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Comment l'EIIL en est venu à poser sa marque noire sur la Syrie

jeudi 21 août 2014 à 18:30

Cet article fait partie d'une série spéciale écrite par la blogueuse et militante Marcell Shehwaro pour raconter la vie réelle en Syrie pendant l'actuel conflit armé entre les forces loyalistes au régime actuel et celles qui veulent y mettre fin.

تصوير عدسة شاب حبي على فيسبوك

Un camp de l'EIIL à Alep. Source photo source : Lens Young Halabi (Facebook)

Quand on m'a demandé d'écrire sur l'Etat Islamique en Syrie et au Levant (EIIL), j'ai laissé Ia page blanche ouverte plusieurs jours sur mon ordinateur. Comment devais-je écrire sur l'EIIL pour les autres, pour ceux qui n'ont pas souffert de la même quantité de violence et de chaos ? Et quelle responsabilité portons-nous en tant que Syriens, en comparaisons avec le reste du monde, dans la création de l'EIIL ?

Tout d'abord, je dois expliciter que les Syriens n'ont pas eu la possibilité de faire leurs emplettes au “Supermarché de la Victoire”, où des marchandises comme l'option d'une fuite d'Assad dans le style du Tunisien Zine El Abidine Ben Ali, ou d'une démission comme l'Egyptien Hosni Moubarak, auraient été en vente. Nous n'avions pas non plus assez de pétrole pour acheter l'option OTAN, comme la Libye. Au lieu de quoi, nous avons acquis Al-Qaida, que nous avons trouvé ficelé de ruban jaune dans la caisse des promotions.

Plus simplement dit, nous Syriens n'avons pas eu le luxe du choix, tandis que d'autres avaient des plans pour se débarrasser de leurs produits avariés dans notre pays, en se servant du sang de notre jeunesse.

Six mois après avoir commencé, la révolution syrienne, qui est dans sa quatrième année, a lancé un SOS le jour des manifestations appelées Vendredi de la protection internationale”. C'était un appel à l'établissement d'une zone d'exclusion aérienne, à la fin de l'extension des délais, à l'expulsion des ambassadeurs, au soutien de l'Armée Syrienne Libre, et à une intervention internationale. 

La Révolution exigeait que chacun prenne ses responsabilités devant l'humanité, et comme c'était un appel ouvert, c'est hélas Al Qaida qui y a répondu.

Nous Syriens sommes-nous alors les seuls responsables de l'émergence de l'EIIL ? EIIL n'est pas le produit de nos rues ni de nos plans. Nous n'avions pas besoin d'eux pour qu'ils en terrorisent d'autres, et ils n'ont pas eu besoin de notre permission pour franchir nos aéroports fermés.

Contrairement à ce que disent certains, ils sont venus chez nous à travers des frontières ouvertes. Ils sont venus chez nous par d'autres aéroports, porteurs des passeports de leurs pays. Ils sont venus chez nous grâce au préjugé et à la peur inspirées par les barbus, distraits par la vue du sang de l'enfant que l'homme tenait dans ses mains.

Je ne veux pas, même pour une seconde, que nous nous lavions les mains de notre responsabilité de Syriens, de la croissance de ce cancer sur notre sol. Au final, certains ont fait allégeance à l'EIIL à cause de la pauvreté. Les vieux suppôts d'Assad, ces amoureux du pouvoir et lèche-bottes, ont fait de même en anticipation du nouveau pouvoir, car il leur est égal de devenir puissants au nom de l'EIIL ou d'Assad.

Dans leur naïveté nos rebelles ont poursuivi, croyant que l'EIIL était venu à notre secours, disant qu'il serait ingrat de parler de leurs défauts, vite devenus crimes. Des milliers d'hypocrites, de profiteurs et de marchands de religion et de guerre ont continué à se vautrer dans la lâcheté, suivant l'exemple des multiples religieux qui ont eu trop peur de mettre en garde la jeunesse contre l'allégeance à EIIL.

Les combattants démunis de l'Armée Syrienne Libre ont été éblouis par l'équipement de ceux d'EIIL, qui, comparé à leurs pauvres fusils, paraît tiré du jeu vidéo Counter-Strike. Peu à peu, ils ont dépouillé leur sens d'appartenance à leur patrie, et certains ont basculé du côté des tueurs.

Ils ont perpétué nos maudites divisions politiques et idéologiques jusqu'à ce que nous soyons noyés dans la pestilence du sang, au point que certains étaient prêts à s'allier avec le diable, ne serait-ce que pour que cette guerre prenne fin. Et c'est ce qui s'est passé : nous nous sommes alignés avec le diable. Et ils nous ont fait craindre notre laïcité, sous prétexte qu'elle détruirait notre unité. Et pour protéger les priorités du combat, il nous ont fait craindre nos rêves d'Etat démocratique civil.

