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6 questions que vous n'osez pas poser sur le Cameroun

mardi 21 octobre 2014 à 23:03
Ecoliers au Cameroun - Domaine public

Ecoliers au Cameroun – Domaine public

Ce billet fait partie d'une série d'articles sur Global Voices pour explorer des thématiques moins connues dans de nombreux pays. La série a commencé avec une exploration de Madagascar. Aujourd'hui Gaelle Tjat à Yaoundé explique 5 questions sur le Cameroun pour Global Voices. Cet article est republié avec son autorisation de son blog personnel Amazing Tjat Bass:

1. A part le président Biya, quelles sont les personnes les plus influentes/célèbres au Cameroun aujourd’hui ?

Paul Biya - Domaine public

Paul Biya – Domaine public

Même nous simples citoyens on se pose la question. Donc si vous trouvez leur trace, faites-le nous savoir. Mais il faut comprendre que le système camerounais a été conçu de manière à ne mettre en lumière qu’UN seul individu. Du moins, sur le plan politique. Difficile donc dans ce contexte de trouver des personnes influentes. Sur la durée. Les potentiels influenceurs se tiennent sagement à l’écart. L’épervier aura tôt fait de les envoyer dans les geôles. Nous ne parlerons donc pas de personne influentes mais de personnes célèbres. Pour la génération 80 (et moins) à laquelle j’appartiens. Dans cette catégorie, on peut ranger Samuel Eto’o et tous ceux dont l’écho vous parviennent sur vos terres. A défaut, sur Twitter, nous avons nos leaders établis par l’agence Dipman. Eux au moins changent les attitudes, bousculent les lignes et nous donnent envie de croire à un futur meilleur malgré les difficultés. Les « People » du classement en moins.

2. Existe-t-il une véritable tension entre les anglophones et les francophones ou bien c’est les autres qui en font tout un plat ?

Hum ! A mon humble avis, en tant que citoyens d’une même terre, Anglophones et francophones cohabitent pacifiquement sur toute l’étendue du triangle national. Cependant, le problème se pose lorsque l’on parle d’intégration et d’unité nationale.  Il convient alors de relever ici la « marginalisation » (avec raison) dont sont victimes les ressortissants du « southern Cameroon ». Des réclamations soulevées avec force et conviction par des partis comme le Southern Cameroon National Council (SCNC)qui  réclame la sécession. Si vous faites un tour dans les parties dites « anglophone » et francophone, le contraste est assez saisissant. En positif je dirai pour les anglophones. Dans les infrastructures et la discipline. Malheureusement, ces actes ne sont pas reconnus sur le plan national. On compte d’ailleurs sur le bout d’une main, les membres de la mangeoire ressortissants de cette zone . Il serait temps de rétablir l’équilibre. Cet article et celui-ci apportent plus de lumières sur la question.

3. Dans la vie courante, parlez-vous anglais ? Français ou les deux ?

L’État du Cameroun est bilingue. Ses citoyens sont quant à eux soit francophones, soit anglophones. Rarement les 02. Nous ne faisons que copier l’exemple de notre chef d’État qui a prononcé le discours d’ouverture des assises du Commonwealth en français. Le seul moment où le bilinguisme est mis en exergue c’est dans la pratique du « pidjin« , un mélange de français, anglais, portugais, espagnol né sur les côtes pour faciliter le commerce entre les acheteurs et vendeurs d’esclaves. Ou du « camfranglais » l’argot créé par le camerounais pour se donner bonne conscience.

4. Les plus belles heures du pays ou les plus grands moments de fierté pour le Cameroun et inversement les moments de tristesse ?
La jeunesse consciente actuelle se bat pour le devoir de mémoire des héros oubliés. Nos moments de fierté sont donc essentiellement sportifs. Ils se sont écrit avec les Lions Indomptables. : les quarts de finale atteints au mondial italien en 1990, les victoires aux éditions 2000 de la CAN et des jeux olympiques, la victoire à la CAN 2002;la brillante prestation à la coupe des confédérations en 2003 et les médailles olympiques de Françoise Mbango aux JO de 2004 et 2008. Les moments de liesse étant instantanés, aucune pérénité n’a été assurée pour ces différents projets. Ils sont donc dans les recoins de la mémoire collective. Attendant peut-être la réception des CAN 2016 et 2019.

