux sur la même journée.

Gros plan sur un paresseux secouru par le Green Heritage Fund Suriname. Photographie de Stellar Tsang, utilisée avec autorisation.

GV : Pouvez-vous nous en dire plus sur ces activités et sur vos objectifs en tant qu'organisation à but non lucratif ?

MP: We have four programs. The Xenarthra Program is basically the rescue, rehabilitation and release of wildlife. It’s also about [preserving] the ecosystem that they live in, to ensure that there’s enough left. We’re not just the normal conservation organization. We’re also looking more and more at the wildlife welfare of animals that are losing their habitat, especially in the city.

The second program is the Dolphin Program. While that's the one species the program is focusing on, we also started looking at the broader picture — all the animals that share the ecosystem with this dolphin and the health of that ecosystem. Together with WWF Guianas, the Nature Conservation Division of the Suriname Forest Service, and the Protected Areas Commission of Guyana, we’re actually implementing a regional Marine Spatial Planning project. In the end, the aim for that program is to have a marine protected area.

Our third program is Education and Research. For us, education is the main focus of what we do because we feel if you don’t raise awareness or don’t educate people, you will never be able to protect areas. Education is a really important part of our efforts. It’s cutting through all of our programs and education, of course, includes advocacy.

The fourth program is Green Community Development. If the community invites us, we help them look for alternative ways of earning money.

MP : Nous avons quatre programmes. Le programme Xenarthra est celui, essentiellement, de sauvetage, réhabilitation et remise en liberté des animaux sauvages. Il s'agit aussi [de préserver] l’écosystème dans lequel ils vivent, afin de s'assurer qu'il en reste assez. Nous ne sommes pas seulement un organisme de conservation classique. Nous nous attachons de plus en plus à nous assurer du bien-être des animaux sauvages qui perdent leur habitat, et plus particulièrement en zones urbaines.

Le second est le programme Dauphin. Bien que le projet soit centré autour de cette espèce, nous avons également commencé à prendre du recul, et donc prendre en compte l'ensemble des animaux qui partagent l'écosystème du dauphin et l'état de cet écosystème. Aux côtés de WWF Guyanes, de la division de la Conservation naturelle du service des Forêts du Suriname et de la Commission des zones protégées de la Guyane, nous mettons actuellement en œuvre un projet régional de planification spatiale marine. Le but final de programme est la mise en place d'une aire marine protégée.

Le troisième grand programme, c'est l'Éducation et la recherche. Pour nous, l'éducation est l'objectif principal de ce que nous faisons car nous pensons que si vous ne sensibilisez pas, ou si vous n'éduquez pas la population, alors vous ne serez jamais capable de protéger des espaces. La pédagogie tient une part primordiale dans nos efforts, c'est une valeur transversale à tous nos projets. Le pôle éducation inclut bien évidemment les activités de plaidoyer.

Le quatrième programme est le Développement de la communauté verte. Si la communauté nous y invite, nous les aidons à trouver des méthodes alternatives pour gagner de l'argent.

GV : Pourquoi avez-vous décidé de concentrer vos forces sur le bien-être des paresseux ?

MP: It’s more or less of a coincidence that we started doing that. I had lost my dog and while I was looking for him through the Animal Protection Society, I volunteered to take care of a baby sloth. Then I started becoming interested in why specifically sloths were being reported [to the Animal Protection Society] so much. We started focusing more on that whole group because they are very special animals — not just the sloths, but also anteaters. I became more and more curious, and started looking online for resources.

MP : C'est plus ou moins une coïncidence si nous en sommes arrivés là. J'avais perdu mon chien et alors que je le cherchais à la Société protectrice des animaux (SPA), je me suis portée volontaire pour prendre soin d'un bébé paresseux. C'est à partir de ce moment-là que je me suis intéressée aux raisons expliquant le fort taux de signalement de paresseux [à la SPA]. Nous avons commencé à nous concentrer sur cette espèce car ce sont des animaux très particuliers ; ce n'est pas seulement les paresseux, il y a aussi les fourmiliers. Je suis devenue de plus en plus curieuse et j'ai commencé à me documenter en ligne.

GV : En quoi le développement et la déforestation ont-ils affecté l'existence des paresseux au Suriname ?

MP: All wildlife that shares the habitat with the sloths are affected when there is deforestation — but sloths are so slow, they cannot get away. The moment the machines start coming in, the monkeys will flee, the birds will go away, the snakes will leave because of the ground moving in a certain way. The animals will be gone, with the exception of the animals that are too slow to do that. These include the sloths, the silky anteaters (small anteaters that live very high in the trees), and the tree porcupines.

When we do the rescues, those are the animals that we mostly catch. We normally release all healthy animals within a week.

Deforestation is happening in the interior where there is illegal gold mining, but those areas are already heavily hunted, so there is not that much wildlife. Most of our animals come from the coastal zone, with maybe 96% coming specifically from the city.

MP : Toutes les espèces partageant l'habitat des paresseux sont au final touchées par la déforestation, seulement ces derniers sont si lents qu'ils ne peuvent pas s'échapper. Dès que les machines arrivent, les singes s'enfuient, les oiseaux s'envolent et les serpents partent parce que le sol bouge d'une façon inhabituelle. Les animaux seront donc partis, sauf ceux qui sont trop lents pour le faire. Et parmi eux on compte les paresseux, les fourmiliers nains (de petits fourmiliers vivant à la cime des arbres), et les porcs-épics.

Quand nous procédons à des interventions de sauvetage, ces animaux représentent la majeure partie de nos captures. Généralement, nous relâchons tous les animaux en bonne santé en moins d'une semaine.

La déforestation se déroule à l'intérieur des terres, là où se trouvent les exploitations aurifères illégales, mais ces zones sont déjà des terrains de chasse très pratiqués, il ne reste donc plus beaucoup de faune sauvage. La plupart de nos animaux viennent de la zone côtière, et peut-être 96 % d'entre eux de la ville en particulier.

Un paresseux se fraie un passage à travers une zone extrêmement polluée de la capitale surinamaise, une ville où de nombreux animaux risquent de perdre leur habitat. Photographie de Stellar Tsang, aimablement fournie par le Green Heritage Fund Suriname. Utilisée avec autorisation.

GV : Comment prenez-vous soin des paresseux une fois qu'ils sont au sanctuaire ?

MP: First, we assess their health status. If they are healthy, we release them within two to three days. Because of the hunting going on in Suriname, we normally do releases [in areas we deem safe].

[For injured animals], the most challenging part is providing food that they will eat. Once the animals eat, you can provide the full treatment they need before releasing them. But if they refuse to eat, they will die, even if they get the treatment; then, we need to make a decision about what to do. Sometimes we will release an animal if we see that being in the forest and being able to take care of itself will heal it. But we don’t do that very often — almost never — because a weak animal or injured animal is just food for predators.

MP : En premier lieu, nous évaluons leur état de santé. S'ils sont en bonne condition, nous les relâchons sous deux ou trois jours. À cause de la chasse au Suriname, nous les remettons habituellement en liberté [dans des zones que nous considérons sûres].

