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“Mangez moins”, le conseil d'un élu russe contre la hausse des prix

jeudi 29 janvier 2015 à 00:21
Images mixed by Kevin Rothrock.

Montage d'images par Kevin Rothrock.

[Billet d'origine publié le 22 janvier] La dureté des temps appelle les sacrifices. Tel était le message d'Ilya Gaffner, un élu régional de Iekaterinbourg, qui a récemment déclaré devant les caméras de télévision depuis une supérette de la ville que les Russes devaient envisager de se mettre au régime pour compenser la hausse des prix alimentaires. “Pour le dire crûment, si vous n'avez pas les moyens”, a dit M. Gaffner, “rappelez-vous que nous sommes tous Russes et que nous avons survécu à la faim et à la guerre. Pensons seulement à notre santé et mangeons un peu moins”.

Elu à son poste actuel en 2011, Gaffner a rejoint Russie Unie, le parti politique dominant, en 2012. Depuis avril 2014, il fait partie du projet “Contrôle Populaire” de Russie Unie, qui mène des “raids” sur les magasins, pour contrôler les prix à la consommation et la conformité à diverses lois sur le commerce. En 2010 et 2011, Russie Unie a ainsi revendiqué près de 2.000 de ces raids.

Le site website de la section de Iekaterinbourg de Russie Unie arbore une vidéo du raid de Gaffner du 21 janvier 2015, dont est toutefois absent son conseil discutable de “moins manger”. On y voit en revanche Gaffner expliquer que la hausse abrupte des prix alimentaires résulte des soucis monétaires de la Russie.

Tandis que Gaffner a refusé d'évoquer ses propos devant la presse, le directeur de Russie Unie à Iekaterinbourg, Viktor Shepty, a déclaré au journal Kommersant que Gaffner a “mal” parlé, et insisté sur la nécessité de “réfléchir sept fois avant de parler une fois”.

Sur YouTube, le reportage de la télévision locale avec les propos non abrégés de Gaffner comptait au premier jour plus de 53.000 visionnages [1.036.000 lors de la présente traduction] – et près de 800 commentaires [5.200 aujourd'hui]. Probablement parce que Gaffner mettait l'accent sur la “russité” de son auditoire, de nombreux utilisateurs de YouTube s'appliquent à spéculer sur son ethnicité, supposant qu'il est juif (et donc en quelque sorte “compromis”, peut-on déduire). D'autres commentateurs semblent représenter les différents aspects du trollage russe incessant sur la guerre d'Ukraine. “Les Russes, vous n'arrêtez pas de gronder ‘Tout est à nous ! Nous ferons tout tous seuls ! Nous supporterons tout pour la Crimée !’ Alors qu'est-ce qui ne va pas maintenant ? Pourquoi toutes ces pleurnicheries ?” écrit “Stas Gerstas”, ce qui lui vaut 384 approbations.

D'autres ont trouvé matière à plaisanteries politiques sans recourir à la guerre en Ukraine orientale. Par exemple, Alexandre Makhorine, avec 305 “approbations”, écrit :

Далее он наверно посоветует гражданам поменьше пить, аккуратнее носить одежду и обувь чтоб поменьше покупать, а также поменьше ходить в туалет, дышать, разговаривать и, наконец, оптимальный вариант, поменьше жить.

Ses prochains conseils seront sans doute de moins boire, de porter les vêtements et les chaussures avec plus de soin pour moins acheter, et aussi de moins aller aux toilettes, moins respirer, moins parler, et au final, la meilleure des options, de moins vivre.

Alors que l'économie russe se débat entre bas prix du pétrole, sanctions occidentales contre les politiques de Moscou en Ukraine et marasme politique interne, les épisodes comme la bévue de Gaffner sont devenus monnaie courante dans la vie politique locale. Début janvier, un incident similaire s'était produit à St. Petersbourg, lorsque le lieutenant-gouverneur s'est fait taper sur les doigts après avoir dit à ses concitoyens de nettoyer eux-même leurs rues quand les équipes de déneigement n'arrivaient pas. Consommateurs russes qui continuent à se sentir pressurés par les hausses de prix, personnel politique qui s'essaie à suivre les attentes grandissantes de l'opinion vis-à-vis du pouvoir : l'année promet de nouvelles gaffes.

Quelqu'un sait où va le Yémen ?

mardi 27 janvier 2015 à 22:08
A telling cartoon about Yemen by Amjad Rasmi where the traditional Yemeni dagger (Janbiyah) worn by Yemenis is an overturned question mark instead.

