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Instantanés culturels n° 4 : Orthodoxie

mardi 31 octobre 2017 à 20:30

Articles courts sur le cadrage des informations culturelles dans les médias, en petites doses.

Dans ce nouvel épisode de nos Instantanés culturels, nous élargissons nos horizons pour mettre le cap sur la Russie et ses médias. Nous nous sommes demandé comment l’orthodoxie, ou christianisme orthodoxe, religion traditionnelle de la majorité des citoyens russes, était couverte par les principaux médias du pays.

L'orthodoxie, c'est… du cinéma?

Quand on étudie les différents articles sur l’orthodoxie dans un échantillon de médias traditionnels russes au mois de septembre, il est difficile de passer à côté d'une légère obsession dans l'actualité :

Un échantillon des termes les plus fréquents dans 1572 articles contenant des mots en lien avec “orthodoxie” (православ*). Parmi ceux qui reviennent le plus souvent, on trouve “Matilda” (матильда), “film”(фильма) ou “cinémas” (кинотеатров), ainsi que les personnalités impliquées dans la controverse : la députée “наталья” “поклонская” (Natalia Poklonskaya, la plus fervemment opposée au film) et “учитель” (Outchitel, le nom du réalisateur). Source: Media Cloud. (Agrandir l'image)

Les termes les plus fréquents —Matilda (матильда), églises (церкви), film (фильма)— dans notre échantillon renvoient à la controverse que suscite actuellement la sortie du film “Matilda“. Le film raconte la liaison entre le jeune héritier du trône russe, le dernier tsar Nicolas II, et Mathilde Kschessinska, ballerine de la troupe impériale.

Bien que peu de gens aient réellement vu le film, dont la sortie est prévue le 25 octobre, celui-ci est déjà au cœur d'une grande controverse. Le problème ? Nicolas II est un saint canonisé par l'Église Orthodoxe. Certaines personnes, parmi lesquelles la députée Natalia Poklonskaya, affirment que le film est une offense à la mémoire du saint et que par conséquent, “il insulte les sentiments religieux des croyants”, ce qui constitue un délit pour la loi russe.

L'orthodoxie a le goût de la controverse, du moins dans les actualités

Pour avoir un panorama plus large de la manière dont les médias parlent de l'orthodoxie, nous avons élargi notre champ de recherche pour inclure les articles de ces six derniers mois.

Termes les plus fréquents dans un échantillon de 9028 articles contenant des mots en lien avec “orthodoxie” (православ*). Parmi les termes surlignés, on trouve “Matilda” (матильда), “activistes” (активисты), “sentiments” (чувства), “croyants” (верующих), entre autres. Source: Media Cloud. (Agrandir l'image)

Matilda est aussi le sujet le plus important sur cette période. Cependant, d'autres thèmes ont retenu notre attention.

Dans le nuage de mots, les termes-clés les plus significatifs sont activistes (активисты), sentiments (чувства) et croyants (верующих). Pourquoi? Puisque faire offense aux sentiments religieux des croyants est considéré comme un délit, les activistes orthodoxes sont souvent présents dans les actualités, afin de défendre la chrétienté et même la moralité générale des ruses de ceux qui y portent atteinte : en particulier, les artistes et les blogueurs.

Par exemple, depuis le 3 mars 2017 se tient le procès de Ruslan Sokolovsky à Iékaterinbourg. L'État a intenté des poursuites contre Sokolovsky suite à la publication d'une vidéo de lui où on le voit jouer à Pokemon Go dans l'Église de Tous-les-Saints, à Iékaterinbourg, le 11 août 2016. Global Voices a écrit un article à ce sujet. L'enquête s'est fondée sur le témoignage d'un blogueur et activiste orthodoxe de la ville.

Ou alors, prenons l'exemple du transfert (передачи) très controversé de la Cathédrale (собор) Saint-Isaac de Saint-Pétersbourg, aujourd'hui un musée, pour qu'elle soit restituée à l'Église orthodoxe russe, avec d'autres églises à travers le pays qui ont souvent servi de bureau ou de magasin à l'époque soviétique. “L'Opération Saint-Isaac”, comme l'a baptisée un média russe, a fait se déchaîner un débat houleux dans la ville, provoquant à la fois des manifestations de rue contre le transfert et des processions sacrées en sa faveur.

