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#SOSManus : La police expulse les demandeurs d'asile de l'ex-camp de détention australien sur l'île Manus

samedi 25 novembre 2017 à 10:26

“Cette photo est assez pour réveiller l'Australie et montrer comment un politicien cruel comme Peter Dutton utilise les Australiens à son propre profit politique”. Photo et commentaire de Behrouz Boochani, utilisation autorisée

Des niveaux accrus de violences de la police paraissent signaler la fin du bras de fer à l'ex-centre régional australien de détention sur l'île Manus en Papouasie Nouvelle-Guinée, que des centaines de demandeurs d'asile refusaient de quitter pour être transférés dans un nouveau lieu.

Depuis des années, l'Australie envoyait dans ce centre les candidats-réfugiés arrivés par bateau. Jusqu'à ce qu'en avril 2016, la Cour Suprême de Papouasie Nouvelle-Guinée en ordonne la fermeture après avoir constaté qu'y détenir des demandeurs d'asil était illégal. Le centre a été officiellement fermé fin octobre 2017.

Néanmoins, des centaines de détenus refusaient de le quitter, en invoquant des craintes pour leur sûreté, du fait des tensions les opposant à la communauté locale, et leur manque de confiance dans les autorités australiennes.

Avec l'opération policière pour mettre fin à la confrontation, photos et vidéos éclosent sur les médias sociaux, dont beaucoup restent cependant à vérifier. Un des détenus, le Pakistanais Ezatullah Kakar, a posté ce message avec cidéo, semblant montrer des policiers maniant des matraques et aggripant sans ménagement les détenus :

Australie-Papouasie Nouvelle-Guinée, vous avez détruit notre vie, nous avons tout perdu, familles, amis et même notre respect de nous-mêmes. Nous n'oublierons jamais comment vous nous avez traités, nous avons compris que nous ne sommes pas des êtres humains, le monde nous oublie, nous serons mieux tués sur place que dans le nouveau camp-prison de Lourengo Manus.

Le journaliste iranien détenu Behrouz Boochani a été l'une de leurs voix. Hier il a été gardé à vue pendant deux heures avant d'être transféré de force.

L'armée a arrêté le journaliste lprimé par Amnesty Behrouz Boochani, en ce moment même à Manus. Merci de partager cette photo en marquant le député Peter Dutton et [le Premier Ministre] Malcolm Turnbull, en les rendant responsables qu'il n'arrive aucun mal à notre frère.

Boochani a tweeté par la suite :

Je viens d'être relâché. Ils m'ont menotté pendant deux heures dans un endroit derrière le camp-prison. Le commandant de police me hurlait ‘vous informez contre nous’. Ils m'ont bousculé plusieurs fois et ont cassé mes affaires. J'en écrirai davantage là-dessus plus tard.

Auparavant, 12 Australiens de l'année s'étaient inquiétés de la situation sur Manus, appelant le gouvernement australien à rétablir les services de base au centre :

12 anciens Australiens de l'année condamnent l'action du gouvernement australien sur Manus, et appellent à une intervention humanitaire d'urgence

Ils n'ont pas fait l'unanimité sur les médias sociaux. Robert Johnstone a posté ce commentaire sous un statut Facebook de Behrouz Boochani :

Good on Minister Dutton for his tough stance on this . These so called refugees are grown up
People and knew what they were embarking on when they jumped in a boat . No one twisted their arms , they are solely to blame for their predicament. If you want to
come to our country come the proper way not through the backdoor like a crim.

Un bon point au ministre Dutton pour sa fermeté là-dessus. Ces soi-disant réfugiés sont des adultes et savaient dans quoi ils s'embarquaient quand ils ont sauté dans un bateau. Personne ne leur a tordu le bras, ils sont seuls responsables de leur malheur. Si vous voulez venir dans notre pays, faites-le de façon convenable, et pas en passant par la porte de derrière comme un délinquant.

