PROJET AUTOBLOG


Global Voices (fr)

Archivé

source: Global Voices (fr)

⇐ retour index

Le prix Nobel de la Paix 2015 au Dialogue National Tunisien : les réactions dans le monde arabe

samedi 10 octobre 2015 à 22:49
The Tunisian National Dialogue Quartet won this year's Nobel Peace Prize "for its decisive contribution to the building of a pluralistic democracy in Tunisia in the wake of the Jasmine Revolution of 2011."

Le Dialogue National Tunisien a obtenu le prix Nobel de cette année “pour sa contribution décisive à la construction d'une démocratie pluraliste dans le sillage de la Révolution du Jasmin de 2011.” Site web officiel du Prix Nobel.

Les Tunisiens sont sur un nuage : leur avancée démocratique vient d'être reconnue par l'attribution hier au quartet du Dialogue National du Prix Nobel de la Paix. Le quartet, composé d'organisations de la société civile, a joué un rôle central de médiation entre les différentes factions de la société tunisienne pendant sa transition vers une démocratie à part entière, après le renversement du dictateur Zine-alabidine Ben Ali, lors de la révolution tunisienne.

Tounsiahourra (Tunisienne libre) exprime le sentiment de fierté et de joie en écrivant pour ses 110.000 abonnés sur Twitter :

Ma mère, qui n'a pas poussé de youyous depuis dix ans, l'a fait aujourd'hui pour le Prix Nobel de la Paix, comme une dame à qui manquait une personne disparue soudain revenue. Un sentiment de justice que je comprends totalement

Dans un autre tweet, elle ajoute :

C'est le plus beau jour de ma vie

Selon le comité du Prix Nobel :

Le Quartet a été formé pendant l'été 2013, quand le processus de démocratisation était en danger de s'effondrer sous l'effet d'assassinats politiques et d'agitation sociale générale. Il a établi un processus politique alternatif et pacifique à un moment où le pays était au bord de la guerre civile. Il a ainsi joué un rôle clé pour permettre à la Tunisie d'instaurer, en l'espace d'un petit nombre d'années, un système constitutionnel de gouvernement garantissant les droits fondamentaux à la population toute entière, sans distinction de genre, d'opinion politique ou de foi religieuse.

Le Quartet est composé de l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), l'Union Tunisienne de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat (UTICA), la Ligue Tunisienne pour la Défense des Droits de l'Homme (LDTH), et de l'Ordre National des Avocats de Tunisie.

Le comité poursuit :

le Quartet a exercé son rôle de médiateur et de force d'entraînement pour faire avancer avec une grande autorité morale le développement démocratique pacifique en Tunisie.

Le Nobel arrive au bon moment pour la Tunisie, secouée récemment par un attentat au Musée du Bardo dans la capitale Tunis en mars, qui a fait 22 morts, suivi d'un autre attentat sanglant sur une plage à Sousse, en juin, qui a tué 38 touristes.

La Tunisie a été le premier pays arabe à inaugurer, en décembre 2010, des manifestations massives pour la démocratie, ce qui a créé un effet domino de soulèvements populaires dans le monde arabe et la chute de régimes dictatoriaux. C'est aussi la révolution qui a réussi dans la région, en aboutissant à une élection présidentielle démocratique qui a porté à la présidence l'an dernier le vétéran politique de 88 ans Beji Caid Essebsi de Nida Tounes.

La récompense a été largement célébrée à travers le monde. Le hashtag en arabe #تونس_تفوز_بنوبل_للسلام (“La Tunisie obtient le Prix Nobel de la Paix”) a grimpé en tête de tendance en un rien de temps aux Emirats Arabes Unis, où beaucoup ont rejoint le choeur de louanges pour la consécration de la Tunisie :

2.018.597 personnes auraient vu “La Tunisie obtient le Prix Nobel de la Paix” depuis sa 1ère mention jusqu'à ce qu'il devienne Trending Topic

L'Egyptienne Nervana Mahmood tweete à ses 46.900 abonnés sur Twitter :

Félicitations à la Tunisie. Contente que le titre soit “contribuer” à la démocratie et non la “réaliser” !

