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Une habitante de Fukushima: « Je ne veux pas que les enfants soient atteints d’un cancer comme moi »,

samedi 4 juin 2016 à 12:15
Fukushima Daiichi

“Fukushima watertanks.” Image from IAEA Imagebank official Flickr account. License: CC BY-SA 2.0

Le cinéaste indépendant Ian Thomas Ash a publié sur YouTube l’interview en quatre parties d’une jeune femme de la préfecture de Fukushima qui a été diagnostiquée d’un cancer de la thyroïde. Cette jeune femme, qui a maintenant 20 ans, en avait 15 au moment où, à la suite du séisme et du tsunami de mars 2011, la centrale nucléaire de Fukushima-Daiichi a perdu son alimentation en électricité et sa capacité à refroidir le combustible dans les réacteurs. L’absence de refroidissement a provoqué des explosions d’hydrogène qui ont sérieusement endommagé quatre des six réacteurs de la centrale de Daiichi.

Les explosions et les incendies qui s’en suivirent eurent pour conséquence une contamination radioactive qui s’est répandue sur une grande partie du nord-est du Japon. La jeune femme interviewée dans le documentaire, qui désire rester anonyme, fait partie des 166 habitants de Fukushima âgés de 18 ans ou moins lors de la catastrophe nucléaire ayant été diagnostiqués ou suspectés d’être atteints d’un cancer de la thyroïde (en date de février 2016).

Alors que certains attribuent cette augmentation des cas de cancer de la thyroïde à des dépistages plus rigoureux, Ash remarque que, en date du 1er avril 2014, 74,5 % des jeunes âgés de 18 à 21 ans qui vivaient à Fukushima au moment de l’accident nucléaire n’avaient pas encore fait d’échographie officielle de la thyroïde.

“This young woman’s reason for speaking out is to motivate the families of children who have not yet received the thyroid ultrasound examination to have their children tested,” Ash says in his introduction to the interview.

L'entretien a été mis sur YouTube en quatre parties : partie 1, partie 2, partie 3, partie 4 (en japonais, sous-titres anglais).

The woman says according to her doctors, her cancer was caught at the right moment. Had she waited any longer, they told her, the cancer could have spread. As a result of the illness, she had part of her thyroid removed.

She will begin working in a nursery school this year, and is pained to think of any other children going through what she has endured:

I would hate if any children I taught developed cancer. To tell the truth, I do not want any children to develop cancer like me.

Ash, based in Tokyo, makes short documentaries about life in Japan after the March 11, 2011 earthquake, tsunami and nuclear disaster.

L'archevêque de Chypre se dit ‘satisfait’ du succès électoral de l'extrême-droite

vendredi 3 juin 2016 à 21:46
Chrysostomos II., the Archbishop of Cyprus, at the Horasis Global Russia Business Meeting in April 2013. Photo by Richter Frank-Jurgen. CC BY-SA 2.0

L'archevêque de Cnypre Chrysostomos II, au Forum mondial Horasis des entreprises russes en avril 2013. Photo de Richter Frank-Jurgen. CC BY-SA 2.0

La “satisfaction” d'un archevêque orthodoxe après le succès d'un parti d'extrême-droite à une élection chypriote secoue l'internet d'expression grecque.

Chypre s'est rendu aux urnes dimanche 22 mai. Les conservateurs au pouvoir ont remporté les élections générales avec 30 % des voix, tandis que le Front populaire national (ELAM) a fait son entrée dans la législature. L'ELAM, politiquement lié au mal famé mouvement néo-nazi grec Aube Dorée, se targue de représenter “un nationalisme social et populaire”. Il est hostile à l'immigration et sceptique quant aux bénéfices de l'appartenance à l'Union Européenne.

Mais ce qui a volé la vedette aux résultats électoraux, c'est la réaction de l’Archevêque orthodoxe Chrysostomos II de Chypre à l'annonce que deux membres d'ELAM allaient siéger au Parlement.

Invité à commenter, il a déclaré :

Je ne croyais pas qu'ils y entreraient, mais je peux dire que je suis satisfait. D'autres voix pourront maintenant se faire entendre. Maintes fois il faut des extrémistes pour que les autres soient plus prudents.

