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Au Paraguay, l'agriculture paysanne est en crise et les paysans exigent des solutions du gouvernement

dimanche 13 août 2017 à 16:34

Photographie du Collectif « En sus zapatos », issue du site Medium de Kurtural. Photographie utilisée avec leur accord.

Sauf mention contraire, les liens de cet article renvoient vers des pages en espagnol.

Au Paraguay, des milliers de paysans défilent depuis plus d’un mois dans les rues d’Asunción. Ce sont des petits producteurs pratiquant une agriculture de subsistance, et qui dénoncent le non-respect d’un accord signé avec le gouvernement en avril 2016. Cet accord prévoyait le refinancement de la dette agricole d’environ dix-huit mille producteurs, mais il a échoué et les paysans sont retournés dans la rue.

Actuellement, le Paraguay compte approximativement 2,6 millions d'habitants vivant en zone rurale, soit plus de 30 % de la population totale. L’un des problèmes majeurs du pays est la concentration élevée des terres agricoles : 94 % des terres cultivées sont exploitées de façon agro-industrielle, et seulement 6 % sont affectées à l’agriculture familiale paysanne, d’après un rapport d’Oxfam intitulé « Yvy Jará : les propriétaires de la terre au Paraguay ».

Les mauvaises politiques agricoles du gouvernement et la forte médiatisation délibérée des organes de presse liés aux groupes de concentration des terres agricoles n’ont fait qu’aggraver ce scénario.

Cette marche des paysans attire l’attention du pays et suscite de la solidarité :

Des étudiants universitaires de plusieurs facultés se réunissent en séance plénière sur l’esplanade de l'UCA pour discuter et se solidariser avec la #MarchaCampesina pic.twitter.com/OqaT4CfaMO — RTV (@rtvparaguay) 7 août 2017

Des membres du gouvernement, eux, traitent les manifestants d’« hommes des cavernes ».

Répression policière :

#Urgente La police « Cartiste » prépare la répression. pic.twitter.com/l4tK0f8Afo — Coord.Intesectorial (@CoordinadoraCNI) 8 août 2017

Quelles sont les causes de la marche paysanne ?

Ce n’est pas la première fois que ces marches ont lieu pour revendiquer les droits des paysans. Celle de cette année trouve son origine dans le non-respect du gouvernement d’un accord signé en 2016. L’objectif de celui-ci était de résoudre le problème de l’endettement des cultivateurs., un endettement engendré par une arnaque de l’État.

Les paysans ont accusé le Ministère de l’agriculture et de l’élevage d’avoir distribué des semences de mauvaise qualité, de n’avoir pas apporté l’assistance technique annoncée et que les prix du marché au moment de la vente de la récolte n’étaient pas ceux prévus au départ. Pour beaucoup d'entre eux, ces facteurs ont rendu le remboursement de leurs dettes, publiques et privées, impossibles. 

Après presque un mois de manifestations, en 2016, ils ont conclu un accord avec le gouvernement de Cartes. Cet accord consistait en des tables rondes pour étudier les revendications et proposer des projets de loi de soutien à l’agriculture paysanne. À l’époque, le gouvernement avait promis de soutenir fermement la classe paysanne.

Un an après, les paysans dénoncent le non-respect de l’accord et des petits producteurs d’autres régions dans la même situation se joignent à eux, touchés par l’absence de politiques publiques et les inégalités croissantes dans le monde rural, l’insuffisance de marchés et le manque d’aide face aux inondations et aux gelées.

Accords et responsabilités non assumés 

Au Paraguay, l’État est tenu de promouvoir l’agriculture paysanne. La Constitution nationale reconnaît expressément la nécessité d’encourager une réforme agraire qui consiste en « l’intégration effective de la population paysanne au développement économique et social de la nation ». De plus, elle s’engage à adopter des mesures qui « stimulent la production, découragent le latifundium [fr] et garantissent le développement de la petite et moyenne propriété rurale ». 

Si aucune solution n'est trouvée, un grand nombre de ces paysans perdront leurs terres et avec elles, leur seul moyen d'existence. Ils iront gonfler les indicateurs nationaux de pauvreté, qui avaient déjà augmenté l'année dernière.