Tandis que l'homme politique égyptien Mohamed ElBaradei écrit pour ses 3,7 millions d'abonnés :

Très heureux pour les Tunisiens. Dialogue, inclusion, démocratie et respect des droits humains sont la seule voie

Depuis l'Arabie Saoudite, Abu Mathkour note :

On n'a pas interféré en Tunisie, alors il y a eu réconciliation et paix. Félicitations la Tunisie !

Mais pour d'aucuns, la récompense est un geste vide de sens, quel qu'en soit le bénéficiaire.

Dima S., qui se dit observatrice du Moyen-Orient, a exprimé son scepticisme pour le prix, avant même l'annonce des résultats :

Dans une heure, annonce du Prix Nobel de la Paix. Celui que les bombardiers d'hôpitaux, les criminels de guerre et enthousiastes de guerre civile religieuse peuvent aussi recevoir

Mabrouk (félicitations) à la Tunisie et à tous les Tunisiens qui ont cru à la paix !

Amérique latine : attention, des livres pour enfants sans princesses et sans idées reçues

samedi 10 octobre 2015 à 17:42

Princesses contre Femmes extraordinaires. Histoires inspirées par Frida Kahlo et Violeta Parra.

La maison d'édition argentine Sudestada a lancé une collection de livres pour enfants intitulée “Anti-princesses” qui mettra en avant en tant que leurs personnages principaux la peintre mexicaine Frida Kahlo et la compositrice chilienne Violeta Parra.

Les héroïnes des ces histoires ne vivent pas dans des châteaux ni attendent que leur prince charmant viennent les sauver. La seule chose qu'elles ont en commun est qu'elles sont des latino-américaines qui ont échappé aux clichés de leur époque.

Nadia Fink, l'auteur de ces ouvrages illustrés, affirme que ces personnages tirés de l'histoire de l'Amérique Latine lui ont offert un parfait contraste avec les contes de princesses européennes:

“Las Antiprincesas seguirán siendo latinoamericanas porque decidimos contar la historia de Nuestra América, en un continente que nos late y nos identifica. Un poco es contraponerlos a los relatos de las princesas en un entorno continental de Europa, alejado de nuestra cultura y nuestro paisaje”.

“Anti-princesses” continuera d'être avec des latino-américaines parce que nous avons décidé de raconter l'histoire de notre Amérique, dans un continent qui nous allaite et nous donne notre identité. C'est un peu pour les mettre en contraste avec les princesse de contes en Europe, qui sont éloignées de notre culture et de notre paysage.

Réactions au Prix Nobel de la Paix : “Un besoin de Tunisie”

samedi 10 octobre 2015 à 16:55


Guy Sitbon est journaliste franco-italo-tunisien, vétéran de l'actualité du Maghreb et du Moyen Orient, depuis
Le Monde jusqu'au Nouvel Observateur et Marianne. Il a accueilli par cet article sur le site tunisien Leaders le Prix Nobel de la Paix décerné au Quartet du dialogue national tunisien. Nous le reproduisons avec son accord comme l'une des réactions francophones à ce Nobel de la paix.

Guy Sitbon

Guy Sitbon

“Paris, onze heures cinq, la clochette du téléphone signale l’arrivée d’un sms. Je verrai tout à l’heure. Deux minutes plus tard, deuxième sms, troisième, quatrième. Mais qu’est ce qui se passe ? Inquiet, je tire mon téléphone de la poche de ma veste et je lis. Ma copine Laura de Rome : « Evviva la Tunisia. » Mon petit-fils de son bureau : « Tu l’aurais imaginé toi ? La grande classe. »Nicole de Madrid : « Bravo Radès » (elle a passé sa jeunesse à Radès) John, de San Francisco : « Congratulations, you really deserve it. » Boris, de Moscou : « Molodets, Slava Tunis (Bravo, vive la Tunisie). » Ma voisine Annie : « Tu vas encore nous embêter avec ta Tunisie. »Je descends, mes voisins Ahmed, le marchand de kebab et Samuel, vendeur de chaussures, tous deux ‘Tunes’ (Ndt : tunisiens), trinquent au bar d’en face. Un coup d’œil sur Google news, tout s’éclaire : Je viens de recevoir le prix Nobel. Ou presque moi. Tous les Tunes ont été nobélisés. J’imagine la nouba à Belleville, à Barbès et dans les restaurants du 17e.