Le Premier Ministre australien Malcolm Turnbull et son ministre de l'immigration Peter Dutton continuent à appliquer une politique inflexible en la matière. Il y en a qui aimeraient les voir traduits en justice :

Cour Pénale Internationale encore une violation des ordonnances du tribunal de Papouasie-Nouvelle Guinée. C'est un crime contre l'humanité

L'impasse de Manus reçoit déjà une attention internationale qui ne se limite pas à l'agence des Nations Unies pour les réfugiés :

UNHCR : L'Australie exhortée à assurer protection, assistance et solutions aux réfugiés sur l'île Manus

C'est scandaleux, en même temps je suis si contente que vous soyez sortis (bien que loin d'être libres). Tout le monde devrait suivre @BehrouzBoochani pour des dépêches directes de l'intérieur du camp sur l'île Manus

La situation change d'heure en heure. Les développements peuvent être suivis au moyen du mot-dièse Twitter #SOSManus.

Le populisme et le projet CrossCheck au Forum Mondial de la Démocratie 2017 à Strasbourg

vendredi 24 novembre 2017 à 14:03
CrossCheck infographie

Comment fonctionne CrossCheck, infographie reproduite avec l'aimable autorisation du projet CrossCheck, via Marie Bohner

“Le populisme en question(s)” a été le thème de l'édition 2017 du Forum de la Démocratie qui s'est tenu à Strasbourg du 8 au 10 novembre. Au long de trois journées au siège du Conseil de l'Europe de débats en sessions plénières, de présentations de projets innovants du monde entier, et d'une agora multipliant les animations participatives, des intellectuels, politiciens, praticiens et des jeunes du monde entier ont échangé autour de questions comme : De la démocratie des partis à la démocratie des citoyens – Les Médias, amis ou ennemis de la démocratie – Le populisme est-il un problème – Réponses multilatérales au populisme ?

Une thématique dans laquelle s'insère naturellement le projet CrossCheck, dont Global Voices, par son équipe GV en Français, est partenaire depuis janvier 2017. Global Voices a publié une dizaine d'analyses par CrossCheck d'informations fausses ou de rumeurs véhiculées pendant la campagne présidentielle française.

Marie Bohner, amie et auteure pour Global Voices, est coordinatrice de projet pour CrossCheck France, qu'elle a présenté au Lab 3 du Forum, “Vérification des faits : le jeu en vaut-il la chandelle ?”. Elle a bien voulu répondre à nos questions.

Lab 3 FMD 2017

Marie Bohner présente CrossCheck au Lab 3 du FMD 2017 à Strasbourg, le 9 novembre 2017. Photo Suzanne Lehn

Global Voices (GV) : Tu es consultante, journaliste, et auteur pour Global Voices, en un très court résumé. Qu'est-ce qui dans ton parcours t'a conduite à travailler directement pour un projet de coopération de médias pour démonter la désinformation dans la période critique de la campagne présidentielle française ?

Marie Bohner (Marie) : Global Voices ! Global Voices est partenaire du projet CrossCheck avec lequel j'ai eu la chance de travailler depuis janvier 2017. Il est toujours étonnant (et très réconfortant) de voir que des activités bénévoles sont non seulement aussi enrichissantes que des activités rémunérées, mais qu'elles peuvent aussi conduire aux perspectives les plus folles. Surtout à GV ! Même si le fait de travailler pour CrossCheck, entre autre, a donné à mes activités un rythme très intense depuis le début de l'année – et je suis donc malheureusement moins productive pour GV. J'ai plein d'idées, mais souvent pas le temps de les mener au bout.

GV : Peux-tu caractériser rapidement pour nos lecteurs ce qu'est CrossCheck, et son fonctionnement ?

Marie : CrossCheck est un projet de journalisme collaboratif initié par First Draft et soutenu par le Google News Lab. Il a rassemblé plus de 30 partenaires médias, universitaires et technologiques autour des élections présidentielles françaises, dans le but de détecter et de vérifier les rumeurs circulant sur les réseaux sociaux en lien avec les thèmes de la campagne. Le projet a été mené par une centaine de journalistes, de la presse nationale à la presse régionale, pure players, presse écrite et TV, avec une dizaine d'étudiants. Nous avons réussi à mener à bien la vérification de plus de 60 histoires en 10 semaines.

