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A la recherche des cadrages avec Media Cloud, pour une lecture et écriture consciente de l'information

mardi 30 janvier 2018 à 19:53

Politique et gouvernement, manifestations et émeutes, agriculture, paysans, alimentation : les cinq thèmes les plus fréquents détectés dans les articles sur les manifestants de paysans en Inde, en utilisant un modèle d'apprentissage-machine mis au point au Media Lab du MIT, Comment les actualités indiennes ont couvert les manifestations paysannes de 2017 : Etude quantitative. Utilisation autorisée.

(Entretien originellement publié le 5 janvier sur le site de NewsFrames)

Un des privilèges que donne le travail avec le projet NewsFrames, ce sont les opportunités offertes de penser en profondeur le défi du cadrage dans les médias — comment définir le problème étudié, par exemple, ou les valeurs à la base de sa perspective.

Dans ce récent échange avec les gens de Media Cloud, une plate-forme open source pour l'étude des écosystèmes médiatiques, qui est aussi un partenaire de NewsFrames, nous réfléchissons à un autre aspect du cadrage (framing en anglais) : qui est affecté par la manière dont les récits sont présentés ? Considérons, par exemple, le traitement journalistique des manifestants. Dans cet entretien, les chercheuses Anushka Shah et Natalie Gyenes se penchent avec nous sur les implications.

Global Voices: Quelle est votre définition de “frame (cadre)” ou “framing (cadrage)” ?
Anushka: Nous avons beau être un organisme de recherche sur les médias, la définition du ‘framing’ou cadrage est la question à un milliard de dollars à l'intérieur de notre équipe !

Je le comprends comme une perspective particulière choisie pour représenter un sujet. Imaginez que vous êtes photographe et que votre tâche est de raconter l'histoire d'un parc de quartier en une seule image.

Vous pouvez choisir de prendre une photo de deux frères et sœurs s'amusant sur la balançoire pour présenter le parc comme un espace sûr et joyeux, ou bien zoomer sur les seringues vides jonchant le sol autour du banc pour montrer qu'en fait il est tout le contraire. Vous pourriez centrer sur les arbres et le feuillage pour montrer l'importance de préserver des espaces verts dans la ville, ou sur l'organisme communautaire qui utilise ce lieu pour des rencontres et la mise sur pied d'activités de quartier. Chacun de ces cadrages nous raconterait une histoire différente sur le rôle du parc.

Natalie: C'est une très bonne question, et l'exercice de réflexion d'Anushka est en plein dans le mille. Nous en avons énormément discuté dans notre groupe, pour trouver que parler de la définition spécifique du cadrage est liée au domaine, ou à la “focale” avec laquelle quelqu'un aborde la question.

Ma compréhension du cadrage est qu'il englobe la diversité des manières dont l'information peut être emballée et présentée à une audience. Une même information peut être partagée différemment selon le contexte dans lequel elle est placée.

Global Voices: Pouvez-vous nous donner un exemple?
Anushka: Les récits des médias sont pleins de cadrages. Prenons l'exemple de la couverture aux USA de l'ouragan Maria à Porto Rico par rapport à celle de l'ouragan Harvey à Houston, Texas. Quand nous avons utilisé notre plateforme Media Cloud pour étudier la différence linguistique dans la couverture, nous avons constaté que le traitement de Harvey se centrait sur l'humain : les souffrances des victimes, comment faire des dons, le matériel nécessité sur le terrain. Maria de son côté se focalisait sur le politique : les tweets de Trump, les ripostes du maire de Porto Rico, et le rôle de la FEMA, l'agence fédérale étasunienne de gestion des situations d'urgence.

La différence de cadrage s'explique peut-être parce que les organes de médias ont senti une lassitude de leurs lectorats alors que Maria était la troisième catastrophe à la suite, ou bien, comme on le voit souvent dans la couverture de populations minoritaires, on s'intéresse moins pour elles à l'angle humain.

Natalie: Pensons aussi aux points de vue partagés dans les narratifs médiatiques, et comment ceux représentés par les médias peuvent contribuer à façonner ce que le public pense sur une question. Prenons comme exemple la collaboration dans les débuts entre NewsFrames et Media Cloud quand nous avons utilisé nos outils pour explorer comment les thèmes autochtones sont couverts dans les média.

Notre examen de la couverture médiatique relative au Dakota Access Pipeline (DAPL) a mis au jour comment les médias traditionnels décrivaient la question avec un cadrage différent de celui utilisé par les tribus amérindiennes de la réserve de Standing Rock dans le Dakota du Nord. Dans des entretiens avec des Amérindiens, comme dans les sources médiatiques amérindiennes, les individus se déclaraient “protecteurs de l'eau”, ce qui est très différent du fort cadrage “protestataires” prévalant dans les médias dominants. Utiliser ce cadre de “protestataires” détourne la focalisation des thèmes plus vastes et systémiques de l'accès à la terre et de la qualité de l'eau, pour ne voir que les événements immédiats se produisant en opposition au pipeline. Et cela écarte la prise en compte des communautés locales dans la couverture médiatique.