Si l'orthodoxie russe était le principal objet de notre enquête, les mots Ukraine et Ukrainien (украинской) sont également apparus dans plusieurs articles. C'est tout à fait logique, la religion orthodoxe étant elle aussi majoritaire en Ukraine. L'autorité exercée sur la population orthodoxe est également venue alimenter le conflit récent entre les deux pays.

  • Une Croisade contre l'orthodoxie russe («Крестовый поход» против русского православия)
    Iz.ru, 18 mars 2017
    “Kiev cherche à faire disparaître toutes les églises orthodoxes russes du pays. Aujourd'hui, les parlementaires ukrainiens s'apprêtent à voter la loi dite “loi religieuse”. Celle-ci limite l'activité de l'Église orthodoxe ukrainienne du Patriarcat de Moscou… Kiev a décidé de prendre le contrôle de la vie spirituelle des Ukrainiens”.

Instants de répit : les heures douces et paisibles de l'orthodoxie

Si la plupart des résultats tirés des articles font la part belle à la controverse, on a vu apparaître d'autres sujets en rapport avec l'orthodoxie, aussi bien en Russie qu'en Ukraine.

Les Fêtes de Pâques (пасхи et праздник) ont aussi fait débat dans les médias, autour de la question de la foi personnelle et des activités de bienfaisance, comme on l'a vu dans le message pascal du patriarche Cyrille. On compte parmi ces pratiques la vénération et le respect des lieux saints ou des “reliques sacrées” (святыниpar des milliers de personnes.

  • Les reliques de la Bonne Volonté (Мощи доброй воли)
    Novaya Gazeta, 22 mai 2017
    “Le 21 mai, les reliques de Nicolas le Thaumaturge, ou, ainsi qu'il convient de le nommer, le Saint Hiérarque Nicolas, évêque de Myre, l'un des saints les plus populaires de notre pays, sont arrivées dans la capitale de la Russie en provenance de la ville italienne de Bari.
    Les autorités de la capitale se préparent à l'arrivée d'un flot de fidèles et prévoient de la nourriture bon marché pour ceux qui feront la queue [pour voir les reliques]. Au moins 10000 bénévoles seront mis à contribution sur le terrain. 20000 agents de police seront déployés pour assurer la sécurité de tous“.

Toutefois, dans la couverture des actualités russes, le spectre des “croyants offensés” n'est jamais loin, comme en témoigne la pétition lancée en juillet par la députée Poklonskaya, qui a recueilli 100000 signatures, pour empêcher le film “Matilda” ne serait-ce que d'arriver sur les écrans.

Il semblerait que lorsque les médias russes traditionnels parlent d'orthodoxie, le terme soit le plus souvent en rapport avec les politiques réactionnaires et les controverses. Cependant, d'autres angles sont encore à explorer, en particulier ceux qui ont trait aux divers aspects culturels d'une religion qui revendique 150 millions de fidèles. Nous espérons vous avoir donné envie d'aller plus loin.

Ci-dessous, une sélection d'articles publiés par Global Voices. Bonne lecture !

Le fils d'un milliardaire indien “réside” dans un immeuble modeste de Macédoine

mardi 31 octobre 2017 à 20:16

Captures d'écran de l'émission d'investigation “Kod avec Snezhana Lupevska Sozen” sur les logements de Sushanto Roy en Macédoine, montrant la première maison (en haut à gauche) et l'appartement actuel. Utilisées avec autorisation.

Aussi surprenant que cela puisse paraître pour la haute société indienne, un des leurs possède une adresse officielle dans un modeste bâtiment post-communiste de Macédoine.

Pour localiser l'adresse de Sushanto Roy, fils du milliardaire indien Subrata Roy, et passé entre 2016 et 2017 d'un quartier huppé à un appartement discret dans un quartier ouvrier, la consultation du registre électoral macédonien a été déterminante.

La résidence de Sushanto Roy (et sa présence ou non dans cet appartement) ont soulevé un certain nombre de questions concernant les relations du VMRO-DPMNE, l'ancien parti au pouvoir en Macédoine, avec la famille Roy et sur les rapports éventuels de ces liens avec la corruption gouvernementale.