Ci-dessous, la vidéo (chargée sur YouTube par l'utilisateur Reporter) avec le message en grec du prélat (pendant les dernières 10 à 15 secondes) :

Par le passé, Chrysostomos avait déclaré lors d'un entretien avec un journal que “la plupart des idées d'ELAM sont claires comme du cristal et reflètent les [s]iennes”.

‘Vous êtes dangereux. Et fasciste.’

Ses propos ont déclenché en ligne une discussion fournie. Avec la querelle ancienne sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat, ou plutôt son absence, en Grèce et par extension à Chypre, l'ingérence perçue de l'Eglise orthodoxe dans la politique a attisé encore plus les flammes de la polémique.

Un commentaire sous la vidéo sus-mentionnée disait :

i ekklisia na kamnei tin doulia tis k na men mplekete sta politika dromena…

L'Eglise doit faire son travail et ne pas se mêler de politique…

Dans une tribune titrée “Archéfasciste II, la fin” sur le portail d'informations Cyprus News, Leontios Filotheou (@leontios_ sur Twitter) a usé de mots très durs contre l'ecclésiastique :

Επικίνδυνος είσαι. Και φασίστας.
Δεν είναι εξάλλου η πρώτη φορά. Ήταν οι «κρυστάλλινες τους απόψεις». Ήταν τα «καλά παιδιά». Και ήρθε και το κερασάκι. «Η ικανοποίηση από την είσοδο του ΕΛΑΜ στη Βουλή. Για να ακούγονται κι άλλες φωνές».
Μα γιατί; Άμα θέλαμε να ακούσουμε κανά φασίστα σε ακούγαμε εσένα; Χρειαζόμασταν λες και το ΕΛΑΜ;
Και τι σε ικανοποίησε ακριβώς;
Το ότι είναι ένα παράρτημα της Χρυσής Αυγής;
Σε ικανοποιούν οι απόψεις τους σε ότι έχει να κάνει με τον άνθρωπο; Με το συνάνθρωπο μας;  Με το μετανάστη; Τον πρόσφυγα; Τον κατατρεγμένο;
[…]
Σε ικανοποιεί που δεν καταδικάζουν το ναζισμό; Σε ικανοποιούν οι σβάστικες; Οι αγκυλωτοί σταυροί; Και όλα αυτά που έστειλαν εκατομμύρια ανθρώπους σε φούρνους στο μεγαλύτερο έγκλημα της ανθρωπότητας;
Σε ικανοποιεί το στυλ τους; Τα μαύρα; Η στρατιωτική πειθαρχία;
[…]
Τι στο διάολο σε ικανοποιεί επιτέλους;

Vous êtes dangereux. Et fasciste.
Ce n'est pourtant pas la première fois. Ils avaient leurs “idées claires comme du cristal”. Ils étaient de “bons gars”. Et ensuite, la meilleure. “La satisfaction qu'ELAM entre au Parlement. Pour que d'autres voix se fassent entendre maintenant”.
Mais pourquoi ? Si nous avions envie d'écouter un fasciste, c'est vous que nous écouterions. Pas besoin d'ELAM aussi, non ?
Qu'est-ce qui vous satisfait au juste ?
Le fait que c'est une succursale d'Aube Dorée ?
Ce qui vous satisfait, c'est leur point de vue sur les êtres humains ? nos concitoyens ? les migrants ? les réfugiés ? les opprimés ?
[…]
Etes-vous satisfait qu'ils ne condamnent pas le nazisme ? satisfait des svastikas ? des croix gammées ? De tout ce qui a envoyé des millions de gens brûler dans les crématoires, le plus grand crime de l'humanité ?
Etes-vous satisfait par leur allure ? Les vêtements noirs ? La discipline militaire ?
[…]
Bordel, qu'est-ce qui vous satisfait à la fin ?

D'autres ont pointé la montée des partis d'extrême-droite dans toute l'Europe et le lien entre l'idéologie conservatrice et les mesures d'austérité imposée ces dernières années dans divers pays de l'Union Européenne, quand Chypre même a plongé dans une crise financière en 2013 :

L'entrée des fascistes d'ELAM au parlement chypriote prouve que l'austérité et la Troïka [le comité tripartite formé par la Commission de l'Union Européenne, la Banque Centrale Européenne et le Fonds Monétaire International] sont les plus grands pourvoyeurs du fascisme moderne !