Les problèmes de dettes et de subventions ne sont pas les seuls auxquels sont confrontés de nombreux manifestants paysans. Ainsi, un témoignage recueilli par Ápe Paraguay sur Facebook relate les nombreuses contraintes liées au travail dans les campagnes du Paraguay :

Pasa que lo nacional no les interesa tanto, traen todo del exterior. Por ejemplo estos proveedores, que son millonarios, traen locote y tomate del exterior. Ellos declaran unos pocos, y meten como 20 mil kilos semanalmente. […] Yo traigo por ejemplo 3 mil kilos y no puedo meter en el mercado. Así ellos nos joden porque meten del exterior y nuestra producción nacional no vale. Eso es lo que un gobierno debe ver para ayudarnos. En nuestro país, la plata es lo que vale, por eso el contrabando no se detiene. Yo sé bien, porque traje una vez 5 mil kilos producción nacional y me detuvieron y me llevaron por tres días detrás de los papeles, haciéndome perder gran parte de la producción; luego vino otro de contrabando que pagó dos o tres millones y pasó. Tuve que estar aquí 3 días porque supuestamente no tengo documentos. Imaginen, traer de Concepción, de tan lejos, el gasto que representa

Ce qui se passe, c'est que le national ne les intéresse pas vraiment, ils font tout venir de l'étranger. Par exemple, ces fournisseurs, qui sont millionnaires, importent des poivrons et des tomates. Ils en déclarent une partie, et ils en mettent à peu près vingt tonnes par semaine sur le marché. (…) Moi, j'en produit par exemple trois tonnes et je ne peux pas les vendre. Et là, ils nous baisent avec ce qui vient de l'étranger et notre production nationale ne vaut rien. C'est ça que le gouvernement doit comprendre pour nous aider. Dans notre pays, c'est l'argent qui compte, c'est pour ça que le marché noir ne s'arrête pas. Je le sais, une fois j'ai apporté cinq tonnes de ma production, et ils m'ont arrêté et ils m'ont fait courir pendant trois jours après des papiers, me faisant perdre une bonne partie de la marchandise; ensuite, il est arrivé un de ces trafiquants qui a payé deux ou trois millions et il est passé. J'ai dû rester trois jours parce que je n'avais pas de documents. Imaginez, venir de Concepcion, de si loin, combien ça coûte.

Des solutions ?

La loi de réhabilitation financière, censée protéger les populations vulnérables contre les pratiques de prêts abusives, pourrait servir à annuler les dettes des paysans. Le Ministère de l'agriculture et de l'élevage aura pour mission d'établir la liste des bénéficiaires potentiels à partir du Registre national de l'agriculture familiale (RENAF). Les bénéficiaires devront remplir les conditions suivantes : posséder au moins trente hectares de terres et que leurs dettes n'excèdent pas 51 millions de Gs. (soit 25 salaires minimum). 

Ces dettes doivent être obligatoirement en lien avec une activité agricole, et les autres dettes ne seront pas prises en compte. Ces indicateurs restreignent en grande partie la quantité des bénéficiaires de cette loi. 

Néanmoins, le nombre précis des paysans concernés n'a pas été défini jusqu'à aujourd'hui. On calcule qu'au moins 17.000 des 196.000 petits producteurs paysans inscrits au Registre national d'agriculture nationale, la base de données qui sera utilisée pour établir la liste des bénéficiaires, y figureront. 

Des subventions à d'autres groupes

L'État du Paraguay a pris en charge la dette de la Azucarera Iturbe pour un montant de 15 milliards de Gs, considérée par le Président comme “la plus importante de l'histoire du Paraguay”. Certaines accusations parues dans les journaux affirment aussi que la subvention de gazole accordée par Petropar aux producteurs de soja atteint 140 millions de dollars, mais Petropar est un groupe qui semble avoir perçu de nombreuses aides économiques, y compris avant l'arrivée de la démocratie. En outre, le gouvernement paraguayen a aussi subventionné l'achat de nouveaux autobus aux entreprises de transport public, et continue de subventionner le prix du billet.

La décision de subventionner les paysans avait été approuvée par le Parlement, mais a ensuite été rejetée par le Président. Pour se défendre des revendications des paysans, le Président Cartes a justifié son veto au motif que le coût de la subvention “pourrait atteindre 3,2 milliards de dollars, soit approximativement 25 % du budget général de la nation”, mais les comptes démontrent que c'est faux.

VIDEO : La mission d'un homme pour préserver les rivières d'Irak

samedi 12 août 2017 à 13:50

Cet article de Todd Reubold a été initialement publié sur Ensia.com, un magazine consacré aux solutions environnementales concrètes dans le monde, et est reproduit ici dans le cadre d'un accord de partage de contenus.

Nabil Musa voyage depuis sept ans à travers le Kurdistan irakien, le plus souvent sur une planche à rames ou dans une barque, dans une mission solitaire pour souligner l'importance de la propreté des cours d'eau pour les générations actuelles et futures.

Dans ce documentaire réalisé par Emily Kinsey, nous suivons Musa, qui explique sa relation avec les rivières de sa région et l'effet de la pollution sur sa commune : “Je voulais vraiment faire quelque chose pour la rivière que nous avons perdue quand j'étais enfant”.

