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Netizen Report : Deux responsables du CPJ victimes de la répression de la liberté d’expression en Tanzanie

mardi 20 novembre 2018 à 17:50

Sur un kiosque à journaux de Dar es Salaam, en Tanzanie, est affichée une publicité pour le quotidien indépendant The Citizen. Photo Adam Jones via Wikimedia Commons (CC BY-SA 3.0)

Le Netizen Report de Global Voices Advox offre un aperçu des défis à relever, des victoires obtenues et des tendances émergentes en matière de libertés numériques dans le monde. Ce rapport traite d’informations et d’événements relevés entre le 1er et le 15 novembre 2018.

Deux militantes pour la liberté de la presse travaillant pour le Comité pour la protection des journalistes ont été arrêtées et interrogées par des policiers en civil en Tanzanie, où elles effectuaient une mission d’enquête.

Les membres du CPJ Angela Quintal et Muthoki Mumo ont été emmenées de force hors de leur hôtel et détenues plusieurs heures durant dans une maison privée par des officiers de police en civil. Ces derniers ont par ailleurs saisi leurs appareils électroniques pour en fouiller le contenu.

Racontant par écrit [tous les liens sont en anglais ou en français] leur expérience pour le quotidien en ligne sud-africain The Daily Maverick, Angela Quintal a décrit la façon dont elle et Muthoki Mumo, qui est kényane, ont été traitées par les policiers.

We were alone at the mercy of a posse of men, some of whom were very abusive and hostile….An intelligence agent was particularly abusive towards Muthoki. He even slapped and shoved her. I tried to intervene and was told to back off. I was terrified that Muthoki would be sexually assaulted and I would be powerless to stop them.

Nous étions seules, à la merci d'une bande d'hommes, dont certains étaient très agressifs et hostiles … Un membre des services de renseignements a été particulièrement violent à l’égard de Muthoki. Il l'a même giflée et bousculée. J'ai essayé d'intervenir et on m'a dit de reculer. J'étais terrifiée à l'idée que Muthoki soit agressée sexuellement et que je ne puisse rien faire pour les empêcher.

Angela Quintal et Muthoki Mumo étaient venues en Tanzanie pour rencontrer des journalistes et des défenseurs de la liberté de la presse, suite à la montée de la répression envers les personnes travaillant dans les médias ces dernières années, et donc sous l'administration du président John Magufuli.

Parallèlement aux menaces extralégales perpétrées à l’encontre des journalistes et des blogueurs, des mesures telles que la Loi sur la cybercriminalité de 2016 et le système de licence appelé « l’impôt sur les blogs », mis en place en 2018, ont accru les possibilités pour les autorités de s’en prendre à la liberté d’expression et de faire taire les voix critiques. La Loi sur la cybercriminalité a été utilisée pour arrêter plusieurs personnes ayant exprimé leurs opinions politiques de façon non violente sur Facebook et dans des groupes WhatsApp. Les autorités y ont également eu recours pour engager des poursuites contre Maxence Melo, célèbre fondateur et directeur du site Internet communautaire JamiiForums, surnommé le « Reddit tanzanien » ou le « Wikileaks en swahili ». Melo a été poursuivi pour avoir refusé de transmettre aux autorités des données relatives aux utilisateurs.

Un militant des droits humains saoudien mort sous la torture en prison

Le défenseur des droits humains Turki Bin Abdul Aziz Al-Jasser était une voix très écoutée en Arabie saoudite, où il rapportait, via un compte Twitter anonyme, les violations des droits de l’homme commises dans le royaume et était l’un des leaders de l’ALQST, l’une des rares organisations saoudienne de défense des droits humains. Mais tout cela a pris fin en mars 2018, lorsqu’il a été enlevé par les autorités qui ont réussi à remonter sa trace à partir du compte Twitter. Al-Jasser est mort cette semaine, après avoir été torturé dans une prison saoudienne.

Plusieurs médias, parmi lesquels le New York Times, ont émis l’hypothèse que les agents du gouvernement saoudien aient pu obtenir les informations ayant mené jusqu’à lui par l’intermédiaire d’un collaborateur de Twitter, travaillant pour le bureau saoudien de l’entreprise, en charge des problèmes relatifs aux utilisateurs basés en Arabie saoudite. Mais cela n'a pas été confirmé. Bien que la façon dont l'identité d'Al-Jasser ait pu être déterminée reste obscure, certains de ses soutiens tiennent Twitter pour responsable.