GV : Quel bilan, au-delà de la défaite de l'extrême droite à la présidentielle française, accueillie avec un large soulagement ?

Marie : CrossCheck a généré de beaux échanges avec tous types de publics, à travers des formulaires en ligne où les gens pouvaient poser des questions ou suggérer des rumeurs à vérifier, mais aussi à travers les réseaux sociaux. Ces échanges ont été plus qualitatifs que quantitatifs, mais surtout ils ont permis de briser un peu l'esprit de silo créé par les réseaux sociaux. Apparemment, selon une recherche sortie récemment, cela serait lié en grande partie à la participation des médias régionaux et locaux dans le projet.

Le projet a aussi permis aux journalistes d'avoir une plateforme de discussion entre eux pour discuter des enjeux et des problématiques du métier aujourd'hui, dans un esprit d'utilité publique.

GV : CrossCheck a-t-il essaimé dans d'autres pays que la France ? peut-il encore le faire ?

Marie : L'équipe de First Draft a beaucoup de demandes à ce sujet, mais il n'est pas toujours facile pour les médias d'un pays de se mettre à travailler de concert… L'expérience a suscité beaucoup de curiosité à l'international, je ne serai donc pas étonnée si des formes plus ou moins proches se produisent ailleurs. Chez First Draft l'idée est de tirer partie de l'expérience française pour définir une sorte de méthodologie. Reste à voir comment cela peut s'adapter, culturellement, d'un pays à l'autre. Les médias français sont les premiers étonnés (mais ravis) d'y être arrivés !

GV : La collaboration qui s'est constituée entre médias différents (AFP, presse nationale, presse locale…) et naturellement concurrents autour de la vérification d'informations douteuses peut-elle se poursuivre ? Sur quelles thématiques, à quelles conditions ?

Marie : L'envie est là, les discussions sont en cours. Je ne peux pas tellement en dire plus pour l'instant. De façon générale il y a peut-être une envie d'aller explorer des thèmes autres que politiques. La santé, peut-être? C'est une hypothèse à ce jour.

GV : Le projet CrossCheck a également une branche recherche. Quels en sont les apports à ce jour ?

Marie : Ce n'est pas vraiment une “branche” recherche. Mais une recherche a été confiée à des chercheurs pour tirer des enseignements du projet. Les résultats viennent d'être publiés la semaine dernière sur le site de First Draft. En anglais pour l'instant, et incessamment en français.

GV : C'est la 3e année que tu interviens également au FMD  au titre d'un autre organisme, l’Ososphère. Peux-tu décrire l'action de cette année, et la thématique illustrée ?

Ososphère fmd

Marie au workshop de l'Ososphère au FMD, avec la Cie des Châteaux en l'air. Photo Suzanne Lehn

Marie : L'Ososphère est une plateforme culturelle et artistique à Strasbourg, qui s'intéresse de près aux questions de la fabrique de la ville et de la conversation dans l'espace public. Je travaille avec eux autour d'un programme qui s'appelle les Cafés Conversatoires : il s'agit de passer outre les expertises de celles et de ceux qui font et habitent la ville, pour les rassembler autour d'une table dans l'espace public. Les architectes, les élus, les urbanistes, mais aussi les habitants et leurs associations, les chercheurs, les philosophes, et surtout les artistes, qui apportent une impulsion et un regard différent au débat.
Au FMD nous avons travaillé sous forme de workshop artistique, urbain et radiophonique, pour interroger avec les participants du FMD la notion de peuple et de populisme à l'échelle de la ville. Nous travaillons avec plein de gens étonnants, en particulier des artistes qui font des constructions incroyablement évocatrices en carton. La compagnie s'appelle des Châteaux en l'air (voir le site Entre cabanes).