Un dessin révélateur sur le Yémen par Amjad Rasmi : le traditionnel poignard  (Janbiyah) porté par les Yéménites est devenu un point d'interrogation inversé.

Le Yémen, souvent qualifié d’ “Etat failli“ ou “au bord du gouffre“, est désormais un pays sans président ni gouvernement. A l'instar des observateurs, les Yéménites de l'intérieur eux-mêmes sont dépassés par les derniers développements dramatiques dans le pays, qui ont abouti à la prise fulgurante de la capitale Sanaa par la milice houthiste. Les Houthistes se sont également emparés des médias publics, du palais et de la résidence présidentielles, de la résidence du premier ministre, ont établi des barrages autour des bâtiments publics et  pris le contrôle d'une base de l'armée, avec pour conséquence finale la démission jeudi 20 janvier du premier ministre, du gouvernement et du président.

Le journaliste yéménite et directeur du Centre de Sondage du Yémen Hafez Albukari a tweeté :

Les Yéménites assistent à un des moments les plus mystérieux de l'histoire contemporaine. Nous sommes à Sanaa mais ignorons ce qui se passe !

Après avoir pris Amran au milieu de l'été, les Houthistes, une rébellion que l'on dit soutenue par l'Iran et qui prétend agir contre la corruption et les malversations, se sont emparés de Sana'a et du reste du pays en septembre dernier, pour finir par devenir le pouvoir de fait au Yémen. Avec la signature de l’Accord national de partenariat et de paix (PNPA en anglais), un pacte de partage du pouvoir qui visait à inclure les houthistes et les séparatistes du Sud dans un gouvernement d'union, le président devait désigner un premier ministre “neutre, sans aucune affiliation partisane” dans les 3 jours ; la formation d'une nouvelle équipe de ministres était attendue dans les 30 jours. Mais dénicher un premier ministre remplissant ces critères et agréé par toutes les factions tenait de la gageure.

Hisham Al-Omeisy a tweeté sarcastiquement :

[sur le dessin : "Bien, Messieurs, nous devons établir les critères de choix d'un nouveau Premier Ministre. Il doit être un homme politique de premier plan... réellement qualifié] Inquiétant, ce n'est plus une raison pour retarder le choix du premier ministre yéménite… le nouveau devra juste convenir à tous

Le Président avait initialement nommé Ahmed Awad Ben Mubarak, qui a été le Secrétaire général de la Conférence de dialogue national (acronyme anglais NDCYE). Une désignation qui s'est heurtée au refus du président déchu Ali Abdullah Saleh et de son parti, le Congrès général du Peuple (GPC), ainsi que des houthistes. Ben Mubarak, qui était le chef de cabinet du président Abdu Rabu Mansour Hadi a été enlevé par les houthistes samedi dernier, 17 janvier, et demeurait captif lors de l'écriture du présent article. C'est Khaled Mahfoudh Bahah, à l'époque ambassadeur du Yémen aux Nations Unies, et ancien ministre du pétrole, qui a été désigné premier ministre à sa place, le 13 octobre 2014 à la satisfaction des houthistes. Après les nominations et rejets, le gouvernement nouvellement constitué, qui comportait de nouvelles têtes et trois portefeuilles attribués à des femmes, était un cocktail prometteur qui avait tout de même apporté espoir et optimisme.

Mais le PNPA, et le  meilleur gouvernement formé depuis 2011, sont restés éphémères. L'insurrection houthiste et des revendications sans fin ont éloigné les sympathisants du début alors que se dissipait la vision d'un Yémen civil et moins corrompu. Au lieu d'honorer leur part de l'accord en se retirant, les houthistes ont multiplié les miliciens et les barrages routiers dans Sana et enlevé le chef de cabinet du président pour réclamer la modification du projet de constitution et une plus grande part de pouvoir, ce qui a abouti à leur prise de contrôle totale de Sanaa dans les événements de la semaine dernière.

Waddah Othman a tweeté ce qu'est la vision déformée du partenariat par les houthistes :

Le partnerariat : vous satisfaites tous mes besoins et exigences, quant aux vôtres on peut s'asseoir et en discuter plus tard

Ignorant le battage médiatique à l'international et dans le Golfe sur les peurs d'une prise de contrôle du Yémen par AQPA (Al-Qaida dans la Pénisule arabique) ou l'Iran, les Yéménites s'inquiètent surtout de qui va remplir le vide du pouvoir dans leur pays.
Haykal Bafana a dissipé cette craine dans son tweet :

A la presse occidentale maniaque : laissez tomber tous ces articles de Terreur de Téhéran sur le Yémen. Je n'entends encore personne parler persan dans les rues de Sanaa. 