[Concernant les animaux blessés], le plus gros défi est de leur fournir de la nourriture qu'ils vont manger. Une fois que les animaux s'alimentent, nous pouvons leur fournir le traitement adapté à leurs besoins avant de les relâcher. Mais s'ils refusent de manger, ils finiront par mourir, même s'ils reçoivent les soins nécessaires. Puis nous devons décider de la suite. Parfois nous relâchons un animal si nous voyons qu'une fois dans la forêt, il pourra prendre soin de lui et donc guérir. Nous ne faisons pas cela très souvent, quasiment jamais en fait, car un animal trop faible ou blessé n'est rien d'autre que de la nourriture pour les prédateurs.

Monique Pool et un membre de son équipe au chevet d'un paresseux secouru. Photographie de Stellar Tsang, aimablement fournie par le Green Heritage Fund Suriname. Utilisée avec autorisation.

GV : Quel est l'aspect le plus difficile de votre travail ?

MP: When we have an animal that is really badly injured, the most difficult part is having to deal with people’s awareness about what they did to the animal. I remember this one animal — people had caught a two-fingered sloth because they wanted to eat it. Then they thought it was pregnant and because they didn’t want to eat a pregnant animal, they tied it up and let it sit in their yard. After maybe ten days, they called us. The wire had completely ruptured through the flesh of its leg and we had to euthanize the animal after we brought it to the vet.

For a week or more, the volunteer and I…we just couldn’t sleep thinking about that. It’s not just dealing with the suffering of the animals, but the ignorance of the people. That really gets me most, the ignorance.

MP : Quand nous recueillons une bête qui est très grièvement blessé, la partie la plus difficile est de sensibiliser les gens sur ce qu'ils lui ont fait. Je me souviens de cet animal en particulier : des gens avaient capturé un paresseux à deux doigts car ils voulaient le manger. Puis ils ont cru qu'elle attendait des petits et comme ils ne voulaient pas manger une femelle enceinte, ils l'ont attachée et l'ont laissée dans leur jardin. Après une dizaine de jour peut-être, ils nous ont appelés. Le câble avait complètement déchiré la chair de sa jambe et nous avons dû l'euthanasier après l'avoir amenée chez le vétérinaire.

Pendant plus d'une semaine, le bénévole et moi… nous ne pouvions plus dormir sans penser à ça. Ce n'est pas seulement d'avoir affaire à la souffrance de l'animal, mais à l'ignorance de la population. C'est ça qui m'atteint le plus, l'ignorance.

GV : À l'inverse, quelle est l'aspect le plus gratifiant ? 

MP: It’s an incredible thing that I am living in a country where these special animals live, where we can see them in the wild and where they still have reasonably untouched habitats. It’s just something I appreciate very much, that I live here — not just where sloths live, but also where these amazing dolphins live. It’s something I’m very grateful for. I’m grateful that I can speak on their behalf and help protect their habitat.

MP : C'est incroyable de vivre dans le même pays que ces animaux spéciaux, où vous pouvez les observer en liberté et où ils ont encore un habitat raisonnablement préservé. C'est juste quelque chose que j'apprécie énormément, de vivre ici, et pas uniquement avec les paresseux, mais aussi où ces incroyables dauphins vivent également. C'est une chose dont je suis vraiment reconnaissante. Je suis vraiment honorée de pouvoir parler en leur nom et de les aider à protéger leur habitat.

GV : Comment est-ce que les gens peuvent soutenir votre organisation et le travail qu'elle mène ?

MP: There are two ways. One is to spend time, helping and volunteering with us. There can also be volunteering from a distance. There is a form on our website, where it says ‘Volunteer’. People can fill out their name, tell us what their skills are and how they want to help us. For example, our website administrator lives in the United States.

The other thing, of course, is donations. We live off of donations. That would help continue this work.

MP : Il existe deux façons. La première est de donner son temps, d'aider et de faire du bénévolat avec nous. C'est également possible d'être bénévole malgré la distance. Il y a un formulaire sur notre site, sous l'onglet “Volunteer”. Les personnes peuvent compléter leur nom, nous dire quelles sont leurs compétences et comment ils souhaitent nous aider. L'administrateur de notre site internet, par exemple, vit aux États-Unis.

La seconde option, se sont bien évidemment les donations. Nous vivons des dons. Cela nous permettrait de continuer ce travail.

GV : Comment utilisez-vous les réseaux sociaux afin d'obtenir du soutien et de sensibiliser le public ?

MP: We use social media to emphasise our message ‘a wild animal belongs in the wild’, and we use the #notapet hashtag in a lot of our posts. We actively use our Facebook page to raise certain issues and we have used social media to promote a petition we started in 2011 and repeated in 2013 to fight against the selling of wildlife in the streets.

MP : Nous utilisons les réseaux sociaux pour renforcer notre message “la place d'un animal sauvage est à l'état sauvage” et nous utilisons le mot-clic #notapet dans un grand nombre de nos articles. Nous alimentons régulièrement notre page Facebook pour soulever certains problèmes et nous avons utilisé les réseaux sociaux pour promouvoir une pétition débutée en 2011 et répétée en 2013, afin de combattre la vente illégale d'animaux sauvages dans les rues.

Monique Pool relâche un paresseux dans la nature, là où est sa place. Photographie de Stellar Tsang, aimablement fournie par le Green Heritage Fund Suriname. Utilisée avec autorisation.

GV : Existe-t-il quelque chose dont les gens ne se rendent pas compte, à propos du travail de conservation que vous réalisez ?

MP: One thing that is really good for people to know is that we do not keep animals in enclosures. There are a lot of people who call and say, ‘We want to come and see the animals’, or want to touch them. We don’t have animals in cages. We absolutely don’t do hugging. We ourselves even limit how much we touch the animals. Sloths are solitary animals, so they are not used to social interactions, even within their species — so you can imagine how other types of interaction can be very stressful for them.

Instead, we take people on releases because we have so many rescues and releases. It’s often a very beautiful moment, because you can see when they are sitting in a cage [on the way to being released], these animals get really depressed. Once you release them, you can actually see how their energy changes; how they get off into the forest, and it’s really amazing to see that. We allow people to take as many pictures as they want, because of course this is what we want to promote — that wild animals belong in the wild.

MP : Une chose certainement bonne à savoir pour le public, c'est que nous ne mettons pas les animaux dans des enclos. De nombreuses personnes appellent et nous disent : “Nous voulons venir pour voir les animaux”, ou “nous voulons les toucher”. Nous n'avons pas d'animaux en cage. On ne fait absolument pas de câlins. Nous-mêmes, nous limitons au maximum notre relation physique avec eux. Les paresseux sont des animaux solitaires, ils ne sont donc pas habitués aux interactions sociales, et ce même au sein de leur espèce, vous pouvez donc facilement imaginer à quel point d'autres types d'interaction peuvent être stressantes pour eux.

