PROJET AUTOBLOG


Global Voices (fr)

Archivé

source: Global Voices (fr)

⇐ retour index

Ces femmes qui parcourent le Bangladesh à moto pour répandre la parole sur l'émancipation

mardi 9 avril 2019 à 20:37

Un collectif de femmes encourage les femmes par le voyage

Sakia Haque

Sakia Haque et son équipe sont beaucoup plus que des touristes à moto : elles parlent aux filles rencontrées de santé reproductive; des problèmes qui viennent avec l'adolescence et de l'émancipation des femmes. Photos prise dans le district de Sunamganj aimablement communiquée par Sakia Haque, et utilisée avec autorisation.

Selon le rapport 2018 sur les écarts hommes-femmes du Forum économique mondial, le Bangladesh a fait de grandes avancées en matière d'émancipation des femmes. Le pays se classe désormais 48ème — loin devant ses voisins d'Asie du Sud — mais les index ne reflètent pas la condition générale des femmes au Bangladesh, où elles se heurtent souvent à des barrières tant dans le foyer qu'au-dehors.

La société conservatrice et patriarcale de ce pays décourage et dissuade souvent les femmes de sortir seules de la maison, que ce soit pour travailler ou seulement faire un petit trajet à pied. Malgré ces défis, un groupe de femmes bangladaises cofondé par deux médecins, Sakia Haque et Manashi Saha, s'est juré de se rendre (et à moto, avec ça !) dans chacun des 64 districts du pays pour éduquer les jeunes femmes sur leur propre potentiel.

Le périmètre de leur tournée a toujours dépassé la simple visite de lieux. Non contentes de découvrir les attractions naturelles , la culture et les spécialités culinaires de chaque nouveau district, elles ont visité de multiples écoles de filles, offert des conseils médicaux gratuits sur la puberté et la santé reproductive, et parlé des moyens pour les femmes de s'émanciper. Au Bangladesh, parler de “questions de femmes” comme la menstruation et la santé reproductive est considéré comme un tabou — le  Bangladesh n'a toujours pas mis en place d'éducation sexuelle au niveau du lycée — et, résultat, les filles sont nombreuses à subir des problèmes physiologiques qui pourraient, s'il en était autrement, être prévenus ou du moins mieux gérés.

L'équipe propose des activités de sensibilisation aux élèves des écoles de filles. Photo prise dans le district de Jamalpur aimablement communiquée par Haque, utilisée avec autorisation.

L'idée novatrice du Dr Haque a reçu le soutien d'un certain nombre de ses amies, qui ont surnommé l'initiative “Le Bangladesh vu par les femmes”. Si Haque et Saha se sont rendues individuellement dans la totalité des 64 districts, elles finiront de les visiter en équipe dans les prochains mois (elles en ont déjà 57 dans les roues). En abordant divers thèmes et en partageant ses récits de voyage, le groupe s'efforce d'éveiller l'esprit d'aventure des écolières dans l'espoir qu'elles puissent briser les entraves d'une société conservatrice.

Le groupe a aussi créé un site web et une page Facebook, Travelettes Of Bangladesh. 28.000 personnes ont déjà rejoint la page, et le groupe a organisé bon nombre de circuits avec des membres. En passant par Facebook Messenger, Global Voices s'est entretenu avec Sakia Haque sur les pérégrinations du groupe et sa mission d'émancipation des jeunes femmes du Bangladesh.

Global Voices (GV): Comment vous est venue l'idée d'aller dans tous les districts du Bangladesh — et de le faire à moto dans une société aussi conservatrice ?

Sakia Haque (SH): My dream to travel across the country started from early childhood. Back then, there was no opportunity for girls like me. Nobody would accept that a girl from a conservative family would travel alone. I got the opportunity when I came to study in the medical college [Sakia works at the Dhaka Medical College and Hospital, one of the premier hospitals in Bangladesh]. I found that friends used to brag about traveling to foreign countries, [about] how beautiful they were! But I was more interested in traveling around my own country first.

I visited a few foreign countries and saw girls and women riding scooters, going to study or work. But in our country, even a girl riding a bike is seen differently. So I decided that I would do my traveling on a motorcycle.

Sakia Haque (SH): Mon rêve de sillonner le pays a commencé dès ma plus tendre enfance. A l'époque, il n'y avait aucune chance pour des filles comme moi. Personne n'aurait accepté qu'une fille d'une famille conservatrice voyage seule. J'en ai eu la possibilité quand j'ai étudié la médecine [Sakia travaille au Centre hospitalier et universitaire de Dacca, un des meilleurs hôpitaux du Bangladesh). J'ai remarqué que mes amies se vantaient de leurs voyages à l'étranger, comme ils étaient superbes ! Mais cela m'intéressait plus de parcourir d'abord mon propre pays.