Catastrophe Nsam

Catastrophe Nsam

Concernant les moment de tristesse, je citerai les 1700 victimes et plus de la catastrophe du Lac Nyos survenue le 21 août 1986, les 250 citoyens camerounais et plus ayant perdus la vie à Nsam le 14 février 1998 en pensant l’améliorer après l’explosion de 02 wagons – citernes de la SCDP et le décès en mondovision de Marc Vivien Foé.

 

Lac Nyos by Peuple Sawa

Lac Nyos by Peuple Sawa

5. Que faut-il savoir sur Boko Haram au Cameroun ?

Au début il y avait les rebelles nigérians. Ils enlevaient les prélats, les chinois et les jeunes filles. Les prélats et les chinois ont depuis été relâchés contre de nombreux milliards de Biya CFA. Les jeunes filles sont toujours retenues captives quelques part. Au Nigéria.

Au Cameroun, depuis un moment, il y a les oubliés/aigris du régime accusés de pactiser avec l’ennemi (réel ou fictif). Ces accusations donnent lieu à des arrestations arbitraires et des fouilles inopinées des résidences des présumés complices. Difficile donc dans ce contexte d’extraire un fil conducteur à même d’éclairer la lanterne du lecteur sur ce problème pourtant majeur dans la sous-région Afrique centrale.

6.   Pourquoi Serena Williams a-t-elle portée un maillot du Cameroun ?

Serena Williams - Domaine public

Serena Williams – Domaine public

Un jour de finale à Rolland Garros, la go a emballé son « matériel » dans le vert-rouge-jaune ! Les « sabitou » lui ont prêté des liaisons avec quelques lions. C’est là que j’ai eu la vraie opinion des citoyens camerounais sur leurs lions. Mboma a l’argent pour gérer une fille comme ca ? » ; « Ndiefi est trop laid pour qu’elle accepte son bonjour »; « Elle a dit a Eto’o qu’il est trop jeune pour elle »…La presse s’en est prise à cœur joie.

L'equipe nationale du Cameroun - Domaine public

L'equipe nationale du Cameroun – Domaine public

Et pourtant l’explication est toute simple : Le Cameroun était INDOMPTABLE au début de la décennie 2000. Ils avaient innové avec les maillots sans manche majoritairement utilisés sur les courts de tennis. Séréna avait besoin d’un uniforme pour la quinzaine parisienne. Lorsque PUMA, alors sponsor des Lions et de Séréna lui fait la proposition, elle a du mal à la décliner ce d’autant plus qu’à l’époque, ils partageaient : le FIGHTING SPIRIT. L’histoire s’arrête là.

Et puis, un peu de buzz n’a jamais tué quiconque.

Voilà. J’espère avoir satisfait votre curiosité et vous avoir donné envie d’en savoir un peu plus sur mon beau pays le Cameroun.

Shalom!

*Matériel : Camerounisme désignant les généreuses courbes féminines

*Sabitou : Camerounisme employé pour désigner un intellectuel aux connaissances douteuses. 

 

L'opposition russe défend l'Ukraine mais ne croit pas à la restitution de la Crimée

mardi 21 octobre 2014 à 19:59
Russian opposition leaders Khodorkovsky and Navalny speak out on Crimea. Images mixed by Tetyana Lokot.

Les leaders de l'opposition russe Mikhaïl Khodorkovski et Alexeï Navalny s'expriment sur la Crimée. Montage d'images de Tetyana Lokot.

Le message des deux principaux opposants de Russie aux Ukrainiens : Dites adieu à la Crimée.