À la place, nous emmenons les personnes lorsque les animaux sont relâchés car nous avons beaucoup de captures et de remises en liberté. C'est souvent un très beau moment puisque vous pouvez voir qu'assis en cage [juste avant d'être relâchés], ces animaux sont vraiment dépressifs. Une fois libérés, vous pouvez observer le changement qui s'opère dans leur énergie, comment ils retournent dans la forêt et c'est absolument magnifique à voir. Nous autorisons les gens à prendre autant de photos qu'ils veulent puisque bien évidemment c'est cela que nous voulons promouvoir : que la place d'un animal sauvage est à l'état sauvage.

Le Doing Cafe à Séoul : lieu privilégié pour parler féminisme, un sujet toujours tabou en Corée du Sud

jeudi 12 avril 2018 à 11:53

Le Doing Cafe, café féministe, s’est ouvert en mars 2017 à Séoul. Depuis lors, le lieu a accueilli plus de 10 000 personnes, la majorité d’entre elles étant des femmes de 20 à 30 ans. Selon Kim Ryeo-il, la propriétaire du café, c’est le premier du genre en Corée du Sud. Dernièrement, le café a fêté son premier anniversaire, attirant plus de 50 de ses fidèles client.e.s. Crédit : Ann Babe/PRI

Cet article, à l’origine écrit par Ann Babe pour GlobalPost, a été publié sur PRI.org le 20 février 2018 et republié en anglais par Global Voices le 25 février, dans le cadre d'un partenariat.

Ha Yoon-na a toujours été en faveur du féminisme, mais n’a jamais osé se dire « féministe ». En Corée du Sud, ce mot est perçu négativement, et Ha, jeune traductrice littéraire de 30 ans, avait peur d’être jugée et marginalisée.

La jeune femme a surmonté sa peur en se rendant dans ce lieu féministe à Séoul. Pour la première fois, au Doing Cafe, parmi plus de 1 000 ouvrages de littérature féminine, et tou.te.s les client.e.s avides de les commenter, elle s’est sentie suffisamment à l’aise pour parler librement de féminisme.

« J’avais une faible estime de moi avant de découvrir ce lieu. Je n’étais pas sûre de moi » confie-t-elle, attablée avec un livre et un thé au citron. « Je me suis épanouie grâce au Doing Cafe, qui m’a aidée à m’identifier comme féministe ».

Caché derrière la station Cheongdam, dans les rues du quartier le plus chic de la capitale, Gangnam, (parodié par Psy dans son hit de 2012, « Gangnam Style »), le Doing Cafe serait presque invisible sans sa façade jaune vif. En y regardant de plus près, on se rend vite compte qu’il ne s’agit pas que d’un simple café — un panonceau sur la porte indique qu’il s’agit là d’un « refuge culturel du féminisme ».

On ne soupçonnerait pas l’existence du Doing Cafe sans la couleur jaune vif de sa façade. Crédit : Ann Babe/PRI

En Corée du Sud, où le patriarcat et la misogynie sont encore profondément ancrés dans la société, le Doing Cafe fait office d’établissement inhabituel, si ce n’est subversif. Selon, Kim Ryeo-il, la propriétaire du lieu, c’est le premier café féministe de ce type en Corée du Sud. Elle ajoute qu’il a attiré plus de 10 000 visiteurs depuis son ouverture en mars 2017, la plupart étant des jeunes femmes vingtenaires et trentenaires. Au niveau local, l’ouverture du café a également donné naissance à une poignée d’autres espaces féministes..

Les multiples ressources et événements du Doing : une bibliothèque féministe, des expositions artistiques, des conférences invitées, une boutique, des rencontres sociales et des conseils personnalisés (menés par Kim, titulaire d'un diplôme supérieur en théologie féministe, visent à soutenir les jeunes femmes comme Ha dans leur combat pour affirmer leur droit à l'égalité.

Kim Ryeo-il a toujours souhaité créer ce type de lieu, mais n’avait jamais imaginé pouvoir concrétiser un tel projet. Crédit : Ann Babe/PRI

« Ce café est en faveur d'un mouvement culturel et sociétal » explique Kim, également connue sous le prénom anglais Liz. La plupart des gens entendent parler du Doing Cafe via les réseaux sociaux.

Du haut de sa cinquantaine d’années, Kim espère que le mouvement actuel provoquera davantage de changements que la première vague féministe des années 1990 — et moins de réactions violentes. « Le monde n’a pas évolué positivement » soupire-t-elle. « Aujourd’hui, les femmes entre 20 et 30 ans … ne vivent pas dans une meilleure société que celle que j’ai connue ».

En effet, malgré une réputation mondiale en termes de technologie de pointe et le succès de la pop culture, la Corée du Sud est à la traîne concernant l’égalité des sexes. Selon le Forum économique mondial, le pays détient dans ce domaine l’un des pires scores du monde, se plaçant à la 118e place sur 144. Parmi les pays membres de l’OCDE, la Corée arrive même dernière sur le plan de l’égalité des salaires.

Les post-it affichés à l’intérieur du Doing Cafe expriment les souhaits des clientes concernant l’avenir et diffusent des messages de remerciements. Crédit : Ann Babe/PRI

Les analystes sociaux déclarent que les inégalités en Corée du Sud découlent, en partie, de la culture confucéenne qui impose des rôles sociaux rigides et des normes de genre. Pour Ha, l’inégalité se ressent au sein de sa propre famille où, selon ses termes, ses parents traitent son jeune frère comme un « prince » et critiquent ses revendications féministes qu’ils décrivent comme une façon de « fuir la réalité » et une « utopie ».

« Ma famille est très conservatrice et confucianiste. Je pensais que c’était moi qui était bizarre » raconte la jeune femme. « Je me sentais seule ». Comme ses parents, ses jeunes frère et sœur perçoivent le féminisme comme une forme « dangereuse » de « chauvinisme féminin » et lui ont dit ne pas comprendre l’intérêt qu’elle y trouve.

C’est une réaction fréquente en Corée du Sud. « Les idées féministes s’apparentent à de la science fiction pour beaucoup, ici » explique Helen Noh, professeure dans le domaine de la protection sociale, à l’université de Soongsil. « Les questions féministes peuvent provoquer une grande gêne ».

Un panonceau sur cette étagère indique :“Cultural Home of Feminism” littéralement « Refuge culturel du féminisme ». Crédit : Ann Babe/PRI

C’est parce que le féminisme est toujours tabou et largement associé à l’idée qu’il s’agit de haine envers les hommes ou de supériorité des femmes. « Pour certaines personnes, le mot féminisme évoque des représentations extrêmes » explique Noh. « Elles n’en comprennent pas l’exacte signification ».

Ha, elle-même, n’était pas totalement certaine de la signification du terme alors qu’elle en partageait les valeurs, sans le savoir. De ce fait, elle a rejoint le Doing Cafe pour s’informer, d’abord pour elle-même, mais ce geste a fini par toucher son entourage également.

« Ma notion du féminisme était assez vague. Je voulais expliquer le féminisme, mais je ne le pouvais pas car je ne m’en faisais pas une représentation très concrète. « Aujourd’hui, j’échange sur mes opinions avec mon petit frère, et il veut en savoir plus sur le féminisme et l’égalité des sexes ».

