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Le rétablissement du premier ministre Ranil Wickremesinghe sonne-t-il la fin de la crise politique au Sri Lanka ?

mercredi 19 décembre 2018 à 20:19

Pendant la manifestation de la Coalition citoyenne Nous Voulons la Démocratie, Lipton Circle, Colombo le 12 décembre. Photo via Groundviews. Utilisée dans le cadre d'un accord de partage de contenu.

Dimanche 16 décembre 2018, le premier ministre sri-lankais démis Ranil Wickremesinghe a été rétabli dans ses fonctions, ce qui pourrait mettre fin à presque deux mois de crise politique.

La veille, samedi 15 décembre, le premier ministre contesté Mahinda Rajapaksa avait démissionné à la suite d'une décision de justice qui l'excluait du poste et contestait sa désignation.

Ranil Wickremesinghe investi premier ministre du Sri Lanka ce qui pourrait mettre fin à une crise politique de 51 jours

Wickremesinghe a tweeté :

Aujourd'hui est une victoire pas seulement pour moi-même ou pour l'UNP. C'est une victoire pour les institutions démocratiques du Sri Lanka et la souveraineté de nos concitoyens. Je remercie tous ceux qui ont défendu fermement la constitution et assuré le triomphe de la démocratie.

Le président actuel Maithripala Sirisena, qui avait précipité la crise constitutionnelle au Sri Lanka en renvoyant  Wickremesinghe de son poste de premier ministre le 26 octobre pour le remplacer par l'ex-président devenu député d'opposition Mahinda Rajapaksa, a défendu ainsi ses actes :

“Même si je suis mis en prison, les décisions appropriées que j'ai prises dans les meilleures intentions pour le pays et son peuple seront gravées dans la pierre un jour” : déclaration du président Sirisena après le rétablissement de Wickremesinghe comme premier ministre aujourd'hui

Le président Sirisena avait suspendu le parlement national pour trois semaines et dissous le gouvernement.  Wickremesinghe a contesté son renvoi, le disant contraire à la constitution, et de nombreux partisans se sont ralliés derrière lui exigeant la convocation à nouveau du parlement pour une motion de confiance. Voir la chronologie de la crise constitutionnelle par Groundviews.

Les Sr-Lankais ont manifesté pratiquement chaque jour depuis le début de la crise, prenant position en faveur de la démocratie.

“Je ne suis pas là pour Ranil. Je suis là pour la démocratie et la bonne gouvernance.” Manifestation de la société civile en ce moment à Liberty Circle

Le président Maithripala Sirisena céda à la pression et re-convoqua le parlement le14 novembre, mais rejeta deux motions de non-confiance contre Rajapaksa. Ranil Wickremasinghe et 121 autres parlementaires sollicitèrent alors la justice pour un mandat de quo warranto, obligeant Rajapaksa à démontrer quelle autorité lui conférait ses pouvoirs de premier ministre. Le 3 décembre, une cour d'appel sri-lankaise émit une injonction temporaire écartant Rajapaksa des fonctions de premier ministre jusqu'à l'audition de la demande contestant sa nomination.

Le 13 décembre, un jugement historique restaura le parlement et ordonna au président d'annuler la nomination du député Rajapaksa premier ministre.

Dernière heure : La Cour suprême du Sri Lanka juge que la décision du président sri-lankais Maithripala Sirisena de dissoudre le Parlement était anticonstitutionnelle et illégale

Un billet de blog sur Groundviews cite le juriste Dinesha Samaratne, qui a déclaré que la décision de la Cour suprême devait être saluée et célébrée :

The Parliament stands and its declaration of no-confidence in MP Rajapakse (through two separate motions) and its declaration of confidence in Prime Minister Wickremesinghe clarifies that Ranil Wickremesinghe continues to enjoy the confidence of a majority in Parliament. The only way forward is for the President to rescind his purported appointment of MP Rajapakse as Prime Minister and his purported appointment of a Cabinet of Ministers. The status quo prior to 26th October has to be restored.

Le Parlement tient bon et sa déclaration de non-confiance envers le député Rajapakse (par deux motions distinctes) et sa déclaration de confiance pour le premier ministre Wickremesinghe clarifie que Ranil Wickremesinghe continue à jouir de la confiance d'une majorité au Parlement. La seule issue est que le président annule sa prétendue nomination du député Rajapakse comme premier ministre et sa prétendue nomination d'un gouvernement. Le statu quo d'avant le 26 octobre doit être restauré.

L'article de Groundviews citait aussi le juriste  Luwie Ganeshathasan, qui expliquait :

The decision re-affirmed that Sri Lankan citizens had a right to be governed according to the Constitution as well as a right to participate in elections according to established procedures of the law, as opposed to on the whim of one individual.