Je suis allée dans quelques pays étrangers et j'ai vu des filles et des femmes allant à scooter, pour étudier ou travailler. Mais dans notre pays, même une fille à bicyclette est vue d'un autre œil. J'ai donc décidé de faire mes voyages à scooter.

A quatre sur deux motocyclettes (des scooters), les amies qui ont lancé le projet “Le Bangladesh vu par les femmes” ont déjà visité une grande partie des districts du pays. Photo prise dans le district de Lalmonirhat aimablement communiquée par Haque, utilisée avec autorisation.

GV: Le tourisme se développe dans le pays, et les femmes sont aussi de plus en plus nombreuses à voyager. D'après votre expérience, le Bangladesh est-il un pays où une femme peut circuler en sécurité ?

SH: I would not say that Bangladesh is absolutely safe for women travelers; that any girl can travel anywhere without giving much thought about safety. There are many areas in the country which are still conservative and girls can face challenges. They do not want to accept that a girl is traveling alone, but if she is a little cautious, or can contact a local in advance to gather information, things become easy for her. I started traveling alone from the time I started college. I preferred to stay in other medical college dorms whenever I traveled. Now, I pick the government circuit houses [accommodations for traveling government officials] for overnight stays, as this is safer for woman travelers.

SH: Je n'irais pas jusqu'à dire que le Bangladesh est totalement sûr pour les femmes qui voyagent ou qu'une fille peut aller partout sans crainte pour sa sécurité. Il y a beaucoup de parties du pays qui restent conservatrices et les filles peuvent avoir des problèmes. On refuse d'accepter qu'une fille voyage seule, mais avec un peu de prudence, ou en contactant d'avance quelqu'un du cru pour s'informer, cela facilitera les choses pour elle. J'ai commencé à me voyager seule à l'époque où je suis entrée en premier cycle de l'université. Je préférais rester dans d'autres résidences universitaires à chaque déplacement. Aujourd'hui, je choisis les maisons de circuits gouvernementales [des hébergements pour les fonctionnaires itinérants] pour passer la nuit, c'est plus sûr pour les femmes en voyage.

GV: Quels genres d'obstacles avez-vous rencontrés pendant vos voyages ?

SH: I suffered eve teasing [street harassment] in a few places. I did not care about all that. If I would have bothered, I could not go further.

SH: J'ai subi de l’eve teasing [‘Embêter Eve’, une expression imagée couramment utilisée en Asie du Sud, NdT] dans plusieurs endroits. Je m'en fichais complètement. Si ça m'avait gênée, je n'aurais pas pu continuer.

GV: Partout où vous êtes allées, vous avez visité des écoles et parlé de thèmes comme celui de la santé reproductive. Parlez-nous de cette action.

SH: As a medical professional, I know that many women in our country do not know about reproductive health and hygiene. They think menstruation is a taboo topic. The motto of our Travelettes of Bangladesh group is to achieve the empowerment of women through travel, so we chose to disseminate information about these topics and help local girls to raise their voices, come out of their homes, speak out and see the beauty of our country through their own eyes.

SH: En tant que professionnelle de la médecine, je sais que beaucoup de femmes dans notre pays ignorent tout de la santé et de l'hygiène reproductives. Elles pensent que la menstruation est un sujet tabou. Le message de nos Travelettes of Bangladesh est d'accomplir l'émancipation des femmes par le voyage, alors nous diffusons l'information sur ces sujets et aidons les filles de la région à prendre la parole, à sortir de chez elles, s'exprimer et voir la beauté de notre pays de leurs propres yeux.

GV: Quel genre de retour obtenez-vous à travers le groupe Facebook ?

SH: We started the Facebook group in November 2016 with the goal of encouraging the women of Bangladesh to travel more. We got a lot of responses from women across the country. Girls of different ages want to travel with us and tell us about their challenges. We have already completed several successful tours with interested girls.

In 2017, the Travelettes of Bangladesh organized the country's first travel photography exhibition. We also won the Joy Bangla Youth Award 2019 and were invited by Marina Mahathir [daughter of Malaysian Prime Minister Mahathir Mohammad], to present our works in Malaysia. Our co-founder, Manasi Saha, is traveling to India to participate in the 2019 Global Platform for Women Leadership, at which she will highlight the work of the Travelletes — so we can say that we are getting a great response from both inside and outside the country.