Actuellement assigné à résidence chez lui sur des accusations douteuses de détournement de fonds, le détracteur le plus intraitable de Poutine, l'avocat anti-corruption Alexeï Navalny a exposé ses opinions sur la Crimée, la guerre en Ukraine, et autres questions russes dans un entretien polémique du 15 octobre avec Alexeï Venediktov, le rédacteur en chef d’Ekho Moskvy (Echo de Moscou). S'il désavoue le parrainage par la Russie de la guerre en Ukraine, Navalny n'en a pas moins surpris par ses propos sur la Crimée.

Я считаю, что, несмотря на то, что Крым был захвачен с вопиющим нарушением всех международных норм, тем не менее реалии таковы, что Крым сейчас является частью РФ. И давайте не будем обманывать себя. И украинцам я сильно советую тоже не обманывать себя. Он останется частью России и больше никогда в обозримом будущем не станет частью Украины.

Je suis d'avis qu'en dépit du fait que la Crimée a été captée en violation scandaleuse de toutes les normes internationales, la réalité n'en est pas moins que la Crimée fait maintenant partie de la Fédération de Russie. Il ne faut pas nous leurrer. Et je conseille vivement aux Ukrainiens de ne pas se leurrer non plus. Elle continuera à faire partie de la Russie et ne fera plus partie de l'Ukraine dans un futur prévisible.

Venediktov a alors demandé à Navalny ce qu'il ferait s'il était président de la Russie : il rendrait la Crimée à l'Ukraine, ou conserverait la dernière acquisition de la Russie ? Navalny a partiellement éludé la question, demandant si la Crimée était un morceau de viande “qu'on se passe et se repasse”, pour finalement dire qu'il considérait la perte de la Crimée comme un gain pour l'Ukraine.

Я думаю, что на самом деле, это для Украины, несмотря на обиду, которую они чувствуют, и т.д., это плюс. Это большое счастье, что Крым с абсолютно пророссийским народом, с консервативно настроенным населением, которое не принимает их антикоррупционной революции, не принимает желание идти в Европу, ушел от них. Они лишились 2 млн избирателей, которые тормозили это движение. Поэтому это такая, с одной стороны, win-ситуация. В политике это долгое время будет мешать и нам, и Украине, и Европе.

Je pense qu'en fait, c'est un plus pour l'Ukraine, malgré l'affront et le reste qu'ils ressentent. C'est un grand bonheur que la Crimée, avec son peuple totalement pro-russe, sa population penchant pour un conservatisme qui ne les incline pas vers la révolution anti-corruption ni l'entrée dans l'Europe, les ait quittés. [Les Ukrainiens] ont perdu deux millions d'électeurs qui bloquaient ce mouvement. Voilà pourquoi c'est, en un sens, une situation gagnante. Politiquement, ceci va longtemps gêner et nous, et l'Ukraine, et l'Europe.

Navalny n'a jamais été sans tache dans l'opposition libérale de Russie, avec son nationalisme décomplexé et son discours anti-immigrants. Mais son adhésion au rapt de la Crimée par Poutine était dure à avaler pour beaucoup d'Ukrainiens et de Russe libéraux.

La Crimée c'est l'Ukraine! #Merde à Navalny

L'interview de Navalny par la radio Ekho Moskvy a failli ne pas atteindre les ondes : le rédacteur en chef Venediktov a reçu un appel téléphonique du président de Gazprom-Media [propriétaire de la radio Ekho Moskvy], Mikhail Lessine, qui a exigé que l'entretien ne soit pas diffusé sous peine de “problèmes” pour la station. Cette tentative de censure apparemment grossière n'a pas abouti, puisque Venediktov a ignoré les menaces et sorti l'interview de Navalny malgré tout.