Ha Yoon-na a toujours cru au féminisme mais était réticente à se dire « féministe » jusqu’à ce qu’elle trouve une communauté au Doing Cafe. Crédit : Ann Babe/PRI

Il y a 15 ans, divorcée et avec deux enfants à charge, Kim rêvait déjà de monter un lieu féministe mais ne s’imaginait pas que cela puisse devenir réalité. À cette période, elle luttait pour joindre les deux bouts.

C’est en mai 2016 que tout a changé. Un soir, dans les toilettes publiques de Gangnam un homme a poignardé à mort une jeune femme ; il avait attendu plus de 50 minutes le temps que 6 hommes différents utilisent les toilettes, et il avait pris pour cible la première femme qui était entrée. « C’est parce que les femmes m’ont toujours ignoré que je l’ai fait » a-t-il confessé plus tard. Bien que le meurtre n’ai pas été jugé relevant d’un crime haineux mais plutôt de maladie mentale, le pays a été choqué et a déclenché un dialogue à propos de la misogynie ancrée en Corée du Sud.

Ce fut l’élément moteur qui a poussé Kim à ouvrir le Doing Cafe.

Le café a comblé un immense vide. « Il n’y a pas beaucoup d’endroits où discuter de ce type de problèmes en Corée » explique Ha. « Ce genre de lieu aide celles (et ceux) qui s’intéressent au féminisme mais n’osent pas se dire féministes. C’est un lieu qui les rassemble et les aide à partager des idées ». Ha pense qu’en offrant un point de départ pour favoriser la prise de conscience et l’éducation, le Doing Cafe, peut répandre des idées féministes auprès de l’ensemble de la population coréenne.

Cependant, tous les clients ne comprennent pas l’objectif du Doing Cafe. « Certaines personnes de passage ne savent rien à propos de ce café » raconte Kim. Elle a parfois fait face à plusieurs d’entre elles, entrées par hasard et parties en déblatérant des propos anti-féministes, vociférant leur homophobie ou se vantant de payer pour du sexe.

En outre, la première année a été tellement difficile financièrement pour Kim qu’elle a souvent songé à fermer boutique, mais la touchante gratitude de ses clients l’a fait tenir. « Au final, peut-être pourrons-nous réellement construire un monde meilleur » déclare-t-elle. « C’est mon rêve. »

Casey Kim, 17 ans, se définit comme non-binaire (ni entièrement masculin, ni entièrement féminin) et dit avoir entendu parler de cet endroit pour la première fois à Gangwon-do, une province de la côte ouest, non loin de là où se sont tenus les Jeux olympiques d’hiver de Pyeongchang. Mais ça n’a pas empêché Casey Kim de se rendre régulièrement dans ce café, où l’on se sent comme chez soi.

De nombreux habitués sont venus avec des rouleaux de kimbap (sushi coréens), du vin et de la musique pour le premier anniversaire du café féministe. Le Doing Cafe de Séoul, propose une bibliothèque féministe, des expositions culturelles, des conférences, une boutique, des rassemblements et des entretiens privés. Crédit : Ann Babe/PRI

Par une nuit fraîche de février, Casey Kim, Ha et environ 50 habitués du Doing Cafe se sont retrouvés pour fêter le premier anniversaire de son ouverture. Le café a eu 1 an en mars. L’ambiance était au rendez-vous, avec lumières tamisées et boule à facettes projetant des reflets lumineux sur les murs ornés d’œuvres d’art et de livres. Les participants se sont mêlés, en dégustant les kimbap et en buvant du vin, sur un fond de playlist musicale en faveur des femmes, concoctée avec soin ; Kim Ryeo, la propriétaire du café, a réussi son pari.

Face à cette scène, elle rayonne. La foule l’applaudit et l’acclame.

« Le Doing Cafe m’a aidé à trouver ma voie » confie Ha. « En finir avec la misogynie n'arrivera pas de mon vivant… mais je sens qu'il est de mon devoir de dire “C'est mal” et d'expliquer pourquoi ».

Ann Babe, de Séoul en Corée du Sud.

En Corée, le parquet, le divertissement et la politique subissent les foudres de #MeToo

jeudi 12 avril 2018 à 10:12

Mosaïque formée d'un arrêt sur image de l'émission coréenne de JTBC, pendant laquelle la procureure Seo Ji-Hyun (en photo ci-dessus) a dénoncé les mauvaises conduites sexuelles de l'élite juridique sud-coréenne, et du mot-clic #MeToo (motif de texte sur écran RGB version 25) par Wolfmann (CC BY-SA 4.0). (Mosaïque par Georgia Popplewell)

L'article d'origine, en anglais, a été publié sur Global Voices le 10 mars 2018. Sauf mention contraire, les liens ce cet article renvoient vers des pages en anglais.

Le mois de février 2018 a été compliqué pour la Corée. Le plus grand événement de sports d'hiver [fr] au monde s'est tenu dans trois villes de l'est, dont Pyeongchang, et a réuni des athlètes venus du monde entier qui ont ri et pleuré pendant des jeux très serrés. Mais dans tout le pays, de nombreuses Coréennes se livraient à une bataille d'une toute autre nature, plus longue, plus dure et solitaire.

Lorsque le mouvement #MeToo (#BalanceTonPorc en France) a commencé à prendre de l'ampleur, les médias coréens l'ont simplement cité dans leurs rubriques “nouvelles du monde”. Certains se sont réjouis et ont envié cette avancée sociale “étrangère”, alors que d'autres l'observaient de loin. Mais tout a changé le 29 janvier.

Ce jour-là, la procureure Seo Ji-hyun a donné une interview au journal télévisé de la chaîne coréenne câblée JTBC. Elle a révélé avoir été agressée sexuellement par l'un de ses supérieurs pendant un enterrement, en 2010. Madame Seo a fait remarquer qu'elle révélait cet incident huit ans après les faits, car elle avait réalisé que rien ne changerait si les victimes continuaient à garder le silence. Elle a également affirmé avoir connaissance d'un autre cas de viol impliquant des membres du parquet, mais n'a  pas donné plus de détails, considérant qu'il ne lui revenait pas de le faire. Son récit à la fois calme et ferme, narré par une femme qui a reçu les éloges officiels du ministère deux fois en quinze ans de carrière, a provoqué la fureur de ses compatriotes.

Alors que les révélations de madame Seo ont continué de secouer le pays, c'est un poème publié en décembre 2017 [fr] qui a ensuite attiré l'attention du public.

Le poème de Choi Yong-mi [fr] “Goemul” (“monstre” en coréen), décrit les agressions sexuelles de jeunes écrivains par un écrivain nommé “En”. Vers la fin du texte, le narrateur suggère que “En” a été nominé pour le prix Nobel de littérature. Le regard du public s'est donc immédiatement tourné vers le poète Ko Un [fr], nominé pour ce prix pendant quinze années de suite. Même si l'auteure, madame Choi, a souligné que Goemul est une oeuvre littéraire, beaucoup de Coréennes du milieu littéraire ont depuis déclaré avoir été victimes d'abus sexuels de la part de Ko Un depuis des dizaines d'années.