Gregory Johnson, auteur de “Le dernier refuge : Le Yémen, al-Qaida et la guerre de l'Amérique en Arabie” partage cet avis :

Soit c'est AQPA qui s'apprête à s'emparer du Yémen, soit c'est l'Iran (Aucun des deux n'est vrai)

Et d'ajouter :

Badr al-Din al-Huthi, le père d”Abd al-Malik, a vécu en Iran, mais ça n'en fait ni un chiite duodécimain ni un client de l'Iran.

Beaucoup s'interrogent au Yémen sur les intentions des houthistes et la soudaineté de leur accès au pouvoir : comment cette minorité a-t-elle pu contrôler en un tournemain les villes de tout le Yémen, limoger des responsables publics, et finalement mettre à genoux la direction de l'Etat ? ce qui se révèle indiscutable, c'est que les houthistes n'opèrent pas seuls.

Osamah Al-Rawhani s'étonne :

#Yémen Question avant de dormir : quelle est la légitimité des houthistes à faire toutes ces conneries ? Il parle pour un groupe minoritaire mais contrôle quand même

Abubakr Al-Shami évoque l'implication de [l'ex-président] Saleh :

Parfois on ne peut que tomber en arrêt et applaudir. Bien joué Ali Abdullah Saleh.

Afrah Nasser, un journaliste et blogueur yéménite vivant en Suède, le pointe sans ambiguïté :

Les houthistes qui prennent le contrôle de force, ce n'est pas parce que le Yémen est un Etat failli, mais que Saleh reste un homme hautement influent derrière les houthistes.

La question de qui va gouverner le pays reste largement sans réponse, dans la crainte d'un possible scénario de retour de l'ancien régime avec une façade rajeunie, surtout depuis que le président déchu Ali Abdullah Saleh a appelé à des élections anticipées, pour peut-être paver la voie à son fils aîné. Il a été vu comme le tireur de ficelles des événements dramatiques de la semaine dernière.

Selon le Yemen Times (citant Nadia Al-Sakkaf), le ministre yéménite de l'Information dans le gouvernement Bahah a courageusement tweeté des mises au point durant la prise de contrôle par les houthistes :

Selon la constitution actuelle — celle en projet reste en discussion — si le président est empêché pour raison de santé, ou s'il renonce à ses fonctions, c'est le président du Parlement qui accède au poste. L'actuel président du Parlement, Yahya Al-Rayi, est un haut responsable du GPC et a été blessé dans un attentat de 2011 contre le Palais Présidentiel.

Cependant, le mandat du Parlement actuel, élu en 2003, devait expirer au bout de six ans, en 2009. L'accord stipulait que les élections seraient reculées de deux ans. Les élections à échéance en 2011 ont été repoussées une nouvelle fois du fait du soulèvement de 2011. Le GPC détient 238 sièges sur 301 au Parlement.

La démission de Hadi mettrait fin au dispositif, selon Al-Sakkaf, et le mandat prorogé du Parlement serait dissous, mettant fin à l'éventualité d'un accès d'Al-Rayi à la présidence.

Jeb Boone, un journaliste américain qui vivait au Yémen durant le soulèvement de 2011 qui a renversé Saleh, commente :

Si la communauté internationale avait laissé la jeunesse du Yémen renverser l'ancien régime en 2011 rien de cela ne serait arrivé

Si vous ne comprenez toujours rien à la situation au Yémen, il vous reste l'explication simplifiée du blogueur satirique Karl Sharo : 

Je mets une fois de plus ma casquette d'expert et écris le Guide Comprendre le Yémen pour les Nuls

Le week-end a vu des manifestations refusant la démission de Hadi et contre les houthistes à Sanaa, Taiz, Ibb, Hodeidah, et Al-Baydha, tandis que d'autres rassemblements réclamaient la sécession des provinces du sud et la rupture des liens avec Sana'a. Pourtant le Yémen n'est pas seulement aux prises avec un vide politique, mais aussi avec une catastrophe humanitaire annoncée passée actuellement sous silence comme le souligne Oxfam.

Infographic by IRIN showing the Humanitarian challenges facing Yemen.

Infographie par IRIN montrant les défis humanitaires vécus par le Yémen.

Le parlement yéménite devait se réunir en urgence dimanche pour débattre de la démission de Hadi ou former un conseil présidentiel chargé de gouverner le pays jusqu'à la tenue des élections. La session a été annulée sine die.