Dans tout le pays, les experts craignent que les décennies de guerre, de pollution, de développement sauvage et d'endiguements se soldent sous peu par une crise de l'eau.

Musa est membre de l'organisation non gouvernementale Waterkeepers Iraq (une filiale de Waterkeepers Alliance), qui travaille à “protéger les rivières, ruisseaux et cours d'eau en Irak et soutenir les communautés locales à utiliser ces ressources naturelles de façon durable.”

À la fin de la vidéo, Musa résume l'urgence au cœur de son travail en posant la question suivante : “Si nous n'avons pas cette eau, comment pouvons-nous survivre ?”

Cette vidéo fut produite, filmée et éditée pour Ensia par Emily Kinsey, une réalisatrice de documentaire et journaliste multimédia basée actuellement à Erbil, en Irak. Son travail porte sur les cultures peu abordées dans les médias et persécutées, et se caractérise par une vidéographie collaborative et des techniques multimédias innovatives, qui aident les communautés opprimées à élaborer leur narration.

“Ma liberté m'appartient” : les internautes caraïbéens discutent de la Journée de l'émancipation

vendredi 11 août 2017 à 13:57

La Journée de l'émancipation déclenche des débats autour des libertés acquises.

La statue “Redemption Song” (le Chant de la rédemption), au parc de l'Émancipation, en Jamaïque. Photographie de Mark Franco, utilisée avec permission.

[Sauf mention contraire, tous les liens de ce billet renvoient vers des pages web en anglais]

Le premier août de chaque année, de nombreux territoires des Caraïbes, incluant Trinité-et-Tobago et la Jamaïque, commémorent la Journée de l'émancipation, en hommage à cette journée de 1834 où les Anglais ont émancipé les Africains asservis. Elle a suscité des échanges passionnés à propos de la signification des fêtes et de la manifestation de l'asservissement dans les sociétés contemporaines.

Sur Twitter, le parti au pouvoir de la Jamaïque s'est souvenu de son importance :

Il y a 183 ans, le 1er août, la Jamaïque a progressé vers l'égalité des droits et la justice. 311.000 esclaves furent libérés en Jamaïque.

D'autres sont allés plus loin :

Le matin d'août arrive ! Liberté pour tracer notre propre destinée. Pour aspirer, construire, devenir.

[Sur le poster: “Un peuple qui ne connait pas son histoire, ses origines et sa culture est comme un arbre sans racines”. Marcus Garvey]

La Jamaïque célèbre 183 ans d'émancipation aujourd'hui. Mais l'héritage de l'esclavage affecte encore mon foyer aujourd'hui. Il est temps d'aller de l'avant ensemble.

L'émancipation, un produit ?

L'appropriation culturelle a immédiatement été mise en avant durant les débats en ligne. Sur Facebook, Rhoda Bharath a partagé un lien vers un article implorant les Noirs-américains “d'arrêter de s'approprier les vêtements africains et les marques tribales”, notant que “si on utilise de façon ignorante une culture qui n'est pas la nôtre, on se l'approprie”. Bharath a ajouté en commentaire : “Pour moi, ce qu'il faut se rappeler, c'est quelle culture a été au pouvoir et quelle culture a été dominée […] L'appropriation a lieu quand une culture dominante reprend ou revendique une culture subordonnée.”

Dans le même ordre d'idées, Bharath s'est hérissée quand elle a lu un article de nouvelles citant Khafra Kambom, le président du comité de support de l'Émancipation (ESC) à Trinité-et-Tobago, qui disait : “Il est important de reconnaître la valeur inexploitée du produit Émancipation”. Bharath a répliqué :

Was Khafra Kambon quoted correctly here in today's Express?
I just got a nosebleed.
Product? For whom?
Unexploited? For who to come and exploit? And turn it into a commercialised pappyshow?
Emancipation celebrations should not be a product.

Est-ce que Khafra Kambon a été cité correctement dans le Today's Express ? Ça m'a donné un saignement de nez. Produit ? Pour qui ? Inexploité ? L'exploiter profitera à qui ? Et qui le transformera en caricature commerciale ? La célébration de l'Émancipation ne devraient pas être un produit.

Comment se souvenir ?

Les internautes ont aussi discuté des effets de l'esclavage. Sur Facebook, Tony Hall, le dramaturge trinidadien, a publié un interview d'un avocat noir américain, Bryan Stevenson, qui a conclu ainsi : “Je ne pense pas que l'esclavage a pris fin en 1865. Je pense qu'il a juste évolué”.

