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Assad accusé d'avoir bombardé à l'arme chimique Al Ghouta dans la banlieue de Damas

mercredi 21 août 2013 à 16:56

Des centaines de personnes, pour la plupart des enfants et des femmes, ont été tuées durant ce qui est selon des activistes de l'opposition syrienne un bombardement au gaz neurotoxique des forces de Bachar Al Assad, au matin du 21 août, dans la région de Al Ghouta, à l'est de Damas.  Des images terribles d'enfants morts ou à l'agonie ont surgi sur les médias sociaux, avec des messages demandant au monde de rompre le silence sur les atrocités commises contre les civils en Syrie.

Sur le blog Greater Syria, Enas, une Syrienne vivant à Aman en Jordanie, écrit :

 A environ 3 h du matin, les forces du régime ont tiré des roquettes à tête chimique sur les zones de Zamallaka et de Al Zainia à Ein Turma. Le district de Jobar a été touché par les gaz poussés par le vent. Un grand nombre de civils ont été exposés au gaz et des dizaines d'entre eux en ont été les martyrs. A cette heure, les premiers bilans provenant des hôpitaux de fortune d'Aarbeen, où les victimes ont été transportées, font état de 41 martyrs  (22 enfants, 11 femmes, 8 hommes), 5 autres martyrs ont été transportés à Douma, on compte 40 martyrs sur les vidéos faites à Saqba, et au moins  20 martyrs dans Ein Turma. La plupart des activistes disent que le bilan dépasse cent morts actuellement. Beaucoup de ces martyrs sont des enfants, que l'on voit suffoquer à mort sur les vidéos.

Le post de Enas donne des liens verse des photos et des vidéos [AVERTISSEMENT / images choquantes] de la tragédie en cours.

Enas ajoute :

Les symptômes des patients comprennent des nausées, des hallucinations, la suffocation, une toux violente, une tension élevée et des symptômes post décès. Mais toujours aucune information sur le type d'arme chimique/de gaz neurotoxique utilisé par les forces du régime contre des civils innocents.

Les familles fuient les zones touchées vers Saqba et plusieurs autres lieux proches, selon les témoins, ils sont totalement terrifiés. Les activistes parlent aussi du manque d'Atropine, qui est d'habitude utilisé pour traiter les civils durant les bombardements à l'arme chimique du régime ; il n'y a pas d'oxygène disponible. Les secouristes ne peuvent qu'utiliser du vinaigre sur la bouche et le nez et de l'eau pour laver le corps des victimes.

Le nombre des victimes a augmenté depuis ce premier message. Hala Droubi a communiqué ensuite un nouveau bilan :

— hala droubi (@haleloola) August 21, 2013

D'autres parlent de 635 victimes :

#BREAKING | MAINTENANT plus de 635 tués pendant l'attaque au gaz neurotoxique sur banlieues #Damascus principalement femmes/enfants. Le silence du monde tue la Syrie.

— TheNewSyria (@The_New_Syria) August 21, 2013
Mohannad partage une photo d'un hôpital de fortune à Daraya :

L’hôpital de campagne de Darava ne semble plus avoir assez de place pour traiter les blessés.  #CWMassacre pic.twitter.com/PMlUKAaAVb

— MohaNNad أبو مازن (@TheMoeDee) August 21, 2013

Il met au défi les médias de rompre le silence entourant les atrocités commises en Syrie :

Si les médias ne veulent pas en parler, alors, nous le ferons. Nous ne serons jamais silencieux.

— MohaNNad أبو مازن (@TheMoeDee) August 21, 2013
Enas partage sa douleur:

Je n'ai pas dormi, je suis assise et je regarde les vidéos et je pleure à gros sanglots. Je ne peux rien faire de loin. Pardonnez moi, mes familles..#CWMassacre #SYRIA

— Enas (@itsEnas) August 21, 2013

 

Elle ajoute que les attaques se sont poursuivies sur Erbin :

BREAKING:#Assad bombarde Arbin où victimes de CW ont été transportées, banlieues #Damass http://t.co/W1ahfEVMBM #CWMassacre #AnewMassacreinSyria

— Enas (@itsEnas) August 21, 2013

L'agence de presse syrienne officielle, sous le contrôle d'Assad, a déclaré que ces allégations étaient destinées à faire capoter une mission d'inspection de l'ONU, actuellement en cours . Cette semaine, une équipe d'inspection de l'ONU est arrivée en Syrie pour enquêter sur des accusations d'usage d'armes chimiques. Les deux côtés s'accusent mutuellement de telles attaques depuis le début du conflit, voici deux ans.