SH: Nous avons démarré le groupe Facebook en novembre 2016 avec l'objectif d'encourager les femmes du Bangladesh à voyager plus. Nous avons reçu énormément de réactions de femmes de tout le pays. Des filles de différents âges veulent voyager avec nous et nous racontent leurs difficultés. Nous avons déjà réalisé plusieurs circuits réussis avec des filles intéressées.

En 2017, les Travelettes of Bangladesh ont organisé la première exposition de photos de voyage. Nous avons aussi obtenu le Prix de la jeunesse Joy Banda 2019 et avons été invitées par Marina Mahathir [fille du premier ministre malaisien Mahathir Mohhamad] à présenter nos travaux en Malaisie. Notre cofondatrice, Manasi Saha, est en Inde pour le Forum mondial 2019 du Leadership féminin, devant lequel elle va présenter le travail des Travelettes. On peut donc dire que nous recevons un très bon accueil tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays.

Sakia Haque veut aller loin, et l'émancipation des femmes n'est pas la seule chose qu'elle espère explorer au long du voyage : elle veut aussi se dévouer au bien-être humain. Vous trouverez ses albums de voyage à travers le Bangladesh ici.

@ActLenguas : Janet Chávez Santiago et l'enseignement du zapotèque, du 8 au 14 avril 2019

mardi 9 avril 2019 à 10:31

Photographie fournie par Janet Chávez.

En 2019, nous avons décidé d'inviter différents hôtes à piloter le compte Twitter @ActLenguas (activisme linguistique) et à partager leur expérience sur la revitalisation et la promotion de leur langue natale. Cette semaine, nous nous sommes entretenus avec Janet Chávez Santiago (@JanChvzSanti).

Rising Voices (RV): Pouvez-vous nous parler de vous ?

Mi nombre es Janet Chávez Santiago y soy originaria de la comunidad zapoteca de Teotitlán Del Valle, Oaxaca, Mexico.

He trabajado una metodología para la enseñanza de zapoteco de la variante de Teotitlán Del Valle (ZTdV) como segunda lengua, así mismo he creado los materiales y enseñado el curso que he llamado “te ganiun dixza xtee Xigie”.

En 2013, en colaboración con la Universidad de Haverford a través de la profesora Brook Danielle Lillehaugen iniciamos el diccionario parlante en zapoteco de Teotitlán Del Valle (Teotitlán Del Valle Talking Dictionary). Para las grabaciones de palabras han participado nativo hablantes del ZTdV.

Je m'appelle Janet Chávez Santiago, je suis originaire de la communauté zapotèque de Teotitlán Del Valle, dans l'État d'Oaxaca, au Mexique.

J'ai développé une méthode d'apprentissage du zapotèque (variante de Teotitlán del Valle, ZTdV) comme seconde langue. J'ai aussi créé les ressources pédagogiques et enseigné le cours, que j'ai intitulé “te ganiun dixza xtee Xigie”.

En 2013, en collaboration avec l'Université de Haverford et Pr. Brook Danielle Lillehaugen, nous avons commencé le dictionnaire parlant du zapotèque de Teotitlán del Valle. Nous avons demandé la participation de locuteurs natifs pour enregistrer les mots.

RV : Quel est l'état actuel de votre langue sur et en dehors d'Internet ?

Poco a poco el zapoteco, no solo de Teotitlán, pero de otras poblaciones en el Valle, está teniendo más presencia en las plataformas digitales como en el caso de los diccionarios parlantes en cuatro variantes del Valle de Tlacolula: http://talkingdictionary.swarthmore.edu/zapotecs/ o a través de proyectos como @VocesValle / #UsaTuVoz, que animan a hablantes a escribir en su lengua usando Twitter cómo plataforma.

Petit à petit, la présence de la langue zapotèque, non seulement de Teotitlán mais aussi d'autres villes de la vallée, augmente sur les plates-formes numériques, comme dans le cas des dictionnaires parlants dans les quatre variantes de la vallée de Tlacolula, ou à travers des projets comme @VocesValle / #UsaTuVoz, qui encourage les locuteurs à écrire dans leur langue sur Twitter

RV : Sur quels sujets allez-vous communiquer sur @ActLenguas ?

En esta semana compartiré información acerca del zapoteco de Teotitlán Del Valle, también visibilizar otros proyectos que están enfocados en la documentación, enseñanza y uso del espacio digital en zapoteco principalmente Del Valle. Así mismo voy a usar este espacio para compartir información acerca de encuentros, conferencias y talleres que se enfocan en la difusión de las lenguas indígenas y de su presencia en el espacio digital.

