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Manifestations à Gaza contre le ‘Massacre des salaires’ par l'Autorité Palestinienne

dimanche 23 avril 2017 à 23:46

Manifestation à Gaza contre les coupes salariales de l'AP. Capture d'écran Source: Pal+ عربي

Au début du mois, de grandes manifestations ont éclaté dans la bande de Gaza pour protester contre la décision de l'Autorité Palestinienne (AP) de baisser les salaires de ses fonctionnaires et personnels de sécurité à Gaza.

L'AP, l'organisme semi-public dépendant des donateurs qui gouverne la Cisjordanie occupée par Israël, a réduit les salaires de ses agents à Gaza de 30 à 70 pour cent au prétexte de la crise financière causée par l'aide étrangère en baisse.

Les Palestiniens ont dénoncé la décision de l'AP, la qualifiant de “massacre des salaires”. Sur les médias sociaux, le hashtag arabe pour ‘massacre des salaires’ a été utilisé ainsi que “Abbas nous a volés”, en référence au président de l'AP Mahmoud Abbas.

La photo parle d'elle-même. #Abbas_Nous_A_Volés #MassacreDesSalaires

Le 8 avril 2017, des dizaines de milliers de Palestiniens ont manifesté dans la ville de Gaza contre les baisses de salaires.Les manifestants ont réclamé le départ du premier ministre de l'AP Rami Hamdallah et la démission du ministre des Finances Bishara.

Ils ont demandé la démission du chef du gouvernement Rami Al Hamdallah… manifestation des employés de l'AP à Gaza contre la baisse de 30% de leurs salaires. #MassacreDesSalaires

Hamdallah a défendu la baisse des salaires de l'AP lors d'une conférence de presse, disant qu'elle était nécessaire pour “gérer les difficultés financières subies par le gouvernement palestinien dues aux réductions ds versements internationaux.”

Il a aussi accusé le Hamas, qui gouverne la bande de Gaza, d'exacerber la crise financière, affirmant que le Hamas “garde ses recettes pour lui, tadis que l'AP a dépensé plus de 17 milliards de dollars dans la Bande de Gaza pendant les dix dernières années.”

Les organisations palestiniennes de la société civile en Cisjordanie ont entamé un sit-in devant les bureaux du premier ministre à Ramallah. La police de l'AP a toutefois barré toutes les rues conduisant à l'immeuble pour restreindre la contestation.

L'AP emploie environ 56.000 personnes à Gaza. Quand le Hamas prit le contrôle de la Bande en 2007, Abbas exigea des fonctionnaires qu'ils abandonnent leurs postes et restent chez eux en continuant à toucher leurs traitements habituels. Ceux qui ignorèrent l'instruction et poursuivirent leur travail sous l'autorité du Hamas virent des salaires amputés voire supprimés.

La décision discriminatoire de l'AP approfondit le fossé politique entre le Hamas et le Fatah, parti auquel appartient Abbas, et faction la plus large de la confédération multipartite qu'est l'Organisation de Libération de la Palestine (avec leOLP). En 2006, le Hamas remporta les élections parlementaires, ce qui conduisit à un conflit avec le Fatah, avec pour résultat que ce dernier contrôla l'Autorité Palestinienne en Cisjordanie, et le Hamas eut la haute main sur Gaza..

Après la victoire électorale du Hamas, Israël procéda à l’arrestation d'au moins 450 membres du parti et les maintint en détention administrative. Récemment, des manifestants palestiniens ont réclamé la fin de la coordination sécuritaire entre l'AP et l'administration israélienne après l'assassinat du célèbre activiste Bassel Al-Araj à Ramallah.

Hamas a parlé de “nouveau complot” contre Gaza. Salah Al Bardawil, un membre du bureau politique du Hamas, a déclaré que le Hamas n'admettait pas d'être menacé et “ne s'agenouillerait pas devant la pression politique.”

Le président du Syndicat des Employés publics de Gaza, Aref Abu Jarad, a trité la mesure de “crime” contre des dizaines de milliers de familles palestiniennes à Gaza.

La justification du Conseil des Ministres que l'AP traverse une crise financière est un mensonge puisque les coupes ne concernent que les salaires des fonctionnaires de Gaza et pas ceux de Cisjordanie.

Plusieurs cadres du Fatah à Gaza ont démissionné pour protester contre la mesure injuste de l'AP.