Gros choc de l'entrée de l'extrême-droite d'ELAM au parlement chypriote. Le serpent s'étend dans toute l'UE. Et c'est un danger plus grand que les déficits des finances.

“Serpent” fait allusion à l'expression “l'oeuf du serpent”, courante en grec pour désigner la montée du fascisme ou du nazisme. C'est en réalité le titre d'un film de 1977 du réalisateur suédois Ingmar Bergman, inspiré par un vers de Shakespeare, qui montrait l'Allemagne d'après-guerre plongée dans la pauvreté et l'inflation.

‘L'archevêque de Chypre dit les choses comme elles sont’

Il y a évidemment eu des messages d'approbation, émanant de politiciens d'extrême-droite ou d'usagers des médias sociaux, qui considéraient qu'ELAM n'est coupable que d'exprimer les pures et authentiques valeurs nationalistes.

Un tweet de Christos Pappas, député grec d'Aube Dorée, a proclamé :

Vive ELAM
Vive Aube Dorée
Deux pays, une seule nation
Deux partis politiques, une seule lutte

Les articles de presse ou les billets Facebook ont regorgé de propos louant le succès d'ELAM ou les propos de l'archevêque :

Γιώργος Χατζηθεοδωρίδης ΣΥΓΧΑΡΗΤΙΡΙΑ ΣΤΟΥΣ ΚΥΠΡΙΟΥΣ ΠΑΤΡΙΩΤΕΣ ΓΙΑ ΤΗΝ ΕΠΙΛΟΓΗ ΤΟΥΣ 

Félicitations aux patriotes chypriotes pour leur choix

27/05/2016 02:43
Πολύ σωστά τα λέει ο αρχιεπίσκοπος Κύπρου

L'archevêque dit les choses comme elles sont

«πρέπει να ακούγονται πολλές φωνές και οι ακραίοι, ώστε οι άλλοι να είναι προσεκτικοί και να μην αποφασίζουν κατευθείαν επειδή έχουν τη δύναμη».
Ορθότατη τοποθέτηση, με εξαίρεση το «ακραίοι». «Λαϊκά δεξιά κόμματα», θα ήταν καλύτερο.

“Beaucoup de voix doivent être entendues, les extrémistes aussi, pour que les autres soient prudents et ne décident pas immédiatement, juste parce qu'ils ont le pouvoir”.
Excellente position, sauf le passage sur les “extrémistes”. Ce serait mieux de dire “partis de la droite populaire”.

ELAM a pris une posture nationaliste dans les actuelles négociations de réunification de l'île avec les Chypriotes turcs. L'île est actuellement divisée selon des lignes ethniques entre une république chypriote grecque reconnue internationalement au sud, et une république chypriote turque sécessionniste au nord, crée par l'invasion turque de 1974 à la suite d'un coup d'Etat militaire à Chypre visant une réunification par le biais d'une annexion de toute l'île par la Grèce.

Au Guyana, une campagne de témoignages pour lutter contre le harcèlement de rue

vendredi 3 juin 2016 à 20:09
Screen grab of the banner image of the WITNESS Project website, which has undertaken a campaign to stop street harassment in Guyana.

Capture d'écran du bandeau du site web du projet WITNESS, qui a lancé une campagne pour mettre fin au harcèlement de rue au Guyana.

Sur une photographie en noir et blanc affichée dans les toilettes d'un café fréquenté de la capitale du Guyana, une jeune femme tient une pancarte sur laquelle on peut lire « Laisse-moi tranquille ! ». Les termes « hé beauté » (sic), « ah j'ai envie de baiser ces lèvres» (sic) et « hé la meuf viens t'asseoir ici » (sic) sont tracés à la craie autour de sa tête.

Puis apparaît le slogan — « Ce n'est pas un compliment, c'est du harcèlement ».

L'affiche fait partie d'une campagne de terrain et sur Internet du projet WITNESS [témoin], à l'initiative d'un groupe de jeunes vivant pour la plupart à Georgetown et dans ses environs qui font appel à l'art et aux médias pour faire prendre conscience de la violence de genre et de la maltraitance infantile au Guyana.