Cette semaine je parlerai de la variante ZTdV du zapotèque et mettrai en avant d'autres projets centrés sur la documentation, l'enseignement et l'utilisation des espaces numériques en zapotèque (essentiellement ZTdV). Je vais aussi en profiter pour parler de réunions, conférences et ateliers qui se concentrent sur la dissémination des langues autochtones et sur leur présence dans l'espace numérique.

En Inde, les batailles de mots-clics font rage à la veille des élections législatives

lundi 8 avril 2019 à 21:08

Un slogan a provoqué une marée sur les médias sociaux

Copie d'écran du site internet La Nation avec NaMo, qui prétend être la plus importante communauté de bénévoles indiens unie pour soutenir le Premier ministre Narendra Modi.

Sauf mention contraire, les liens de cet article renvoient vers des pages en anglais.

Les élections législatives indiennes de 2019 [fr] approchent à grand pas, et les partis politiques préparent leurs slogans pour attirer les électeurs avant le scrutin (entre le 11 avril et 19 mai). Cette année, les publicités électorales se sont appuyées sur les médias sociaux, menant à une bataille de mots-clics entre le Premier ministre en exercice et ceux qui veulent le déloger.

En 2014, Narenda Modi [fr], à la tête du Bharatiya Janata Parti (BJP) [fr], avait utilisé le slogan “Abki baar Modi sarkaar” [Cette fois-ci, un gouvernement Modi, NdT]. Rahul Gandhi [fr], l'actuel président du Congrès national indien [fr], le parti d'opposition, avait alors qualifié Mr. Modi de “chowkidaar“, qui signifie garde ou gardien en hindi. Aujourd'hui, il va jusqu’à dire “Chowkidaar chor hain“, ce qui se traduit par “le garde est le voleur“. Retournant la référence, le BJP a trouvé son slogan de campagne : “Main bhi chowkidaar” [Gardien moi aussi, NdT].

Ce slogan a généré une vague de réactions sur Twitter et sur des forums de discussion. Les fervents supporteurs du BJP, que l'on appelle les Bhakts, ont donné tout leur soutien au mot-clic, allant jusqu'à produire une ligne de produits dérivés.

Encore une fois, NaMo le gardien ! [NaMo est le diminutif de Narendra Modi]

L'inde montre à nouveau son soutien à NaMo avec les t-shirts Main Bhi Chowkidar ! Commandez le vôtre sur [lien] ou sur l'app NaMo.

Copie d'écran de la page d'accueil Twitter du Premier ministre indien Narendra Modi.

Les politiciens du BJP, qu'ils soient élus ou non, ont changé leur pseudonyme sur Twitter et ajouté le “titre” Chowkidaar avant leur nom. Le compte personnel du Premier Ministre lui-même a été changé en Chowkidaar Narendra Modi. Une vidéo de la campagne montrant plusieurs personnes avec les paroles “Main bhi chowkidaar hun” [Moi aussi, je suis un gardien, NdT] chantées en arrière-plan a été publiée par le BJP : elle a attiré une grande attention et de nombreuses critiques.

Le Premier ministre a partagé le lien vers les points de vente des produits dérivés. Il est intéressant de noter que ceux-ci s'en tiennent à la couleur safran et son slogan imprimé, consacrant ainsi encore l'image du parti comme celui du Parti safran.

Les Bhakts de Narendra Modi ont afflué dans ses campagnes et les rassemblements de 2019. Un rassemblement similaire à qui se fait pendant les campagnes présidentielles aux États-Unis (avec des écrans géants, des bannières portant des slogans et un public portant les produits dérivés) a semblé être le point d'orgue de la campagne du BJP.

L'Inde s'unit et affirme d'une seule voix Main Bhi Chowkidaar.
Un grand merci à tous ceux qui ont pris part au programme dans toute l'Inde !
Vos bénédictions et votre affection sont une source d'une immense force.

À Mumbai, un rally automobile a été organisé dans le cadre de la campagne du BJP, et ses participants ont revêtu les t-shirts safran. Le Premier ministre a tenu des vidéoconférences pour les programmes de ses discours.

Il y a des centaines de milliers de chowkidaars dans toute l'Inde.
Trouvez ici votre rassemblement #MainBhiChowkidar le plus proche.
À ce soir !