La décision réaffirmait le droit des Sri-Lankais à être gouvernés conformément à la Constitution et de participer aux élections conformément aux procédures fixées par la loi, par opposition au caprice d'un individu.

Ashraf Hegazy et Gary Milante ont noté sur Groundviews que la crise politique est largement passée inaperçue de la presse internationale, mais que :

How Sri Lankans have responded to these events demonstrates the resilience that they have built into their systems of government and social norms.

La riposte des Sri-lankais à ces événements démontre la résilience qu'ils ont bâtie dans leurs systèmes de gouvernement et leurs normes sociales.

Le 16 décembre, des internautes ont rappelé au président Sirisena sa déclaration de novembre qu'il démissionnerait immédiatement en cas de retour de Wickremesinghe.

Vraiment, est-ce quelqu'un peut demander à @MaithripalaS / @PMDNewsGov pourquoi plus d'une heure après la prestation de serment de Wickremesinghe, il est toujours président et n'a pas démissionné ?

Je me réjouis trop pour demain ! Non, pas parce que M. Ranil Wickramasinghe est de nouveau premier ministre. Seulement pour voir le rouge monter au visage de M. Maithreepala Sirisena quand il rencontre les députés UNP – et se sentir tout bête.

Selon les articles des médias, un nouveau gouvernement sera investi le 17 décembre 2018, qui comprendra six parlementaires des factions Rajapaksa et Sirisena du Parti de la Liberté du Sri Lanka (SLFP). Le Parti de l'Unité nationale de Wickremesinghe (UNP) s'est dit prêt à travailler une fois de plus avec le président Maithripala Sirisena, “fourvoyé par certains groupes” contre le gouvernement d'union. En août 2015, le Parti de la Liberté du Sri Lanka de Sirisena et Rajapaksa (SLFP) et le Parti de l'Unité nationale dirigé par Wickremesinghe (UNP) avaient créé un gouvernement d'union nationale après la signature d'u accord.

Sur son blog, le poète, critique, journaliste et commentateur politique sri-lankais Malinda Seneviratne a posé l’importante question sur les suites qu'aura le verdict :

Where do we stand right now? Well, the President cannot dissolve Parliament arbitrarily. Parliament itself is at a standstill thanks to the antics of the Parliamentarians, a clearly partisan Speaker, a stubborn President and a court order. We will have to wait and see if the key players in the drama can rise above their personal and political agenda to resolve things.

Où en sommes-nous à présent ? Eh bien, le Président ne peut pas dissoudre le Parlement arbitrairement. Le Parlement lui-même est au point mort à cause des simagrées des parlementaires, d'un Speaker (président) clairement partisan, d'un Président obstiné et d'une injonction judiciaire. On verra si les principaux acteurs du drame sauront s'élever au-dessus de leur agenda personnel et politique pour régler les choses.

Difficile de prévoir comment cette crise politique et les différends entre Sirisena et Wickremesinghe vont tourner dans ce “nouveau gouvernement”.

C'est officiel : 2018 a été une année désastreuse pour le Japon

mercredi 19 décembre 2018 à 18:25
Japan kanji for 2018

Le caractère chinois (kanji) “wazawai” ou “sai” (災) a été désigné  kanji représentant le mieux l'année 2018 pour le Japon. Le kanji est dévoilé chaque année au Temple historique Kiyomizu de Kyoto. Capture d”écran de la chaine officielle Youtube d'informations ANN.

Après une année de tremblements de terre, de pluies torrentielles, d'inondations, de typhons et de chaleur excessive, le caractère chinois signifiant “désastre” ( : “wazawai” ou “sai”) a été désigné kanji de l'année 2018 du Japon”. Les caractères chinois sont connus sous le terme de kanji (漢字) au Japon.

Le kanji de cette année a été choisi par la Japanese Kanji Proficiency Society (Société japonaise de compétence en Kanji) sur la base des résultats du sondage national réalisé plus tôt à l'automne. Sur les 193 214 inscriptions reçues de tout le Japon, “wazawai” a reçu le grand nombre de bulletins de vote, soit 20 858.

