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Trois hashtags créés par des musulmanes féministes

lundi 29 février 2016 à 19:40
Uploaded by Flickr user theflavv. Taken on March 17, 2011 (CC BY-NC-ND 2.0)

Mis en ligne par l'utilisateur de Flickr theflavv. Pris le 17 mars 2011 (CC BY-NC-ND 2.0)

Sohini Chatterjee, actuellement étudiante en Mastère Relations internationale,  s'intéresse à un courant féministe porté par de très jeunes femmes musulmanes sur les réseaux sociaux, principalement en Grande Bretagne et aux Etats-Unis. Un autre éclairage, dans un tout autre contexte.

Avec la montée de l'islamophobie, il semble que l'on assiste partout à la réduction des musulmanes à une caricature. L'islam est souvent dépeint par les médias comme opprimant les femmes, et accompagné d'un appel au clairon pour “secourir” les musulmanes… le plus souvent en rejetant leur religion.

Le stéréotype de la musulmane “sans défense”, dépourvue de moyens d'action propres et opprimée par sa foi, est utilisé aussi bien par les libéraux que par les conservateurs.

Certaines de ces jeunes femmes se tournent vers Twitter pour affronter ceux qui les instrumentalisent pour justifier la misogynie, le racisme, l'impérialisme culturel. Elles soulignent que la foi est un aspect important de l'identité d'un croyant et que nier leur droit à croire et pratiquer est en soi une oppression.

#NotYourRespectableHijabi [ndt : PorteuseDeHijabPasSiRespectable]

Dans l'islam, il incombe exclusivement à la femme de couvrir son corps d'une certaine manière ou de choisir de porter le hijab comme un symbole de sa foi ou de sa fierté symbolique pour sa religion et sa culture. Alors lorsqu'un homme a fait remarquer à une musulmane qu'elle ne devrait pas porter de maquillage avec son hijab car ça n'était pas assez “respectable”, Humaira a exprimé sa colère sur Twitter.

Humaira Mayet (@LondonRaani sur Twitter), une Londonienne de 20 ans, a utilisé le mot-dièse #NotYourRespectableHijabi pour protester contre ceux qui jugent les femmes d'après leur apparence, souvent pour des raisons religieuses.

À la suite de Humaira, d'autres femmes qui portent le hijab se sont rapidement mises à tweeter avec ce mot-dièse et ont posté des photos d'elles portant du maquillage, en protestation de ce flagrant flicage religieux et moral : elles font savoir au monde que personne n'a à réglementer leur foi.

Salut salut salut je suis très croyante et je déteste quand les gens disent que je ne respecte pas le hijab #NotYourRespectableHijabi

Quand j'ai lu qu'on ne peut pas porter le hijab et du maquillage, je me suis sentie comme ça #NotYourRespectableHijabi

Au final : si vous n'êtes pas une femme (musulmane), vous n'avez pas le droit de parler du hijab. #NotYourRespectableHijabi

#TraditionallySubmissive [ndt : TraditionnellementSoumise]

Un article a cité le premier ministre britannique David Cameron disant que les musulmanes vivant au Royaume-Uni sont incapables de s'élever contre leurs oppresseurs et de défendre leurs droits à cause de leur manque de maîtrise de la langue anglaise. Il a poursuivi en émettant l'hypothèse que les clercs musulmans profitent de cette “soumission traditionnelle” des femmes pour les opprimer. M. Cameron en est arrivé à suggérer que la langue anglaise pourrait “donner plus d'autonomie” aux musulmanes du Royaume-Uni, les aider à jouer un rôle constructif dans la société britannique, et aussi à les aider à lutter contre l'extrémisme religieux.

Les musulmanes qui se sont indignées d'être perçues et même qualifiées de “traditionnellement soumises” se sont tournées vers Twitter pour  démonter les arguments de M. Cameron en dressant la liste de leurs accomplissements.

[Maîtrise en Littérature anglaise – Professeur d'enseignement secondaire – blogueuse – poète – conteuse – présentatrice de télévision – conférencière ] #TraditionallySubmissive Et ça, ce ne sont pas des compétences en anglais ?

[Mère célibataire de 4 enfants – diplômée en psychologie et sociologie – chef d'entreprise – coach en addictologie – auteur d'un livre à paraître sur les addictions – coach de vie spécialisée dans le stress et les traumatismes – bilingue] J'en suis ! Je suis #traditionallysubmissive moi aussi.

