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Le Liban a fini par se redonner un Président, au bout de deux ans et demi

samedi 5 novembre 2016 à 18:51
Supporters of Michel Aoun gathering in Beirut. Photo by Hassan Chamoun.

Les partisans de Michel Aoun se sont rassemblés à Beyrouth. Photo Hassan Chamoun.

Le 31 octobre 2016, après 1 an et demi 1/2 de vacance du pouvoir, le parlement libanais a enfin élu un Président de la République :  Michel Aoun.

Michel Aoun, un ex-chef militaire âgé de 81 ans auquel ses partisans donnent le titre de “Général”, a fondé en 1992 le Courant patriotique libre (CPL) et préside le Bloc du changement et de la réforme. Il a réuni sur son nom 84 voix au premier tour (il en fallait 86) et 83 au second tour (18 de plus que les 65 de la majorité simple), ce qui fait de lui le 13ème président du Liban. Une victoire double : non seulement grâce à lui le pays a un chef élu, mais encore il entre au palais présidentiel après avoir été chassé par les troupes syriennes de son poste de premier ministre par intérim en octobre 1990. Depuis lors et jusqu'en 2005, il a vécu en exil en France.

La joie, surtout des proches du CPL, a éclaté en beaucoup d'endroits du pays. Le journaliste  Kareem Chehayeb, qui blogue sur Beirut Syndrome, a filmé une scène de liesse à Beyrouth :

Feux d'artifice, musique à tue-tête, chansons et hourras… Mes pauvres oreilles.

Comme de coutume au Liban, le succès d'Aoun est généralement examiné sous les aspects autant confessionnels que gépolitiques. Plus précisément, détracteurs et observateurs disent que son élection est une victoire pour l'Iran, puisque Aoun était le choix de son allié le Hezbollah, et qu'un obstacle prédominant à son accession à la présidence était l'hostilité de l'homme politique lié aux Saoudiens Saad Hariri. De fait, le gouvernement iranien, qui détient une influence significative sur le Hezbollah, s'est aussitôt réjoui de l'élection d'Aoun, que le Guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei a même qualifiée de “triomphe de l'axe de la résistance.” Bachar Al Assad n'a pas perdu de temps pour décrocher son téléphone et féliciter le nouvel élu.

A l'opposé, Saad Hariri, avant de donner son appui à Aoun et de lui assurer la majorité, a parlé de “gros sacrifice”. L'aval donné par Hariri à Aoun a pris par surprise ses partisans, dont beaucoup continuent à contester cette décision. Etant donné que M. Hariri redeviendra premier ministre, on peut en déduire qu'il a fait un calcul politique pour se garder une certaine influence. Comme l'écrit Joyce Karam, chef du bureau de Washington du journal Al-Hayat, “le marché Aoun-Hariri est un pacte de pouvoir et de survie pour les deux dirigeants et une prise en compte du déplacement constant des alliances au Liban dans le sens de la realpolitik”.

Karam décrit aussi la contestation “du dedans” de Hariri par sa base traditionnelle :

Le ministre de la justice Ashraf Rifi a porté à Hariri un coup lourd de conséquences à Tripoli, et émerge comme un rival potentiel en engrangeant le soutien tant local que régional. Dans la foulée d'un délaissement saoudien du Liban vers le Yémen, la Syrie et dans certains cas l'Afrique, il ne restait à l'ancien premier ministre que peu d'options. Accepter Aoun était le moyen le plus à portée de main pour soulager les tourments d'Hariri et assurer si ce n'est que temporairement son avenir politique.

Mais sur le terrain, ce n'est pas forcément ainsi que la plupart des gens voient les choses. Si aucune étude sociologique ne permet d'établir scientifiquement les opinions, des témoignages ‘anecdotiques’ suggèrent que les chrétiens libanais préfèrent généralement Aoun, surtout depuis qu'il a reçu le soutien de son ex-ennemi des Forces Libanaises Samir Geagea.

Journaliste libanaise du Wall Street Journal, Maria Abi-Habib a affirmé que l'élection d'Aoun devait être comprise comme “une victoire pour l'écrasante majorité des chrétiens qui le soutiennent” plus que le résultat de calculs géopolitiques. Le “vote chrétien” est souvent au centre des analyses politiques puisque le fauteuil de président de la république est exclusivement réservé à un chrétien maronite, en vertu de ce qu'on appelle le système confessionnel libanais, qui vise, non sans une bonne dose de critiques, à maintenir un “équilibre” entre les nombreuses confessions religieuses du Liban.

La victoire d'Aoun est présentée comme celle du Hezbollah/Iran. Pourquoi ça ne peut pas être une victoire pour l'écrasante majorité de chrétiens qui le soutiennent ?

Quant au cheminement pour y arriver, le blogueur libanais Ramez Dagher, qui écrit sur Moulahazat, a publié le 31 octobre un article intitulé “Comment Michel Aoun est devenu le Président“. En quelques 5.000 mots, il a synthétisé les deux douzaines d'analyses politiques qu'il a écrites au long des trois dernières années. Il défend dans ces textes que les alliances au Liban ne sont rien d'autre que des phénomènes temporaires au gré des tendances au Moyen-Orient et des dissensions internes libanaises.