GV : Ces activités ne t'ont permis d'assister que de façon limitée aux différentes tables rondes, présentations et autres propositions du programme très rempli du FMD. Néanmoins quelles sont tes impressions sur le thème, le populisme en question(s), et la façon dont il a été traité ?

Marie : J'y ai vraiment été trop peu malheureusement pour faire de bons retours à ce sujet. J'ai l'impression que les choses tournaient beaucoup autour de la question de la désinformation en ligne et des médias. Peut-être moins de stratégies politiques… Mais cela reste un avis très parcellaire.

GV :Tu vas participer au Sommet 2017 de GV à Colombo, dans un peu plus d'une semaine, et tu y présenteras le partenariat de Global Voices avec FirstDraft/CrossCheck. Peux-tu donner quelques détails en avant-première ?

Marie : Nous allons parler de la façon dont les informations sont perçues – ou non – comme crédibles d'une culture à l'autre, dans une table ronde qui s'appelle “Is credibility cross-cultural?” le 2 décembre à 16h50. C'est excitant de partager ces problématiques au sein d'un groupe super international comme GV, particulièrement avec des gens qui s'interrogent sur la façon de formuler les informations, comme Connie avec NewsFrames, mais aussi Sivakosaran pour Wikipedia en tamoul et Sanjib pour le Népal.

Thème et dates du prochain Forum Mondial de la Démocratie sont déjà fixés : La citoyenneté en mouvement, du 19 au 21 novembre 2018.

Les rumeurs sur les médias sociaux attisent l'escalade des violences entre Bouddhistes et Musulmans au Sri Lanka

vendredi 24 novembre 2017 à 00:20

Capture d'écran supposée montrer la maison d'un musulman sri-lankais endommagée par une attaque en bande de bouddhistes sri-lankais. Vidéo de Haroon Ali via YouTube.

Les tensions sont montées ces jours derniers entre bouddhistes cingalais et membres de la minorité musulmane dans le sud du Sri Lanka. Selon la police, ceci est dû en partie à la propagation de fausses nouvelles sur les médias sociaux.

Les affrontements dans la ville côtière de Gintota, dans la province de Galle state, auraient commencé après qu'un enfant musulman a été renversé le 13 novembre par un motocycliste cingalais qui a payé un dédommagement à la victie pour régler l'affaire. Le 16 novembre 2017, un groupe de jeunes Cingalais ont assailli deux motocyclistes musulmans, en invoquant l'incident du 13 novembre. Un des motards a été hospitalisé pour ses blessures.

En riposte, un groupe compatissant avec le motard musulman a attaqué deux maisons appartenant à des Cingalais, ce qui a provoqué l'hospitalisation d'un homme cingalais. La police a effectué plusieurs arrestations ce jour-là, et appréhendé les individus responsables d'avoir déclenché les violences.

Ratnasiri Malalagama et Nandana Nanneththi ont rapporté sur le World Socialist Website :

Vendredi à  16h17, un individu du nom de Uchitha Arunodha Gunasekera a posté une note sur sa page Facebook appelant chacun dans la zone de Galle “à se rassembler au temple de Thuparamaya à Gintota contre les musulmans”. L'attaque violente a été discutée et préparée au temple.

Puis dans la nuit du 17 novembre 2017, une petite mosquée et plusieurs maisons appartenant à des musulmans à Gintota ont été attaquées par des bandes cingalaises.

#Gintota: Environ 66 maisons et 26 magasins endommagés dans des affrontements et 5 blessés ont été admis à l'hôpital Karapitiya, dit le Ministre Vajira Abeywardene ; le Ministre Vajira a été hué et chassé d'un temple bouddhiste; Le moine du BBS [une organisation bouddhiste extrémiste, NdT] Gnanasara a aussi été vu à #Galle.