Cher Premier Ministre britannique, je parle deux langues, apprends les langues étrangères rapidement, travaille dans une compagnie aérienne et ai un diplôme universitaire. #TraditionallySubmissive

Cette campagne a été importante car les opinions de M. Cameron sont malheureusement partagées par beaucoup, qui nourrissent de dangereux préjugés sur les communautés musulmanes simplement parce qu'elles sont culturellement distantes de leurs propres paysages socio-culturels. Ces idées fausses sont souvent si profondément ancrées dans l'inconscient collectif d'une grande partie de la population qu'elles courent le risque de devenir institutionalisées.

En démentant vigoureusement de telles suppositions, les musulmanes ont fait entendre leur voix, contrairement à ce dont M. Cameron les croyait capables. Et ce n'était pas la première fois.

#LifeofaMuslimFeminist [ndt : VivreCommeUneFeministeMusulmane]

En 2014, fatiguée de s'entendre dire qu'on ne peut pas être à la fois musulmane et féministe, Noorulan Shahid a créé le mot-dièse #lifeofamuslimfeminist, affirmant la dualité  de son identité.

De nombreuses musulmanes l'ont très vite suivie en tweetant leur foi en l'islam et leur féminisme. Certaines révèlent aussi que la misogynie empoisonne leur communauté de l'intérieur aussi bien que de l'extérieur. Ce mouvement dissident virtuel veut déconstruire encore un autre préjugé sur les musulmanes : que leur identité religieuse les empêche de formuler des revendications légitimes pour obtenir l'égalité.

Les musulmanes du XXIe siècle, dont l'importante présence dans l'espace virtuel ne peut être négligée, se sont prouvées des personnes qui s'assument, qui sont politiquement éduquées et qui participent au combat mondial contre l'oppression et la discrimination. Ces femmes expriment leur exaspération face à une tendance suprématiste blanche au sein du féminisme, qui a longtemps rechigné à développer une définition plus nuancée de l‘intersectionnalité [NdT: en sociologie, la situation de subir plusieurs formes de discrimination] féministe. Deux ans après son lancement, ce mot-dièse est toujours utilisé et est encore actif. Si David Cameron suivait ce mouvement surTwitter, il n'aurait probablement pas commis l'erreur de penser que les musulmanes sont “traditionnellement soumises”.

“Les féministes blanches soutiennent que les femmes devraient pouvoir s'habiller comme elles veulent, pourtant elles refusent de me laisser porter le hijab en paix #lifeofamuslimfeminist”

JE NE PEUX PAS CHOISIR ET NE CHOISIRAI PAS UNE IDENTITE UNIQUE. ET VOUS FEREZ AVEC. (2/2) #BeingBlackAndMuslim #LifeOfAMuslimFeminist #intersectionality

Je suis féministe et musulmane ET j'aime la vie !

Certaines de mes histoires préférées du Coran et de l'Islam sont celles de mères célibataires fortes Agar Maryam Amina Khadija… #lifeofamuslimfeminist

J'ai besoin du féminisme parce que les gens (y compris les autres féministes) croient que ma religion m'oppresse. #lifeofamuslimfeminist

Ces femmes veulent pulvériser des mythes, combattre la misogynie et les préjugés avec plus de courage que celui qu'on leur attribue généralement.

Après une année 2015 sans conquête de l'Everest, la course devrait reprendre de plus belle cette année

dimanche 28 février 2016 à 16:41
Mount Everest from base camp one. Image from Flickr by Rupert Taylor-Price CC BY 2.0

L'Everest vu du camp de base N° 1. Photo sur Flickr de Rupert Taylor-Price, CC BY 2.0

L'Everest, la plus haute montagne du monde, est un défi pour les aventuriers et chasseurs de records.

Chaque année, la volonté de grimper l'Everest draine des milliers de voyageurs aventureux à Khumbu

Pourtant, en 2015, l'Everest est resté invincible, personne n'a pu en atteindre le sommet pour la première fois depuis 1974. Le tremblement de terre dévastateur qui a tué environ 9.000 personnes au Népal n'a pas non plus épargné la plus haute montagne du monde  et ceux qui aspiraient à la vaincre.

Durant cette période, personne n'a pu gravir l'Everest pendant la fenêtre d'opportunité de sept à dix jours qui se présente chaque mois au mois de mai. Le tremblement de terre a détruit les échelles et les voies qui permettaient un accès sûr. Tenter d'escalader le sommet à un autre moment est très dangereux car les conditions seraient particulièrement rudes, avec des températures oscillant entre – 32 et – 41 degrés celsius et des vents de plus de 230 km/heure.