Durant toute l'année 2018, le Japon a subi une série de coups de massue, notamment :

Dans un communiqué de presse, la Japanese Kanji Proficiency Society, établie à Kyoto, a expliqué que “désastre” était un symbole approprié pour 2018 au Japon, ce kanji ayant bouleversé la vie des gens en divers aspects :

日本全国「災」害は、いつどこで起きるか分からないと、自助共助を重視する人が増え、防「災」の意識が高まった。多くの人が「災」害を忘れず、教訓として減「災」につなげていきたいと心に刻んだ一年

Etant donné que partout au Japon, personne ne savait quand une catastrophe pouvait survenir (害), le nombre de personnes qui ont décidé de prendre leurs responsabilités personnelles dans la préparation aux catastrophes (防) a augmenté. Et puisque personne ne pouvait oublier les calamités qui ont frappé le Japon, ce fut une année où beaucoup de gens ont voulu en apprendre davantage sur les façons de minimiser les effets des catastrophes naturelles. (減).

Chaque année en Décembre, le Kanji de l'Année est annoncé au Kiyomizu-dera, un temple et site du patrimoine mondial de l'UNESCO à Kyoto, crée il y a 1300 ans. Le Révérend Mori Seihan, l'abbé en chef du temple, dévoile généralement le kanji de l'année en l'écrivant en calligraphie traditionnelle, comme on le voit dans cette vidéo de la cérémonie de 2018 :

Alors que le Japon se prépare à l'abdication de son empereur actuel en mai 2019, mettant ainsi fin à l'ère Heisei alors qu'il fait la transition vers un nouvel empereur, la deuxième lettre chinoise la plus populaire dans le sondage de cette année était “hei” (平). “Hei” est l'un des deux kanji qui composent “Heisei” (成), le nom de règne de l'actuel l'empereur du Japon, qui est généralement connu dans le reste du monde sous le nom d’Akihito :

Alors que le caractère le plus populaire était “wazawai”, le deuxième était “hei” (平), certains commentateurs affirmant que c'était la fin de l'ère Heisei (成) au Japon. Pour beaucoup d'autres, les Jeux Olympiques de 2018 à PyeongChang (écrit 昌 en japonais), et le sommet américano-coréen de 2018 qui visait la paix (和) ont été les événements positifs de l'année écoulée. 😊 Nous espérons que l'année prochaine sera une année positive pour laquelle un kanji positif et brillant pourra être choisi. ✨

— 2018 Kanji de l'année.

“Le genre est un sujet qui nous concernent tous, pas seulement les femmes”

mercredi 19 décembre 2018 à 12:09

Le projet Histoires recadrées [en] demande à ses participants de réagir aux thèmes dominant la couverture médiatique les concernant. Ces articles se concentrent sur les réflexions de personnes plus souvent représentées dans les médias par d'autres qu’elles-mêmes. La génération de nuages de mots sur la plate-forme de Media Cloud [en], qui effectue des recherches dans des collections de médias d'une région donnée du monde, peut donner un aperçu aux participants de leur représentation dans les médias et leur donner une occasion de l'analyser. Ce projet s'abstient de porter une quelconque conclusion sur les données, mais au contraire, fournit le point de départ d'une discussion sur la forme qu'ils peuvent donner à leur propre représentation dans les médias numériques.

Johanna Lombeida fait partie de l’équipe de diffusion du magazine radio hebdomadaire “La Movida Independiente” sur Wambra Radio à Quito,en Équateur. Elle écrit aussi pour Transistor Extremo. Ce qui suit est une transcription de la vidéo de l'analyse par Johanna du nuage de mots pour le terme “género” (genre) dans le contexte équatorien.

Mots dominants dans 3.326 articles publiés entre janvier 2017 et avril 2018 mentionnant le mot “género” (genre) au sein de deux collections de Media Cloud d'organes de presse hispanophones en Equateur (agrandir).

Qu'est-ce qui, dans ce nuage, a le plus attiré votre attention ?

Yo escogí la nube de “género”. Me sorprendió bastante el hecho de que partamos de género desde el punto de un discurso solo de mujer. Otras cosas que me impactaron también fueron que salió (la palabra) comunicación. Tuve la oportunidad de verificar entre (las palabras) “género” e “ideología”. No mencionamos a actores políticos. Algo que también me llamó mucho la atención fue que como en cuatro o cinco veces se toma el término de “erradicación”. (Me sorprendió) que todo va dirigido sólo a la mujer, como que si el tema de género sólo fuese destinado para la mujer. También hay algo importante que es que casi en la última línea encontramos (la palabra) “unidas”, también solo dirigido a la mujer. Creo que el tema de género nos compromete a todos, entonces eso me llamó bastante la atención.