Pour les dernières informations, suivre le mot-clic  #CWMassacre sur Twitter.

Mises à jour : depuis la mise en ligne de ce post, le titre a été modifié. L'attribution d'informations à des “activistes” à été modifié en ” forces syriennes de l’opposition”.  Le dernier paragraphe ne figurait pas dans la version précédente.
 

Peut-on guérir le SIDA avec une plante du Malawi ? ‘Africa Check’ vous répond

mercredi 21 août 2013 à 12:41

Tous les liens renvoient vers des sites en anglais, sauf indication contraire.

Les Africains sont ils vraiment “tués comme des mouches” en Afrique du Sud ? Est-il vrai que 80 pour cent des Sud-africains consultent régulièrement un guérisseur traditionnel ? Combien y a-t-il d’États sur le continent africain ?

C'est entre autres à ces questions que tente de répondre le nouveau site internet Africa Check afin de faire le tri entre réalité et fiction et encourager une plus grande fiabilité des informations dans les débats publics sur le continent africain.

D'après le site internet, Africa Check est :

Une organisation à but non lucratif qui encourage la véracité des informations dans les débats publics. Nous vérifions les propos de personnalités publiques sur l'ensemble du continent, en commençant par l'Afrique du Sud, en utilisant des techniques journalistiques, des preuves obtenues grâce à des sites et outils en ligne, les commentaires de nos lecteurs, les sources publiques et es experts, dans le but de faire la différence entre réalité et fiction. Nous publions ce que nous trouvons sur ce site.

 

Le logo d'Africa Check. Source: africacheck.org

Le logo d'Africa Check. Source: africacheck.org

Le site invite ses lecteurs à tester le service en posant des questions. Il explique l'importance de la vérification des faits :

La vérification des faits n'est pas une activité abstraite. Cela affecte de vrai vies humaines.

En 2003, un groupe de dirigeants religieux et politiques dans le nord du Nigeria a conseillé a leur sympathisants de ne pas faire vacciner leurs enfants contre la polio sous prétexte que le vaccin les rendrait stériles.

La campagne de vaccination faisait partie d'un complot organisé par l'Occident afin de réduire la population du monde musulman, affirmaient-ils. Des tests sur les vaccins ont montré que ces affirmations n'étaient pas fondées, et ceux qui les avaient propagées sans les vérifier les retirèrent par la suite. Cependant, le mal était alors déjà fait.

La polio, qui était en recul dans le monde entier en 2002, connut un regain dramatique dans le nord du Nigeria et de là, se propagea dans beaucoup de pays de l'Afrique de l'ouest et dans le reste du monde. Presque une décennie plus tard, la maladie continue de rendre des gens infirmes en Afrique et ailleurs.

Les fausses informations touchent des vies.

 

Et la vérification des faits est ce qui les préoccupe. Dans un article de blog intitulé “Ma tribu se meurt” [afrikaans, afr], l'acteur, auteur et musicien sud-africain populaire Steve Hofmeyr affirme que les Sud-africains blancs tués par des Noirs pourraient remplir un terrain de football, que les Afrikaners blancs sont tués “comme des mouches” et qu'un fermier blanc est assassiné tous les cinq jours.

Africa Check a vérifié les données de Steve Hofmeyr et est arrivé à la conclusion qu'il avait tort :

Les affirmations sont pourtant fausses et grossièrement exagérées. En réalité, les Blancs ont moins de risque d'être assassinés que tous les autres groupes ethniques.

Le 2 juillet 2013, une version actualisée de l'article annonçait :

Le 1er juillet, Steve Hofmeyr a publié une réponse écrite à cet article, ainsi qu'à un article confirmant les résultats trouvés par Africa Check, dans le journal afrikaans Rapport.

Les nombreuses affirmations faites par Monsieur Hofmeyr et les “statistiques” qu'il a présentées sont insensées. Depuis sa publication, son article a du être actualisé plusieurs fois, on a notamment effacé les données qu'il disait être en lien avec l'Afrique du Sud mais qui correspondaient en réalité à d'autres continents (et qui étaient également mal interprétées).

L'argument le plus fort de Monsieur Hofmeyr peut se résumer à ceci : “Bien plus que les faits, ce sont les émotions et ressentis des gens qui comptent … Ainsi, que ‘les gens de notre peuple meurent comme des mouches’ reste applicable, d'un point de vue émotionnel, et n'a pas besoin d'être étayé par des faits.”

