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Un calendrier de prêtres orthodoxes avec leur chat fait le buzz en Russie

mardi 15 décembre 2015 à 17:11
The October page of the quirky calendar features hieromonk Theodorit and his cat Monya. Image from pravmir.ru.

Le mois d'octobre de l'étrange calendrier présente le moine Theodorit et son chat Monya. Image fpravmir.ru.

Vous n'avez probablement jamais vu des chats et l'église russe orthodoxe si proches et dans de si tendres attitudes. Un groupe de fervents chrétiens a publié un calendrier de photos où les douze mois de l'année prochaine sont illustrés par des photos de prêtres orthodoxes posant avec leur chat.  Le calendrier  “Prêtre+ Chat” publié par Artos, une association d'artistes chrétiens, souhaite donner par ce moyen une image de la “culture orthodoxe moderne” en Russie.

La dernière édition du calendrier Pirelli a pris un virage culturel (en abandonnant ses nus provocateurs). “Prêtre + Chat”  semble aller contre l'idée même des calendriers traditionnels orthodoxes qui représentent des saints et des icônes religieuses. Il n'est donc pas étonnant que l'information soit aussitôt devenue virale.

Les prêtres souriants en soutane ont été photographiés dans l'intimité avec leur félin par la photographe Anna Galperina, chez eux, sur de confortables sofas, avec des coussins, ou sur des bancs au soleil.  2016 commencera avec l'archiprêtre Oleg Batov et son chat  Apelsin. Monsieur Février, l'archiprêtre Pyotr Dynnikov, qui dirige un refuge pour animaux est photographié avec ses deux chats, Angola et Vasik.

A sampling of the monthly pages in the

Un échantillon des pages du calendrier, photo Xenia Loutchenko sur Facebook.

La journaliste Xenia Loutchenko, coordinatrice du projet, qui travaille pour le site religieux  Pravmir dit que “Prêtre + Chat” devrait être considéré comme un hybride entre un calendrier italien, Calendario Romano, qui présente de jeunes et beaux prêtres et I gatti di Roma le calendrier des chats de Rome.

Xenia Loutchenko raconte que le casting pour le calendrier s'est déroulé de façon spontanée : les prêtres ont embarqué leur animal de compagnie dans l'aventure sans façon, pour l'expérience : “C'était à celui qui avait un chat et était prêt à poser pour une photo.” La journaliste insiste sur le fait que le calendrier n'est pas recommandé officiellement par l'église orthodoxe russe et qu'il a été inspiré par un livre sur la vie quotidienne du clergé russe.

“Je ne vois pas un gros péché dans ça” a commenté le porte-parole de l'église orthodoxe russe, le Très Révérend Vsevolod Chaplin, interrogé sur le calendrier.  “Les prêtres ont des chats, les chats ont des prêtres, parfois, les chats vivent même dans une église. Cependant, je ne mettrais par un tel calendrier sur mon mur.”

Des internautes russes ont exprimé quelques doutes et s'interrogent sur l'élément spirituel de l'entreprise.

Oh, je sais pas…Je me suis habitué à l'idée que les chats, la participation à l'émission “The Voice,” etc. sont des choses séculaires, et ici, il y a des hauts représentants de l'église, et tout ça

Les réactions ont été en général positives même si certains ont trouvé le projet  “kitsch.” “J'ai eu des commentaires de la part de ceux qui sont loin de l'église, comme “Rien ne peut aider ces prêtres, leur image ne peut pas s'améliorer, même avec des chats !” a répondu Xania Loutchenko au journal  ‘Komsomolskaya Pravda’.

Sur le site religieux Pravmir, où Xania travaille, les réactions ont été là aussi variées. Un commentateur anonyme écrit :

Портреты хорошие, отцы веселые, но идея странная. Отцы же не поп-звезды какие-нибудь, чтобы на календаре размещаться. И не близкие родственники. Иногда можно заказать календарь с фотографиями родственников. А это – странная затея.

Les portraits sont beaux, les prêtres sont souriants, mais l'idée est bizarre. Les prêtres ne sont pas des pop stars qui finissent sur un calendrier. Et ils ne sont pas non plus des parents proches. Il est envisageable de commander un calendrier avec des photos de ses proches, c'est possible. Mais là, c'est vraiment un projet bizarre.

Elena Gatchinskaya prend le contre-pied des critiques, et se demande pourquoi l'idée fait tant réagir.