Le mot-clic de campagne du BPJ a aussi provoqué de fortes critiques. Le parti du Congrès a lancé son propre slogan électoral : “Main bhi berozgar” [Chômeur moi aussi, NdT] pour moquer celui du BJP, et l'Aile jeunesse du Congres a introduit le mot-clic correspondant #MainBhiBerozgar. Certains responsables du parti ont suivi et changé leur pseudonyme sur Twitter.

Retournant toute la campagne du BJP, le parti du Congrès a changé tous ses slogans sauf un : “Chowkidar chor hain” [le gardien est le voleur, NdT]. Pendant un récent match de cricket de première ligue indienne au Rajasthan, une partie de la foule s'est mise à scander le slogan, comme le montre cette vidéo devenue virale. Ça n'en a pas surpris beaucoup, car le Ministre actuel de l’État du Rajasthan est au Parti du Congrès.

On a vendu la mèche
du bruit au milieu d'un match…

Le gardien est le voleur…!

Pour le 1er avril, le Congrès a sorti deux nouveaux mots-clics : #ModiMatBanao et #ModiDiwas, qui se traduisent par “Ne faites pas de nous des Modi” et “la Journée Modi”.

Regardez bien vos gardes
Ceux qui viennent avec leur propre collection d'oppression

Où sont les 20 millions d'emplois ?
Les doubles revenus ? Et ou sont les 1,5 millions dans chaque compte en banque ?

Ils nous disent seulement quoi dire et quoi manger
Nous répondons C'est assez, ne faites pas de nous des Modi

Une autre technique utilisée par les deux partis est de donner des candidatures à des célébrités de la télévision et du cinéma. C'est l'une des stratégies les plus vieilles de la politique indienne et cette fois aussi, tous parient dessus.

Les candidats des partis ont commencé à remplir les nominations pour les circonscriptions du pays.

Pendant de temps, d'autres ont critiqué cette tactique, des comédiens ont disséqué le slogan du BJP et des articles sont parus demandant si le parti tout entier est digne d’être qualifié de gardien du pays. Des comiques se sont fait entendre haut et fort  dans leurs critiques du parti au pouvoir et continuent avec le même enthousiasme depuis que les campagnes de 2019 battent leur plein.

Hasan voulait prendre le temps de répondre à la question de savoir si oui ou non, Patriot Act utilise des rires préenregistrés.

D'ici que M. Modi se mette à vendre des tickets sur bookmyshow pour ses rassemblements électoraux, ce n'est qu'une question de temps…

Ce drame sera finalement mis à l'épreuve du 11 avril au 19 mai 2019, quand la plus grande démocratie du monde se rendra aux urnes.

Au Maroc, le mouvement Hirak ne fait plus parler de lui mais la répression des médias indépendants continue

lundi 8 avril 2019 à 13:37

Les journalistes parlant des manifestations restent derrière les barreaux.

Une manifestation à Al Hoceima dans le Rif pendant l'été 2017. Photo : Mohamed Mouha via Wikimedia (CC BY-SA 4.0)

Le présent article est le second d'une série de deux sur la répression des médias et les “fake news” au Maroc. Il a été écrit en collaboration avec Access Now. La première partie se trouve ici.

Le mouvement contestataire Hirak a commencé à gagner du terrain après la mort de Mohsin Fekri, un vendeur de poissons dont la marchandise avait été confisquée par la police à Al Hoceima le 29 octobre 2016. Quand le jeune homme avait tenté de récupérer son poisson, il avait été happé par la benne d'un camion de ramassage d'ordures.

Les manifestations hebdomadaires de protestation contre la stagnation socio-économique et les fonctionnaires corrompus dans la région du Rif, longtemps négligée par le gouvernement central, étaient persistantes jusqu'à ce que les autorités lancent une violente répression en juin 2017, avec l'arrestation de plus de 400 activistes et manifestants.

Le mouvement déclencha aussi un retour de bâton pour les journalistes indépendants et tous ceux qui entendaient documenter la contestation et la répression qui l'a suivie. Au moins sept journalistes indépendants furent arrêtés pendant qu'ils suivaient les manifestations. Selon le Comité pour la protection des journalistes, trois sont encore derrière les barreaux pour leur couverture du Hirak.

Hamid El Mahdaoui, qui dirigeait le site d'information Badil.info avant d'être arrêté, purge une peine de trois ans d'emprisonnement après avoir été reconnu coupable par la Cour d'appel de Casablanca en juin 2018 de “défaut de signalement d'un crime mettant en danger la sécurité nationale’’, en raison d'une conversation téléphonique (dont un enregistrement officiel a été obtenu par une mise sur écoute) entre lui-même et un militant antimonarchiste installé aux Pays-Bas, au cours de laquelle le militant détaillait un plan pour introduire des armes dans le pays.