Après le psychodrame autour de l'interview de Navalny, c'est une autre figure clé de l'opposition qui s'est prononcée contre la restitution de la Crimée à l'Ukraine : Mikhail Khodorkovski, l'ex-oligarque et ennemi juré de Poutine, enfermé huit ans dans des camps de travail avant d'être grâcié en décembre 2013. Khodorkovski a écrit sur Twitter avoir lu l'interview de Navalny et être d'accord avec lui sur le fond à propos de la Crimée :

J'ai lu l'entretien d'Alexeï [Venediktov] avec Alexeï [Navalny]. Nous sommes des alliés sur l'essentiel. Les détails, nous les négocierons.

@psykrab : Vous n'échapperez pas à la question. Vous rendriez la Crimée si vous étiez président ?

Khodorkovski : Je vais vous répondre expressément : non. Le problème de la Crimée est là pour des décennies. La voie passe par l'effacement des frontières en Europe, par la régionalisation. Ce ne sera pas de mon vivant.

Le journaliste ukrainien célèbre Vitali Portnikov a écrit un billet sr Facebook critiquant Navalny et Khodorkovsky, qui a généré un millier de commentaires :

И что Ходорковского – впрочем, как и Навального – мы в нашей стране больше не увидим. Пусть лучше изображают демократов на “Русских маршах, в швейцарских ресторанах и даже в Кремле, где они вряд ли будут отличимы от сегодняшних подельников Владимира Путина.

Et puis après, jamais on ne reverra dans notre pays les semblables de Khodorkovski—ni, du reste, de Navalny. Il vaut mieux qu'ils représentent les démocrates aux “Marches Russes [nationalistes, lien en anglais]”, dans les restaurants suisses, et même au Kremlin, où il est douteux qu'on les distingue des complices actuels de Vladimir Poutine.

Khodorkovski a personnellement répondu au message de Portnikov et aux centaines d'utilisateurs ukrainiens qui ont laissé des commentaires indignés, en explicitant sa position sur les réalités de la Crimée.

Вернуть Крым Украине в ближайшие десятилетия сможет только диктатор.
Ни один закон не работает без силы, а если президент силой заставляет общество делать то, что общество категорически не поддерживает – он диктатор.

Rendre la Crimée à l'Ukraine dans les prochaines décennies, seul un dictateur le pourra.
Aucune loi ne fonctionne sans la force, et si un président contraint la société à faire ce que la société rejette catégoriquement—il est un dictateur.

Les Russes anti-Kremlin et, plus encore les Ukrainiens, se sont de plus en plus indignés de la position sur la Crimée de Navalny et Khodorkovski, vilipendés comme traîtres et vatniks (terme péjoratif pour les Russes fervents patriotes). Mais, cet épisode en est la preuve, l'opposition actuelle au Kremlin est loin d'être un front unifié. Si Navalny dénonce effectivement l'agression russe en Ukraine, il estime aussi que le problème de l'immigration illégale en Russie est “cent fois plus important que n'importe quelle Ukraine.”

Khodorkovski a dit se voir en chef du mouvement d'opposition russe, mais celui-ci s'est nettement affaibli depuis son apogée de 2011-13, lorsqu'une mosaïque de nationalistes, libéraux, communistes, et d'étudiants manifestait contre la corruption et la fraude électorale. Avec les opinions favorables à Poutine qui caracolent au-dessus de 80 % après l'annexion frénétiquement approuvée de la Crimée, l'opposition russe ne va pas se tirer une balle dans le pied en manifestant contre la seule immense source de fierté nationale en Russie aujourd'hui.

Chik-V : le surnom donné par les Jamaïcains au chikungunya, qui fait des ravages

mardi 21 octobre 2014 à 13:50
The Aedes aegypti mosquito in macrophotography. Copyright Sanofi Pasteur - May 2011, used under a CC BY-NC-ND 2.0 license.

Macrophotographie d'un moustique Aedes aegypti.
Copyright Sanofi Pasteur – Mai 2011, utilisée sous licence CC BY-NC-ND 2.0.