Si tout cela est de notre responsabilité, c'est aussi nous qui avons payé de notre sang pour combattre cette entité. Et jusqu'il y a peu, c'est nous qui avons souffert le plus de son extrémisme et de son occupation de notre pays. Nous avons aussi souffert de ses tentatives pour laver le cerveau de nos jeunes. Ce sont nous rebelles qui, en une fraction de seconde, avons été revendiqués par deux Etats, entraînant d'autres pays à s'intéresser à un avenir qui, nous en sommes sûrs, sera criminel—pas seulement pour nous comme nation, mais pour l'humanité entière. A quoi cet extrémisme donnera-t-il naissance dans le futur ? Et qui, parmi les innocents de la terre, ciblera-t-il ?

EIIL a occupé notre pays parce qu'ils considèrent que les Syriens n'ont pas de véritable nation. Pour eux, ce que nous avons est un produit de l'Occident infidèle. L'occupation de notre pays a été annoncée sur Al Jazeera le 9 avril 2013, et de ce jour EIIL nous combat. Ils nous combattent comme une révolution qu'ils ne reconnaissent pas, en persistant à brûler notre drapeau et enlever et faire diparaître nos rebelles. Et contrairement à nos autres adversaires, personne n'ose poser de questions.

Je me rappelle encore le temps où je faisais la route entre Alep et la Turquie. Je voyais de nombreux points de contrôle d'EIIL en chemin, et m'apercevais avec douleur qu'ils avaient changé de force les noms de nos villages des campagnes. Il reste peu de traces qu'on est en Syrie. Ils ont peint tous les drapeaux révolutionnaires en noir. Ils ont effacé les noms des villages, qu'ils ont remplacés par d'énormes pierres noires sur lesquelles est écrit “L'Etat islamique en Irak et Syrie vous souhaite la bienvenue”.

J'ai peur de tourner en ridicule cette occupation éhontée. J'ai peur, parce que les Palestiniens ont autrefois tourné en ridicule ce qu'ils pensaient être le concept d'une nation qui ne pourrait être réalisée sur leur sol, et parce que les révolutionnaires iraniens ont autrefois ri à l'idée qu'un Etat théocratique pourrait engloutir leur révolution. J'ai peur de me moquer de la situation, et pétrifiée à la pensée que je pourrais entrer dans le premier stade du deuil, qui est le déni, pour finir dans le compromis et la résignation.

Les mots du chauffeur de bus qui avait remarqué ma tristesse sonnent encore à mes oreilles. “Demain il pleuvra, et tout ce noir s'en ira,” a-t-il dit. Je prie pour qu'il pleuve sur Al Riqqa, Al Bab, Manjib et Mossoul, et toutes les zones tenues par EIIL. Mais auparavant, pour que les nuages les atteignent, il faut qu'il pleuve à Damas.

Marcell Shehwaro blogue sur marcellita.com et tweete sur @Marcellita, essentiellement en arabe. Les autres articles de la série, dont certains existent en français, sont ici.

10 000 m3 de bois illégal abattus au Cameroun selon Greenpeace Afrique

jeudi 21 août 2014 à 16:08
Plants d'arbres

Plants d'arbres à Dimako (Est-Cameroun) Photo de Nestor Nga Etoga

Un trafic de bois illégal du Cameroun vers les marchés internationaux s'opère au vu et au su du Ministère des Forêts et de la Faune (MINFOF) et l'Union européenne (UE), selon Greenpeace Afrique.

Greenpeace Afrique a obtenu des preuves qu’Uniprovince, une société détenue par Herakles Farms, a abattu au moins 10 000 m3 de bois à des fins commerciales. Des documents officiels du port de Douala montrent qu’une cargaison de plus de 3000 m3 a déjà quitté Douala pour le port chinois de Zhangjiagang.

C’est sans surprise que nous avons appris que ce bois trace son chemin vers la Chine malgré toutes les preuves de son illégalité

a déclaré Irène Wabiwa, Responsable de la campagne Forêt à Greenpeace Afrique.