Africa Check est bien d'accord que les ressentis comptent. Comme indiqué dans notre rapport, l'Afrique du Sud connaît l'un des taux de criminalité les plus élevés du monde et tous les meurtriers doivent être abhorrés. Les données concernant les crimes, comme toutes les autres données, pourraient et devraient être améliorées. C'est un secteur dans lequel Africa Check s'investit. Cependant, ce n'est pas une raison pour lancer des faits inexacts comme le fait Monsieur Hofmeyr.

Un autre propos démontré faux par le site : Les Sud-africains sont ils réellement 80 pour cent à consulter régulièrement un guérisseur traditionnel comme de nombreuses sources médiatiques dont la BBC et le South African Medical Journal l'affirment toujours ?:

Un guérisseur sud-africain, appelé Sangoma en zulu. Photo reproduite avec l'autorisation de africacheck.org.

Un guérisseur sud-africain, appelé Sangoma en zoulu. Photo reproduite avec l'autorisation de africacheck.org.

Voici les faits :

D'après une enquête générale sur les ménages de 2011, tandis que 70,7 % des ménages sud-africains privilégient les cliniques et hôpitaux publics, presque un quart (24,3%) des ménages disent qu'ils préfèrent consulter un médecin privé. Les options les moins choisies sont les guérisseurs traditionnels (0,1%) et les pharmacies (0,3%).

Une analyse plus détaillée a montré que 81,3 % des ménages sud-africains noirs ont d'abord recours aux services médicaux du secteur public, 17,2 % ont d'abord recours aux services médicaux du secteur privé et seuls 1,5 % ont d'abord recours à « d'autres » services médicaux, ce qui inclut les guérisseurs spirituels et les guérisseurs traditionnels. Il est intéressant de voir que 1,5 % des ménages sud-africains blancs ont déclaré qu'ils avaient d'abord recours à « d'autres » services médicaux.

Ces statistiques réfutent l'affirmation selon laquelle 80 pour cent des sud-africains noirs iront d'abord chercher l'assistance d'un sangoma pour leurs soins médicaux. Contrairement à cette affirmation, les études montrent que la plupart des Sud-africains noirs iront d'abord chercher des soins dans les services de santé publics.

Le site internet a également enquêté sur un médicament mystérieux du Malawi appelé “Garani MW1″ découvert par une employée du ministère de la Santé malawien. Les journaux et sites internet ont fait la promotion du Garani-MW1 pour soigner le VIH et le sida. Il n'existe pourtant aucune preuve pouvant confirmer cette affirmation :

Une “plante miracle” mystérieuse qui n'a jamais fait l'objet de tests cliniques indépendants ou d'études sérieuses est promue sans aucun questionnement par de nombreux journaux et sites internet malawiens comme un moyen de soigner le VIH et le sida.

Appelée Garani-MW1 par la bureaucrate du ministère de la Santé malawien qui dit l'avoir découverte, la “plante du HIV et du sida” est décrite sur le site internet du produit comme « une préparation à base de plante utilisée pour soigner les malades atteints du virus du sida”.

Il n'existe aucune preuve que le Garani-MW1 soigne quoi que ce soit, sans parler du sida. La substance n'a fait l'objet d'aucun test clinique indépendant, aucune donnée n'a été publiée et aucun des succès ne semble avoir été confirmé de façon indépendante.

En conclusion :

Le fait est qu'il n'existe aucun médicament contre le virus du sida. Les antirétroviraux sont actuellement les seules médicaments fiables pour traiter le virus. Si un médicament venait un jour à être découvert, on peut être sûr que les géants pharmaceutiques internationaux, dans leur avidité à déposer une licence pour le médicament, se feront la guerre, et que cette histoire provoquera une hystérie médiatique dans le monde entier comme nous ne l'avons connue que rarement jusqu'à présent.

Comme nombre d'autres médicaments-miracles, l'histoire du Garani-MW1 s'appuie sur le désespoir des personnes atteintes du sida.

Le fait que des journaux supposés réputés au Malawi aient choisi de donner crédit à ces affirmations par des reportages à sensations et flagorneurs est particulièrement écœurant. C'est le type de reportage qui cause de réels dommages et coûte des vies. Cela devrait être condamné.

Par ailleurs, de combien de pays l'Afrique est-elle réellement composée ? 54, 55 ou 57 ?

“De combien de pays le continent est il composé dans son intégralité ?” nous demandait un groupe de personne recherche la fiabilité de l'information dans un message envoyé la semaine dernière.