Global Voices: On peut supposer que vous trouvez important que l'on comprenne le cadrage, puisque c'est votre domaine de travail. Mais pourquoi est-ce important, et/ou quels sont les défis en ce moment même ?

Anushka: Je pense que l'étude des cadrages est très importante, car les intentions et motivations leur sont étroitement liées. Pourquoi choisissons-nous de raconter une histoire plutôt qu'une autre ? Identifier un cadre nous permet de pénétrer les motifs de l'auteur de ce cadre, ce qui est essentiel pour connaître les distorsions à l'intérieur de l'information qui nous est présentée.

J'aime lire les informations plutôt politiquement orientées à gauche qu'à droite, mais une plus grande conscience des cadrages m'a fait me rendre compte que je ne fais peut-être que confirmer mes partis-pris au Iieu de vraiment chercher à savoir ce qui se passe dans le monde. Le défi maintenant, c'est, comment arriver à savoir ce que je ne sais pas ? Comment aller au-delà de ma zone de confort tout en sachant que je serai mal à l'aise ?

Natalie:
J'ai l'impression que la simple conscience du concept de cadrage est importante : comprendre que ce que nous lisons est filtré ou contextualisé nous aide à devenir des consommateurs plus critiques d'information. Et, comme l'a dit Anushka, cela peut aussi fournir un exercice important de mise en perspective.

L'attention médiatique est un aspect important du cadrage : “Pendant au moins deux jours, ‘neutralité du net’ a été un terme de recherche plus populaire que ‘Kanye West’, ‘Kim Kardashian’, et même ‘Justin Bieber’ (USA seuls) – extrait de Net Neutrality, Kanye, and Hot Dogs sur le blog de Media Cloud.

Qu'est-ce qui à votre avis serait à la portée des auteurs et lecteurs ordinaires d'informations en matière de cadrage ?

Anushka: Je pense qu'en tant que lecteurs d'informations nous devons commencer à aborder les contenus avec la même tolérance que nous préconisons pour aborder les personnes. Nous pouvons ne pas aimer ce que dit quelqu'un à l'autre bout du spectre, ce n'en est pas moins important de l'entendre car nous avons probablement quelque chose à en apprendre. Ça ne veut pas dire que nous devons forcément l'approuver.

En pratique, c'est difficile de lire du contenu très loin à gauche ou très loin à droite de sa position, mais si vous êtes un lecteur du New York Times aux États-Unis, lisez peut-être un peu plus le Wall Street Journal ou regardez Chris Wallace dans l'émission Fox News Sunday et vice versa.

Au-delà des affinités partisanes, en lisant sur des sujets, essayez d'interagir davantage avec le contenu en vous posant des questions comme : Qui est affecté par cette question ? Comment pourraient-ils ressentir ce cadrage ? Ce cadrage est-il centré sur un angle juridique, politique, économique ou social, et à quoi ça ressemblerait avec les autres ? Par exemple, les narratifs des médias sur l'agression sexuelle sont dominés par un cadrage policier-judiciaire, sans prendre en considération les effets psychologiques et sociaux sur les femmes.

Global Voices: Pouvez-vous nous parler un peu de vous-mêmes ?

Anushka: Je suis chercheuse spécialisée sur le projet Media Cloud au Media Lab du MIT.

Natalie: Je suis une crack auto-proclamée en santé mondiale, optimiste invétérée, et conteuse en formation. Beaucoup de ce que j'apprends et fais en ce moment provient de mon activité de post-doctorante au Berkman Klein Center et de chercheuse associée dans le projet Media Cloud au Media Lab du MIT.

Global Voices: A propos, où vivez-vous et quelles langues parlez-vous ? Nous sommes une communauté internationale et aimons connaître les environnements d'où parlent les personnes.

Image : Anushka Shah.

Anushka: Je passe environ les deux tiers de mon temps à Cambridge, Massachusetts, et le dernier tiers à Mumbai, où j'ai grandi et que je considère toujours comme chez moi !

Je parle anglais, hindi (la langue nationale de l'Inde), marathe (la langue de l’État où se situe Mumbai), gujarati (ma langue maternelle), et français !

Natalie: Je suis une citoyenne de la Pangée ! Je suis une Canadienne vivant à Toronto, au Canada, en ce moment, mais je suis aussi Suédoise. J'ai la chance d'avoir été entourée par un assortiment varié de langues à la maison : anglais, hébreu, hongrois, français, polonais et cantonais. Je travaille à m'améliorer sur toutes, y compris l'anglais :)

Cet entretien a été condensé et adapté.