Нет, а что такого? Нормальный календарь, тем более, на грядущий год. Священники напомнят о Христе, ну а котики – антистресс. И тоже напомнят о Христе. “Всякое дыхание да хвалит Господа”. И чего многие так негативно реагируют?

Quel est le problème ici ? C'est un calendrier normal pour l'année à venir. Les prêtres vous rappelleront le Christ, et les chats sont bons contre le stress. Et ils vous rappelleront aussi le Christ. “Que chaque souffle rende grâce à l'Eternel.” Pourquoi tellement de gens réagissent mal ?

Yekaterina Kovrigina dit qu'elle préfère de loin les prêtres aux singes, symbole de l'année chinoise à venir. Les  calendriers avec des animaux se vendent en général très bien en Russie, et celui consacré aux singes a déjà été distribué dans les kiosques.

Лучше батюшки с котиками, чем обезьяны всех видов из каждого утюга.

Mieux vaut des prêtres avec des chats que ces singes en tout genre qui débordent de tous les kiosques à journaux.

Le calendrier “Prêtre+ Chat” a été tiré à 1000 exemplaires dans un premier temps mais une réimpression devrait être prévue. Le calendrier est en vente dans plusieurs églises de Moscou et peut aussi être acheté en ligne.

Amsterdam : Sahand Sahebdivani transforme la narration en phénomène culturel

mardi 15 décembre 2015 à 16:19
Sahand

Sahand Sahebdivani et sa mère Parwin Akhbari sur scène à Anvers, en Belgique. Photographie de Facebook (reproduite avec autorisation).

Ceci est le premier volet d'un entretien en deux parties avec Sahand Sahebdivani. Lisez la seconde partie ici.

Le Mezrab a été créé pour rassembler les gens autour de la musique et de la narration, dans l'esprit des échanges culturels et de la célébration des hybrides ethniques. Situé à Amsterdam, le Mezrab est un endroit où les gens viennent pour partager des histoires, de la musique, des rythmes et plus encore. Aujourd'hui, il est également connu pour ses concerts, improvisations et comédies et est devenu un lieu chéri des amoureux de la culture à Amsterdam. Après des années de soirées de narration envoûtantes, une école vient d'ouvrir dans le centre culturel pour enseigner cet art. Du reste, l'idée du Mezrab s'est développée avec son fondateur, Sahand Sahebdivani, et sa famille. Tenacité, identité, art et quelques djinns (les démons du folklore arabe et musulman) : tous font partie de l'histoire du Mezrab.

Global Voices s'est entretenu récemment avec Sahand, qui nous a expliqué les origines du Mezrab et son propre cheminement. Il nous a parlé des hybrides culturels, de la représentation des femmes dans les histoires traditionnelles iraniennes, et de l'histoire du Mezrab, qui a commencé par une petite tradition familiale et qui est aujourd'hui l'un des espaces culturels les plus célèbres d'Amsterdam.

En fait, [le Mezrab] a commencé avec deux ingrédients essentiels : le fait que j'ai grandi avec des parents possédant tous ces talents, et le fait qu'ils ne les utilisaient pas. Mes parents sont très instruits, mais quand ils sont arrivés ici [aux Pays-Bas], tout ce qu'ils ont pu faire, c'est du ménage et de la cuisine. Ce qu'ils ont fait, sans se plaindre. C'est une vie qu'ils ont acceptée. Mais en même temps, à la maison, ils étaient ces gens incroyables et intéressants, toujours en train de cuisiner, de réciter des poèmes, de chanter.

Vers mes vingt ans, j'ai commencé à inviter des gens chez nous pour dîner ensemble. C'est devenu un tel succès que nous avons ouvert un endroit pour reproduire tout ça. Pour être honnête, mon père avait créé quelque chose de similaire quand j'avais dix ans, un centre culturel à Amsterdam. Il s'appellait Khaneye Aftab (la Maison de la lumière) et il était près du Mezrab. Je me souviens d'y avoir vu mes premiers conteurs persans, ils venaient de France. Il s'y passait plein de choses supers. Mon père cuisinait, il y avait des cassettes vidéos, de la musique, de la poésie, mais ça n'a pas marché parce que c'était seulement pour les Iraniens. Tout était organisé en persan. Du coup, les non-Persans ne s'y sentaient pas chez eux. […]

