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Ouganda : La police enquête sur des meurtres en série de femmes

jeudi 21 septembre 2017 à 11:26

Au moins 20 femmes ont été tuées pour des raisons mystérieuses

Une capture d'écran d'une vidéo YouTube montrant l'inspecteur général de la police, M. Kale Kayihura, s'adressant au public à Nansana, district de Wakiso, où plusieurs femmes ont été assassinées.

Arrêt sur image d'une vidéo YouTube montrant l'inspecteur général de la police, Kale Kayihura, s'adressant au public à Nansana, district de Wakiso, où plusieurs femmes ont été assassinées.

En Ouganda, de mystérieux meurtres en série ciblent en ce moment les femmes. Entre le 7 juin et le 5 septembre, on a découvert les corps de vingt femmes brutalement assassinées dans les villes d'Entebbe et de Nansana, situées respectivement à 30 et 20 kilomètres de Kampala, la capitale.

La télévision locale NTV Uganda rapporte que les neuf premières victimes, des femmes âgées de 17 à 32 ans, ont toutes été tuées de manière similaire, notamment par étranglement et l'insertion de bâtons dans la bouche et les organes génitaux, ce qui suppose des actes de viol.

Plusieurs arrestations ont eu lieu en relation avec les meurtres dans les deux villes, mais la culpabilité des suspects n'a pas encore été confirmée. Malgré ces arrestations, d'autres meurtres ont eu lieu depuis que ces personnes sont en détention provisoire. La police de Nansasa détient 8 suspects, de copains, maris et amis de quatre des victimes, les considérant comme des “amants rejetés”.

La sorcellerie est une autre théorie. L'inspecteur général de la police, Kale Kayihura, a suggéré qu'un homme d'affaires pourrait avoir engagé des tueurs à gage pour assassiner des femmes afin d'obtenir leur sang pour effectuer des rituels propitiatoires de richesse.The Daily Monitor, un quotidien local, rapporte :

“Le suspect a avoué avoir tué huit femmes sur les ordres d'un homme d'affaires ici, à Nansana. Le sang doit servir pour ses rituels pour obtenir plus de richesses”, a déclaré le général Kayihura. La police mérite des félicitations si un tel suspect existe et qu'une confession à cet effet a été obtenue. Cependant, le public n'est pas intéressé par de telles déclarations publiques.

En réponse, le lecteur Ahamushozi Kanungu a posé une question:

Pourquoi n'arrêtent-ils pas l'homme qui l'a engagé ? Puisqu'ils le connaissent, au lieu d'arrêter des innocents sans motif clairement formulé !

En outre, les habitants méfiants et suspicieux à l'égard de leurs autorités ont participé à des activités de police communautaire visant à réduire les crimes dans leurs collectivités. M. Kayihura, l'inspecteur général de la police, a souligné ce point lors d'un récent rassemblement communautaire à Nansana, rapporté par le journaliste Raymond Mujuni, de NTV Uganda. M. Kayihura a annoncé :

“Nous avons mis en place des mesures de sécurité visant à renforcer la vigilance populaire – la participation des personnes – ainsi que l'augmentation de la visibilité et de l'efficacité de la police afin de protéger les communautés dans les zones concernées …”

Le mardi 5 septembre, les parlementaires ont décidé de suspendre leurs activités jusqu'à ce que le ministre de l'Intérieur et les responsables de la sécurité intérieure soumettent un rapport complet sur les meurtres. Cette directive survient au moment où des glissements de terrain dans l'est de l'Ouganda et des inondations dans le Nord font l'objet d'une attention du Parlement.

Au cours de la séance, Mme Rosemary Seninde, une députée représentant le district de Wakiso où des meurtres ont eu lieu, a déclaré :

C'est si triste que nous n'ayons pas les vrais suspects. La manière dont certaines des femmes sont tuées est terrible et humiliante pour ceux d'entre nous qui les voyons.