Malgré l'incertitude qui plane, les Yéménies sont des gens résilients toujours prêts à voir le côté positif, comme l'a tweeté Abubakr Al-Shamahi :

“Nous n'avons pas de président, ni d'armée, de forces de l'ordre, d'argent ou d'Etat. Mais nous sommes vivants. Vive le peuple yéménite !”

A quoi Mohammed Al-Assadi a ajouté :

Malgré les graves problèmes sur le terrain, les gens du Yémen ont construit chaque jour l'espoir qu'une solution apparaisse au bout du tunnel obscur.

Un mois après, les Pakistanais promettent de ne jamais oublier le massacre de l'école de Peshawar

lundi 26 janvier 2015 à 23:29
British Pakistanis protested against terrorism, and hosted a vigil outside the Pakistani high commission building in London for the victims of the Peshawar school attack in December 2014. Image by Geovien So. Copyright Demotix (16/1/2015)

Des Pakistanais de GrandBretagne manifestant contre le terrorisme et veillant en face du Haut-Commissariat du Pakistan à Londres en mémoire des victimes de l'attaque de l'école de Peshawar en décembre 2014. Image de Geovien So. Copyright Demotix (16/1/2015)

Tous les liens associés renvoient à des pages en anglais, sauf mention particulière. Ce billet a été publié le 20 janvier 2015.

Dans le monde entier, les Pakistanais ont organisé des manifestations et des veillées en mémoire des victimes de l'attaque de l'école de Peshawar exactement un mois après la tragédie, exprimant leur solidarité avec les familles des enfants assassinés et réclamant du gouvernement des mesures sévères contre l'extrémisme.

Les militants du Tehreek-e-Taliban (TTP) ont lancé un assaut contre l'école militaire publique de Peshawar le 16 décembre 2014, tuant 145 personnes dont 130 enfants.

Le 16 janvier, des veillées et des manifestations ont eu lieu dans différentes villes au Pakistan dont Islamabad, Karachi, Abbottabad, Sialkot, Sargodha, Peshawar, Hyderabad, Jhelum, Jhelum Cantt, Bahawalpur, Dera Allah Yaar, Sukkur, Larkana et Nawabshah.

Ailleurs qu'au Pakistan, ‘Pakistanais contre le Terrorisme', une campagne dans les médias sociaux organisée par le mouvement Never Forget (Ne jamais oublier), a arrangé des manifestations dans le monde : aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, au Canada, en Australie, en Allemagne et au Kenya, pour s'unir et s'élever contre l'extrémisme, les violences entre les religions et l'injustice.

Collage of Global Protests. Image courtesy Sana Jamal.

Un collage d'images des manifestations générales. Collage d'images de Sana Jamal.

Les militants de cette campagne avaient appelé les Pakistanais vivant à l'étranger à rejoindre les manifestations “non en envoyant seulement des fonds, mais en se rendant à l'Ambassade du Pakistan quel que soit leur lieu de résidence” pour envoyer un message fort au gouvernement. 

A Mumbai, un marathon a été organisé à la mémoire des victimes : 

(Marathon de Mumbai) en mémoire de l'attaque de Peshawar

Une manifestation émouvante s'est tenue en face du Consulat du Pakistan à Houston aux Etats-Unis :

Manifestation contre le terrorisme à Houston #Attaque de Peshawar #Reconquérir le Pakistan #Arrêtez Abdul Aziz

Une manifestation a eu lieu à Londres aussi :

Londres. Les Pakistanais manifestent contre le terrorisme. Fier. Tellement fier. #N'oubliez jamais #Attaque de Peshawar #N'oublie jamais Pakistan

Manifestations au Pakistan

Le Pakistan a connu de nombreuses veillées depuis l'attaque de décembre, mais une manifestation en particulier, née dans la capitale, est devenue un mouvement : la campagne Never Forget (N'oubliez Jamais). Apparue après qu'Abdul Aziz, un religieux controversé d'Islamabad, eut initialement refusé de condamner l'attaque de Peshawar, le mouvement réclame l'arrestation d'Abdul Aziz et presse le gouvernement d'adopter une politique de tolérance zéro contre les militants et les mentalités extrémistes.

Menée par l'avocat et activiste social Mohammad Jibran Nasir, la campagne vise ”à garder la mémoire des milliers de vies courageuses que le Pakistan a perdues en raison du terrorisme et de l'extrémisme religieux”. Dans un entretien, Nasir explique l'idée derrière le mouvement : “Nous essayons de responsabiliser les Pakistanais pour créer un précédent. Nous voulons leur dire que s'ils s'unissent, s'ils font entendre leurs voix et qu'ils sont assez cohérents même un mois après la tragédie, alors des mesures peuvent être prises contre les personnes comme Abdul Aziz”.