[Alors nous avons réfléchi à] un autre endroit comme celui-là, mais ouvert à toutes les cultures. Nous avons ouvert celui-ci, qui faisait environ trente mètres carrés. Je me rappelle qu'il attirait particulièrement les gens du sud de l'Europe, de l'Espagne, de l'Italie, de l'Amérique latine. Peu du Moyen Orient, contrairement à ce à quoi on aurait pu s'attendre, mais beaucoup de Sud-Américains, d'Espagnols, d'Italiens, de Portugais. Quelques Kurdes. En cinq ans, nous avons organisé des soirées de contes, mais nous avons surtout utilisé la musique pour rapprocher les gens. Nous avons organisé beaucoup d'improvisations. Pour moi, cet endroit était comme un conservatoire. Je n'ai jamais fait d'études de musique, alors jouer là-bas chaque semaine était très important pour moi. J'ai appris comment faire de la musique sur le tas. Ce fut la naissance du Mezrab.

Alors que son projet prend forme, Sahand se forme à l'art du conte et se rend compte que cette forme artistique a besoin d'une plus grande scène. C'est ainsi que le Mezrab se fait connaître comme l'endroit où les conteurs peuvent se rendrent et réciter toutes sortes d'histoires. Réelles, mythologiques, imaginaires, issues de différentes traditions et en anglais aussi bien qu'en néerlandais. La présence du Mezrab sur internet a également pris de l'ampleur, et cette évolution est visible sur YouTube :

Le Mezrab Cafe et les fans partagent des vidéos des représentations : ces enregistrements donnent un aperçu de ce phénomène. Par exemple, une vidéo d'il y a huit ans montre une improvisation dans une pièce de vingt mètres carrés dans laquelle Parvin, la mère de Sahand, accompagne les musiciens.

Certaines vidéos sont disponibles sur la chaîne YouTube MezrabCafe :

La narration représente plus que la simple transmission de vieux contes d'une génération à la suivante; c'est aussi une façon de retrouver de vieux récits, comme par exemple des histoires qui mettent en avant le rôle des femmes dans les anciennes épopées. De cette façon, le Mezrab embrasse des idées et des mouvements qui ne portent pas que sur la communication interculturelle, mais aussi sur l'égalité. Ces récits viennent d'endroits lointains et anciens, mais ils résonnent avec les idéaux de notre époque. Le Mezrab est ainsi devenu un lieu de dialogue bien vivant entre passé et présent.

J'ai un côté idéaliste quand je raconte une histoire. Ca, c'est vrai. Mais je pense que ce serait une mauvaise approche que de chercher des histoires et ensuite seulement y mettre mon idéalisme. Ce qui m'attire, c'est que de nombreux récits contiennent déjà ces idées. Bien plus qu'on ne pourrait penser. Nous venons de pays (je pense au Moyen Orient, ou peut-être même l'Inde) dans lesquels les femmes ont un rôle inférieur à celui des hommes.

Je pourrais chercher des histoires d'oppression et les modifier pour qu'elles s'accordent à mes idéaux, mais je ne crois que ce soit la bonne façon de faire, surtout si ces histoires elles-mêmes sont déjà remplies de récits donnant du pouvoir aux femmes. Prenez par exemple l'histoire de Rostam et Tahmineh. C'est une histoire que mon père me racontait quand j'étais petit comme un exemple de la force d'une femme. Finalement, il y a vraiment beaucoup d'exemples de femmes fortes et féroces. Mon idéalisme consiste davantage à mettre ça en avant qu'à inventer des détails dans l'histoire.

C'est une très belle chose que ces femmes fortes existent dans ces récits et d'une certaine manière, c'est plutôt gratifiant de voir que c'est le régime en place, qui veut garder les femmes dans une situation inférieure, qui doit changer les histoires pour qu'elles s'accordent à leur vision.

Au final, c'est la même chose pour le nationalisme, parce que les Iraniens peuvent être incroyablement nationalistes, horriblement nationalistes même, et si vous êtes ainsi alors l'une de vos fiertés est le Shahnameh [poème épique écrit par le poète persan Ferdowsi]. Mais en fait, les héros les plus importants du Shahnameh étaient tous issus d'Iraniens et du sang de l'ennemi. Presqu'aucun d'entre eux n'était “cent pour cent” Iranien. Ils avaient tous un grand-parent ou une mère qui venait du côté “ennemi” et d'une certaine façon ce livre, cette collection d'histoires, peut servir d'antidote. Pour moi, c'est une inspiration.