#MeToo se propage comme un feu de brousse

Le mouvement a continué avec le témoignage d'une actrice qui a accusé le célèbre réalisateur Kim Ki-duk de l'avoir violée. Deux autres actrices ont ensuite émis des accusations similaires envers le réalisateur.

Ce fut ensuite au tour de Lee Yoon-taek, le directeur artistique de Yeonheedan, l'une des plus célèbres troupes de théâtre coréennes, d'être accusé d'inconduite. Quand d'autres témoignages ont fait jour, M. Lee s'est excusé pour son comportement, mais a nié les accusations de viol.

Le suivant, l'acteur Oh Dal-soo [fr], surnommé “l'homme aux cent millions de spectateurs”, a d'abord nié les accusations de harcèlement sexuel, puis les a reconnues.

Vingt victimes ont témoigné avoir été agressées sexuellement par l'acteur et professeur à l'université de Cheongju Jo Min-ki. Le 9 mars 2018, celui-ci a été retrouvé mort [fr] dans l'immeuble de son appartement à Séoul.

L'acteur Jo Jae-hyun, lui, a été publiquement pris à partie par sa collègue Choi Yul. Elle lui a écrit par le biais de son compte Instagram qu'elle “attendai[t] que l'on découvre ce que tu avais fait”. Jo Jae-hyun a alors lui aussi reconnu sa culpabilité, et a ensuite démissionné de son poste à l'université de Kyungsung.

Cette prolifération de témoignages a conduit le président de l'association des acteurs coréens Choi Il-hwa à reconnaître qu'il avait lui aussi eu des comportements répréhensibles. C'était la première fois en Corée qu'un agresseur s'exprimait avant d'avoir été accusé. A la suite de ces aveux, des journalistes de la chaîne publique nationale KBS se sont alors exprimés et ont partagé leurs propres témoignages. Des récits estampillés #MeToo sont apparus de partout, révélant des agressions dans un grand nombre de secteurs de l'industrie coréenne.

Du divertissement à la politique

Les révélations #MeToo ont fini par atteindre le domaine de la politique. Ahn Hee-jung, l'ancien gouverneur de la province de Chungcheongnam a été le premier à être dénoncé, et par sa propre secrétaire. M.Ahn était le favori de son parti, actuellement au pouvoir, pour la prochaine élection présidentielle. A la suite de cette affaire il a rapidement démissionné [fr]. L'ancien député Jeong Bong-ju a pour l'instant renoncé à se présenter à la tête de la municipalité de Séoul après avoir lui aussi été accusé.

La vitesse à laquelle le mouvement s'est propagé, ainsi que son étendue, ont montré à quel point la Corée était mal préparée à réagir à ce genre de situations.

Comme le fait remarquer la procureure Seo elle-même, une contrainte légale pèse également sur les victimes. L'article 307 du code pénal sud-coréen, qui traite de la diffamation, stipule qu'une “personne qui calomnie une autre en dévoilant des faits supposés de manière publique” (et pas nécessairement des faits mensongers ou faux) “encourt une peine de prison de deux ans au plus ou une amende n'excédant pas cinq millions de wons” [environ 3.700 euros, NdT]. Le soutien de la société ne protège donc les victimes en rien.

Un seul des 556 cas d'abus sexuels dans le monde du travail rapportés en 2016 a été jugé. Sept victimes sur dix ont quitté leur emploi après avoir porté plainte. Entre 2012 et 2016, 9 cas seulement ont été jugés alors que 2.109 plaintes pour harcèlement sexuel avaient été déposées. Le CEDAW, le Comité pour la suppression des discriminations à l'égard des femmes, a d'ailleurs pointé ce chiffre du doigt à l'occasion de la session qui s'est tenue avant la publication de son 8e rapport périodique national.

#MeToo, vecteur de changement en Corée

Lentement mais sûrement, #MeToo fait évoluer la Corée du Sud.

L'éclosion des révélations du mouvement #MeToo a mis en lumière la gravité d'un phénomène qui était resté dans l'ombre pendant plusieurs décennies. La Corée du Sud s'était longtemps voilée la face en refusant d'écouter les victimes, et le mouvement a montré l'étendue et la sévérité du problème. Il a aussi révélé le rôle important que le pouvoir joue dans le harcèlement sexuel et le fait que, bien que l'âge et de la hiérarchie soient des notions centrales dans la société coréenne, ces comportements étaient totalement inacceptables.

Un soutien social important, et une leçon pour l'avenir

De nombreuses personnes ont montré leur solidarité avec les victimes, à la fois dans les rues et en ligne à travers le mot-clic #WithYou [“avec vous”, NdT]. De nombreux acteurs ont apporté leur soutien, suivis par des personnalités politiques.

Le 26 février, lorsque la police a effectué la première arrestation d'un agresseur dénoncé par le mouvement, le président Moon-Jae in a demandé à la police “d'enquêter activement” au sujet des accusations d'agressions sexuelles.

Environ une semaine plus tard, le 7 mars, à la veille de la 110e Journée internationale des femmes [fr], le président de la Commission nationale coréenne des droits de l'homme [ko], Lee Sung-ho, a publié une déclaration #WithYou. Il a affirmé à cette occasion que la commission allait étendre les enquêtes concernant les anciens officiels aux cas de harcèlement sexuel découlant d'un abus de position dominante.

Dans l'intervalle, le mouvement #MeToo s'efforce d'éduquer le public. Des débats publics ont insisté sur le fait que les victimes dont l'identité avait été révélée ne devraient pas faire l'objet de davantage de harcèlement. Des directives sur la couverture médiatique de ces sujets ont été proposées [ko]. Après tout, ces témoignages ne sont pas seulement des histoires à raconter, ce sont des expériences subies par des êtres humains bien réels.

Le temps a passé depuis que la déclaration de Seo Ji-hyun a lancé le mouvement #MeToo en Corée du Sud. Le nombre de témoignages explosifs a donné le ton et a créé un élan en faveur du changement. L'évolution qui en découlera reste encore à définir, mais il y a des raisons de se montrer optimiste. Les Coréens se sont rendus compte du pouvoir du peuple. Le souvenir des veillées aux chandelles qui se sont tenues plusieurs samedis de suite sur la place Gwanghwamun [fr] et l'éviction de la présidente Park Geun-hye [fr] en mars 2017 sont encore vivaces dans les mémoires.

Le message, à ce moment-là comme maintenant, était un appel pour une Corée meilleure. Seulement cette fois-ci, il est délivré sous la forme des mots-clics #MeToo et #WithYou.

WordFrames: ‘Migrants’ et ‘Réfugiés’ dans les médias français

mercredi 11 avril 2018 à 21:19
Atelier convention: chiffres

Atelier sur les demandeurs d'asile à la 1ère Convention française sur l'accueil des migrants, Grande-Synthe, 1er mars 2018. Photo: Suzanne Lehn. Utilisation autoriséee.