Chasse aux infox, aux rumeurs et aux « mots inappropriés » en Chine

Une enquête menée par le site Internet Hong Kong Free Press a montré que les noms de certains chefs d’État et activistes chinois avaient été estimés « inappropriés » et censurés par les dernières versions du service de gravure proposé pour iPad, iPod Touch et Apple Pencil. Si un client écrit « Xi Jinping » (le nom du président chinois) en caractères chinois, l'avertissement suivant apparaît : « Les mots inappropriés ne sont pas autorisés ». Les références aux dissidents politiques, à l’indépendance de Hong Kong ou de Taïwan, ainsi qu’au Falun Gong génèrent un résultat similaire.

Le réseau social chinois Weibo (équivalent à Twitter mais en plus vaste) permet à des personnes travaillant pour le gouvernement chinois et à certains médias de signaler ce qu'ils estiment être des « rumeurs » propagées sur Weibo, ce dans le cadre d’un effort fait pour identifier les infox (fake news) diffusées en ligne. En Chine, toute information venant contredire les discours officiels et la politique du parti peut être considérée comme une rumeur.

Une universitaire ougandaise arrêtée pour avoir insulté la mère du président sur Facebook

L’universitaire et militante féministe Stella Nyanzi a été arrêtée le 2 novembre dernier à l'Université Makerere, à Kampala, et inculpée en vertu de la Loi de 2011 sur l'utilisation abusive des ordinateurs (Computer Misuse Act) pour avoir eu recours « à des moyens de communication électroniques pour perturber ou tenter de perturber la paix, le calme ou le droit à la vie privée d’une personne sans raison valable d’entrer en communication ». Stella Nyanzi avait déjà été arrêtée sur la base d’accusations similaires en 2017, après avoir comparé le président Museveni à une « paire de fesses » sur sa page Facebook.

Des journalistes algériens arrêtés pour diffamation

Abdou Semmar, rédacteur en chef du média en ligne Algérie Part et ancien collaborateur de Global Voices, et son collègue journaliste Merouane Boudiab ont été libérés le 8 novembre dernier après avoir passé plus de deux semaines derrière les barreaux. Ils avaient été arrêtés suite à des plaintes pour diffamation déposées par Anis Rahmani, directeur de la chaîne de télévision privée Ennahar, et par le gouverneur d'Alger Abdelkader Zoukh.

Algérie Part a largement couvert les allégations de corruption visant Zoukh. Le site s’est également montré critique envers Rahmani et son groupe de presse, signalant le fait qu'Ennahar TV diffusait mensonges et rumeurs. Aucun des plaignants n'a expliqué publiquement ce qu'il jugeait diffamatoire dans les reportages d’Algérie Part. Les journalistes attendent à présent leur procès.

Un journaliste et activiste sahraoui toujours en vie après 45 jours de grève de la faim

Le défenseur des droits humains et journaliste originaire du Sahara occidental Bachir Khadda, qui est emprisonné au Maroc depuis 2010 et est aujourd'hui âgé de 32 ans, a suspendu sa grève de la faim, entamée il y a 45 jours, à la demande de sa famille. Avant son arrestation en 2010, Bachir Khadda avait principalement travaillé pour le site d’information en ligne Equipe Media sur des reportages traitant des violations des droits humains et des manifestations ayant lieu sur le très disputé territoire nord-africain. Il avait été condamné en 2013 pour « complicité de violence » contre les forces de sécurité après avoir été forcé de signer, les yeux bandés, des aveux préalablement rédigés.

En dépit de son état de santé fragile – il est aujourd’hui incapable de marcher ou de parler –, il est maintenu à l'isolement dans la prison marocaine de Talfit.

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À la rencontre des militants qui sauvent une forêt allemande vieille de 12 000 ans de la transformation en mine de charbon

lundi 19 novembre 2018 à 12:34

Crédit: Hambi info via Flickr

La version originale de cet article a été écrite par Renee Karunungan sur 350.org et est basée sur des interviews vidéo menées par Sarah Hüther, Lou Huber-Eustachi et Ruben Neugebauer.