Pour la première fois depuis 41 ans, aucun humain n'a atteint le sommet de l'Everest cette année et 22 en sont morts.  @SCMP_News @NatGeo pic.twitter.com/fcmkTdVnP4

En dépit des conditions rigoureuses et des morts survenant chaque année pendant les ascensions, certains sont incapables de renoncer aux sensations fortes associées à l'escalade de l'Everest.

Historiquement, pour cent grimpeurs ayant atteint le sommet, quatre sont meurent.

Imperturbables face aux risques de tremblements de terre et aux avalanches, on verra ce printemps de nouvelles hordes d'alpinistes et de risque-tout se précipiter vers l'Everest pour en tenter l'escalade.

Alan Arnette, qui a connu l'Everest, souhaitait sur son blog Summits Don’t Matter (“L'essentiel n'est pas le sommet”), que ce soit enfin différent, pour le bien du pays :

On verra évidemment des centaines de personnes en route au printemps prochain pour tenter l'Everest. Quelques organisateurs passeront tranquillement par le nord en affirmant que c'est plus sûr. Des gens sans autre expérience qu'un Kilimandjaro revendiqueront leur droit à vivre cela…jusqu'à ce que quelque chose tourne mal. Des guides continueront à sauver des vies en faisant ce qu'ils peuvent; et la “machinerie” de l'Everest continuera à fonctionner même s'il est évident que, pour l'heure, il faut d'abord laisser le Népal récupérer.

Le business de l'Everest

Depuis que Sir Edmund Hillary et le sherpa Tensing Norgay (les sherpas sont une communauté ethnique de l'Himalaya) réalisèrent la première ascension, 4.093 personnes ont atteint le sommet, pour un étonnant total de 7.000 fois.

Sir Edmund Hillary et le Sherpa Tensing ont été les premiers à atteindre le sommet du mont Everest  en mai 1953 pic.twitter.com/NqoL3BRqLN

Le fils de Tensing a été très critique pour “la mascarade qu'est devenue l'Everest”, voué à un intense trafic de grimpeurs occidentaux au détriment du bon état et de l'intégrité de la montagne. L'Everest est devenu un business, et il attire encore un grand nombre de consommateurs.

Une des pires avalanches de l'histoire de cette montagne, en 2014, a failli entraîner une grève des sherpas, quand les familles de Népalais tués dans cette catastrophe reçurent une compensation dérisoire pour leur morts. Il y eu encore plus de morts en avril 2015 lors des avalanches déclenchées par le tremblement de terre au Népal. En comparaison des énormes sommes d'argent payées par les grimpeurs pour avoir le privilège de gravir l'Everest, les sherpas sont peu payés pour leurs compétences, la part du lion de cet argent est divisée entre les tour-opérateurs et le gouvernement népalais.

Ça fait quoi d'escalader la plus haute montagne du monde ?

Pour ceux qui voudraient découvrir combien il est difficile de conquérir l'Everest, P K Sherpa, qui y est monté deux fois, fait partager des moments sublimes en images. Le voyage commence classiquement par un atterrissage à l'aéroport de Lukla – l'une des plus dangereux du monde – puis un trekking jusqu'au village de Namche Bazaar.

A bird’s eye-view of Namche Bazaar. Used with permission.

Une vue panoramique de Namche Bazaar. Photo utilisée avec autorisation.

La randonnée de Namche Bazaar jusqu'au camp de base de l'Everest est à couper le souffle, souvent une expérience unique dans une vie. Le périple à travers le massif de l'Everest est difficile mais aussi une belle aventure.

Une marche de 11 jours depuis Lukla vous mène jusqu'au camp de base à environ 5400 mètres. Entre 5500 et 6100 mètres, vous affrontez la cascade de glace de Khumbu. Dans cette zone, les grimpeurs doivent habituellement recourir aux échelles et cordes pour traverser les sections dangereuses.

Climbers at the Khumbu Icefall. Used with permission.

Alpinistes dans la Cascade de glace de Khumbu. Photo utilisée autorisation.

P K Sherpa poses for a picture at the Khumbu Icefall. Used with permission.

P K Sherpa pose pour une photo sur la Cascade de Khumbu. Photo utilisée avec autorisation.

Alan Arnette nous explique :

La ‘cascade de glace de Khumbu’ est un dénivelé de 600 mètres sur un glacier en mouvement parsemé de profondes crevasses et d'imposants séracs. Les grimpeurs doivent passer au-dessus des crevasses sur des échelles en aluminium avec des crampons sur leurs chaussures. Il y a eu plus de morts sur la cascade que nulle part ailleurs sur la face sud de l'Everest ces dernières années.