Le Coordinateur Spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient Nikolaï Mladenov a également exprimé sa préoccupation devant la décision :

Depuis dix ans, les Palestiniens de Gaza ont vécu quatre guerres, l'absence de libertés, des restrictions israéliennes sans précédent, une grave crise humanitaire, un chômage élevé, les coupures d'électricité, et l'absence d'avenir politique.

Alors que le gouvernement palestinien a besoin d'assurer son équilibre fiscal dans ds conditions économiques de plus en plus difficiles, il importe que les réformes ou décisions de réduction des dépenses soient équitablement réparties et prises en tenant compte de la rudesse des conditions dans lesquelles vit la population de Gaza.

La Bande de Gaza subit d’inhumaines conditions économiques et de vie, résultat de 10 ans de blocus imposé par le gouvernement israélien depuis la victoire de Hamas aux élections parlementaires de 2006 ainsi que des multiples offensives militaires d'Israël contre le territoire, dont la plus récente a eu lieu pendant l'été 2014.

Caricature sur la situation à Gaza. #MassacredesSalaires

Le Kremlin planifierait une vaste campagne de dénigrement contre le principal opposant de Poutine

dimanche 23 avril 2017 à 19:07

Image : Alexeï Navalny / Instagram, édité par Kevin Rothrock

Sauf mention contraire, les liens de cet article renvoient vers des pages en russe.

Le Kremlin a finalement décidé de défier Alexeï Navalny, ont indiqué quatre sources différentes à la chaîne de télévision indépendante Dozhd. Selon deux d'entre elles (juste identifiées comme “des individus proches du Kremlin”), la campagne contre le leader de l'opposition russe va bientôt commencer.

D'après une source qui le côtoie régulièrement, le directeur adjoint de Poutine, Sergueï Kirienko, a renversé la position longtemps tenue du Kremlin selon laquelle Navalny ne représentait pas une véritable menace pour le régime. L'administration serait inquiète à l'idée que Navalny puisse gâcher la probable réélection de Poutine en mars prochain, alors que le Kremlin compte sur une “belle victoire”, avec une forte participation et sans la nécessité d'une répression ouverte contre l'opposition politique.

Selon le reportage de Dozhd, une équipe spéciale du bureau de politique intérieure de Poutine a mis en place une cellule de crise quelque part à l'extérieur du Kremlin, pour générer des données visant à discréditer Navalny. Dozhd indique qu'Alexander Kharichev et Andreï Yarine – deux hauts responsables de la politique intérieure de Poutine – superviseront l'opération de dénigrement.

« Ils tournent des vidéos, élaborent des clips viraux et conçoivent des petits jeux vidéos pour discréditer Navalny. Ils le combattent comme s'il était Hitler » a révélé l'une des sources à Dozhd.

Les analystes politiques ont confié à Dozhd que le public pouvait s'attendre à ce que la campagne contre Navalny ressemble aux diffamations dirigées contre l'ancien premier ministre Mikhail Kasyanov. Sa course pour un siège à la Douma d'état a échoué l'année dernière, après que la télévision russe eut diffusé des séquences de caméra cachée le montrant en train de tromper sa femme, provoquant par ailleurs l'effondrement [fr] de l'alliance de l'opposition démocratique en Russie.

Sur Internet, où Navalny bénéficie d'un maximum de soutien et de popularité, les Russes se moquent déjà d'un Kremlin travaillant sur des « jeux vidéos » pour discréditer l'activiste anti-corruption le plus populaire du pays. « J'ai hâte que sorte le jeu vidéo qui discrédite Alexeï Navalny » a tweeté ironiquement Anton Semakine, un artiste de Perm. « Après les manifestations contre la corruption, le Kremlin a décidé de sévir contre Navalny, pas contre la corruption » a plaisanté le comédien russe Bob Farber.

D'après les sources de Dozhd, ce sont les manifestations anti-corruption du mois dernier, menées presque exclusivement par Navalny, qui ont provoqué cette nouvelle réponse du Kremlin. Bien que les rassemblements n'aient représenté qu'une fraction infinitésimale de la population russe, les efforts de Navalny dans la lutte anti-corruption ont incontestablement abouti à un mouvement plus large. Consultez à ce sujet l'article de RuNet Echo « Russia's Youngster Uprising » [en].

Des preuves statistiques montrent la progression de l'influence politique de Navalny : début avril, l'institut de sondage Levada Center a enregistré une baisse de 10% de la cote de popularité du premier ministre Dimitri Medvedev après que Navalny eut publié une enquête explosive accusant Medvedev de corruption à grande échelle.