L'utilisateur de YouTube Haroon Ali a posté une vidéo supposée montrer les dommages aux biens :

Depuis, plusieurs personnes ont été blessées, et de multiples véhicules (appartenant pour la plupart à des musulmans) détruites. Pas moins de 62 habitations et commerces ont été assaillis à Gintota et ses environs.

Les policiers de la Special Task Force (STF, les unités spéciales) ont été déployés sur la zone, et ont imposé un couvre-feu nocturne comme mesure de sécurité pour empêcher de nouvelles violences. Dix-neuf personnes, seize Cingalais et trois Musulmans, ont été arrêtés.

19 [individus] arrêtés dans les violences de la nuit dernière à Gintita Galle, le calme est revenu à présent, le couvre-feu de la police devrait être levé à 9 heures – [dit] la police

La minorité musulmane déjà avant cible de violences

Les rumeurs sans fondement sur les réseaux sociaux ont fait monter la tension encore d'un cran, disent les policiers. Ceux-ci pointent en particulier des messages prétendant que les musulmans se préparaient à attaquer un temple bouddhiste. La police a aussi dit enquêter sur des individus ayant publié des récits mensongers ou incendiaires sur l'incident et qui seraient arrêtés pour ce motif.

Les musulmans représentent environ 10 pour cent d'une population sri lankaise de 21 millions, tandis que 70 % adhèrent au bouddhisme (mmajoritairement de la branche theravāda), le reste appartenant pour la plupart à des traditions hindoues. Du point de vue ethnique, 75 % sont Cingalais, environ 10 % sont des Maures sri-lankais (musulmans parlant tamil), et près de 15% sont Tamouls (Sri Lankais et Indiens).

La tension est montée entre les deux communautés cette année, avec des incidents sporadiques de radicaux bouddhistes s'en prenant à la communauté musulmane avec des accusations de conversions forcées de gens à l'Islam et de vandalisme sur des sites archéologiques du bouddhisme. Plus de 20 attaques contre les musulmans, dont des incendies criminels de commerces appartenant à des musulmans et des jets de cocktails Molotov sur des mosquées, ont été enregistrés depuis avril 2017.

Après la dernière flambée de violences, certains se sont demandés si la riposte des autorités était suffisante :

Disinformation spread on Sri Lankan social media

Law and Order Minister Sagala Ratnayaka vowed to take action against rumor mongers: “Some political groups are now on a desperate mission to turn this minor brawl into a Sinhala-Muslim clash,” he said.

But not all social media messages about the clashes are unfounded. This cartoon by Cartoon Lanka argues that mainstream media in Sri Lanka are ignoring a very real conflict at hand:

Misinformation nevertheless has been a persistent problem in Sri Lanka. A July editorial by Global Voices partner Groundviews recalled past examples of incitements against minorities and highlighted the activities of the Buddhist hardliner group Bodhu Bala Sena:

When this group first became active, they spread hate messages, mainly through Facebook, claiming, for example, that popular Muslim-owned shop No Limit was giving out toffees which, when consumed, would render Sinhalese mothers infertile. These rumors persist even today.

The editorial noted that:

Sri Lankans tend to digest media uncritically and unquestioningly. This will have to change in order to stop misinformation from spreading – and this can be done through spreading awareness – whether through short videos, articles on how to spot fake news or training.

Risque de vols d'identité : l'Estonie suspend les certificats de sécurité de 760.000 cartes d'identité

jeudi 23 novembre 2017 à 12:06

Arrêt sur image d'une vidéo promotionelle video sur les cartes d'identité estoniennes du site gouvernemental e-Estonia.com.

Le 4 novembre 2017, les autorités estoniennes ont désactivé les certificats de plus de 760.000 cartes nationales d'identité électroniques à cause d'une vulnérabilité de sécurité qui a pu compromettre les cartes émises entre le 16 octobre 2014 et le 26 octobre 2017, voire avant.

