PROJET AUTOBLOG


Global Voices (fr)

Archivé

source: Global Voices (fr)

⇐ retour index

Le Kazakhstan utiliserait un logiciel de détection de mécontentement politique

mardi 8 janvier 2019 à 10:23

Le collectif Digital Revolution a publié les documents avec le mot-clic #KvantNash. (Photographie : copie d'écran du site de Digital Revolution)

Ce qui suit est un article partenaire d'EurasiaNet.org, rédigé par Almaz Kumenov et republié avec autorisation.

Le Kazakhstan aurait adopté un logiciel mis au point par les services secrets russes et conçu pour détecter les humeurs de protestation au sein de la population.

Le 19 décembre 2018, le collectif russe de pirates informatique Digital Revolution a publié sur son site des documents numérisés qui prouveraient l'existence d'un mécanisme de recherche systématique d'indices de mécontentement populaire dans des sources d'informations en ligne et sur les réseaux sociaux. Les pirates affirment avoir découvert les documents en s'introduisant dans les serveurs de l'Institut de recherche scientifique Kvant, une unité du Services fédéral de sécurité de Moscou, ou FSB.

D'après les documents divulgués, Kvant utilise des réseaux neuronaux artificiels pour analyser les activités de Facebook, d'Instagram, ainsi que de leurs analogues russes VKontakte et Odnoklassniki, afin de détecter des phrases-clés pouvant signaler un mécontentement politique.

Selon un rapport de la BBC Russie, Kvant était dans les années 1970 une unité de recherche chargée de la production des premiers ordinateurs soviétiques. En 2018, le département du Trésor des États-Unis l’a identifiée comme une agence s'évertuant à déstabiliser les États-Unis. Dans la même déclaration, le Trésor déclare qu'en 2010, Kvant a été désignée entreprise unitaire d'État fédérale sous l'égide du FSB.

BBC Russie rapporte maintenant que le Kazakhstan semble avoir développé un système similaire à celui mis en place par la Russie.

En janvier 2018, le ministère de l'Information et des Communications avait révélé avoir alloué près de 4,4 millions d'euros à la création d'un système automatique de surveillance de l'univers numérique. Son objectif déclaré était de freiner les incitations au terrorisme, à l'extrémisme et au suicide. Le développeur serait sélectionné par appel d'offre publique et le travail achevé à la fin de l'année 2018.

BBC Russie rapporte n'avoir trouvé aucun document officiel comme preuve d'achat du matériel requis. Mais certaines pistes ont été détectées par Digital Revolution.

Selon un document téléchargé par le collectif, un tel système a été conçu en 2017 à Moscou pour le Kazakhstan. L'entrepreneur de cette opération était un groupe de recherche basé au Kazakhstan aussi dénommé Kvant, tandis que le sous-traitant était le Kvant basé à Moscou.

La société Kvant, semble-t-il privée, à Astana, déclare sur son site internet analyser les données de masse depuis 2015 et fournir des services à plusieurs entreprises informatiques internationales. Sa propriétaire Lyazzat Shakimova a confirmé à BBC Russie le travail de sa société sur un système de surveillance, tout en niant tout contact avec le Kvant russe.

Le ministère de l'Information et des Communications n'a pas commenté l'enquête de la BBC publiquement.

Le contrôle restrictif du gouvernement sur l'espace en ligne au Kazakhstan a déjà concrètement affecté d'innombrables internautes.

Beaucoup se plaignent d'un ralentissement de leur connexion presque chaque soir, dans ce qui ressemble à une tentative du gouvernement de restreindre l'accès aux diffusions en direct d'un opposant détesté en exil.

Les procureurs ont également fait des exemples de plusieurs personnes utilisant les réseaux sociaux comme Facebook pour exprimer leur désapprobation quant à la gestion du pays. Fin novembre 2018, un tribunal d'Almaty condamnait un homme à quatre ans de prison pour avoir “fourni des informations” à un groupe d'opposition aujourd'hui interdit, le Choix démocratique du Kazakhstan.

La Fondation pour un dialogue ouvert basée à Varsovie a récemment identifié cet accusé comme faisant partie des trente citoyens du Kazakhstan visés par des procédures judiciaires entre mars et octobre 2018, en représailles à des messages critiques sur les réseaux sociaux ou les applications de messagerie.

Trump déchaîne un “facepalm” collectif en Afghanistan avec sa version de l'invasion soviétique de 1979

lundi 7 janvier 2019 à 16:27

“Facepalm” : statue au Jardin des Tuileries, Paris. image Creative Commons.

L'analyse historique à la mode particulière du président étasunien Donald Trump — qu'elle s'applique aux événements vieux d'un jour ou de plusieurs décennies — est souvent perçue comme faisant partie de la séduction post-vérité qu'il exerce sur la base politique qui a adhéré à sa campagne électorale de 2016.