L'émetteur, @Infosecafrica, indiquait que l'Union Africaine, l'organisation politique régionale africaine, était composée de 54 membres mais qu'il avait vu un rapport affirmant qu'il y avait 57 pays sur le continent.

De combien de pays est donc composée l'Afrique ? L'UA affirme représenter tous les pays africains. Sont-ils ainsi 54 ou 57 ? Nous nous sommes demandés dans quelle mesure il était difficile de répondre à cette question.

Le désaccord sur le nombre d’États n'est pas seulement un problème africain :

Bien que cela puisse paraître évident, ne pas être d'accord sur le nombre d’États qui composent un continent n'est pas un phénomène limité à l'Afrique.

En Asie, il existe un désaccord sur le fait que Taïwan, qui s'est séparé de la Chine en 1949, est une nation indépendante ou non. Inquiets de menaces d'attaques de Pékin si ils en venaient à déclarer leur indépendance formelle, cela n'a pas été fait.

Pourtant, depuis sa capitale Taipei, Taïwan possède son propre gouvernement élu démocratiquement et sa propre monnaie et est dirigé indépendamment de la Chine ; un pays en tout point donc, à part son nom.

Et en Europe, alors que la plupart des gouvernements reconnaissent le Kosovo comme état indépendant, la Serbie, son voisin, ne le fait pas. Ainsi, il existe en Europe aussi une incertitude quant au nombre de pays qui la compose.

La réponse est :

La meilleure réponse à la question de @Infosecafrica à laquelle nous sommes arrivés est de dire qu'il y a 55 états internationalement reconnus et membres soit de l'Union Africaine, soit des Nations Unies, ou des deux. 53 d'entre eux figurent sur les listes de l'UA et des Nations Unies. Le Maroc ne fait pas partie de l'UA mais est membre de l'ONU. La république arabe sahraouie démocratique fait partie de l'UA.

De plus, tandis que plusieurs territoires affirment leur indépendance, il existe aussi un état de facto, correspondant aux définitions normales d'un pays, le Somaliland. Cependant, il ne s'agit pas d'un état reconnu.

Les partenaires principaux d'Africa Check sont la Fondation AFP et le département de journalisme de l'université de Witwatersrand. Le fianncement est apporté  par l'Open Society Foundation for South Africa et par l'African News Innovation Challenge.

Vous pouvez suivre ce projet sur Twitter et Facebook.

En Indonésie, une réforme prévoit plus de religion et moins de sciences à l'école primaire

mardi 20 août 2013 à 16:36

[Tous les liens renvoient vers des pages en anglais]

L’Indonésie a récemment introduit une réforme des programmes scolaires dans plus de 6000 écoles, ce qui a instantanément suscité des réactions négatives en raison du manque de préparation et de la disparition des sciences, de l’anglais et des technologies de l’information en tant que disciplines distinctes.

Au niveau de l’enseignement primaire, les 11 disciplines n’en forment plus que 6, et l’on est passé de 26 à 30 heures de cours par semaine. L’enseignement de la langue anglaise et celui des sciences ont fusionné, avec une priorité donnée aux sujets tels que le Bahasa Indonesia [langue nationale], le “nationalisme” et les sciences religieuses. Deux heures supplémentaires ont été allouées aux sciences religieuses. Pour leurs activités extrascolaires, les élèves en deuxième cycle de secondaire doivent s’inscrire à l’organisation scoute nationale.

Primary school students in Indonesia. Photo from Flickr page of Abdul Rahman (CC License)

Elèves de primaire en Indonésie. Photo provenant de la page Flickr d'Abdul Rahman (Licence CC)

L’accent mis sur l’éducation civique et religieuse est censé développer le « sens de la moralité et de la responsabilité sociale » chez les jeunes. Plus particulièrement, les réformes ont été pensées de sorte à rendre les élèves « tolérants et calmes » en réponse au problème grandissant de la violence à l’école.

De nouvelles méthodes d’enseignement ont également été introduites, en plus de la promotion d’un programme qui adopte l’approche « thématique intégrée ».

Mirzatus Solikhah résume ainsi le contenu du programme de la réforme des contenus scolaires :

Le nouveau programme respecte trois composantes principales de l’éducation : les savoirs, les savoir-faire et le savoir-être. Le savoir découle des cours en général. Le savoir-faire s’acquiert dans la pratique, avec l’éducation physique par exemple, et le savoir-être est reflété par la mise en place d’heures supplémentaires dédiées à la religion.