J'ai choisi le nuage de mots pour “genre”. J'ai été surprise de constater que nous comprenons le genre a partir d'un discours qui se base exclusivement sur les femmes. Les autres choses qui ont attiré mon attention ont été la présence du mot “communication”. J'ai eu l'occasion d'opposer les deux mots “genre” et “idéologie”, et les acteurs politiques ne sont pas mentionnés. J'ai été impressionnée de voir cinq ou quatre fois le mot “éradication”. J'ai été surprise de voir que tout se dirigeait exclusivement vers les femmes, comme si seulement les femmes s'intéressaient au “genre”. Une autre chose assez importante est qu'on trouve le mot “unis” vers la fin du nuage, s’adressant aussi uniquement aux femmes. Je pense que le sujet du “genre” nous concernent tous, donc j'ai été surprise de voir que le discours n'était centré que sur les femmes.

Comment le “genre” devrait-il être représenté dans les médias ?

Yo quisiera encontrarme un actor que no necesariamente que pertenezca a las organizaciones, sino un actor nuevo, que sea un discurso desde el otro lado, un discurso desde lo varonil, desde el hombre.

J'aimerais bien trouver des acteurs qui ne font pas nécessairement partie d'une organisation, de nouveaux acteurs. J'aimerais aussi voir un discours [qui vienne] de l'autre coté, d'une perspective masculine, des hommes.

Quels mots un nuage de mots pour “genre” devrait-il avoir ?

Creo que el género es un tema que nos engloba a todos, no solo a las mujeres, y seguimos con el mismo discurso de que el género involucra solamente a la mujer. Siguiendo con lo de (la representación) de la ideología, creo que los medios solo lo ponen como algo que alguien dijo, incluso ahí hay una parte en la que se menciona en ideología al (ex-presidente) Correa y (al actual presidente) Moreno, como que si la ideología partiera desde ellos, entonces nos olvidamos de la historia y del origen.

Je pense que le genre est un sujet qui nous concernent tous, et pas seulement les femmes, mais nous continuons d'avoir le même discours comme quoi le genre ne concerne que les femmes. Suivant [la représentation de] l'idéologie, je pense que les médias n'en parlent que comme d'une chose dite quelqu'un. Il y a même une mention de l'idéologie en relation avec [l'ex-président] Correa et [le président actuel] Moreno, comme si une idéologie émergerait d'eux. Nous oublions toujours l'histoire et la source.

Cet article fait partie de la série Rising Frames développée en proche collaboration avec l'organisation équatorienne El Churo. Le 21 avril 2018, El Churo a organisé un atelier réunissant des représentants de différents collectifs et groupes pour examiner la façon dont eux-mêmes, ou des questions qui leur tiennent à cœur, sont représentés dans les médias équatoriens et pour réagir en créant leurs récits.

Belén Febres-Cordero a aidé à la transcription et à la traduction de cet article, qui a été édité et raccourci pour plus de clarté.

Les Gilets Jaunes: deux perspectives différentes mais complémentaires pour comprendre

mardi 18 décembre 2018 à 11:33

Bastille – 8 décembre 2018

Le mouvement des Gilets Jaunes a commencé en Octobre 2018, bien avant l'appel à la mobilisation du 17 Novembre. Ce que beaucoup ne pensait être qu'une protestation passagère est en cours de puis plus de deux mois. ce que beaucoup pensait se réduire à une frustration sur le prix du carburant s'est étendu à une protestation contre les inégalités de la société.  Ce que beaucoup pensait être un mouvement non structuré pourrait être piloté des réseaux sociaux par des groupes politiques russes qui ont intérêt à affaiblir l'Europe.
Pour mieux comprendre ce mouvement, nous avons demandé à Yannick S et Carolina R de répondre aux questions de Global Voices. Yannick S est ingénieur de laboratoire à Paris, il participe activement au mouvement des Gilets Jaunes depuis Octobre. Carolina R est consultante dans les Ardennes et aussi collaboratrice de Global Voices. Elle suit l'évolution du mouvement de près depuis ces début aussi.

Global Voices GV: Le mouvement des gilets jaunes se veut apolitique: quel était l'objectif de depart et quels sont les objectifs a ce stade de la negotiation?

Carolina (CR):  Since the begininng, despite their claim, I feel that the Gilet Jaunes movement is prone to a certain political linience. The inclination is inevitable to a movement that brands itself “popular” or “of the people”. Having to live in a small French town, in a region often called “region sinistré” I could sincerely feel a genuine despair of the population. For example, the hard working farming community and blue collar families have been traditionally under-repressented and misrepresented. They have been fending themselves without the interference of the central power, the central government. Families in rural communities have been fending their own welfare up to the point that they're bursting at the seam. Lack of opportunities and proper attention have shove the community into bankruptcy, unemployment, suicides.