Alors que le chikungunya se répand aux Caraïbes, la Jamaïque poursuit ses efforts afin de limiter la propagation de cette maladie virale très redoutée. 

La maladie, transmise par le moustique Aedes Aegypti, provoque de fortes fièvres et des douleurs articulaires intenses. Jusqu'à maintenant, le gouvernement a appelé les citoyens à la vigilance en leur demandant de s'assurer que leur environnement immédiat n'est pas propice à la reproduction des moustiques et en les formant aux méthodes de prévention. Le gouvernement envisage également la mise en place d'un jour de nettoyage national afin de pallier à la collecte aléatoire des ordures ménagères dans certains quartiers, qui aggrave la situation.

Sachant que le nombre de personnes infectées risque d'augmenter, beaucoup dénoncent l'absence de médicaments pour combattre les symptômes, la réponse tardive à une situation d'urgence et l'attitude effacée du ministre dans une crise de ce genre.

En début de semaine, Carolyn Joy Cooper de Jamaica Woman Tongue a critiqué le ministre de la santé pour avoir minimisé le nombre de cas de chikungunya en jouant sur les mots :

As late as last Monday, Dr Fenton Ferguson was still claiming that there were only 35 ‘confirmed’ cases of chik-V in all of Jamaica. If the goodly dentist has a public-health inspector to spare, I can prove that a full 25 per cent of these cases are concentrated in just two roads in my neighbourhood!

I have chik-V. My neighbours to my right and left and up the road are also afflicted. That’s four of us. And down the adjacent road, there are at least another five cases. So that makes nine out of 35. And that’s just the ones I know about. Of course, the big trick is ‘confirmed’. We are not ‘confirmed’ cases. We have the symptoms, but that doesn’t matter.

As far as the Ministry of Health is concerned, if you haven’t done a blood test, you and your doctor are just guessing.

Pas plus tard que lundi dernier, Fenton Ferguson annonçait seulement 35 cas « confirmés » sur l'ensemble de la Jamaïque. Si ce brave dentiste voulait bien mettre à disposition un inspecteur de santé publique, je pourrais prouver que 25% de ces cas sont concentrés dans deux rues de mon voisinage !

Je suis atteinte du chikungunya. Les voisins à ma droite, à ma gauche et en haut de la rue sont également atteints. Cela fait déjà quatre personnes. Dans la rue d'à côté, il y a au moins cinq autres cas. Cela fait neuf sur 35. Et je ne considère que les cas dont j'ai entendu parler. A l'évidence, tout est dans le « confirmés ». Nous ne sommes pas des cas « confirmés ». Nous avons les symptômes mais ça ne veut rien dire.

Pour le ministre de la santé, tant qu'il n'y a pas de tests sanguins, vous et votre médecin ne faites que des suppositions.

Pour lever l'incertitude, Carolyn Cooper a voulu faire un test sanguin mais on lui a répondu que « les réactifs pour les analyses de sang étaient en rupture de stock ». Elle s'est interrogée : comment le ministre de la santé peut-il parler de « 35 cas confirmés » alors que les laboratoires sont à cours de réactifs, tant il y a de tests sanguins pratiqués pour identifier la maladie ? La réponse semble provenir de l'industrie du tourisme en Jamaïque : 

I completely understand Dr Ferguson’s anxiety about scaring off visitors with chik-V. After all, tourism is our bread and butter. But I think he’s underestimating the bravery of potential tourists. [...]

The minister of health needs to be far less concerned about tourists and much more worried about the people of Jamaica.

Je comprends totalement l'angoisse du Dr Ferguson,  d'effrayer les touristes avec le chikungunya. Il ne faut pas oublier que le tourisme est notre gagne-pain. Mais je pense que le Dr Ferguson sous-estime la bravoure des touristes potentiels.  [...]

Le ministre de la santé devrait se préoccuper davantage des Jamaïcains que des touristes. 