Dans les “restaurants Jatayu” népalais, les vautours peuvent enfin se nourrir sans diclofenac

lundi 29 janvier 2018 à 21:59

Vautour de l'Himalaya au restaurant des vautours de Nawalparasi, au Népal. Photographie de Sagar Giri, reproduite avec autorisation.

Sauf mention contraire, les liens de cet article renvoient vers des pages en anglais.

Ils sont grands, plutôt moches et ont une mauvaise réputation. Bien que les vautours [fr] aient toujours été au cœur d'une relation amour-haine avec les humains, ils sont aussi nos alliés naturels. Ce sont principalement des charognards qui jouent un rôle important dans le processus de la mort dans la nature. En se nourrissant de grandes quantités de chair, ils contribuent à limiter la propagation des bactéries et des maladies des cadavres d'animaux en décomposition. Cependant, malgré ce rôle tampon essentiel, ils sont plus souvent considérés comme des nuisibles que comme des oiseaux importants.

Ainsi que l'a montré une étude de 2007, la population des vautours chaugouns (Gyps bengalensis) en Inde a décliné jusqu’à seulement 0.1 % de son niveau du début des années 1990. Dans l'ouest du Népal, la population de cette même espèce a diminué de 25 % entre 2002 et 2009. De la même manière, les populations de vautours indiens (Gyps indicus) et de vautours à long bec (Gyps tenuirostris) ont aussi diminué dramatiquement dans tout le sous-continent indien. Cette tendance n'est malheureusement pas limitée à l'Asie du Sud et le nombre de vautours diminue dans le monde entier. La pénurie de nourriture, les collisions avec des constructions humaines et l'empoisonnement sont, entre autres, mis en cause.

Pour lutter contre ce déclin, quelques pays ont monté un projet de sauvegarde intéressant : les restaurants Jatayu, ou restaurants pour vautours.

Un restaurant pour vautours géré par les villages

Pour restaurer les populations de vautours, des stations d'alimentations ont été créées dans plusieurs pays asiatiques : au Cambodge, en Inde, au Pakistan et au Népal. Dans ce dernier, elles sont gérées par les villages voisins et ont été surnommées restaurants Jatayu [fr], d’après un personnage révéré du Ramayana [fr], une fresque épique hindoue. Jatayu est le nom sanskrit du vautour.

Si vous êtes au Népal et que vous aimez la nature, visitez le restaurant Jatayu, ce sera une expérience unique. J'étais hypnotisée.

Ces “restaurants” se procurent du bétail âgé et improductif auprès de fermiers et prennent soin des animaux jusqu’à ce qu'ils meurent de vieillesse. Les éleveurs sont heureux de remettre leurs vieux animaux à ces restaurants car ils savent que les bêtes y seront bien traitées.

A scene from a vulture restaurant in Western Nepal — dead animals are offered to vultures at this site only after ensuring that the carcasses are free of Diclofenac. The vultures had been disappearing owing to the use of this medicine for treating livestock. The vulture numbers were on a decline since the poor birds died of kidney failure after eating Diclofenac laced carcass. After the introduction of these restaurants throughout Nepal's southern plains, the vultures are returning back. And the conservationists are happy! ———- #vulture #vulturerestaurant #diclofenac #vultureconservation #terai #Nepal #conservation #jatayurestaurant #southasia

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Quand une bête meure, elle est servie aux vautours, une fois que des tests ont montré qu'elle ne contenait pas de diclofénac.

Le diclofénac, le médicament-tueur responsable de l'extermination massive des vautours

L'utilisation de diclofénac [fr] pour soulager la douleur chez les animaux d'élevage est l'une des causes principales du grand nombre de morts de vautours au Népal, en Inde et dans d'autres pays d'Asie du Sud. Même de faibles doses de diclofénac peuvent être fatales aux vautours car elle provoquent une insuffisance rénale. Quand les reins cessent de fonctionner, la concentration d'acide urique augmente dans le sang des oiseaux et l'acide se cristallise autour de leurs organes internes.

Comme les vautours se nourrissent en groupe, une seule carcasse contenant du diclofénac peut provoquer la mort d'un grand nombre d'oiseaux.

Le médicament a été interdit en Inde, au Népal et au Pakistan en 2006 et au Bangladesh en 2010. Grâce à ces interdictions et à d'autres initiatives de protection de plusieurs organisations, dont des villages, ces espèces d'oiseaux “en voie de disparition” commencent à se remettre.

Ces restaurants pour vautours sont également devenus des attractions touristiques pour visiteurs domestiques et internationaux et représentent une source de revenus supplémentaires pour les villages voisins. Ceux-ci se sont aussi mis à vendre la peau et les os du bétail pour en faire du cuir et de l'engrais.