Il ne faut pas oublier que le Liban n'a pas connu d'élections depuis 2009. Autrement dit, le parlement qui a choisi Aoun pour présider le pays est juridiquement illégitime. Dagher explique :

L'élection présidentielle libanaise de 2016 n'a rien de démocratique. Le président sera là jusqu'en 2022, et a été élu par le parlement de 2009. Tous ceux qui n'avaient pas 21 ans à l'époque sont restés à l'écart du processus électoral, ce qui veut dire que tous les moins de 33 ans n'auront pas été consultés en 2022 sur le locataire du Palais de Baabda. Et même ceux qui ont élu indirectement le président en élisant en 2009 le parlement qui l'a choisi, ont choisi leurs représentants dans un contexte complètement différent. Ils ont voté pour une des deux coalitions complètement différentes, dans un contexte régional et local complètement différent. Il n'y avait pas de guerre civile syrienne à l'époque, pas de printemps arabe, pas d'EI. Le Hezbollah combattait encore Israël, et pas Israël et en Syrie. Les [Mouvements du] 8 Mars et 14 Mars n'avaient essayé qu'une fois de gouverner ensemble, entre 2008 et 2009, et pas trois (2008-2009, 2009-2011, 2014-2016). Il n'y avait pas de crise des ordures, pas de manifestations des poubelles, pas de mouvement politique alternatif à l'époque. De plus, vous ne pouvez pas dire qu'il n'y a pas le quorum jusqu'à ce que le parlement vous élise, puis revenir en disant que vous avez été élu démocratiquement. Surtout si le parlement actuel qui vous a élu est anticonstitutionnel au départ (et là je cite le conseil constitutionnel).

Peu avant l'élection, une vidéo d'Aoun s'est mise à circuler sur les médias sociaux, qui le montrait disant précisément cela : le parlement est illégitime et ne peut donc élire un président. Il l'a dit lors d'une conférence de presse le 7 juillet 2015, et l'a répété en mars 2016.

Cette vidéo a été mise en ligne par le mouvement “Vous puez”, qui a mené les manifestations contre la “crise des ordures” et la corruption pendant l'été 2015. Sur Facebook, le groupe usait du mot-dièse “#كلن_يعني_كلن” (“Tout est dans tout” et “Tous pourris”), un slogan populaire repris en choeur pendant les manifestations.

Quelle honte… un mensonge éhonté aux Libanais. Note : ce sont ses mots, pas les nôtres. Conférence de presse du 7 juillet 2016 sur OTV [la chaîne de télévision libanaise appartenant au CPL]

Le scrutin, un cirque

Les Libanais en colère se sont gaussés de l'élection sur internet, un processus qu'ils ont largement qualifié de cirque. Ce qui a beaucoup fait rire, c'est comment le président de la Chambre Nabih Berri a dû pendant le vote appeler à maintes reprises les députés à regagner leurs bancs, se plaignant même à un moment que les élus se comportaient comme “des voyous à l'école”.

Un utilisateur de Twitter a partagé une vidéo produite par la radio d'information libanaise Al Jadid, montrant les députés blaguer et rire en pleine pagaille. AJ+ en arabe a publié une vidéo similaire.

Parmi les parlementaires, Walid Joumblatt, chef du Parti socialiste progressiste majoritairement Druze, et connu pour son goût des tweets excentriques, a passé toute la séance sur Twitter à mettre en ligne des images de la Rome antique :

Le vote a commencé

Longue vie au chef

Deux votes ont aussi généré de nombreuses plaisanteries. Un député a donné sa voix au personnage de fiction Zorba le Grec, tandis qu'un autre votait pour la chanteuse et top-model libanaise Myriam Klink (qui est une partisane de Michel Aoun).

A l'élection présidentielle d'aujourd'hui au Liban, Michel Aoun a gagné mais Zorba le Grec a eu une voix

Myriam Klink occupant le parlement au Liban

Enfin, comme l'a noté Nadine Mazloum de Newsroom Nomad, l'élection était entachée de corruption avant même de commencer :

Deux députés n'auraient pas dû être admis dans le Parlement, mais hélas, au nom du consensus, ils l'ont été.

Le premier est Issam Sawaya, qui aurait quitté le Liban peu après son élection en 2009, et n'y est revenu que pour le scrutin présidentiel. Le second est le sulfureux Okab Sakr, qui n'est pas retourné au Liban depuis qu'on a appris en 2012 son implication dans un marché syrien de vente d'armes. Sakr est venu voter, sans qu'aucune mention soit faite de son implication dans l'affaire de vente d'armes.

Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais la dernière fois que j'ai vérifié, les députés étaient élus pour représenter les gens. S'ils sont incapables de faire le travail, ils feraient mieux de démissionner pour que d'autres puissent le faire à leur place.

Après ces débuts laborieux de la présidence Aoun, quel sera le prochain épisode pour le Liban ?

Un rapport révèle comment les politiciens ghanéens utilisent les médias sociaux avant les élections

vendredi 4 novembre 2016 à 09:08
La page de couverture du rapport Governance Social Media Index.

La page de couverture du rapport Governance Social Media Index.

Penplusbytes a publié la deuxième édition du rapport sur le Governance Social Media Index (GSMI), qui évalue et classe la présence sur les médias sociaux des partis politiques, de leurs dirigeants et des organes clés de gestion des élections au Ghana en fonction du nombre de leurs fans et du niveau d'engagement de ceux-ci sur Facebook et Twitter.