Située dans l'État allemand de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, la forêt de Hambach a 12 000 ans et date de la dernière ère glaciaire. Pourtant, il ne reste actuellement que 10 % des 5 000 hectares d'origine.

Cette partie de la forêt de Hambach est, pour l'instant, protégée. Le géant allemand de l'énergie RWE, qui a acheté la forêt en 1978, s'était apprêté, malgré de féroces protestations, à couper ce qu'il reste de l'ancienne forêt pour agrandir une de ses mines à ciel ouvert. Début octobre, un tribunal a ordonné à RWE de suspendre ses programmes pendant qu'un autre procès est toujours en attente. Même si cela représente une victoire importante pour ceux qui on œuvré à protéger la forêt, le combat est loin d'être terminé. Depuis 2012, plusieurs activistes occupent Hambach, déterminés à la sauver pour de bon et mettre fin à l'extraction de charbon en Allemagne.

Les défenseurs de la forêt

Strobo, une des activistes qui vit dans la forêt de Hambach, nous a dit qu'elle a “décidé de vivre dans la forêt et mettre [s]on corps devant les engins de terrassement”

Les activistes ont construit des cabanes dans les arbres et installé des barricades sur les routes pour arrêter la compagnie minière et empêcher les véhicules de police de venir libérer la voie pour RWE.

En septembre, les autorités de l'État allemand de Rhénanie-du-Nord-Westphalie ont ordonné que les cabanes soit retirées pour libérer l'espace et permettre l'extension de la mine de charbon.

Lou, une autre activiste, a raconté que “les gens qui [l]'ont sortie des cabanes étaient des grimpeurs professionnels. Ils sont venus avec des grues, des nacelles élévatrices, et abatteuses pour détruire les arbres et dégager le passage jusqu'aux occupants pour pouvoir amener les équipements lourds et sortir les gens des cabanes.”

Le géant allemand de l'énergie RWE, extrait chaque année 49,6 million de tonnes de lignite, aussi appelé charbon brun ou doux. L'Allemagne est le plus grand producteur de lignite au monde. Le lignite produit plus d'émissions de carbone que l'anthracite. Les champs miniers de RWE en Rhénanie sont les plus grandes sources d’émissions de carbone en Europe. Ils comptent pour 80% des émissions allemandes liées à l'énergie. Trois des cinq premiers pollueurs en Europe sont les sites industriels de charbon possédés par RWE. L'entreprise allemande a exprimé son désaccord avec l'agenda allemand de sortie du charbon.

“Ce n'est pas seulement pour la forêt”

Un autre activiste, Momo, relie le combat pour sauver la forêt de Hambach à d'autres luttes pour la justice climatique : “Nous produisons actuellement un grand pourcentage d’émission de carbone à l'échelle globale, qui affecte le changement climatique, que les gens du Sud doivent fuir. Ce combat représente plus que la destruction d'une forêt”.

Lou acquiesce, pour elle “c'est une part d'une lutte mondiale plus importante. Ce qui arrive ici, l'extraction du charbon qui nourrit le changement climatique, est un problème global. C'était très important pour moi de venir ici et d'encourager ce combat, d'être solidaire avec le combat mené ici et les luttes à travers le monde, contre le changement climatique, le capitalisme, le racisme. C'est une part d'une lutte beaucoup plus large contre le système tel qu'il est.”

Construire des ponts entre les activistes du climat et les mineurs de charbon

L'Allemagne a promis de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40% d'ici 2020, mais est en voie de manquer ses objectifs. Le gouvernement a constitué une commission chargée de la sortie du charbon. D'ici la fin de l'année, celle-ci est chargée de trouver des perspectives économiques pour les mineurs de charbon et les régions concernées, d'annoncer des mesures pour réduire les émissions de carbone en convergence avec les objectifs climatiques de l'Allemagne, et de donner une date de fin pour la production de l'énergie tirée du charbon.

Les implications pour les mineurs de charbon et les autres travailleurs ont reçu beaucoup d'attention dans le débat public concernant la sortie du charbon. C'est là que le travail de Christopher devient important.

Christopher fait partie du mouvement de justice climatique et a travaillé avec des communautés affectées par l'activité minière. Il a organisé les premières rencontres entre les mineurs de lignites et les activistes pour la justice climatique ou les “débats de paix” comme il les appelle, car “il y avait trop de confrontation” selon lui.