Dans la seconde partie de cet entretien, Sahand aborde plus en profondeur les rencontres entre les gens, les hybrides culturels et le pouvoir des histoires, à la fois sur internet et dans la vie réelle.

Les autorités chinoises veulent récompenser les internautes qui diffusent de “bonnes nouvelles”

mardi 15 décembre 2015 à 12:58
"Répandre de l'énergie positive pour construire le China Dream" est une stratégie de propagande sous la présidence de M. Xi Jinping. Image de ligne tupi générateur de bannière.

“Répandre de l'énergie positive pour construire le China Dream” est une stratégie de propagande sous la présidence de M. Xi Jinping. Image de tupi ,générateur de bannières.

Depuis 2014, “la diffusion de l'énergie positive dans la société” est devenue une stratégie de propagande majeure [fr] préconisée par le Président chinois Xi Jinping. Le Web chinois compte aujourd'hui la présence de millions de “bénévoles de civilisation” qui publient des messages amicaux du Parti communiste chinois.

Mais l'énergie positive ne peut  pas faire beaucoup contre les nouvelles déprimantes qui dominent, comme le smog toxique [fr] qui a enveloppé Pékin et certaines parties du nord de la Chine.

Pour lutter contre cela, M. Jiang Jun, le porte-parole du Bureau d'information Internet de l'état chinois, exhorte les entreprises opérant dans les domaines des technologies de l'information (TI) et de l'Internet à allouer une partie de leurs fonds destinés à la charité à ceux qui “diffusent de bonnes nouvelles.”

Lors d'une réunion à la fin de novembre, à laquelle assistaient les principaux portails en ligne, les sites d'information et entreprises de l'Internet telles que Alibaba, Baidu et Sina, M. Jiang a critiqué les opérateurs pour leur absence de soutien à la charité. “Deer Murmur”, un blogueur du site watching.cn a ainsi paraphrasé et cité cette suggestion de M. Jiang:

互联网不但是信息集散地,也是知识集散地,也越来越多地成为商品和服务的集散地,同时,它也是大众情绪集散地,这其中,就有戾气、怨气。怎样平复呢?比如,可以通过公益活动,“让网民存善念、发善贴、行善事、助善行,有的国外的网站仅仅是转发一个善行的帖子就奖励,转发就会给予补贴。” […] 我们要打扶贫攻坚战,现在网民有多少呢?有6亿多,没有脱贫的人有七千多万,比例差不多是九个网民对一个穷人,我们希望理想的结果是:让九个网民来帮助一个穷人。

L'Internet est non seulement une plate-forme d'information, mais aussi une plate-forme de connaissances, d'affaires et de service. Elle génère également des émotions publiques, des sentiments tels que la colère et le ressentiment. Comment pouvons-nous provoquer des émotions comme le ressentiment? Nous pouvons utiliser la charité “pour encourager les internautes à cultiver la bonté, publier de bonnes nouvelles, faire de bonnes choses et être de bons Samaritains. Certains sites à l'étranger donnent des récompenses [aux internautes] s'ils publient de bonnes nouvelles, une sorte de subvention “. […] Nous pouvons traiter cela comme une campagne pour sortir les gens de la pauvreté. Actuellement, nous avons 600 millions d'internautes et plus de 70 millions d'entre eux vivent dans la pauvreté. Le nombre de personnes aisées par rapport aux pauvres est d'environ neuf pour un. Nous pouvons demander aux neuf qui sont mieux lotis d'aider celui qui est pauvre.

Actuellement, la plupart des entreprises opérant dans les domaines des nouvelles technologies et les géants de d'Internet ont des services pour sensibiliser le public envers les groupes défavorisée afin de collecter des fonds pour les organisations qui, par exemple, les aident ou font des travaux de secours lors de catastrophes. Cependant, canaliser des ressources vers ceux qui “diffusent les bonnes nouvelles” implique que ces entreprises assument les frais pour les propagandistes online du gouvernement et du parti (communément connus comme le Parti de 50 cents).

“Vous appelez cela énergie positive?

La définition même de “bonnes nouvelles” est également discutable. Le site China Digital Times a récemment signalé un exemple particulièrement troublant de la façon dont les médias publics transformaient de mauvaises nouvelles en bonnes nouvelles.