Moi, ça ne m’étonne pas. Si pas la Tunisie, qui ? Obama ? Poutine ? Assad ? Le Pen ?

La guerre d’aujourd’hui c’est sous nos cieux qu’elle égorge, nulle part ailleurs. Dans ce foutu « monde arabo-islamique » précipité dans une chakchouka sanguinaire.

À la jointure du bien-être et de la malédiction, une pastille à peine visible sur les planisphères, la nôtre. Ni la plus gracieuse ni la plus ingénieuse, peut-être la plus sympa. Ni pétrole, ni armes, tout juste l’envie de vivre cette vie en sourire plutôt qu’en chagrin. En amour, pas en venin. En haine de la haine.

Dans les parages du Pôle Nord, une poignée de vieillards blondinets s’adonne à une seule tâche : tenir à l’œil les poings et les canons de la planète. Qui se tient mal, qui se tient bien. Qui croit au droit, qui croit au tordu. Qui tue et qui soigne. Rien ni personne n’échappe à l’oculaire de leurs microscopes. Un année entière, ils ont trifouillé l’espèce humaine pour finalement dénicher qui ? Vous, nous, moi. Je savais que j’avais besoin de la Tunisie. Mais voilà que d’Oslo m’est parvenue une révélation : le monde a besoin de la Tunisie.

Le Quartet a bien mérité de la patrie. Oslo aurait pu céder à l’usage en couronnant Béji Caïd Essebsi et Rached Ghanouchi pour avoir conjuré la calamité annoncée en mariant l’eau et le feu. Mais à Oslo, on a gardé un souvenir cruel de ces distinctions remises à des héros comme Kissinger et Le Duc Tho (1973), Arafat, Rabin et Pérès (1993).Ils ont même éliminé Merkel. Le Comité Nobel aurait pu aussi élire le peuple tunisien dans son entier. Beaucoup, à Damas ou à Sousse n’en sont pas dignes. Au delà du Quartet, c’est à l’histoire entière de la Tunisie que revient l’honneur. Histoire perpétuellement entre les mains de chacun.

Ce matin, Moncef explique à sa femme de ménage ce qu’est le prix Nobel. A l’issue du long discours de son patron, Salha demande : Qu’est-ce que ça va changer pour moi ? En une réplique, elle a tout dit Salha.

Désormais, chaque mot, chaque geste devra être précédé d’une question : ce que je vais faire, ce que je vais dire est-il à la hauteur d’un prix Nobel de la Paix. Vous avez bien entendu, la Paix.”

Nobel

 

 

L'auteure et journaliste biélorusse Svetlana Alexievich, Prix Nobel de Littérature 2015

samedi 10 octobre 2015 à 14:46
Svetlana Alexievich, lauréate du Prix Nobel de Littérature 2015. Image de Wikimedia Commons.

Svetlana Alexievitch, lauréate du Prix Nobel de Littérature 2015. Image de Wikimedia Commons.

Le Prix Nobel de Littérature 2015 a été décerné à l'auteur biélorusse Svetlana Alexievitch. L'Académie suédoise, à qui revient la remise de ce prix prestigieux, a félicité Alexievitch “pour ses écrits polyphoniques, un monument à la souffrance et au courage de notre époque”.

DERNIERE MINUTE Le Prix Nobel de Littérature 2015 est décerné l'auteure biélorusse Svetlana Alexievitch

Auteure biélorusse écrivant en russe et journaliste d'investigation, Alexievitch a été félicitée pour ses reportages documentaires, basés sur un grand nombre d'entretiens approfondis, qui décrivent la vie et la guerre en Union Soviétique et dans la période post-soviétique. Elle est la 14e femme à remporter l'un des 111 Prix Nobel de Littérature décernés jusqu'à aujourd'hui, et le premier auteur de langue russe à recevoir cet honneur depuis 1987, lorsque le poète Joseph Brodsky a reçu le prix.

