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Le Koweït, le Bahreïn et l'Arabie Saoudite font taire les voix qui s'élèvent contre la guerre au Yémen

mardi 21 avril 2015 à 11:09
Hundreds of Yemeni and Arab supporters rallied at the Marble Arch and then marched to the Saudi Arabian Embassy in London in a protest against the attack on Yemen. Photograph by See Li. Copyright: Demotix

Des centaines de sympathisants yéménites et arabes se sont réunis à Marble Arch et ont marché jusqu'à l'Ambassade d'Arabie Saoudite à Londres pour protester contre l'agression au Yémen. Photograph de See Li. Copyright: Demotix

Les pays du Golfe intensifient leur lutte contre les activistes anti-guerre dans la région. Le Koweït et le Bahreïn ont emprisonné des activistes qui avaient critiqué la guerre menée par l'Arabie Saoudite au Yémen. Et la répression se poursuit avec une tendance historique dans toute la région à maîtriser les voix de l'opposition.

Les combats au Yémen ont fait des centaines de morts depuis que l'Arabie Saoudite a lancé une campagne militaire dans ce pays le 26 mars. Le Soudan et l'Arabie Saoudite, soutenus par leurs alliés du Golfe, l'Egypte, la Jordanie, le Maroc, ont entamé une opération de frappes aériennes, surnommée Tempête Décisive, contre les combattants Houthis qui on pris le contrôle du Yémen en janvier.

Le 26 mars, deux personnes ont été arrêtées pour “avoir profité de la situation au Yémen pour troubler la paix et menacer la sécurité et l'ordre civil,” selon un tweet du Ministère de l'Intérieur du pays :

2 personnes ont été arrêtées pour avoir profité de la situation au Yémen pour troubler la paix et menacer la sécurité et l'ordre civil #Bahrain

Selon le quotidien en anglais des Emirats Arabes Unis Khaleej Times :

Dans une déclaration, le ministère souligne la situation délicate qui règne dans la région et les mesures spéciales qui ont été prises au Bahreïn et dans d'autres pays du Conseil de Coopération du Golfe pour résoudre des problèmes arabes internes et pour soutenir la légitimité, la sécurité et la stabilité au Yémen.

Le Ministère de l'Intérieur met en garde contre toute tentative d'exploitation de la situation actuelle pour causer le désordre entre les citoyens et les résidents par la diffusion d'informations trompeuses dans les médias sociaux ou de déclarations contre les décisions de Bahreïn.

Le Ministère de l'Intérieur indique que des mesures légales seront prises contre toute action qui pourrait représenter un risque contre la sécurité et la sûreté des citoyens et souligne que la situation demande une unité nationale forte pour garantir la sécurité, l'ordre et la stabilité.

Cette déclaration a été suivie par l'arrestation de Nabeel Rajab, activiste bien  connu pour la défense des droits humains, le 2 avril.

Selon l’Index on Censorship, Rajab, qui attend déjà un procès relatif à deux accusations pour son utilisation de Twitter, fait l'objet de deux nouvelles accusations :

Le 2 avril 2015, les forces de l'ordre ont entouré le domicile de M. Rajab et l'ont arrêté pour répondre de deux nouvelles accusations liées à une série de tweets récents et à un article d'opinion publié dans le Huffington Post. Il est en premier lieu accusé d'avoir “insulté un organisme officiel” en rapportant les mauvais traitements et la torture constatés dans la prison de Jau au Bahreïn. En second lieu il est accusé de “diffuser des rumeurs en temps de guerre” pour avoir fait un article sur la mort de civils au Yémen, et être ainsi en contravention avec une interdiction gouvernementale de critiquer publiquement le conflit. Si il est condamné pour toutes ces accusations, M. Rajab pourrait devoir effectuer plus de 10 ans de prison.

Rajab est toujours en prison dans l'attente de son procès.