En général, le rapport montre que les acteurs politiques au Ghana avaient augmenté leur recours aux médias sociaux avant les élections générales de 2016.

L'intense activité des médias sociaux politiquement orientés n'est pas passée inaperçue, avant même la publication du rapport de Penplusbytes. John Kudalor, inspecteur général de la police du Ghana a laissé entendre en mai 2016 que les autorités ghanéennes pourraient envisager de bloquer des plates – formes [fr] de médias sociaux à l'occasion des élections du 7 décembre afin de “maintenir la paix”.

Suite à un débat public entre les principales parties prenantes , après cette déclaration, le président ghanéen John Dramani Mahama a déclaré le 14 Août [fr] que “le gouvernement n'avait pas l'intention de fermer les médias sociaux le jour des élections.”

Penplusbytes est une organisation sans but lucratif qui promeut une gouvernance efficace en utilisant la technologie en Afrique. L'organisation vise à stimuler le changement grâce à des innovations dans trois domaines clés : l'utilisation des nouvelles technologies numériques pour favoriser la bonne gouvernance et la reddition de comptes ainsi que les nouveaux médias, les innovations et la supervision efficace de l'utilisation des ressources et des revenus miniers, pétroliers et gaziers.

Le GSMI suit la pertinence et l'utilisation efficace des médias sociaux dans l'action du gouvernement. La première édition du rapport a été publiée en juin 2016.

La deuxième édition du GSMI a été compilée le 30 septembre après la disqualification de 13 candidats aux élections présidentielles et générales de 2016 par la Commission électorale du Ghana. Ces candidats ont été inclus dans le rapport parce qu'ils faisaient partie du premier GSMI.

Le rapport montre que le président Mahama est en avance sur les autres candidats présidentiels sur Facebook avec 1.007.595 de fans soit 125.171 de plus que son chiffre de juin de 880.620. Nana Akufo-Addo, leader du plus grand parti d'opposition, New Patriotic Party, suit avec 981.057 sur Facebook, avec une augmentation de 265.341.

S'agissant de Twitter, le rapport montre que M. Akufo Addo a mieux profité de la plate-forme pour communiquer et interagir avec ses militants, comme en témoignent ses plus de 4 000 tweets par rapport aux 842 tweets du président Mahama.

En ce qui concerne les partis politiques, le New Patriotic Party (Nouveau Parti patriotique) [fr] continue de mener largement avec 307 963 “j'aime” sur Facebook. Puis, vient le Progressive People's Party (Parti Progressiste du Peuple) avec 33.193 fans, qui devance leNational Democratic Congress (Congrès national démocratique) au pouvoir, qui enregistre 24.743 “j'aime” sur Facebook.

Plus tôt cette année, Penblusbytes a publié son premier rapport sur l'utilisation des réseaux sociaux par la presse papier, la radio et la télévision au Ghana.

Early this year, Penblusbytes released its first Social Media Index (SMI) report on Ghana’s print, radio and television media houses.

Plus tot cette année, Penplusbytes a publié son premier rapport sur les médias sociaux (SMI) sur les entreprises de presse, de radio et de télévision du Ghana.

L'intégralité du rapport Governance Social Media Index peut être téléchargé ici.

La modeste élection d'une transsexuelle est une immense victoire pour la communauté trans du Brésil

jeudi 3 novembre 2016 à 00:14
Indianara during a protest asking for the ousting of current Brazilian president, Michel Temer | Photo: Indianara Siqueira/Facebook/Used with permission

Indianara lors d'une manifestation pour le renvoi du président brésilien actuel, Michel Temer | Photo: Indianara Siqueira/Facebook/Utilisée avec autorisation

Depuis maintenant quelques années, le Brésil détient le triste record du nombre de meurtres de transsexuels commis dans le monde. Selon une étude de Transgender Europe, quatre fois plus de transsexuels sont assassinés au Brésil que dans le second pays de la liste (le Mexique) et presque huit fois plus que dans le troisième (les Etats-Unis). Une étude indépendante, conduite chaque année par un groupe pour les droits des homosexuels à Bahia, a compté qu'au moins 318 membres des communautés lesbiennes, gays, bisexuelles et transsexuelles (LGBT) ont été assassinés au Brésil en 2015, dont 37% — soit environ 117 personnes — étaient transsexuels.

L'espérance de vie d'un transsexuel vivant au Brésil au 21ème siècle est de 30 ans. En comparaison, l'espérance de vie des Brésiliens en général est actuellement de 75 ans. Le Brésil n'a pas de lois qui protègent les personnes LGBT contre la discrimination. La définition de crime haineux ne prend compte ni de l'orientation sexuelle, ni de l'identité sexuelle, et ni l'un ni l'autre ne peuvent être vérifiés dans un rapport de police, ce qui fait que les activistes et les ONG ont du mal à recueillir des informations. La vie des transsexuels qui travaillent dans l'industrie du sexe est particulièrement difficile.  