Livrées dans une vidéo de présentation élégante et drôle, les allégations de Navalny ont attiré plus de 19 millions de vues sur YouTube.

Vu du dehors : Les Français désinvoltes sur le sexe extraconjugal mais pas sur le couple

samedi 22 avril 2017 à 19:06

“Le déjeuner sur l'herbe” d'Edouard Manet (1863). Domaine public sur Wikipedia

Global Voices a récemment demandé à ses rédacteurs quel est l'aspect le plus surprenant du pays où ils vivent ou de celui d'où vous venez ?

Les réponses seront publiées dans une série d'articles visant à démonter ces préjugés et à proposer un point de vue plus nuancé sur certaines régions du monde. Ce premier article est la réponse du rédacteur en chef de Global Voices en français, Lova Rakotomalala, qui vit à Paris.    

C'est un stéréotype qui a la vie dure : les Français ont une vie sexuelle plutôt libertine. La littérature et la culture populaire ne valent pas mieux,  qui sont pleines de personnages français dont l'attitude sur le sexe est très laissez-faire. Des exemples ? Le Vicomte de Valmont, le Marquis de Sade, Brigitte Bardot, Dominique Strauss-Kahn, et même Pépé le putois, bon sang !

Ce cliché n'est pas forcément sans fondement. Les Français ont tendance à adopter une attitude relâchée quant aux aventures extraconjugales de leurs dirigeants. Félix Faure, président de 1895 à 1899, est mort d'une apoplexie au Palais de l'Élysée alors qu'il avait des rapports sexuels avec sa maîtresse, entre deux réunions de travail. L'épouse et la maîtresse du président François Mitterrand ont toutes les deux assisté à ses funérailles avec leurs enfants. Plus récemment, il y eu la fameuse aventure du président François Hollande avec l'actrice Julie Gayet.

Une enquête publiée par le Pew Research Center indique les électeurs français seraient plus tolérants envers l'infidélité que les autres électeurs à travers le monde : seuls 47 % d'entre eux déclarent qu'il est moralement inacceptable d'avoir une aventure extraconjugale. Ce comportement est reconnu, au moins de façon informelle, dans l'administration. Un de mes amis, Français expatrié et pensant s'installer à Madagascar avec un contrat d'ingénieur d'un an, reçut ainsi une lettre du consulat à Madagascar qui le prévenait des menaces pesant sur les étrangers. Mon ami pensait que le pays était pacifique et demanda donc plus de précisions. La réponse du consulat fut la suivante : “Vous êtes un jeune couple. Votre femme vous rejoindra peut-être plus tard, mais venir seul à Madagascar pourrait être préjudiciable à votre vie de famille.” Je ne sais toujours pas si cette déclaration accusait davantage les mœurs françaises ou malgaches !

Mais on trouve aussi des preuves qui contredisent l'idée selon laquelle les Français laissent libre court à leur libido. Même si les normes culturelles françaises vis-à-vis de l'infidélité conjugale sont moins strictes qu'ailleurs dans le monde, en 2015, une campagne publicitaire nationale du site internet de rencontres extraconjugales Gleeden a été très critiquée par le grand public et a dû retirer ses publicités dans différentes villes.

L'actrice Brigitte Bardot fut l'un des sex symbols les célèbres des années 1950-1960. Photographie : Michel Bernanau (CC BY-SA 3.0) Wikimedia Commons.

Dans son blog French Yummy Mummy, Muriel Demarcus, une Française établie à Londres, objecte à cette idée reçue :

In London, they make it sound like the French have invented extramarital affairs. All the articles usually paint an idyllic picture of open marriages and glorify women who swallow their pride while their husbands have a roving eye. Apparently, being unfaithful is not that big a deal in France.

What a load of rubbish! Come on, the aristocracy in this country has had affairs for ages (just look at the Royal Family!), and it doesn’t have much to do with the French, does it? They did it all by themselves. Affairs are not the privilege of the French.

Admiring the French for their perceived promiscuity is an easy way to forget their own frustrations.

What would we do without stereotypes? I once was offered an ashtray despite the fact that I don’t smoke. As I am French, people assume I smoke. Well, I don’t.

À Londres, on dirait que les Français ont inventé les relations extraconjugales. Les articles présentent généralement tous une image idyllique des mariages libres et applaudissent les femmes qui ravalent leur fierté alors que leur mari court le guilledou. Apparemment, être infidèle n'est pas vraiment un problème en France.