La colère sur ces mystérieux meurtres a éclaté sur Twitter. L'utilisateur de Twitter @ndix_devar a demandé à la police de ramener le Superintendant adjoint de police Muhammad Kirumira à Nansana, citant son bilan de réduction significative des taux de criminalité dans la région pendant son activité :

Meurtres sans fin surtout dans la municipalité de Nansana. Pourquoi ne pas ramener Afande Kirumira pour régler définitivement leur affaire à ces idiots?

Michael Kategaya a partagé un tableau montrant la fourchette d'âge des victimes entre 17 et 32 ​​ans provenant de milieux à faible revenu :

Qui tue des femmes à Ebbs et Nansana? Qu'est-ce que les données disponibles sur les victimes nous racontent des victimes potentielles?

Ngoboka Solomon a exprimé ses préoccupations concernant la sécurité des citoyens :

C'est très regrettable pour Entebbe et Nansana, mais la police devrait passer plus de nuits blanches et nous rassurer sur la sécurité !

Les récents meurtres en série de femmes ont eu lieu à peine six mois après que l'inspecteur général adjoint de police de l'Ouganda, Andrew Felix Kaweesi [fr] a été assassiné avec son chauffeur et son garde du corps pendant qu'il se rendait au travail. La police a relié ce meurtre à ceux des religieux musulmans entre 2015 et 2016, tous tués par des individus circulant à moto avec des armes à feu.

La valeur des droits de l'homme ? 20 dollars selon la Chambre des Représentants des Philippines

mercredi 20 septembre 2017 à 20:18

La jeunesse proteste contre les exécutions extrajudiciaires liées à la drogue. Source: Anakbayan. Utilisé avec autorisation.

Les alliés du Président philippin Rodrigo Duterte au sein de la Chambre des Représentants, menés par son Président Pantaleon Alvarez, ont voté l'attribution de 1 000 pesos (20 dollars américains) au budget 2018 de la Commission des droits de l'homme (Commission on Human Rights, CHR), un organe constitutionnel chargé de s'assurer que l'État fasse respecter les lois et les traités sur les droits de l'homme.

Environ 112 parlementaires ont appuyé la décision du Président de la Chambre de rendre la commission pratiquement inutile dans l'exercice de son mandat. La CHR a régulièrement fait part de ses préoccupations quant aux excès du gouvernement de Duterte dans sa « guerre contre la drogue » qui a déjà causé la mort de 13 000 suspects.

La CHR a été créée par la Constitution philippine de 1987 afin d'empêcher que les graves violations contre les droits de l'homme perpétrées pendant 21 ans sous la dictature de Ferdinand Marcos se répètent. Duterte a fait à plusieurs reprises état de son admiration pour ce dernier, qu'il a d'ailleurs fait inhumer au Libingan ng mga Bayani (Le cimetière des héros) en 2016.

Ce maigre budget n'est autre que le coup de grâce porté par l'administration de Duterte qui considère la CHR comme une nuisance dans son combat contre les drogues illégales.

En revanche, la CHR n'est pas seule à condamner les exécutions extrajudiciaires de supposés suspects de la drogue. Outre celle de l'opposition politique, de certains groupes religieux et quelques organisations de la société civile, la « guerre contre la drogue » de Duterte a également suscité la désapprobation de la communauté internationale, notamment de l'Union Européenne et de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies.

Lors d'une entrevue avec les médias, le Président de la Chambre, Pantaleon Alvarez, a expliqué pourquoi la majorité parlementaire a pris la décision d'entamer considérablement le budget de la CHR :

Wala akong makitang dahilan para sustentohan kayo ng gobyernong ito. Mas gusto niyo pa protektahan ang mga karapatan ng mga kriminal, hindi ang mga biktima

Je ne vois aucune raison pour que ce gouvernement finance la CHR. Vous préférez protéger les droits des criminels plutôt que ceux des victimes.