Le 16 janvier, la campagne Never Forget a organisé des rassemblements dans tout le pays. Les manifestants de Karachi ont crié “Récupérez vos mosquées“, “Arrêtez Abdul Aziz” et “Le Silence est Criminel”.

A Lahore, une chaîne humaine s'est formée à l'école militaire publique pour protester contre les massacres.

A Islamabad, des citoyens, des membres de la société civile et des représentants politiques se sont réunis pour marquer cet anniversaire d'un mois et réaffirmer leur résolution de combattre la violence. Les manifestants dans la capitale ont aussi placé plus d'une centaine de faux cercueils comme un rappel symbolique de l'horreur témoignée le 16 décembre à Peshawar.

Aabpara chowk, 141 cercueils pour honorer les victimes de Peshawar et d'autres attaques terroristes.

Le Ministre de l'Information Pervaiz Rashid a aussi participé à une veillée aux chandelles organisée devant le Parlement à Islamabad, pour dire que la nation est unie contre les extrémistes et souligner le fait qu'aucun terroriste ne pourra trouver refuge au Pakistan.

Mais les activistes qui ne peuvent pas retenir leur colère contre le gouvernement ont crié contre Abdul Aziz, réclamant son arrestation, forçant finalement le ministre à interrompre son discours et quitter le rassemblement.

Collage of local protests. Image by Sana Jamal.

Un collage des images des manifestations locales. Image par Sana Jamal.

Hommages du monde de la musique et des sports

L'équipe nationale de cricket du Pakistan a rendu visite aux enfants blessés durant l'attaque. Les joueurs de cricket ont été impressionnés par l'esprit des enfants. “Les enfants nous ont transmis un courage formidable et nous ont souhaité tout le meilleur pour la future Coupe du Monde” a dit le capitaine de l'équipe Misbah-ul-Haq. 

Les joueurs de l'équipe de cricket du Pakistan @SAfridiOfficial & @iamAhmadshahzad avec les élèves de l'école militaire publique de Peshawar.

Après le retour des étudiants à l'école militaire publique le 12 janvier, l'organe de presse militaire Inter-Services Public Relations (ISPR) a sorti un hommage musical émouvant pour honorer la mémoire des jeunes victimes assassinées lors de la terrible attaque. De nombreuses personnes ont partagé cette chanson émouvante. Elle fait passer un message de condamnation et de résistance qu'aurait pu dire l'un des enfants assassinés aux extrémistes en réponse au massacre.

Le refrain de cette chanson est plein d'émotion : Main aisi qoum se hoon jis kay woh bachon se darta hai … Bara dushman bana phirta hai jo bachon se larta hai (Je viens d'un pays qui a peur de ses enfants… Il est un ennemi, celui qui cible les enfants) :

Ce billet a été écrit en collaboration avec Anushe Noor Fahim.

Cinq thèmes importants pour les jeunes femmes activistes au Kirghizistan

lundi 26 janvier 2015 à 22:57
Images showing solidarity with women that have suffered from violence. Photo by Devochki-Aktivisti of Kyrgyzstan.

Images de solidarité avec les jeunes femmes ayant souffert de violence.  Photo des jeunes activistes du Kirghizistan.

Les jeunes activistes du Kirghizistan sont de jeunes filles âgées de 13 à 17 ans, luttant pour l'égalité, la justice et la diversité dans un climat particulièrement difficile pour les droits des jeunes femmes.

L'un des éléments clés de leur projet est un blog à travers lequel le groupe publie des cartes de jeunes vivant dans des régions du Kirghizistan où la culture patriarcale prédomine.

En plus du blog, les jeunes activistes expriment aussi leur désir de participer de manière équitable à la société kirghize, à travers l'art, la poésie et la musique. Elles motivent les jeunes filles à participer au mouvement HeForShe (Lui pour Elle), afin de lutter pour l'égalité des genres, et faire en sorte que les droits à l'éducation, au sport et à la santé entre autres, soit  ouverts aux jeunes des deux sexes.

Cette semaine Global Voices a parlé avec Aishoola Aisavea (17 ans) à propos des thèmes qui motivent les jeunes activistes à continuer leur travail au sein du pays.

“Les gens pensent que le féminisme se base sur la haine des hommes.”dit Aisaeva. “Il s'agit au contraire de s'opposer à la violence”.

Thème 1: L'éducation

Aishoola Aisaeva: l'éducation est un thème primordial au Kirghizistan, surtout pour les petites filles. Dans les camps pour jeunes que nous avons organisé en 2013, nous avons posé la question sur les forums et nous avons compris que les pères préfèrent appuyer leurs fils plutôt que leurs filles, lorqu'il s'agit d'éducation.