Le registre électoral révèle la surprenante nouvelle adresse de Sushanto Roy

L'un des piliers de la campagne électorale 2017 menée par l'ex-parti au pouvoir VMRO-DPMNE fut la propagation d'informations alarmistes concernant les migrants et l'incitation à l’homophobie. L'émission d'investigation “Kod so Snezhana Lupevska Sozen” (“Code avec Snezhana Lupevska Sozen”) a mené l'enquête sur l'attribution de la nationalité macédonienne aux étrangers durant le règne du VMRO-DPMNE.

Il s'est avéré que, contrairement à sa rhétorique présentant les individus du Moyen-Orient comme dangereux, durant la dernière décennie, un grand nombre de personnes de cette région ont bénéficié d'une procédure accélérée pour obtenir la nationalité en tant qu'”investisseurs”. Par exemple, Reza Zarrab alias Rıza Sarraf, un homme d'affaire iranien résidant en fait en Turquie et qui fut arrêté aux États-Unis en 2016 pour suspicion de blanchiment d'argent lié à la violation de l'embargo avec l'Iran, a obtenu la citoyenneté macédonienne.

“Kod” a aussi enquêté sur la famille de Subrata Roy, un milliardaire indien controversé qui fut un partenaire du précédent gouvernement. Les journalistes de l'émission ont utilisé les données du registre électoral, qui a été rendu public avant les élections locales, pour trouver l'adresse actuelle de Sushanto Roy. Après avoir habité une villa somptueuse d'un quartier huppé, son adresse officielle est maintenant un appartement quelque peu vétuste situé dans une zone bien moins agréable, en bordure de la ville.

La vidéo ci-dessous (en macédonien), issue de l'émission, montre la première et l'actuelle résidences de Roy.

Les journalistes d'investigation ont visité l'appartement, situé dans le morne pâté de maisons baptisé “le bâtiment-boîte de conserve” et construit après le tremblement de terre de 1964. Ils y ont rencontré le propriétaire, un vieil homme du coin qui n'a pas voulu s'exprimer devant la caméra. Il a expliqué que les membres de la famille du milliardaire indien sont en effet les anciens occupants de son appartement. Le propriétaire a ensuite admis que ses proches travaillaient dans l'une des entreprises de Subrata Roy en Macédoine et qu'on lui avait demandé de “louer” l'appartement [sans doute en contrepartie de l'emploi offert].

Certains citoyens habitant dans l'ancien quartier de Roy ont feint leur déception suite à son “déménagement”, et ont fait mine de fustiger le responsable de “Kod”, Snezhana Lupevska Sozen, pour avoir fait “éclater leur bulle”.

Sushanto Roy n'est plus mon voisin. :( C'est dommage, nous n'irons plus acheter le pain et le lait [au magasin d'à côté] ensemble. :((( Merci Lupevska.

Brève et triste histoire de l'implication de Subrata Roy en Macédoine

En 2012, le gouvernement de la République de Macédoine met en place un programme économique cherchant à attirer les investissements étrangers. Il présente le milliardaire indien Subrata Roy comme une sorte de “sauveur” qui apporte des centaines de millions d'euros dans le pays. Il était prévu qu'il reçoive — en guise de subvention — une partie du parc national de Galichica pour y construire un gigantesque complexe-casino sur le lac Ohrid qui devait notamment inclure un “aéroport sur l'eau” ainsi que d'immenses parcelles de terrain dans l'Est de la Macédoine pour construire une ferme de 20 000 vaches.

A l'époque, seuls quelques médias indépendants avaient prêté attention au fait que Subrata Roy était visé par une enquête pour fraude massive dans son pays d'origine. Entre-temps, afin de montrer leur bonne volonté, la compagnie de Roy, Sahara, le gouvernement macédonien et les médias — sous contrôle gouvernemental — ont mené une grande campagne de relations publiques pour promouvoir l'entreprise de Subrata Roy. La campagne de relations publiques a notamment organisé un événement appelé Sahara Balkan Peace Festival, avec des animateurs bollywoodiens, ainsi qu'une participation de l'ancien Premier Ministre britannique Tony Blair.