Le Koweït aussi a intensifié sa répression, avec l'arrestation de deux activistes le 2 avril, qui ont été détenus et interrogés pendant 5 jours à propos de leurs tweets sur le Yémen. L'ancien député et avocat Khaled Al-Shatti  ainsi que l'écrivain et universitaire Salah Al-Fadhli ont tous deux été arrêtés pour leurs commentaires publiés sur Twitter qui critiquaient les frappes aériennes saoudiennes sur le Yémen, dans lesquelles le Koweït est impliqué, et la participation du Koweït à l'opération. Les tweets ont été considérés par les autorités comme négatifs pour l'Emir du Koweït et critiques vis-à-vis de leurs voisins d'Arabie Saoudite.

Rana Al Sadoun tweete :

Demain l'avocat Khalid Al-Shatti et le Dr Salah Al-Fadhli seront déférés devant la justice pour avoir démoralisé l'armée et interféré avec l'autorité de l'Emir.

Ils ont tous deux été libérés contre une caution de 10.000 US$ chacun.

Sur le blog Monkey Cage du Washington Post, Madeleine Wells, candidate au doctorat en science politique à l'université George Washington, explique les raisons sous-jacentes qui ont poussé le Koweït à tuer dans l'oeuf la dissidence :

Qu'est-ce qui a changé depuis, qui amènerait le Koweït à rejoindre ses alliés arabes sur une cause potentiellement controversée et sectaire susceptible de faire des vagues avec ses alliés shites dans le pays même? La réponse c'est que le Koweït, comme la plupart de ses voisins, s'est durci à la suite des soulèvements régionaux et intérieurs qui sévissent depuis 2010. L'élite qui mène la famille Sabah est encore sous le choc de la coalition inter-classes de la jeunesse islamiste tribale qui n'a fait qu'intensifier ses demandes de réformes politiques depuis le Printemps Arabe, ce qui s'ajoute aux dissensions familiales et aux menaces de coup d'état. Pour faire face à la situation, le Koweït a réveillé les anciennes méthodes pour juguler les mouvements d'opposition en cours. En 2014, plus de 30 personnes ont été déportées et déchues de leur nationalité, soupçonnées de déstabiliser la sécurité du pays. Plus récemment, on a appris que 18 personnes avaient été arrêtées le 23 mars, lors d'une manifestation anti-gouvernementale, parmi lesquelles le défenseur des droits humains Nawaf al-Hendal, qui était intervenu devant le Conseil des Droits de l'Homme des Nations Unies trois jours avant. Hendal a été libéré depuis mais il doit comparaître devant une Cour Pénale du Koweït.

Mais surtout, au cours des derniers mois il est devenu clair que non seulement il y a une ligne rouge à ne pas dépasser par les Koweïtiens qui critiquent l'émir, mais également un  tabou sur les critiques envers les alliés régionaux du Koweït. Plusieurs Koweïtiens qui ont critiqué le régime saoudien ou qui se sont engagés sur des campagnes publiques d'opposition sont visés.

Ensuite, elle explique :

Cette criminalisation régionale des dissidents a été facilitée par le Pacte de Sécurité du Conseil de Coopération du Golfe, que le Koweït a été le dernier à signer. Le pacte donne des moyens légaux pour poursuivre les forces d'opposition dans tout le Golfe, ouvertement en termes de sécurité.

Ces mesures répressives sont soutenues sur place. Sur Twitter, Kristin Diwan, professeur en science politique et arabophile, tweete un lien vers un article d'un quotidien koweïtien qui encourage la répression:

Un chroniqueur koweïtien lie l'opération Tempête Décisive au Yémen à la répression “décisive” de l'opposition politique intérieure

Pour en revenir au Bahreïn, Rajab est accusé de “diffuser de fausses informations”. Un blogueur bahreïnien, Ali Abdulemam, forcé à quitter le pays et déchu de sa nationalité, se demande si tous ceux qui diffusent de fausses informations sont punis. Il tweete:

Le Ministre des Affaires Etrangères sera-t-il tenu pour responsable de diffuser de fausses informations et de nuire à un pays avec lequel le Bahreïn entretient des relations diplomatiques?

Le tweet fait référence à un tweet du Ministre des Affaires Etrangères du Barhraïn, Shaikh Khalid bin Ahmed Al Khalifa, le 5 avril, où il indique que les services de douane et de sécurité du Koweït ont découvert une cargaison d'explosifs iraniens en route vers Bahreïn.