Le journaliste devenu cinéaste Kim Johnson a publié un article écrit il y a quelques années, déclenché par une photo qu'il a conservée, qui détaille l'histoire de l'abolition de l'esclavage et comment la Journée de l'émancipation a été marquée à Trinité-et-Tobago :

When I first came across the photograph of the slave it felt white-hot with meaning, as if it would burn the New York Times page on which it was printed. […] Neither the subject nor the photographer was named, only the date and the place: 1863, a Louisiana cotton plantation. And the fact that the man was a slave who had been flogged by his ‘owner’. […]

On the Holocaust Monument in Israel, dedicated to the victims of the Nazis, is the inscription:
‘This must never happen again.’

We in the Caribbean have been more ambivalent towards the horror and shame that was plantation slavery. The sons and daughters of both slaves and slave-owners must live together, and indeed have gone far towards building a civilisation from the charnel house of history. Our monument is ourselves, our society and culture. Its inscription: ‘Do you remember the days of slavery?’ […]

It is a memory which changes over time and which, according to UWI Professor of History Barry Higman finds ‘its most complete expression in the celebration of the anniversary of emancipation’.

La première fois que je suis tombé sur la photo de l'esclave, elle m'a fait un effet comme chauffé à blanc, comme si elle allait brûler les pages du New York Times sur laquelle elle était imprimée. […] Ni le sujet ni le photographe n'était nommé, il n'y avait que la date et le lieu : 1862, une plantation de coton en Louisiane. Et le fait que l'homme était un esclave qui avait été fouetté par ses “propriétaires”. […]

Sur le monument de l'Holocauste en Israel, dédié aux victimes du nazisme, il y a l'inscription : “Ça ne doit plus jamais arriver”.

Dans les Caraïbes nous avons été plus ambivalents envers l'horreur et la honte que fut l'esclavage des plantations. Les fils et les filles d'esclaves et de propriétaires d'esclaves doivent vivre ensemble, et en effet ils ont été loin dans la construction d'une civilisation sur le charnier de l'histoire. Notre monument, c'est nous-même, notre société et notre culture. Son inscription : “Vous rappelez-vous des jours de l'esclavage ?” […]

C'est un souvenir qui change avec le temps, et qui, d'après le professeur d'histoire UWI Barry Higman, trouve “sa plus complète expression dans la célébration de l'anniversaire de l'émancipation”.

Profondément affecté par l'injustice de l'esclavage, Johnson s'est souvenu d'un voyage qu'il a effectué au port négrier de Badagry au Nigéria, qui met en lumière la complicité des africains dans la traite transatlantique des esclaves :

Chief Bowei explained, ‘The descendants of the slave masters talk with so much pride and they show you the graves of the slavemasters, their ancestors and show you the grave of this man, he was a slave master and they are so proud and I get so disgusted, that’s me. My very first time to Trinidad I just laid low to study the people in Trinidad. To see if they had any bitterness in them especially toward pure Africans as a result of the slave trade and all that.’

Le chef Bowei a expliqué : “Les descendants des maîtres d'esclaves parlent avec tant de fierté et ils vous montrent les tombes des maîtres d'esclaves, leurs ancêtres, et vous montre la tombe de cet homme, il était un maître d'esclave et ils sont si fiers et ça me dégoûte tellement, mais c'est moi. Ma première fois à Trinité, j'ai juste commencé à étudier les gens de Trinité. Pour voir si ils avaient un peu d'amertume, surtout envers les purs Africains, en tant que résultat du commerce d'esclaves et tout ça.”

Le pouvoir de la statuaire

Annie Paul, blogueuse basée en Jamaïque, a organisé des tweets à propos du type de monuments utilisé pour marquer l'émancipation dans plusieurs endroits du monde. L'inspiration vient du tweet suivant de Samuel Sinyangwe, qui, lors d'un voyage à la Barbade, a été fasciné par une statue représentant Bussa, à la tête d'une révolte d'esclaves en 1816 :

Premier jour à la Barbade et nous sommes déjà passés devant ce monument trois fois. Je n'ai jamais vu quelque chose comme ça.

Il explique dans un tweet suivant :

De toute ma vie je n'ai jamais vu un monument qui symbolise le pouvoir de la libération noire de la façon dont cette statue le fait. Intentionnellement.

Paul a trouvé ce fil sur Twitter “fascinant car en Jamaïque les conservateurs étaient totalement opposés à ce qu'ils considéraient comme une représentation-cliché des esclaves brisant leurs chaînes. Ça a directement influencé la sélection du monument de l'émancipation jamaïcaine”.

Sinyangwe a ajouté :

La statue dont je me souviens avoir vu dans mon enfance à Orlando était celle-ci. Elle commémore les soldats confédérés luttant pour garder les noirs asservis.

Elle a été démontée il y a UN MOIS. Et ils ne l'ont jamais remplacée par une statue comme celle de la Barbade.