M. Roy a aussi annoncé qu'il allait financer la construction d'un monument en hommage à Mère Teresa (1910-1997), née à Skopje, qu'il a rencontrée à Calcutta et avec laquelle il dit avoir sympathisé. Le gouvernement a célébré cette décision en érigeant un monument sous la forme d'une plaque mémoriale en marbre pour commémorer l'annonce du futur monument. Le site était l'un des rares espaces verts subsistant près de la place centrprincipale.

Le Premier Ministre de l'époque Nikola Gruevski et Subrata Roy dévoilant une plaque pour le monument à venir, le 23 janvier 2013. Photo du Gouvernement de la République de Macédoine.

Comme dans de nombreux autres pays, la loi macédonienne autorise le gouvernement à accorder la citoyenneté aux personnes présentant un “intérêt national scientifique, économique, culturel, sportif ou autre” (Loi sur la citoyenneté), c'est-à-dire qui investissent 400 000 euros et emploient au moins 10 personnes. En 2014, les journalistes indépendants on révélé que plusieurs membres de la famille de Subrata Roy, dont sa femme Swapna et ses deux fils Sushanto et Seemanto, étaient devenus citoyens macédoniens.

Leur adresse officielle était une villa qu'ils louaient dans le quartier opulent de Bardovci. Début 2016, alors que des citoyens se rassemblaient pour se débarrasser des “fantômes” du registre électoral, son nom a encore une fois fait surface.

Tweet  : Sushanto Roy, Sushanto Roy de Bardovci. #Tous sur la liste
Image : Capture d'écran de la version en ligne du registre électoral donnant les informations suivantes : nom, prénom, adresse et bureau de vote.

La fin de l'héritage de Subrata Roy en Macédoine

En 2014, les autorités indiennes ont finalement arrêté et incarcéré Subrata Roy pour fraude et dettes. En Macédoine, certains ont fait l'hypothèse selon laquelle l'octroi de la citoyenneté avait pour but de parer à de possibles demandes d'extradition de la part de l'Inde.

Manifestement, le jeune M. Roy ne semble pas avoir passé beaucoup de temps en Macédoine. En octobre 2016, le Ministère de l'agriculture a entamé une action en justice contre lui pour ne pas avoir payé de bail pour le terrain mis de côté pour l'exploitation de bétail qu'il avait promise. Certains utilisateurs des médias sociaux ont utilisé la similarité du nom Sushanto avec une expression locale liée au mensonge (“sushu-lazhe”, litéralement “sèche-ment”, l'idée étant que le mensonge est si intense qu'il provoque la sécheresse) pour faire des commentaires sur cette affaire.

Le Ministère de l'agriculture attaque Sushanto Roy en justice pour défaut de paiement de loyer. Pourquoi seulement lui ? Ceux qui l'ont fait venir sont de plus grands “sushantoes”.

Le procès contre le jeune Roy n'a pas entamé ses droits citoyens ; avant les élections générales qui ont eu lieu en décembre, les utilisateurs de Twitter se sont alarmés du fait que ce Macédonien naturalisé ait le droit de vote.

Sushanto et Swapna Roy, un des fils et l'épouse de Subrata Roy, sont inscrits comme électeurs dans la municipalité de Karposh, localité de Bardovci, bureau de vote 2653/1.

En fait, aucun des investissements promis par la famille Roy en Macédoine ne se sont matérialisés. Leur compagnie, Sahara, a acheté un hôtel à Ohrid sans introduire le moindre argent dans le pays. La famille a contracté un emprunt dans une banque locale possédée par l'un des membres les plus hauts placés du parti au pouvoir. Alors que l'entreprise échouait, la banque a pris le contrôle de l'hôtel. Pour beaucoup d'observateurs, cela a confirmé l'impression que le rôle de Roy dans toute cette supercherie était de servir de couverture au blanchiment de l'argent possédé par les membres du gouvernement VMRO-DPMNE.

Le gouvernement VMRO-DPMNE a ensuite annoncé qu'il allait utiliser environ 6 millions d'euros des contribuables macédoniens pour construire le nouveau monument, promis par Roy, en mémoire à Mère Teresa. Il est encore en construction dans le centre de Skopje, et il est, de par sa hauteur, conçu pour rivaliser avec la statue d'Alexandre le Grand qui se trouve non loin.