Nous félicitons la prudence des services de douane et de sécurité du Koweït qui ont découvert une cargaison d'explosifs en provenance d'Iran en route vers Bahreïn. Le terrorisme continue.

Quand le Ministre de l'Intérieur du Bahreïn a démenti l'information, Al Khalifa n'a pas supprimé l'information. Il s'est contenté de tweeter le démenti :

Agence de Presse du Bahreïn: Le directeur général du port nous informe: l'information sur l'interception d'une cargaison d'explosifs en route vers Bahreïn est démentie.

D'autre part, l'Arabie Saoudite a été également le siège de manifestations anti-guerre à Awamiya, dans l'est du pays. Toby Matthiesen tweete :

On apprend qu'un agent de sécurité #Saudi  et un expatrié asiatique ont été tués à Awamia aujourd'hui, des dizaines d'habitants ont été arrêtés et blessés, des maisons ont été incendiées

La répression est une longue histoire

Ce n'est pas la première fois qu'une guerre à l'étranger a des répercussions dans le Golfe. Cette tendance est en fait plus ancienne que certains des pays qui font partie de la coalition Tempête Décisive.

En 1956, quand le Royaume-Uni, la France et israël on participé à la crise du canal de Suez, le Bahreïn connu une grève des ouvriers pour protester contre les attaques. Une semaine après la grève, les manifestations et les affrontements ont gagné les entreprises britanniques et le Bahreïn a profité de l'occasion pour régler ses problèmes intérieurs. Le très populaire Haut Conseil National qui représentait l'opposition à l'époque a été dissous et ses chefs arrêtés et condamnés à l'exil. Un mois plus tard la loi martiale était déclarée et toutes les publications interdites [1]. Beaucoup ont pensé que la réaction était excessive, étant donné que la Grande-Bretagne avait ses propres vagues de manifestations où le Parti Travailliste menait une campagne anti-guerre qui avait failli tourner au pugilat à la Chambre de Communes [2]. Inutile de préciser que le Royaume-Uni n'a pas sombré ou dissous le parti travailliste.

Un document de 1959, intitulé “Mesures de sécurité interne au Qatar et à Bahreïn. Code BA file 11914“, détaille les recommandations données aux britanniques et aux forces locales pour contrer toute manifestation potentielle en réponse à de possibles opérations militaires. Ces mesures comportaient des écoutes téléphoniques, toujours très actuelles, comme le rapporte un quotidien koweïtien:

Quotidien Alshahed Kuwaiti: Nouveau matériel et renfort en personnels pour surveiller les abonnés à Twitter suspects

Dans les années 1980, pendant la première guerre du Golfe entre l'Irak et l'Iran, le Koweït a expulsé un grand nombre d'activistes soi-disant anti-guerre en Irak, dont des Koweïtiens sans papiers et des Irakiens, bien que le Koweït soutienne Saddam Hussein à cette époque. On estime le nombre d'expulsés à plus de 60.000.

Même si la récente vague de répression des voix anti-guerre est inquiétante face à la situation actuelle, on note un effort concerté pour amplifier les tambours de la guerre. De la chanson “Oh Welcome War” au concours “Poète de la Tempête Décisive”, une nouvelle identité se crée autour de la culture de la guerre dans la région.

Le journalist Abbas Al Lawati tweete sur la chanson d'un chanteur saoudien qui a pour titre “Bienvenue la guerre” :

Un chanteur saoudien lance à la radio une chanson “bienvenue la guere” pour soutenir la guerre au #Yemen

Et Adawa Alwatan tweete sur un concours de poésie pour célébrer la guerre au Yémen :

La chaîne Alasaiel s'apprête à lancer un concours de poésie Tempête Décisive

Ce qui est plus inquiétant c'est l'introduction du facteur religieux dans la résolution du problème, en présentant la guerre comme un conflit entre les musulmans sunnites et les “apostats” houthis. Un groupe d'organisations bahreïniennes a fait paraître une annonce payante en pleine page dans un journal pro-gouvernemental pour déclarer que les Houthis étaient des apostats qu'il fallait excommunier. Dans la liste des organisations on trouve le Groupe Karama pour les Droits Humains et un institut de cure de désintoxication.