Logo de la Commission des droits de l'homme des Philippines.

Suite aux critiques de certains membres du Congrès, la CHR a précisé sa fonction officielle :

En dépit des explications continues quant à notre mandat, nous regrettons qu'ils perçoivent notre rôle comme combatif plutôt que comme un effort collaboratif permettant de renforcer la démocratie philippine en s'assurant que tous les agents publics fassent preuve d'honnêteté dans l'exercice de leurs fonctions et adhèrent aux principes universellement admis des droits de l'homme.

La CHR a annoncé qu'elle continuera d'exercer son mandat malgré son budget insignifiant :

En dépit de ces circonstances, nous n'abandonnerons pas notre devoir constitutionnel qui est de rendre la justice pour tous et de donner à chacun ce qui lui revient. Les droits de l'homme constituent une préoccupation qui transcende tout esprit de parti ou désaccord. Il est de notre devoir d'avancer et de franchir ces obstacles en restant soucieux de notre serment de servir le peuple et la République, car en ces temps-ci, c'est ce qui s'avère juste et nécessaire.

Après que les médias ont annoncé que le budget de la CHR serait diminué à 1 000 pesos, les Philippins ont exprimé leur indignation en masse sur les médias sociaux.

Ted, un jeune actif, a critiqué le gouvernement sur Facebook :

Le budget de 1 000 pesos pour la CHR signifie que le gouvernement est nul et n'attache aucune importance aux droits de l'homme.

L'utilisateur Facebook Kim Tanhui a fortement encouragé ses concitoyens philippins à cesser de tolérer les violations des droits de l’homme :

Les droits de TOUTE personne, en tant qu'individu, doivent être protégés indépendamment du candidat ou du parti qu'il/elle soutient.

Nous parlons là du public qui tolère ce mépris envers les droits de l'homme et les valeurs morales, et qui malheureusement, est devenu la norme au cours des derniers mois. Mais réveillez-vous ! C'est votre gouvernement qui vous dit que vos droits humains ne valent que 1 000 pesos. C'est votre gouvernement qui désarme totalement la CHR, l'organe destiné à vous protéger contre les abus gouvernementaux.

L'utilisateur Twitter @DonyaJemimah a fait de rapides calculs afin de souligner l'importance qu'attachent les comparses de Duterte aux droits de l'homme :

1 000 pesos = BUDGET DE LA CHR (DROITS DE L'HOMME)
1 000 pesos / 103 MILLIONS DE PHILIPPINS = 0.000009 PAR TÊTE
APPAREMMENT, UN BONBON VAUT BIEN PLUS QUE NOS DROITS HUMAINS 🙄

La rapporteure spéciale des Nations Unies pour les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, Agnès Callamard, a fait également état de sa consternation:

Repréhensible et impensable : Le Congrès des Philippines réduit considérablement le budget annuel de la Commission des droits l'homme à 20 dollars US.

Même certains soutiens du Président ont été choqués de la mesure éhontée prise par la Chambre basse. Maintenant que la Chambre basse en a terminé avec le processus budgétaire, la balle est dans le camp du Sénat dont les membres sont en mesure de prendre des décisions avec plus de flexibilité, et en marge de la politique gouvernementale puisque ces derniers disposent d'une base électorale nationale plus conséquente. Certains sénateurs se sont déjà engagés à restaurer la proposition initiale de budget pour la CHR estimée à 678 millions de pesos (13,2 millions de dollars) une fois que leurs délibérations budgétaires seront relancées.

Ces mouvements d'indignation continueront-ils, et permettront-ils aux sénateurs de l'opposition d'attribuer un budget plus approprié à la CHR ? Comment le gouvernement de Duterte parviendra-t-il à s'assurer que la CHR n'ait plus aucun pouvoir avec son budget de 20 dollars ? Alors que des militants et divers groupes de défense se préparent à un grand rassemblement le 21 septembre pour commémorer le 45ème anniversaire de la déclaration de la loi martiale, qui a entraîné de graves violations des droits de l'homme sous la dictature de Marcos, cette décision de l'administration de Duterte ne sera pas oubliée de sitôt.