Grâce à la popularité croissante des restaurants Jatayu et des revenus qu'ils apportent aux villages, les gens qui détestaient et évitaient les vautours commencent à changer d'avis. Lentement mais sûrement, la mauvaise réputation dont souffraient ces oiseaux se transforme en une meilleure compréhension de leur importance dans le cycle de la vie et de la mort.

Unforgettable experience watching 150 #himalayan and red-headed vultures feeding on carcass in the Himalayas. So important to support and conserve these amazing animals. Thanks @kat_smith92 and @parahawking ! #vultures #himilayanvulture #redheadedvulture #vulturefeeding #birdsofprey #wildlife #himalayas #himalayantravel #river #landscape #carcass #cadaver #animalspotting #birdwatching #vulturerestaurant

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Si avez envie de voir ces grands oiseaux de près, vous pouvez visiter l’un des restaurants Jatayu gérés par les villages des districts de Nawalparasi, Rupandehi, Dang, Kailali ou Kaski.

L'Iran suspend des milliers de peines de mort liées à la drogue

lundi 29 janvier 2018 à 17:24

Un garde se tient près d'une corde durant une exécution publique en Iran. Image fournie par le Centre iranien des droits de l'homme.

Cet article est une version révisée d'un article initialement publié sur le site internet du Centre iranien des droits de l'homme [en]. Sauf mention contraire, les liens renvoient vers des pages en anglais.

Environ 4.000 détenus iraniens actuellement condamnés à mort pour des crimes en lien avec la drogue pourraient voir leur peine annulée suite à une ordonnance judiciaire reposant sur la modification récente de la loi sur le trafic de drogues.

Cette ordonnance [fa], délivrée le 9 janvier 2018 par le chef de l'autorité judiciaire Sadegh Larijani, suspend les peines de mort pour les crimes liés à la drogue en attendant l'examen de ceux-ci. Elle exige également que les juges annulent toutes les peines de morts ne satisfaisant pas les nouveaux critères établis par le parlement vis-à-vis de la peine capitale.

Le 14 octobre 2017, le Conseil des gardiens, qui vérifie la conformité des lois avec les principes islamiques, a approuvé la modification de la loi contre le trafic de drogues après son adoption par le parlement, en dépit des efforts menés par les agences de sécurité pour mettre fin au projet d'amendement.

Cette évolution survient après des années de luttes domestique et internationale pour la défense des droits de l'homme. L'Iran est un des pays au monde au plus fort taux d'exécution par habitant. Plus de 500 personnes ont été exécutées en 2017, dont la vaste majorité pour des cas mineurs de trafic de drogue, y compris pour possession de petites quantités de drogues illégales.

Environ 5.000 personnes, la plupart de moins de 30 ans et ayant commis leur première infraction, se trouveraient dans le couloir de la mort en Iran avant le passage de l'ordonnance judiciaire concernant les crimes liés à la drogue. Les données recueillies par le Centre iranien des droits de l'homme indiquent qu'au cours des 12 mois précédant l'amendement en octobre 2017, au moins 270 prisonniers ont été exécutés pour des crimes liés à la drogue qui ne sont dorénavant plus passibles de la peine de mort.

L'ancien député Ali Akbar Mousavi Khoeini a déclaré au Centre iranien des droits de l'homme qu'il avait contribué à l'organisation de plusieurs réunions à Genève, il y a deux ans, entre des représentants des droits de l'homme aux Nations Unies et des représentants iraniens de la lutte anti-drogue :

I see this as a good omen. It has come a bit late but it will still save the lives of many human beings. I’m happy to see these efforts have led to constructive decisions by Parliament and the judiciary to reduce executions. I hope the amendment to the drug law will become a benchmark for future judicial reform to strengthen justice, freedom, peace and progress in Iran.

Je vois cela comme un bon présage. Cela arrive un peu tard mais cela sauvera la vie de nombreux êtres humains. Je suis heureux de voir que ces efforts ont mené à des décisions constructives de la part du parlement et du pouvoir judiciaire pour réduire les exécutions. J'espère que la modification de la loi relative aux drogues pourra servir de référence aux futures réformes judiciaires afin de renforcer la justice, la liberté, la paix, et le progrès en Iran.

En vertu de l'amendement de la loi, la peine capitale pourra uniquement être imposée dans des cas de condamnations liées à la drogue impliquant :

Yahya Kamalipour, le président adjoint du comité parlementaire iranien des affaires juridiques et judiciaires, a déclaré [fa] le 30 octobre 2017 :

By our estimation, 4,000 of the 5,000 prisoners convicted of drug charges will be saved from execution. I was a judge and prosecutor for 20 years so I’m well aware of the situation facing these prisoners and their families.