Elle s'inscrit dans le cadre d'une campagne en trois volets qui s'appuie également sur des ateliers et les médias sociaux pour tenter d'engager le dialogue. Depuis ses débuts, le projet a reçu des dizaines de témoignages de femmes et même de certains hommes, comme l'a souligné le directeur du programme des bénévoles de WITNESS Rosheni Takechandra lors d'un entretien en face à face le 28 mai 2016 :

Basically what happened to them, how it made them feel, ways they’ve dealt with it and the results of that. Each story is unique to the person’s experience, but overall the harassment is the common thing.

En gros ce qui leur est arrivé, comment elles se sont senties, la manière dont elles y ont fait face et ce qu'il en a résulté. Toute histoire est propre à l'expérience de la personne, mais globalement le harcèlement est le dénominateur commun.

La page Facebook du projet a recueilli près de 2000 j'aime, et de nombreuses jeunes Guyanaises ont partagé leurs propres expériences du harcèlement de rue. Shelly Harris raconte son histoire sur Facebook :

I have faced down groups of touts. I stood my ground; looked them in the eye boldy and told them with enough venom to out supply a poisonous snake, not to touch and I would repeat as though I am just crazy enough.
Eventually, after some training, from the time I got to the bus park, I could hear one or two saying: ‘Don’t touch she.’

J'ai tenu tête à des bandes de racoleurs. J'ai tenu bon ; les ai regardés dans les yeux avec audace et leur ai dit avec assez de venin pour vider un serpent de son poison de ne pas me toucher, et je l'ai répété comme si j'étais un peu folle. A force, avec de la pratique, dès que je me rendais à l'arrêt de bus, j'en entendais un ou deux qui disaient : « Ne la touchez pas. »

La journaliste indépendante Carinya Sharples écrit dans un post de blog :

I usually feign deafness and walk on. But words are harder to ignore – and my irritation levels vary according to the language, context and man.

Je feins en général la surdité et continue à marcher. Mais les mots sont plus difficiles à ignorer – et mon degré d'irritation varie en fonction du langage, du contexte et de l'homme.

Dans une vidéo mise en ligne sur le site, Haresh, qui participe au projet WITNESS, se voit demander pourquoi — en tant qu'homme — il s'intéresse au problème :

I think respect for women is vital and it starts with everyday interactions.

Je pense que respecter les femmes est essentiel et cela commence dans les interactions quotidiennes.

Lors de son entretien avec Global Voices, Takechandra a révélé qu'à l'origine, le groupe était dans l'incertitude quant à la manière dont se déroulerait le projet, en raison notamment du fait d'envoyer sur le terrain de jeunes femmes et de jeunes hommes bénévoles pour s'exprimer sur le sujet :

I think it would be fair to say that it’s an abusive and a very aggressive culture, verbally, even physically and the newspapers attest to that when you see the level of violence in Guyana.

Je pense qu'il serait juste de dire que c'est une culture très agressive et faite de violences, verbales, même physiques et les journaux en témoignent lorsque l'on voit le degré de violence au Guyana.

Les gens abordaient semble-t-il souvent les membres du groupe, même lorsqu'ils collaient des affiches :

We realized that lots of men were willing to have a conversation to justify why they should harass women. That’s what we wanted. We wanted to ignite and spark conversations.

Nous nous sommes rendu compte que de nombreux hommes étaient désireux d'avoir une conversation [avec nous] pour se justifier de harceler des femmes. C'est ce que nous voulions. Nous voulions favoriser et susciter la discussion.

Alors, elles ont commencé à organiser des ateliers et des groupes de parole pour recueillir directement les témoignages des hommes. Takechandra explique :

Men were saying that they didn’t know. Men were saying, ‘I thought women liked this. I thought they wanted to know how they look and about their body parts. I had no idea that women didn’t like it.’

Les hommes déclaraient qu'ils ne savaient pas. Les hommes disaient, « Je pensais que les femmes aimaient ça. Je pensais qu'elles voulaient savoir de quoi elles ont l'air et de quoi a l'air leur corps. Je ne me doutais pas que les femmes n'aimaient pas ça. »

Takechandra affirme que, pour l'instant, la campagne a reçu plus de réactions positives que négatives, de nombreux hommes ayant ainsi déclaré qu'ils ne réalisaient pas que c'était un problème et d'autres ayant promis d'arrêter — même si tous les hommes auxquels elles ont parlé n'étaient pas convaincus :

They say ‘I’ve been doing this since I was [little]. My father used to do it. My uncle used to do it. I can do it. Women like it. If a woman looks a certain way, she should know.’