On peut se demander qui il a voulu impressionner en ce début d'année avec son interprétation grossièrement inexacte de l'invasion soviétique de l'Afghanistan en 1979. Quoi qu'il en soit, ses propos ont provoqué un tollé dans ce pays.

Retour en arrière : en 1978, les factions communistes Khalq et Parcham, sous l'instigation des Soviétiques, mènent un coup d’État en Afghanistan, assassinent le président d'alors Sardar Daud Khan, et massacrent sa famille.

Le pays reçoit le nom de République démocratique d'Afghanistan. Le coup d’État met en branle un cycle de violences dont l'Afghanistan ne s'est probablement jamais remis. [Et qui sera, par ailleurs, une des causes de la chute de l'URSS dix ans plus tard, NdT]

Trump, quant à lui, voit les choses différemment. Lors d'une réunion de ministres du 2 janvier, il a relaté ainsi l'invasion :

Russia used to be the Soviet Union. Afghanistan made it Russia, because they went bankrupt fighting in Afghanistan. Russia. … The reason Russia was in Afghanistan was because terrorists were going into Russia. (The Soviet Union) was right to be there. The problem is, it was a tough fight. And literally they went bankrupt; they went into being called Russia again, as opposed to the Soviet Union. You know, a lot of these places you’re reading about now are no longer part of Russia, because of Afghanistan.

La Russie était l'Union soviétique, l'Afghanistan en a fait la Russie, parce qu'ils ont fait faillite en  combattant en Afghanistan. La raison pour laquelle la Russie était en Afghanistan, c'est parce que les terroristes entraient en Russie. Ils avaient le droit d'y aller. Le problème, c'est que c'était une guerre difficile et ça les a ruinés. Et c'est pour ça qu'ils ont cessé de s'appeler “Union Soviétique” et qu'ils sont redevenus “La Russie”. Beaucoup de ces endroits dont vous n'entendez plus parler aujourd’hui ne font plus partie de la Russie à cause de l'Afghanistan.

Cette déclaration a valu des ripostes cinglantes du Président afghan Ashraf Ghani, du Ministre des affaires étrangères Salahuddin Rabbani, et de l'ancien chef du renseignement national Rahmatullah Nabil, ainsi que plusieurs répliques éclairées d'ambassadeurs afghans.

Une des meilleures d'entre elles est venue de Waheed Omer, l'ambassadeur en Italie, qui a proposé un résumé lapidaire des ingérences étrangères en Afghanistan via l'Inter-Services Intelligence (ISI) du Pakistan, une institution que de nombreux Afghans rendent responsable de l'émergence et de la présence prolongée des talibans.

Non, nous n'avons pas envoyé de terroristes en URSS en 1979. L'URSS nous a envahis. Les USA ont financé l'ISI pour les saigner [les Soviétiques]. Puis l'ISI a aidé les terroristes à attaquer les USA. Puis les USA nous ont envahis pour les tuer [les terroristes]. Aujourd'hui, la Russie couche avec l'ISI pour saigner les USA. Nous sommes piégés au milieu. Point à la ligne.

Les ambitions afghanes de l'URSS pendant la Guerre froide ont planté le décor pour presque vingt ans de guerre civile et l'émergence des talibans. Carte de Matthew White.

Le désastre du communisme afghan

L'Afghanistan a été maintes fois envahi au long de son histoire, le plus récemment par les forces de la coalition dirigée par les USA, que Trump tient à présent à retirer complètement du pays.

Dans un article pour Mangal Media, Mohammed Harun Arsalai, co-fondateur de Documenting Afghanistan, a expliqué en quoi l'expansion du communisme promue par les Soviétiques en Afghanistan a peut-être marqué la plus cataclysmique de toutes les interventions étrangères dans ce pays.

Once these (communist) factions were in control they began summarily killing just about anyone they remotely suspected of being in opposition. Going to the Masjid too often was enough for them. They were also killing each other. The mass, violent repression and extrajudicial killings that the communists were carrying out pushed Islamic groups in Afghanistan into militancy. But it wasn’t until the wanton killings starting in 1978 that the Mujahideen went from being an underground resistance movement to a popular resistance movement.

Une fois que ces factions (communistes) ont pris le contrôle, elles ont commencé à exécuter à peu près tous ceux qu'elles suspectaient de près ou de loin d'opposition. Aller trop fréquemment à la mosquée leur était une raison suffisante. Ils ont aussi commencé à s'entre-tuer. La violente répression de masse et les assassinats extra-judiciaires qu'ils ont menés ont poussé les groupes islamiques d’Afghanistan à l'insurrection. Mais ce n'est pas avant le début des tueries gratuites en 1978 que les Moudjahidin se sont transformés de mouvement clandestin de résistance en mouvement de résistance populaire.