Au coeur d'une réalité si problématique, une transsexuelle de 45 ans a offert au monde un aperçu de la vie que mènent les personnes transsexuelles au Brésil. Indianara Siqueira s'est présentée sur la liste du parti de gauche PSOL aux élections municipales de Rio de Janeiro le 2 octobre. Elle a obtenu 6166 votes et acquis un siège de suppléant (un des six remplaçants désignés au cas où les premiers choix des électeurs décéderaient ou devraient abandonner leur poste pour une raison quelconque) à l'assemblée législative locale. Pour célébrer et pour inviter ses électeurs à sa cérémonie d'inauguration en janvier, Indianara a decidé de partager certains épisodes de son histoire sur sa page Facebook.  Jusqu'à présent, plus de 3100 personnes ont “aimé” son post  et il a été partagé plus de 700 fois.

Indianara est née dans une ville de taille moyenne, Paranaguá, dans l’ Etat de Paraná au sud du Brésil, pendant la dictature militaire (1964-1985). Elle a commencé à prendre des hormones à 12 ans. A 16 ans, elle a quitté la maison de sa grand-mère. Avant l'âge de 20 ans, elle avait déjà été violée par des policiers dans la petite pension où elle vivait à São Paulo.

Indianara décrit les conditions brutales auxquelles elle et tant d'autres ont dû faire face :

Fui pra Santos,afinal como diz a canção:La miseré est plus légere au soleil (A miséria é mais leve no sol).

Lá dormindo na rua conheci as Travestis putas que me acolheram e me deram um poste onde trabalhar na esquina.De masseira e pizzaiola,me tornei puta.

Quase todos os dias éramos levadas pelo Francês ( Polícia Civil) entre outres,ou Abreu ( PM) entre outros PMs pra delegacia.Apanhavamos por existir.Eramos jogadas no camburão e em viaturas como lixo que não pode nem ser reciclado.Eramos colocadas no muro do coliseu de Santos e tínhamos amoníaco espirrado na cara.Aquilo queimava olho ,mucosa da boca.So que quando eles iam puxar o amoníaco,puxavam também o revólver e se vc corresse eles atiravam.Vc suportava o amoníaco te queimar enquanto eles riam.As vezes faziam vc achar que iam fuzilar todas..Vc aprende o dia do plantão dos teus algozes,mas não pra fugir deles e sim se preparar psicologicamente pra ser torturada por eles.Voce tinha que sobreviver.Mas vc saia pronta pra morrer.

Je suis venue vivre à Santos, car après tout, comme dit la chanson, La misère est plus légère au soleil.

C'est là, alors que je dormais dehors, que j'ai rencontré des travestis qui se prostituaient. Ils m'ont accueillie et donné un endroit sous un lampadaire à un coin de rue où travailler. Après avoir été boulangère et pizzaïolo, je devins pute.

Presque chaque jour, « le français » (un des officiers chargés d'enquêter) ou Abreu (un des officiers de la police militaire), nous amenait au poste de police. On étaient battus pour nous punir d'exister. Ils nous entassaient dans les voitures et camionettes de police comme des déchets non-recyclables. Ils nous alignaient contre le mur du théâtre du Colysée de Santos pour nous jeter de l'ammoniaque au visage. Ça nous brûlait les yeux, l'intérieur de la bouche. Leur truc c'était de sortir leur revolvers en même temps que l'ammoniaque, comme ça si quelqu'un voulait s'enfuir, ils tiraient. Il te fallait endurer la brûlure de l'ammoniaque pendant qu'ils riaient. Parfois ils nous faisaient croire qu'ils allaient tous nous descendre. Tu apprends à connaître les horaires de tes bourreaux, à ne pas t'enfuir à leur approche, tu apprends à te  préparer psychologiquement à leurs tortures. Il faut que tu survives. Mais tu sors de chez toi prête à mourir.

Indianara s'identifie à la fois comme transsexuelle et comme travesti. Le mot travesti en portugais, bien que péjoratif à l'origine, a été adopté par la communauté transsexuelle du Brésil, et beaucoup de femmes trans s'identifient actuellement ainsi.

Elle vivait à Santos pendant les années quatre-vingts-dix, au moment où l'épidémie du SIDA frappait le Brésil. Elle nota à l'époque que l'espérance de vie des «transvestigeneres» — une combinaison des mots «transsexuel» et «travesti» en portugais — était de 25 ans.

A aids chegou.Santos era conhecida como a capital da AIDS.Disseram que eu morreria de AIDS.

Minha irmã cishetero casada com um PM morreu de Aids.Varias amigas morreram de AIDS.Variios amigos morreram de Aids.Nos chamavam de aidéticos.Nos expulsavam dos bares ,restaurantes e não nos deixavam comer com medo que comtaminassemos os talheres.Nos matavam socialmente aos poucos.Eles tinham prazer nisso.E não tínhamos a quem recorrer.

As vezes nos revoltavamos.A lider da revolta era assassinada.

Ninguém chorava por nós.Ao contrário.Para muitas famílias como é até hoje, é um alívio quando nos matam ou morremos.

Le SIDA est arrivé. Santos était connu comme la capitale du SIDA. Ils disaient que je mourrai du SIDA.

Ma sœur cisgenre, qui était mariée à un officier de police, est morte du SIDA. Plusieurs de mes amis sont morts du SIDA. Les gens nous appelaient les AIDéticos. Ils nous jetaient dehors dans les bars et les restaurants, de peur qu'on contamine les couverts. Ils nous tuaient à petit feu socialement. Ça leur donnait du plaisir. Et personne n'était là pour nous soutenir.

Parfois on se révoltait. Le leader de la révolte se faisait tuer.