[1] Albaker, Abdulrahman. From Bahrain to Exile in St.Helena, pages 160-230
[2] Neff, Donald. Warriors at Suez, pp. 388–389

Comment un jeu traditionnel africain s'est répandu à travers les continents

lundi 20 avril 2015 à 23:40
Waali Mali

Waali, jeu traditionnel au Mali avec la permission de Boukary

7032 kilomètres séparent Bamako, la capitale du Mali et Antananarivo, la capitale de Madagascar et pourtant des liens tangibles existent entre ces deux pays depuis des siècles.

Ceci n'est pas vraiment une surprise. Malgré la distance importante, les origines Bantous communes aux deux pays et (à leurs voisins) expliquent certains points communs de leurs cultures.

Carte des migrations bantoues en Afrique via  Mark Dingemasse CC-BY-2.5

Carte des migrations bantoues en Afrique via Mark Dingemasse CC-BY-2.5

Témoin de ce flux migratoire important et de la mixité des cultures sur le continent africain, on retrouve un jeu de stratégie ancestral qu'affectionnent tout autant les villageois du Sahel que les pêcheurs du canal de Mozambique. Le Waali est un jeu traditionnel au Mali. Même si on le retrouve encore dans certains villages, ce jeu a presque disparu au Mali. Sur la photo d'introduction, le jeu est fabriqué en banco mouillé, on peut aussi  le retrouver en bois. Au départ, c’était un jeu réservé aux rois et leurs amis. Ensuite, le Waali a été mis à la disposition du grand public.

Lova, un collaborateur sur Global Voices, note une similarité importante avec un autre jeu malgache, le Katra. Le Katra a fait son apparition avec la vague migratoire bantou sur les côtes malgaches au 17eme siècle. Lova écrit sur twitter:

« Ressemblance fascinante entre le Waali, jeu Malien http://wp.me/p4FZv7-g1 et le Katra, jeu à Madagascar » .

Katra, jeu traditionnel à Madagascar - domaine public

Katra, jeu traditionnel à Madagascar – domaine public

Suite au partage de cette photo, d'autres internautes ont réagi et ont noté de nombreuses variations de ce jeu dans leurs pays.

Nene Ba, une amie à Dakar, signale l'existence d'un jeu similaire au Sénégal :

 Chez nous, ça s’appelle le Wourè

Mina Harker partage une image d'un jeu similaire connu sous le nom d’Awalé :

Je l’ai acheté en France en 2002 dans une boutique qui faisait de l’artisanat africain. La vendeuse m'a dit que celui que j’ai arrive de la Côte d’Ivoire.

Mina partage aussi un lien détaillant les origines de ce jeu et ses règles :

Le but du jeu est de récolter un maximum de graines. Il se pratique à 2 joueurs qui se font face avec devant eux 6 trous. S'il y a d'autres trous, ils servent à engranger les prises. On dépose 4 graines dans chaque trou

Mina ajoute qu'une variante existe aussi en France :

En France,  on faisait ça dans la terre à 24 trous. quand j’ai trouvé l’Awalé en 12 trous,  j’ai pas hésité a le prendre, pratique à transporter pour jouer. En revanche, je ne connais pas le nom du jeu. On faisait les trous dans la terre on mettait des cailloux et on jouait. Apparemment ce jeu se joue aussi au Brésil. 

Sy Sye ajoute aussi  des informations supplémentaires sur ce jeu:

Ce jeu existe dans beaucoup de pays, moi je l’ai connu au Ghana où il s’appele Oware. Cet article dit que le jeu est censé être d’origine Akan, soit du Ghana et/ou de la Côte d’ivoire, et qu’il est répandu un peu partout en Afrique. On peut aussi noter l’apparente similarité des noms de ce jeu, ce qui rend bien vraisemblable une origine commune ».

Les noms des variantes de ce jeu sont donc:  Oware (Ghana), Ayò (Yoruba), Awalé (Côte d’Ivoire), Wari (Mali), Ouril or Uril (Cap Vert), Warri (Caraïbes), Wali (Dagbani), Adji (Ewe), Nchọ (Igbo), Woure (Sénégal) et Awélé (Ga).  

Si vous connaissez d'autres variantes de ce jeu, partagez-les avec nous sur twitter (@fasokan ou @globalvoices) ou dans la section commentaires.