Jean Lowrie-Chin, blogueuse, est du même avis. Elle considère qu’ « un seul ‘discours à la nation’ n'est pas suffisant pour parler d'une crise qui touche à présent presque tous les foyers jamaïcains » en référence à l'allocution télévisée du Dr. Fenton Ferguson le 28 septembre dernier. Depuis, le Dr. Ferguson a reconnu le décalage entre le nombre de cas confirmés et le nombre de cas suspectés, mais il maintient que le ministère de la santé a agi de façon professionnelle.

Selon Lowrie-Chin, « les Jamaïcains négligents, qui ont peu de fierté de leur environnement » sont en grande partie responsables de la propagation de la maladie. Elle suggère aussi que, comme à Cuba, le gouvernement crée des emplois où les travailleurs seraient formés à l'identification et à la destruction des sites de reproduction des moustiques, et qu'il éduque les communautés à risque. Sa publication dresse la liste des points sur lesquels la communication officielle aurait pu être meilleure : 

What makes simple, logical steps so difficult, is bureaucracy – that morass which is the perfect hiding place for mediocrity and incompetence. While we must respect our democratically elected government, they should in turn respect the people they swore to serve.

Ce qui complique des étapes simples et logiques, c'est la bureaucratie – ce bourbier, planque parfaite pour la médiocrité et l'incompétence. Nous devons respecter notre gouvernement élu démocratiquement mais en retour, le gouvernement doit respecter le peuple qu'il a juré de servir.

Elle soutient que beaucoup des erreurs faites dans la gestion de la « crise du chikungunya » sont liées aux « lacunes de gouvernance » et à la culture de la médiocrité générée par la fuite des cerveaux, l'exil des esprits les plus brillants vers des pays où leurs idées seront appréciées.

Depuis des décennies, la Jamaïque perd de son capital humain, comme bien d'autres régions en proie à des difficultés économiques. Selon une étude de la Banque Mondiale, « plus de 60 pour cent » des Jamaïcains avec un diplôme de l'enseignement supérieur migrent, surtout vers les Etats-Unis, à cause de leur proximité :

The very high migration rate of the best educated from Jamaica means that the number of migrants with a tertiary education from this country actually exceeds the number of local residents with this level of education.

Le très fort taux d'émigration des Jamaïcains les mieux formés indique que le nombre de migrants avec un diplôme de l'enseignement supérieur excède le nombre de résidents locaux avec un niveau d'étude équivalent. 

Selon les internautes, le gouvernement jamaïcain continue à agir comme si de rien n'était et il n'envisage pas de solution :

This agonizing ChikV is a metaphor for the pain and suffering that is being felt by humble Jamaicans, barely surviving on the margins of poverty. They deserve some hope that our leaders will do right by them, bringing our nation to a healthy state.

La gravité de la crise du chikungunya reflète la peine et la souffrance des humbles Jamaïcains, qui survivent à peine dans la pauvreté. Ils méritent justice de la part des dirigeants ainsi que le rétablissement de l'état sanitaire du pays.  

Convaincue que le ministère de la santé n'est pas à la hauteur de la situation, la blogueuse « Cucumber Juice » a publié une foire aux questions qui fournit des informations sur la maladie, les méthodes de prévention et les moyens de contrôle des symptômes si le virus a été contracté.

Le Cachemire connaît les “pires violences de la décennie” entre l'Inde et le Pakistan

mardi 21 octobre 2014 à 13:16
Indian villagers carry the dead bodies of Akram Hussain who was killed in alleged Pakistan mortar firing at Jeora village of R.S Pura border sector about 32 km from Jammu, India. Image by Amarjeet Singh. Copyright Demotix (23/8/2014)

Des villageois indiens transportant le corps du défunt Akram Hussain, tué lors d'un tir de mortier présumé en provenance du Pakistan, du village de Jeora, dans le secteur de la frontière R.S. Pura, à 32 km de Jammu, Inde. Image de Amarjeet Singh. Copyright Demotix (23/8/2014)

Tous les liens associés à ce billet renvoient à des pages en anglais, sauf mention contraire.