Depuis le début, malgré leur revendication, j’ai le sentiment que le mouvement Gilet Jaunes est sujet à une certaine tendance politique.Cette inclination est inévitable pour un mouvement qui se dit “populaire” ou “du peuple”. Devant vivre dans une petite ville française, dans une région souvent appelée “région sinistrée”, je pouvais sincèrement ressentir un véritable désespoir de la population. Par exemple, la communauté agricole qui travaille dur et les familles de ouvriers ont toujours été sous-représentées et mal représentées. Ils se sont débrouillés sans ingérence du pouvoir central ou du gouvernement. Les familles des communautés rurales ont comme souci de protéger leur mode de vie avant qu'il ne cède face à la pression économique. Le manque d'opportunités et d'attention ont poussé la communauté vers la faillite, le chômage et les suicides.

Yannick S (YS): Ce mouvement a démarré suite aux augmentations successives des prix des carburants. Des citoyens (Priscillia Ludosky, Eric Drouet, Jacline Mouraud…) ont appelé à manifester et à signer des pétitions sur les réseaux sociaux, et les gilets jaunes (GJ) sont maintenant dans la rue depuis le 17 novembre. Mais les revendications de beaucoup vont bien au-delà du simple problème du pouvoir d’achat. Le mouvement est bien plus profond que ça. Les GJ veulent que les inégalités sociales qui durent depuis des décennies (et même plus) cessent, et avoir plus de contrôle sur leur vie, en mettant en place notamment un référendum d’initiative populaire.

Manifestation des Gilets Jaunes autour du rond-point de la Vaugine à Vesoul pae Obier – CC-BY-4.0

GV: Selon vous, quel est la raison majeure de la frustration des manifestants? Est ce que la position du gouvernement est justifiée selon toi?

I keep on hearing that people said that the movement was triggered by the ras-le-bol general, how how people are fed up being the cash cows for the government while being a part of lower-middle class and that the government favors the rich in every way.  In my opinion the reason is very vague but I believe that in general, the current administration has failed to deliver its campaign promises. On environmental for example. To be able to count on an idealist such as Nicolas Hulot who has been rejecting ministrial position in the past, is quite an accomplishment for the administration, but for some reasons, Hulot and few others resigned from their posts, leaving us to question what kind of dynamics is happening in Elysee. I'm certain that undelivered campaign promises aren't something new in France, we see also in previous administrations, however, today's populism, regardless of left or right leanings, detonated the ticking social bomb.           Est ce que la position du gouvernement est justifiée selon toi?  When the President address the nation after waves of protests, it was a much adoed thing. It seemed to me that his address managed to pacify slightly the movement who needed to be acknowledged by the head of state, however I don't believe that the movement will stop.

CR: J'entends souvent que les gens disaient que le mouvement avait été déclenché par le ras-le-bol général , que les gens en avaient marre d'être des vaches à lait pour le gouvernement alors qu'ils faisaient partie de la classe moyenne inférieure et que le gouvernement favorisait les riches. A mon avis, la raison est très vague mais je pense qu'en général, le gouvernement actuel n'a pas tenu ses promesses de campagne. Sur l'environnement par exemple. Pouvoir compter sur un idéaliste tel que Nicolas Hulot, qui avait rejeté la fonction ministérielle par le passé, est un exploit pour l'administration, mais pour de multiples raisons, Hulot et quelques autres ont démissionné de leur poste, ce qui nous laisse entrevoir quel type de dynamique se passe à Elysée. Je suis convaincu que les promesses de campagne non tenues ne sont pas une nouveauté en France. Nous voyons aussi dans les administrations précédentes, cependant, le populisme actuel, indépendamment de son inclinaison à gauche ou à droite, a fait exploser la bombe sociale. Lorsque le président a pris la parole devant la nation après des vagues de manifestations, le problème était devenu beaucoup trop compliqué. Il m'a semblé que son discours a réussi à calmer un peu le mouvement, car il a ainsi reconnu les doléances mais je ne crois pas que le mouvement va s'arrêter.

YS: En fait, les gens en ont marre de devoir travailler toute leur vie pour une misère, alors qu’ils voient une élite gagner des millions ou des milliards si facilement et être exemptée d’impôts par les gouvernements. Mais la plupart des Français ne sont pas fainéants, ne sont absolument pas jaloux et ne veulent pas être milliardaires.  Ils veulent tout simplement vivre, et non survivre. Nous vivons malheureusement dans un monde fou où l’argent est roi, et où on nous a toujours appris qu’il fallait avoir un emploi pour vivre, quitte à justifier les pires actes. La position du gouvernement n’est pas justifiable du tout pour moi. Un président méprisant, qui refuse de parler à son peuple, qui propose aux forces de l’ordre une prime de fin d’année, ou qui ose opposer GJ et écologie est clairement totalement déconnecté de son peuple. Même dans son discours du 11 décembre, on aurait dit une machine sans émotion. Comme beaucoup d’autres GJ, je pense qu’il est indispensable de changer le système actuel qui nous conduit à détruire la Nature, et donc à notre propre perte.