Les écoles utilisent des livres anciens et patriarcaux, en majorité écrits par des hommes, qui ne font qu'enseigner le rôle des hommes dans la société et l'histoire du Kirghizistan, ignorant les femmes et leurs corps.

Vous trouverez ci-dessous un extrait d'une lettre que nous a écrit une jeune fille vivant dans la province de Chui, près de Bishkek, la capitale du pays :

I never leave my house after school. And I see nothing new, every day is the same: a mountain of unwashed dishes, cleaning, washing, looking after children. I become exhausted, and then I do not have energy to do my schoolwork – J., 16 years old.

Je ne sors jamais de ma maison après l'école. Et je ne vois rien de nouveau, chaque jour est pareil : une montagne de vaisselle sale, du ménage, et veiller sur les enfants. Je finis épuisée, ensuite je n'ai plus l'énergie de faire mes devoirs- J., 16 ans.

Malheureusement, toutes les petites filles du Kirghizistan n'obtiennent pas les connaissances nécessaires. Certaines vont au collège, d'autres non.

Nous utilisons l'art et les graffitis, et organisons des projections cinématographiques pour partager notre expérience avec d'autres adolescentes. Dans notre blog, nous publions des informations sur des femmes reconnues pour leurs rôles comme scientifiques, exploratrices et politiciennes. 

Nous voulons motiver d'autres jeunes filles, leur montrer que les femmes peuvent étudier les sciences et faire de la politique. Les femmes peuvent remplir un rôle dans le futur de notre pays, il nous faut seulement inciter plus de jeunes à étudier et à participer.

Thème 2 : La diversité

AA: Nous sommes toutes différentes. nous venons de différentes écoles, de différents villages, et groupes d'âges. Nous sommes des jeunes de la rue, des jeunes LBTQ, de jeunes handicapées, nous sommes des jeunes qui avons souffert de violence, de haine, d'injustices et de discrimination.

Quand nous avons commencé à réunir des récits, nous avons pris conscience du fait que nous sommes toutes différentes les unes des autres, et à quel point nos vies et nos histoires divergent. Cependant, nous avons toutes besoin d'un lieu où être comprises et soutenues.

I studied in the village (I cannot say where exactly I lived). My aunt is very good and kind, and her daughter is the same. But the most terrible thing is that I constantly experienced sexual harassment, physical and psychological violence, from her sons and my uncle. They said it was because I was a girl that they did that to me.I cried every day, because I couldn’t do anything about it, nobody would believe me. That was my childhood. In those days, I wanted to commit suicide – А., 16 years old.

J'ai étudié dans un village (je ne peux dire où j'habitais précisément). Ma tante est très bonne et très tendre, et sa fille aussi. Mais le plus horrible est que j'ai constamment connu le harcèlement sexuel, les violences physiques et psychologiques, de la part de ses fils et de mon oncle. Ils m'ont dit que c'est parce que j'étais une fille qu'ils me faisaient ça. Je pleurais chaque jour, car je ne pouvais absolument rien y faire, personne ne m'aurait cru. Ce fut mon enfance. A ce moment là, je voulais me suicider- A., 16 ans.

Thème 3 : La santé

AA: Nous promouvons également la santé en matière de reproduction, il est très important de connaître nos droits concernant la santé. Nous abordons toujours ce thème dans les camps, conférences et rencontres, nous voulons que les jeunes filles aient plus de connaissances sur le sujet et puissent prendre leurs décisions au sujet de leur corps.

I am already enough of an adult to decide what to do with my body. That is to say – it is my property. But the why does everyone decide for me, how to dress and what to do and what not to do with my body?! I want to shape my eyebrows and cut my hair. But my elder brothers don't let me have that opportunity – J., 15 years old.

Je suis suffisamment adulte pour décider ce que je veux faire avec mon corps. C'est à dire- c'est ma propriété. Mais pourquoi est-ce que tout le monde décide à ma place comment je dois m'habiller, et ce que je dois faire ou non avec mon corps ?! Je veux m'épiler les sourcils et me couper les cheveux. Mais mes grands frères ne me laissent pas cette chance- J., 15 ans.