Avec la série WordFrames, NewsFrames de Global Voices explore le discours médiatique à partir des associations de mots, en comparant et contrastant leur usage et leur possible signification dans les discussions publiques.

La crise des migrants en Europe compromet la survie de l'espace Schengen”
– Christine Lagarde, directrice générale du FMI, Davos, 23 janvier 2016

Nous ne pouvons pas accueillir plus de réfugiés
– Manuel Valls, Premier ministre français, Munich, 12 février 2016

(diapositive ci-dessus extraite de la présentation lors de l'atelier sur les demandeurs d'asile)

Ces citations nous montrent que pour beaucoup de gens, parler de “crise” migratoire est devenu une banalité. Pourtant, l'immigration n'a rien d'une nouveauté en France. Nous avons donc voulu nous faire une idée de la façon dont cette vaste question est actuellement cadrée dans les médias français.

Notre exploration nous a d'abord apporté le terme immigrant, soit une personne qui pénètre dans une région ou un pays pour un séjour de longue durée ou avec l'intention de s'y établir. Nous avons ensuite recherché les termes migrant et migration qui décrivent le déplacement d'individus ou de groupes d'un lieu à un autre — quelque chose d'aussi vieux que l'humanité elle-même. Enfin, nous avons aussi examiné les mots asile et réfugiés. 

En creusant le sujet, nous avons voulu savoir si l'on pouvait en apprendre plus sur cette soi-disant crise à partir d'une exploration du traitement médiatique des immigrants, migrants, demandeurs d'asile et réfugiés.

L'horizon plus long de l'immigration en France

A grands traits, la France est devenu de plein gré un pays d'immigration après la fin de la deuxième guerre mondiale en 1945. Pendant les années de reconstruction après-guerre, la France connaissait une sérieuse pénurie de main d’œuvre, et les gouvernements désiraient attirer des travailleurs d'autres parties du monde.

Avant et après l'indépendance de l'Algérie, les ouvriers algériens ont contribué à la croissance de l'économie française, et ont été autorisés à faire venir leurs familles, ce qui a mené à la constitution d'une grandissante communauté musulmane. A la fin des années 1970, la France a aussi su se mobiliser pour accueillir plus de 100.000 boat-people vietnamiens fuyant leur pays après la chute du régime sud-vietnamien soutenu par les USA.

Mais, dans l'histoire plus récente, il y a un sentiment que les statistiques de l’immigration publiées en France manquent de détails et de transparence. Le pouvoir semble réticent à fournir des statistiques détaillées, et il y a des querelles récurrentes sur le nombre réel des “éloignements” (expulsions) — considéré par les gouvernements comme un indicateur significatif de l'efficacité de leurs politiques migratoires. Certains de ces expulsés reviennent de façon répétée, comme les Roumains (qui sont, précisons le, citoyens de l'U.E.) Pourtant, dès que l'on regarde de plus près la question de l'immigration, on relève quelques faits inattendus : ainsi, que l’Albanie était le premier pays d'origine des demandeurs d'asile en 2017. Cette relation malaisée avec les faits crée un fossé persistant entre discours et réalité, alimentant la suspicion, la méfiance, et l'exploitation des réactions de xénophobie. Ce qui se retrouve, de façon regrettable, dans le langage utilisé par des personnalités politiques pour évoquer les questions liées à l'immigration.

Comparons, par exemple, les déclarations fluctuantes de l'ex-premier ministre socialiste Manuel Valls, aujourd'hui député indépendant soutenant le parti LRM au pouvoir du président Macron.

En septembre 2016, premier ministre en fonctions, Valls s'exprimait en ces termes :

Manuel Valls a appelé jeudi à “éviter toute déclaration à l'emporte-pièce” sur la question des migrants, estimant que si la France doit prendre sa part dans leur accueil, elle est “loin d'être submergée”.

Redevenu député, Valls s'exprime à la radio le 21 janvier 2018 :

On a pu voir dans le glissement, de la France “loin d'être submergée” à  “nous n'avons pas besoin d'une nouvelle immigration” la preuve d'un changement de discours vers une posture plus intransigeante sur l'immigration de la part de nombreux secteurs de la sphère politique.

Une approche de fermeture à l'immigration qui n'a pourtant rien de neuf, comme on peut le voir dans ce discours à l'Assemblée nationale de 1989 du premier ministre socialiste d'alors, Michel Rocard :

Il y a, en effet, dans le monde trop de drames, de pauvreté, de famine pour que l’Europe et la France puissent accueillir tous ceux que la misère pousse vers elles.

Ses paroles ont été simplifiées par la suite en mantra “la France (et l'Europe) ne peuvent pas accueillir toute la misère du monde”, une formule réutilisée depuis par les politiques de tous bords pour proclamer que la limite de tolérance aux immigrants était atteinte sinon dépassée. Le président français Emmanuel Macron lui-même, défendant sa politique d'asile en novembre 2017, s'est référé aux propos de Rocard :

“La France est un pays généreux, mais elle ne peut pas prendre toute la misère du monde, comme disait Michel Rocard. Je ne peux pas tenir un discours démagogiquement dangereux sur ce sujet.”

Ces dernières années, la question de l'immigration et des migrants a pris une visibilité de plus en plus aveuglante — il suffit de se rappeler Calais et sa tristement célèbre “Jungle” — qui nourrit les succès électoraux grandissants des partis populistes de droite dans toute l'Europe et ailleurs.

La fracture rhétorique : demandeurs d'asile “accueillis” contre migrants économiques “éloignés”

Qu'est-ce que Media Cloud ?

Media Cloud est une plateforme open source développée par le Center for Civic Media du MIT et le Berkman Klein Center for Internet and Society de Harvard. Media Cloud a pour objet d'agréger, analyser, livrer et visualiser l'information tout en répondant à des questions quantitatives et qualitatives complexes sur le contenu des médias en ligne.

Pour commencer notre exploration, nous nous sommes servis de l'outil d'analyse de datas de Media Cloud (voir encadré ci-contre) pour trouver les thèmes en rapport avec immigration et migration dans plusieurs collections de médias français.

Pour essayer de voir comment les médias français représentent la question en France même, notre première requête a examiné les usages d’immigration (et de son mot associé immigrants) ainsi que de migration (et de son mot associé migrants) dans des phrases où ils se retrouvent avec le mot “France” dans les collections de médias français.

Nous sommes partis de novembre 2017 pour finalement resserrer la période considérée du 1er janvier au 21 mars 2018, ce qui a produit 146 articles liés à immigration et immigrants et 707 articles liés à migration et migrants.

Le nuage de mots suivant montre les mots-clés associés (par ordre de prévalence décroissante) communs au terme “immigration” :

Nuage de mots des résultats de requête avec le terme “immigration” du 01-01- 2018 au 21-03-2018.