Quelle ânerie ! Enfin voyons, l'aristocratie anglaise elle-même entretient des aventures depuis toujours (pour ne parler que de la famille royale !). Elle n'a pourtant rien à voir avec les Français, n'est-ce pas ? Ils le font tout seuls comme des grands. L'infidélité n'est pas le privilège des Français.

Admirer les Français pour leur promiscuité sexuelle présumée est une façon facile d'oublier ses propres frustrations.

Que ferions-nous sans les stéréotypes ? Une fois, on m'a offert un cendrier bien que je ne fume pas. Comme je suis française, les gens supposent que je fume. Hé bien non.

Les données du site internet Gleeden lui-même démentent le cliché selon lequel les Français ont l'exclusivité de l'adultère :

Gleeden’s own figures suggest that the French are no more likely to stray than other nationalities. Its own research found that 17 percent of the French admitted to having an affair, the same as in Spain and Italy.

Les données de Gleeden suggèrent elles-mêmes que les Français ne sont probablement pas plus infidèles que les autres. Cette enquête faisait ressortir que 17 % des Français ont avoué avoir eu une aventure, le même taux qu'en Espagne et en Italie.

D'autant que, si on creuse davantage, il apparaît que la vision de l'amour à la française tend plutôt à construire et entretenir des relations qui dépassent les règles simplistes et sans nuances de la monogamie. Pour les Français, ce qui compte le plus est la relation de couple et pas seulement son expression physique.

Apparemment, comprendre – ou pardonner – est la base. Dans Modern Romance, le nouveau livre sur le romantisme à l'heure du numérique inspiré du comique américain Aziz Ansari, on cite l'étude réalisée par l'Institut Français d'Opinion Publique (IFOP) en concluant que :

It wasn't that French people didn't care if their spouses cheat, but that they weren't as shattered by the betrayal. Because of their cultural attitude, the French are also the most likely to forgive a cheater.

Ce n'est pas que les Français attachent peu d'importance si leurs partenaires les trompent, mais ils ne sont pas autant brisés par la trahison. A cause de leur culture, les Français ont tendance à pardonner l'infidélité.

Cette étude soulignait que 68% des Français croient qu'il est possible d'être fidèle toute la vie à une personne et 63% d'entre eux croient qu'ils continueraient de l'aimer même si cette personne a été infidèle.

La psychologue française Maryse Vaillant l'explique avec ces données :

My research showed that giving in to temptation can help a man understand the extent to which he is attached to his wife. With his wife he has projects of bringing up children, buying a house, creating a life. With an attraction to another young woman it's not the same thing. Sometimes we need a little emotional crisis to show the difference between a moment's satisfaction and building an existence together.

Ma recherche a démontré que céder à la tentation peut aider un homme à comprendre combien il est attaché à sa femme. Il a des projets avec elle comme d'élever leurs enfants, acheter une maison, faire sa vie. C'est différent lorsqu'il est attiré par une femme plus jeune. Des fois, nous avons besoin d'avoir une crise émotionnelle pour nous rendre compte de la différence entre un moment de satisfaction et la construction d'une vie de couple.

“Même si les Français sont plus tolérants vis-à-vis de l'infidélité et la considèrent comme faisant partie de la vie, il faut le faire discrètement”, écrit Debra Ollivier, auteur de What French Women Know: About Love, Sex, and Other Matters of the Heart and Mind [Ce que les femmes françaises savent sur l'amour, le sexe et les autres affaires sentimentales et d'esprit].

“It’s a private thing you do. Marriage and the sanctity of the family are still really important. If you’re going to have a lover, it’s probably because you want to keep your family intact. You’ll have a lover and be satisfied and keep the family unit together. It’s ironic, because we talk about family values in the United States, but we don’t do anything to underwrite it. We have no social infrastructure, whereas there they do. The family structure is important. It doesn’t easily fall apart, and when it does, it’s really traumatic.”

“C'est quelque chose de privé. Le mariage et le sanctuaire familial restent très importants. Si vous avez un amant, c'est probablement parce que vous souhaitez conserver votre famille. Avec un amant,vous serez satisfait et ta famille restera unie. C'est paradoxal de parler des valeurs familiales aux Etats-Unis car on ne fait rien pour les assurer. Il n'y a pas d'infrastructure base sociale, alors qu'eux en ont. Le socle familial est important. Il ne se brise pas facilement, mais quand ça arrive, c'est un traumatisme.