Une fois passée cette section dangereuse, les grimpeurs progressent jusqu'au Camp 1 puis au Camp 2, au Camp 3 et arrivent finalement au Camp 4 à 8000 m – connu aussi sous le nom de “zone de la mort”.

Climbers trading their way to Camp 3. Used with permission.

Grimpeurs traçant leur piste vers le Camp 3. Photo utilisée avec autorisation.

Collecting garbage at Camp 4. Used with permission.

Ramassage des ordures au camp 4. Photo utilisée avec autorisation.

 L'expérience personnelle de PK Sherpa lui inspire beaucoup de respect pour cette section de l'ascension:

Quand j'ai atteint le camp 4, la zone de la mort, j'ai vu les cadavres éparpillés ici et là. Une scène tragique et déchirante qui ne peut être décrite avec des mots.

De là, les grimpeurs s'élancent habituellement vers le sommet aux environs de minuit. MountEverest.net raconte de nombreuses expériences sur cette aventure :

C'est le silence complet, personne ne parle. Vous ne pouvez que chuchoter, c'est absolument terrifiant et vous commencez à grimper, grimper en attendant les premières lueurs de l'aube. Le froid est à désespérer, pénétrant, glacé. Les piolets et les crampons pénètrent profondément dans la glace.

Climbers capturing their moment of glory at the summit. Used with permission.

Les grimpeurs savourant leur moment de gloire au sommet. Photo utilisée avec autorisation

Alors, ça fait quoi finalement d'atteindre le sommet ?

Réponse de P K Sherpa :  “ça donne l'impression d'avoir conquis le monde”.

Où va l'argent sale saisi par la police au Mexique, en Colombie et aux États-Unis?

dimanche 28 février 2016 à 08:52
Las suntuosas fortunas confiscadas por instituciones de justicia en Colombia, México y Estados Unidos son reutilizados por distintos organismos y ven numerosos destinos en esferas públicas y privadas. Fotografía de Susana González Bloomberg vía Getty Images. Tomado por Univisión y republicada con permiso.

Les immenses fortunes confisquées par les institutions judiciaires en Colombie, au Mexique et aux États-Unis sont réutilisées par divers organismes et trouvent de nombreuses destinations dans les sphères publiques et privées. Photographie de Susana González Bloomberg via Getty Images. Empruntée par Univision et republiée avec autorisation.

La version originale de ce reportage a été réalisée par Mayra Rocha d'Univision, aux États-Unis et a été republiée sur CONNECTAS et par Global Voices dans le cadre d'un accord de partage de contenus.

“Tu  imagines avoir tellement d'argent que tu ne sais même plus combien tu en as?”. C'est ce que le leader colombien du cartel de Cali, Gilberto Rodríguez Orejuela, confiait à celle qui fut sa compagne pendant huit ans. Cette anecdote n'est qu'un aperçu de la portée économique du trafic de drogue, un commerce désormais géré par de véritables multinationales du crime.

En 2011 le magazine Forbes classait Joaquín “El Chapo” Guzmán, chef du cartel de Sinaloa, parmi les hommes les plus riches du monde et le second plus puissant du Mexique, avec une fortune estimée à un milliard de dollars. Aujourd'hui, ce capital s'élèverait à plusieurs milliards. Quant à Rodríguez Orejuela, le principal ex-leader du cartel de Cali, au moment de son arrestation en 1995, sa fortune dépassait le milliard de dollars, selon le ministère public colombien. De la même manière, le patrimoine de Pablo Escobar, le leader du cartel de Medellín, a été estimé entre 9 et 15 milliards de dollars.

Mais que deviennent ces fortunes quand les trafiquants sont arrêtés? Aux États-Unis, on privilégie l'unité ayant effectué la saisie. Dans un premier temps, l'argent retrouvé ou les biens confisqués sont confiés à un procureur qui détermine si les preuves sont suffisantes pour que l'affaire soit jugée. Une fois que l'origine illégale de l'argent est prouvée et que les victimes ont été indemnisées, le Département de la Justice, dans le cadre d'une loi appelée Distribution équitable de fonds, répartit l'argent restant aux services de police ayant participé à l'enquête. 

Dans ce reportage diffusé par le site d'information latino-américain CONNECTAS, l'inspecteur Rodolfo Rodríguez de la Police de Los Angeles commente ;

Por ley, 65 por ciento va al departamento que confiscó, 35 por ciento se divide entre el estado y los fiscales, para continuar operaciones antidroga.