GV: Le mouvement est en cours  depuis quelques semaines; à ce stade, quel serait une issue acceptable pour le camp des gilets jaunes et pour le gouvernement?

We're now at the fifth week of street protest (although the campaign has taken place long before) and the government is holding a meeting with the representatives of the movement. This is a good start. Last Monday, the President has spoken about how the administration wants to remedy the “economic and social emergency”, the question now is the deliverables and timeline. Only time will tell at the moment.

CR: Nous en sommes maintenant à la cinquième semaine de manifestations de rue (bien que la campagne ait eu lieu bien avant) et le gouvernement tient une réunion avec les représentants du mouvement. C'est un bon début. Lundi dernier, le président a expliqué à quel point le gouvernement voulait remédier à “l'urgence économique et sociale”. La question concerne maintenant les produits à livrer et le calendrier. Seul le temps nous le dira pour le moment.

YS: Honnêtement, je ne sais pas. Une augmentation significative du pouvoir d’achat sera peut-être suffisante pour certains, mais d’autres, dont moi, veulent surtout que le peuple reprenne la main sur son destin. Un changement radical du système est nécessaire. J’ai participé au rassemblement pour la VIe République en mars 201714, et nous étions nombreux à vouloir par exemple un renversement de la Ve République, ce qui est demandé par une partie des GJ.

GV: Il y a eu des actes de violence et des blesses de part et d'autres. Comment perçois ces événements? 

As whether the government is justified to contain protest in a full urban warfare style? No. Tear gas is inhumane and violent. I personally anti tear-gas anywhere moreover in a peaceful protest. Tear gas is being used too much, too often. In small town like Charleville-Mezieres, tear gases were launched against the trouble makers who deliberately smash public properties, however there's always few people who got caught in the mess without the intention to destruct. I also noticed that in Paris, the authorities are doing the stop and frisk method, this one I believe a better method of containment of an event that could otherwise turn violent.

CR: Si le gouvernement est justifié de contrôler la protestation comme si c'était une guerrilla urbaine? Les gaz lacrymogènes sont inhumains et violents. Personnellement, je suis anti-gaz lacrymogène n'importe où dans une manifestation pacifique. Les gaz lacrymogènes sont trop utilisés, trop souvent. Dans une petite ville comme Charleville-Mézières, des gaz lacrymogènes ont été lancés contre les fauteurs de troubles qui brisent délibérément des biens publics. Cependant, il y a toujours peu de gens qui se font prendre dans le pétrin sans intention de détruire. J'ai aussi remarqué qu'à Paris, les autorités appliquaient la méthode du stop and frisk, celle-ci étant, à mon avis, une meilleure méthode de confinement d'un événement qui pourrait autrement devenir violent.

YS: Il y a eu des centaines de blessés et huit morts depuis le 17 novembre et c’est très triste. Les moyens mis en œuvre par les forces de l’ordre ont été exagérés je pense et, d’après pas mal de vidéos prises par les manifestants et qui tournent sur les réseaux sociaux, on peut voir que ce sont elles qui ont commencé les agressions, ou que certains agents se fondent aux GJ. A voir. Sinon, je ne suis pas violent, mais je comprends tout à fait que certains s’en soient pris à des symboles de l’oligarchie financière comme Starbucks ou des banques

Comment perçois le fait que des personnalités tels que Philippot, Bruner et meme Donald Trump se sont prononces en faveur du mouvement?  Que voudrais tu dire a ces personnes?

This is the problem of Yellow Vest movement. Since it's riding on social and economic issues, it can't be apolitical and has become a honeypot for populist politicians. This movement became something of a free publicity to them, an unabridged opportunity to stay relevant until the next election. I saw how extreme and ultra left as well as right wanted so badly hijacking the movement and its narratives and peddled false information on local Yellow Vest Facebook groups. And when people are angry, nobody cares to fact check and debunk. I find this rather sad. A movement that could've been a true cry out that unites people turned  to be something that so divisive.

CR: C'est le problème majeur du mouvement du gilet jaune. Étant donné qu’elle repose sur des questions sociales et économiques, elle ne peut être apolitique et est devenue un honeypot pour les politiciens populistes. Ce mouvement est devenu pour eux une publicité gratuite, une occasion sans faille de rester pertinent jusqu’aux prochaines élections. J'ai vu à quel point l'extrême et l'extrême gauche ainsi que la droite voulaient si difficilement détourner le mouvement et ses récits et colporter de fausses informations sur les groupes Facebook de Yellow Vest. Et quand les gens sont en colère, personne ne se soucie de vérifier et de démystifier les faits. Je trouve cela plutôt triste. Un mouvement qui aurait pu être un véritable cri qui unit les gens s’est transformé en quelque chose qui divise tellement.