Une entreprise canadienne veut construire la plus grande mine d’or du Brésil — au cœur de l’Amazonie

vendredi 21 avril 2017 à 23:35

Coucher de soleil sur les pirogues de Bye Bye Xingu, l'action militante des indigènes et des riverains, soutenue par l'ISA, dans le Grand Méandre du Xingu en 2016. Photo: Lilo Clareto/ISA, publiée avec son autorisation.

Ceci est une compilation de deux articles publiés par l’Institut socio-environnemental (ISA), une organisation non gouvernementale brésilienne pour la défense de l’environnement et des droits des indigènes. Cette version a été rédigée pour Global Voices et sa publication autorisée.

Une entreprise canadienne projette de construire ce qui sera la plus grande mine d’or à ciel ouvert du Brésil, située au cœur de la forêt amazonienne, au bord du Rio Xingu. Malgré tout, des militants, des ONG et des groupes de défenses des droits des indigènes engagent une bataille pour la terre.

La Belo Sun Mining Corp, dont le siège est à Toronto, au Canada, est derrière le projet Volta Grande Gold, qui envisage d’extraire 600 tonnes d’or sur une période de 12 ans. La mine va laisser des montagnes de déchets d’à peu près deux fois la taille du Pain de Sucre. Une communauté de 300 familles de cultivateurs des localités de Vila da Ressaca, Galo et Ouro Verde, devra être déplacée si le projet aboutit.

Début février, le Secrétariat à l'environnement de l’État du Pará (Semas) a concédé à l'entreprise, qui avait entrepris les recherches sur le terrain depuis 2008, un permis environnemental d'installation, mais celui-ci a été invalidé deux semaines plus tard par le Ministère de la justice du Pará, sur injonction de la Defensoria Pública (Défense publique) de l’État (DPE).

Dans ce texte, le juge Álvaro José da Silva Souza confirme que l'entreprise a acquis des terres publiques fédérales et qu'il va ordonner au Ministère public fédéral (MPF) d'ouvrir une enquête pour appropriation foncière frauduleuse (grilagem). Les terres en question font partie de la Gleba Ituna, choisie par l'Union dans les années 80 comme lieu fondateur de la réforme agraire.

D'autre part, le juge affirme que l'entreprise n'a rien fait en trois ans, depuis l'émission de l'autorisation préalable et même depuis le récent permis environnemental, pour déplacer et reloger dignement les riverains concernés. “Je trouve totalement déraisonnable et injustifié que jusqu'à aujourd'hui les familles soient laissées dans le dénuement le plus total face à leur avenir incertain”, dit le texte. Il a donné un délai de 180 jours à l'entreprise pour présenter un programme de relogement des riverains concernés, garantissant aux familles le libre accès à leurs terres durant cette période.

La zone prévue pour la mine est déjà durement touchée par un autre projet, l’usine hydroélectrique de Belo Monte, en phase de test depuis fin 2015. Le barrage a réduit le débit des eaux de 80% sur un tronçon de 100 kilomètres du Rio Xingu, mais il a aussi provoqué la mort de milliers de poissons, la détérioration de la qualité de l'eau et des bouleversements considérables dans le mode de vie des populations indigènes et riveraines depuis le début de sa construction en 2011.

Le projet est vu comme une bombe à retardement environnementale, pouvant potentiellement causer une tragédie équivalente à celle de la rupture du barrage de la Samarco – un site de la BHP Billiton e Vale – survenue à Mariana (MG), fin 2015, qui a déversé des milliards de litres de déchets dans le Rio Doce, faisant 19 morts et 700 sans-abri.

Une note technique, émise par Belo Sun en 2012 portant sur les préoccupations soulevées lors d'une réunion publique sur le projet, a été signée par le même ingénieur qui s'était porté garant de la sécurité du barrage de Mariana quatre mois avant sa rupture. En novembre 2016, lui et 20 autres dirigeants ont été condamnés pour homicide par le Ministère public fédéral.

Pas de consultation des populations indigènes 

Les communautés indigènes directement affectées par le projet n'ont pas été consultées, comme l'exige la Convention 69 de l'Organisation Internationale du Travail (OIT), ratifiée par le Brésil.