En décembre 1979, le cercle intérieur du Politburo soviétique, craignant la déloyauté potentielle du président d'alors Hafizullah Amin, décida d'envahir l'Afghanistan. Après une semaine de combats intenses, les Soviétiques tuèrent Amin, prirent le contrôle de l'Afghanistan, et installèrent Babrak Karmal à la tête de la République démocratique d'Afghanistan. Karmal démissionnera finalement en 1986, à un moment où plus d'un million d'Afghans avaient déjà été tués et plus de six millions déplacés par les combats.

Finalement, en 1988, la République démocratique d'Afghanistan, l'URSS, les USA et le Pakistan signèrent des accords pour mettre fin à la guerre en Afghanistan, et le retrait des troupes soviétiques débuta. En 1989 toutes les troupes soviétiques avaient quitté l'Afghanistan, concédant concrètement la défaite.

Les troupes soviétiques rentrent d'Afghanistan. Photo d'archive de RIAN. Présentée sur Wikimedia Commons.

La déclaration du Président Trump selon laquelle “La raison pour la quelle la Russie était en Afghanistan, c'est parce que les terroristes entraient en Russie” est tout simplement fausse.

Dans un discours de 1980, le président américain Ronald Reagan — un homme que Trump utilise comme référentiel à qui se mesurer — a qualifié l'invasion de menace extrêmement grave contre la paix, faisant craindre une expansion soviétique plus avant en Asie du Sud-Ouest.

L'ambassadeur d'Afghanistan au Sri Lanka, M. Ashraf Haidari, a relevé après les propos de Trump que “même la Russie” n'appuierait pas son interprétation faussée de l'invasion.

Le chaos déchaîné par l'invasion soviétique — et l'afflux d'armements en provenance tant de Moscou que de l'Occident dans le pays — ont jeté les bases de dizaines d'années de violences et de l'arrivée au pouvoir des talibans en 1996.

Quiconque a suivi l'histoire de l'Afghanistan sait que @realDonaldTrump a exactement inversé la causalité. Nous avons le terrorisme à cause du coup d’État communiste et de l'invasion soviétique.

… et en partie parce que les USA n'ont ressenti aucune responsabilité pour un effort de nettoyage – ne se souciant guère où la quantité phénoménale d'armes à feu et d'argent (plus les stéroïdes de l'idéologie) qu'ils avaient injectée pour battre les Soviétiques irait après cette défaite…

Quant au legs de l'invasion par les USA eux-mêmes de l'Afghanistan, il reste un immense point d'interrogation de sombre augure.

Le conflit a gagné en complexité et intensité à mesure que l’insurrection talibane se renforce et que des combattants proclamant leur allégeance à l'EI multiplient les attaques contre des cibles civiles en parallèle.

Depuis les premières frappes [américaines] en octobre 2001, l'Afghanistan n'est jamais paru aussi dangereux qu'aujourd'hui.

Dix-huit ans, des milliers de milliards de dollars et des milliers de vies plus tard, le gouvernement américain se précipite pour quitter une guerre qu'il ne peut gagner, sur fond de grosses fanfaronnades de Trump.

Global Voices est partenaire de l'Année internationale des langues autochtones 2019

lundi 7 janvier 2019 à 00:16

L'Organisation des Nations Unies a proclamé 2019 : Année internationale des langues autochtones .

Nous avons l'immense satisfaction de vous annoncer que, cette année, Global Voices [fr] est partenaire officiel de la campagne (notre logo n'est pas encore en place). Rising Voices (RV) va coordonner notre participation en collaborant avec les équipes des différentes sections et régions ainsi qu'avec les équipes des différentes langues. Comme vous le savez, RV milite depuis plusieurs années en faveur de la diversité linguistique numérique et sur la manière dont la technologie peut être un outil pour les communautés qui participent à la revitalisation de leurs langues.

Le lancement officiel de la campagne aura lieu fin janvier à Paris, au siège de l'UNESCO. Notre collègue Gwen Lefeuvre [fr] sera présente pour couvrir l'événement en direct sur le compte Twitter de RV. Elle a apporté un soutien inestimable à ce travail et je la remercie pour sa présence. Juan Carlos Romero, un autre membre de notre réseau, représentera également RV en prenant part à une table ronde sur “Les langues et le militantisme numérique”. Il habite actuellement à Paris où il enseigne le quechua qui est sa langue maternelle. Il a également aidé à organiser un de nos ateliers de langues à Cochabamba, en Bolivie.

Comment participer ?

Nous sommes ouverts à toutes les suggestions ! Nous serions ravis d'avoir de vos nouvelles.