Les tensions atteignent de nouveau des sommets dans le Cachemire, cette fois le long de la Ligne de Contrôle (ou LOC pour Line of Control), entre l'Inde et le Pakistan. Ces derniers jours, les deux voisins ont échangé des coups de feu à la frontière, causant la mort de 17 civils et la fuite de milliers d'autres. 

Ces nouvelles hostilités ont débuté il y a près de deux semaines, le 7 octobre, quand des soldats indiens et pakistanais ont tué neuf passants spectateurs, alors qu'ils échangeaient des coups de feu. Après la confrontation, chaque camp a rejeté sur le camp adverse la responsabilité d'incitation à la violence. Le calme était fragile les jours suivant, l'Inde et le Pakistan ayant poursuivi leurs échanges de tirs de mortier et de balles de mitrailleuses, conduisant au décès de 6 personnes dont trois enfants.

Pour tenter de calmer les tensions, les commandements militaires de l'Inde et du Pakistan ont mis en place un numéro de téléphone spécial (hotline) pour préserver une communication régulière entre les forces armées des deux nations. Mais jusqu'à maintenant, cette initiative n'a pas été d'une grande utilité.

L'inde et le Pakistan ont créé la Ligne de Contrôle (LOC) en 1972, après des affrontements violents au Cachemire. Cette délimitation géographique n'a pas réussi à apporter la paix. Mais en 2003, les deux pays ont signé un accord officiel de cessez-le-feu, après  une longue période de 14 années de batailles armées le long de la frontière.

La dernière période de troubles sur la Ligne de Contrôle (LOC) a été qualifiée comme étant “la pire de cette décennie dans la région“, et beaucoup craignent qu'elle puisse aussi réduire à néant le cessez-le-feu de 2003. Très peu a été fait pour renouer les liens. L'Inde a refusé de participer avec le Pakistan à des réunions avec les séparatistes du Cachemire, et le Premier Ministre indien Narendra Modi a annulé de manière inquiétante l'entretien avec son homologue pakistanais au mois d'août de cette année. 

Selon les officiels pakistanais, Islamabad n'a rien fait pouvant provoquer des attaques indiennes. “Nous ne comprenons pas pourquoi les indiens ciblent la population civile pakistanaise”, a déclaré un major pakistanais à la presse le 8 octobre.

Les forces indiennes racontent une histoire similaire, avec des rôles qui sont inversés.

La couverture des affrontements par les médias a été manipulée. Par exemple, le Times of India a publié des articles comme “Le Pakistan pourrait continuer ses tirs à la frontière jusqu'à Diwali“, dans lequel le journal accuse Islamabad d'avoir “de nouveau violé le cessez-le-feu”. A l'opposé, le journal Express Tribune, est apparu plutôt pro-pakistanais, publiant des articles comme “Des tensions grandissantes: l'Inde reprend ses bombardements, le Pakistan menace d'une réplique“, sous-entendant que l'Inde serait l'instigateur des récentes violences. Le journal ultra libéral Karachi Post a aussi blâmé les troupes indiennes pour avoir tiré en premier.

Sur Twitter, nombreux sont ceux qui ont commenté la couverture disparate par les média. Un certain cynisme colore certaines réponses. Omar Waraich, par exemple, écrit sur la crise à la frontière, sur la Ligne de Contrôle : 

Affrontements sur la Ligne de Contrôle : Selon les média pakistanais : 5 pakistanais tués. Selon les médias indiens : 6 indiens tués

L'inconsistance des média a aussi rendu furieux les internautes. Salman Akram Raja soutient que la guerre d'informations dans la presse aggrave la guerre armée dans les rues. 

Les média, aussi bien en Inde qu'au Pakistan, créent des mondes parallèles de colère et d'angoisse. Des douzaines de chaînes mais aucune pour l'explication de l'opinion de chacun.