Thème 4 : Une sélection dans l'intégration 

AA: Une fois nous avons participé à un forum sur la violence de genre, mais on nous assis au fond de la salle, malgré le fait que le thème soit lié aux problèmes des jeunes filles. Tous les autres participants étaient des adultes, mais ils discutaient de thèmes concernant de jeunes adolescentes. Quand ils nous laissèrent enfin parler, nous leur avons demandé de regarder autour d'eux et nous expliquer pourquoi nous, nous ne pouvions parler de nos problèmes. Ils nous ont inclus à la liste mais ne nous ont pas pris au sérieux.

C'est un problème. La société pense que nous ne pouvons parler pour nous-mêmes, mais ceci arrive car personne ne pense à nous demander notre opinion. 

Thème 5 : L'égalité

AA: Un des principaux objectifs des jeunes activistes du Kirghizistan est l'égalité. L'égalité de genres nous concerne tous, et nous voulons que les jeunes des deux sexes contribuent et promeuvent ensemble l'égalité.

Nous collectons des récits de jeunes femmes qui subissent l'inégalité et à la discrimination. Des jeunes qui nous racontent qu'elles ne peuvent faire ce qu'elles veulent pour le simple fait d'être des femmes, et que la société avec ses stéréotypes leur impose des restrictions depuis l'enfance. L’extrait qui suit est une lettre envoyée par une jeune qui souhaitait chanter l’épopée de Manas, une épopée kirghize traditionnelle qui raconte l'histoire de la vie d'un mythique roi guerrier :

I have been a girl Manaschi (storyteller of the Epic of Manas) since I was 3 years old. When I was a child, everyone thought it was great – they considered all children equal. But I grew up, and found that being an older girl is much harder. Beginning when I was 9 years old, everybody started telling me the stereotypes I should follow. And so my favorite pursuit – storytelling – stopped for a while. I had already resigned myself to the fact that I was a girl – К., 13 years old.

Je suis une fille Manaschi (narratrice de l'épopée des Manas) depuis que j'ai 3 ans. Quand j'étais petite tout le monde pensait que c'était super  – on considère les enfants comme tous égaux. Mais j'ai grandi et découvert qu'être une jeune fille était bien compliquée. Ça a commencé quand j'avais neuf ans, tous m'ont dit que je devais suivre les stéréotypes. Et mon plus grand souhait -raconter des histoires- s'est interrompu pour un temps. Je m'étais résignée au fait d'être une fille – К., 13 ans.

La bataille pour le rio Tapajós: Les Munduruku, “le peuple tortue”

dimanche 25 janvier 2015 à 18:20
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 Pour évoquer l'intelligence et la stratégie de défense de cet animal, les hommes se peignent la peau avec des traits évoquant la carapace des Jabutis ( tortues terrestres amazoniennes). Photo: Marcio Isensee et Sá, Agência Pública. CC BY-ND.

Ce reportage a été publié le 11 décembre 2014 par Agência Pública, avec le soutien de Mongabay, il comporte deux parties : “la bataille pour la frontière  Munduruku” et “Des décennies de lutte pour le Tapajós”,  écrite par le  journaliste Bruno Fonseca.  Elles ont été adaptés et seront publiées par Global Voices en trois épisodes. Voici le premier .

Malgré le remue-ménage provoqué dans le village par les discussions sur la centrale hydroélectrique, les Munduruku de Sawré Muybu maintiennent leurs activités routinières. Le matin, les femmes ballaient leurs maisons aux sol en terre, aux murs de bois, aux toitures de feuilles de babaçu (une espèce de palmier). Les poules et les chiens se précipitent pour manger ce qui vient d'être balayé à l'extérieur. Il n'y a pratiquement pas de détritus non organiques. Les adultes prennent soin de l'abatis, pêchent et chassent. L'eau nécessaire provient de la “crique”  cristalline qui baigne le village. 

En sortant de l'école les enfants courent de tous côtés en mangeant des fruits. Unique motif de mauvaise humeur constatée : le bain: “Ma mère ne veut pas que je me baigne plus de trois fois par jour” dit un enfant qui a déjà atteint sa dose journalière de chaleur et de soleil ! Quelques minutes après il joue dans l'eau froide de la crique avec un sourire rayonnant!

Le menu du repas du jour est toujours une surprise. On le connaît seulement quand les pêcheurs ou les chasseurs rentrent au village ! Les adolescentes lavent la viande et en prélèvent une partie pour la famille. Chaque jour de ce reportage dans le village une viande différente est apparue : tatou, tortue, cerf et les savoureux cochons-bois. La variété de poissons est telle que nous en avons perdu le compte.

 Difficile d'imaginer comment pourrait survivre cette population dans un milieu pauvre en chasse et en pêche.

Jovens e crianças ficam ansiosos para participar dos rituais de canto e dança. Eles só falam em Munduruku entre si. Foto: Marcio Isensee e Sá, Agência Pública. CC BY-ND.