Chantier de construction du nouveau monument à Mère Teresa (au milieu) sur la place principale de Skopje, en Macédoine. Photo par GV, CC BY.

Petre Shilegov, le maire de Skopje qui a emporté les élections du 15 octobre comme représentant de l'ancien parti d'opposition SDSM, a annoncé que la construction du monument allait être stoppée, tout comme celle d'autres édifices qui avaient été planifiés par le précédent gouvernement VMRO-DPMNE dans le cadre du plan Skopje 2014.

L'agression au couteau d'une journaliste russe rallume un “climat de haine” dans les média

mardi 31 octobre 2017 à 14:07

Tatiana Felgengauer (à gauche) et l'humoriste politique Victor Chenderovitch (à droite) à une manifestation de l'opposition à Moscou en octobre 2013. Crédit : Vladimir Varfolomeev, Flickr // CC BY-NC 2.0

Cet article a été mis à jour et publié originellement en anglais le 24 octobre 2017, pour tenir compte des derniers développements de l'affaire.

Lundi 23 octobre à midi, la présentatrice radio et rédactrice en chef adjointe d'Ekho Moskvy (Echo de Moscou), a été poignardée à la gorge dans les locaux de la radio au centre de Moscou.

Mme Felgengauer a été hospitalisée et placée sous coma artificiel, et son état déclaré “grave mais stabilisé”.  Son assaillant, qui a agi seul, identifié comme le ressortissant israélien Boris Grits, a été appréhendé par le personnel de sécurité de l'immeuble, arrêté par la police et poursuivi pour tentative de meurtre.

La presse russe a publié des photos de la scène du crime, avec la salle du personnel d'Echo de Moscou éclaboussée du sang de Mme Felgengauer :

“Il savait qui il cherchait” : un homme muni d'un couteau a attaqué la présentatrice d'Echo de Moscou.

Le rédacteur en chef d'Echo de Moscou Alexeï Venediktov a annoncé la nouvelle en ces termes :

Un homme a fait irruption dans les locaux d'Echo de Moscou et a poignardé la présentatrice Tatiana Felgengauer au cou. L'homme a été appréhendé. Tatiana a été hospitalisée, elle est sous perfusion.

Le lendemain, Tatiana Felgengauer reprenait connaissance et paraissait avoir bon moral, écrivant même un mot pour ses collègues et sympathisants, retweeté par un collègue présentateur d'Echo de Moscou :

Mes amis !! Sa famille a pu rendre visite à @t_felg et elle nous a écrit une lettre ! On ne laissera personne d'autre la voir pour le moment, elle passe son bonjour et ses remerciements !

Le mot lui-même griffonné par Felgengauer sur un bout de papier dit :

Все-все-все!

Спасибо за поддержку и любовь, котаны. Все со мной будет хорошо. Дышать через трубочку даже прикольно. Алсо, впервые за 16 лет работы на радио я выспалась :)

Скоро буду с вами — обнимемся!

Таня Ф.

12.40  24.10.2017

A toutes, tous !
Merci pour votre soutien et votre amour, mes chats. Tout ira bien pour moi. Respirer à travers un tube est vraiment rigolo. Et puis, en 16 ans de travail à la radio c'est la première fois que j'ai dormi tout mon content :)
Je serai bientôt avec vous — On s'embrassera !
Tania F.
12.40  24.10.2017

L'agression au couteau contre Tatiana Felgengauer a aussitôt déchaîné une vague de critiques contre l'appareil de propagande d’État, qui a récemment intensifié ses attaques contre les rares médias indépendants qui demeurent encore en Russie, et particulièrement Echo de Moscou.

Deux semaines avant l'agression contre Mme Felgengauer, une émission de la chaîne publique d'information Rossiya 24 cataloguait les présentateurs d'Echo de Moscou, dont Felgengauer, comme “agents de l'étranger” marchands d’ “armes de l'information”. Felgengauer a elle-même tweeté le 12 octobre un lien vers un clip YouTube de la séquence de Rossiya 24 :

Les journalistes de R-24 ont fini par trouver une manière de traiter les rassemblements de Navalny [le leader de l'opposition]. Ils ont embauché tout le monde pour cela, depuis [Oleg] Kachine à [Fiodor] Kracheninnikov [éminents journalistes russes]

En outre, Ioulia Latynina, une autre présentatrice de premier plan d'Echo de Moscou, a été contrainte de fuir la Russie après un enchaînement d'agressions contre sa personne. Début septembre, sa voiture a été incendiée, et elle s'est hâtée de quitter le pays, craignant pour sa sécurité.