A peine six jours après l'émission du permis environnemental d'installation, début février, la multinationale minière a dévoilé sur son site internet, uniquement en anglais, le programme détaillé des activités, qui s'étendent sur 120 kilomètres le long du Rio Xingu. S'il se réalise, le projet aura un impact certain sur au moins quatre Terres Indigènes : la TI Paquiçamba, des Indiens Juruna, la TI Ituna/Itata, des Indiens isolés, la TI Arara da Volta Grande, des Indiens Arara, et la TI Trincheira Bacajá, des Indiens Xicrin. La législation prévoit que les autorisations sur cette partie soient octroyées au niveau fédéral, par l'Ibama, puisqu'elles concernent directement les terres indigènes.

Programme  de prospection de la Belo Sun Mining Corp, montrant les Terres Indigènes adjacentes. Monté par l'ISA.

Jusqu'à présent, les villages qui pourraient subir les impacts de ce projet s'il se réalise n'ont toujours pas été consultés. “Quand on regarde cette carte, on a l'impression qu'il n'y a pas d'indigènes ici. Pour Belo Sun, ils n'existent pas”, dénonce Mukuka Xicrin, président de l'Association Instituto Bepotire (Ibkrin).

La délivrance du permis environnemental d'installation a aussi choqué la Fondation nationale de l'Indien (FUNAI), qui exige le réexamen des études sur la composante indigène, car elle estime que le programme présenté par la Belo Sun est incomplet.

La Defensoria Pública de l'Union (DPU) et la Defensoria Pública du Pará ont elles aussi engagé deux recours pour annuler le permis. Le Ministère public fédéral (MPF) a envoyé au Ministère de l'environnement du Pará un avis défavorable à la mesure, deux autres recours ayant déjà été intentés par le MPF contre le projet.

Les activistes américains débordés forment des alliances inédites pour répondre à la politique migratoire de Trump

vendredi 21 avril 2017 à 23:17

Asha Noor, deuxième en partant de la droite, proteste à l'aéroport international e Detroit le 29 janvier 2016. “Nous devons encore aborder les thèmes quotidiens de la brutalité policière, l'emprisonnement de masse et la surveillance des personnes noires et musulmanes” raconte Noor. “Nous devons encore faire face à ces problèmes mais aussi lutter contre l'interdiction”. Photographie fournie par Asha Noor.

Cet article de Martina Guzmán a été publié à l'origine sur PRI.org le 15 février 2017 et est republié sur Global Voices dans le cadre d'un accord de partenariat.

Organiser la communauté n'est pas un travail pour les faibles.

Dans la ville américaine de Détroit, “les activistes s'y donnent à fond”, raconte Adonis Flores. “Avant même de prendre ma douche, ma boîte mail est presque pleine. Et à peine réveillé, mon téléphone commencent à sonner et je reçois des appels des membres de la communauté qui ont peur et ont de nombreuses questions sur les décrets présidentiels”.

Flores est un immigrant mexicain converti en activiste, qui a commencé à travailler en soutien à la loi DREAM (Acronyme de l'anglais Development, Relief and Education for Alien Minors Act (Développement, Assistance et Éducation des Mineurs Étrangers), visant à protéger des sans-papiers arrivés enfants aux USA ; et par la suite pour le programme DACA (Deferred Action for Childhood Arrivals , Moratoire pour les migrants arrivés enfants) en 2010.

Sa tâche la plus récente a été d'organiser une opposition au décret du Président Donald Trump, qui octroie des pouvoirs accrus à la police des frontières américaine aux agents du Service d'Immigration et des Contrôles des douanes, et qui prévoyait la suspension définitive de l'entrée des réfugiés syriens aux États-Unis et une interdiction pour de 90 jours d'entrée aux voyageurs provenant des sept pays à prédominance musulmane. Le gouvernement Trump pense remettre ces dispositions en place après leur suspension par une cour de justice.

Pendant ses matinées agitées, Flores court à des réunions de planification avec le personnel de Michigan United, l'organisation de défense des immigrants où il travaille. Dès que je passe la porte du bureau, la frénésie commence. Les téléphones n'arrêtent pas de sonner. Plein de gens viennent demander de l'aide pour leurs proches bloqués dans d'autres pays et pour obtenir des noms d'avocats de confiance susceptibles de les aider. Des bénévoles entrent et sortent. Flores a des conférences téléphoniques toute la journée, puis il court à des réunions dans toute la ville. C'est une vie de fou, dit-il.