Christopher a réuni les activistes du climat et les mineurs de charbon

“On a discuté du changement climatique et du lignite, nous dit-il, des emplois et de la transformation de l'économie. Cela ne concerne pas juste les emplois dans l'industrie de la lignite. Quand nous arrêtons la lignite, nous ne faisons pas qu'arrêter la plus grande source d’émissions en Europe, nous forçons également le débat sur d'autres secteurs économiques : de quelle type d'économie voulons-nous ? Nous avons commencé la conversation avec les mineurs de lignite.”

“Il n'y a pas de travail sur une planète morte” dit cette banderole dans une manifestation pour protéger la forêt de Hambach

Le pouvoir d'un mouvement unifié

La Colombienne Maria Fernanda, qui vit en Allemagne depuis 22 ans, participe aussi aux actions pour sauver la forêt de Hambach. C'est un combat important pour elle et pour les peuples indigènes colombiens parce que la destruction menée par RWE a aussi affecté les forêts dans leur pays.

“L'année dernière, raconte-t-elle, certaines femmes indigènes colombiennes sont venues en Allemagne pour appeler à l'arrêt des mines de charbon ici”. Elle a travaillé comme interprète pour les peuples indigènes.

Maria Fernanda à côté de la forêt de Hambach

Strobo, Lou, Momo, Christopher et Maria Fernanda disent que c'est ce mouvement qui grandit pour sauver la forêt de Hambach qui leur donne de l'espoir.

Christopher dit que “le sentiment est bon, on a réussi à construire un mouvement grand et divers en un temps court, qui est nécessaire pour se battre contre le changement climatique.”

Pour Maria Fernanda, c'est un éveil des gens qui sont venus pour réaliser qu'ils “n'ont pas juste besoin d'argent, ils dépendent de la terre nourricière, de l'eau, de l'air, pour manger et vivre. C'est le bon moment pour se rassembler et s'unir” selon elle.

Et en se rassemblant, Momo croit qu'ils envoient un message fort au gouvernement allemand en disant que c'en est trop, que la solidarité de milliers de personnes montre leur force collective.

Manifestation pour la fin du charbon au-dessus de la mine à ciel ouvertvoisine de la forêt de Hambach. Photo: Leon Enrique

Des activistes comme Lou et Strobo, qui ont construit des cabanes dans les arbres, n'abandonneront pas le combat. Les cabanes ont été détruites par la police mais les activistes ont depuis commencé à les reconstruire.

Strobo conclut : “Ils nous éloignent des cabanes mais ils ne peuvent pas expulser un mouvement, ils ne peuvent pas expulser les idées pour lesquelles nous nous battons”.

La fuite en Hongrie de l'ex-homme fort de la Macédoine déclenche une avalanche de désinformation

lundi 19 novembre 2018 à 11:14

Ce montage photographique de l'humoriste macédonien Alekandar Dojranliev montrant l'ex-premier ministre anti-migrants Nikola Gruevski habillé comme une réfugiée à la frontière hongroise est devenu un mème populaire. Reproduit avec autorisation.

Avec leur publication d'informations non confirmées, non vérifiées et trompeuses sur la fuite en Hongrie de l'ex-premier ministre macédonien Nikola Gruevski à fins d'échapper à sa condamnation à deux ans de prison, de nombreux organes de médias des Balkans ont contribué à créer la confusion et la méfiance dans le public. Principale source de la confusion, le va-et-vient des reprises d'articles entre les médias macédoniens, hongrois, serbes et albanais en l'absence de vérification journalistique élémentaire.

Selon Balkan Insight, on sait désormais que Gruevski est passé clandestinement de Macédoine en Albanie, avant d'être transporté dans des véhicules diplomatiques à travers le Monténégro et la Serbie par du personnel des ambassades de Hongrie dans ces pays.

Sur un vol d'une compagnie aérienne fantôme ?

Un des morceaux de désinformation de plus de poids est venu du jusque là fréquentable journal serbe Politika, qui a publié le 15 novembre un article affirmant que Gruevski avait “fui” sur un vol de la Malév Hungarian Airlines en partance de Tirana, la capitale albanaise, à destination de Budapest. A l'avantage du gouvernement serbe, aux liens étroits avec les populistes macédoniens et hongrois impliqués dans l'opération, l'article de Politika omettait opportunément la Serbie dans sa description de l'itinéraire emprunté par le fugitif.

