PROJET AUTOBLOG


Global Voices (fr)

Archivé

source: Global Voices (fr)

⇐ retour index

Surveillance : ZunZuneo, le clone américain de Twitter qui surveille la vie privée des Cubains

jeudi 10 avril 2014 à 11:48
Image from Wikimedia Commons.

Une femme utilisant un téléphone public à Varadero, Cuba en 2012. Photo Wikimedia Commons.

[Les liens redirigent vers des pages web en anglais.]

« Internet est un champ de bataille ». Du moins, c’est l’image qui prédomine à Cuba. Alors que le Département d’État des États-Unis se félicite de la libre circulation des informations et des connaissances, les autorités cubaines parlent d'une cyberguerre idéologique, menée par les États-Unis contre Cuba et tout ce que représente ce pays. Les révélations de la semaine passée concernant ZunZuneo, le « Twitter cubain » créé par l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), fait penser que les Cubains n’ont pas tort.

 ZunZuneo, un programme fonctionnant via SMS sur tous les types de téléphones portables, était-il destiné à l’échange d’informations, d’opinions et de mèmes ? Non. ZunZuneo a été conçu dans le but de promouvoir « le changement démocratique » et de déclencher un Printemps cubain. Bienvenue dans le dernier chapitre de la guerre froide entre Cuba et les États-Unis, un fléau vieux de 6 décennies.

À l’instar d’autres initiatives de « libération », fondées sur la technologie, mises en place à l’étranger par les États-Unis, ce projet découle d'une idée irrationnelle et condescendante concernant l’impact de l’accès aux technologies de la communication chez les  populations opprimées. Nous savons que les récents soulèvements sociaux de la Tunisie à l’Ukraine ne sont pas simplement le fruit d’un festival de tweets, mais qu’ils sont nés du travail d'un solide réseau d’activistes collaborant depuis des années afin de promouvoir le changement de multiples façons, en ligne et hors ligne. S’il est vrai que les réseaux sociaux ont joué un rôle dans ces soulèvements, c’est celui d’accélérateur d’événements.

Toutefois, il semblerait que l’USAID n’ait pas étudié à la question dans le détail. Bien que cela ne soit qu’une partie des graves failles de ce programme.

ZunZuneo a été développé, déployé et promu par des agents du gouvernement des États-Unis et par des sous-traitants, sans que les personnes que le programme était supposé aider en aient connaissance. Non seulement la plateforme n’offrait aucune transparence concernant son origine, mais en plus elle a obtenu le numéro de téléphone portable d’un demi-million de Cubains, à leur insu et sans leur autorisation. Cela représente une part importante de la population utilisant un téléphone portable, qui était, à l'époque, estimée à environ 2,2 millions de personnes (pour une population de 11 millions).

Ce n’est pas le pire : les opérateurs de ZunZuneo ne se sont pas contentés d’obtenir ces numéros sans autorisation et sans en informer les utilisateurs, ils ont également surveillé le contenu des messages transitant par le logiciel. Comme l’écrit l’Associated Press (AP), « En coulisses, les ordinateurs de ZunZuneo… conservaient et analysaient les messages des abonnés et d’autres informations les concernant, y compris le sexe, l’âge, la “réceptivité” et les “tendances politiques” ». Depuis, l’USAID a rédigé un billet, démentant plusieurs éléments contenus dans l’article de l’AP, mais sans apporter de véritables réponses concernant ces affirmations.

L’AP n’indique pas si les messages interceptés étaient privés ou publics ni quelles garanties de confidentialité avaient été offertes aux utilisateurs, le cas échéant. Dans une certaine mesure, cela importe peu. En matière de doctrine des droits de l’homme, le programme ZunZuneo violait certainement les droits relatifs au respect de la vie privée des utilisateurs.

Il s’agit exactement du type de comportement que les États-Unis condamnent régulièrement chez les gouvernements étrangers. Utiliser les réseaux sociaux comme outil de surveillance ? Rien de nouveau, il suffit de regarder du côté du Pakistan, du Vietnam, de l’Arabie saoudite ou de presque n’importe quel pays qui figure sur la liste des ennemis d’Internet de Reporters sans frontières cette année. La principale différence est que l’USAID prétend avoir agi dans le but de « promouvoir les droits de l’homme et les libertés universelles ».