Les informations ont présenté une touchante histoire d'un pauvre homme élevant seul son jeune enfant. L'histoire a été présentée comme #positiveenergy sur Weibo, une plateforme populaire de médias sociaux. Mais il se pourrait bien que l'histoire soit totalement différente, et peu édifiante : 

张保勇说,自己家庭贫困,跟哥哥一把年龄了还没有结婚。10年前,他在外捡垃圾的时候,碰到一个智障女子,三年后,女子怀孕并生下一名女婴,因为害怕别人知道,他一直不敢出门,就在孩子刚满三个月的时候,孩子母亲偷跑出去,他一心照顾孩子,也没再寻找。“我身体残疾,没有劳动能力,我哥哥每天都去东阿县城捡垃圾,一个月也就收入六七百元钱。”
[…]虽然有外债,但到了上学年龄,张保勇还是送女儿上了幼儿园,“半年学费一两千块钱,我们俩省吃俭用也得供孩子上学。”张保勇说,因为自己跟智障女没有结婚证,孩子在东阿县医院出生时,没法办理出生证明,所以女儿到现在还是黑户。“没有户口,连一年级都没法上。” […]

M. Zhang Boyong dit que sa famille est pauvre. Bien que son frère et lui sont adultes, ils sont encore célibataires. Il y a dix ans, il a rencontré une femme handicapée mentale alors qu'il ramassait des ordures recyclables dans les poubelles. Trois ans plus tard, la femme a donné naissance à une petite fille.Il n'a pas osé s'identifier comme le père, soucieux que d'autres le sachent. Lorsque le bébé a atteint trois mois, sa mère s'est enfuie. Il ne l'a pas cherchée, car il devait prendre soin du bébé. “Je souffre d'un handicap physique et je ne peux pas faire des travaux pénibles. Mon frère doit aller en ville pour ramasser des objets à recycler et gagner environ 600-700 yuans [environ 100-120 dollars américains] par mois.

[…] Il avait même eu à emprunter de l'argent pour envoyer sa fille à l'école maternelle. “Les frais s'élevaient à environ 1000-2000 yuans pour six mois. Nous avons du réduire les frais pour la nourriture afin d'économiser assez d'argent pour l'école “, a dit M. Zhang. Il n'avait pas de certificat de mariage, c'est pour cela que l'enfant n'a pas d'acte de naissance. La fille ne posséait toujours pas de permis de résidence. “Sans certificat de résidence, elle ne peut même pas aller à l'école primaire.” […]

L'organe du parti, le Quotidien du peuple, a présenté la nouvelle comme une histoire touchante d'un parent célibataire seul et pauvre, en parlant d'une fillette de cinq qui prenait soin de son père handicapé. Mais de nombreux internautes ont découvert les lacunes de l'histoire et les ont présentées sur Weibo (via China Digital Times):

看吧,小姑娘的智障母亲是怎么来的为了一己私欲,强奸拘禁智障女性成孕;现在又让才5岁的小姑娘承担原不属于她这个年纪该承担的重担。现在再出来演演孝感动天的戏码,呵呵

Regardez, d'où vient la mère handicapée mentale de la petite fille? Pour satisfaire [son] désir animal, [il] a violé une femme handicapée mentale et l'a mise enceinte. Maintenant, [il] il jette le fardeau sur la petite fille. C'est: le théâtre de la piété chinoise LOL.

母亲是跑了还是被弄死了?生过孩子就失踪了?她生孩子前怎么没跑?赶快安置好孩子收押这罪犯吧

La question c'est, la mère a-t-elle fui ou bien a-t-elle été assassinée? Pourquoi a-t-elle disparu après l'accouchement? Pourquoi n'a-t-elle pas fui avant que l'enfant naisse? Prenez soin de l'enfant et arrêtez le criminel!

把这个强奸智力障碍妇女的王八蛋哥俩送进监狱,再找有能力抚养的好心人领养这个小女孩才叫正能量,现在制造舆论,不懂法律的蠢货真是漫山遍野。

Mettre le violeur en prison et trouver à la petite fille une bonne famille d'accueil est de l'énergie positive. Beaucoup de gens stupides sans aucune notion juridique font du travail de propagande.

我去。。。。强奸智障妇女,生下一个孩子忍受悲惨的人生,还成正能量了?小编你要不要也只有正能量一个?我保证不报警[拜拜]

WTF ….il viole une femme handicapée mentale en lui faisant un enfant et en vivant dans la misère, vous appelez énergie positive? Peut-être l'éditeur aimerait-il faire l'expérience de ce type d'énergie positive. Je vous promets que je ne vais pas le signaler à la police. Au revoir.