Cet article a été publié initialement sur le blog du projet Quand le village se réveille,  un projet de Rising Voices et a été  reformaté  et republié avec l'accord des membres du projet.

 

Erevan se prépare pour le centenaire du génocide arménien

lundi 20 avril 2015 à 19:38
Armenian students walking towards Genocide Museum, surrounded by the Centennial emblem. Photo taken by myself.

Des étudiants arméniens marchent vers le Musée du Génocide cerné de l'emblème du centenaire. Photo prise par Joey Ayoub.

Ce vendredi 24 avril, est une date importante pour les Arméniens du monde entier. A cette date, il y aura 100 ans que les autorités ottomanes ont commencé à rassembler quelque 250 intellectuels et chefs de communautés arméniens à Constantinople, ouvrant la voie au génocide arménien, durant lequel il est estimé que 1 à 1,5 millions de citoyens arméniens de l'Empire ottoman ont été systématiquement exterminés entre 1915 et 1918.

Dans tout Erevan, on voit la couleur violette de la fleur bien nommée ne m'oublie pas [surnom donné au myosotis], depuis les écoliers qui la portent sous forme de broche à la poitrine, aux étudiants des universités en train de boire un café, qui l’exhibent collée sur leur ordinateur. Partout, dans les rues, les maisons, les hôpitaux, les supermarchés, les restaurants, les magasins et les hôtels s'affiche la fleur avec un message simple : “Je me souviens et j'exige”.

Yerevantsi woman sitting at a public park with a living statue of a piano with Forget-Me-Not flowers on it. Photo taken by myself.

Une femme assise dans un parc public à Erevan, avec derrière elle une statue végétale d'un piano orné de fleurs de myosotis [ne m'oubliez pas]. Photo prise par Joey Ayoub.

Se rappeler du génocide et réclamer sa reconnaissance par la République de Turquie, le successeur légal de l'Empire ottoman, a été dans les faits une partie de la vie et de l'identité de tous les Arméniens durant le siècle passé. Génération après génération, les survivants du génocide arménien et leurs descendants ont monté des campagnes auprès de la communauté internationale pour faire reconnaitre ce fait. Jusqu'alors, seulement 21 pays [anglais] ont entièrement reconnu le génocide arménien, dont la France, l'Italie, le Liban et la Russie.

La fleur de myosotis [“ne m'oubliez pas”] peut être vue plantée dans tout Erevan. Ainsi que l'a expliqué [anglais, pdf] le Diocèse Est de l'Eglise arménienne d'Amérique, la fleur de myosotis “exprime la notion du souvenir éternel, et permet aussi d'évoquer symboliquement le passé (le centre noir : le génocide et les souffrances), le présent (les pétales violet clair : l'unité des communautés arméniennes dans le monde), l'avenir (les cinq larges pétales représentant les cinq continents où les survivants du génocide arméniens ont trouvé un nouveau foyer ; la couleur pourpre est celle des ornements sacerdotaux de l'Eglise arménienne, toujours au coeur de l'identité chrétienne arménienne), et l'éternité (les douze trapézoïdes représentent les douze colonnes du mémorial du Génocide à Erevan, jaunes comme la lumière, la créativité et l'espoir)”.

Dans les jours à venir, plusieurs événements allant du concert à la conférence sont prévus pour commémorer le génocide. L'auteur de Global Voices et cet article [Joey Atoub] va participer au Forum international contre le crime et le génocide [ces 2 liens en anglais], qui rassemble plus de 500 participants venus du monde entier, dont des politiques, des religieux, des personnages publics, des journalistes et des éditeurs.

D'autres posts sur cet événement seront publiés sur Global Voices. Restez connectés.

“Nous contournons la mort” : Des blogueurs yéménites racontent les horreurs de la guerre

lundi 20 avril 2015 à 15:13
Buildings targeted in Saudi-led air strikes on Yemen. Photograph shared on Twitter by Sana'a-based blogger @Omeisy

Des bâtiments visés par les frappes aériennes sous direction saoudienne au Yémen. Photo partagée sur Twitter par le blogueur de Sana'a @Omeisy

Dix-huit gouvernorats sur 22 ont été attaqués par la coalition sous bannière saoudienne depuis qu'a débuté le 26 mars la guerre contre le Yémen, font savoir les Nations Unies. Dans le sillage de destruction, des centaines de morts, des milliers de blessés et un pays de 24 millions d'habitants qui survit dans la pauvreté, l'épouvante et l'absence des biens de première nécessité.