En outre, avec l'aide de Jer, nous souhaitons mettre à jour notre portail Activismo Lenguas (Militantisme linguistique) qui cartographie les projets d'activisme numérique de langues différentes dans toute l'Amérique latine. Inspiré par la rotation du compte GV Instagram, notre réseau de militants linguistiques numériques en Amérique latine gérera à tour de rôle un compte Twitter dédié aux langues autochtones dans la région.

Je vous remercie pour votre soutien et votre implication. L'une des principales raisons pour lesquelles nous avons accepté cette proposition de partenariat est que notre communauté comprend le pouvoir et l'importance de raconter des histoires et d'accéder à l'information dans diverses langues du monde afin d'accroître la compréhension interculturelle. Nous occupons une position unique pour démontrer l'importance de notre travail actuel, ainsi que les réalisations que cette campagne de l'ONU espère accomplir.

Les BD de Marcelo D'Salete, pour comprendre le Brésil d'hier et d'aujourd'hui

dimanche 6 janvier 2019 à 16:53
Marcelo D'Salete por Rafael Roncato/ Divulgação.

Marcelo D'Salete au travail. Photo: Rafael Roncato, utilisation autorisée

En 2013, Global Voices publiait une série d’articles [en portugais, traduits en anglais, espagnol et italien mais sauf exception pas en français] sur les bandes dessinées de Marcelo D’Salete. Celui-ci commençait alors à être reconnu pour ses récits urbains et un point de vue caractérisé par le “questionnement et la complexification des possibilités de représenter les noirs et leur histoire”, selon ses mots [article traduit en français].

Avec le temps, D’Salete s'est tourné vers le passé du Brésil. Ses œuvres les plus récentes, Cumbe (2014) et Angola Janga (2017), racontent des histoires de résistance d'esclaves noirs dans le pays qui a été le plus grand importateur d'esclaves africains du monde occidental (plus de 10 fois les États-Unis), et le dernier à l'avoir aboli (en 1889).

Basées sur la recherche historique, les œuvres de D'Salete nous entraînent dans un voyage de bravade, de collaboration et de courage qui a valu à l'artiste des récompenses au Brésil et ailleurs.

Marcelo D’Salete a accordé un entretien à Global Voices, qui a été légèrement écourté dans la version traduite.

Marcelo D'Salete par Rafael Roncato/ Divulgação.

GV: Votre travail a la caractéristique d'attirer l'attention des lecteurs sur des personnages qui d'habitude ne sont pas au premier plan. Il révèle ainsi les motivations, toute une vision du monde. Pourquoi le point de vue noir est-il important dans les histoires que vous voulez raconter ?

MDS: Imagino que tenhamos algumas narrativas, talvez um pouco mais no campo da literatura, com personagens negros. Mas poucas vezes esses personagens são protagonistas nessas histórias. Creio também que são poucas as histórias que acabam alcançando um grande público. Esse tipo de narrativa é importante para compreender o nosso passado, mas também para compreender o nosso presente. Não é simplesmente uma questão de colocar essas figuras lá. É colocar essas figuras, nessas narrativas, de um certo modo, com certa complexidade, tentando compreendê-las, tentando vê-las com seus defeitos mas também com suas conquistas.

MDS: J'imagine que nous avons quelques narratifs, peut-être un peu plus dans le champ littéraire, avec des personnages noirs. Mais c'est rare que ces personnages soient les protagonistes de ces histoires. Je crois aussi que rares sont les histoires qui atteignent un large public. Ce type de narratif est important pour comprendre notre passé, mais aussi notre présent. Ce n'est pas simplement une question de placer ces figures là. C'est de les placer dans ces narratifs, d'une certaine manière, avec une certaine complexité, en essayant de les comprendre, de les voir avec leurs défauts mais aussi avec leurs conquêtes.

GV: En juillet 2018, quand vous avez écrit un texte sur le Prix Eisner pour Cumbe, vous avez dit : “l'incitation publique à former et produire le professionnel est une partie essentielle du processus de création des BD et de l'émergence de nouveaux auteurs et narratifs.” Pourquoi avez-vous souligné le rôle de l'incitation publique ?

MDS: Os livros “Cumbe” and “Angola Janga” tiveram o apoio do PROAC (de incentivo à cultura no estado de São Paulo), que é um programa que premia os melhores projetos com um valor em dinheiro para o artista e para a impressão do livro. Isso ajudou muito para que eu tivesse um pouco mais de tranquilidade para finalizar esses trabalhos. É claro que eram trabalhos que já estavam acontecendo há mais tempo, e eles viriam a público imagino que mais cedo ou mais tarde. Mas, o prêmio acabou colaborando para que os trabalhos saíssem naquele tempo e com qualidade. Isso é algo importante para incentivar, para que continue, para que se amplie em diferentes estados e a nível federal, para que artistas de diferentes locais possam produzir o seu trabalho e vê-lo impresso, vê-lo circulando.