Bien qu’on ignore dans quelle mesure le gouvernement cubain avait connaissance du programme, il est fort vraisemblable que les autorités aient permis sciemment son déploiement. L’appareil sécuritaire d’État est robuste, bien huilé et pleinement au fait des activités liées aux réseaux de télécommunication dans le pays. Même si cela est impossible à prouver, il est probable que les autorités chargées de la sécurité nationale aient utilisé le réseau comme une manière, parmi d’autres, de surveiller les communications des citoyens.

Cela signifierait que ZunZuneo n’a pas uniquement offert un outil permettant aux agents du gouvernement des États-Unis de surveiller facilement les communications de la population cubaine, mais aussi une opportunité supplémentaire pour le gouvernement cubain de faire de même.

Le discours classique aux États-Unis est que l’embargo économique sur Cuba découle de l’horrible bilan en matière de droits de l’homme du pays. Il y a beaucoup d’éléments qui vont dans ce sens. Cependant, l’embargo a été mis en place bien avant que Cuba soit connu pour les violations systématiques des droits politiques et civils. En 1960, Fidel Castro avait émis un refus formel de l’aide proposée par le gouvernement des États-Unis et mis un terme à tous les contrats passés avec des compagnies étasuniennes, qui opéraient confortablement, et ont tiré d’énormes profits, dans le pays sous l’ère Batista. Deux ans plus tard, John F. Kennedy signait et scellait l’embargo.

Aux États-Unis, les dirigeants politiques qui continuent à défendre l’embargo sont des personnes qui ont un avantage politique et financier à le maintenir en place. De telles révélations suggèrent que les droits humains des citoyens cubains ne sont guère plus qu'un joli emballage pour un programme nettement moins noble. Et le travail de l’USAID à Cuba n’est rien de plus qu’une extension de ce programme, une extension largement occultée aux citoyens étasuniens et cubains. C’est uniquement grâce aux efforts déployés par certains organismes, comme l’Associated Press, que nous avons parfois l’occasion d’être témoins de l’absurdité de cet éternel et amer conflit.

 

“C'est une fille !” : campagne contre l'infanticide des filles en Inde et en Chine

jeudi 10 avril 2014 à 11:43

Le site MujeresMundi, dirigé par le spécialiste de la communication Xavier Medina, un Péruvien basé en Belgique, participe à la communication de la campagne It's a girl ! (C'est une fille !) contre l'infanticide des filles en Inde et en Chine :

Les filles sont tuées dans un féminicide qui fait plus de victimes que tous les génocides du vingtième siècle. Bien que cela paraisse incroyable, ce problème est rarement porté à l'attention de la communauté internationale. Comment expliquer cet étrange silence face à l'un des plus grands problèmes de l'humanité ? 

Le site comprend une interview de Evan Grae Davis, producteur du documentaire It's a girl!, qui déclare, “Je ne me considérais pas comme un activiste jusqu'à ce que je commence à produire et réaliser le film It’s a Girl”.

Pourquoi le Président de Madagascar n'a pas encore nommé un nouveau Premier Ministre

jeudi 10 avril 2014 à 08:43

Le nouveau président de Madagascar Hery Rajaonarimampianina a été élu le 20 décembre 2013. Quelques mois plus tard, il n'a pas encore nommé un premier ministre pour son nouveau gouvernement. De nombreux observateurs se demandent ce qui prend autant de temps. Le blogueur malgache Michael Rakotoarison a un regard différent sur la situation ; il soutient que le fait que le président prenne son temps n'est peut-être pas une si mauvaise chose : 

J’étais dans l’attitude ambiante de celui qui doute, moi qui de base n’ai jamais soutenu le Président [..]. De source sûre, le président missionne à l’étranger une poignée d’hommes discrets chargés de débusquer des compétences. Le pari est donc de dégager la politique, pour ne se soucier que de l’économie. 

 

Shanghai, nouvelle destination préférée des jeunes diplômés chinois

mercredi 9 avril 2014 à 18:45
Young people in Shanghai in 2013. Photo by Flickr user Richard Schneider. CC BY-NC 2.0

Des jeunes à Shanghai en 2013. Photo de Richard Schneider sur Flickr. CC BY-NC 2.0

[Tous les liens sont en mandarin, sauf mention contraire]

Alors que la saison de remises de diplômes approche à grand pas, environ 7,2 millions de futurs diplômés chinois devront en découdre pour décrocher un emploi.

Mais où ? Une récente étude atteste que Shanghai est devenue la ville la plus attractive pour les diplômés chinois en quête d'un emploi, toujours plus nombreux à postuler auprès des entreprises chinoises. 