El Mahdaoui parle dans une vidéo sur la répression des protestataires à El Hoceima. Source : Arrêt sur image d'une vidéo téléversée sur la chaîne YouTube du journaliste le 28 juin 2017.

El Mahdaoui avait déjà passé un an en prison après une condamnation pour “incitation” à manifester. Il a été arrêté le 20 juillet 2017 dans la ville d'Al-Hoceima où il était venu couvrir les manifestations du Hirak.

Le journaliste citoyen Mohamed El Asrihi, rédacteur en chef et directeur de Rif24.com, un site web de média citoyen local qui a fourni une couverture extensive des manifestations à Al Hoceima et dans d'autres villes, purge cinq années de prison. Le même tribunal l'a reconnu coupable en juin 2018 d’ “atteinte à la sécurité interne du Maroc par la réception de dons et de financements pour des activités et de la propagande mettant en danger l'unité et la souveraineté du Royaume du Maroc et la loyauté de ses citoyens”, ainsi que de “participation à des manifestations non autorisées”, “provocation contre l'unité du royaume”, “injures contre des agents publics”, et “usurpation de la qualité de journaliste sans détenir l'accréditation nécessaire”.

Les journalistes qui n'obtiennent pas l'accréditation la “carte de journaliste professionnel” délivrée par le Conseil national de la presse, qui supervise le secteur d'activité ne bénéficient pas des mêmes protections que ceux qui sont reconnus “journalistes professionnels”. Pour obtenir l'accréditation, les journalistes doivent avoir un diplôme universitaire. Le journalisme doit être leur profession première et leur principale source de revenus, et ils doivent avoir un casier judiciaire vierge. La carte doit être renouvelée chaque année. Des conditions qui excluent les journalistes citoyens qui peuvent ne pas pratiquer le journalisme comme source de revenus, ainsi que ceux qui ne sont pas diplômés ou n'ont pas fréquenté l'université.

Mais même pour les journalistes considérés comme “professionnels”, les protections juridiques sont limitées. Si en 2016, le parlement marocain a adopté un nouveau code de la presse qui éliminait des peines d'emprisonnement, les journalistes et les médias risquent toujours des amendes en cas de “diffamation” de ministres du gouvernement (article 81), de diplomates étrangers (article 82), d'institutions étatiques et agents publics (article 84). En outre, les journalistes continuent à être poursuivis et emprisonnés en application du code pénal qui contient des dispositions punissant de prison et/ou d'amendes ceux reconnus coupables de “nuire” à l'Islam, à la monarchie, ou d'incitation à des activités allant à l'encontre de l'intégrité territoriale du pays.

Tout ce dispositif rend la tâche difficile aux médias indépendants pour contrer les campagnes endémiques de désinformation, en particulier celles qui ciblent les personnes menacées à cause de leur militantisme et de leur travail d'information sur le Hirak et d'autres événements qui comptent pour le public.

Les élections législatives indiennes, une étude de cas sur la désinformation ?

dimanche 7 avril 2019 à 20:54

Les initiatives de vérification ne résolvent pas le probleme

Practices in India: Sending daily religious quotes in Hindi language through WhatsApp. Image from Flickr by Lau Ray.

Pratiques indiennes : l'envoi quotidien de citations religieuses en hindi sur WhatsApp. Photographie par Lau Ray sur Flickr (CC BY-NC 2.0).

Sauf mention contraire, les liens de cet article renvoient vers des pages en anglais.

Alors que les élections législatives indiennes approchent et que la désinformation numérique se propage sur de multiples plates-formes du pays, la démocratie indienne pourrait bien arriver à un point d'inflexion.

En 2018, des lynchages déclenchés par l'infox propagée sur WhatsApp ont provoqué la mort de plus de trente personnes [fr]. Dans les premiers mois de 2019, des statistiques falsifiées sur le conflit indo-pakistanais se sont répandues sur de nombreuses plates-formes, conduisant à des attaques, à travers tout le pays, sur des étudiants cachemiris.

Dans un effort hautement médiatisé, le gouvernement indien mené par le Bharatiya Janata Party (BJP) [fr], a voulu contrer ces tendances et mettre la pression sur les grandes entreprises technologiques (essentiellement Facebook et Twitter) pour que celles-ci s'attaquent à l'infox et empêchent la diffusion d'informations qui pourraient aboutir à des interférences électorales.