Davantage que la plupart des autres pays, l'Estonie se fie au numérique pour de nombreux services de base, comme la délivrance des médicaments sur ordonnance, le vote, les virements bancaires et les signatures électroniques. De fait, 98 % des Estoniens possèdent une carte d'identité qu'ils peuvent utiliser comme justificatif pour voyager à travers l'Europe, accéder à l'assurance santé et payer leurs impôts. Les cartes d'identité numériques ont été mises en place en 2002 et sont devenues la pierre angulaire des e-services du pays. L'Estonie a les services à haut débit parmi les plus rapides du monde, et a instauré une culture numérique solide, une connectivité internet et une e-governance largement répandues.

Le logiciel de sécurité des cartes d'identité suspendues sera remplacé par un nouveau, plus sécurisé, dans le cadre de l'action nationale contre le risque de brèche dans la vie privée. Ces certificats ont été désactivés lorsqu'un groupe de chercheurs de République Tchèque ont identifié une faille de sécurité dans les puces des cartes, qui aurait pu conduire à des fuites majeures de données personnelles des citoyens. Ces chercheurs ont découvert que les puces installées dans les cartes d'identité émises entre le 16 octobre 2014 et le 26 octobre 2017 (mais peut-être dès 2012) étaient vulnérables aux pénétrations de clés privées comme publiques et à de potentiels vols d'identité.

Les puces étaient fabriquées par Infineon, une entreprise de microélectronique ayant son siège aux États-Unis et en Allemagne, qui fournit des services d’identification administrative, de sécurité mobile et d'informatique de confiance et de sécurité incorporée.

Le gouvernement estonien affirme qu'aucune pénétration n'a encore eu lieu, et que les autorités ont désactivé les cartes d'identité concernées par mesure de précaution pour s'assurer de l'absence de tout dommage aux données des citoyens. Pour garantir la continuité de fonctionnement de l'e-gouvernement, 35.000 personnes selon les estimations, qui utilisent leur carte d'identité pour leur travail, comme les fonctionnaires et les médecins, ont reçu en priorité une mise à jour avec une version plus sûre.

Le 2 novembre 2017, le Premier Ministre Jüri Ratas faisait cette déclaration :

E-riigi toimimine püsib usaldusel ning riik ei saa lubada Eesti ID-kaardi omaniku identiteedi vargust. Praeguse teadmise järgi ei ole e-identideedi vargust aset leidnud, kuid PPA ja RIA ohuhinnang näitab, et see oht on muutunud reaalseks.

Le fonctionnement d'un e-État est basé sur la confiance, et l’État ne peut pas se permettre qu'un vol d'identité arrive à un détenteur d'une carte d'identité estonienne. A notre connaissance actuelle, il n'y a pas eu de cas de vol d'e-identité, mais l'évaluation du risque de la police et du Comité de surveillance des frontières ainsi que de l'Autorité du Système d'information indiquent que la menace est devenue réelle.

Le risque de sécurité dévoilé par les spécialistes tchèques ne se limite pas aux cartes d'identité estoniennes. Vraisemblablement, tous les jeux de puces produits par Infineon pendant ce laps de temps portent la même faille. C'est pourquoi tous les systèmes informatiques dans le monde qui utilisent les puces d'Infineon sont aussi en danger de se faire infiltrer. Une vulnérabilité qui illustre les graves problèmes de sécurité qui accompagnent la numérisation des cartes et systèmes nationaux d'identité.

Toomas Hendrik Ilves, le précédent Président de la République d'Estonie (2006-2016) a participé à la discussion dans les médias en laissant entendre sur Twitter que le “fond de l'histoire” pourrait relever de Gemalto, le fabricant des cartes, qui semble n'avoir pris connaissance de la vulnérabilité qu'en février, mais n'en a pas informé ses clients. Les cartes électroniques d'identité estoniennes sont fabriquées depuis 2001 par Trub AG et son successeur Gemalto AG, des sociétés suisses qui utilisent les technologies d'Infineon.

L'ex-président Ilves a affirmé que la firme néerlandaise “a informé les utilisateurs commerciaux mais pas les les clients (payants) du secteur public”, et invité les journalistes à examiner l'affaire plus en profondeur.