Ninety percent of the prisoners on death row for drug crimes were just unfortunate mules carrying drugs to pay for their daughter’s dowry or an operation for their mother.

Selon nos estimations, 4.000 des 5.000 détenus reconnus coupables d'infractions liées à la drogue échapperont à leur exécution. J'ai été juge et procureur pendant 20 ans, donc je suis bien conscient de la situation à laquelle ces détenus et leur famille font face.

Quatre-vingt-dix pour cent des condamnés à mort pour des affaires de drogue n'étaient que de malheureux individus qui transportaient des drogues pour payer la dot de leur fille ou bien une opération à leur mère.

Netizen Report : Le gouvernement du Brésil peut-il utiliser Google pour manipuler l'opinion publique ?

lundi 29 janvier 2018 à 13:04
Manifestations contre le Président Temer à São Paulo, août 2016. Rovena Rosa / Agência Brasil via Wikimedia Commons (CC BY 3.0)

Manifestations contre le Président Temer à São Paulo, août 2016. Rovena Rosa / Agência Brasil via Wikimedia Commons (CC BY 3.0)

Le Netizen Report de Global Voices offre un aperçu des défis à relever, des victoires obtenues et des tendances émergentes en matière de libertés numériques dans le monde.

Un article paru le 12 janvier sur le site de O Globo, [fr] l'un des quotidiens les plus lus au Brésil, soutient que le gouvernement brésilien cherche à collaborer avec Google pour personnaliser les résultats de recherche des utilisateurs brésiliens, en fonction de leur localisation et éventuellement d'autres caractéristiques.

Selon l'article de O Globo, qui n'a pas mentionné ses sources, le gouvernement espère adapter les résultats de recherche relatifs à un projet de loi controversé sur la réforme des retraites, sur lequel le Congrès devrait voter à court terme. Google n'a fait aucune déclaration publique à ce sujet.

Le journal O Globo rapporte que des membres de l'administration du président Michel Temer ont rencontré les représentants de Google au début de janvier pour discuter de la possibilité de diriger les requêtes des utilisateurs vers le contenu officiel produit par le gouvernement. Selon l'article :

Cela fonctionnerait plus ou moins comme suit : un travailleur rural qui cherche “réforme des retraites” verrait le contenu qui explique que cette catégorie de travailleurs ne sera pas affectée par la version actuelle du projet de loi.

Le projet de loi sur la réforme des retraites, très impopulaire, est l'élément le plus audacieux du plan d'austérité de Temer, qui vise à maîtriser le déficit public. Depuis la fin de 2016, le gouvernement a eu du mal à obtenir le soutien du projet de loi au Congrès et en a proposé une version plus modérée. Les enjeux sont encore plus élevés maintenant que les législateurs s'inquiètent du fait que l'approbation d'un projet de loi aussi impopulaire nuira à leurs chances de réélection en octobre.

Si Google acceptait une telle proposition, l'entreprise saperait ses propres arguments antérieurs concernant le service qu'elle fournit. Dans de nombreuses procédures judiciaires, y compris dans plusieurs affaires au Brésil, les avocats de Google ont soutenu que le moteur de recherche est un “intermédiaire neutre”, un système algorithmique conçu pour montrer aux utilisateurs des informations “pertinentes”, selon un ensemble de calculs (hautement subjectifs) pour en déterminer la pertinence.

L'idée soulève également des questions importantes sur la portée du Marco Civil da Internet du Brésil, ou cadre civil pour Internet. Adoptée en 2015, peu avant le début du processus de destitution de l'ancienne présidente Dilma Rousseff, la loi protège la neutralité du réseau en interdisant “la discrimination ou la manipulation des données à des fins commerciales tout en les autorisant dans les situations d'urgence. Elle ne traite pas explicitement de la discrimination de contenu à des fins politiques.

La coalition au pouvoir en Éthiopie paie des gens pour promouvoir son programme – et harceler ses opposants

Une série de documents gouvernementaux et d'enregistrements de tchats, divulgués par des sources soupçonnées d'être internes, révèle que le gouvernement éthiopien rémunère des commentateurs des médias sociaux [fr] pour influencer les conversations en ligne en faveur du gouvernement. Parmi les documents figure une liste de personnes et les montants précis qui leur ont été versés pour des publications pro-gouvernementales et anti-opposition. La plupart des personnes sur la liste sont déjà des fonctionnaires. Les révélations sont cohérentes avec des campagnes en ligne de plus en plus agressives, pro-gouvernementales et anti-opposition, qui ont coïncidé avec une augmentation du discours haineux en ligne et de la persécution de journalistes indépendants.