Dans un rapport publié en mai, Permis de piller, Greenpeace Afrique a documenté comment Uniprovince a obtenu une vente de coupe sans passer par la procédure d’enchères publiques, en violation de la loi camerounaise. Wabiwa explique que : 

Trois procureurs de l'État camerounais ont reçu des informations prouvant l’illégalité de l'exploitation forestière d’Uniprovince, mais aucune mesure n'a été prise à notre connaissance. Le MINFOF et l’UE, en charge de la mise en œuvre de l'accord de partenariat FLEGT, ont également été informés à plusieurs reprises; mais malheureusement, cela n'a pas empêché le bois d'être exporté “.

sur la route de Kent-zou à l'Est cameroun

sur la route de Kent-zou à l'Est cameroun avec la permission de l'auteur

Le 19 août, Greenpeace Asie de l'Est a présenté ces preuves aux autorités compétentes en Chine, en leur demandant d'enquêter sur la société chinoise impliquée dans l'importation de ce bois illégal d’Herakles Farms/Uniprovince. Malheureusement, le cas de la Vente de Coupe d’Uniprovince n'est que la partie apparente de l'iceberg. Il y a de fortes chances que l’attribution de treize autres ventes de coupe, à diverses sociétés d’exploitation forestière cette année dans la région de Kribi, n’aurait pas respecté la procédure non plus.

Une grande proportion du bois issu des ventes de coupe au Cameroun Search Cameroun a pour destination la Chine via le port de Zhangjiagang. La Chine ne disposant pas encore d'une législation interdisant l’importation de bois illégal.

#EgyPoliceTipsToUS : Quand le pouvoir égyptien demande aux USA de “faire preuve de retenue à Ferguson”

jeudi 21 août 2014 à 14:56

Les utilisateurs de Twitter, en Egypte et ailleurs, donnent des conseils à la police américaine sur la meilleure façon de traiter les désordres actuels à Ferguson, Missouri.

Le mot-clé ironique #EgyPoliceTipsToUS [Conseils de la police égyptienne aux Etats-Unis] a été créé sur Twitter en réaction à une déclaration du gouvernement égyptien invitant les autorités américaines à “faire preuve de retenue” à Ferguson, où police locale en équipement anti-émeute et manifestants sont face à face depuis 11 jours, après qu'un policier a tué un jeune Noir désarmé. Les policiers de Ferguson, blancs à une écrasante majorité, ont brutalisé les journalistes sur les lieux et utilisé lacrymogènes et balles en caoutchouc contre les manifestants. 

Selon les twittos, l'Egypte est le pays le plus mal placé pour donner des leçons aux Etats-Unis, avec ses antécédents de violences dans la gestion de ses propres désordres depuis les débuts de la révolution égyptienne le 25 janvier 2011. Le mot-clé a donc rappelé quelques-unes des atrocités commises entre-temps par les forces de l'ordre égyptiennes contre les manifestants, sans oublier l'une des pages les plus sanglantes de l'histoire récente de la contestation, quand plus de 800 manifestants ont été tués à Rabaa [anglais] le 14 août 2013. 

Jason Stern, chercheur associé pour le Moyen-Orient au Committee to Protect Journalists, a tweeté :

Quels sont vos #ConseilsPoliceEgyptienne aux policiers américains de #Ferguson ?

Il a proposé les vidéos de conseils suivantes, montrant la brutalité et les stratagèmes de la police égyptienne :

3. Quand ça devient incontrôlable, faites faire votre sale boulot à des voyous à dos de chameau

Ne vous contentez pas de menacer les journalistes que vous allez leur tirer dessus. Tirez-leur vraiment dessus

Si vous déchirez les vêtements d'une femme en la frappant, veillez à la couvrir avant de continuer à frapper

D'autres utilisateurs de Twitter y sont allés de leurs propres conseils.

@befroggled, 760 abonnés, a rappelé les tests de virginité forcés [anglais] opérés par l'armée égyptienne sur les manifestantes de la place Tahrir en 2011.

Raflez les manifestantes pour des tests de virginité. C'était la méthode préférée du Président Sissi pour traiter les manifestantes féminines.

Elle évoque aussi l'utilisation par les autorités du prétexte du contre-terrorisme pour réprimer les contestataires :

Si vous êtes inquiets que votre répression des manifestants provoque un scandale, demandez un mandat de lutte contre le terrorisme.

Bilal Zrebel écrit pour ses 5.200 abonnés :

Des policiers en civil font d'une pierre deux coups : tuer des manifestants et les piéger en faisant croire qu'ils sont armés ! Gagnant-gagnant

Allusion au massacre de Rabaa, où la force publique égyptienne a tué en une journée plus de 800 manifestants, il y a un an, dont certains brûlés vifs, il écrit aussi :

Brûlez-les morts ou vifs, “soi-disant” le feu ne laisse pas de preuves !