“Il faut que je forme des volontaires, que j'appelle des gens pour qu'ils assistent à des sessions informatives, que je réponde à une multitude d'appels des médias ainsi qu'aux e-mails”, raconte Flores.

La tradition militante de Detroit remonte à loin. Les frères Victor, Roy et Walter Reuther ont commencé à s'organiser contre les sévères conditions de travail dans l'industrie automobile. Les frères Reuthers ont lutté pour la démocratie industrielle et créé le syndicat du travail UAW (United Automobile Workers, syndicat des travailleurs de l'industrie automobile) en 1935. Par la suite les leaders du syndicat ont uni leurs forces avec Martin Luther King, afin de lutter pour les droits civils des Afro-Américains. Plus récemment, le sens de l'organisation et l'implacable recherche de justice de Monica Lewis Patrick, Clarie McClinton, Debra Taylor et Nayyirah Shariff ont fait connaître au monde la crise de l'eau à Détroit et à Flint.

Detroit fait maintenant face à un défi différent. Quand Trump a signé le décret présidentiel pour la prohibition d'entrée des immigrés et des réfugiés, la métropole de Détroit, où vit la plus grande concentration d'Arabes-Américains, en a ressenti les effets immédiatement.

Flores se souvient de l'émotion qu'il a ressentie quand il a entendu la nouvelle : “Ma première pensée a été : “Qu'est-ce qu'on va faire? On n'a pas eu le temps de se préparer. Le préavis est si court”.

Néanmoins, les communautés ont unis leurs forces. Les organisateurs de la Marche des femmes ont obtenu les permis nécessaires pour organiser un meeting à l'Aéroport International de Detroit, et c'est ainsi que la nouvelle est arrivée aux oreilles des organisateurs et de leurs réseaux de contacts respectifs

“J'étais motivé”, raconte Flores. “Tout le monde s'est uni très rapidement. La communauté, le pays se sont uni: J'ai ressenti beaucoup d'espoir”.

L'interdiction d'entrée et les changements qui jour après jour engendrent des décisions juridiques basées sur les ordres présidentiels, ont créé un sentiment de camaraderie entre les activistes de Detroit. Ensemble ils s'organisent, partagent l'information de dernière minute et s'appuient sur les compétences linguistiques de chacun pour traduire les tracts en espagnol ou en arabe

“Il n'y avait pas dans le passé une très bonne collaboration entre les différentes communautés”, raconte Flores, qui a été emmené aux États-Unis sans papiers lorsqu'il avait neuf ans. Il en a maintenant 28. “Suite à l'élection de Trump, une attaque contre une communauté est ressentie par toutes les autres communautés”.

Fatou Seydi Sarr, un des collègues de l'organisation de Flores, est fondatrice du Bureau Africain pour l'Immigration et les Affaires sociales. Ils partagent une alliance unique entre immigrants mexicains et sénégalais, deux communautés qui ne se mélangent pas habituellement. La langue, les barrières culturelles, la religion et le racisme ont habituellement tendance à distancier les deux groupes, mais les époques atypiques appellent des partenariats non moins atypiques, spécialement s'ils luttent pour un même objectif.

Sarr est la leader de la communauté d'Africains occidentaux de Detroit et en tant qu'activiste elle affronte ses propres difficultés. Sa communauté était en marge de l'organisation de justice sociale pendant des années.

“Il est difficile de faire manifester des immigrés de Guinée, Sénégal ou Mali contre l'interdiction d'entrée des musulmans”, nous dit Sarr. “Les Africains occidentaux ne protestent pas par peur d'être arrêtés. C'est un risque pour eux car ils savent qu'ils seront une cible, à cause de la sur-criminalisation des Afro-Américains qui affecte les immigrants africains.

Sarr se dit souvent épuisée par les exigences du travail d'organisation.

La communauté des immigrants africains occidentaux communique la plupart du temps à travers de sms et d'appels téléphoniques, et certains d'entre eux ne parlent que le français. Le côté positif de la chose, selon elle, est de pouvoir se servir de l'importante opposition à l'interdiction pour entrer en contact avec les leaders des autres communautés, ce qu'il n'était pas possible de faire auparavant.

“J'ai pu convaincre les leaders africains de la communauté des Kenyans de se présenter à lla réunion avec le maire de Detroit, Mike Duggan, pour aborder le thème de l'interdiction d'entrée,  nous confie Sarr. “Et avec le soutien de Adonis Flores, nous avons pu assurer un événement de Know Your Rights (Connaissez vos droits) avec le président de l'association de Guinée”.