Des utilisateurs de Twitter de toutes les régions ont rapidement partagé des photos de monuments commémorant l'émancipation dans plusieurs pays, comme celle-ci de Cuffy en Guyane :

C'est Cuffy à Georgetown, Guyane. Il a mené une révolte d'esclaves qui a commencé le 23 février 1763, un jour que la Guyane reconnaît encore comme le jour de la République.

Une autre représente une scène de révolte d'esclaves à Curaçao :

Vous trouverez celle-ci à Curaçao. C'est à propos de la révolte d'esclave de 1795 ici dans l'île.

… Une belle photo du Marron Inconnu en Haiti :

Le Marron Inconnu de Haiti.

Et bien-sûr la statue emblématique située à l'entrée du parc de l'Émancipation en Jamaïque :

“Chant de la rédemption” – au parc de l'Émancipation, Jamaïque. Montre une totale liberté.

Revendiquer la liberté

La journée de l'Émancipation a aussi suscité des discussions sur l'importance de revendiquer des libertés durement gagnées. L'activiste Tillah Willah écrit :

What Emancipation mean, we still enslaved, who is a born again African and cote ci cote la and guinea hen bring ram goat.
Hear nah, my grandmothers’ knees were too bruised by prayers and cleaning people floors for me to do anything else but be who I am.
My freedom is mine. I choose to give thanks. And do work. And help people. And weep. And dance. And remember joy. I choose to question myself everyday and put down other people's loads that are no longer mine to carry. That is my freedom. What is yours?

Ce que Émancipation signifie, nous sommes encore asservis, qui est né d'origine africaine, et côté-ci côté-là et une histoire à dormir debout.

Les genoux de ma grand-mère ont été trop meurtris par les prières et le nettoyage du sol des gens pour que je sois autre chose que ce que je suis.

Ma liberté m'appartient. J'ai choisi de remercier. Et de travailler. Et d'aider les gens. Et de pleurer. Et de danser. Et de me rappeler la joie. J'ai choisi de m'interroger tous les jours et de déposer les charges des autres qu'il ne m'appartient plus de porter. C'est ma liberté. Quelle est la vôtre ?

Le journaliste Wesley Gibbings a résumé en disant que la liberté de l'émancipation appartient à chacun :

The way I see this is like living in the same village with other people. Do we say ‘one third is yours and another his and one third for me?’ Or is it that all of the village or town is for all of us?
I therefore do not lay claim to a quarter this and a quarter that when it comes to my mixed heritage. I am a quarter nothing! All of them are all of me.
I don't feel compelled to do something ‘African’ to commemorate our emancipation. I listen to the music every day and I have been there (more than once) so I know there is no monolithic version of ‘African’ dress and, especially today, of ‘African music’. Most of all, it is who I am in totality.
So much to explain to the man who once warned me about ‘all you’ being at the Emancipation Village in Port of Spain. Too much to explain on this important day. I lay as much claim to this freedom as anybody else. It is mine.

La façon dont je vois ça, c'est comme vivre dans le même village avec d'autres personnes. Est-ce que nous disons : “un tiers est à vous et l'autre tiers est à moi ?”. Ou est-ce que le village ou la ville en entier est à nous tous ?

Je ne prétends donc pas à un quart de cela quand il est question de mon héritage mixe. Je ne suis un quart de rien ! Je suis toutes ces parts.

Je ne me sens pas obligé de faire quelque chose d'”africain” pour commémorer notre émancipation. J'écoute de la musique tous les jours et j'y suis allé (plus d'une fois), ainsi je sais qu'il n'y a pas une version monolithique de la robe “africaine” et, surtout aujourd'hui, d'une “musique africaine”. Plus que tout, c'est ce que je suis en totalité.

Il y a tellement à expliquer à l'homme qui une fois m'a averti sur “mon être tout entier” au village de l'Émancipation du port d'Espagne. Trop à expliquer à propos de ce jour important. Je prétends à cette liberté tout autant que n'importe qui d'autre. Elle est à moi.

A bord du Maitree Express, le train de l'amitié entre l'Inde et le Bangladesh

jeudi 10 août 2017 à 19:01

Voyage inaugural du Maitree Express II, reliant Khulnâ à Calcutta. Capture d'écran de la vidéo YouTube de l'utilisateur BDRailFan. 8 avril  2017

De la remise en service de deux axes ferroviaires de l'époque coloniale britannique, l'Inde et le Bangladesh espèrent un accroissement de l'amitié et de la paix entre leurs citoyens. Le Maitree Express, mis en exploitation il y a neuf ans, conquiert lentement les cœurs et les esprits des voyageurs en fournissant un transport abordable et régulier entre les deux pays.