OthmaNation, 1.500 abonnés, a cité le passage à tabac de la ‘manifestante au soutien-gorge bleu’ [anglais] par des militaires égyptiens lors d'une manifestation contre l'armée en décembre 2011.

Quand vous arrachez les vêtements aux femmes, prétendez qu'elles l'ont fait elle-mêmes pour piéger vos agents honnêtes.

Enfin, l'avocat Sherif Saaadni a partagé ce conseil avec ses 3.902 abonnés :

(Dénoncez TOUJOURS la violence et accusez les activistes de trahison ; l'opinion se laissera convaincre. Rejetez la faute sur un groupe. Les Républicains ?) 

N'appliquez pas des mesures graduées et préservant la vie en dispersant la foule. Où seraient le plaisir et la dissuasion ?

Une rencontre pour la préservation des langues indigènes du Mexique

jeudi 21 août 2014 à 13:27
'Colorful', Mexico, Oaxaca - Photo by Chris Ford  (CC BY-NC 2.0)

‘Colorful', Mexique, Oaxaca. Photo de Chris Ford (CC BY-NC 2.0)

Global Voices, via sa branche pour la formation Rising Voices, la Bibliothèque Juan de Córdova, et SURCO invite les personnes qui défendent les langues autochtones dans tout le Mexique à participer au rassemblement qui aura lieu du 3 au 5 octobre prochain au Centre culturel San Pablo dans le centre historique de Oaxaca de Juárez, au Mexique.

Le but premier de cette rencontre est d'offrir un espace pour des échanges et un apprentissage mutuel des 25 langues indigènes utilisées habituellement par ces militants des langues et de la technologie. 

 Le Mexique est un des pays d'Amérique latine le plus riche du point de vue linguistique, avec plus de 300 langues indigènes parlées et écrites quotidiennement.  Beaucoup de celles-ci sont menacées.  Des outils technologiques ont été récemment créés pour conserver une documentation linguistique et pour mettre à disposition des outils d'apprentissage en ligne permettant de les étudier et de les préserver.

 Une génération nouvelle est apparue qui utilise quotidiennement sa langue maternelle sur Internet (tweets, blogs, ou podcasts). De plus, on observe l'émergence de groupes d'utilisateurs d'internet qui se réjouissent de cette possibilité de promouvoir en ligne leur langue  et leur culture. Ils s'efforcent ainsi de lui  redonner vie en faisant apparaître une nouvelle génération de locuteurs.  C'est une prise de conscience de leur devoir envers leur communauté qui pousse ces personnes à consacrer leur temps et leurs compétences à cette cause.

En dépit de tous ces efforts, ils travaillent souvent dans un isolement relatif, affrontant des difficultés particulières et des défis permanents :

La bonne nouvelle est qu'il existe des stratégies possibles pour faire face à ces défis, comme le démontre le nombre grandissant de communautés qui ont réussi à utiliser les média participatifs pour promouvoir leurs langues en ligne. Il existe néanmoins toujours un besoin d'explorer des possibilités de mieux se connecter pour partager leurs histoires et leurs expériences.

C'est à ce niveau qu'intervient ce rassemblement, qui va rapprocher des blogueurs, réalisateurs et producteurs dans l'audio-visuel, des éditeurs de Wikipédia, et des militants du logiciel libre. Tous souhaitent créer un environnement numérique propice aux langues indigènes du Mexique. 

Au travers de débats entre partenaires et des ateliers pratiques, les opportunités ne manqueront pas pour les participants de développer leurs compétences numériques et d'entamer des discussions sur leurs préoccupations communes. De plus, ces ateliers sur le cyberactivisme en ligne et hors ligne pourront avoir un impact positif sur la vie de leurs communautés.

Sont prévues également deux rencontres publiques pour ceux qui souhaiteraient en apprendre plus sur la façon dont certaines communautés travaillent et sur la meilleure manière d'utiliser le numérique.

Tout ceux qui le souhaitent peuvent faire une demande de participation

Attention : Cette invitation ne concerne que les personnes parlant une langue indigène et résidant au Mexique. La date limite d'inscription est fixée au 29 août 2014. Pour plus d'information, voir le  formulaire de contact sur le blog de cet événement.

Internet n'oublie jamais : participez au débat international sur le ‘droit à l'oubli’ de l'Union Européenne

jeudi 21 août 2014 à 12:56
As the saying goes, "an elephant never forgets." Illustration by W.H. Drake, from Rudyard Kipling's "The Jungle Book." Copyright expired, image released to public domain.

Selon l'adage, “un éléphant n'oublie jamais.” Illustration de W.H. Drake, tirée du “Livre de la Jungle” 1895. Image du domaine public, libre de droits.