Comme la loi l'indique, 65 pour cent revient à l'unité qui a fait la saisie, l'Etat et le ministère public se partagent 35 pour cent, pour continuer les opérations anti-drogue.

Dans une enquête réalisée par le Washington Post, des statistiques du département de la justice montrent que la Police de Los Angeles a reçu, entre 2001 et 2014, 18,4 millions de dollars grâce à ce programme, la Police de New York, 27 millions de dollars et le bureau du shérif de Los Angeles, 24,3 millions de dollars. Selon ce reportage, cet argent est réinvesti dans du matériel, de la technologie, des entraînements et des opérations pour continuer à combattre le trafic de drogue. Si les biens sont saisis lors d'une opération menée au niveau fédéral en collaboration avec des institutions comme le FBI ou la DEA, l'argent est placé sous la tutelle des Ministères des Finances et de la Justice et les biens et propriétés sont vendus aux enchères.

Cela fut le cas de la villa du “capo” colombien Pablo Escobar à Miami Beach, rachetée par un couple de Floride il y a plus de 20 ans pour moins d'un million de dollars. Un prix très bas pour une villa avec vue sur la mer.

Propriétés mises aux enchères et biens répartis entre les victimes

Au Mexique, qu'il s'agisse de maisons, de chevaux ou de grosses cylindrées, lorsque les biens ne sont pas réclamés, ils finissent aussi aux enchères. Selon Alonso Carriles, directeur du Service d'Administration et d'Aliénation de Biens (une dépendance du Ministère des Finances mexicain), quand des biens sont saisis, ils sont mis sous scellés et à disposition du procureur général jusqu'à ce que les procédures pénales contres leurs propriétaires soient ouvertes. La quantité d'argent sous scellés pourrait être supérieur à 330 millions de dollars.

Selon l'avocat pénaliste Gabriel Regino, des bâtiments, des terrains, des hôtels et des maisons peuvent être vendus aux enchères ; toutefois les maisons sont plus difficiles à vendre, en effet, acheter une maison dans laquelle a vécu un “capo” ou sa famille peut causer des problèmes à ses nouveaux propriétaires. C'est pour cette raison que le gouvernement mexicain a plutôt choisi de les louer à des organismes à but non lucratif.

En Colombie, une fois les biens saisis, commence une période pendant laquelle l'accusé peut défendre sa propriété. Si l'est prouvé que les biens ont été acquis de façon illicite, le Procureur Général en fait don à une entreprise administrant les biens du Fonds de Réparation des Victimes et de Lutte contre le Crime Organisé. C'est là que se sont retrouvés beaucoup de biens ayant appartenu à Pablo Escobar et à d'autres leaders des cartels de Medellín et Cali. C'est pourquoi le fils de Pablo Escobar a assuré publiquement que ni lui ni sa famille n'ont conservé d'argent ou tout autre bien issu du narcotrafic. Selon le fils de Pablo Escobar, tout est resté entre les mains du gouvernement. Selon ses dires, il n'a hérité qu'une montre de son père.

CONNECTAS

Comment de plus en plus d'écoles au Brésil enseignent aux enfants à manger leurs propres légumes

samedi 27 février 2016 à 23:25
Sixth-graders at the Leão Machado school in Sao Paulo. School gardens have become a popular way to help kids learn to eat healthier in Brazil. Credit: Rhitu Chatterjee. Used with PRI's permission

Les élèves de sixième année de l'école Leão Machado à Sao Paulo. Les potagers scolaires sont devenus une manière en vogue d'aider les enfants à manger sainement au Brésil. Crédit: Rhitu Chatterjee. Utilisée avec la permission de PRI.

Cet article de Rhitu Chatterjee de The World est paru à l'origine sur PRI.org le 11 février 2016 et est publié une nouvelle fois ici dans le cadre d'un accord de partage de contenu.

Sur la pente d'une colline de la ville de São Paulo, un groupe d'élèves de sixième année est au travail. Ils sont armés de graines, de terre et d'un ensemble d'outils de jardinage. Des bouteilles de soda à l'envers, remplies d'eau, entourent une série de parcelles rectangulaires. Un garçon nommé Felipy Pigato m'explique qu'ils sont en train de préparer le sol pour planter.

“Hier, nous avons mélangé de la terre avec de la fibre de coco”, explique-t-il. “La fibre de coco soutient les graines dans le sol.”