Si les frappes de l'Opération Tempête Décisive se donnent pour cible les installations militaires et les dépôts d'armes afin d'étouffer la rébellion houthiste soutenue par le président déchu Ali Abdullah Saleh, leur résultat est une accumulation de mort, d'exode et de destruction dans tout le pays. Malgré la quantité massive de frappes ces dernières semaines, la violente agression Houthi/Saleh s'est diffusée au sud et intensifiée, notamment à Aden, et tue de nombreux civils tout en détruisant les quartiers résidentiels.

Avec l'appui de ses alliés arabes du Golfe, de l'Egypte, de la Jordanie, du Maroc, du Soudan, l'Arabie Saoudite a lancé une opération de frappes aériennes contre les combattants Houthis qui se sont emparés du Yémen en janvier. La campagne est aussi soutenue par les USA, qui apportent à leur partenaire saoudien une aide en renseignement et logistique.

Les Nations Unies estiment qu'environ 150.000 personnes ont été déplacées, et l'Organisation Mondiale de la Santé, citant des sources du Ministère yéménite de la Santé, recense 767 tués et plus de 2.900 blessés en moins d'un mois.

Le dernier rapport publié par le Bureau des Nations Unies pour la Coordination de l'aide humanitaire donne un aperçu des infrastructures détruites, endommagées, ou désorganisées suite aux combats.

Ceux qui sont confinés chez eux n'ont ni carburant, ni gaz de cuisine, ni eau. La nourriture est rare, et l'électricité inexistante.

Vivre au milieu des frappes aériennes et des bombardements constants

Les habitants de la capitale Sana'a et d'Aden tweetent nuit et jour sur les horreurs que la guerre leur fait subir.

Pour Osama Abdullah, de Sana'a, vivre dans la capitale c'est “contourner la mort” :

Nous dormons et sommes réveillés par les frappes saoudiennes, chaque jour nous perdons un ami cher ou un parent, nous contournons la mort et notre vie n'a plus de sens

Hisham Al-Omeisy partage des photos des dégâts causés par les frappes aériennes à Sana'a :

Photos de ces 2 dernières heures à Sana'a Yémen montrant le bombardement par les frappes aériennes de la coalition..qui n'ont pas encore cessé..

Amal Suqaf décrit l'effroi de vivre au quotidien dans de telles conditions :

Très très fortes explosions à Aser, Attan et derrière la maison d'Abduraboh à 60 mètres de rue, c'est si effrayant, je suis sourde

Le bombardement aérien continuel a arrêté toute vie. Ammar Al-Aulaqi tweete sur la pénurie de carburant et les coupures d'électricité :

Les plus grands distributeurs alimentaires de Sana'a sont vides. Les rues sont vides à cause de la pénurie de carburant. Les ordures s'accumulent. Coupures de courant générales. “Je suis une légende” [NdT: titre d'un film d'anticipation]

Rooj décrit la vie dans la peur permanente, avec un repas par jour, dans l'obscurité :

Pour savoir comment c'est au Yémen, débranchez l'électricité, l'eau, le chauffage, mangez une fois par jour, vivez dans le noir et craignez pour votre vie.

Haykal Bafana, de Sana'a, dit que les Yéménites sont dépourvus des nécessités de base autant que de paix :

Pas d'électricité 34 heures de suite dans la capitale du Yémen Sana'a. Ni essence, ni diesel, ni gaz de cuisine, ni eau ni paix non plus.

Ibrahim Alhemyari suggère ce que devrait indiquer la météo aux Yéménites au lieu des températures minimales et maximales du jour :

Voici ce que je devrais vraiment recevoir en vérifiant la météo au Yémen sur mon iPhone.

Et tandis que Sana'a se fait bombarder par la coalition menée par les Saoudiens, cette horreur trouve un écho dans le sud, où l'alliance Saleh/Houthi combat à Aden, dans un relatif silence des médias.