L'occupation de Wikipolítica : un engagement collectif pour réinventer la politique du Mexique

mercredi 20 septembre 2017 à 19:47

Image provenant du kit de presse disponible sur laocupación.org. Reproduit avec permission.

[Billet d'origine publié en espagnol le 6 septembre. Sauf mention contraire, tous les liens de ce billet renvoient vers des pages web en espagnol]

La ville mexicaine de Guadalajara a récemment accueilli le festival “l'occupation“, l'une des nombreuses initiatives portées par le collectif pro-démocratie Wikipolítica Jalisco [fr] afin de trouver des solutions aux problèmes qui accablent les sociétés.

Un assortiment d'organisations locales, nationales et internationales, ainsi que des sociétés civiles, des universités et des citoyens se sont réunis à Guadalajara, Jalisco, du 30 août au 2 septembre, pour partager leurs expériences en matière de participation sociale et politique.

Nous devons nous organiser pour sensibiliser plus de monde à la politique et leur faire comprendre qu'ils ne sont pas seuls.

Tel a été le message de #FueroNoJuicioSí (#JuridictionNonJugementOui), une expression en soutien à l'élimination des protections constitutionnelles en cas de poursuites contre les politiciens et #SinVotoNoHayDinero [en] (#PasDeVotePasDargent), qui cherche à réduire les ressources publiques dont les partis politiques usent et abusent. L'occupation fait partie de l'agenda de Wikipolítica en tant que mouvement progressiste et novateur qui renforce la participation des citoyens, l'échange de dialogue et l'intelligence collective.

Au premier plan Pedro Kumamoto est un activiste mexicain qui est devenu le premier candidat indépendant à obtenir un siège au congrès d’État de Jalisco en 2015.

L'occupation a émergé au milieu d'une consternation visible et de la déception vis à vis des excès et de la corruption des politiques du Mexique, en tant qu'espace crucial pour renforcer une politique différente.

Les participants s'engagent à «rendre une conscience citoyenne» au public et à exercer un contrôle public sur les lieux et les sujets qui ont été dominés par des partis politiques usés.

Comme Roberto Castillo, membre du conseil Wikipolitica pour la ville de Mexico, l'a écrit dans son article “L'occupation : pourquoi la politique n'est pas nécessairement ennuyeuse, et pourquoi c'est mieux si nous sommes tous impliqués” :

Nos alejaron de la política.

La llenaron de corrupción, impunidad y cinismo.

Pero ya volvimos. Y vamos a cambiarla por completo.

Mucho de lo que hacemos es política

La política no es solo aquello que se hace en el congreso desde las curules de los diputados, mucho menos se reduce a discursos de gente trajeada en un atril, que lleva por título “presidente” o “gobernador”. Fuera de ese mundo hemos estado construyendo una gran variedad de formas de participar en la vida política de manera más cercana y útil para todas y todos nosotros.

Ils nous ont éloignés de la politique.
Ils l'ont remplie de corruption, d'impunité et de cynisme.
Mais nous sommes de retour. Et nous allons la changer complètement.
Beaucoup de ce que nous faisons c'est de la politique.
La politique ne se fait pas seulement au Congrès depuis les fauteuils des députés, et se réduit encore moins à des discours de gens bien habillés derrière un pupitre, qui portent des titres titres de «président» ou «gouverneur». Au-delà de ce monde, nous avons construit une grande variété de façons de participer à la vie politique d'une manière plus proche et plus utile pour nous tous.

Quatre journées de festival se sont déroulées, remplies d'ateliers, de tables rondes, de conférences, de prises de paroles éclairantes et d'activités artistiques et culturelles révélant une diversité d'activisme, de projets et de résistance visant le changement.