Ils disent « Je fais ça depuis que je suis [petit]. Mon père le faisait. Mon oncle le faisait. Je peux le faire. Les femmes aiment ça. Si une femme a telle apparence, elle doit le savoir.

La violence de genre est endémique dans la culture guyanaise. D'après le site web de Help and Shelter, le principal foyer d'accueil de Georgetown, entre un tiers et deux tiers des femmes ont été victimes de violence conjugale dans le pays.

Le foyer est l'un des principaux soutiens institutionnels du projet WITNESS et arbore sur sa façade la peinture d'un panneau publicitaire. Le projet a également reçu un soutien financier de la part de la fondation Margaret Clemons à New York.

En septembre, la campagne de WITNESS étendra de nouveau son programme afin d'y inclure des ateliers de formation de témoins — destinés aux filles et aux garçons — dans plusieurs écoles de Georgetown. Takechandra affirme que les expériences de groupe leur ont enseigné que les harceleurs cessaient souvent de s'en prendre aux femmes dès lors qu'un autre homme intervenait. Ils souhaitent à terme organiser la formation dans toutes les écoles guyanaises. Takechandra prévoit dans chaque atelier de demander aux participants de s'engager à lutter contre le harcèlement :

If it’s anyone who will change behavior and send a strong message, it’s the younger population.

S'il y en a qui sont susceptibles de modifier leur comportement et envoyer un message fort, ce sont bien les jeunes.

L'archevêque de Valence (en Espagne) en croisade contre “l'Empire Gay”

jeudi 2 juin 2016 à 20:59
Cañizares en la misa de su toma de posesión como arzobispo de Valencia

Le cardinal Cañizares à sa messe inaugurale à Valence. Capture d'écran d'une vidéo YouTube de l'archdiocèse de Valence.

L'Espagne “assiste [ces dernières années] à une escalade majeure contre la famille de la part des dirigeants politiques, avec l'aide d'autres pouvoirs comme ‘l'empire gay’ et certaines idéologies féministes,” a déclaré l'archevêque de Valence, Antonio Cañizares, dans son homélie lors d'une messe célébrée au siège valencien de l’Institut pontifical Jean-Paul II d'étude sur le mariage et la famille.

Le cardinal catholique a aussi affirmé que l'Espagne était le pays européen “où l'augmentation du nombre des avortements, des divorces et des unions civiles est la plus forte”, et dénoncé les lois inspirées par “l'idéologie du genre” (l'idée que les différences entre hommes et femmes sont des constructions sociales) comme “les plus insidieuses de l'histoire de l'humanité”.

Le cardinal Cañizares appartient à l'aile dure de l'Eglise catholique, qui a dominé l'Espagne durant les papautés  de Jean-Paul II et Benoît XVI, mais semble en recul sous François. Ce qui n'empêche pas certains de ses figures de proue de continuer à attaquer la communauté LGBT, en alimentant d’aigres controverses.

Sans surprise, ses propos ont allumé de féroces discussions. Sur Twitter, les mots de l'archevêque ont été pris avec humour, et une avalanche de tweets et de memes a hissé l'expression “Empire Gay” en tête de tendance le 19 mai.

Retenir ce nom pour un sauna : Empire Gay

Si ça n'est pas le fruit de l'empire gay, je ne sais pas ce que c'est.

 Empire Gay.

Le cardinal Cañizares : L'Empire Gay prépare une attaque contre les familles.

Buenafuente, caracterizado de Darth Gayer

Buenafuente, personnage de Darth Gayer. Photo : eldiario.es sous licence CC BY-SA 3.0

L'humoriste Andreu Buenafuente, dans son émission Late Motiv, s'est déclaré “un grand fan de Cañi” et a consacré son monologue au cardinal :

Cañizares, los días que sale el arco iris, no sale de casa. Él cree que vendrá Elton John y se lo va a llevar al infierno a ver vídeos de George Michael hasta que los ojos le sangren.

Cañizares ne sort pas de chez lui les jours où il y a un arc-en-ciel. Il croit qu'Elton John va venir l'emporter en enfer regarder des vidéos de George Michael jusqu'à ce que les yeux lui en saignent.