Personne ne nous pleurait. Au contraire. Pour beaucoup de familles, et encore aujourd'hui, c'est un soulagement quand on nous tue ou quand on meurt.

Indianara during a conference for LGBT rights

Indianara lors d'une conference pour la defense des droits des LGBT  | Photo: Indianara Siqueira/Facebook/Utilisée avec autorisation

 

Ces épreuves ont fait d’ Indianara une activiste.  En 1996,elle faisait partie du groupe pour la défense des droits des LGBT, luttant pour le droit des transsexuels à user du nom de leur choix —   officiellement reconnu par la législation brésilienne seulement cette année — ainsi que pour le droit d'un des membres d'un couple homosexuel à adopter le nom de famille de son partenaire.

Elle s'est aussi battue pour que les transsexuelles puissent être placées dans l'aile réservée aux femmes dans les hôpitaux, ou au moins être séparées des hommes dans l'aile réservée aux hommes.

Et quand elle a dénoncé les abus de la police à l'encontre des personnes LGBT travaillant dans la rue, elle est devenue une cible:

Então um dia fui algemada em um poste em Santos enquanto o policial fazia roleta russa na minha cabeça.Eu aterrorizada tremia tanto é chorava.Pensei nos meus irmãos pequenos que dependiam de eu sobreviver nessa porra de vida,pensei nas travestis doentes que dependiam de que eu sobrevivesse. […] Sim,o barulho do tambor do revólver girando me fazia lembrar de quem dependia de mim pra viver um pouco mais,mesmo eu não sabendo se teria essa chance.Mas o barulho aterrozante do revólver me fazia lembrar que eu estava viva ainda.Ou morta,mas ainda sem saber.

Alors, un jour j'étais menottée à un lampadaire à Santos, avec un policier qui jouait à la roulette russe [avec le revolver] contre ma tempe. J'étais terrifiée, je tremblais et je pleurais. Je pensais à mes petits frères dépendants de ma survie à cette vie de merde, aux travestis malades dépendants de ma survie. […] Oui, le bruit de rotation du cylindre du revolver me rappelait ceux qui dépendaient de moi pour vivre un peu plus longtemps, même si je ne savais pas moi-même si j'aurais cette chance. Mais le bruit effrayant du revolver me rappelait que j'étais toujours en vie. Ou morte, même si je ne le savais pas encore.

Menacée, Indianara partagea son temps entre Rio and São Paulo pendant un temps, travaillant avec des groupes de soutien pour les transsexuels et organisant des marches pour la défense des droits des LGBT. Mais alors qu'elle devenait une figure importante dans sa communauté, les abus de la police s'intensifiaient :

Em SP a polícia colocava cocaína no carro das travestis e nas bolsas exigindo 5 mil reais pra não leva-las presas como traficantes.Muitas foram.Tinha a vida destruídas na prisão.Livres ou viravam ladras revoltadas que agrediam inclusive nós ,as amigas como se nos culpassem por não termos passado pelo mesmo.

Muitas foram presas injustamente.Algumas morreram nas prisões.

Nossa tortura tem que ser contada nas audiências públicas sobre tortura sim.

À São Paulo,la police cachait de la cocaïne dans les voitures ou dans les sacs à main des travestis et exigeait qu'ils paient 5000 reais brésiliens [1500 dollars américains] pour éviter d'être emprisonnés pour trafic de drogue. Beaucoup l'étaient. Leur vie était détruite en prison. Une fois libérés, ils devenaient des voleurs révoltés qui s'attaquaient même à nous, leurs camarades, comme s'ils nous reprochaient de n'avoir pas été nous aussi enfermés.

Beaucoup étaient accusés injustement. Certains mouraient  en prison. On devrait témoigner de nos tortures aux audiences publiques sur la torture.

Ce harcèlement a poussé beaucoup de membres de la communauté transsexuelle du Brésil à s'organiser à plus grande échelle. Une conférence nationale des personnes transsexuelles a été créée et est devenue un événement annuel important. Indianara a dû quitter le Brésil, mais elle continue à dénoncer la police. Comme elle a expliqué, «la vie des futurs transvestigeneres en dépendait”. Un de ses derniers projets comprend des cours de préparation aux tests d'entrée à l'université spécifiquement conçus pour les étudiants trans.

A meme from her campaign says: "Come transform the city"

Un meme pour sa campagne proclame: “Venez transformer la ville!” | Photo: Indianara Siqueira/Facebook/Utilisée avec permission

En 1992, une amie d’ Indianara, Kátia Tapety, a été élue conseillère municipale de la petite ville de  Colônia do Piauí – devenant la première personne trans a être élue à un poste politique. Aux élections suivantes, Kátia est devenue la législatrice ayant obtenu le plus de voix dans cette ville. Au vote suivant, elle a été élue maire adjointe. 

Vingt-quatre ans plus tard, la représentation des personnes transsexuelles dans les fonctions politiques reste faible, mais les élections de cette année ont vu un nombre record se présenter. Au moins 80 candidats se sont identifiés comme trans ; six ont été élus. Pour Indianara, qui célèbre son obtention d'un siège de suppléant, ceci représente une victoire: 

Passamos um recado:Estamos e ficaremos em todes espaços que nos foram negado.

Essa minha suplência é uma vitória de todes corpos de transvestigeneres que tombaram por mim.Que sobreviveram por mim.Que tombaram ao meu lado.Pelos corpos que poderão dizer : Sim podemos por que elas e eles puderam.