Les cartes d'identités estoniennes ne sont pas les seules que fait Gemalto. Pourtant, aucun autre gouvernement n'a fait de bruit. Probablement parce que les cartes sont émises mais jamais utilisées.

Ou alors, il s'agit d'un gouvernement technophile qui a réagi avec rapidité et mesure à une vulnérabilité de chiffrage de sécurité. C'est nouveau !

La décision de l'Estonie de remplacer les certificats a aussi retenu l'attention des passionnés de la société de l'information en Europe centrale et orientale. Dans une discussion sur Facebook, un spécialiste serbe d'informatique vivant en Estonie a expliqué dans ses commentaires le point de vue de l'utilisateur final :

Obavestili su nas pre nekoliko meseci (dok je rizik bio samo teoretski), a pre par nedelja su pustili update sertifikata kroz zvaničnu app (ne mora da se menja ID). Trenutno ume da štuca autorizacija, ali imamo i rezervni način autorizovanja (preko mobilne app) tako da nismo blokirani.

On nous a notifié il y a plusieurs mois (quand le risque n'était encore que théorique), et il y a quelques semaines ils ont publié des mises à jour au moyen d'une appli officielle (pour qu'on n'ait pas à changer les cartes d'identité). Pour l'instant le processus de validation a parfois des hoquets, mais il y a une méthode de secours de validation par une appli de téléphone mobile, pour que nous ne soyons pas du tout bloqués.

Au Venezuela, le témoignage d’une mère désespérée sur la situation des hôpitaux pour enfants

mercredi 22 novembre 2017 à 19:03

Capture d'écran extraite de la vidéo réalisée par l'association “Prepara Familia”.

Les difficultés rencontrées par les hôpitaux publics vénézuéliens continuent d'augmenter, entraînées par des aides gouvernementales dérisoires et dans l'indifférence des médias. Dans ce contexte, des organisations non-gouvernementales comme Prepara Familia (Préparer la Famille), se servent d'internet pour alerter l'opinion. Pour illustrer cette situation, l'association a réalisé une vidéo depuis le département néphrologie de l'hôpital Juan Manuel de los Rios, à Caracas, la capitale du pays, afin de dénoncer la situation désespérée à laquelle sont confrontés les patients et leurs familles.

Pour les malades, le temps passé dans le service néphrologie de l'hôpital a permis de nouer des relations quasi familiales. Les mères forment une communauté soudée et se soutiennent mutuellement pour pallier l'absence de leur entourage et les difficultés qu'imposent de lourds traitements. Malheureusement, l'effort de ces familles venues à l'hôpital chercher des soins aura été vain. Depuis le milieu de l'année, de nombreux jeunes patients sont décédés dans le service, les uns après les autres.

Bien que la situation soit niée par l'hôpital et que les autorités aient tenté de le cacher, des salles et des équipements ont montré des signes inquiétants de contamination. Des études menées par l'Unité de technologie médicale de l'Université Simón Bolívar ont suggéré la présence de coliformes totaux, de coliformes fécaux et de mésophiles aéroportés. Les enfants ont été contaminés par les machines que l'hôpital utilise pour nettoyer le sang et n'ont pas été pris en charge en raison de contraintes budgétaires. Pour cette raison, certains de ceux qui sont allés à l'hôpital pour se soigner ont vu leur état de santé s'aggraver.

Dans la vidéo, les mères des patients du service de néphrologie de l'hôpital Juan Manuel de los Ríos témoignent des difficultés qui accompagnent le manque d'hygiène dans l'hôpital, comme les infections qui compliquent davantage l'état de santé de leurs enfants. En général, les enfants qui ont besoin d'une dialyse se rendent à l'hôpital au moins deux fois par semaine pour recevoir des traitements, ce qui leur permet de continuer à mener une vie normale.

Esto ha sido muy fuerte […] no veo mejorar a mi hijo. La situación es horrible.