Les professeurs d’anglais et d’information et technologie (IT) pourraient être les premiers à faire les frais de ces réformes.

Les professeurs d’anglais et d'IT pourraient perdre leur emploi.

Pour que les réformes fonctionnent, le gouvernement doit résoudre les problèmes suivants :

Il y a au moins trois choses importantes à régler : les manuels scolaires, la formation des enseignants, et la gouvernance en matière d’éducation.

Mais les enseignants se sont plaints de n’avoir eu que cinq jours de formation. Des pénuries de manuels scolaires ont été signalées dans plusieurs provinces. Jennifer a entendu parler de ce problème dans un journal local :

Le journal local vient aujourd’hui de publier un article selon lequel la plupart des élèves concernés n’ont même pas encore reçu leurs manuels. La réponse du ministère à cette situation a été la suivante : utilisez votre imagination, cherchez des documents sur Internet et faites-en des photocopies !

M. Faruq Ubaidillah se réjouit du fait que ces réformes vont donner aux élèves plus de temps pour se concentrer sur un nombre de disciplines plus restreint :

[...] cette décision permettra aux élèves de gérer leur temps plus d’efficacement et plus intelligemment pendant le processus d’enseignement et d’apprentissage en classe. Ils n’ont plus besoin de se concentrer sur autant de matières, ce qui ne faisait que les perturber. N’est-il pas mieux d’avoir moins de matières, mais un contenu plus ciblé, plutôt que l’inverse ? De plus, l’anglais peut être appris en dehors de l’école.

Mais Harry Wardana désapprouve la disparition des sciences et de l’anglais en tant que disciplines distinctes :

Si vous vous tournez vers les nations les plus modernes, vous verrez que l’intérêt qu’elles portent aux sciences est démesuré. Là-bas, on pense que le développement de la science va redéfinir les rêves d’une nation. Et malheureusement notre gouvernement ne parle pas la même langue, au propre comme au figuré.

Quel paysage mental désolant.

Thalia pense également que les matières qui ont été abandonnées sont des composantes essentielles d’une éducation de base :

Le programme 2013 donne une plus grande priorité au savoir-être qu’aux savoirs et aux savoir-faire.

Je me demande si le gouvernement n’a pas oublié que, pour assurer un avenir brillant, le comportement va de pair avec les connaissances. En outre, ces disciplines sont très importantes pour le développement des enfants.

Agita Sesara se demande si le gouvernement et les écoles sont prêts à introduire les différentes réformes du nouveau programme :

[...] le changement va être profond. Il ne s’agit pas seulement de supprimer des matières, mais aussi de modifier totalement les méthodes d’enseignement fondamentales des enseignants actuels. Est-ce que les enseignants vont réussir à intégrer ces changements ?

Est-ce que toutes les ressources et le personnel impliqués dans l’éducation sont prêts à s’adapter ? Si la réponse est « non », ces changements n’auront servi à rien.

International Education 2012 mentionne l’accusation lancée par certains groupes selon laquelle les réformes n’ont été introduites que pour justifier la plus grande place accordée aux sujets religieux dans le programme :

[...] les critiques de la proposition ne pensent pas qu’une refonte du programme est la solution. Certains professeurs s’inquiètent que le gouvernement et les représentants religieux ne simplifient le problème à l’extrême et utilisent des termes tels que « la formation du caractère » et la « moralité » pour justifier davantage d’éducation religieuse.

Peut-être est-ce pour apaiser ces critiques que le gouvernement a promis de faire un « Sondage sur le programme » le mois prochain afin d’évaluer l’impact des réformes. Il a également alloué plus de fonds à la formation des enseignants en préparation à l’introduction des réformes à l’échelle nationale l’année prochaine.

Bhoutan : la transition démocratique en podcasts

mardi 20 août 2013 à 15:29

Le Centre pour les médias et la démocratie du Bhoutan est l'un des projets finalistes du programme de micro-bourses de Rising Voices de cette année et il a récemment conclu la première étape  : des ateliers de formation au podcasting. Ce billet a été écrit par l'organisateur du projet, Mansoor Fassihi.

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Il n'est jamais facile de grandir – surtout pour une jeune démocratie. Depuis cinq années dans une transition démocratique, le Bhoutan a commencé à ressentir les douleurs de la croissance, qui viennent avec les élections, la politique des partis, et la réorientation psychologique des électeurs nécessaire pour devenir des citoyens (en plus d'être les sujets d'un monarque bienveillant).