Ce tweet montre ce qui a été discuté et présenté pendant le festival :

La meilleure réponse à l'indignation et la satiété est de rêver et de travailler pour un autre avenir. L'occupation est un espace pour rêver collectivement.

Féminiser la politique c'est cesser de privilégier la verticalité de la politique traditionnelle.

Certains ont fait des comparaisons entre l'occupation et la manière rigide et démodée avec laquelle le président du Mexique a livré son cinquième rapport gouvernemental (référencé dans le tweet en tant que «# 5toInforme») le 2 septembre:

Le pays qui s'éteint, dans le 5ème rapport;
Le pays qui naît, dans l'Occupation.

À l'Occupation nous nous demandons : pourquoi les remplacer ? Réponse dans le 5ème rapport.

Faisant écho à ce message, Damian Carmona, membre du Wikipolitica de Jalisco, a écrit sur son blog :

Fueron días en los que nos unimos no sólo con el fin de soñar, sino de sentir una necesidad: reemplazarles. Reemplazarles no es una declaratoria de guerra a las personas que habitan los partidos, es una declaratoria contra las formas tradicionales de hacer política -dentro y fuera de los partidos- y les pido no se inquieten ante esta declaratoria, pero si lo hacen, pregúntense si no es porque temen perder el privilegio que les ha otorgado las formas tradicionales de hacer política.

Nous nous sommes réunis ces derniers jours non seulement pour rêver, mais pour ressentir un besoin : les remplacer. Le fait de les remplacer [les politiciens] n'est pas une déclaration de guerre contre les membres des partis, c'est une déclaration contre les formes traditionnelles de la politique – à l'intérieur et à l'extérieur des partis – et je leur demande de ne pas se soucier de cette déclaration, mais s'ils le font, demandez-vous si ce n'est pas parce qu'ils craignent de perdre le privilège que leur ont octroyé les formes traditionnelles de la politique.

L'équipe Wikipolitica et Pedro Kumamoto ont annoncé les futurs projets pour le mouvement à la fin de l'événement, incluant la candidature de Kumamoto aux sénatoriales mexicaines de 2018, qui a pour but d'e faire passer le programme du mouvement à l'intérieur des murs institutionnels.

De même, huit autres membres de Wikipolitica disputeront des sièges de députés indépendants dans différents congrès :

Quel moment formidable pour l'annoncer : Kumamoto va briguer un siège au Sénat. Exactement là où la crise politique s'est reflétée avant-hier soir.

La création de ces espaces vient donner une bouffée d'air frais au milieu des scandales de corruption qui ont secoué l'opinion mexicaine ces dernières semaines. “L'escroquerie maîtresse” (#LaEstafaMaestra) est un exemple.

Comme révélé par le média digital Animal Político, le gouvernement a utilisé 128 compagnies fantômes comme véhicule pour détourner de l'argent public. De la même façon, l'organisation Les Mexicains contre la corruption et l'impunité, a mis en lumière le cas de l'avocat général qui a enregistré sa Ferrari à une adresse d'habitat social pour échapper aux impôts.

Ce mur est tombé !

Sainte Rose de Lima, quand sainteté rime avec modernité

mercredi 20 septembre 2017 à 17:10

Façade de l'église Santa Rosa de Lima, à Lima. Photo sur Flickr de Natalia Cartolini (CC BY 2.0).

Les traditions au Pérou sont non seulement tenaces, mais elles utilisent aussi de nombreux moyens pour s'intégrer au monde contemporain. On peut citer, à titre d'exemple, la dévotion accordée aux saints apparus avec la culture catholique, en particulier celle vouée à Sainte Rose de Lima. Santa Rosa est une figure centrale de la culture péruvienne, qui, loin de se laisser distancer par la progression rapide des technologies de la communication en réseaux, regroupe autour d'elle aujourd'hui de nombreuses tendances qui montrent que l'ancien et le moderne se côtoient aisément.