Mais les experts ont conclu qu'un grand nombre des campagnes de désinformation les plus insidieuses proviennent des partis politiques eux-mêmes et que leurs cellules de communication sur les médias sociaux s'attaquent aux journalistes et aux militants. De plus, les efforts de vérification organisés par Facebook ont produit des résultats partagés, et dans certains cas, néfastes.

Avec neuf cents millions d'électeurs enregistrés dans les vingt-neuf États du pays (les élections commenceront le 11 avril 2019) et une tension politique et sociale croissante sous la direction du Premier ministre en exercice Narendra Modi [fr], l'enjeu est énorme pour la troisième économie d'Asie. Les citoyens indiens auront besoin de trouver des sources d'information sur Internet fiables et sur lesquelles ils peuvent compter pour exercer leur choix dans l'isoloir. Mais c'est plus facile à dire qu'à faire…

Vérification des informations sur Facebook

À la suite d'une série d'allégations et d'accusations concernant la diffusion de fausses informations sur Facebook et WhatsApp (qui appartient à Facebook), la maison-mère s'est associée à plusieurs plates-formes d'informations locales pour contrer l'infox avant les plus grandes élections démocratiques de la planète.

Pour reconnaître et agir contre les différents types de désinformation, l'entreprise a ainsi identifié des médias certifiés par des programmes indépendants de vérification des faits. Parmi ces médias se trouvent India Today, Vishvas News, Newsmobile et Fact Crescendo, et auparavant Boom et l’Agence France Presse (AFP) [fr]. Cette coalition a affirmé qu'elle examinerait et classerait les histoires sur une échelle de désinformation dans plusieurs langues locales dont le hindi, le bengali, l'ourdou, le télougou, le malayalam et le marathi.

Le 11 février 2016, Manish Puri, l'ancien responsable du partenariat India News chez Facebook, déclarait à Reuters :

We are committed to fighting the spread of false news on Facebook, especially ahead of the 2019 General Election campaign season. And one way to do that is by growing our partnership with third-party fact-checkers. We now have seven partners across the country covering six languages, who will review and rate the accuracy of stories on Facebook.

Nous nous engageons à combattre la diffusion de fausses informations sur Facebook, tout particulièrement à l'approche de la campagne des élections législatives. Et l'une des façons d'y parvenir est d’accroître notre partenariat avec des vérificateurs de faits indépendants. Nous avons maintenant sept partenaires dans tout le pays, couvrant six langues, qui examineront et classeront les histoires sur Facebook.

Pourtant, après l'attaque terroriste [fr] du 14 février au Cachemire qui a fait quarante victimes, il s'est avéré que certains partenaires de Facebook ont publié des informations non vérifiées.

Dainik Jagran, Newsmobile et India Today ont tous les trois mal rapporté les événements et diffusé des informations déformées alors que l'Inde et le Pakistan en venaient à une confrontation militaire près de la ville pakistanaise de Balakot.

La plate-forme de vérification indépendante AltNews (qui ne participe pas au programme de partenariat de Facebook) a ainsi rapporté que India Today avait publié quatre articles non vérifiés sur l'attaque de Pulwana et les frappes aériennes de Balakot. Le même groupe a également signalé que Dainik Jagran et Newsmobile avaient partagé des informations non vérifiées.

Les raisons qui ont mené les partenaires de Facebook pour la vérification des faits à diffuser ces rapports non vérifiés ne sont pas claires. Comme beaucoup, ils ont pu être pris de court par le chaos numérique qui a fait suite aux attaques et dans lequel la désinformation a atteint un record historique.

AltNews a expliqué que bien que l'initiative de ce partenariat ait semblé pleine de bonnes intentions, les résultats de leur travail a finalement contribué au problème :

With a booming industry of misinformation on Facebook, the platform partnering with fact-checking websites is appreciated. However, when such partners are found to be contributors to misinformation, the question arises – is Facebook sincere in its efforts to curb fake news?

Dans l'industrie en plein boom de la désinformation sur Facebook, il est appréciable que celui-ci s'allie avec des sites de vérification des faits. Cependant, quand il s’avère que de tels partenaires contribuent à la désinformation, on peut poser la question : les efforts de Facebook pour juguler l'infox sont-ils sincères ?

La question posée par AltNews n'est pas nouvelle dans le monde de la vérification des faits. Dans un entretien avec The Guardian, l'ancienne éditrice en chef du site américain de vérification Snopes, Broke Binkowski, explique que le partenariat entre Facebook et Snopes s'est écroulé quand ce dernier s'est mis à douter des intentions de Facebook.