Au Centre pour les médias et la démocratie du Bhoutan (BCMD), nous reconnaissons l'importance de documenter et de raconter les nombreuses histoires de cette transition. Ces documents nous aident à comprendre qui nous sommes, où nous allons, et ce qui doit être fait pour apporter les changements que nous voulons.

A l'approche de la seconde phase des élections démocratiques au Bhoutan, nous avons une excellente occasion de nous pencher sur la santé de notre démocratie. Où en est Bhoutan depuis la signature de la Constitution en juillet 2008 ? Quelles sont les questions brûlantes qui se font jour et qui nécessitent notre action ?

Depuis avril 2013, nous avons formé et permis aux jeunes de raconter leurs expériences à travers des podcasts. Ces jeunes, membres de nos clubs média des collèges, utilisent leur initiation au journalisme pour enquêter et révéler des aspects de la vie de leurs communautés. Nous avons soutenu la création et le renforcement des Clubs de médias – associations d'étudiants en journalisme - dans les écoles à travers le Bhoutan comme une plateforme où les étudiants peuvent s'exprimer, étudier les conditions de vie de leurs communautés et prendre des mesures pour les améliorer. Ce projet prévoie des formations dispensées aux Clubs de médias dans quatre collèges de Bhoutan : Paro College of Education, Samtse College of Education, l'Institut d'études des langues et culture et le Collège Sherubtse.

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Tout ce travail est une terre inconnue pour BCMD. Dans le passé, nous avons organisé des formations à la production de documentaires, lau journalisme citoyen, à la photographie et la narration numérique – mais jamais du podcasting. La raison pour laquelle nous avons choisi le podcasting est due au paysage médiatique au Bhoutan, où presque la moitié de la population est analphabète et n'a pas accès ni à internet ni à la télévision. Enregistrer des récits permet d'atteindre le plus grand nombre de personnes et de développer une culture de la démocratie au Bhoutan. (L'un des fondements de toute société démocratique, après tout, est l'accès à l'information !)

Dans cet esprit, nos modules de formation ont évolué pour répondre aux besoins d'apprentissage de nos Clubs médias. Nous avons trouvé, d'une part, que les scripts nécessitent plus d'investissements que prévu. Pour amener les élèves à organiser leur contenu en un récit intéressant, les étudiants doivent d'abord apprendre à cadrer les questions avec un angle positif, et ne pas simplement se plaindre ou critiquer, et d'autre part que le traitement du son, du niveau du volume à l'enregistrement des voix off, n'est pas aussi intuitif que nous le pensions.

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Le temps n'a pas non plus été de notre côté. Compte tenu des contraintes horaires et de programmes que les collèges  imposent aux élèves, nous n'avons eu que quelques jours au total pour former chacun des quatre clubs aux fondamentaux du journalisme radio, aux  méthodologies d'interview et aux techniques d'écriture sonore pour l'édition audio.

Néanmoins, nous progressons par la volonté de nos étudiants. Grâce aux cinq ateliers que nous avons organisés avec plus de 90 élèves, nous avons obtenu des reportages sur des questions difficiles, comme sur les difficultés que les étudiants des régions éloignées rencontrent pour l'accès aux possibilités de vote, les cas de corruption et l'inégalité entre les sexes.

Notre atelier le plus récent a commencé le 16 juillet, seulement trois jours après la conclusion des deuxièmes élections jamais organisées au Bhoutan, avec une victoire-choc de 32 sièges pour le Parti démocratique du peuple contre 15 pour l'ancien parti au pouvoir, le Druk Phuensum Tshogpa (qui bénéficiait d'une super-majorité de 45 sièges contre 2). La campagne électorale qui a duré un mois avait créé une tension à travers le pays sur les questions d'équité et de transparence des élections.

Dans le sillage de ces événements, nos étudiants ont choisi d'explorer quatre thèmes : répondre aux attentes des gens du nouveau gouvernement, les droits de vote des moines, le rôle des femmes dans la politique et l'impact des médias sociaux sur les élections. Qu'ont-ils découvert ?

Écoutez :

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(La suite du récit de notre atelier le plus récent peut être trouvé sur Le site web du Centre des médias du Bhoutan Lab)

Reconnaissant le potentiel de la forme audio, les élèves ont travaillé jusqu'à des heures tardives pour obtenir des interviews difficiles avec des dirigeants locaux, des concitoyens, et même des moines ! Ce sont des étudiants qui sont prêts à découvrir la vérité, à trouver le courage de poser des questions difficiles, à être justes et non présomptueux pour apporter un changement social. Ils sont, en bref, prêts à assumer les responsabilités de la citoyenneté active.