MDS: Les livres “Cumbe” et “Angola Janga” avaient le soutien de PROAC (une entité publique de promotion de la culture dans l’État de São Paulo), un programme qui récompense les meilleurs projets avec une somme d'argent pour l'artiste et pour l'impression de l'ouvrage. Cela m'a beaucoup aidé en me donnant un peu plus de tranquillité pour terminer ces travaux. C'étaient clairement des travaux déjà réalisés, et qui j'imagine auraient trouvé un public tôt ou tard. Mais le prix a aidé les œuvres à sortir en leur temps et avec une bonne qualité. Cela a son importance pour encourager, pour continuer, pour s'amplifier dans différents États et au niveau fédéral, pour que les artistes de différents lieux puissent produire leurs œuvres et les voir imprimées et diffusées.

GV: Vous avez aussi loué le rôle de la bande dessinée dans la promotion du changement, en disant que “les arts sont des composants essentiels d'un changement structurel.” Pourquoi cela ?

MDS: Os quadrinhos foram um elemento muito importante na minha alfabetização, no meu aprendizado. Eu lia quadrinhos desde muito cedo. Tenho uma paixão por esse tipo de veículo até hoje. Foi a partir deles que eu tive contato com algumas narrativas diferentes sobre a nossa sociedade e o nosso passado. O quadrinho de ficção e outros, assim como cinema, foram importantes para minhas relações, pros meus colegas, pra minha geração, principalmente nas décadas de 1980 e 1990, nesse momento de formação. Acredito que o tipo de arte que a gente pode fazer, em formato de quadrinhos, tem um grande potencial. É essencial trazer novas perspectivas e novas possibilidades de ver nossa sociedade hoje e no passado. Algo que possa favorecer uma mudança de mentalidade em relação ao tratamento dos diversos grupos que a gente tem no Brasil, contrapondo uma visão hegemônica, que ainda enquadra esses grupos em posições diferentes e desiguais. Essa visão hierarquizada da sociedade, nos últimos meses, a gente vê que está bem marcada na fala de diversos políticos.

MDS: Les bandes dessinées ont été un élément très important de mon apprentissage de la lecture et de l'écriture. J'ai lu très tôt des bandes dessinées. Jusqu'à aujourd'hui j'ai une passion pour ce type d'expression. C'est à partir d'elles que j'ai eu contact avec quelques narratifs sur notre société et notre passé. Les bandes dessinées de fiction ou autres, ainsi que le cinéma, ont été importants pour mes relations, pour mes confrères, pour ma génération, principalement dans les années 1980 et 1990, le moment de ma formation. Je pense que le type d'art que les gens peuvent faire, en format de bande dessinée, a un grand potentiel. Il est essentiel de tracer de nouvelles perspectives et de nouvelles possibilités pour voir notre société aujourd'hui et dans le passé. Ce qui pourrait favoriser une mutation des mentalités par rapport au traitement des divers groupes de la population au Brésil, un contrepied de la vision hégémonique qui enferme toujours ces groupes dans des positions différentes et inégales. Cette vision hiérarchisée de la société, nous avons vu dans les derniers mois qu'elle reste très marquée dans le discours de divers hommes politiques.

Página de Angola Janga, de Marcelo D'Salete. Reproduzida com autorização do autor.

Une planche de Angola Janga, par Marcelo D'Salete. Reproduction avec la permission de l'auteur.

GV: Quels sont pour vous les jalons de votre carrière ?

MDS: Além das obras de literatura infantil, ilustrando textos de outras pessoas, tenho quatro trabalhos solo de quadrinhos publicados até agora – Noite Luz (2008); Encruzilhada (2011), Cumbe (2014) e Angola Janga (2017). Os dois últimos são os mais conhecidos pelo público, mas considero que os primeiros, que são trabalhos mais urbanos, também trazem algo importante pra gente pensar.

MDS: Au-delà des œuvres de littérature enfantine, en illustrant Ies textes d'autres, j'ai seulement quatre ouvrages de BD publiés à ce jour : Noite Luz (2008); Encruzilhada (2011), Cumbe (2014) et Angola Janga (2017). Les deux derniers sont les plus connus du public, mais je considère que les premiers, qui sont des œuvres plus urbaines, apportent aussi quelque chose d'important à la réflexion.

GV: A mesure que progressait votre carrière, comment avez-vous ressenti l'expansion de votre public ?