Tout le monde n'a pas goûté l'homélie du cardinal. Paco Ramírez, directeur de l'Observatoire espagnol de la LGBT-phobie a publié une cinglante Lettre ouverte de l'Empire Gay contre le druide Panoramix Cañizares”, dans laquelle il qualifie le cardinal de “fou” et cite des études scientifiques “ayant découvert que l'homophobie et l'intolérance irrationnelles résultent de problèmes psychologiques, que ces gens sont prédisposés à des troubles psychotiques pouvant, dans des cas extrêmes, tourner à la schizophrénie”. Ramírez accuse également Cañizares d'inciter à la violence homophobe :

Como Panorámix el druida de “Astérix y Obélix”, se empeña en seguir defendiendo con furia y rencor una concepción de la sociedad y de la Iglesia caduca y que ya no existe, el mundo ha cambiado y su Aldea Gala de la ortodoxia fundamentalista se ha convertido en un burbuja traslúcida que no le permite ver que sus homilías en vez de difundir el mensaje de amor y concordia del Evangelio son un altavoz para el odio, la confrontación y la incitación a la violencia.

Comme le druide Panormaix de [la bande dessinée française] “Astérix et Obélix,” il est déterminé à continuer à défendre avec fureur et rancoeur une conception de la société et de l'Eglise caduque et disparue, le monde a changé et son village gaulois de l'orthodoxie fondamentaliste s'est transformé en bulle translucide qui l'empêche de voir que ses homélies, au lieu de diffuser le message d'amour et de concorde de l'Evangile, sont un porte-voix pour la haine, la confrontation et l'incitation à la violence.

Dans une société comme l'espagnole, de plus en plus sécularisée et traditionnellement tolérante des identités sexuelles minoritaires, peu de voix ont défendu Mgr Cañizares. Sur periodistadigital.com, l'utilisatrice ‘Mar’ a dit son accord avec l'archevêque :

Me adhiero completamente a sus declaraciones señor Obispo. Hay q ser valiente para expresarlas. Hoy por hoy los vicios están de moda, entre ellos la homosexualidad y el feminismo. Pero qué es esto? Tan vacío está el ser humano que necesita llamar la atención de cualquier forma? El exhibicionismo y la agresividad de estos grupos lo confirman.

J'adhère totalement aux déclarations de mgr l'évêque. Il faut du courage pour les exprimer. De nos jours, les vice sont à la mode, entre autres l'homosexualité et le féminisme. Mais qu'est-ce que c'est ? L'être humain est-il si vide qu'il doive attirer l'attention sous n'importe quelle forme ? L'exhibitionnisme et l'agressivité de ces groupes le confirment.

Sur Infocatolica.com, Edith se dit consciente du “problème” :

Todos ya nos estamos dando cuenta de la furibunda dictadura gay.

Nous nous rendons tous compte de la furibonde dictature gay.

El cardenal Cañizares con la «capa magna» en 2007, durante una ordenación de sacerdotes en Toledo

Le cardinal Cañizares avec la “cappa magna” en 2007, lors d'une ordination de prêtres à Tolède en 2007. Photo : laicismo.org

Mais une majorité d'Internautes a condamné la sortie de Cañizares, qualifiant son discours de rance et obsolète :

Androcentritis (en eldiario.com): A ver si se enteran estos hombres célibes y castos de que la única autoridad que tienen es con respecto a sus subalternos y que no pretendan meterse en las camas ni en las braguetas de los miembros de la sociedad civil del siglo XXI (no XI ni XII).

Androcentritis (sur eldiario.com) : Il faut que ces hommes célibataires et chastes comprennent que leur seule autorité leur vient de leurs subalternes et qu'ils ne doivent pas prétendre s'immiscer dans les lits et les braguettes des membres de la société civile du XXIème siècle (pas du XIème ou XIIème).

Roberto (en infocatolica.com): El Cardenal Cañizares cumple su misión, como pastor de la Iglesia defender el modelo de familia católica; el problema que es que gran parte de la población ha dejado de ser católica (si es que alguna vez lo fue) y entonces la forma de entender la familia, la sexualidad, las relaciones, etc para mucha gente ya no está centrada en la fe y en la moral que se deriva de ella.