Ci-dessous, quelques-uns des mots-clés visualisés sous forme de diagramme en bâtons. Les mots-clés le plus fréquemment associés avec les mots de recherche “immigration” et “migration” étaient loi, projet, ministre, asile, présentation, migrants, droit, musulmans, accueillir :

Word Nb 1

Les termes les plus fréquemment associés avec “Immigration”

Les résultats de recherche montrent que des thèmes-clé sont ceux en rapport avec loi, asile, migrants et musulmans. En creusant davantage pour commencer à analyser les articles associés aux mots, un exemple a émergé en particulier : le projet de loi “asile-immigration”.

Les principales dispositions du projet de loi “asile immigration”, présenté au Conseil des ministres en février 2018, visent à rallonger les durées maximales de rétention et à restreindre les possibilités d'appel. Pour “équilibrer” cet objectif, le gouvernement a prévue une composante “intégration”, avec des mesures pouvant être ajoutées ultérieurement au texte.

Comme on le voit par les articles cités ci-dessous, ce projet de loi fait polémique en France, avec de vifs échanges tant pour que contre sa mise en œuvre. Les défenseurs du texte appartiennent essentiellement au gouvernement et aux représentants du parti majoritaire, alors que ses détracteurs se trouvent dans le monde associatif et parmi les défenseurs des droits humains :

Asile et immigration : “Il faut être ferme parce que l'on ne peut pas accueillir tout le monde” Europe1, 19 février 2018 : Interview de la députée LREM qui sera rapportrice du texte à l'Assemblée Nationale :

“Je crois qu'il était important d'avoir ce texte qui nous permet de mieux accueillir, de mieux intégrer […] et puis aussi d'être plus efficace, d'être plus ferme sur les reconduites”, développe l'élue. “L'objectif est de montrer que l'on a une identité en France, qui est celle du droit d'asile. On va la préserver et l'améliorer”, assure-t-elle.

Loi asile et immigration : “Une logique de contrôle, de tri et d'expulsion” Europe1 20 février 2018, Interview du président de la CIMADE, ONG de défense des droits des migrants:

“[…] le projet qui sera présenté demain est un projet de loi résolument répressif, dont le centre de gravité penche considérablement vers une logique de contrôle, de tri et d'expulsion des personnes migrantes”, déplore le responsable associatif. “Il serait tout à l'honneur du gouvernement d'assumer cette logique répressive et de ne pas nous enfumer avec, soi-disant, des textes équilibrés”

Et nous voilà au cœur même du sujet : a-t-on raison ou pas de trier les arrivants, en créant des distinctions entre les catégories de migrants admis à entrer dans le pays.

Les tensions s'éclairent lorsque les thèmes dominants sont regroupés :

3 words Immigration

Combinaisons de 3 mots associées avec “immigration”.

Ces combinaisons aident à comprendre les mots-clés en contexte, en ce qu'elles montrent les mots qui le plus souvent précèdent ou suivent le mot-clé dans la phrase.

En examinant les combinaisons elles-mêmes, nous voyons d'intéressants nœuds de tension : “peut/doit accueillir les réfugiés” peut s'interpréter comme la tension entre une France qui se dit un pays humaniste défenseur des droits de l'homme, et sa politique réelle de fermeture à l'immigration ; et “tous migrants économiques”, comme un nœud de tension entre les réfugiés ‘accueillis’ et tous les autres à qui l'accès doit être refusé.

Cette idée que la France devrait ou non accepter plus de migrants cherchant à changer leur avenir économique se retrouve dans la défense par le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb du nouveau projet de loi “asile-immigration” :

Collomb se dit “obligé de faire” un tri entre les migrants
L'Express, 11 février 2018

“On ne peut faire de manière exponentielle un accueil vis-à-vis de tout le monde, comme un certain nombre de gens le voudraient. Ils disent ‘on n'a pas besoin de faire un tri, on ne doit pas choisir entre ceux qui ont besoin de l'asile et les migrants économiques’ . Si ! On est obligé de le faire parce qu'à un moment donné, nous ne pourrons pas donner un avenir à tout le monde

Dans ce passage, nous voyons M. Collomb argumenter pour la nécessité de sélectionner les gens — de séparer ceux qui fuient les guerres et les menaces (dont ils peuvent donner des preuves) et ceux qui tentent de trouver un meilleur travail.

Ainsi, le droit de la personne à la liberté de mouvement est-il entièrement dans le nom qu'on lui donne ?

De ‘migrants’ à ‘exilés’ : la dimension humaine

Afin de gommer la fracture rhétorique entre demandeurs d'asile “acceptés” et migrants économiques “refusés”, et, plus généralement, de promouvoir une vision humaine d'individus ayant un nom et un destin, de nombreuses associations et défenseurs des droits humains avancent le mot “exilés” à la place de migrants.

Un “exilé” est une personne qui a été contrainte par une raison quelconque (par choix ou par force) à quitter son pays d'origine et à s'installer dans un pays étranger. Nous avons ajouté ce terme dans notre deuxième recherche, à côté du terme “migrant”, pour voir si le mot “exilé” apportait un éclairage intéressant à la perception des migrants dans le contexte français.

Exil* donne des mots-clés apparus dans l'actualité récente, et s'appliquent toujours d'abord à l'ex-président catalan Carles Puigdemont (203 mentions en deux mis et demi), qui a fui en Belgique pour échapper à son arrestation par les autorités espagnoles ; et à l'ex-espion russe retrouvé apparemment empoisonné au Royaume-Uni (89 mentions ‘Londres’ et 84 ‘mort’), tandis que “migrants” en compte 56.

Le nuage de mots Migrant* produit : Calais ; associations (qui condamnent la politique de l’État et les violences policières) ; Macron ; et de nombreuses références au vocabulaire juridique et administratif lié aux procédures instituées par l’État.

Ce nuage de mots reflète le fait que dans le laps de temps retenu pour notre recherche, la ville de Calais (qui se trouve être surtout, malgré elle, une zone de transit pour les migrants à destination de l'Angleterre) fait régulièrement l'actualité, surtout avec les ‘rixes‘ et les ‘violences‘ ‘entre‘ migrants/réfugiés dont certains se retrouvent ‘entre la vie et la mort‘, qui ont fait plusieurs ‘mort‘ et ‘blessés‘. Les passeurs sont à la racine de ces affrontements territoriaux pour le contrôle des parkings sur lesquels les migrants, avec leur aide chèrement payée, grimpent et se cachent dans les poids lourds en attente de franchir la Manche :

France: cinq migrants entre la vie et la mort à Calais après des affrontements RFI, 1er février 2018

« Le conflit entre Afghans et Africains a toujours été sous-jacent. C'est malheureusement un schéma classique » de voir des affrontements entre eux, a commenté une source préfectorale.

Les relations entre le gouvernement et les associations se sont aigries :

Migrants à Calais : Macron dénonce les “mensonges” de certaines associations L'OBS 16 janvier 2018:

La rupture entre le milieu associatif et l'exécutif est consommée depuis plusieurs semaines, notamment après la décision du ministère de l'Intérieur d'autoriser des équipes à vérifier la situation légale des migrants dans les centres d'hébergement.