Sainte Rose de Lima [fr], née sous le nom de Isabel Flores de Oliva le 20 avril 1586 [à Lima], alors que la ville était la capitale de la Vice-royauté du Pérou, est la première sainte latino-américaine. Elle meurt le 30 août 1617 et est canonisée en 1671. Elle est proclamée sainte patronne du Pérou en 1669, puis patronne du Nouveau Monde et des Philippines en 1670. Elle est aussi la patronne de la police nationale du Pérou.

Au sein de l'Église Catholique, le saint patron (fr) entretient un lien particulier avec une communauté, dont les membres invoquent ses intercessions divines. Pour les croyants, c'est comme un médiateur et un avocats face à Dieu.

Quatre cents ans se sont écoulés depuis la disparition de Santa Rosa, mais la dévotion qu'on lui porte demeure très forte au Pérou ou ailleurs dans le monde.

Maison de Santa Rosa à Quives. Photo Flickr de Lucerito Corrales (CC BY 2.0).

Isabel ou Rosa était la quatrième des treize enfants de Gaspar Flores et de Maria de Oliva y Herrera. On ne connaît le nom que de neuf de ses frères et sœurs.

Elle a passé une grande partie de son enfance et de son adolescence avec sa famille à Quives, dans le département de Lima, où son père avait été envoyé pour travailler comme responsable d'une mine :

[Quives es una] reducción indígena ubicada en la sierra de Lima, entre la confluencia de los ríos Chillón y Arahuay. Hasta allí se trasladó la familia […]. De niña, la futura Santa Rosa de Lima sufrió una enfermedad que le imposibilitaba la movilidad de las piernas. Su madre quiso aliviarle con una receta local, cubriéndole las piernas con pieles de buitre, medida que finalmente agravaría los males de la pequeña, sufriéndolos en silencio. Recibió en 1598 el sacramento de la confirmación […] de manos del arzobispo Toribio de Mogrovejo, también futuro santo.

[Quives est une] réduction indigène située dans la région Sierra de Lima, à la confluence des fleuves Chillón et Arahuay. Toute la famille avait déménagé […]. Enfant, la future Santa Rosa de Lima a souffert d'une maladie qui lui paralysait les jambes. Sa mère, pour la soulager lui recouvrait les jambes avec de la peau de vautours, une technique locale qui finalement n'a fait qu'aggraver les douleurs de la petite, qui les supportait en silence. Elle reçoit en 1598 le sacrement de la confirmation […] des mains de l'archevêque Toribio de Mogrovejo, qui lui aussi sera canonisé.

On l'appelait Rosa qui était son nom de confirmation, un des rites de passage les plus importants du catholicisme :

[…] Rosa, apelativo que sus familiares empleaban prácticamente desde su nacimiento por su belleza y por una visión que tuvo su madre, en la que el rostro de la niña se convirtió en una rosa […] asumiría definitivamente tal nombre más tarde, cuando entendió que era “rosa del jardín de Cristo” y adoptó la denominación religiosa de Rosa de Santa María.

[…] Rosa, le nom que sa famille lui donnait depuis sa naissance à cause de sa beauté et d'une vision que sa mère avait eue, dans laquelle le visage de l'enfant s'était mué en rose […] fut le nom qu'elle assuma définitivement plus tard, quand elle comprit qu'elle était “une rose du jardin du Christ” et qu'elle adopta l'appellation religieuse de Rosa de Santa Maria.

Les tourments qu'elle s'infligeait sont bien connus : dès son plus jeune âge, elle refusait de  manger, elle couvrait son corps de cilices garnis de pointes de fer, se mettait de l’ají [fr] (un piment local) dans les yeux pour pouvoir rester à la maison, elle buvait le pus des malades et elle portait même une ceinture en fer fermée par un cadenas dont elle avait jeté la clé au fond d'un puits. À ce sujet, le fameux psychiatre péruvien Mariano Querol pense que Sainte Rosa présentait tous les signes cliniques de la schizophrénie :

Para mí fue una persona que padeció trastornos mentales muy difíciles de clasificar y catalogar. Presentó graves disturbios de personalidad, disturbios emocionales, de conducta, de autoflagelación, impulsos masoquistas enormes, incluso iluminaciones, posesión divina.