Tandis que de nombreux médias balkaniques reprirent l'article tel quel, d'autres prirent exceptionnellement la peine de vérifier et déconstruire l'information de l'intérieur. L'agence macédonienne Meta a ainsi révélé que Malev avait cessé ses opérations depuis 2012.

Illustration du fact-check (vérification des faits) de l'article de Politika “Exclusif : Gruevski a fui par l'Albanie” par Raskrikavanje.rs, utilisée avec autorisation. L'article mêlait le vrai (il a bien été en Albanie) et le faux (il a pris l'avion au lieu de voitures pour traverser la Serbie) pour égarer le public sur sa piste.

Le site serbe de vérification des médias Raskrikavanje.rs a poursuivi le démontage de l'article de Politika en établissant que l'unique vol de Tirana à Budapest sur n'importe quelle compagnie le 13 novembre partait tard le soir, et était opéré par la compagnie à bas coût Wizz Air. Gruevski ayant lui-même annoncé sur Facebook aux alentours de 13h10 ce même jour sa présence à Budapest, il aurait été impossible qu'il ait pris le vol Wizz Air ou tout autre vol depuis Tirana.

L'article en question a été retiré du site web de Politika sans explication. Mais le site macédonien CriThink – Pensée critique pour un usage judicieux des médias a conservé une capture d'écran de la page dans le cadre de sa vérification de faits. A côté de son analyse de l'information, CritThink a pointé que l'auteur anonyme de l'article trompeur n'avait pas cité la moindre source à l'appui de ses affirmations.

За ниедна информација во написот, или за ниедно тврдење нема наведено од каде тие потекнуваат и кој ги дал информациите. Нема ни повикување на анонимни извори – било официјални или неофицијални, што, исто така, дополнително го зголемува сомневањето дека она што е објавено е, всушност, невистина.

Il n'y a pas un seul élément d'information dans l'article, pas une seule affirmation qui indique la source dont elle émerge ou l'individu qui l'a fournie. Ils ne disent même pas qu'il y a eu des sources anonymes – officieuses ou officielles, ce qui en plus suscite des doutes si ce qui a été publié était réellement véridique.

Gruevski s'est-il évadé déguisé en femme ?

Un autre morceau de désinformation répandu a été l'affirmation largement reprise que Gruevski avait traversé les frontières habillé en femme. Une thèse qui a inspiré d'innombrables mèmes, peut-être une revanche contre l'instrumentalisation par son gouvernement de la misogynie et de l'homophobie, ainsi que son maniement de propagande anti-LGBTI pour mobiliser ses soutiens.

Made in Hungary. M. Nikolas vole et détale.

La source de cette affirmation était un entretien donné par un professeur de droit macédonien bien connu, Vlado Kambovski, au respectable site web SDK.mk le 14 novembre. A un moment où les détails de l'incident n'étaient pas encore connus, Kambovski a conjecturait que tout était possible, même l'extravagance d'un politicien macho conservateur s'affublant de vêtements de femme pour échapper à la loi.

Големиот херој и патриот Никола Груевски, кој можеби и во женски алишта се скри и побегна од Македонија, стори двоен прекршок покрај кривичното дело за кое е осуден на двегодишна затворска казна која требаше да ја издржува… Тој со бегството си ја зацементира вината.

L'[auto-proclamé] grand héros et patriote Nikola Gruevski, qui s'est peut-être déguisé en femme et a fui la Macédoine, a ajouté un double outrage au crime pour lequel il a été reconnu coupable et condamné à deux ans de prison qu'il était supposé purger… Par sa fuite il a donné une preuve en béton de sa culpabilité.

Plusieurs médias hongrois ont pris cette saillie à la lettre et ont publié des articles aux titres sensationnalistes affirmant que Gruevski avait réellement passé les frontières habillé en femme, citant SDK comme la source de l'information.

Ajoutant un niveau supplémentaire d'enfumage, certains médias macédoniens ont amplifié la désinformation provenant de ces sources avec des manchettes comme “Les médias hongrois disent que Gruevski a franchi la frontière habillé en femme.” Ces médias se sont reposés si lourdement sur ces sources de troisième main que cela les a empêchés de réaliser que la rumeur était en fait née dans leur propre pays.