Nous constatons que les références à Calais sont absentes de notre requête sur “exilés”, d'où il ressort que les médias n'envisagent pas les gens à Calais comme des exilés, mais plutôt comme des migrants, donc des personnes en déplacement. Cette conception des migrants ou flux migratoire sous-entend généralement qu'il faut agir pour prévenir toute “fixation” et tout “appel d'air“,une absorption étant supposée attirer toujours plus de nouveaux arrivants.

Ce graphique de combinaisons de trois mots nous donne des indications intéressantes sur “migrants”, en montrant la prévalence des préoccupations administratives et de gestion :

Trigrams Migrants

Vombinaisons de 3 mots associées avec “Migrants”.

Pour résumer brièvement notre recherche, les mots qui prédominent dans le cadrage de la question de l'immigration et des migrants peuvent être caractérisés comme généralement négatifs : abondent les termes qui renvoient à la crise, aux limitations par la loi, ou au danger tant pour des pays de destinations débordés que pour les migrants eux-mêmes.

Quelques réflexions pour conclure

Retour à la scène mondiale : une crise paraît bien exister s'agissant des déplacements forcés, et la tendance est probablement là pour durer avec les précisions de nombres grandissants de “réfugiés climatiques”. Mais la France en fait-elle assez pour utiliser son plein potentiel d'accueil ?

Des médias, des personnalités publiques et des spécialistes disent que la réponse à cette question est “non”. En réalité, certains travaillent inlassablement à rétablir les faits, à alerter sur les violations des droits des migrants, et à dénoncer la violence de l’État contre les populations vulnérables. Certains constatent que la couverture médiatique immigration/migrants a des lacunes importantes, qu'ils œuvrent à combler. C'était l'un des objectifs de la récente Convention Nationale sur l'Accueil et les Migrations française de mars 2018, une rencontre de divers acteurs de la défense des droits et du soutien aux migrants.

Pour certains, cela revient à ceci : appeler les gens “migrants” est une façon de les catégoriser comme des gens qui bougent, donc par définition ils doivent continuer à bouger et n'ont rien à faire “chez nous”.

Le sociologue et blogueur français Eric Fassin explique le pouvoir des noms que nous donnons aux gens dans le contexte de l'immigration :

“L’émigré, c'est celui qui est parti, l'immigré, c'est celui qui est arrivé, le migrant c’est celui qui n’a pas ‘vocation’ à être ici, ni nulle part : il ne fait que se déplacer”.

Dans cette situation complexe, les solutions à cette situation exigent de nous de changer les termes mêmes de notre traitement de l'information. Tant que le mot “migrants”, dépourvu de toute véritable signification juridique, et qui pour cela, selon l’ONU et les ONG, devrait être utilisé avec précaution pour éviter idéologies et ambigüités, sera utilisé comme cadrage, il n'y aura pas de remèdes durables à l'horizon.

“Women Make the News” : une base de données en ligne relie les journalistes à des spécialistes thaïlandaises

mercredi 11 avril 2018 à 20:06

Site web de « Women Make the News »

Les liens de ce billet renvoient vers des pages en anglais.

Alarmé par le faible nombre de spécialistes femmes interviewées dans les médias traditionnels, le bureau de l'UNESCO à Bangkok a lancé un site web qui relie les journalistes et les chercheurs thaïlandais à des femmes universitaires, fonctionnaires, chefs d'entreprise et militantes d'ONG.

La base de données « Women Make the News » (en français : les femmes font l’actualité) a été lancée en 2017 pour promouvoir l'égalité des sexes dans les médias et la société. Elle fournit une liste de contacts de spécialistes femmes afin de faire entendre davantage de voix féminines dans les reportages d'actualités.

Le Bureau de l'UNESCO à Bangkok a cité une étude réalisée en 2014 par le service public de radiodiffusion thaïlandais qui a révélé que seulement un expert sur quatre interrogés en un mois de reportages télévisés thaïlandais était une femme.

Mais les femmes spécialistes ne manquent pas en Thaïlande. Une autre étude a révélé qu'environ 53 % de tous les scientifiques du pays sont des femmes. En outre, les femmes représentent environ 37 % des personnes occupant des postes de direction dans le monde des affaires. La Thaïlande est aussi l'un des six pays du monde où il y a autant de femmes que d'hommes qui créent des entreprises.

« En Thaïlande, environ 53 % de tous les scientifiques sont des femmes. Les femmes représentent environ 37 % des personnes qui occupent des postes de direction dans le monde des affaires. La Thaïlande est l'un des six pays du monde où il y a autant de femmes que d'hommes qui créent des entreprises. Pourtant… seulement 24 % des experts interviewés par les médias thaïlandais sont des femmes ». Source : UNESCO Bangkok

Le projet « Women Make the News » a été conçu en réponse à la représentation dominante des femmes comme victimes, figures familiales et objets sexuels. Il a trois objectifs spécifiques :

Relier les journalistes basés en Thaïlande avec des voix de spécialistes féminines.

Accroître la visibilité des femmes spécialistes thaïlandaises et des voix féminines dans l'actualité.

Souligner la diversité de l'expertise féminine en Thaïlande et encourager une plus grande participation des femmes dans la société.

Au moment de la rédaction de cet article, la base de données compte près de 300 femmes spécialisées dans des domaines où l'on a constaté un déséquilibre entre les sexes dans la couverture de l'actualité. Il s'agit notamment des médias, des TIC (technologies de l'information et de la communication) et de l'innovation, de la culture et de l'histoire de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN), ainsi que de l'environnement et du changement climatique. Le public est invité à proposer davantage d'expertes et à inviter d'autres femmes leaders à faire partie de la base de données.

Capture d'écran du site web « Women Make the News »

L'utilisation de la base de données est assez facile. La fonction de recherche de l'outil permet aux utilisateurs de trouver des expertes par domaine, lieu, secteur et thème.

Lorsque l'auteur de cet article a recherché une experte d’« Internet » à Bangkok, la base de données a répertorié plusieurs expertes qui sont affiliées à des institutions comme les universités de Thammasat et Chulalongkorn, ainsi qu'une ancienne vice-ministre de l'éducation.

Chaque profil contient les coordonnées et une brève biographie de l'experte. Par exemple, voici le profil d’une cadre active dans le domaine des droits de l'homme, Angkhana Neelapaichit :

Capture d'écran du profil d'Angkhana Neelapaichit. Source: « Women Make the News »

Un an après son lancement, le bureau de l'UNESCO à Bangkok a reconnu que cet outil avait un impact limité :

Une enquête de l'UNESCO visant à mesurer la portée de la base de données a révélé que si la moitié des femmes de la base de données ont été contactées pour une interview, la majorité des journalistes interrogés n'étaient pas au courant de son existence.

Pour remédier à cette situation, un atelier a été organisé avec plusieurs groupes de médias thaïlandais à temps pour la célébration de la Journée internationale des droits des femmes au début du mois de mars 2018.

Pour en savoir plus sur l'utilisation de la base de données en Thaïlande aujourd'hui, visionnez cette courte vidéo :