Comment les divisions politiques ont affecté le chemin de fer

Le Bengale est une vaste zone géopolitique du sous-continent indien ; avec plus de 250 millions de Bengalis, c'est une des régions les plus densément peuplées au monde, unie par la langue et la culture, mais divisée par la religion. Le premier coup a été la partition du Bengale en 1905, déclarée par les colonisateurs britanniques, qui séparèrent la partie orientale largement musulmane de l'occidentale largement hindoue. Le Bengale fut réunifié en 1911, mais Hindous et Musulmans ne tardèrent pas à réclamer la création de deux États indépendants à l'intérieur du Bengale.

Bengale Oriental et Bengale Occidental. Carte par Goran via Wikimedia Commons. CC BY-SA 3.0

En 1947, le Bengale reçut le coup de grâce : il fut partagé entre deux pays, l'Inde et le Pakistan, sur une base uniquement religieuse, dans le cadre de la Partition des Indes. Le Bengale occidental est resté dans l'Inde, et le Bengale Oriental est devenu le Pakistan oriental, qui se libéra du Pakistan en 1971 pour devenir le Bangladesh.

Le Chemin de fer du Bengale Oriental a été un des pionniers du rail, en fonctionnement de 1857 à 1942 dans les provinces du Bengale et de l'Assam de l'Inde britannique.

Avant la partition de l'India en 1947, des lignes régulières de voyageurs reliaient Calcutta (Kolkata) à des villes comme Khulna et Jessore au Bengale oriental, avec la compagnie de l’Eastern Bengal Railway (Chemin de fer du Bengale oriental). Après la partition, le chemin de fer périclita — des restrictions de visa furent instaurées, et l'inexistence de gares à la frontière avec des installations appropriées de douanes et de contrôle d'identité entraîna la fermeture de la ligne. Les liaisons ferroviaires restantes entre l'Inde et le Bangladesh (alors Pakistan oriental) furent suspendues pendant la guerre indo-pakistanaise de 1965. Les voyages aériens coûteux et les services limités de cars étaient depuis lors les seuls moyens de transport existants entre les deux Bengale.

Un geste d'amitié

Après quatre décennies, le Maitree Express I a été inauguré le 14 avril 2008, à l'issue d'années de négociations entre l'Inde et Bangladesh. “Maitree” signifie amitié, pour dénoter la signification de cette ligne de train pour les relations d'Etat entre les deux pays :

Deux nations + un train…… Le Maintree express 13109_13110

La ligne a commencé par fonctionner deux fois par semaine, pour une durée de trajet de 13 heures, et avec deux arrêts aux gares-frontières de Gede et Darshana pour les formalités douanières et de police. A présent, le train circule avec des voitures climatisées six fois par semaine dans les deux sens, en 11 à 12 heures pour un trajet de 450 km. (Cette page Facebook informe sur la ligne.)

Le prix du billet Dacca-Calcutta (ou Calcutta-Dacca) en 1ère classe climatisée est d'environ 27 dollars (23 euros), et de 17 dollars (14,50 euros) en classe économique climatisée (taxes comprises). Beaucoup mois cher qu'un billet d'avion ordinaire en classe économique entre les deux villes, environ 100 dollars (85 euros) pour une heure de vol.

Pour satisfaire la demande croisssante, une seconde ligne de train (le Maitree Express II) a été inaugurée en avril 2017, reliant Calcutta à la ville bangladeshie de Khulna, ce qui a restauré la route historique du Barisal Express. Le voyage de 176 km comporte 96 km du côté du Bangladesh.

Le train Calcutta-Khulna (Maitree Express) a été remis en service 52 ans après la guerre indo-pakistanaise de 1965. Merci !

“Agréables frissons de joie”

Parce que le Maitree Express réunit des gens des deux Bengale, beaucoup d'émotions sont réveillées. Un voyage abordable a prouvé son pouvoir d'unir les gens des deux pays, en leur donnant l'opportunité de visiter leurs terres ancestrales et de rencontrer amis et parents de l'autre côté de la frontière. Sur Facebook, le journaliste bangladeshi Fazlul Bari raconte la scène à laquelle il a assisté dans une gare du Bengale Occidental, où il a observé une femme qui avait émigré du Bangladesh encore adolescente :

স্টেশনে বসে যখন লোকাল ট্রেনের জন্য অপেক্ষা করছিল তখন একটা ঘোষনা এলো ‘’দুই নম্বর প্লাটফর্ম থেকে একটা ট্রেন সোজা চলে যাবে দয়া করে নিরাপদ দূরত্বে সোরে দাঁড়ান ‘’। তখন দেখে ট্রেনটা ‘ মৈত্রী এক্সপ্রেস ‘ কলকাতা টু ঢাকা বাংলাদেশ লেখা আর ট্রেনের গায়ে লাল সবুজ বর্ডার টানা। ট্রেনটা ২-৩ মিনিট মত দাড়িয়ে ছিল। [..]