Le gouvernement Gruevski, qui a régné sur la Macédoine de 2006 à 2017, a lourdement investi dans la propagande et la désinformation. Une grande partie de l'infrastructure mise en place, y compris certains médias alliés, est toujours en place et continue à manipuler l'information qui souvent croît en sensationnalisme et inexactitude avec les allers-retours de part et d'autre des frontières dans la région.

Les journalistes et les opérations de vérification des faits ont du pain sur la planche pour les démonter. Il n'en reste pas moins que le flux de fausses affirmations et contre-affirmations érode la confiance du public dans le journalisme comme pilier de la démocratie, et enfonce plus profondément les gens dans l'apathie politique.

Le blogueur mauritanien Mohamed Ould Mkheitir, blanchi de l'accusation d'apostasie mais toujours en prison depuis 4 ans

dimanche 18 novembre 2018 à 18:33

Mkheitir lors de sa parution à la cour d'appel en 2016 par IHEU.org – CC BY-SA 4.0

Trente-deux (32) organisations de défense des droits humains ont lancé une campagne mondiale pour exiger la libération et la protection de Mohamed Ould Mkheitir. Cet ingénieur, âgé de 33 ans est toujours détenu au secret alors qu’une cour d’appel a ordonné il y a un an de commuer sa peine de mort en une détention de deux ans d'emprisonnement.  Ayant déjà fait 3 ans de détention préventive, il aurait du être libéré depuis un an.

Il n’a que des contacts très limités avec sa famille alors que ses avocats n'ont pas accès à lui car les autorités n’ont pas appliqué la décision de le libérer rendue par une cour d’appel le 9 novembre 2017.

Le communiqué publié par Amnesty International résume la situation injuste et précaire dans laquelle se trouve le détenu  Mohamed Ould Mkheitir:

Le 9 novembre 2017, une cour d’appel a ramené sa peine à deux ans d’emprisonnement, qu’il avait déjà purgés, et lui a infligé une amende. En mars 2018, le ministre de la Justice, Mokhtar Malal Dia, a déclaré dans une interview que le blogueur était “toujours détenu quelque-part en Mauritanie”.

En mai les autorités mauritaniennes ont informé le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale (CERD) que cet homme était “en détention administrative pour sa propre sécurité”.

Pendant près d’un an, les avocats de Mohamed Mkhaïtir n’ont cessé de demander à lui rendre visite mais le ministre de la Justice ne leur a pas répondu. Mohamed Mkhaïtir serait en mauvaise santé et aurait besoin de soins médicaux urgents.

À la suite de cette dénonciation, plusieurs sites d'information en ligne ont repris le communiqué et des internautes ont exprimé leurs sentiments.

La Cour d’Appel avait révoqué la sentence pour vice de procédure le 31 janvier 2017 et le nouveau procès at eu lieu les 8 et 9 novembre 2017, condamnant le blogueur à deux ans de prison et environ 150 euros d’amende.  Le site journaliste Mauritanien Mohammed Gherrabi rappelle le contexte judiciaire du cas du blogueur:

En mai 2018, 21 ONG nationales et internationales demandaient déjà de mettre fin à la détention arbitraire et de garantir la sécurité du blogueur Mohamed Mkhaïtir. Elles sommaient également les autorités mauritaniennes d’abroger la récente loi sur les infractions liées à l’apostasie, qui rend la peine de mort obligatoire en cas de “propos blasphématoires” et d’actes sacrilèges”. L’adoption d’un tel texte constitue un véritable retour en arrière, éloignant la perspective d’une abolition pour ce pays qui, pourtant, n’a procédé à aucune exécution depuis 1987 et même ratifié de nombreux traités internationaux concernant les droits humains.

Martin Mateso cite sur le blog Geopolis que Kate Barth, directrice juridique de l'ONG Freedom Now, est très engagée dans cette campagne:

La directrice juridique de Freedom Now, Kate Barth, engagée dans cette campagne, fait remarquer que le cas du blogueur Mohamed Mkhaïtir est emblématique «de la répression à laquelle le régime mauritanien soumet les libertés d’expression et d’information, en particulier celles des journalistes qui dénoncent le recours illégal au travail servile».

Les Nations Unies ont critiqué à plusieurs occasions la détention et la condamnation à mort de Mohamed Mkhaïtir.