MDS: Foi muito interessante observar a formação de um público para o tipo de quadrinho que eu estava fazendo. Foi um processo lento, mas foi muito interessante observar que, a cada edição, mais pessoas ficavam conhecendo esses trabalhos. Geralmente, essas pessoas não vão atrás apenas de um livro, elas acompanham a obra completa de um autor. Acho isso interessante, é algo que eu gosto de fazer também — quando eu gosto de um artista, gosto de acompanhar todo o seu trabalho.

MDS: Il a été très intéressant pour moi d'observer le développement d'un public pour le genre de bande dessinée que j'étais en train de faire. Le processus était lent, mais il a été très intéressant d'observer qu'avec chaque publication, plus de personnes arrivaient à connaître ces œuvres. En général, ces personnes ne choisissent pas juste un livre, mais suivent l’œuvre complète d'un auteur. Je trouve ça intéressant, et c'est ce que je fais moi-même : quand j'aime un artiste, j'aime suivre tout son travaiI.

GV: Quels souvenirs de bandes dessinées avez-vous de l'époque de vos études ?

MDS: Na escola pública, onde eu estudava, eu não lembro de ter contato com quadrinhos. Os quadrinhos acabaram entrando na escola pública, e mesmo particular, um pouco depois, em meados dos anos 2000. Eu só fui ter contato com quadrinhos por meio de colegas que tinham o mesmo gosto. Infelizmente, não era uma leitura realizada em sala de aula.

MDS: A l'école publique, où j'ai fait mes études, je ne me rappelle pas avoir été en contact avec des bandes dessinées. C'est un peu plus tard, au milieu des années 2000, que les BD ont fini par entrer à l'école publique et même privée. Je n'étais en contact avec les BD que par des camarades ayant les mêmes goûts. Malheureusement, ce n'était pas une lecture existant dans la salle de classe.

GV: Avoir des œuvres listées dans le Plan national d'enseignement de la littérature (PNLD) ouvre de nouvelles possibilités pour un artiste. Comment voyez-vous la possibilité que votre travail devienne une référence pour toute une génération d'élèves ?

MDS: É um meio muito interessante e tem um potencial enorme para atingir diversas gerações de leitores. Lembrando que não é apenas uma narrativa mais fácil que a literatura em prosa, mas, sim, uma outra forma de contar histórias. Acho muito importante que os livros estejam no PNLD. Não era a minha intenção inicial, mas, depois, vendo o trabalho pronto e observando a relação do público com essas obras, mostrando para os jovens e vendo a reação dos meus próprios alunos com essa literatura, eu fui me acostumando mais com a ideia de que, sim, é um material que pode ser utilizado em sala de aula. Professores têm comentado que as obras são um excelente recurso para discutir esses temas.

MDS: C'est un médium très intéressant et qui a un potentiel énorme pour atteindre différentes générations de lecteurs. En se rappelant que c'est un narratif simplement plus facile que la littérature en prose, une autre façon de conter des histoires. Je pense qu'il est très important que ces livres soient intégrés au PNLD. Ce n'était pas mon intention au départ, mais, par la suite, en voyant le travail prêt et en observant la relation du public avec ces œuvres, en les montrant aux jeunes et en voyant la réaction de mes propres étudiants, je me suis habitué à l'idée que ce matériau pouvait être utilisé en salle de classe. Les professeurs ont commenté que les oeuvres sont une excellente ressource pour discuter ces thèmes.

Página de Angola Janga, de Marcelo D'Salete. Reproduzida com autorização do autor.

Une planche de Angola Janga, par Marcelo D'Salete. Reproduction avec la permission de l'auteur.

GV: Après tant d'interviews, de séances de dédicaces et de débats, peut-on ajouter une question que personne n’aurait posée et à laquelle vous aimeriez répondre ?

MDS: Gostaria de reforçar que este trabalho, do Angola Janga, é um trabalho que fala sobre um período e um contexto. Eu gosto muito de vê-lo como uma obra com diversos personagens, diversas narrativas, tentando analisar aquele contexto do modo mais complexo possível. Foi uma experiência muito rica, um aprendizado enorme nesses anos todos. A ideia era tentar fazer com que a gente se aproximasse um pouco mais desses diferentes personagens naquela narrativa, para além de alguns líderes que são importantes, como Zumbi [um dos líderes do Quilombo dos Palmares], mas revelando também outros personagens igualmente relevantes para tentarmos compreender aquele período.

MDS: Je voudrais souligner que Angola Janga est un ouvrage qui parle d'une période et d'un contexte. Il me plaît de le voir comme un œuvre avec différents personnages, différents récit, qui tente d'analyser ce contexte de la manière la plus complexe possible. Ce fut une expérience très riche, un immense apprentissage dans toutes ces années. L'idée était d'essayer de faire que les gens approchent d'un peu plus près ces différents personnages dans ce récit, au-delà de quelques leaders qui sont importants, comme Zumbi [un des chefs du quilombo de Palmares], mais aussi en révélant d'autres personnages également pertinents pour essayer de comprendre cette période.