Sou resistência.Sou resiliência.

Nous avons envoyé un message: Nous sommes et nous serons à tous les postes qui nous ont été interdits.

Mon siège de suppléant est une victoire pour tous les corps de transvestigeneres qui sont tombés pour moi.Qui ont survécu pour moi. Qui sont tombés à mes côtés. Pour les corps qui peuvent maintenant dire oui, on peut parce qu'ils ont pu.

Je suis la résistance. Je suis la résilience.

Le traitement d'un journaliste d'images indépendant à Calais questionne sur l'utilisation de l'état d'urgence en France

mercredi 2 novembre 2016 à 19:12
Calais Jungle janv 2016

Jungle de Calais, 17 janvier 2016, photo sur Flickr de malachybrowne. Licence CC BY 2.0

Le journaliste vidéaste indépendant Gaspard Glanz a été placé en garde à vue le 26 octobre alors qu'il filmait pour son site d'information et agence de presse Taranis News le démantèlement de la « jungle » de Calais. 33 heures plus tard, il était relâché, avec interdiction de séjour « dans les lieux où des troubles à l'ordre public sont prévisibles » et notamment sur l'arrondissement de Calais, « jusqu'à la fin de l'état d'urgence », et obligation de se présenter tous les samedis au commissariat de police de Strasbourg, la ville où il habite à 600 km de là, manière de lui compliquer désormais la poursuite de son travail.

L'arrêté préfectoral détaillant ces mesures ainsi que leur aire d'application s'appuie sur le dispositif de l'état d'urgence instauré en France après les attentats de novembre 2015 et toujours en vigueur. Dans ce cadre, les préfets, représentants locaux de l'autorité de l'Etat, peuvent créer des Zones de protection et de sécurité, ce qui a été fait pour Calais dès le 23 octobre 2016. L'arrêté invoque aussi les poursuites judiciaires en cours contre lui.

Les faits

Le reporter ne recourt pas cette fois aux seules images pour raconter sur son site, de façon aussi circonstanciée qu'épique, le déroulement de son interpellation suivie de sa longue garde à vue, y voyant un ordre « venant de tout en haut ».

Il lui est reproché, premier motif, d'avoir pénétré sans accréditation presse – demandée et non reçue – sur « un territoire protégé par l’état d’urgence ».

Le deuxième motif porte sur le vol allégué d'un talkie-walkie des forces de l'ordre, imprudemment présenté sur Twitter comme une « prise de guerre ». Il est aussi poursuivi pour injure publique sur douze fonctionnaires de police de Rennes, dont il a posté sur Facebook la photo de groupe dans la rue avec le simple texte « Ein Reich, ein Volk, ein Führer » (Un peuple, un pays, un guide, slogan du parti nazi dans les années 1930). Le mot “nazi” n'est pas prononcé mais l'allusion est transparente. L'article 433-5 du code pénal français punit l'outrage à une « personne dépositaire de l'autorité publique » (les policiers en font partie) de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende. Ces deux dernières accusations lui valent deux procès à venir en janvier et mars 2017. 

Présent sur tous les terrains de la contestation

Taranis News occupe une place particulière dans le paysage médiatique français. Il s'intéresse à tous les mouvements sociaux et contestataires – et ils sont nombreux en France des dernières années, depuis la contestation du projet d'aéroport à Notre-Dame des Landes jusqu'aux opérations de Calais en passant par les manifestations de Nuit Debout et les mobilisations contre la loi travail.

Taranis News est présent partout en France où on manifeste, pour quel bord que ce soit, avec ou sans répression, même sur les actuelles manifestations de policiers.

La forme de journalisme pratiqué par Taranis News, l'immersion au sein même des manifestants, comporte un risque tant physique – prendre des coups lors de heurts entre forces de l'ordre et manifestants – que judiciaire, accru par un certain goût de la provocation qu'exprime la devise de Gaspard Glanz sur son profil Twitter « J’adore sentir l’odeur du gaz lacrymogène, le matin  » –  comme l'illustrent ses actuels déboires. Sa pratique, qui suppose la liberté de se déplacer constamment sur le terrain, est entravée par la contrainte qui lui est imposée de se signaler une fois par semaine auprès de la police dans sa ville :

M’obliger à pointer tous les samedi au commissariat de Strasbourg, ça va détruire mon activité professionnelle. Il faut comprendre que je me déplace en permanence, que j’ai fais des dizaines de milliers de kilomètres depuis le début de l’année en faisant des aller/retours entre Rennes, Nantes, Paris, Lille, Calais et je ne suis resté à Strasbourg que moins d’un mois en cumulé sur toute l’année. M’obliger à faire 1600km à 1800km aller/retour (si je suis à Rennes ou à Nantes par exemple) chaque semaine et juste pour pointer au commissariat de Strasbourg, économiquement cela va me laminer.

Journaliste ET/OU militant

Ce tweet du journaliste Michel Mompontet sur son compte personnel constate un certain manque de solidarité dans le milieu des médias :

Gaspard Glanz, qui incarne un journalisme à la frontière incertaine entre information et action, s'est créé de solides inimitiés, non seulement du côté des forces de l'ordre, mais aussi dans les milieux de la presse. Ses reportages vidéo, presque sans commentaires comme les « No comment » d'Euronews, mais présentés du point de vue des manifestants sont pourtant recherchés tant par l'AFP que la BBC.