Ioulia Latynina fuit la Russie après des agressions. Aucun journaliste ne devrait être forcée à abandonner son domicile par des attaques contre son travail.

Les confrères et consœurs de Felgengauer dans les médias indépendants russes ont été prompts à accuser la propagande d’État d'attiser un “climat de haine”, une expression forgée après le meurtre de Boris Nemtsov, l'opposant assassiné à deux pas du Kremlin en mars 2015.

Autre étrange coïncidence, une semaine auparavant la télévision publique russe avait diffusé les premiers épisodes de la nouvelle — et déjà polémique — série [d'espionnage] The Sleepers [Les Dormeurs], dans laquelle une journaliste a la gorge tranchée. Pour beaucoup, le moment particulièrement glaçant n'est pas passé inaperçu :

Avant-hier j'ai regardé Les Dormeurs, une série télé où une journaliste d'opposition est égorgée. Aujourd'hui a eu lieu l'agression contre Tatiana Felgengauer. J'espère que les épouvantables coïncidences ne vont pas continuer…

Sergueï Iolkine, dessinateur éditorial à Deutsche Welle Russie, a proposé sa vision imagée du “climat de haine” :

L'agression contre la présentatrice d'Echo de Moscou Felgengauer est une conséquence de la haine sur les écrans de télévision, soutient @Sergey_Elkin

D'autres ont eu du mal à comprendre la facilité avec laquelle l'assaillant a pu franchir les niveaux de sécurité successifs jusqu'aux studios de la radio Echo de Moscou en plein centre de la ville. Sergueï Smirnov, rédacteur en chef de Mediazona, un organe d'information indépendant spécialiste du système pénal russe, a écrit sur sa chaîne Telegram :

Давайте для понимания, тут многие были на Эхе. Но я для тех, кто не был напишу.

Как попасть в редакцию? Она на 14 этаже находится в здании на Новом Арбате. Внизу пост охраны, там как минимум один человек сидит, но чаще двое. Ну ок, можно просто перепрыгнуть препятствие. Или как Мэш пишет охранника залили газом.

Но дальше надо точно пойти к лифтам, если первый раз там был неочевидно. А также лифты очень нагружены обычно, вечно их ждешь минут 5.

Дальше, выход из лифта и дверь в редакцию. Неясно где именно мудак ударил Таню ножом, но там тоже есть дежурный на посту. То есть те, кто говорит, что это прямо было совсем просто – ну это не так. И требовало подготовки и разведки как минимум.

Pour essayer de comprendre. Beaucoup ici ont été à Echo. J'écris donc pour ceux qui n'y sont jamais allés. Comment est-ce qu'on entre dans la rédaction ? Elle est au 14ème étage d'un bâtiment sur le Nouvel Arbat. En bas il y a un poste de garde, avec au moins un homme, parfois deux. Bon d'accord, on peut simplement sauter par-dessus le tourniquet. Ou, comme l'écrit Mash [une chaîne d'information sur Telegram], gazer le garde de lacrymogène. Mais pour continuer, il faut prendre les ascenseurs, ce qui n'est pas évident si on vient pour la première fois. En plus, ils sont presque toujours occupés, on les attend toujours cinq minutes. Ensuite, il y a le palier des ascenseurs et la porte de la rédaction. On ignore où exactement ce connard a poignardé Tania, mais il y a à cet endroit un autre garde posté. Par conséquent, ceux qui disent que c'était une attaque improvisée se trompent. Ça nécessitait au minimum une préparation et un repérage.

Ce qui laisse tout son poids à l'idée que l'agresseur présumé Boris Grits a été mu par la propagande d’État ou formé à infiltrer les locaux d'Echo. Le journaliste Roman Moguchy a déterré ce qui paraît être le blog personnel de Grits, brossant le portrait misérabiliste d'un individu aux prises avec un chômage chronique et succombant progressivement à une obsession pathologique pour Felgengauer.