À mon avis, elle souffrait de troubles mentaux très difficiles à classifier et à cataloguer. Elle présentait des troubles de la personnalité importants, des troubles émotionnels, des troubles du comportement, d'autoflagellation, des pulsions masochistes énormes, voire des illuminations et la possession divine.

Au-delà des diagnostics médicaux réalisés sur la base de récits de la vie d'une femme morte au début du XVII° siècle, le fait est que la dévotion portée à Sainte Rose de Lima a évolué pour rester en phase avec les avancées modernes du XXI° siècle.

La ferveur avec laquelle ses fidèles déposent leurs vœux dans le puits de la basilique de Santa Rosa est bien connue. Il paraît que la sainte exauce les vœux de ceux qui réussissent à déposer leur demande le 30 août, au terme de longues files d'attente, comme le raconte le blogueur Cyrano :

Al lado del templo [de Santa Rosa] existe una casa donde la creencia popular afirma que Santa Rosa pasó gran parte de su vida. […] Dentro de la casa, que recibe visitas durante todo el año, existe un pozo llamado el Pozo de los Deseos en donde los fieles lanzan papeles de distinto tipo y tamaño que contienen sus más íntimos deseos u ofrecimientos para que Santa Rosa se los cumpla. No son cientos sino miles los que arrojan el 30 de agosto su papel al pozo. Ya se imaginan el alboroto que causa esta tradición.

À côté du sanctuaire [de Santa Rosa], il y a une maison où, d'après la croyance populaire, Santa Rosa a passé une grande partie de sa vie. […] Dans la maison, que l'on peut visiter toute l'année, il y a un puits appelé le Puits des Vœux où les fidèles lancent des papiers de toute sorte et de toute taille où figurent leurs souhaits ou leurs promesses les plus intimes pour que Santa Rosa les exauce. Ce ne sont pas des centaines, mais des milliers de personnes qui jettent leur papier dans le puits le 30 août. On imagine le tumulte que provoque cette tradition.

La bonne nouvelle pour ceux qui ne veulent pas ou ne peuvent pas se déplacer jusqu'au sanctuaire dédié à la sainte, c'est que maintenant, ils ont la possibilité de lui faire parvenir leurs vœux en ligne à l'aide du site web spécialement conçu à cet effet.

Millones de personas dan fe de las gracias, tanto espirituales como materiales que Rosa brinda, si ésta está en los planes de la Providencia divina.

¡Envíanos tus peticiones, agradecimientos o tu testimonio!

Des millions de personnes témoignent des grâces spirituelles et matérielles accordées par Rose pour peu qu'elles répondent aux desseins de la divine providence. Envoie-nous tes demandes, tes remerciements ou ton témoignage !

La sainte a aussi un compte Facebook, Twitter, et même WhatsApp :

Nous avons dépassé les 100 000 j'aime et les 100 000 abonnés sur Facebook ! Continuons à partager

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Une jeune chanteuse kirghize renonce à diriger un musée suite au mécontentement en ligne

mercredi 20 septembre 2017 à 14:24

Musée national d'histoire et d'archéologie Sulayman. Photographie de Dave Proffer. Wikipedia (Creative Commons Attribution 2.0 Generic)

Sauf mention contraire, tous les liens de ce billet renvoient vers des pages en anglais et en russe.

A 26 ans, la chanteuse Samara Karimova a été nommée directrice d'un musée très visité au Kirghizistan, mais a dû renoncer au poste suite à des réactions négatives en ligne lui reprochant son soi-disant manque de qualification et d’expérience.