 Les jeunes et les enfants ont tous envie de participer aux rituels de chants et de danses.  Il ne parlent que le Munduruku entre eux . Photo: Marcio Isensee et Sá, Agência Pública. CC BY-ND.

Parmi toutes les incertitudes qu'apportent  la construction de ces usines hydroélectriques, la crainte la plus grande est d'être déplacé vers la ville : “Ces personnes ne savent pas vivre comme vous” explique Aldira Akai Munduruku, “ils ont toujours vécu en pleine forêt, de la chasse et de la pêche. En ville les gens dépendent de l'argent, s'il n'en ont pas il ne mangent  pas”. Enceinte de cinq mois et mère d'une petite de deux ans, Aldira garde le souvenir de la faim pendant les années où elle a vécu dans la ville de Jacareacanga quand elle était enfant.

Dans les histoires que racontent les plus anciens, mélangeant le destin des hommes et des animaux, le “Jabuti” ou tortue d'ici est le héros le plus représenté. Grâce à son intelligence et à son sens de la stratégie il vient toujours à bout de la force et de la domination de ses ennemis: le tapir, l'anaconda et le jaguar. C'est pour invoquer ses compétences, ses habilités, que les guerriers se peignent sur le corps des dessins évoquant  ceux que l'on voit sur sa carapace.

Les histoires de guerres du passé sont aussi bien présentes. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle les Munduruku attaquèrent tellement souvent les implantations portugaises que les responsables coloniaux nommèrent leur fleuve rio dasTropas (fleuve des armées). C'est de cette époque que date leur réputation de “réducteurs de têtes”. Ils avaient coutume de couper la tête de l'ennemi mort et après un procédé de momification, enfilaient cette tête sur une lance qu'ils fichaient aux frontières de leur territoire. Cette pratique est abandonnée depuis plus d'un siècle, mais les Mundurukus  continuent à utiliser son pouvoir symbolique en peignant cette image sur des pancartes d'auto-démarcation de leur territoire. 

Bien que prêts à défendre leur territoire, ils n'aiment pas être considérés comme des violents. “ Les Mundurukus sont pacifiques, mais quand on met le doigt sur la plaie, il se mettent en colère” explique Deusiano Saw Munduruku qui enseigne à l'école Sawuruku ré Muybu. Le nom du mouvement de résistance aux usines est Ipêreg Ayû, qui veut dire:” le peuple qui sait se défendre”. Roseninho, choisi pour être le porte parole de Sawré Muybu face aux  pariwat (non indiens), nous déclare : “Le gouvernement dit que nous sommes menaçants, mais non, c'est nous qui sommes menacés.” 

No fim da aula, crianças da aldeia brincam até anoitecer. Foto: Marcio Issensee e Sá, Agência Pública. CC BY-ND

A la fin des classes, les enfants du village jouent jusqu'à la tombée de la nuit. Photo: Marcio Issensee et Sá, Agência Pública. CC BY-ND

L'expérience de Belo Monte

Les Mundurukus ont déjà été confrontés à plusieurs épisodes de pressions concernant leur territoire. Au début des années 1920, les missionnaires tentèrent sans succès d'interrompre la transmission de leur langue maternelle et de changer leur mode de vie. Dans les décennies 40 et 60, la FUNAI, le vieux service de protection des Indiens a installé un atelier d'extraction du caoutchouc sur les terres Munduruku, tentative infructueuse pour les transformer en mercenaires du caoutchouc. Plus récemment, une invasion de bûcherons et d'orpailleurs les préoccupe beaucoup. Et maintenant cette usine s'ajoute à tout ça ! Deux années devant la justice. Une véritable guerre juridique marquée par l'octroi de licences d'exploitation à l'usine de Belo Mont., Le ministère public fédéral est déjà intervenu à huit reprises pour exiger que les ouvrages construits sur le Rio Tapajos respectent les droits des populations locales. La différence dans la situation actuelle, est justement dans l'expérience acquise sur le Xingu avec Belo Monte. Dans le cas présent, l'expérience acquise sur le Rio Xingu pourrait faire la différence. Après avoir prêté main forte à l'occupation du chantier de Belo Monte en mai 2013, les Mundurukus ont commencé comme là-bas à négocier avec les responsables de l'usine, échangeant la chasse, la pêche, les abattis contre des paniers alimentaires, des camionnettes et autres biens offerts en compensation. L'état actuel de dépendance  financière des villages proches de Belo Monte est un exemple qui effraie les indigènes du Rio Tapajós.