“Ils [Facebook] nous ont surtout utilisé pour jouer un rôle de relations publiques en situation de crise”, affirme-t-elle. “Ils ne prennent rien au sérieux. Ils veulent davantage se donner bonne figure et refiler la responsabilité… Ils n'en ont clairement rien à faire.”

Et WhatsApp ?

Facebook a aussi fait des effort pour contrer la diffusion de l'infox sur WhatsApp, dont les Indiens forment la majorité de son marché : sur 1,5 milliard d'usagers de WhatsApp dans le monde, deux cent millions sont en Inde. Des foules enragées ont tué plus de vingt personnes accusées d'enlever des enfants ou de trafiquer du bétail dans des messages viraux diffusés sur WhatsApp dans différents États dont le Rajasthan et le Maharashtra.

Mapping reports of Whatsapp instigated lynchings in India till July 2018.

Cartographie des lynchages incités par WhatsApp en Inde jusqu'en juillet 2018. Légende : hachures, attaques n'ayant pas provoqué de morts; jaune, au moins un lynchage; rouge: plus d'un lynchage. Image par Adondai sur Wikipedia. CC BY-SA 4.0.

Limiter la diffusion de telles rumeurs est plus compliqué sur WhatsApp que sur Facebook puisque le contenu de tous les messages envoyés sur WhatsApp est crypté et par conséquent, impossible à lire pour l'entreprise.

En réponse à la pression exercée par le gouvernement indien, l'entreprise a effectué une modification technique à l'application, réduisant à cinq le nombre d'usagers à qui on peut faire suivre un message. Auparavant, les utilisateurs pouvaient faire suivre n'importe quel message jusqu’à vingt fois. Cette mise à jour a d'abord été déployée en Inde avant d’être étendue au reste du monde.

Si des modifications techniques peuvent quelque peu contribuer à réduire le flux d'infox, une campagne de désinformation correctement financée et professionnelle trouvera sans doute le moyen de contourner ce problème. Dans le cas de l'Inde, où beaucoup affirment que les politiques des partis et la manipulation politique sont les moteurs de la militarisation de WhatsApp, de simples ajustements techniques ne seront sans doute pas suffisants.

Lire aussi : La recrudescence des lynchages en Inde attribuée à WhatsApp par le pouvoir et aux manigances politiciennes par les Indiens

D’après une enquête menée par l'organisation à but non lucratif Internet and Mobile Association of India et le portail de journalisme de données Factly, seuls 2,7 % des Indiens croient ce qu'ils lisent sur les médias sociaux, et la plupart se fient aux médias d'information, dont les journaux.

Bien que l'infox soit un énorme problème en Inde et en Asie du Sud, de nombreuses plates-formes ajoutent au chaos ambiant en répétant des récits non vérifiés qui attirent l'attention sur les médias sociaux. Par ailleurs, le classement de l'Inde sur la liberté de la presse empire, et les journalistes comme les organisations de la société civile font face à des attaques sur les réseaux sociaux et des restrictions dans leur travail sous forme de réglementations qui limitent leur capacité à rapporter des informations et travailler dans l’intérêt du public.

Pendant qu'ils observent la confrontation qui se joue entre le Premier ministre actuel Narendra Modi et le chef du Congrès national indien Rahul Gandhi, les Indiens sont aussi aux prises d'un environnement de l'information de plus en plus complexe et dans lequel il est difficile de trouver et de reconnaître les informations fiables.

Au niveau mondial, ces développements contribuent eux aussi au déclin de la protection des médias et de la société civile dans le pays. Selon l'alliance internationale CIVICUS Monitor, l'Inde fait maintenant partie des pays de la catégorie “entravée”, aux côtés du Brésil, du Kenya, du Maroc et d'autres pays présentant un bilan mitigé dans ce domaine. Le Venezuela, la Turquie, l'Arabie Saoudite et l'Iran sont un niveau en-dessous dans la catégorie “bloquée”.

Copie d'écran du site internet de Civicus Monitor montrant l'état des libertés au sein des sociétés civiles dans tous les pays du monde.

Leur rapport souligne la façon dont les campagnes de désinformation et les régimes autoritaires ciblent les manifestations de la société civile et le militantisme dans le monde entier, problème dont l'infox fait partie intégrante. Les prochaines élections indiennes pourraient devenir une étude de cas sur ce sujet en développement rapide.