Aujourd'hui, il raconte qu'il vont ajouter le compost. En bêchant, les élèves repoussent des paquets de boue, créant ainsi des fosses peu profondes, où les vers de terre frétillent dans un sol fraîchement retourné.

Mateus Feitosa de Almeida, 12 ans, écarte doucement la terre autour d'un ver de terre. “Il faut tirer comme ça pour ne pas blesser les vers de terre,” explique-t-il. “Si on les enlève, c'est mauvais pour le sol.”

Ce travail se passe dans un quartier tranquille de la classe moyenne, dans un jardin appartenant à la Leão Machado School, une école publique de grande taille.

Les élèves travaillent orientés par deux professeurs, Daniel Giglio Colombo et Marta Martins.

“C'est la deuxième année du projet”, explique Daniel, qui a aidé à initier le potager. “Nous allons cultiver les mêmes choses que l'année dernière — roquette, laitues, radis.”

Les légumes qu'ils cultivent sont utilisés dans les repas scolaires. “Cependant, l'objectif réel du potager scolaire n'est pas de fournir des ingrédients”, commente-t-il, “mais d'enseigner aux élèves d'où provient la nourriture, afin qu'ils développent un lien avec leurs aliments.”

“Quand on demande aux enfants d'où viennent les laitues, ils répondent “le marché”,” dit Daniel. “Ils ont perdu le contact avec la nature, le sol, semer et cultiver les plantes.”

“Et cela se reflète dans leur alimentation”, explique-t-il, “qui est de moins en moins saine”.

Students say the school garden project is teaching them a lot about how to grow food, though it's still hard for some of them to appreciate vegetables. Credit: Rhitu Chatterjee. Used with PRI's permission

Les enfants racontent que le projet de potager scolaire leur apprend beaucoup sur la manière de faire pousser la nourriture, mais qu'il est toujours difficile pour certains d'entre eux d'apprécier les légumes. Crédit: Rhitu Chatterjee. Utilisée avec la permission de PRI.

De même qu'aux Etats-Unis, les aliments hautement transformés comme la restauration rapide, le soda, et le sirop de maïs riche en fructose sont devenus extrêmement populaires ici au Brésil. Et les taux d'obésité sont croissants, même parmi les enfants. C'est un problème d'envergure nationale qui a alerté le gouvernement et les experts en santé publique dans le pays. Le gouvernement du Brésil a interdit les sodas, les gâteaux et les biscuits dans les repas scolaires. Il y a également restreint les quantités de sel et de sucre. Il a imposé au minimum une portion quotidienne de fruits et légumes.

“Initialement, les élèves avaient l'habitude de rejeter les aliments frais”, explique Marta. Ses collègues et elle espéraient que le potager scolaire pourrait changer cela.

“Nous souhaitions créer de meilleures habitudes grâce à ce projet”, commente Marta. “Nous voulions qu'ils améliorent leur alimentation et soient en meilleure santé.”

Cette idée se retrouve derrière la prolifération de potagers scolaires à travers le Brésil. Le programme a commencé il y a douze ans en tant que programme pilote dans cinq écoles, dans le cadre d'un projet du Programme des Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture. Aujourd'hui, il y a quelques milliers de potagers scolaires dans 700 villes. La plupart sont gérés de manière indépendante par les écoles. D'autres sont soutenus par les municipalités.

“Il est difficile de savoir pour l'instant si les potagers scolaires ont permis d'améliorer la santé des enfants”, dit Albaneide Peixinho, qui gère depuis 13 ans le programme brésilien des repas scolaires. Cependant, elle explique que les écoles rapportent que les potagers permettent aux enfants d'avoir une meilleurs conscience de leur alimentation.

“Grâce aux potagers scolaires, ils voient que les aliments proviennent de la Terre,” raconte Albaneide, et ils mangent plus sainement.” Certaines études montrent même que les élèves influencent la manière dont leurs familles mangent. “Les parents nous disent que les enfants mangent beaucoup de fruits et légumes, et qu'ils insistent pour manger ces aliments à la maison.”

Sarah Campos (left) and Juliana Santos, former students of the Leão Machado School. Campos says she tried her first radish after working in the school garden. Now she loves them. Credit: Rhitu Chatterjee. Used with PRI's permission

Sarah Campos (à gauche) et Juliana Santos, anciennes élèves de l'école Leão Machado. Sarah dit qu'elle a goûté son premier radis après avoir travaillé au potager scolaire. Maintenant elle les aime. Crédit: Rhitu Chatterjee. Utilisée avec la permission de PRI.