Sarr a émigré aux États-Unis après avoir connu un touriste de Détroit lorsqu'elle étudiait à Paris. Ils sont tombés amoureux, se sont mariés et ont emménagé dans la ville de Motown. Son travail d'activiste est relativement récent ; elle a d'abord rejoint la lutte des Afro-Américains après le meurtre de Trayvon Martin en 2012. “J'étais dans la rue lorsque Trayvon, Mike Brown et Ranisha McBride se sont fait tirer dessus.”, racone Sarr, qui avait 35 ans à ce moment là.

Detroit a subit de nombreuses crises extrêmes ces dernières décennies. La nomination d'un administrateur de crise, des coupures d'eau massives, les injustices environnementales et un système d'enseignement en déconfiture ont obligé les gens à manifester dans les rues, avec très peu de soutien des blancs lors de ces manifestations.

Mais c'est la présidence de Trump qui a augmenté la participation des personnes qui n'étaient pas politiquement actives auparavant. Des millions de personnes dans le pays ont manifesté avant et après la prise de pouvoir de Trump. Sarr raconte qu'elle a vu un changement notamment avec la façon dont les blancs de Detroit se sont engagés dans les causes importantes à ses yeux depuis des années, et ajoute: “Je ne leur en veux pas, mais je reconnais leur privilège. L'interdiction fait que les gens voient de manière générale le système d'une manière différente maintenant que leur mode de vie s'en voit affecté”.

Asha Muhamed Noor, organisatrice depuis un moment, travaille à l'opposé de là où vit Sarr. Son bureau est à Dearborn, dans la banlieue de Detroit, dans un quartier principalement yéménite parsemé de restaurants, boulangeries et même une mosquée.

Noor est une spécialiste du soutien à la campagne TAKE ON HATE (Attaquer la haine), dirigée par le Réseau National pour les Communautés Arabo-Américaines. Cette campagne est un opération de terrain qui s'oppose à la discrimination contre les Arabo-Américains, les musulmans et les réfugiés aux États-Unis.

A la différence de Flores et de Sarr, Noor organise depuis qu'elle a 16 ans, et en a maintenant 26.

“J'ai commencé à travailler pour les problèmes de la jeunesse somalienne. Ils sont visé depuis longtemps. J'organisais des manifestations au département d’État”, raconte Noor à propos de ses années passées à Washington DC. “Ma famille allait manifester chaque semaine. Ils marchaient pour les droits des Palestiniens, contre le bombardement de la Somalie, pour le DACA ou pour l'immigration. Nous sommes activement impliqués en politique.”

Noor mentionne que tout le monde [à Dearborn] connaît quelqu'un qui a été affecté par l'interdiction. “On réagit rapidement et on commence à travailler immédiatement. Nombre d'entre nous n'avons pas dormi pas pendant les premières 73 heures”.

Noor peut enfin respirer un peu maintenant que l'interdiction a été suspendue temporairement par des tribunaux fédéraux.

Ce qui surprend le plus Noor, ce n'est pas que Trump ait signé le décret présidentiel mais la rapidité avec laquelle il l'a fait. “Je me suis demandé comment ça a pu se produire si vite”, relate Noor. “Il n'a même pas attendu une semaine avant de viser les communautés opprimées. Ça m'a fait comprendre comment allaient être les quatre prochaines années pour les miens.”

“On doit encore aborder les thèmes quotidiens de la brutalité de la police, l'emprisonnement de masse et la surveillance des noirs et des musulmans”, dit Noor. “Nous devons encore faire face à ces problèmes avant de lutter contre l'interdiction”.

Pour le moment, des activistes comme Flores, Sarr et Noor se préparent pour les futurs décrets présidentiels, et aux quatre années avec Trump à la présidence. Pendant la semaine du 14 février, le Département de Sécurité Nationale a mené des descentes de police dans tous les États-Unis et a arrêté plus de 680 personnes. Même si ces actions sont similaires aux expulsions qui se sont produites au début de la présidence d'Obama, la position plus dure de Trump et le manque d'information augmente la crainte des immigrants.

Activistes et défenseurs tentent de comprendre les nouvelles règles pendant qu'ils affrontent des batailles qui couvaient depuis des années. Un mois après les débuts de l'administration de Donald Trump, ils sont déjà déterminés.

“Le choc est passé”, raconte Noor. “Nous nous préparons maintenant pour ce qui va suivre”.