Militant ? Sans doute, pas si loin des « No borders », la mouvance autogestionnaire pour l'abolition des frontières, et de la gauche de la gauche française. Regards, un média de cette tendance a été parmi les premiers à lui apporter un soutien, qui ne dépasse guère depuis les médias proches de ce bord politique, tels Mediapart, dont la société des journalistes écrit :

La multiplication des poursuites pour des motifs contestables au regard de la liberté d’expression donne le sentiment d’un harcèlement à l’égard de Gaspard Glanz. La rédaction de Mediapart suivra avec attention le déroulé de ses procès à venir car ils ne concernent pas seulement le sort d’un journaliste professionnel même s’il ne possède pas de carte de presse, mais bien le respect des droits et de l’indépendance de toute une profession.

Sa militance – fait aggravant, contre l'ordre établi – fait-elle de lui un faux ou mauvais journaliste ? Gaspard Glanz est attaqué, dans les commentaires d'articles et les réseaux sociaux, sur le fait qu'il n'a pas de carte de presse et qu'il est militant, ce qui serait contraire à l'éthique journalistique. Un des critères d'obtention de la carte de presse en France est le fait d'être salarié d'un média – ce que beaucoup de journalistes ne sont pas et qui n'est pas forcément un gage d'indépendance et de liberté d'expression.

Un détournement de l'état d'urgence, pour la COP 21 et les échéances électorales ?

L’état d'urgence, instauré en France après les attentats de novembre 2015, a été prolongé pour la quatrième fois en juillet dernier suite à l'attentat de Nice, ce jusqu'à la fin de janvier 2017. La levée des restrictions à sa liberté de mouvement pour Gaspard Glanz est assujettie à une hypothétique fin de l'état d'urgence qui semble destiné à un renouvellement perpétuel jusqu'à la disparition improbable de la menace terroriste.

Une commodité dont le gouvernement ne s'est pas privé d'user pour s'affranchir de la contestation tout en évitant de trop disperser des effectifs policiers forcément limités. Une première fois pendant la COP 21 à Paris en novembre 2015. Dans le gros et violemment controversé livre de confidences de François Hollande paru tout récemment, Un président ne devrait pas dire ça, on peut lire :

Le Président affirme dans le livre « C’est vrai, l’état d’urgence a servi à sécuriser la COP 21, ce qu’on n’aurait pas pu faire autrement », avoue sans fard Hollande. [Et il poursuit : «Imaginons quil ny ait pas eu les attentats, on naurait pas pu interpeller les zadistes pour les empêcher de venir manifester. Cela a été une facilité apportée par l’état durgence, pour dautres raisons que la lutte contre le terrorisme, pour éviter quil y ait des échauffourées] .

Dans le cas présent et le contexte politique français d'un président à l'impopularité abyssale à l'approche de la campagne des présidentielles en 2017, les images en direct du démantèlement de la Jungle et du transfert en bus des migrants vers d'autres lieux du pays que pouvait réaliser et diffuser Taranis News risquaient fort de contredire le récit harmonieux de la communication gouvernementale, comme l'a décrit le Monde [accès restreint aux abonnés] :

La « com’» était presque parfaite… Dès la préparation du démantèlement de la « jungle » de Calais, la Place Beauvau [le Ministère de l'Intérieur] et la préfète du Pas-de-Calais, Fabienne Buccio, ont travaillé le dispositif d’évacuation du bidonville pour qu’il raconte la belle histoire d’une France terre des droits de l’homme et de l’asile. Tout a été pensé pour convaincre le public qu’il s’agissait d’une opération humanitaire.

Liberté d'informer et rétrécissement de l'état de droit

Si les raisons de son arrestation restent ouvertes à la controverse, il en ressort tout de même de vraies inquiétudes quant à la façon dont l'état d'urgence est – et continuera probablement à être – utilisé avec complaisance en France pour museler un certain nombre de contestations.

Les grands médias français suivent et s'inquiètent de la situation de leurs confrères en Turquie et en Hongrie en ce moment. Ils semblent malheureusement moins prompts à s'interroger face à « la salve de procédures » qui tombe sur Gaspard Glanz sous couvert d'état d'urgence.

La page Facebook de Taranis News est ici.

Free Basics, le projet controversé de Facebook pour un accès gratuit limité à internet, est déjà présent dans 47 pays

mercredi 2 novembre 2016 à 11:44
Capture d'écran de la vidéo présentant Free Basics sur YouTube. Via internet.org

Capture d'écran de la vidéo présentant Free Basics sur YouTube. Via internet.org

Partant du principe que plus de 85 % de la population mondiale vit dans des zones couvertes par un réseau de téléphonie mobile, mais que ces services étaient coûteux pour un accès à internet, Facebook a lancé Free Basics, en s’associant à des opérateurs mobiles locaux dans le monde entier.

Le programme Free Basics a été lancé le 20 Août, 2013 sous le nom d'Internet.org. C'est le résultat d'une collaboration de Facebook et les entreprises opérant dans le domaine de la technologie mobile Samsung, Ericsson, MediaTek, Opera Software, Nokia et Qualcomm.  Ce projet permet de naviguer gratuitement avec une carte SIM de tout opérateur mobile qui y participe.