Le régulateur mexicain met en danger un réseau téléphonique communautaire par le retrait d'une clause dérogatoire

Indigenous Community Telecommunications, la première et seule association mexicaine de fournisseurs de services communautaires indigènes, pourrait être forcée de cesser ses activités [fr] après que le régulateur national des communications du Mexique lui réclame un million de pesos pour les fréquences radio qu'elle utilise. Indigenous Community Telecommunications a demandé une exemption de paiement, car ils sont sans but lucratif et n'ont aucune utilisation commerciale, ce qui a été accepté dans le cadre de leur accord de licence initial. Un an après le début des opérations, leur demande d'exemption a été refusée. Le groupe conteste la décision.

L'ordre de bâillonner les médias sociaux s'étend aux employés de l'université au Jammu-et-Cachemire

Cette semaine, les professeurs et le personnel de l'Université de Jammu, dans l'Etat du Jammu-et-Cachemire, au nord de l'Inde, ont appris qu'un règlement de 2017 écartait les agents publics de certains types de discours sur les médias sociaux. Le règlement de 2017 indique que «les agents publics doivent s'abstenir de toute conduite délinquante, malhonnête, immorale ou notoirement scandaleuse sur les médias sociaux qui pourrait être préjudiciable au gouvernement».

L'Iran a une loi sur l'accès à l'information – et le Présent Rohani veut commencer à l'utiliser

Les manifestations qui ont éclaté en Iran à la fin du mois de décembre pourraient donner l'occasion au gouvernement de mettre en pratique la loi sur l'accès à l'information, adoptée en 2009, mais qui n'a pas encore été entièrement appliquée. À la suite de ces manifestations, le Président iranien Hassan Rohani a prononcé un discours sur l'importance de la transparence dans la gouvernance, affirmant : «Nous n'avons d'autre moyen que la clarté pour éradiquer la corruption;  nous devons tous aller à l'intérieur d'une salle de verre afin que les gens puissent voir tout ce que nous faisons».

Un navire en train de sombrer succombe à la censure en vertu de la loi allemande contre les discours haineux

Twitter a bloqué le compte du magazine satirique Titanic dans le cadre de la nouvelle loi allemande contre le discours de haine, NetzDG. Le compte du magazine a été fermé pendant 48 heures après qu'il a republié un post supprimé parodiant les tweets anti-musulmans d'un politicien allemand d'extrême droite, selon la Columbia Journalism Review. La loi donne aux plateformes de médias sociaux 24 heures pour supprimer les messages signalés par les utilisateurs comme étant illégaux.

Le Royaume-Uni prévoit de lutter contre la désinformation, d'une certaine façon

Le gouvernement britannique met en place un groupe de travail dédié à la sécurité nationale pour contrer la désinformation répandue par les acteurs étatiques, dans le cadre d'une enquête sur les allégations selon lesquelles la Russie aurait interféré dans la campagne référendaire du Brexit en 2016. Aucun autre détail n'a encore été révélé sur les opérations de la nouvelle unité.

La NSA écoute plus attentivement qu'on ne pensait

Un récent article de The Intercept révèle que la National Security Agency des Etats-Unis dispose d'une technologie capable d'identifier les gens par le son de leurs voix, en le captant dans un fichier unique appelé “empreinte vocale”. Le rapport s'appuie sur des documents de 2004 à 2012 classifiés, et indique que les agences de renseignement américaines ont utilisé cette technologie dans des opérations antiterroristes depuis l'invasion américaine de l'Irak en 2003 [fr]. L'article provoque des préoccupations juridiques concernant le droit à la vie privée, en particulier parce que les identificateurs vocaux sont une forme unique de données biométriques.

L'ONU affirme que plus de gens ont besoin d'un accès à Internet, en particulier les femmes

La Commission du haut débit des Nations Unies a annoncé de nouveaux objectifs pour 2025 pour soutenir l'expansion de l'accès mondial à Internet, dans le but ultime de connecter les 50% du monde actuellement hors ligne. Les objectifs de 2025 exhortent les pays à établir des plans nationaux pour le haut débit, à rendre l'accès à Internet plus abordable et à multiplier les opportunités de développement des compétences numériques.

La Commission a également abaissé le seuil d'accessibilité à l'Internet de 5% à moins de 2% du revenu national brut mensuel (RNB) par habitant, reflétant une sensibilité accrue à l'inégalité des revenus. Ces proportions ont d'abord été proposées par l'Alliance for Affordable Internet dans son rapport 2016 sur l'Abordabilité de 2016. Parmi les objectifs, il y a également l'égalité des genres dans tous les domaines de l'utilisation d'Internet, reconnaissant que les femmes et les jeunes filles sont parmi les groupes les moins susceptibles de bénéficier de l'économie numérique.