সঞ্চিতা বলল এটা দেখে মুহূর্তের মধ্যে যেন তার ভেতরটায় এক অজানা, স্নিগ্ধ, মনোরম, অনাবিল, আনন্দের ঢেউ খেলে গেল! দিশা তাকে কিছু একটা জিজ্ঞেস করতে চেয়েছিল। ও তখন দিশা কে থামিয়ে দিয়ে ওর কানের কাছে মুখ নিয়ে বলতে লাগলো ‘’দিশা, দেখ! এটা আমার দেশের ট্রেন। এই ট্রেনে আমার দেশের লোক রয়েছে। সেই দেশ যেখানে আমি জন্মেছি , বড় হয়েছি। যে দেশ নিজেকে চিনতে শিখিয়েছে। নিজেকে , নিজের দেশকে, দেশের মানুষকে , ভালবাসতে শিখিয়েছে। আমাকে অনুভূতি দিয়েছে , অনুভব করার শক্তি যুগিয়েছে । এই ট্রেনে যারা আছে তাদের হয়তো আমি চিনিনা কিন্তু এরা তো আমার সেই চেনা দেশের লোক। সেই চেনা দেশেই থাকে । তাই এরা ও আমার আপনজন। এদের একটু প্রাণ ভরে দেখতে দে’’।

Elle attendait un train local dans cette gare, et il y a eu une annonce par le haut-parleur : ‘Le Maitree Express va entrer en gare quai 2, merci de cous éloigne du bord du quai.’ Elle regarde le train marqué ‘Calcutta-Dacca, Bangladesh’ et il y a des bordures rouges et vertes sur les voitures. Le train ne s'est arrêté que 2 ou 3 minutes. […]

Sanchita a dit avoir ressenti un frisson inconnu, doux, joli, paisible et agréable à l'intérieur de son corps en regardant le train. Sa fille Disha allait poser une question, Sanchita l'a arrêtée, et lui a dit : ‘Disha, regarde, c'est un train de mon pays. Dedans il y a des gens de mon pays, là où je suis née et j'ai grandi. Le pays qui m'a permis de me découvrir moi-même et d'exprimer de l'amour pour mon pays et les miens. Il m'a appris à ressentir et à l'aimer. Je ne connais peut-être pas les passagers de ce train mais ils sont du pays que je connais. Alors ils me sont proches. S'il te plaît laisse-moi les regarder un peu.’

MD Arif Hossain se désole sur Facebook de devoir renoncer à son habitude de regarder par la fenêtre ouverte :

পহেলা বৈশাখ থেকে শুরু হয়েছে মৈত্রী এক্সপ্রেস এর ফুল এসি ট্রেন। আমার মতো ভ্রমণ পাগল মানুষের জন্য মনে হয় একটু সমস্যাই হয়ে গেল।
এসি বগির জানালার কাঁচের ভেতর থেকে প্রকৃতি দেখা আর টেলিভিশনের সামনে বসে প্রকৃতি দেখা একই ব্যাপার, দুটোই খুব দূরের মনে হয়

Les trains du Maitree Express sont désormais totalement climatisés depuis ce Nouvel An bengali (14 avril). Je crois que ça va être un problème pour les passionnés de voyage comme moi.

Regarder défiler les paysages à travers la vitre d'un wagon climatisé, c'est comme regarder un écran de télévision. Ça paraît artificiel dans les deux cas.

Sur diverses plateformes de médias sociaux, des gens ont partagé leurs expériences de voyage à bord du Maitree Express, ou de trainspotting. Un certain Rahman Atik a partagé un vlog sur YouTube racontant son voyage de Dacca à Calcutta en Maitree Express :

Le Maitree Express va prochainement inaugurer un service non-stop :  les passagers seront autorisés à effectuer la totalité des formalités de police et de douane à leur lieu de départ, ce qui permettra un voyage confortable et sans encombre, tout en réduisant la durée du trajet de douze à six ou sept heures.

#ArepaLeTacosEstAvecToi, ou l'expression de fraternité entre le Mexique et le Venezuela

jeudi 10 août 2017 à 16:12

Détail de l'illustration réalisée par une artiste vénézuélienne, créatrice de la page ‘Azúcar y Sal’. Image largement diffusée, tirée de son profil public sur Facebook.

Sauf mention contraire, tous les liens de cet article renvoient vers des pages en espagnol.