Pour en savoir plus sur les œuvres de Marcelo D'Salete, consultez son site web.

La pression de la Chine pour ‘un pays, deux systèmes’ à Taïwan rencontre une opposition vigoureuse

samedi 5 janvier 2019 à 21:05

“Taïwan n'acceptera en aucun cas “un pays, deux systèmes”. La vaste majorité des Taïwanais sont résolument opposés à “un pays, deux systèmes”. C'est cela le “consensus de Taïwan” Image issue du compte Facebook de la présidente taïwanaise Tsaï Ing-wen

Le Président Xi Jinping a déclaré que la réunification de Taïwan avec la Chine est essentielle au grand dessein politique de régénération de la Chine, insistant que si une réunification pacifique était l'idéal, Pékin n'excluait pas l'usage de la force armée.

Dans son discours pour le rassemblement commémorant le 40ème anniversaire du rétablissement du dialogue entre les deux rives du détroit le 3 janvier, M. Xi a poursuivi en disant que la réunification devait reproduire le modèle “un pays, deux systèmes” de Hong Kong, en conformité avec le consensus de 1992. Il a ajouté que le problème de Taïwan ne pouvait pas continuer à être transmis de génération en génération.

Taïwan est de facto un Etat souverain depuis 1949, lorsque que le Kuomintang (KMT), vaincu de la guerre civile chinoise, se relocalisa sur l'île. En 1992, le KMT signa le consensus “Une seule Chine” avec Pékin, par lequel les deux parties convenaient que la Chine continentale et Taïwan constituent un unique pays. Mais les interprétations sur ce qu'implique ledit consensus sont très contradictoires.

La présidente taïwanaise Tsaï Ing-wen a aussitôt réagi aux déclarations de M. Xi par un communiqué publié, entre autres autres canaux, sur sa page Facebook :

We have never accepted the “1992 Consensus.” The fundamental reason is that Beijing authorities’ definition of the “1992 Consensus” is “one China” and “one country, two systems.” I want to reiterate that Taiwan absolutely will not accept “one country, two systems.” The vast majority of Taiwanese also resolutely oppose “one country, two systems,” and this opposition is also a “Taiwan consensus.”

Nous n'avons jamais accepté le “consensus de 1992″. La raison fondamentale en est que la définition par les autorités de Pékin du “consensus de 1992″ est “une seule Chine” et “un pays, deux systèmes”. Je tiens à répéter que Taïwan n'acceptera en aucun cas “un pays, deux systèmes”. La vaste majorité des Taïwanais s'oppose aussi à “un pays, deux systèmes”, et cette opposition est aussi un “consensus taïwanais”.

Le Bureau des Affaires du continent de Taïwan, l'organe gouvernemental qui gère la communication avec la Chine continentale, a lui aussi publié une déclaration décriant le modèle “un pays, deux systèmes” :

The result of the implementation of ‘One Country, Two Systems’ in Hong Kong is the loss of freedom, rule of law and human rights of Hong Kong people – this is unacceptable to the Taiwanese people.

Le résultat de la mise en œuvre de ‘Un pays, deux systèmes” à Hong Kong est la perte de la liberté, de l'état de droit et des droits humains pour la population de Hong Kong. Impossible à accepter pour le peuple taïwanais.

Nombreux sont ceux à Hong Kong qui pensent que le principe “Un pays, deux systèmes”, inscrit dans la Déclaration commune sino-britannique de 1984 et la Loi fondamentale, a échoué à protéger les droits et libertés des citoyens de Hong Kong.

Ces dernières années, Pékin a interféré sans états d'âme dans les affaires intérieures de Hong Kong. En 2014, avec le décision de confiner le cadre électoral au Chef de l'Exécutif hongkongais. En 2015, cinq libraires de Hong Kong disparurent, dans ce qui est généralement considéré comme des détentions extra-judiciaires par les forces de polices chinoises. Entre 2016 et 2018, six législateurs pro-démocratie furent démis sous les auspices de Pékin.

Un débat s'est ensuivi sur Twitter, dans lequel les usagers se sont efforcés de découvrir ce qui est vraiment nouveau dans les propos de Xi. L'utilisateur de Twitter @tangyongtao a copié un commentaire qui circulait sur un tchat de groupe :

Le discours de Xi indique que le PCC a fondamentalement changé sa politique envers Taïwan. Dans le passé, il restait fidèle au “consensus de 1992”, un consensus plutôt ambivalent sur qui doit conduire la réunification, et qui met l'accent sur l'égalité dans les pourparlers entre les deux rives du détroit. Cette fois, Xi évoque “un pays, deux systèmes” comme stratégie de réunification, c'est déclarer ouvertement que le PCC va contrôler la souveraineté de Taïwa, tandis que Taïwan sera autorisé à conserver son propre système. Extrait d'un article.