Nouvelles recherches [en anglais]

 

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#MeToo a atteint les universités de Chine, malgré les efforts des censeurs

dimanche 28 janvier 2018 à 21:04

Des étudiantes chinoises déploient des banderoles contre le harcèlement sexuel lors de la Marche des femmes du 20 janvier à Washington, DC. Image via Voice of America, licence de réutilisation.

Le mouvement mondial #MeToo est en train de prendre lentement en Chine, malgré la stricte censure de l'internet.

Après le renvoi du très estimé professeur Chen Xiaowu de l'université Beihang sur de multiples allégations d'inconduite sexuelle, des étudiantes et anciennes étudiantes de dizaines d'universités de premier plan ont lancé des pétitions en ligne exigeant que les directeurs d'établissements instaurent contre les agressions sexuelles des politiques officielles, pratiquement inexistantes dans les universités chinoises. L'action a son propre hashtag, #EveryoneIn (Chacun est concerné).

Lancée en octobre 2017 à la suite des accusations par dizaines de dérapages sexuels à l'encontre du producteur de cinéma américain Harvey Weinstein, la campagne #MeToo et son hashtag se sont transformés en mouvement de prise de conscience du harcèlement et des agressions sexuelles. Depuis lors, des femmes du monde entier partagent leurs expériences sur Internet sous le hashtag #MeToo.

Le mouvement s'est aussi répandu en Chine continentale, tout en étant peu visible en ligne, grâce au système agressif de censure de l'Internet de la Chine. Les militantes disent que les expressions comme “anti-harcèlement sexuel” sont ciblées et censurées sur les médias sociaux.

Mais les choses ont commencé à bouger lorsque l'histoire de Luo Qianqian, une ancienne étudiante de l'Université Beihang à Pékin, est devenue virale.

Luo, qui vit maintenant aux États-Unis, a publié un texte où elle raconte comment Chen Xiaowu l'a attirée dans la maison de sa sœur et a voulu la forcer à un rapport sexuel il y a douze ans de cela, pendant ses études de doctorat. Elle a réussi à s'échapper, mais a appris plus tard qu'une autre étudiante avait été piégée par Chen et était tombée enceinte.

Le récit de Luo est devenu viral du jour au lendemain. Les censeurs ont réagi avec célérité, mais n'ont pu contenir le flot quand cinq autres étudiantes de Beihang se sont fait connaître et ont produit des accusations similaires d'inconduite sexuelle contre Chen.

Après enquête, l'Université Beihang a décidé de révoquer Chen, qui à l'époque des faits était le vice-président du programme d'études doctorales de l'Université. Le Ministère de l’Éducation a également privé Chen de son titre académique de “Spécialiste du Fleuve Yangtze”.

La décision a été largement rapportée et discutée sur la plate-forme chinoise de média sociaux Weibo.

Une étudiante de Beihang a écrit sur un des fils d'informations Weibo relatif à la sanction disciplinaire, pour noter qu'elle aurait dû intervenir depuis longtemps :

作为北航的学生,我只能说学校的反应之慢令人不满,这事情早就有人举报过,然后在知乎上删帖,然后威胁受害人,总归给压下去了,离我们不到1km的北电事件也没有了消息,这社会越来越让人失望,政府的不作为,让越来越多的优秀学子开始离开这个国家,长此以往,这个国家还有希望吗?

En tant qu”étudiante de Beihang, je peux seulement dire que l'établissement est malheureusement trop lent à réagir à l'inconduite sexuelle. L'affaire avait déjà été signalée avant. Elle avait été révélée sur Zhifu (une plate-forme Internet), mais le post a été supprimé et la victime menacée. La divulgation a été empêchée. Un cas similaire [de harcèlement sexuel] a eu lieu à l'Université des Postes et Télécommunications de Pékin, qui est à 1km de Beihang. Il n'y a eu aucune suite. Les gens sont déçus par l'inaction du gouvernement. L'élite quitte de plus en plus le pays. Y a-t-il encore un espoir à long terme dans ce pays ?

Les militantes féministes voient une petite victoire dans ce résultat, un avertissement que le harcèlement sexuel sur les campus est endémique en Chine, et que les universités n'ont toujours pas de politiques pour traiter le problème.

Wei Tingting, une militante féministe qui a été arrêtée par la police pour avoir organisé en 2015 une action anti-harcèlement sexuel lors de la Journée des femmes le 8 mars, a mené en septembre 2015 une enqête à l'échelon national sur le harcèlement sexuel dans les campus universitaires. Sur les 6.592 réponses recueillies, près de 70 % avaient connu différentes formes de harcèlement sexuel.