Le 28 juillet 2017, le Ministre de la Culture du Kirghizistan a nommé Samara Karimova directrice du musée Sulaiman Too, qui fait partie du Complexe de la montagne sacrée, inscrit [fr] au patrimoine mondial de l'UNESCO. Le musée se trouve dans la ville méridionale d'Och, théâtre de violences [fr] ethniques sanglantes il y a sept ans.

Suite à l'annonce de sa nomination, de nombreux utilisateurs des réseaux sociaux ont rapidement souligné son manque d'expérience et de formation dans le domaine de l'éducation. Certains y ont aussi vu un conflit d'intérêt, étant donné que le conjoint de Samara Karimova est un haut fonctionnaire du Ministère de la Culture.

Les commentaires sur Facebook ci-dessous citent les raisons pour lesquelles Samara Karimova n'est pas digne de devenir directrice du musée :

И как говорил великий Ленин “каждая кухарка может управлять государством”!!! Её назначение – это тоже самое, что лечить людей поставили талантливого повара, а собирать ракеты – артиста т.к он “талантлив”… Никто не спорит, что она талантливая, но ведь петь на сцене одно, а управлять музеем в одном из сакральных мест это не песенки петь!!!???

Comme le disait le grand Lénine “n'importe quelle kukharka [terme russe : une cuisinière à domicile, NdT] peut gouverner” !!! La choisir revient au même que de laisser une cuisinière talentueuse [devenir médecin et] soigner les gens, ou laisser un chanteur fabriquer des fusées, puisqu'il est “talentueux”… Personne ne nie le fait qu'elle a du talent, mais chanter sur scène n'est pas la même chose que gérer un musée sur un lieu sacré !!!???

“В музее должен работать настоящий специалист историк этнограф или научный работник нужно проводить научно исследовательские открытия”

C'est un vrai expert en histoire et en ethnographie, ou un chercheur, qui devrait travailler au musée, puisque ça demande de faire des recherches.

“И всё таки министр поступил как заинтересованное лицо, мог назначить не супругу представителя министерства по Югу или в противном случае должен снять с должности мужа чтобы не было конфликт интересов”.

Le Ministre de la Culture a agi avec un parti pris. Il pouvait ne pas nommer la conjointe d'un de ses fonctionnaires responsable du sud, ou renvoyer le conjoint pour éviter les conflits d'intérêt.

Samara Karimova a immédiatement réagi aux réactions négatives en refusant le poste. Dans une courte interview sur le site d'actualités “Sputnik Kyrgyzstan”, elle explique :

“Я вчера читала, что писали об этом в соцсетях. Многие говорили, что я слишком молода для такой работы, поэтому я решила не занимать эту должность. Наше общество, видимо, не готово к молодым управленцам, хотя у меня было очень много планов развития музея”

J'ai lu hier ce que les gens ont écrit sur les réseaux sociaux à propos de cette affaire. Beaucoup ont dit que j'étais trop jeune pour ce travail, et c'est pourquoi j'ai décidé de ne pas l'accepter. Manifestement, notre société n'est pas prête à accepter les jeunes cadres, malgré mes nombreuses idées pour la promotion du musée.

😊

A post shared by 🎤Самара Каримова (@samarakarimova_official) on

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De nombreux utilisateurs des réseaux sociaux kirghizes ont répondu que la source du problème remontait aux proches des fonctionnaires obtenant les meilleurs postes au gouvernement :

“Кыргызстанское общество устало от токолок и детей чинух, которые садятся на руководящие должности”.

La société kirghize est fatiguée des tokols [fr] et des enfants de fonctionnaires qui accèdent aux postes de direction.

La nomination au gouvernement de jeunes membres de familles des élites locales des républiques de l'Asie Centrale n'est pas une chose rare. Au Kirghizistan en particulier, deux présidents ont déjà été évincés du pouvoir après avoir été accusés de népotisme.