Sarah Campos,14 ans, a suivi le cours de potager scolaire l'an dernier à Leão Machado de São Paulo. “Je n'avais jamais mangé de radis auparavant,” explique-t-elle. Elle en a goûté alors que ses camarades et elle ont cuisiné les radis qu'ils avaient cultivés dans le potager scolaire.

“J'ai tellement aimé que je m'en suis servi une seconde assiette,” raconte Sarah. Maintenant elle dit qu'elle mange souvent des radis. “Je demande à ma mère d'en préparer quelquefois pour le déjeuner. Elle les cuisine en salade avec des carottes et des pommes de terre. C'est très bon.”

Ses camarades et elles expliquent qu'ils acceptent maintenant davantage de manger des légumes. Ils essayent d'éviter la restauration rapide et sont plus attentifs à leur alimentation.

Hors du jardin, je demande à Mateus, l'élève qui m'a parlé de protéger les vers de terre, ce qu'il a appris dans ce cours de jardinage.

“Beaucoup de choses,” dit-il. “Comme bêcher, ce qu'est du fertilisant organique, ce que les animaux font pour améliorer le sol.”

“Qu'as-tu appris à propos des légumes ?”

“Qu'ils sont bons pour la santé et le bien-être.”

“Manges-tu des légumes ?”

“Ce n'est pas ce que je préfère mais je suppose que oui maintenant avec ce projet,” explique-t-il en riant, embarrassé.

Nous espérons qu'à la fin de l'année scolaire, il les appréciera vraiment.

Cet article a été écrit avec le soutien du Pulitzer Center on Crisis Reporting.

Je te scanne, tu me scannes : les nouveaux rapports de force autour de WeChat en Chine

samedi 27 février 2016 à 22:48
Sol, a film producer, shows me her QR scanner tattoo in Beijing. Photo by Christina Xu

Le tatouage en forme de lecteur de QR Code de la réalisatrice Sol  à Pékin. Photo par Christina Xu

Cet article écrit par Christina Xu a d'abord été publié sur le blog 88 Bar et est reproduit ici avec permission.

Au cours de mon voyage de dix semaines en Chine, j'ai ajouté plus de 150 contacts sur WeChat, l'application de messagerie instantanée chinoise la plus populaire, et de loin. Quand on ne faisait pas connaissance grâce à des amis en commun en ligne, nous utilisions la façon la plus répandue pour ajouter un ami : une personne présente son code QR, fourni par WeChat, et l'autre n'a qu'à viser le code avec un lecteur et à attendre un bip de confirmation. Tout comme une poignée de main ou l'échange de cartes de visite, la lecture d'un code QR est devenue un geste quotidien de plus en plus assimilé à une performance sociale, une première impression digitale. Au mieux, c'est une interaction joueuse et suggestive lourde de l'énergie palpable d'une potentielle nouvelle relation.

Durant mon voyage, de nouveaux amis prenaient parfois les devants en me tendant leur téléphone portable sans un mot au détour d'une conversation, affichant leur code QR avec assurance. La plupart étaient plus hésitants et attendaient le consentement avant de me laisser le choix en demandant : “我扫你还是你扫我?”, “Je te scanne, ou tu me scannes ?” En d'autres mots, niveau code QR, tu es plus dominant ou dominé ?

“C'est douloureux d'attendre que l'autre personne vous scanne”, remarque une étudiante de 24 ans. En face d'un scanneur inexpérimenté, le scanné attend parfois dans l'embarras, téléphone tendu, comme lorsque la réponse à un “tope-là” tarde à arriver.

J'ai demandé à quinze de mes nouveaux amis WeChat leur position de scanne préférée, et la plupart d'entre eux ont révélé préférer scanner que d'être scannés. “C'est douloureux d'attendre que l'autre personne vous scanne”, remarque une étudiante de 24 ans. En face d'un scanneur inexpérimenté, le scanné attend parfois quelques secondes dans l'embarras, téléphone tendu,  comme lorsque la réponse à un “tope-là” tarde à arriver. Sol, productrice dans l'industrie du film, voit cela en terme de rapports de force : “si l'autre personne a été la première à parler de s'ajouter sur WeChat, je propose habituellement de scanner pour que ce soit plus juste.” Tony, une journaliste spécialisée dans les jeux vidéos venant de Shanghai, va plus loin : “Se proposer pour scanner me semble plus en phase avec la politesse chinoise, parce que vous demandez humblement à l'autre personne de partager ses coordonnées.”