Thierry Barbaut analyse l'impact de cette application sur la vie des personnes à travers le monde en citant quelques exemples sur le site Afrique Technologie: 

Ce programme a un véritable impact sur les vies humaines en fournissant un accès gratuit à la santé, à l’éducation, et aux informations économiques. SmartBusiness, par exemple, est un site qui apprend aux gens à lancer et à gérer une entreprise, avec désormais 5 services de recherche de plus par jour depuis son lancement en Afrique du Sud au mois de juillet, ce qui signifie qu’un plus grand nombre peut accéder aux informations économiques importantes.

BabyCenter et MAMA atteignent des millions de personnes dans le monde en proposant des informations de santé primordiales pour la grossesse et l’art d’être parent et, rien qu’à travers les services Free Basics Internet.org, 3,4 millions de personnes sont informées. «Dès que les gens sont connectés, ils peuvent réaliser des choses extraordinaires aussi bien en tant que communauté qu’individus. La connectivité offre des opportunités aux peuples du monde entier, notamment, en Afrique où nous avons commencé ce voyage, » déclare Ime Archibong, directeur des partenariats stratégiques au sein de Facebook.

Depuis Bukavu, la ville où il étudie, à l’est de la république démocratique du Congo, le blogueur Olivier Ntanama, qui utilise le pseudonyme Smach, fondateur du blog Tech in Congo, a recensé lesTop 80 sites web gratuits avec Free Basics de Facebook

L'application Free Basic ne se limite pas aux utilisateurs des réseaux sociaux ordinaires. Elle s'adresse aussi aux développeurs. En effet, lors de la Conférence F8, Facebook a annoncé:

Aujourd’hui, lors de la conférence F8, nous allons annoncer deux nouveaux outils destinés aux développeurs Free Basics. Nous avons lancé la plate-forme Free Basics en septembre pour tous les développeurs dont le service répond aux critères techniques et aux critères de participation de base. À l’heure actuelle, plus de 500 services sont proposés dans le monde. Les développeurs qui intègrent la plate-forme Free Basics jouent un rôle fondamental dans l’élaboration des expériences offertes aux personnes lorsqu’elles accèdent à Internet par le biais de Free Basics.

Dans un billet paru en juin sur blastingnews.com intitulé “Free Basics à Madagascar: l’internet gratuit de Facebook à quel prix ?” la blogueuse,  a analysé les avantages de l'application dans son pays, à l'occasion de la visite d'une mission de Facebook à Madagascar pour la présentation du projet, a écrit:

En mai 2015, Free Basics était déjà accessible dans 47 pays d'Afrique, d'Asie-Pacifique et d'Amérique latine. En Afrique, des opérateurs de téléphonie mobile de 22 pays offriraient ce service, dont entre autres en Afrique du sud, au Nigeria, au Kenya, au Ghana, au Sénégal, en Zambie, au Rwanda et la Guinée.

Selon un sondage effectué par Facebook, au total 79 632 utilisateurs ont exprimé leur jugement après utilisation. Sur une échelle allant de 1 à cinq, 47 951 avaient donné le maximum de la note, soit près de 70 pour cent, 11 757 ont jugé qu'il méritait 4, soit environ 15 pour cent, pour 7 410 utilisateurs lui ont attribué 3, soit un peu moins de 10 pour cent. Ce qui porte le total des utilisateurs qui ont une opinion positive à 95 pour cent.

D'autre part, le site info.internet.org informe que des résultats d'un sondage effectué en Inde:

Lors d’un sondage réalisé auprès de plus de 3 000 personnes en Inde, 86 % des participants ont soutenu Free Basics après avoir pris connaissance des avantages et des inconvénients du service.

En outre, plus de 80 % des participants sont favorables à l’idée d’un « accès gratuit à un ensemble de sites web utiles sur Internet”.

D'après The Guardian, Facebook est en pourparlers depuis des mois avec des responsables gouvernementaux américains et des opérateurs de téléphonie mobile pour élaborer une version américaine de Free Basics. Cette version adaptée au public américain ciblerait les classes à faible revenu et les zones rurales qui ne peuvent pas se permettre l'accès à Internet haut débit fixe ou sur les smartphones.

Malgré l'appréciation de tant d'utilisateurs et l'offre gratuite de ces services, il y a de la résistance, qui a abouti à la suspension de Free Basics en Inde et en Égypte.

Depuis mai 2015, des ONG de défense des droits numériques font circuler une lettre adressée à Mark Zuckerberg, dans laquelle  ils dénoncent le programme sous prétexte de menaces pour la neutralité d'Internet et des atteintes à la vie privée et à la sécurité des internautes. Ils lui attribuent l'intention de construire un clos numérique dans lequel enfermer les gens les plus pauvres du monde, en leur servant un ensemble limité de sites et services sans sécurité. Cette pétition a recueilli plusieurs milliers de signatures du monde entier.

Parmi les associations qui sont à l'origine de cette pétition, il y a quelques unes basées en Afrique: Paradigm Initiative Nigeria, RIght 2 Know Campaign – Afrique du sud Africa, Unwanted Witness (Ouganda), Zimbabwe Human Rights NGO Forum – Zimbabwe, Centre Africain D'Echange Culturel (CAFEC) R. D. Congo, i freedom Uganda, KICTANet (Kenya) Just Associates Southern Africa – Africa.