Le top 100 chinois des employeurs préférés – une enquête réalisée par la compagnie Universum – nous apprend [anglais] que Pékin, Shanghai et Guangzhou sont les trois villes plébiscitées par les diplômés. Un trio communément désigné par les Chinois comme le ”Beishangguang”, les poumons économiques de la Chine.

L'enquête, publié le 3 avril 2014 après avoir interrogé 51 000 étudiants universitaires à travers la Chine, a également argué que de nombreuses entreprises chinoises ont augmenté leur nombre d'embauches, et deviennent de plus en plus populaires auprès des futurs diplômés.

La majorité des entreprises dominant ce classement sont par ailleurs chinoises, comme le géant des télécommunications Huawei ou le deuxième plus grand producteur chinois d'huile, Sinopec. 

Bien que cette étude ne fournisse pas les raisons de la popularité de Shanghai, de nombreux médias chinois ont évoqué différentes explications. Ainsi, China National Radio affirme :

以前大学生首先选择北京是看中北京的首都的地位,看中这里的发展机遇;现在很多人放弃北京是因为这里的生活成本实在是太高了,很难落户也是其中的一个障碍。相比而言,上海是一个非常开放的城市,这几年上海开始引进人才政策,实行居住证制度,不论国籍、不论文凭、不论职称、不论身份,只要你是真才实学,无论是境内还是境外的人来上海都会有很好的创业和发展的渠道。也就是说只要有能力,就会有发展的空间,甚至在企业中还可以做到很高的地位,这就是非常吸引大学生的一个原因。 

Par le passé, de nombreux diplômés universitaires ont choisi Pékin après avoir évalué son statut de capitale et les opportunités de développement qu'elle offre. Dorénavant, beaucoup quittent Pékin à cause de son niveau de vie trop élevé et de la difficulté à obtenir le Huji [français]. A titre de comparaison, Shanghai est une ville très ouverte. Elle a mis en place des politiques incitatives pour les permis de résidence et attire les talents. Indépendamment de votre éducation, de votre nationalité ou de vos titres, tant que vous avez du talent, vous pouvez faire des affaires. Tant que vous serez compétent, vous profiterez d'une marge de progression et gravirez les échelons au sein de votre société. Voilà pourquoi la ville attire autant d'étudiants. 

Un journal de Pékin a publié trois portraits de jeunes professionnels qui ont choisi de quitter Pékin pour de bon. Intitulé “Quitter Pékin pour travailler ailleurs possède de nombreux avantages, la capitale n'est plus la première option pour l'emploi”, l'article met en relief les plaintes des personnes interrogées quant à l'aggravation de la pollution à Pékin, et le népotisme touchant le marché du travail.

Les médias chinois se sont emparés de l'étude Universum et publient force articles, avec des titres tels que “Shanghai, première ville plébiscitée par les diplômés”. Elle génère également de nombreuses discussions sur le réseau social de microblogging chinois Sina Weibo. 

A l'instar de plusieurs utilisateurs de Weibo, un rédacteur de Shanghai, sceptique, écrit:

前段时间么说毕业生逃离北上广,现在又说“上海取代北京成为毕业生工作的最‘理想’城市”。各种机构各种数据互相在抽脸么? 

Il y a quelques temps, les diplômés abandonnaient Pékin, Shanghai et Guangdong; maintenant, ils disent que Shanghai a remplacé Pékin, devenant le lieu idéal pour travailler. Est-ce ainsi que les instituts d'études se battent entre eux ?

Un utilisateur de Weibo de Shanghai se lamente ainsi:

嫌地铁不够挤?物价不够高 

Le métro de Shanghai n'est pas assez bondé ? Les prix ne sont pas trop élevés ?

Chuhui, résident de Shanghai, écrit:

 欢迎来到这个老人跌倒没人敢扶,钱包被偷满街人都不会告知你,收入水平高,生活成本更高的城市。在这里你会颠覆自己的人生观、价值观。只有真正灵敏、不怕吃苦的人,才能经受住魔都的考验。

Bienvenue dans la ville dans laquelle personne n'ose aider une personne âgée en train de tomber, où personne ne vous dira que votre portefeuille a été volé, où les revenus sont élevés, et le coût de la vie encore plus. Ici, votre vision de la vie et vos valeurs seront déformées. Seuls ceux qui n'ont pas peur de la violence passeront l'épreuve du feu à Shanghai.