Es un problema que se va a dar cada vez más, lo obispos y sacerdotes en cuestiones de moral (aunque su mensaje vaya dirigido a todos), tendrán que considerar que solamente la comunidad católica va a ser la receptora de sus mensajes, y esta comunidad va a ser menos numerosa y mas envejecida.

Roberto (sur infocatolica.com) : Le Cardinal Cañizares remplit sa mission de pasteur de l'Eglise de défendre le modèle de la famille catholique ; le problème est qu'une grande partie de la population a cessé d'être catholique (si elle l'a jamais été), et donc la façon de comprendre la famille, la sexualité, les relations, etc,. pour beaucoup de gens n'est plus centrée sur la foi et la morale qui en découle.

C'est un problème qui se verra de plus en plus, les évêques et prêtres devront considérer que sur les questions de morale (bien que leur message soit destiné à tous) la communauté catholique sera seule réceptrice de leurs messages, une communauté moins nombreuse et plus âgée.

Quant aux implications juridiques potentielles des propos de l'archevêque, Lambda, un collectif de défense des droits des LGBT, a porté plainte devant le procureur régional pour délit de haine “avec ses propos homophobes et sexistes qui ne font qu'inciter à la haine contre ceux qui n'entrent pas dans les modèles archaïques défendus par la hiérarchie catholique”.

Au milieu de la cacophonie, le pape François a convoqué l'archevêque au Vatican, une audience inattendue dans laquelle, à en croire eldiario.es, “les propos de l'empourpré ont fait le gros de la conversation”.

(…) el Papa Francisco no quiere que los obispos españoles sigan boicoteando el cambio de mensaje que pretende hacer llegar desde la Iglesia. Y menos, en un momento en el que “España está viviendo un momento electoral y político muy complicado” en el que la Iglesia “debe ser instrumento constructivo, y no elemento desestabilizador”, apuntan fuentes eclesiásticas.

(…) Así, mientras desde el Vaticano se han abandonado las palabras gruesas contra los homosexuales, los divorciados o cualquier cuestión relativa a la moral sexual, algunos obispos (…) siguen empeñados en hacer del sexo un caballo de batalla.

[…] Le Pape François ne veut pas que les évêques espagnols continuent à boycotter le changement de message qu'il veut propager de l'Eglise. Encore moins dans un moment où “l'Espagne traverse une période électorale et politique très complexe” où l'Eglise “doit être un instrument constructif, et non un élément déstabilisateur”, notent des sources ecclésiastiques.

[…] Ainsi, alors qu'au Vatican on a abandonné les gros mots contre les homosexuels, les divorcés ou toute question relative à la morale sexuelle, quelques évêques […] persistent à vouloir faire du sexe un cheval de bataille.

Les discriminations de classe dans le cinéma mexicain entre divertissement et sujet de société

mercredi 1 juin 2016 à 17:37
Portadas de películas mexicanas destacadas que son mencionadas en este post. Imagen del autor.

Affiches de films mexicains connus qui sont évoqués dans cet article. Image de l'auteur.

Les films mexicains qui exploitent les discriminations de classe (ou classisme) et les inégalités sociales sont ceux qui connaissent le plus de succès dans les salles, le dernier exemple en date étant le film depuis peu à l'écran ¿ Qué culpa tiene el niño ? [Est-ce la faute de l'enfant ?].

Comme je l'ai souligné dans des travaux précédents [fr], les inégalités sociales et la pauvreté qui ravagent le pays ont conduit les personnes dotées d'un fort pouvoir d'achat à se comporter avec arrogance et hauteur vis-à-vis du reste de la population, rendant plus visible l'asymétrie et les excès et extravagances qui l'accompagnent.

Il n'est pas anodin que le film Nosotros los nobles [Nous les nobles] (2013) ait été en son temps l’œuvre mexicaine ayant réalisé le plus d'entrées de tous les temps. Il raconte l'histoire d'une famille fictive qui, après s'être trouvée au sommet de l'élite socio-économique mexicaine, est confrontée à la difficulté de vivre comme le reste de la population, c'est-à-dire avec les revenus d'emplois mal payés auxquels ont accès les personnes sans influence ni pouvoir : un protagoniste est embauché comme employé de banque, un autre est conducteur de transport en commun et une troisième est serveuse dans une cafétéria où elle doit porter une minijupe moulante pendant sa journée de travail.