Beaucoup de travail reste à faire. Maintenant que nous avons formé les principaux membres de ces Clubs médias, nous avons besoin d'eux pour produire des documentaires. En utilisant les fonds de la bourse Rising Voices, nous avons acheté et équipé les clubs avec un kit d'enregistrement audio, sous la condition qu'ils produisent au moins un documentaire par mois. Nous continuerons à fournir une aide aux membres des clubs, à leur donner des informations sur les réactions générées par leurs documentaires et à les aider dans l'élaboration des scripts. En outre, nous étudions la possibilité d'adapter ces documentaires pour les diffuser en utilisant la technologie de réponse vocale interactive pour téléphones mobiles.

 

Vous pouvez suivre les travaux de BCMD sur Facebook et écouter les podcasts réalisés au cours des ateliers sur leur site web.

Au Brésil, critiquer la police militaire vaut menaces de mort

mardi 20 août 2013 à 15:10

[Les liens conduisent à des pages en portugais, sauf indication contraire]

 

Un commentaire du dessinateur brésilien Carlos Latuff [français], sur sa page Facebook, à propos du meurtre d'un couple de policiers et des soupçons qui pèsent sur leur fils, âgé de 13 ans, a donné lieu à diverses réactions sur les réseaux sociaux, y compris à des menaces de mort.

Connu pour son talent à “défendre les causes humanitaires à travers ses dessins aux traits simples et à l'humour acide”, Carlos Latuff a écrit  ce message sur sa page Facebook, le 6 août :

Garoto mata seu pai, que era policial da ROTA…esse menino precisa de duas coisas: atendimento psicológico e uma medalha.

Un gamin tue son père, qui était policier aux ROTA. Ce gamin mérite deux choses : un suivi psychologique et une médaille.

Il faisaiit ainsi allusion au principal suspect du meurtre de quatre adultes de la même famille, dans le quartier de Vila Brasilândia à São Paulo. Ce gamin de 12 ans (NdT: comme cela a été précisé par la suite) se serait suicidé après le crime, le 5 août dernier. Le Département des homicides et de la protection aux personnes de la Police civile de São Paulo est en train d'enquêter sur les circonstances troubles qui entourent cette affaire. Le père de l'enfant était sergent aux ROTA (Rondes Ostensives Tobias de Aguiar), le bataillon d'élite de la Police Militaire (PM) de São Paulo, connu pour des d'assassinats opérés sans aucun discernementet la mère était caporal de la PM. La grand-mère et la tante maternelle de l'enfant ont aussi été retrouvées mortes dans les alentours immédiats de la maison familiale.

En plein débat sur le désarmement des policiers militaires au Brésil (NdT: beaucoup d'armes ont été retrouvées dans la maison), et à la suite des manifestations massives qui ont pris possession du Brésil au mois de juin dernier, les dessins de Latuff critiquant l'action de la police sont fréquents.

Suite à un billet posté sur Facebook le 7 août, il a commenté les menaces reçues avec son naturel habituel:

Ao longo dos meus 23 anos de profissão como cartunista já fui detido três vezes por desenhar contra a truculência da polícia brasileira, e já recebi inúmeras ameaças, seja de judeus sionistas por conta de minhas charges em favor dos palestinos, seja de extremistas muçulmanos pelas minhas charges sobre a questão egípcia e síria. Portanto, ameaças fazem parte do meu trabalho.

Tout au long de mes 23 ans de métier en tant que dessinateur, j'ai déjà été incarcéré trois fois pour avoir dessiné contre la truculence de la police brésilienne, et j'ai déjà reçu de nombreuses menaces, que ce soit de la part de juifs sionistes en raison de mes dessins en faveur des palestiniens,  d'extrémistes musulmans pour mes dessins sur la question syrienne et égyptienne. Les menaces font donc partie de mon travail.

Mais des policiers militaires et leurs admirateurs en sont venus à menacer de mort le dessinateur sur les réseaux sociaux et lui-même pense qu'il est désormais en danger.

Print de um dos perfis de policial militar que ameaçou Latuff no Facebook.