En effet, en avril 2017 et mai 2018, un Groupe de travail sur la détention arbitraire et six experts de l'ONU pour les questions des droits de l'homme ont demandé sa libération immédiate ainsi que son droit à demander réparation.

Sur le site d'actualités Afrique.le360.ma, le journaliste mauritanien Cheikh Sidya, rappelle:

L'affaire Mohamed Ould Mkhaitir ce blogueur reconnu “d'apostasie” condamné à la peine capitale avant que cette peine ne soit ramenée à un emprisonnement correctionnel de deux ans pour “mécréance” continue à susciter le débat en Mauritanie.

En effet, malgré que l'intéressé ait purgé sa peine en détention préventive entre décembre 2013 et fin 2017, il est toujours en prison.

La Cour suprême mauritanienne avait pourtant ordonné sa libération en novembre 2017. La mesure n'a jamais fait l'objet d'exécution à ce jour.

Interpellé à l'occasion des assises de la 29ème session de la Commission des droits des peuples [humains] et des peuples(CADHP), tenues à Nouakchott en avril – mai 2018, un officiel mauritanien révélait que le jeune blogueur a été placé en détention administrative.

S'exprimant sur le blog l'allumeur de reverbere, Jorge Brites stigmatise la passivité de l'Union européenne et des États-Unis, avant d'analyser les réalités  sociologiques de la société mauritanienne qui sont à la base de cette violation des droits de MKheitir:

De manière générale, l’immense majorité de la classe politique et médiatique mauritanienne, quand elle n’a pas clairement appelé à exécuter la peine capitale, a en tout cas évité de s’exprimer sur cette affaire – encore moins de soutenir Ould M'Kheitir. Quelques voix se sont toutefois faites entendre, parmi lesquelles la militante Aminetou Mint Moctar, présidente de l'Association des Femmes Chefs de Famille (AFCF), mais une fatwa a rapidement suivi pour appeler à assassiner ces mécréants. Le nombre d’intellectuels, de diplômés, voire même de militants pro-démocratie ayant appelé à tuer le jeune blogueur, a de quoi déconcerter. Il vient contredire l’idée que le terme de “vindicte populaire” serait réservé à des gens sans éducation et que la manipulation sur des bases religieuses ne concernerait que des masses miséreuses et illettrées. Il est même effrayant de constater la promptitude de tant de gens – parmi lesquels des soi-disant érudits – à exiger que le sang soit versé… ce qui constitue tout de même, a priori, l’option la plus extrême et la plus violente qui existe. Et pour les musulmans convaincus, on peut légitimement se demander si le Prophète lui-même, dans pareille situation, aurait fait exécuter un jeune qui interroge la religion parce qu’il estime qu’elle légitime un système inégalitaire. On peut facilement imaginer, compte tenu de l’importance de la notion de pardon dans l’islam, qu’il aurait tenté de le convaincre par des arguments théologiques, et que dans tous les cas il aurait pardonné ses “égarements” plutôt que de, simplement, le faire tuer.

Depuis le début du calvaire que vit Mohamed Ould Mkhaitir globalvoices.org a publié les billets suivants:

De premier ministre à condamné en cavale : l'ex-homme fort de la Macédoine s'enfuit en Hongrie

dimanche 18 novembre 2018 à 17:30

Quand il était au pouvoir, le conseil des ministres de Nikola Gruevskis commanda ce portrait toujours accroché au siège du gouvernement de la République de Macédoine, aux côtés de tableaux plus petits d'autres anciens premiers ministres. PHOTO: Domaine public.

Pour échapper à un verdict de deux ans de prison pour corruption, Nikola Gruevski, l'ex-premier ministre macédonien, est allé se réfugier en Hongrie.

Gruevski a disparu jeudi 8 novembre, lorsque les six gardes du corps qu'il avait choisi un par un dans les effectifs du ministère de l'Intérieur auraient perdu contact avec lui. Gruevski était engagé dans des procédures judiciaires à rallonge pour retarder l'exécution d'une condamnation à deux ans de prison dans une affaire au nom de code Tank où il était accusé d'abus de fonctions. Ses avocats ont multiplié les appels après la confirmation du verdict par le Tribunal suprême.