A en juger par le cas ci-dessus, si les géants de l'Internet devaient subventionner ceux qui répandent une énergie positive comme suggéré par M. Jiang Jun, la ligne de partage entre le bien et le mal, le juste et le mauvais pourrait devenir plus mince que jamais.

La Hongrie enrichit son arsenal anti-réfugiés d'un site web et d'une procédure contre l'Union Européenne

dimanche 13 décembre 2015 à 16:55

Image hvg.hu. Traduction du texte : “Le quota de relocalisation obligatoire AUGMENTE LE RISQUE DE TERRORISME ! Un immigrant illégal arrive en moyenne toutes les 12 secondes en Europe. Nous ne savons pas qui ils sont ni quelles sont leurs intentions. Nous ne savons pas combien sont des terroristes dissimulés”.

Tout au long de 2015, les réfugiés ont afflué en Europe en nombres sans précédent. Dépendant de canaux informels et du simple hasard, ceux qui fuient guerres et persécutions tombent à leur arrivée soit sur des mains secourables et un accueil chaleureux, soit sur des clôtures de barbelés et des obstacles bureaucratiques insurmontables.

L'Union Européenne elle-même a montré sa large impréparation à la gestion adéquate de cet afflux, et les solutions qu'elle a proposées se sont heurtées à des dirigeants davantage portés à l'inaction ou à l'exploitation des peurs et de la xénophobie dans leur pays afin de renforcer leur assise politique. La Hongrie a été particulièrement bruyante dans sa posture anti-réfugiés, avec une consultation nationale trompeuse assimilant migration et terrorisme, et en couvrant le pays d'une campagne d'affichage alarmiste.

Les autorités hongroises ne s'en tiennent pas là. Le gouvernement du premier ministre Viktor Orban et son parti Fidesz ont anoncé leur projet de nouvelle campagne d'affichage, cette fois dirigée directement contre le plan de l'U.E. de relocalisation à travers le continent des réfugiés actuellement en Italie et en Grèce. Les premiers panneaux publicitaires d'une campagne qui coûtera dans les 380 millions de forints (environ 1,2 millions d'euros) aux contribuables, sont en place, et des publicités en pleines pages poussant l'argumentaire du gouvernement fleurissent déjà dans la presse quotidienne à grande diffusion.

Le 3 décembre 2015, la Hongrie a aussi contesté sur le plan juridique le plan européen de relocalisation des réfugiés. Le mois dernier, elle avait également lancé une pétition agressive contre les mesures proposées par l'UE. Des stands sont apparus dans les rues, tenus par des militants improvisés qui faisaient du battage à coup de statistiques fabriquées et de phrases racistes (vidéo en hongrois). Selon les sources officielles, de 900.000 à 1 million de signatures auraient déjà été collectées.

La pétition peut aussi être signée en ligne sur un site web gouvernemental bourré de contre-vérités. Voici un florilège d'affirmations avec explications et corrections.

“The compulsory resettlement quota would mean the resettlement of nearly 160,000 people into our nation.”

“Le quota obligatoire de relocalisation signifierait la relocalisation de près de 160.000 personnes dans notre pays”.

En réalité, dans le schéma de relocalisation de l'UE, ce sont 1.294 réfugiés qui seraient assignés à la Hongrie, et non 160.000 comme le prétend le gouvernement. Même avec les réunifications de familles, le nombre ne devrait pas dépasser quelques milliers.

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“Plus de 900 “no-go” zones dans les métropoles européennes : Les “no-go” zones sont les parties d'une ville que les autorités parviennent difficilement ou pas du tout à garder sous leur contrôle. Dans ces quartiers les normes écrites ou non-écrites de la société-hôte peinent à se maintenir. Dans les métropoles européennes comme Paris, Londres, Stockholm ou Berlin, où les migrants vivent en grand nombre, il y a 900 de ces ‘no-go’ zones”.

L'idée de “no-go” zones est un mythe déboulonné souvent repris dans les cercles de droite et anti-immigration, et l'origine de ce nombre de 900 reste un mystère.