Cela a été très difficile […] Je ne vois aucune amélioration dans la santé de mon fils. Cette situation est horrible.

Pour la plupart des familles touchées, la mauvaise gestion du gouvernement est la véritable épidémie. Les produits utilisés pour effectuer les examens ne sont pas remplacés, et les coûts sont exorbitants. Il n'y a pas non plus d'ambulance pour transférer les familles dans d'autres hôpitaux. Parfois, il n'y a même pas assez de nourriture à l'hôpital, qui dépend alors des dons.

Dans la vidéo, présentée pour la première fois le 5 juillet 2017, les mères de Deivis, Rafael et Cristhian – tous trois patients du service – ont parlé de la situation de l'hôpital, du manque d'entretien et des contaminations. Des plaintes ont déjà été déposées devant le bureau du procureur mais elles n'ont pas été autorisées à entrer en contact avec des avocats. Les tribunaux n'ont pas non plus accepté les demandes formulées par la CECODAP, une organisation vouée à la défense des droits humains des enfants, qui a demandé à plusieurs reprises la reconnaissance d'une situation d'urgence.

Les mères des trois enfants décédés en août et septembre ont témoigné dans la vidéo. Sept enfants sont morts d'infections dans l'unité. Il a été rapporté dans la présentation de la vidéo par l'organisation que :

A la fecha que fue grabado el video habían fallecido 3 niños (Raziel Jaure, Samuel Becerra, Dilfred Jimenez) y Daniel Laya falleció en los días de la grabación, lamentablemente contaminados con bacterias. El material audiovisual fue presentado en la audiencia Nro. 163 ante la CIDH celebrada el cinco de julio de dos mil diecisiete en Lima, Perú por Cecodap, Prepara Familia y Judith Bront la madre de Samuel Becerra, uno de los niños fallecidos. Desde entonces, tres niños más han fallecido producto de la contaminación que se vive en dicho centro de salud. Sus nombres eran: Deivis Perez, Rafael Velasquez y Cristhian Malave. Varias de las madres que aparecen en el video denunciaban la situación mientras sus hijos aún vivían.

Au moment où cette vidéo a été enregistrée, trois enfants (Raziel Juare, Samuel Becerra et Dilfred Jimenez) étaient morts, plus Daniel Laya, décédé pendant le tournage, tragiquement infecté par des bactéries. La vidéo a été présentée à l'auditorium numéro 163 avant la célébration du CIDH le 5 juillet 2017 à Lima au Pérou par la CECODAP, l'association Prepara Familia, et Judith Bront, la mère de Samuel Becerra, l'un des enfants décédés. Depuis cette date, trois autres enfants sont morts en raison de contaminations contractées dans cet hôpital. Ils s'appelaient : Deivis Perez, Rafael Velasquez et Cristhian Malave.

Aujourd'hui, l'hôpital est toujours contaminé. La réponse du ministère public a été de demander la fermeture de l'unité et le transfert des patients vers d'autres hôpitaux. Un tribunal dédié à la protection des enfants a appelé le ministère public à garantir l'accès aux traitements médicaux dont les patients ont besoin. Néanmoins, Katherine Martínez, présidente de l'organisation Prepara Familia, conteste que l'unité ait été fermée. Selon elle  :

La salle et la clinique de dialyse continuent d'être opérationnelles parce que c'est la seule unité restante dans le pays qui prend des patients pédiatriques qui pèsent moins de 20 kilos.

Les mères des victimes participent ensemble aux réunions et aux funérailles. Elles continuent de protester et tentent de rendre cette situation visible auprès des autorités internationales. La vidéo a été présentée à la Cour des droits de l'homme inter-américaine, la plus grande organisation de défense des droits de l'homme du continent avant que le gouvernement vénézuélien ne la quitte en 2013eft it in 2013. Voyant que les préconisations du procureur n'étaient pas respectées, on ignore si le gouvernement jouera un rôle actif pour résoudre cette urgence, car il semble désormais que les priorités soient axées sur les différends politiques qui divisent le pays.