[Sauf indication contraire les liens dirigent sur des pages en anglais]

Oiwan Lam a participé à la rédaction de ce post.

Tout le monde a quelque chose à cacher – mais quand il s'agit d'internet devons-nous tous avoir le droit de pouvoir être oubliés ? En mai dernier, la Cour de Justice Européenne s'est prononcée en faveur de cette proposition [fr], et a décrété que tout européen peut demander aux moteurs de recherche de retirer des résultats de recherche le concernant toute information “obsolète” ou “sans objet”. Des entreprises comme Google, Yahoo ou Microsoft se sont élevées contre cette décision, qui les laisse responsables de décider quelles informations correspondent à ces critères.

Techniquement, n'importe qui peut exercer ce “droit” – il n'y a pas de frais ou de procédure spécifique réservée à certaines personnes ou connexions autorisées. En tant qu'utilisateur européen d'internet il vous suffit de remplir un formulaire en indiquant votre nom et les information relatives aux contenus que vous souhaitez faire disparaître des résultats de recherches. Depuis que la Cour de Justice Européenne a statué pour faire respecter et codifier le Droit à l'Oubli en mai dernier, Google a reçu plus de 91 000 demandes de retrait d'information dont environ la moitié a été honorée.

Les activistes qui défendent la liberté d'expression craignent que cette décision ne soit une porte ouverte aux entreprises et gouvernements qui pourront faire disparaître des résultats de recherches les informations douteuses les concernant. Et le fait que la décision de les faire disparaître incombe à des entreprises de technologie comme Google n'est pas une mince affaire : écarter le pouvoir judiciaire de cette décision est une sérieuse gaffe dans le domaine des droits en ligne.

Le problème est au centre des questions que nous nous posons tous les jours au sein de notre communauté. Nous sommes d'accord pour dire que certaines informations méritent un minimum de protection. Des données financières, une information sur la santé ou la sexualité des personnes en sont des exemples. Nous pensons que chacun a le droit de maintenir ces informations dans la sphère privée. Mais une informations sur les activités politiques d'une personne sont rarement faciles à classer. Il y a beaucoup de nuances.

Quelques mois après l'annonce de cette réglementation, Oiwan Lam, rédactrice en chef pour Advox Chine, s'est inquiétée sur ses conséquences auprès de ses contacts dans notre communauté. Elle demande : “Comment pouvons-nous nous prémunir contre la menace potentielle qui pèse sur la sphère publique en ligne si cette réglementation est appliquée ?”

Les échanges qui suivent montrent que les membres de notre communauté craignent que cette loi ne restreigne la possibilité pour les journalistes, activistes, internautes, et militants des droits humains de réunir et conserver les preuves de violations de droits, de corruption et autres malversations qu'ils cherchent à prouver.

Une auteure égyptienne, Rasha Abdulla, professeur en communication à l'Université Américaine du Caire, pose la question : que se passe-t-il quand une information importante pour l'intérêt public disparaît soudainement de nos résultats de recherches ? Elle écrit :

 J'imagine facilement qu'en Egypte toute vidéo d'un officier de police sur YouTube ou tout fonctionnaire corrompu enregistré sur vidéo ou dont on parle dans les journaux ADORERAIT être oublié. Les archives digitales sont tout ce que nous avons pour dénoncer certaines des atrocités qui se sont passées.

“Quelle garantie avons-nous que bon nombre d'informations gênantes (mais pertinentes) ne vont pas tout simplement disparaître ?”  demande Leila Nachawati, auteure syro-espagnole et étudiante en communication à l'Université Carlos Tercero de Madrid. Et elle poursuit :

[Nous] devrons faire confiance à des entreprises qui décideront si l'information est “d'intérêt public”, ce qui, comme tout le monde le sait, est une pente savonneuse… L'Union Européenne fait référence au “besoin d'équilibre entre la vie privée et la liberté de parole”, mais à  moins de lister des critères plus précis, cela ne veut pas dire grand-chose

Ces échanges nous incitent à demander à nos collègues, les experts en droit de l'internet du monde entier, ce qu'ils pensent de cette réglementation et de nous parler de son impact sur le débat politique dans leurs pays depuis sa mise en place. Oiwan Lam et moi-même avons adressé les questions suivantes à nos contacts et à certains experts que nous connaissons et en qui nous avons confiance :

Nous invitons les experts et les personnes intéressées à répondre à ces questions. N'hésitez pas à poster vos commentaires à la suite de cet article ou à nous envoyer vos réflexions à advocacy@globalvoicesonline.org. Nous ne manquerons pas de les publier pour continuer le débat.