Sara Danius, secrétaire permanente de l'Académie suédoise, a déclaré aux journalistes lors de l'annonce du Prix à Stockholm le 8 octobre qu'Alexievitch “nous a offert un nouveau matériau historique et un nouveau genre.” Le Wall Street Journal a également souligné le travail plus récent de l'écrivaine, la décrivant comme “une critique affirmée du dirigeant de son pays et une voix majeure contre l'implication de la Russie en Ukraine.”

Les oeuvres d'Alexievitch, qui mêlent fiction et prose documentaire pour dépeindre des histoires émotionnelles sur le rôle des femmes durant la seconde guerre mondiale et la catastrophe de Tchernobyl, et basés sur des témoignages directs, ont été traduits dans de nombreuses langues et ont remporté des prix internationaux. Mais ses livres ne sont pas publiés dans son pays natal, la Biélorussie, dirigée par l'inamovible Alexandre Loukachenko, en raison d'une répression continue de la liberté de parole et d'une censure omniprésente.

Alexievitch a passé la plus grande partie de sa vie dans plusieurs pays européens, voyageant grâce à des bourses d'auteur. Elle a ouvertement critiqué la main de fer de Loukachenko sur la Biélorussie, le désastreux bilan du pays en matière de droits de l'homme et le maintien de la peine de mort.

S'exprimant lors d'une conférence de presse à Minsk, en Biélorussie, peu de temps après l'annonce du Prix, Alexievitch a affirmé qu'elle “n'était pas une femme des barricades”, mais que le climat politique actuel en Biélorussie “nous pousse aux barricades, parce que ce qui arrive est honteux.”

Chroniquant les horreurs et les difficultés de la vie dans plusieurs crises historiques, à la première personne et à travers les paroles de témoins, Alexievitch a vu ses “reportages d'investigation” devenir les favoris des critiques littéraires. L'Académie suédoise a salué l'engagement de l'auteure à préserver les voix de ses sources et a affirmé que “[G]râce à son extraordinaire méthode — un collage minutieux de voix humaines — Alexievitch approfondit notre connaissance de toute une période historique.”

Svetlana Alexievich, âgée de 67 ans, a commencé à enregistrer dans les années 70 les témoignages oraux de femmes soldats ayant participé à la seconde guerre mondiale, alors qu'elle travaillait comme jeune journaliste dans un journal local biélorusse. Ces témoignages ont été publiés dans son premier livre, “La guerre n'a pas un visage de femme“. Ce livre a longtemps été interdit de publication car il portait sur des histoires personnelles et ne mettait pas assez en avant le rôle de l'Etat communiste ; ce n'est qu'en 1985 qu'il a pu être publié.

Alexievitch a continué à utiliser les témoignages à la première personne dans son second livre, Les Cercueils de zinc, surl'invasion soviétique en Afghanistan et enregistré les témoignages remplis de chagrin de mères ayant perdu leurs fils durant le conflit. “J'ai besoin de surprendre une personne à un moment où elle a été secouée”, déclare Alexievitch à l'hebdomadaire russe Ogonyok en 2014. “Mon oreille est toujours dehors, dans la rue.”

L'écrivaine et journaliste a ensuite porté son attention sur la catastrophe nucléaire de Tchernobyl qui, bien qu'ayant eu lieu en Ukraine en 1986, a affecté la Biélorussie plus que tout autre pays, étant donné que la centrale était très proche de la frontière. En 1997, elle a publié La Supplication. Tchernobyl, chronique du monde après l'apocalypse, un recueil de témoignages obsédants de personnes ayant travaillé au nettoyage du site après la catastrophe. Beaucoup de ces personnes interviewées sont maintenant décédées, mais leurs voix subsistent dans les écrits d'Alexievitch.