На фейк похоже, но ХЗ. «Последние пару дней она начала искать возможность воздействовать на мое сердце. С дыханием, точнее его прекращением, она уже давно экспериментирует».

Ça ressemble à un fake, mais le diable sait. “Ces deux derniers jours elle a commencé à chercher des moyens de manipuler mon cœur. Pour ma respiration, plus précisément pour l'arrêter, elle expérimente depuis longtemps déjà.”

Dans un billet daté du 14 septembre, Grits annonçait son intention d'aller à Moscou pour mettre fin à la “torture sexuelle télépathique” de Felgengauer.

Les adversaires politiques d'Echo de Moscou — dont les présentateurs de premier plan des médias publics russes, qui ne cessent de pilonner la station pour sa ligne éditoriale supposée “anti-russe” — ont unanimement condamné l'agression. L'un des détracteurs peut-être les plus célèbres d'Echo de Moscou, Vladimir Solovyov, un animateur de talk-show de radio et télévision, a tweeté :

Il n'y a et ne peut y avoir aucune justification à ce genre de crime. Les coupables doivent être punis.

Mais cette démonstration de solidarité journalistique rare en Russie a été entachée par Victor Volkov, un rédacteur précédemment employé par Interfax, une des trois principales agences d'information de Russie. Dans un billet Facebook, il a rejeté la faute de l'agression sur Felgengauer et ses collègues :

Гляди-ка, у либералов очередная мученица совести вырисовывается. Кто-то слегка подрезал прямо в редакции “Эха Москвы” ведущую Таню Фельгенгауэр.
По-моему, ничего удивительного. Все эти хихоньки, хаханьки, паскудные шуточки. И всё это густо замешено на лжи. Рано или поздно подобное должно было случиться.

Regardez, l'apparition d'un nouveau martyr de conscience chez les libéraux. Quelqu'un a égratigné dans les locaux de la rédaction d'Echo de Moscou la présentatrice Tania Felgengauer.
A mon sens, rien d'étonnant à cela. Tous leurs ricanements et petites blagues. Et tout ça densément basé sur le mensonge. Ça devait arriver tôt ou tard.

Tatiana Felgengauer n'est qu'une plus récentes victimes d'agressions contre rédacteurs et journalistes en Russie, obstinément classée parmi les pires pays du monde pour l'exercice du journalisme.

Sommet Global Voices 2017 au Sri-Lanka : le compte à rebours est lancé !

mardi 31 octobre 2017 à 12:45

Le lac Beira à Colombo, la nuit. PHOTO : Shamli071 via Wikimedia Commons.

Afghanistan, Afrique du Sud, Argentine, Australie, Azerbaïdjan, Bangladesh, Bolivie, Brésil, Canada, Chili, Chine, Colombie, Danemark, Équateur, Égypte, Espagne, États-Unis, Éthiopie, France, Allemagne Grèce, Guinée, Inde, Indonésie, Iran, Italie, Jamaïque, Japon, Jordanie, Kenya, Liban, Macédoine, Madagascar, Maldives, Mexique, Mozambique, Myanmar (Birmanie), Népal, Nigeria, Ouganda, Pakistan, Palestine, Pérou, Philippines, Royaume-Uni, Russie, Serbie, Sri Lanka, Taïwan, Tadjikistan, Tanzanie, Trinidad et Tobago, Tunisie, Venezuela, Vietnam.

Voici, vous l'aurez deviné, la cinquantaine de pays —d'autres continuent à s'y ajouter —qui seront représentés au Sommet Global Voices 2017.

Dans à peine plus d'un mois, les 2 et 3 décembre, des centaines de personnes des quatre coins du globe se réuniront à la TRACE Expert City de Colombo, au Sri Lanka, pour passer ensemble deux journées à explorer les relations entre internet ouvert, liberté d'expression et mouvements citoyens en ligne à travers le monde.

Depuis 2006, les Sommets de Global Voices rassemblent les communautés de médias citoyens et de cyberactivisme les plus innovantes et stimulantes du monde entier. Ces rencontres s'avèrent un terreau fertile pour les idées et les coopérations par-dessus les frontières, et nous nous réjouissons de poursuivre cette tradition lors du Sommet 2017.