YS: Ces personnes ne m’intéressent pas du tout. Le mouvement des GJ ne souhaite pas être associé à quelque parti politique que ce soit

GV: Beaucoup d'informations manufacturées et malveillantes circulent de part et d'autres sur les camps opposés, comment fais-tu pour faire la part du faux et du vrai?

In general, I don't engage in forums, I consider it a time waste to argue with angry people. But I have the habit to share link of verified news to debunk fake ones.

CR: En général, je ne participe pas dans des forums, je considère que discuter avec des personnes en colère est une perte de temps. Mais j’ai l’habitude de partager un lien de nouvelles vérifiées pour en démystifier les fakes news.

YS: Il est en effet très difficile de trier les informations, notamment sur Internet. J’ai évité de partager plusieurs informations d’amis sur Facebook par exemple car, après vérification, elles s’avéraient fausses. Pour se rapprocher de la vérité, il faut comparer plusieurs sources d’informations : les médias officiels (que vous n’avez pas à croire sur parole je rappelle), les médias alternatifs, les sites officiels des gouvernements, des institutions européennes ou mondiales… Suivant le domaine d’investigation (scientifique, historique…), il m’arrive de me tourner vers des sites universitaires, des MOOC, des chaînes Youtube… Lire les commentaires de certains internautes peut également s’avérer très enrichissant. Bref, ça demande parfois énormément de temps, mais c’est le prix à payer.

GV: Comment vois-tu les semaines à venir et le dénouement sur le long terme?

I think things will be quieter now, especially with the coming Christmas and terrorist shooting in Christmas Market of Strasbourg. But the movement will fizzle and will be off the streets yet it won't die down. It will manifest in other forms through different protest. The Yellow Vest is now an emblem that unites those who protest..

CR: Je pense que la situation sera plus calme maintenant, en particulier avec les fêtes de Noël et la fusillade terroriste au marché de Noël de Strasbourg. Mais le mouvement va s'essouffler et sortir de la rue sans pour autant disparaître. Cela se manifestera sous d'autres formes à travers différentes manifestations. Le gilet jaune est maintenant un emblème qui unit ceux qui protestent.

YS: Franchement, personne ne peut vraiment prévoir ce qu’il va se passer. Il y a des chances que le mouvement se calme pendant les vacances de Noël, mais ça ne changera rien à la motivation des GJ. Les gens reviendront en début d’année si nécessaire. Je souhaite personnellement un éveil des citoyens du monde entier

GV Un message que tu aimerais faire comprendre/passer aux lecteurs de Global Voices (novice sur la politique en France pour la plupart). 

Whenever I read the news about Yellow Vest movement on non French media, I got the impresssion that the media is missing out many details and nuances.I see article saying that the movement is a part of anti green tax. That it's anti Macron protest. It's really not that simple. It's much more nuanced than what the media said. It's about the French people, their daily problems and their future. There are more peaceful protest than the violent ones portrayed on TV and captured on cameras.

CR: Chaque fois que je lisais des nouvelles du mouvement Yellow Vest sur des médias non français, j'ai l'impression que les médias manquent beaucoup de détails et de nuances. Je vois un article disant que le mouvement fait partie du mouvement anti-taxe verte. Que c'est la protestation anti Macron. Ce n'est vraiment pas si simple. C'est beaucoup plus nuancé que ce que les médias ont dit. Il s’agit des Français, de leurs problèmes quotidiens et de leur avenir. Il y a plus de manifestations pacifiques que les violentes dépeintes à la télévision et capturées par des caméras.

YS: N’ayez pas peur de ce mouvement, qui se veut pacifiste avant tout. Les GJ sont de simples humains comme vous qui veulent que tous nous puissions vivre enfin sereinement. Le chemin est encore long mais nous sommes de plus en plus nombreux à vouloir un monde meilleur, que ce soit chez les GJ18 ou dans d’autres mouvements comme celui des Indignés. Le mouvement des GJ (où quel que soit son nom) devrait être mondial. Prenez le temps de vous faire votre propre opinion et n’hésitez pas à rejoindre la révolution qui se prépare

 

Manifestations nocturnes en Hongrie contre la réforme judiciaire et la ‘loi esclavagiste’

mardi 18 décembre 2018 à 11:30

Manifestation devant le Parlement hongrois à Budapest le 13 décembre 2018. Photo : Atlatszo.hu / Márk Tremmel, CC BY-NC-SA 2.5.