Le livre le plus récent d'Alexievitch, La Fin de l'homme rouge ou le temps du désenchantement (2013), est son plus récent travail non-fictionnel s'intéressant à l'héritage de la mentalité soviétique plus de vingt ans après la chute de l'URSS, et le dernier de son grand cycle littéraire, Voix de l'utopie, dans lequel la vie en Union Soviétique est dépeinte du point de vue de l'individu.

Наш главный капитал — страдание. Это единственное, что мы постоянно добываем. Не нефть, не газ, а страдание. Я подозреваю, что именно оно и манит, и отталкивает, и удивляет в моих книгах западного читателя.

Notre principal capital est notre souffrance. C'est la seule chose que nous exploitons constamment. Pas le pétrole, le gaz, mais la souffrance. Je suppose que c'est ce qui attire, repousse et surprend le lecteur occidental de mes livres.

L'auteure a été critiquée par l'élite intellectuelle biélorusse parce qu'elle écrit en russe et pas en biélorusse, allant en sens inverse de la forte dynamique cherchant à faire revivre la culture nationale et la langue en Biélorussie. Alexievitch a affirmé que sa biographie “est davantage européenne” que russe ou biélorusse.

“Je me considère comme une personne du monde biélorusse, de culture russe, et comme une cosmopolite du monde”, affirme Alexievitch.

Svetlana Alexievitch est née le 31 mai 1948 dans la ville ukrainienne d'Ivano-Frankivsk, d'un père biélorusse et d'une mère ukrainienne. Lorsque le père eut accompli ses obligations militaires, la famille déménagea en Biélorussie où ses parents travaillèrent tout deux comme instituteurs. Après avoir terminé l'école, Alexievich travailla comme institutrice et comme journaliste, et étudia le journalisme à l'université de Minsk entre 1967 et 1972. Elle réside actuellement à Minsk, où elle est retournée après avoir vécu en Europe occidentale, pour travailler à son nouveau livre.

L'impunité règne-t-elle dès que l'on s'attaque aux femmes en Colombie ?

vendredi 9 octobre 2015 à 13:48
7330160038_5b9d63e812_z

Image sur une pancarte lors d'une marche pour protester contre la violence envers les femmes en Colombie. Photo prise sur le compte Fickr de La marche patriotique sous licence Creative Commons.

Deux faits divers survenus ces derniers jours en Colombie, l'assassinat de la journaliste Flor Alba Núñez et l'annonce de la mise en examen de la chanteuse et actrice Carolina Sabino pour délit d'avortement présumé, ont laissé un arrière-goût amer aux Colombiens qui se demandent si leur pays demeure une terre hostile pour les femmes.

Suite à l'assassinat de la journaliste de 25 ans d'une balle dans la tête le 10 septembre dernier, les associations de journalistes professionnels se sont immédiatement manifestées, exprimant leur rejet. La Fondation pour la liberté de la presse (FLIP) a de plus appelé le Parquet colombien à agir rapidement dans ce cas. Dans le même temps, Reporters sans frontières (RSF) a souligné qu'il fallait davantage prêter attention aux menaces reçues via Internet, comme cela s'est passé dans le cas de Núñez. Et l'ONG de conclure sur ces chiffres alarmants:

Colombia, el tercer país más mortífero para el gremio en el continente americano, se encuentra en el lugar 128, entre 180 países, en la Clasificación Mundial de la Libertad de Prensa 2015 de RSF.

La Colombie, le troisième pays le plus mortifère pour la profession sur le continent américain, se situe à la 128ème place, sur 180 pays, dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2015 de RSF.

Le blog Periodismo en las Américas [Journalisme dans les Amériques] recense les assassinats qui se sont produits dans le pays cette année:

Luis Carlos Peralta Cuéllar, director y propietario de la emisora Linda Estéreo, fue asesinado el 14 de febrero en Doncello, departamento de Caquetá. Édgar Quintero, periodista de Radio Luna, fue baleado por un desconocido el 2 de marzo en Palmira, departamento del Valle del Cauca.