Le programme de cette année proposera des débats, de courtes présentations de projets, des sessions de tables rondes ouvertes et des ateliers de formation pratique, avec quelques-unes des voix majeures des droits numériques et des médias citoyens internationaux. Dans ce cadre, nous faciliterons, en temps réel, la participation en ligne tout comme l'enregistrement, la traduction et la publication des savoirs et échanges qui ressortiront de la rencontre.

Vous souhaitez nous rejoindre à Colombo ? Inscrivez-vous en passant par le site web du Sommet. Mais si vous n'avez pas la possibilité de venir en personne, vous pourrez suivre des portions du programme en retransmission directe les 2 et 3 décembre 2017.

D'ici là, rendez-vous sur le site web du Sommet, son compte Twitter et sa page Facebook pour plus d'informations au jour le jour !

Le Sommet Global Voices 2017 est rendu possible par les généreux soutiens de la MacArthur Foundation, la Ford Foundation, la Mozilla FoundationGroundviewsGoogle, Calcey Technologies, Lanka Bell et Hashtag Generation.

Au Népal, chaque chien a sa fête : Kukur Tihar

lundi 30 octobre 2017 à 19:41

Un chien paré d'une tika rouge et d'une guirlande à l'occassion de Kukur Tihar. Photo sur Flickr de wildstray. CC BY-NC-ND 2.0

Saviez-vous qu’il existe au Népal et dans certaines parties de l'Inde une fête hindoue dédiée à la célébration de la relation spéciale qui lie les humains aux chiens ?

Cette journée est appelée Kukur Tihar et se célèbre le deuxième jour de la fête de Tihar qui en dure cinq. Tihar est fêté par des lanternes, des pétards, comme les rites de Divali en Inde et dans d’autres pays. Lors de Kukur Tihar, des guirlandes, des tika (points rouges) et des friandises spéciales telles que lait, œufs, viande ou aliments de qualité pour chien sont offerts aux chiens de compagnie comme aux chiens errants.

La guirlande est appelée “malla” et est symbole d'admiration et de dignité. Elle afffirme le chien qui la porte comme une possession précieuse, et symbolise les prières qui accompagnent le canidé. Le tika (point rouge) accorde au chien un caractère sacré et représente une bénédiction pour ceux qui ont l'occasion de le rencontrer en ce jour faste.

Sur son blog, Pradeep Singh explique :

Chez les Hindous, le chien est le gardien de Yamaraj, considéré comme le dieu de la mort. Selon leurs croyances, le chien est un animal loyal et cette journée célèbre la relation entre les humains et les chiens.

Cette année, cette journée est tombée le 18 octobre et les photos des chiots pomponnés en compagnie de leurs heureux maîtres ont envahi les réseaux sociaux.

Heureuse fête des chiens

“A chaque chien sa fête”

Joyeux Kukur Tihar à tous ceux qui le fêtent. Une des fêtes les plus sympas du coin.

Jour préféré, au nom de leur fidélité

Les gens ont aussi partagé sur Twitter les prières (“puja”) avec la gent canine :

Vidéo de la cérémonie de Kukur (Chien) Tihar aujourd'hui.

L'adoration de chaque créature est la règle de base de la mythologie hindoue. Aujourd'hui c'est la fête du Chien au Népal. Heureux ‘Kukur Tihar’ (vénération des Chiens)

Des propriétaires de chiens d'autres parties du monde ont aussi saisi cette occasion de réjouissances avec leurs animaux de compagnie :

Ma famille (@dahalalish@kellyjellymua) fête Divali – et particulièrement Kukur Tihar avec ma nièce petite chienne Pepper [Poivre] !

Joyeux Kukur Tihar, la fête de ceux de toutes nationalités, ethnicités ou religions, qui vénèrent le plus nos amis canins.

Si seulement ces gestes de tendresse pouvaient être prodigués aux chiens tout au long de l'année, rêvait un organisme népalais en faveur du bien-être animal :

Miyu, un chien sourd abandonné, désormais adopté et qui profite de la fête ! Donnons aux chiens l'affection et les soins qu'ils méritent, toute l'année