A la Havane, un livre, sans rien en échange

mercredi 9 avril 2014 à 18:35
Suelta masiva de libros en La Habana (Foto: Fernando Medina)

Don massif de livres à la Havane (Photo Fernando Medina)

Des dizaines de personnes se sont rassemblées dans un parc de la Havane, la capitale cubaine, dimanche dernier pour participer à un don massif de livres. L'initiative, mené par le blogueur [es] et auteur de Global Voices Rafael González [es], consistait à [es] laisser des livres quelque part dans le parc avec une inscription sur la première page disant: “Ce livre appartient à celui qui le trouve et, en échange, il l'offrira à son tour après l'avoir lu pour que d'autres puissent en profiter.”

L'initiative initiale, lancée sur Facebook [es], a été reprise par Rafael González, qui a contacté les créateurs. Lu Di Piertro a commenté : 

La idea no es nuestra, ya existe desde hace un tiempo y no sé exactamente quién la empezó. Un amigo, Rodri, que está también de organizador de este evento pensó en armar una suelta masiva y me propuso que hiciéramos este evento y gratamente fue muy aceptado. Nos parece bueno (el evento) por muchas razones (…): lo importante de leer, lo hermoso de dar, lo emocionante de soltar y la incertidumbre de no saber y confiar; fomentar la solidaridad y el espíritu del compartir social y culturalmente, abrir el corazón y atravesar fronteras. 

Cette idée n'est pas la nôtre, elle existe déjà depuis un certain temps et je ne sais pas qui l'a précisément lancée. Un ami, Rodri, qui est aussi un organisateur de cet événement, a pensé à mettre en place un don massif et m'a proposé que nous fassions cet événement et il a été très positivement reçu. (L'événement) nous semble bon pour plusieurs raisons (…): l'importance de la lecture, la beauté du don, l’enthousiasme de diffuser, et la surprise, de ne pas savoir et ne pas y croire ; la promotion de la solidarité et l'esprit de partage social et culturel, l'ouverture de votre cœur et le franchissement des frontières.  

Entre-temps, un autre organisateur, Rodri Bristot, a ajouté:

En lo personal, lo que me impulsa a organizar este evento de Suelta Masiva, tiene que ver con una idea un poco romántica: creo que hay cosas en la vida que debieran ser gratis, como la educación y la lectura; los libros no debieran ser solo para quienes pueden pagarlos, si no que deberían ser más accesibles, que la gente los encuentre en los espacios públicos sin tener que resignar algo (dinero o trabajo) para adquirirlos.

Personnellement, ce qui m'a poussé à organiser cet événement de “Don massif”, est lié à une idée qui est un peu romantique : je crois qu'il y a des choses dans la vie qui devraient être gratuites, comme l'éducation et la lecture ; les livres ne devraient pas être uniquement réservés à ceux qui ont les moyens de les payer, ils devraient être plus accessibles, les gens devraient les trouver dans les espaces publics sans avoir à sacrifier quelque chose (argent ou travail) pour les acquérir.

Varios marcadores fueron compartidos en la cita (Foto: Fernando Medina)

Plusieurs marque-pages ont été distribués durant l'événement (Photo Fernando Medina)

Dans la matinée du dimanche 6 avril, Rafael González, avec un groupe d'environ 50 jeunes, adultes et enfants, ont fait don de leurs livres dans le parc de H y 21, situé à El Vedado, à la Havane. Les visiteurs se sont mis à regarder derrière les bancs du parc, ont fouillé le parterre central, entre les racines des arbres, et ont même approché ceux qui arrivaient dans le parc pour recevoir directement les livres. 

L'écrivain cubain Dazra Novak a décrit son expérience [es] sur son blog [es]: 

He soltado cuatro libros hoy -con el mes, el año y la ciudad anotados en la primera página-, espero que los beneficiados la pasen tan bien como yo al leer dos de esos títulos, tan bien como la pasé al escribir los otros dos. No sé por qué sospecho que en algún momento volverán a mí para que yo pueda enrumbarlos de nuevo. Ahora que lo pienso, hoy –mañana, siempre- todos deberían hacer lo mismo.

J'ai donné quatre livres aujourd'hui – avec le mois, l'année, et les villes listées sur la première page -, j'espère que les bénéficiaires ont autant de plaisir que moi j'en ai eu en lisant deux de ces livres, et en écrivant les deux autres. Je ne sais pas pourquoi je pense qu'à un moment donné les livres vont revenir vers moi, afin que je puisse les refaire circuler. Maintenant que j'y pense, aujourd'hui – demain, toujours – tout le monde devrait faire de même.  

*Photo de couverture par Fernando Medina.