Beaucoup conviennent que l'inconduite sexuelle de Chen Xiaowu n'est que la partie émergée de l'iceberg :

当客厅里有一只蟑螂的时候,墙角早就一堆了

Quand on voit un cafard au milieu du salon, c'est qu'il y en a généralement toute une colonie dans un coin

对中国的敎育行业感到无比担忧,从幼儿园到大学,就没有给孩子一个安全的环境。除了压就是洗白。

Le secteur éducatif de la Chine est tellement anxiogène — du jardin d'enfant jusqu'à l'université, l'environnement n'est pas sécurisé. Et le problème est traité soit par la répression soit par un pseudo-nettoyage.

D'autres ont fait remarquer que cela reflétait les abus de pouvoir systémiques dans la société. Ainsi de ce commentaire :

在“色欲”的社会里谁能把持住?特别是有着公权势的人,利用权势(职权利害)把多少女性抱上了床、搂进了怀?有的是投怀送李,有的是身不由己,但都是为了生计。

Dans une société menée par “le désir et la soif”, comment résister à de telles tentations ? Surtout pour ceux qui détiennent des positions d'autorité publique, ils utilisent leurs postes pour appâter les femmes. Pour leur propre survie, les femmes doivent être dociles, de gré ou de force.

Pour traiter le problème des abus de pouvoir systémiques, étudiantes, anciennes élèves et membres du corps enseignant de plusieurs universités dont l'Université de Pékin, l'Université Fudan [à Shanghai]  et l'Université de Wuhan ont lancé des appels publics aux directions d'établissements pour qu'elles instaurent une panoplie de mesures disciplinaires et de de surveillance de nature à prévenir le harcèlement sexuel sur les campus.

A quoi s'ajoute la signature par une cinquantaine de professeurs d'universités de tout le pays d'une déclaration le 19 janvier, demandant au Ministère de l’Éducation de s'occuper du harcèlement sexuel dans les écoles et les campus universitaires avec des mesures concrètes. Les professeurs ont proposé que les contrevenants soient poursuivis en justice. Ils se sont aussi engagés à signaler les cas de harcèlement sexuel et à protéger les victimes.

Mais des appels similaires à instaurer des mesures contre le harcèlement sexuel dans les campus ont été faits de façon répétée dans les dernières années, sans qu'aucun dispositif concret n'ait été mis en place à ce jour.

Des féministes comme Wei Tingting se servent de ce moment pour pousser l'opinion à faire davantage pression :

在你们看到的“罗茜茜”以外,还有另一个和很多个“罗茜茜”……这个罗茜茜用了12年,其她的罗茜茜我们看不见。
有人说这是中国高校版的Me Too,我要说的是,Me Too并不够,而是要Everyone In
不是只有受害的当事人站出来说:Me Too 还要更多其他的人(包括女人和男人)拿出行动来说:I’m in
Me Too 只解决了”说出来“的部分,说出来之后要做什么,需要更多人的I’m In

Luo Qianqian n'est pas qu'un cas isolé, il y a beaucoup beaucoup de “Luo Qianqian”… il a fallu douze ans à cette Luo Qianqian [pour raconter son histoire], pendant que d'autres Luo Qianqian restent invisibles.
Certains disent que ceci est la version des campus chinois de Me Too. Je tiens à dire que Me Too ne suffit pas, ce qu'il nous faut c'est Everyone In (Tout le monde est concerné).
Il n'y a pas que les victimes qui doivent se lever et raconter leurs histoires de Me Too, il faut que les autres (femmes et hommes) agissent et disent “I’m in” (Je suis concerné).
Me Too concerne seulement la partie récit. Quand toutes les histoires sont dites, il faut plus de “I’m in” pour passer à l'action.

Wei a lancé une campagne de financement participatif assortie d'un plan :

1,为调查报告中所有的211高校寄送一份高校调查报告和建议信
2,为这个网络众筹一名协调人的工资
3,招募更多感兴趣的同道人

1. envoyer un exemplaire du rapport d'enquête et un lot de propositions de mesures aux 211 universités qui ont participé à l'enquête.
2. Prendre en charge le salaire de la coordinatrice qui entretiendra un réseau [national anti-harcèlement sexuel.
3. Recruter plus de monde dans le réseau.

Pendant ce temps, des inquiétudes naissent en ligne que l'actuelle campagne #MeToo en Chine n'affronte une nouvelle salve répressive. En 2015, cinq militantes féministes ont été arrêtées après s'être exprimées à haute voix contre le harcèlement sexuel avant la Marche de la Journée internationale des Femmes du 8 mars.

Selon un article du New York Times, en plus de la censure d'un appel public réclamant une politique de lutte contre le harcèlement sexuel dans les campus, des militantes ont été mises en garde par les autorités que leurs actions pourraient être considérées comme une collusion avec des forcces étrangères et une trahison du pays. Féministes et alliés du mouvement en Chine se préparent à un regain de censure, à l'approche de la Journée internationale des femmes.