Ce que souligne Ammar Al-Aulaqi :

Très honnêtement, les habitants d'Aden vivent le pire, il y a dix fois plus de morts de civils ici, pourtant c'est Sana'a qui a le plus de couverture médiatique. Un fait.

Il indique que les écoles et universités sont fermées depuis le début de la guerre :

Le monde doit savoir : Toutes les écoles, universités et institutions d'enseignement sont fermées à Aden depuis le 26 mars. #AdenSaigne

La porte-parole du Comité International de la Croix Rouge au Yémen, Marie Claire Feghali, a déclaré que la situation humanitaire dans le pays était “très difficile … [avec] la coupure des voies maritimes, aériennes et terrestres”. Et elle décrit la situation à Aden comme “catastrophique pour dire le moins”. Et encore : “La guerre à Aden est dans chaque rue, à chaque coin … Beaucoup sont dans l'impossibilité de s'échapper”.

Un Yéménite-Britannique raconte à la radio BBC World les problèmes et dangers qui sont le lot des gens à Aden.

D'autres habitants d'Aden ont tweeté sur leurs épreuves.

Nisma, une étudiante de 20 ans à Aden, décrit pour la radio BBC World les terribles conditions de vie qui y règnent :

Ma vie quotidienne pas d'électricité pas d'eau rien à manger pas de sécurité. On vivrait mieux dans la jungle.

Fakhuus Hashim dit qu'Aden souffre dans une guerre qu'elle n'a pas commencée :

Aden subit une guerre qu'elle n'a pas commencée et où elle n'a aucun rôle. Mais les corps tombent si vite. Dieu aie pitié.

Hussain Al-Yafai rapporte que des tireurs embusqués tirent sur des femmes et des enfants et les tuent à Aden :

Les snipers houthis tuent à présent des femmes et des enfants à Aden ! On annonce de nombreux enfants et femmes tués par des snipers houthis !

Sala Mohammed décrit la situation humanitaire désespérée sur le terrain :

#Aden#Dhalea#Lahj Besoin urgent d'aide humanitaire, pénurie d'eau, nourriture, carburant et services médicaux.

Pour résumer, Al-Omeisy note que tous les Yémenites sont unis dans leurs souffrances :

Juste pour mettre en perspective, Sana'a subit les frappes aériennes de la coalition. Aden même chose + artillerie des Houthis, artillerie de la marine, artillerie de patrouilleurs..etc

A suivre sur Global Voices

Liberland, la nouvelle micro-nation des Balkans, recrute des citoyens

dimanche 19 avril 2015 à 18:18
The "official" flag of the Republic of Liberland. Design by Vít Jedlička, used under Creative Commons license.

Le blason “officiel” de la République de Liberland. Dessiné par Vít Jedlička, utilisation sous licence Creative Commons.

La dernière histoire qui fait le tour des réseaux sociaux d'Europe de l'Est, c'est celle de la plus récente des nations européennes, la République de Liberland. Le pays en herbe, que n'a encore reconnu aucun autre ni la communauté internationale, est situé sur un bout de terre de 7 kilomètres carrés au bord du Danube, entre la Croatie et la Serbie, resté “no man's land”, élément d'une dispute frontalière plus large entre les deux pays remontant à 1947.

Quand l’information a atterri pour la première fois sur les réseaux sociaux des Balkans le 14 avril 2015, beaucoup y ont vu un poisson d'avril tardif. Liberland commence toutefois à être pris plus au sérieux depuis que des sources fiables comme l'agence de presse indépendante serbe Beta ont confirmé et repris la proclamation.

La dernière en date des micro-nations d'Europe (à ne pas convaincre avec un micro-Etat, qui n'est autre qu'un tout petit pays reconnu) paraît résolu à devenir un Etat officiel. Le président de Liberland, un citoyen tchèque dénommé Vit Jedlicka, a affirmé sur la page Facebook de Liberland le lendemain de la proclamation qu'un millier de personne en avaient déjà sollicité la citoyenneté. M. Jedlicka est un diplômé de l’Institut CEVRO de Sciences Politiques et a écrit exclusivement en ligne sur les questions politiques, économiques et sociales en Europe. La page Facebook “officielle” de Liberland rencontre elle aussi un succès fabuleux, avec ses presque 17.000 “j'aime” à mi-avril 2015, un nombre qui continue à croître à un rythme soutenu.