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“Le quota obligatoire de relocalisation est très coûteux : La mise en oeuvre du quota obligatoire de relocalisation aurait des conséquences financières notables. L'entretien d'un migrant, même sur la base des réglementations actuelles, coûte 130.000 forint [470 euros] par mois. L'Union Européenne ne dit pas d'où nous devons prendre les fonds pour les migrants. Et c'est un fait qu'à la fin de novembre la Hongrie n'avait pas touché un cent des 1,2 milliards de forint [4 million d'euros] promis par la Commission européenne à titre d'aide d'urgence pour soulager la pression migratoire. Pour couronner le tout, il y a un risque que les pays occidentaux les plus développés accueillent les migrants les plus éduqués, tandis que les autres Etats membres devront accueillir une masse de personnes sans qualifications”.

Le plan de relocalisation de l'UE indique que les Etats-membres bénéficiaires recevront 6.000 euros par réfugié. Ce qui est, en fait, la politique de relocalisation de l'UE depuis 2008. Pendant l'été, le gouvernement hongrois a demandé une aide financière à l'UE et a reçu la promesse dun fonds d'urgence de 4 millions d'euros pour aider le pays à faire face à l'afflux de réfugiés. Cette somme n'aurait pas été versée car l'afflux de réfugiés s'est interrompu et le pays a fermé ses frontières.

Ce qu'oublie l'argument, ce sont les plus de 60 millions d'euros alloués au pays dans le cadre des fonds européens ‘Asile, Migration et Intégration, et ‘Sécurité Intérieure’ pour la période 2014-2020. Inutile de dire que le plan de relocalisation n'est pas conçu pour fonctionner à la carte entre les différents pays-membres.

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“Le quota obligatoire de relocalisation menace notre culture : Avec la relocalisation obligatoire, la composition ethnique, culturelle et religieuss de notre nation changerait. Les immigrants illégaux ne respectent pas nos lois et ne veulent pas partager nos valeurs culturelles communes. La relocalisation en masse de gens d'autres continents et cultures constitue donc un danger pour notre culture, notre mode de vie, nos coutumes et traditions. Si nous n'agissons pas, dans quelques dizaines d'années nous ne reconnaîtrons plus l'Europe”.

Et pour finir, il n'y a pas de preuve que les réfugiés dans leur ensemble, comme le professe le gouvernement, “ne respectent pas [nos] lois et ne veulent pas partager [nos] valeurs culturelles communes”.

Au vu de ces affirmations discutables et de ce langage alarmiste, le Comité Helsinki hongrois a souligné dans un récent communiqué que le gouvernement Fidesz prend sans doute les Hongrois pour des imbéciles.

Les ‘quotas de réfugiés’ de l'Union Européenne

Pour la plupart des réfugiés arrivés par bateau en Grèce, la Hongrie n'était qu'une étape de leur cheminement vers des pays plus “accueillants” comme l'Allemagne et la Suède. Début septembre, les autorités hongroises ont empêché les réfugiés de monter dans les trains vers l'Allemagne, les contraignant à parcourir à pied les 170 kilomètres les séparant de la frontière autrichienne. Les organisations de défense des droits humains ont dénoncé la multiplication des embûches comme contraire aux obligations internationales de la Hongrie.

Ce qui a abouti à la fermeture totale des frontières de la Hongrie mi-octobre. Malgré le déclin consécutif du flux de réfugiés dans le pays, le gouvernement s'est retourné contre le projet de plan de relocalisation de l'UE, consistant à répartir 120.000 réfugiés des pays-membres sur le front de la crise, entre tous les Etats-membres.

Image by Marian Kamensky. Used with permission.

“Où allez-vous comme ça ?” “En Europe, M. Orban !” dessin de Marian Kamensky. Utilisé avec sa permission.

Au départ, le plan voulait relocaliser 15.600 réfugiés en provenance d'Italie, 50.400 de Grèce et 54.000 de Hongrie. Mais cette dernière “ne souhaite pas être bénéficiaire du schéma de relocalisation d'urgence”, qui aurait signifié que la Hongrie reçoive 500 euros par réfugié relocalisé, note le communiqué de presse de la Commission Européenne. Le Premier Ministre Viktor Orban a objecté au principe du plan, et a aussi refusé la catégorisation de la Hongrie en pays de la ligne de front, insistant que la plupart des réfugiés reçus étaient entrés en premier par la Grèce. La République Tchèque, la Roumanie et la Slovaquie ont également refusé le plan.