Ce texte est basé sur l'article (en anglais) “Les Hongrois manifestent contre le gouvernement chaque nuit devant le Parlement” écrit par Anita Kőműves, avec des photos de Márk Tremmel et Áron Halász pour Atlatszo.hu, la première association de journalisme d'investigation en Hongrie. Il est reproduit ici en format adapté dans le cadre d'un partenariat avec Global Voices.

Les Hongrois manifestent devant le bâtiment du Parlement et à travers Budapest depuis que le parti de droite de Viktor Orbán a adopté un projet de loi autorisant les employeurs à exiger 400 heures supplémentaires annuellement de leurs salariés, ainsi qu'un autre facilitant le remplissage des tribunaux par des juges loyaux au parti d'Orbán. Bravant le froid, les contestataires sont dans les rues chaque soir jusqu'à minuit passé, et y affrontent les lacrymogènes des policiers.

Le parlement hongrois a adopté deux importants textes de lois mercredi. Passant outre aux critiques des partis d'opposition, l'assemblée dominée par le parti droitier au pouvoir Fidesz (Alliance civique hongroise) a réussi à voter la ’loi esclavagiste’ et une loi créant un nouveau système judiciaire.

12 décembre 2018, le jour où l'opposition hongroise a étonné PLEIN de monde (et il y a mieux)

Les tribunaux administratifs nouvellement créés seront entièrement séparés du système judiciaire actuel. Ils seront sous l'entière supervision du ministère de la Justice, et leur réglementation permettra de remplir aisément les nouvelles juridictions de magistrats loyaux au Fidesz. Ces tribunaux administratifs pourront statuer dans des affaires politiquement sensibles, de corruption, de loi électorale et de liberté de réunion.

Des policiers alignés devant le parlement hongrois à Budapest. Photo extraite de l'album de la première nuit de manifestations, par Atlatszo.hu / Márk Tremmel, CC BY-NC-SA 2.5. Cliquer sur l'image pour voir l'album.

Ce qui a été appelé la ’loi esclavagiste’ va augmenter le plafond annuel d'heures supplémentaires de 250 à 400 heures. Mieux, les employeurs pourront prendre jusqu'à trois ans pour les indemniser.

Selon cette loi, les salariés doivent accepter par écrit les heures supplémentaires, mais les protestataires affirment que les pressions des employeurs ne laisseront pas d'autre choix aux salariés que d'accepter les nouvelles conditions.

Les trois premières nuits de manifestations

Manifestation devant le parlement hongrois à Budapest. Photo extraite de l'album de la deuxième nuit de manifestations, par Atlatszo.hu / Áron Halász, CC BY-NC-SA 2.5. Cliquer sur l'image pour voir l'album.

Depuis le vote de la loi, des manifestations se déroulent devant le parlement, avec des milliers de protestataires qui déambulent dans les rues de Budapest en scandant bruyamment des slogans anti-gouvernement, et barrent brièvement rues et ponts. Une partie des manifestants sont retournés devant le bâtiment du Parlement scander leurs slogans face à la police anti-émeutes.

Bravant le froid et la neige de vendredi soir, les manifestants restent dans les rues jusqu'à 1 ou 2 heures du matin chaque nuit.

De nombreux manifestants ont été interpellés pendant la 2e nuit d'agitation après le vote par l'administration Orban de la #LoiEsclavagiste. La vice-présidente de Momentum est en ce moment dans un commissariat, l'accès à son avocat lui est refusé jusqu'à présent.

A la différence des manifestations des années précédentes, la  police a fait usage de gaz lacrymogènes pendant les manifestations, attisant la colère des protestataires.

Ils viennent d'asperger la foule

Les manifestants ont utilisé des bombes de fumigènes, brûlé des mouchoirs en papier et des journaux. Une fenêtre du Parlement a été brisée par un jet de pierre d'un manifestant.

Manifestation à Budapest (Hongrie). Photo extraite de l'album de la troisième nuit de manifestations, par Atlatszo.hu / Márk Tremmel, CC BY-NC-SA 2.5. Cliquer sur l'image pour voir l'album.

Les manifestations se sont poursuivies dimanche après-midi sur la place des Héros. Organisations étudiantes, partis d'opposition et syndicats ont annoncé qu'ils allaient se joindre aux manifestations.

Des milliers de Hongrois manifestent devant la télévision publique contre sa propagande permanente.

La police a utilisé les gaz lacrymogènes contre les manifestants devant le siège de la télévision publique. Atlatszo.hu a documenté les événements en fournissant une couverture vidéo en direct de la scène sur Facebook.