El CPJ reporta que 46 periodistas han sido asesinados en Colombia desde 1992. El país ocupa el octavo lugar en el Índice Global de Impunidad 2014 de la organización sobre asesinatos de periodistas.

Luis Carlos Peralta Cuéllar, directeur et propriétaire de la radio Linda Estéreo [Jolie stéréo], a été assassiné le 14 février à Doncello, dans le département de Caquetá. Édgar Quintero, journaliste de Radio Luna, a été abattu par un inconnu le 2 mars à Palmira, dans le département du Valle del Cauca.

Le CPJ [Comité pour la protection des journalistes] rapporte que 46 journalistes ont été tués en Colombie depuis 1992. Le pays occupe la 8ème place de l‘Indice global d'impunité 2014 de l'organisation pour le meurtre de journalistes [lien en français].

Dans le même temps, des journalistes tels que Héctor Abad Faciolince ont aussi élevé la voix en guise de protestation:

D'autres se sont réunis dans la rue pour exprimer leur indignation:

Le jour qui a suivi le meurtre de la journaliste, le Parquet général de la nation a demandé une audience pour mettre en examen l'actrice et chanteuse Carolina Sabino pour délit présumé d'avortement. Affaire qui a été révélée après que cet organisme a intercepté une conversation téléphonique entre Sabino et sa soeur Lina Luna, également actrice, dans le cadre de l'enquête menée sur l'ancien conjoint de cette dernière, un hacker condamné en avril dernier à 10 ans de prison pour avoir espionné les personnes chargées des négociations du processus de paix avec la guérilla des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC).

Carolina a le même jour manifesté son mécontentement sur son compte Twitter face à la demande du Parquet car le fait que celle-ci ait été publiée dans les médias avant de l'en avoir d'abord informée a porté atteinte tant à son intimité qu'à sa dignité:

En Colombie, les femmes peuvent interrompre leur grossesse lorsqu'elle représente un risque pour leur santé, dans les cas de malformation du fœtus et de viol. Cependant, cet incident a déclenché une polémique et généré une vague de soutien à Carolina Sabino, précisément en raison de la manière dont il a été révélé. L'indignation généralisée de l'opinion publique a finalement poussé le Parquet à retirer sa plainte trois jours plus tard.

Voici quelques exemples des nombreux messages de solidarité à Carolina Sabino:

Sur le portail Las dos Orillas [Les deux rives], Juan Mosquera Restrepo a également pris la défense de Carolina Sabino:

El atentado que ha cometido la Fiscalía al filtrar esta historia privada a medios de comunicación es, a todas luces, una violación del derecho a la intimidad

L'attentat qu'a commis le Parquet en divulguant cette affaire privée à des médias est de toute évidence une violation du droit [au respect de] la vie privée.

Et d'autres comme Gustavo Bolivar, s'indignent de la voir répandue sur les réseaux sociaux :

Mais pour Carolina le mal est déjà fait et personne ne va en répondre. Cependant, ce n'est pas la première fois que le Procureur général de Colombie, Eduardo Montealegre, se trouve impliqué dans une affaire polémique concernant des femmes. Cela s'est déjà produit avec Jineth Bedoya, une autre journaliste qui a été enlevée et violée par des paramilitaires il y a 15 ans. Le procureur a dû réactiver la détention et l'ordre de capture d'Alejandro Cárdenas Orozco, impliqué dans le crime et laissé en liberté cette année, alors que l'affaire n'a toujours pas été résolue.

Quant à l'accusation contre Carolina Sabino, Montealegre s'est défendu en invoquant le fait qu'il ne savait rien. On espère en revanche qu'il parviendra à retrouver les auteurs de l'assassinat de la journaliste Flor Alba Núñez.

Le président colombien Juan Manuel Santos a promulgué cette année une loi qui fait du féminicide un crime à part entière et  punit d'une peine de prison pouvant aller jusqu'à 41 ans l'homicide d'une femme pour des raisons de genre. Comme le révèle un rapport de la Commission économique pour l'Amérique latine (Cepal) en partenariat avec la revue Semana, en Colombie, 88 femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint en 2014.