Copie d'écran d'un compte de policier militaire qui a menacé Latuff sur Facebook. (souligné en rouge ” si je le croise, je le bute, la place de ces branleurs c'est dans la tombe…)

Tirée d'une série de commentaires menaçants à l'encontre de Latuff,  Revista Fórum a sélectionné un témoignage du dessinateur dans lequel celui-ci affirme que la fameuse phrase était une “provocation” :

Esse tema é tabu. Não podemos tratar da violência policial no Brasil. Vivemos em um Estado policial, e nesse Estado você não pode ser crítico, senão é ameaçado.

Ce thème-là est tabou. On ne peut pas traiter de la violence policière au Brésil. Nous vivons dans un Etat policier, et dans cet Etat on ne peut pas être critique, sinon on est menacé.

A arte engajada de Latuff denunciando os crimes da Polícia Militar/ROTA. Cartum de Carlos Latuff, uso livre

L'art engagé de Latuff dénonçant les crimes de la Políce Militaire/ROTA. “Pour services rendus” Dessein de Carlos Latuff, utilisation libre

Sur sa page Facebook, le 6 août, il dit ne pas se sentir intimidé et il réaffirme :

Quem conhece meu trabalho sobre a violência policial, sabe bem o que penso sobre a atuação das polícias no Brasil e lá fora. Sou coerente com o que acredito.

Qui connait mon travail sur la violence policière sait bien ce que je pense des agissements des polices, au Brésil comme à l'étranger. Je suis cohérent avec ce en quoi je crois.

Malgré ça, le jour suivant, le dessinateur s'est tout de même inquiété du risque réel encouru, rendant responsable l'Etat brésilien de quoiqu'il puisse lui arriver :

Dessa vez, com as redes sociais, estas ameaças são potencializadas, graças a comunidades relacionadas a organizações policiais, que reúnem não só membros ativos das forças de repressão, como também simpatizantes com perfil fascista, anti-comunista, anti-petista, machista e homofóbico. É sabido que dois desses perfis, Fardados e Armados e Rondas ostensivas tobias de aguiar “Rota” estão incitando seus membros a tomarem ações violentas contra mim. E é bem possível que isso aconteça, afinal de contas, a polícia mata! Não seria eu o primeiro, e muito menos o último. Essa é a característica de nossas polícias, de nosso estado. E se acontecer, que sejam responsabilizados os administradores destas comunidades e o estado brasileiro.

Cette fois, avec les réseaux sociaux, ces menaces sont décuplées, grâce aux communautés en relation avec les organisations policières, qui réunissent non seulement des membres actifs des forces de répression, mais aussi des sympathisants qui ont (sur Facebook) des profils fascistes, anti-communistes, anti-pétistes (NdT: du PT, parti des Travailleurs, le parti de Lula et Dilma Rousseff, au pouvoir actuellement), machistes et homophobes. Il est de notoriété publique que deux de ces comptes, En uniforme et armés et Rondes ostensives tobias de aguiar “Rota” sont en train d'inciter leurs membres à envisager des actions violentes contre moi. Il est bien possible que cela arrive, en fin de compte, la police tue ! Je ne serais pas le premier, et encore moins le dernier. Voilà la caractéristique de nos polices, de notre état. Et si cela arrive, qu'en soit rendu responsables les administrateurs de ces communautés de l'état brésilien.

Campanha pelo fim da Polícia Militar pegando carona nas ameaças feitas ao cartunista Carlos Latuff. Arte sobre cartum de Latuff, uso livre.

Une “Campagne pour la fin de la Políce Militaire”  née de l'écho médiatique des menaces faites au dessinateur Carlos Latuff.  En rouge : “La campagne “Réagissez” soutient Carlos Latuff directement de Bahia,qui saigne sous la violence d'une police qui tue.” En jaune : “Pour la fin de la police militaire. Tout de suite”.  L'art en image de Latuff, utilisation libre.

Diverses organisations ont fait preuve de solidarité, comme le MTST (Mouvement des Travailleurs Sans Toit), les Mères de Mai et le PSTU (Parti Socialiste des Travailleurs Unifié), qui a aussi reproduit une série de menaces adressées au dessinateur sur les réseaux sociaux. Des messages de soutien venant de personnalités ou d'organisations sociales et politiques, y compris [en] de l'étranger [sb], “ont rempli la boite aux lettres” de l'auteur.

Le Diário Liberdade a republié la lettre diffusée par Carlos Latuff et a manifesté son soutien au dessinateur. Le collectif de communication Catarse (Catarsis) a déclaré que Latuff était “un artiste et une personne incontournable dans la défense des droits de l'homme au Brésil, ainsi que dans tant d'autres pays que son travail atteint et influence”.