After pulling up their in-app QR scanner and successfully scanning a code, the QR top is presented with their new acquaintance’s contact card. From there, they can send a friend request which must be accepted by the QR bottom before two-way messaging can happen.

Une fois le code scanné par le lecteur intégré à l'application, le scanneur reçoit la carte de contact de sa nouvelle connaissance. À partir de là, il peut envoyer une demande d'ajout en ami que le scanné doit accepter avant qu'il soit possible d'entrer en communication.

Ces rapports de force autour de la lecture des codes QR se manifestent également physiquement. Être celui qui scanne requiert en effet un peu —un petit peu— plus de compétence et d'effort: le scanné tend son téléphone sans bouger tandis que l'autre s'ajuste au dessus, comme un domestique aux petits soins. Le lecteur de code QR de l'application WeChat est si efficace que s'en est troublant, mais il faut tout de même faire l'effort de viser un peu. Scanner revient aussi un peu plus cher. Le lecteur doit envoyer la demande aux serveurs de WeChat afin de reconnaître l'information encodée, ce qui demande un peu de connexion internet. Trois des personnes interrogées ont répondu préférer être scannées parce que ça demande moins d'effort. Pour certains, cette passivité intentionnelle démontre un pouvoir confiant: fais tout le boulot, moi j'attends que ça se passe. Pour d'autres, c'est le résultat de moindres compétences techniques: certains utilisateurs plus vieux, peu habitués à l'application, ont indiqué tendre simplement leur téléphone à l'autre parce qu'ils ne savent pas où trouver le code du tout.

The QR bottom just pulls up their QR code and waits. Later, they’ll be able to find the other party’s friend request in a tucked-away part of the Contacts tab.

Le scanné ne fait que tendre son code QR et attendre. Il pourra ensuite retrouver la demande en ami dans une partie spécifique de l'onglet contacts.

Les bonnes manières entrent aussi en jeu dans le rituel du code QR. Des deux participants, c'est le scanné qui a le dernier mot : avant que l'échange de messages puisse se faire, c'est lui qui doit répondre à la demande d'ajout en ami puis envoyer le premier message. Ce processus lui donne l'opportunité de rejeter discrètement une mise en contact avec la possibilité d'inventer des excuses plausibles : “Je n'ai pas reçu la demande !” ou même, “J'ai cru que je t'avais ajouté, mais j'ai dû oublier d'envoyer le message.” Être l'ami WeChat de quelqu'un signifie que cette personne peut dès lors vous demander des faveurs, vous inviter à passer plus de temps avec elle ou encore partager des moments de sa vie avec vous grâce à Moments. Être en position de décider sans faire de bruit de donner suite ou pas n'est pas insignifiant.

C'est beau de voir une simple interaction digitale se parer de familiarité et de tradition à force d'usage, comme un treillis envahi de vignes et prenant une forme à la fois organique et inorganique.

Le reste des sondés affirmaient rester flexibles : soit ils laissent l'autre personne choisir, ou alors ça leur est entièrement égal. Parfois, les rôles sont déterminés par les circonstances : si seule une personne reçoit du réseau, il faut que ce soit elle qui scanne. Personnellement, j'ai vécu plusieurs de ces positions suivant la situation. À certaines occasions, j'affichais mon code et tendait volontiers mon téléphone à ma nouvelle connaissance, trahissant un niveau de confiance qui aurait paru presque transgressif aux États-Unis. Par contre, quand je suis très enthousiaste envers une nouvelle amitié, je saute sur l'opportunité de scanner moi-même, heureuse de faire sentir mon empressement avec la promesse de faire moi aussi un effort pour garder le contact.

C'est beau de voir une simple interaction digitale se parer de familiarité et de tradition à force d'usage, comme un treillis envahi de vignes et prenant une forme à la fois organique et inorganique. Nos téléphones, salis de l'huile de nos mains et de notre transpiration, sont devenus des extensions de nos êtres sociaux et même physiques. Lorsqu'on amène ces appareils à se frôler, c'est dans un geste intime qui peut transmettre identité, pouvoir et intention. Est-ce que la technologie nous rend moins sociaux ?  Non, car malgré une possible période d'hésitante acclimatation, notre sociabilité fini toujours par engloutir tout le reste pour ses propres besoins.

Merci à Jane Chun, Diana Kimball, Matt Boch, Jaime Woo, et Carlin Wing pour m'avoir aidée ma réflexion sur ces idées.

Cet article fait partie de Multi Entry, une collection décentralisée de d'histoires et de contenus sur les jeunes gens créatifs de la Chine moderne et la culture qu'ils développent.