Comparé au discours prononcé par Hu Jintao [le Président chinois de l'époque] au 30ème anniversaire [du dialogue entre les deux rives du détroit], le discours de Xi Jinping présente trois changements majeurs : 1. Xi souligne que la Chine ne renoncera pas à l'usage de la force armée, Hu ne mentionnait aucun moyen militaire ; 2. Xi évoque “un pays, deux systèmes” comme un modèle de réunification, Hu mettait l'accent sur les négociations entre les rives du détroit ; 3. Xi ne mentionne pas la confiance mutuelle, Hu mettait l'accent sur la construction de la confiance dans différents domaines, y compris politique et militaire.

Chez les dissidents, les opinions sur la réunification sont contrastées. L'économiste politique He Qinglian a écrit :

Sitôt que Taïwan et la Chine seront unifiés, [il n'y aura] pas d'espace de négociation, pas de liberté, pas de démocratie. L'économie de Taïwan ne pourra qu'être intégrée à la Chine. Les 70 années d'efforts de Taïwan pour un développement indépendant prendront fin.

A l'inverse, @Zhiyongxu, fondateur du Nouveau Mouvement Citoyen en Chine continentale, pense que Taïwan peut faciliter une unification démocratique avec la Chine :

Tsaï Ing-wen est trop sur la défensive. Bien que Taïwan soit actuellement en sécurité, cela ne peut être garanti à long terme. Un politicien taïwanais plus fort devrait adresser des lettres régulières aux Chinois du continent plaidant pour une constitution démocratique d'une Chine unifiée. Ceci peut fournir un espace à Taïwan pour intervenir dans les affaires intérieures de la Chine, ainsi que pour émettre des suggestions et faire des critiques sur l'ordre du jour dans des domaines comme le respect des droits humains en Chine. Au lieu d'être sur la défensive, cela peut être plus proactif pour se gagner le soutien des Chinois du continent. Ce qui peut assurer la sécurité de Taïwan et contribuera à faire l'histoire de façon à changer le monde.

Le texte de Xu a été retweeté plus de 350 fois, recevant accord et désaccord. Une réaction représentative disait :

如果民进党这么干,就是原来的国民党了。这种办法并不新鲜,但是解释不了为什么地区会产生独立的问题。一个地区一旦选择独立,就意味着这个地区已经不想跟原来的地区产生联系。跟婚姻一样,感情破裂最后的双方的关系不是爱也不是恨,而是感情淡漠。

Si le Parti progressiste taïwanais suit votre suggestion, il deviendra le KMT d'autrefois. Il n'y a rien de neuf dans votre suggestion, mais elle ne répond pas à la principale raison pour laquelle Taïwan a un mouvement indépendantiste. Le fait que [Taïwan] ait fait le choix de suivre le chemin vers l'indépendance signifie qu'il veut couper la relation avec son origine. Comme dans le mariage, lorsque le lien est brisé, la relation n'est plus dirigée par l'amour ou la haine, mais par l'indifférence.

Beaucoup ont réagi au programme de réunification de Xi par l'humour noir, comme par exemple @guoshouzhu qui ironise :

[Il faut réunifier Taïwan] Les Taïwanais doivent consomment du porc avec la peste porcine africaine, des aliments toxiques, de l'huile de vidange ; ils doivent respirer un air toxique. Leurs allocations doivent être abolies pour qu'ils ne puissent pas se permettre d'être malades, de faire des études et d'acheter un logement. Que Taïwan adopte le système politique parallèle (parti et gouvernement), que les fonctionnaires du parti et du gouvernement aient des privilèges pendant que le peuple vit comme les chiens et les cochons. Lavez le cerveau des Taïwanais pour qu'ils ne puissent pas critiquer et soient seulement capables de louanger les imbéciles.

@gowKE4HReZ7ZBc5 a cité une réaction typique de citoyen de Hong Kong :

Internaute hong-kongais : En tant qu'habitant de Hong Kong, j'exhorte les Taïwanais à ne jamais croire au “un pays, deux systèmes” du PCC, c'est un moyen de s'insinuer dans Taïwan, une fois qu'ils prennent le contrôle, ils peuvent faire tout ce qu'ils veulent et vous tailleront en pièces. Tous les incidents politiques qui se sont produits après le transfert de Hong Kong à la Chine en 1997 ont montré les conséquences. La démocratie dont vous jouissez aujourd'hui a été payée des vies des soldats du KMT lors de la guerre civile. Protégez l'unique espace démocratique chinois en ce monde.