En mai 2016, dans près de 1100 salles de cinéma a eu lieu la première de ¿Qué culpa tiene el niño? du réalisateur Gustavo Loza. Selon le journal Milenio, le film a dépassé les audiences de Angry birds, le film [fr] et de la superproduction hollywoodienne Captain America: Civil War [fr]. La recette est toujours la même : railler les discriminations de classe au Mexique. Alejandro Alemán [N.d.T critique de cinéma panaméen] la résume ainsi :

El humor en esta cinta versa sobre un solo gag. La diferencia social entre Maru y Renato así como el choque de clase que presupone la reunión de ambas familias. Mientras Maru es hija de un importante diputado (Jesús Ochoa haciendo su personaje de siempre) que vive en una cuasi mansión, Renato vive en una unidad habitacional con su mamá (Mara Escalante, haciendo de su personaje una revisión de otro similar que hace en la televisión); mientras Maru tiene un trabajo respetable en Santa Fe, Renato tendrá que meterse de repartidor de pizzas; mientras la familia de Maru bebe champaña, la familia de Renato bebe tepache.

L'humour dans ce film tourne autour d'un seul gag : la fracture sociale entre Maru et Renato ainsi que l'affrontement de classe que suppose la rencontre des deux familles. Alors que Maru est la fille d'un important député (Jesús Ochoa dans son rôle habituel) qui vit dans un quasi château, Renato habite un appartement avec sa mère (Mara Escalante, dont le personnage est une réplique de celui qu'elle interprète à la télévision) ; alors que Maru a un travail respectable à Santa Fe, Renato devra devenir livreur de pizza ; alors que la famille de Maru boit du champagne, la famille de Renato boit du tepache.

[Note : Santa Fe est un quartier de la ville de México qui a connu ces dix dernières années un processus de gentrification [fr] à travers la construction d'immeubles de bureaux et d'espaces commerciaux exclusifs. Par ailleurs, le tepache est une boisson fermentée à base d'ananas dont la consommation est de plus en plus rare, et qui est habituellement destinée aux plus bas revenus de la capitale mexicaine.]

La curiosité malsaine que suscitent chez les téléspectateurs mexicains les relations sentimentales entre des personnes appartenant à différentes classes sociales a été exploitée dans Amarte duele [T'aimer fait mal] (2002) et un grand nombre de films représentatifs de la production cinématographique mexicaine, dont certains remontent même à 1959 comme Alejandro Alemán le note lui-même dans son article.

Le fait que les inégalités sociales soient au cœur du film a été relevé sur les réseaux sociaux par des utilisateurs comme Rufián, qui écrit sur Twitter :

Francisco Blas considère pour sa part que l'on va au cinéma pour se divertir :

Il convient de souligner que l'industrie du cinéma populaire mexicain est peu reconnue en-dehors du pays car rares sont les œuvres de qualité qui franchissent les frontières. Les long-métrages mexicains de renom se comptent sur les doigts d'une main. Le plus célèbre d'entre eux est peut-être Amores perros [fr, Amours chiennes] dirigé par celui qui a depuis reçu de multiples récompenses et est maintenant reconnu au niveau international, Alejandro González Iñárritu.

Et comment ne pas évoquer le travail de Luis Estrada et sa critique opportune de la corruption morale de la classe politique et des pouvoirs de fait, tant dans La ley de Herodes [La loi d'Hérode] (1999) que dans La dictadura perfecta [La dictature parfaite] (2014) plus les œuvres dirigées par Estrada entre-temps. Mais cela s'arrête là. L'immense majorité du cinéma commercial mexicain est dominée par des comédies romantiques imprégnées de cet élitisme profond qui caractérise (et semble plaire à) un vaste pan de la société mexicaine.

La satire a toujours donné du mordant à la critique de conduites indésirables ou à dépasser. Au Mexique, les discriminations de classe sont utilisées comme argument de vente pour faire venir les gens dans les salles de cinéma et les faire rire un moment. Cependant, cet élitisme devra un jour être abordé sérieusement, comme un problème qui ne provoque plus l'hilarité générale et qui a conduit ces derniers mois à des épisodes affligeants de discriminations, d'abus de pouvoir et d'agressions envers des fonctionnaires, comme nous l'avions déjà signalé dans d'autres articles.