Suite au scrutin vénézuélien controversé du 30 juillet dernier, convoqué par le président Nicolas Maduro pour former une Assemblée constituante, et après quatre mois de manifestations quotidiennes contre le gouvernement en raison de la crise sociale, économique et politique du pays, les Vénézuéliens ont reçu du Mexique un élan de solidarité virtuelle. Derrière le compte Twitter @BanderitasSquad, un groupe de jeunes Mexicains anonymes a créé le mot-clic #ArepaElTacoEstáContigo [#ArepaLeTacosEstAvecToi]. La chaîne NTN24 fait connaître leurs motivations, données par l'un des membres :

Habíamos escuchado de venezolanos que, probablemente, ellos tendrían su última noche con Internet y este fue un modo de mostrar nuestro apoyo. Le mandamos mucho amor y que sepan que no están solos.

J'avais entendu dire certains Vénézuéliens qu'ils allaient probablement vivre leur dernière nuit avec Internet, et c'était une façon de manifester notre soutien. On leur envoie beaucoup d'amour, qu'ils sachent qu'ils ne sont pas seuls.

Ce message d'encouragement réunit deux icônes de la gastronomie populaire de chaque pays : l’arepa [fr] vénézuélienne et le tacos mexicain. Avec cette formule bien trouvée, des centaines de personnes ont adressé des messages d'admiration et leurs vœux les plus sincères aux Vénézuéliens qui luttent pour la démocratie.

Nous reproduisons ici quelques-uns de ces messages :

#ArepaElTacoEstaContigo je ne vous envoie pas du courage parce que je sais que vous en avez déjà, mais j'adresse tout mon respect et mon admiration à un peuple qui se bat

Parce que tout le monde n'est pas capable de s'élever et de lutter contre l'injustice! Toute mon admiration aux Vénézuéliens #ArepaElTacoEstaContigo

Les Vénézuéliens se battent tous les jours, leur exemple m'a ouvert les yeux, lutter pour un pays libre. #ArepaElTacoEstaContigo

Certains ont livré des paroles de réconfort :

On devrait emmener tous les Vénézuéliens au Mexique et leur donner tout plein de tacos pour en finir avec toute cette tristesse #ArepaElTacoEstaContigo

Sérieux, ça me donne envie de prendre le Venezuela, de l'envelopper dans une couverture pleine d'amour et de le mettre en lieu sûr #ArepaElTacoEstaContigo

Les messages sont également venus confirmer l'amitié entre les deux peuples frères :

Ce hashtag, c'est rien que de l'amour pour les Vénézuéliens et Vénézuéliennes, de la part du chaos mexicain #ArepaElTacoEstaContigo

Le mieux que l'on puisse faire, c'est leur envoyer de bonnes ondes et leur montrer qu'ils ne sont pas seuls. Courage, Venezuela #ArepaElTacoEstaContigo

Certains se sont plaints que les utilisateurs mexicains de Twitter suivent plus ce qu'il se passe au Venezuela que dans leur propre pays. Banderitas Squad leur répond :

On n'est pas hypocrites parce qu'on ne parle pas des problèmes du Mexique, c'est juste qu'aujourd'hui, on a voulu donner le sourire à quelqu'un d'autre #ArepaElTacoEstaContigo

Un utilisateur a même signalé à la plateforme Twitter un tweet du président Maduro remerciant le Conseil électoral national d'avoir garanti le bon déroulement des élections de la Constituante :

#ArepaElTacoEstaContigo Ça lui va parfaitement, à ce salaud
Sur l'image : ‘Signaler’,  ‘Les propos tenus sont inappropriés ou dangereux”

Face à cette vague de “bonnes ondes”, les Vénézuéliens ont exprimé leur reconnaissance :

Amis solidaires du monde entier #ArepaElTacoEstaContigo MERCI. Que Dieu vous bénisse

Le combat pour les droits de l'homme n'a pas de frontières ! Merci aux Mexicains solidaires du combat pour la liberté du Venezuela #ArepaElTacoEstaContigo

Magnifique, cet #ArepaElTacoEstaContigo qu'ont inventé les Mexicains. De la solidarité entre des drapeaux qui sont immuables. Ceux de l'âme.

Pantallazo de la actualización pública de Facebook de Azúcar y Sal

Capture d'écran du post d'Azúcar y Sal sur Facebook.

Je n'ai pas pu m'empêcher de faire un petit dessin pour ce merveilleux hashtag que mes chers amis mexicains ont créé sur Twitter <3 Merci pour ce geste et pour votre soutien ! Je vous aime !

Vos messages d'encouragement et de soutien font toute la différence, même si vous n'y croyez pas. Merci beaucoup! #ArepaElTacoEstaContigo Un petit dessin de remerciement

Sur le dessin, respectivement en espagnol mexicain et vénézuélien : “J'suis avec toi, mon pote” “Merci mon gars, toi t'es un ami, un vrai”.

Les créateurs du Hashtag ont répondu avec un simple tweet :

Vénézuéliens, il n'y a pas de quoi, on a voulu vous redonner le sourire et vous témoigner notre soutien, on vous aime #ArepaElTacoEstaContigo

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