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Liberland received today more than 6000 registrations and 1000 full applications for citizenship

Posted by Vít Jedlička on Wednesday, April 15, 2015

Liberland a reçu aujourd'hui plus de 6.000 inscriptions et 1.000 dossiers complets de citoyenneté.

Certains continuent à voir dans Liberland soit une blague, soit une tentative de faire parler des problèmes de l'Europe, mais nombreux sont maintenant ceux qui soupèsent sérieusement les chances de cette micro-nation de devenir le troisième plus grand micro-Etat du monde et un pays à part entière. Puisque que son territoire est de facto terra nullius et que Liberland semble posséder tous les attributs d'un Etat, les pays voisins et la communauté internationale pourraient avoir du mal à justifier leur refus de le reconnaître.

Une partie de cette discussion consiste aussi à se demander si l'entrée Liberland de Wikipédia devrait être effacée de la plus grande encyclopédie collaborative du monde. Si deux éditeurs seulement de Wikipédia ont réclamé le retrait de l'article, qu'ils disent se rapporter à “un pays imaginaire de plus”, la plupart des autres éditeurs et intervenants en ont défendu le maintien, soit parce que c'est juste une histoire valide à traiter ou parce qu'il a une chance même mince de rejoindre les nations de l'Europe.

Un éditeur de Wikipédia expliquait :

Ceci peut vraisemblablement avoir du sens puisqu'il s'agit d'une terra nullius crée par un conflit frontalier. Tout acte effectué vis-à-vis de cette nation non-reconnue a un impact potentiel sur la légitimité des prétentions de chacune des parties, il [l'article] se qualifie totalement au regard de la notariété à long terme.

Some of the founders of Liberland, upon planting the country's flag on the territory between Croatia and Serbia. Photo from Liberland.org official press release.

Des fondateurs de Liberland viennent de planter le drapeau du pays sur le territoire entre la Croatie et la Serbie. Source photo : communiqué de presse officiel de Liberland.org.

Selon le site web de Liberland et son entrée Wikipédia, le pays a pour langues officielles le tchèque, le hongrois et le serbo-croate, et pour latitude et longitude 45°46'N 18°52'E. Ça peut toujours servir dans un examen de géographie.

Candidater pour la citoyenneté, rien de plus simple : il suffit d'envoyer un courriel avec le scan d'une pièce d'identité en cours de validité, une lettre expliquant les motifs pour lesquels on désire devenir citoyen de la République de Liberland, et un numéro de téléphone s'il y a lieu. Il existe pourtant des restrictions à la citoyenneté, comme l'indiquent le site web officiel et le président de Liberland en personne :  néo-nazis, communistes, ou extrémistes s'abstenir. Les individus condamnés pour “crimes graves” se verront aussi refuser immédiatement la citoyenneté.

L'entité qui deviendra peut-être un jour le troisième plus petit pays d'Europe, après le Vatican et Monaco, promet une taxation faible ou nulle de ses nationaux (déjà entendu parler de “paradis fiscal” ?) et une nation de citoyens qui :

  • ont le respect des autres et le respect des opinions d'autrui quelles que soient leur race, origine ethnique ou religion
  • ont le respect de la propriété privée qui est intangible

Voilà qui serait rafraîchissant en Europe. En attendant, que le pays accède ou non à la reconnaissance officielle, Liberland pose quelques questions de droits de l'homme, statut économique, extrémisme croissant et corruption, douloureuses pour les autres pays d'Europe.

Des gens du monde entier s'expriment sur les pages de médias sociaux de Liberland en soutien aux valeurs qu'il revendique — liberté d'expression, libre marché, et abolition de toute sorte d'extrémisme et de discrimination. Les internautes soulignent souvent qu'il s'agit là de thèmes qui montent également dans certains pays européens, et rapidement. L'Europe retrouvera-t-elle le chemin de l'Etat de droit ou faudra-t-il qu'une nouvelle nation établisse de nouvelles normes pour le vieux continent ?