Dernièrement, les ministres de l'UE auraient commencé à discuter de la suspension de la zone Schengen — l'accord qui permet la libre-circulation des personnes entre ses pays-membres — pour une période de deux ans. La Grèce serait la principale concernée, mais des documents fuités laissent entendre que la mesure pourrait être étendue à d'autres Etats-membres, en particulier la Hongrie. Le gouvernement hongrois, atterré, a même contribué à la création d'une initiative “Amis de Schengen” avec d'autres pays d'Europe de l'Est. Un groupe de pression qui laissera probablement inchangé le discours anti-réfugiés et europhobe du gouvernement.

Où en sont les ‘valeurs européennes’ ?

vendredi 11 décembre 2015 à 16:00
Europe Day 2008 / Participants at the Square of the european promise Photo: Sabitha Saul; published with permission

Jour de l'Europe 2008:  les participants sur la Place de la promesse européenne . Photo: Sabitha Saul; publiée avec autorisation

Le concept des  “valeurs européennes” n'est pas nouveau, mais après les attentats de Paris en novembre dernier, et le flot de réfugiés qui arrivent sur ce continent (et la flambée de nationalisme et de xénophobie qui s'en est ensuivie), le concept provoque à nouveau des débats.

Un socle commun de principes est-il vraiment partagé par les 28 états membres de l'Union ? Si oui, quels sont-ils ? Et l'Europe est-elle à la hauteur de ses propres idéaux ?

Le blogueur allemand Johannes Korten et l'artiste Jochen Gerz  se sont réunis pour inviter tous les Européens à prendre part à un ‘carnaval de blogs’ sur ce thème. Korten  écrit :

Ces jours-ci, cette idée est sérieusement remise en question. Il devient de plus en plus évident que l'idée d'une Europe « officielle » naissait surtout des intérêts financiers et économiques. Et tant que les problèmes et conflits d'intérêts pouvaient encore être résolus avec de l'argent, l'idée européenne semblait être “OK”.

Aujourd'hui, des centaines de milliers de personnes sont en route vers cette même Europe. Ils fuient la guerre, la violence et la terreur ou bien ils fuient les difficultés économiques, qui résultent souvent de notre propre comportement de consommateur ou d'intérêts géostratégiques. Les problèmes provoqués par cet afflux de personnes qui recherchent la paix et le bonheur en Europe ne peuvent être résolus uniquement par de l'argent. L'Europe est assez riche pour accueillir ces personnes. Les défis se situent à des niveaux très différents. Ils sont culturels. Ils constituent un véritable test pour ce qui est souvent décrit  comme les « valeurs européennes » dans les grands discours, que ce soit les discours prononcés lors des remises de prix de la paix ou en des occasions semblables.

Gerz est l'artiste derrière le “Square de la promesse européenne” (Square of European Promise) qui se trouve à Bochum, en Allemagne, et qui a été inauguré le 11 décembre 2015. Il a consacré une décennie à la création de la place, dans lequel 14726 noms, ceux des personnes qui ont fait une promesse à l'Europe, ont été inscrits. Les engagements individuels restent secrets, mais leurs noms gravés sur la place représentent la promesse d'une société diversifié, d'une Europe unifiée.

Le point de départ pour l'artiste ont été deux listes existantes conservées dans l'église du Christ, à côté de la place : celle des 28 “ennemis de l'Allemagne” de 1931 et celles des morts de la Première guerre mondiale. Gerz voulait accompagner celles-ci d'une “liste des vivants”.

Korten poursuit dans son appel à un ‘carnaval de blogs’ avec une série de questions auxquelles réfléchissent bien des personnes actuellement :

En ce moment, nous avons besoin de trouver les réponses aux questions urgentes. Notre politique en a besoin, mais chacun d'entre nous aussi.  Que vaut notre liberté à nos yeux ? Que vaut la liberté des autres à nos yeux ? Réalisons-nous et apprécions-nous notre chance de vivre dans des sociétés démocratiques ? Que vaut notre éducation à nos yeux ? Notre culture, nos cultures ? Comment nous traitons les uns  avec les autres, dans cette Europe? Est-il qu'il existe encore quelque chose comme une idée commune? Une idée de ce que cette Europe pourrait représenter, outre sa prospérité économique?

Les créateurs de ce Carnaval de blogs veulent ouvrir un dialogue sur ce que l'Europe en tant que concept signifie pour ses citoyens. Pour s'informer sur comment participer, cliquez ici.