Depuis le début du mois d'octobre, le cessez-le-feu sur la Ligne de Contrôle (LOC) a été violé 11 fois, et ni l'Inde ni le Pakistan n'a reconnu officiellement la responsabilité d'avoir initié le conflit. Aucune issue n'étant pour envisageable pour le conflit, la région ne peut que croiser les bras et espérer qu'il n'y ait plus d'escalades de violences entre ces pays rivaux qui possèdent tous deux l'arme nucléaire.

Rire avec le Tumblr des #Ratés de la campagne électorale tunisienne

lundi 20 octobre 2014 à 15:46
Campaigning by the 'Current of Love', a political party in Tunisia

En campagne avec le ‘Courant de l'Amour', un parti politique tunisien

Les internautes tunisiens collationnent les moments drôles ou grotesques de la course électorale sur un blog Tumblr intitulé #TnElecFails [les ratés des élections en Tunisie].

Le coup d'envoi de la campagne des élections législatives tunisiennes a été donné le 4 octobre. Plus de 5 millions d'électeurs inscrits sont appelés à élire le 26 octobre les 217 députés de l'Assemblée des représentants du peuple.

Les deux principaux concurrents aux élections de cette année sont le mouvement islamiste Ennahda, vainqueur de celles de 2011, et Nidaa Tounes, créé en 2012 et dirigé par Beji Caid Essebsi, 86 ans, qui a servi les présidences autocratiques de Habib Bourguiba et Zine el-Abidin Ben Ali.

Mais avec le nombre de listes dépassant les 1.300 et celui des candidats estimé à 13.000, les sujets de moquerie ne manquent pas dans la campagne électorale actuelle, des logos aux slogans en passant par les noms arborés par les listes.

Quelques photos :

"I like" is the logo of this list

Le “J'aime” de Facebook est le logo de cette liste

Name of the list: "the miserables", motto: "the hope of generations"

Nom de la liste : les misérables”, slogan : “un espoir pour les générations”

This independent list 'I want my country to be clean' was hanged on a wall near a high school, without the photos of its candidates, with the following note: "our photos do not matter, what matters is achieving our promises to you". The list did not remain with photos for long, and this note was written in answer: "we do not need your faces anyway".

Cette liste indépendante ‘Je veux que mon pays soit propre’ a été collée sur un mur proche d'un lycée, sans photos de ses candidats, avec l'explication suivante: “Nos photos ne comptent pas, ce qui compte, c'est de réaliser les promesses que nous vous faisons”. La liste n'est pas restée longtemps sans photos, et quelqu'un a ajouté : “De toute façon nous n'avons pas besoin de vos têtes”.

Scissors is the logo of the Tunisian party because they want to "circumsize the security [institution], the judiciary and the administration"Most probably, they meant to purge or cleanse from corruption. But, they opted for "circumcise".

Des ciseaux, voilà le logo que s'est choisi le Parti Tunisien qui veut “circoncire la sécurité [l'institution], la justice et l'administration”. Ils voulaient sans doute dire purger ou nettoyer la corruption. Mais c'est “circoncire” qu'ils ont choisi.

Pourquoi cette dérision du processus électoral tunisien ?

A vrai dire, ça n'est pas un choix. Qui ne rirait pas devant “les misérables, un espoir pour les générations” ou un parti qui se propose de “circoncire les institutions de la sécurité et de la justice ainsi que l'administration” ?

Mais en même temps, cette ironie reflète le mécontentement populaire face à la classe politique, qui presque quatre ans après le renversement du régime Ben Ali, n'a pas fait grand chose pour répondre aux aspirations socio-économiques criantes des Tunisiens.

Un bon exemple en est la protestation d'un groupe de diplômés au chômage de Metlaoui, une ville pauvre du gouvernorat de Gafsa dans le sud-ouest de la Tunisie. Ils ont collé leurs diplômes universitaires marqués “A vendre” sur un panneau d'affichage électoral.
for sale