Gruevski était supposé se présenter à la prison avant lundi 12 novembre. Mais mardi 13, il a annoncé sur Facebook avoir déménagé à Budapest parce qu'il recevait des menaces. Il a sollicité l'asile politique en Hongrie.

Son évasion a provoqué un tollé en Macédoine et à travers la région, car l'opinion exige qu'on lui explique pourquoi et comment l'ex-homme fort a réussi à se tirer.

Si la fuite de Gruevski est sans précédent dans l'histoire de la Macédoine, la destination qu'il a choisie n'étonne pas grand monde. Il y a un an à peine, Global Voices racontait que Gruevski a pu passer un accord avec le premier ministre Viktor Orban pour que la Hongrie accueille les fugitifs liés à des abus de pouvoir du gouvernement Gruevski.

Gruevski et Orban ont l'habitude de coopérer. Les banques hongroises sont impliquées dans des accords de corruption pour siphonner l'argent des contribuable macédoniens. Les deux dirigeants ont exploité la crise des réfugiés de 2015 pour créer une hystérie xénophobe en vue de gains politiques, ont mené des opérations coordonnées contre la société civile, et monté des stratagèmes financiers pour financer la propagande partisane.

“Quand j'étais premier ministre, j'ai volé, triché et menti, voilà pourquoi je suis persécuté dans mon pays. Est-ce que vous pouvez m'héberger ?”
“Nous sommes toujours heureux d'accueillir ceux qui partagent notre culture !”
Dessin de Marabu (HGV) sur la demande d'asile de Nikola Gruevski en Hongrie

Au niveau de l'Union européenne, les partis populistes des deux dirigeants, le VMRO-DPMNE et le Fidesz, ont coutume d'user de leur appartenance au Parti populaire européen (PPE), une association pan-européenne de partis politiques de droite, pour minimiser ou retarder les réponses de la communauté internationale aux abus à l'intérieur de leurs pays.

Exigences de responsabilité

Ces fuites en Hongrie ont été facilitées par la justice macédonienne, qui s'est prononcée contre la détention des suspects dans de nombreuses affaires de corruption en cours. Ces dernières années, des rapports de l'Union européenne ont indiqué que le parti de Gruevski avait subverti l'indépendance des tribunaux en les remplissant de loyalistes du régime.

Dans un pays qui baigne depuis des décennies dans les théories complotistes, beaucoup se demandent si le gouvernement actuel a passé une sorte de marché pour laisser s'en aller Gruevski, en échange du soutien de son parti au parlement sur la question de l'accord du nom avec la Grèce, un thème qui alimente les spéculations des médias depuis plusieurs mois.

Étrange !
La couverture de l'hebdomadaire Focus du 23 août 2018
Le titre de l'article de une est :
“Le gouvernement permettra-t-il à Gruevski de s'enfuir en Hongrie si les députés VMRO soutiennent l'accord sur le nom ?”
Ils l'ont fait et il l'a fait !
Étrange, vous dis-je !

Mercredi 14 novembre, le premier ministre macédonien Zoran Zaev a pourtant nié avec véhémence les allégations d'un accord politique avec Gruevski.

D'autres Macédoniens, dont des juristes et des spécialistes de droits humains, ont exigé que le gouvernement assume ses responsabilités dans cet embarrassant scandale, et se sont dits déçus par le pouvoir dont ils ont voté la mise en place sur la promesse d'un retour à l’État de droit.

Le ministère de l'Intérieur attend de voir où se trouve Gruevski.
Le ministère des Affaires étrangères attend que le ministère de l'Intérieur confirme que Gruevski n'est pas en Macédoine.
Le tribunal attend la requête du Procureur général d'émission d'un mandat d'arrêt contre les complices soupçonnés de Gruevski.
Le bureau des Procureurs spéciaux attend les informations du ministère de l'Intérieur sur l'évasion de Gruevski.
Y A-T-IL QUELQU'UN DANS CE PAYS QUI NE SOIT PAS EN TRAIN D'ATTENDRE QUELQUE CHOSE ?

Plusieurs organisations de premier plan de la société civile ont vigoureusement condamné les “omissions, négligences grossières et entorses aux dispositions de la Loi sur l'exécution des peines et du règlement sur l'exécution des tâches de la police, de la part du tribunal d'instance de Skopje 1 et du ministère de l'Intérieur” qui ont eu pour résultat l'évasion du malfaiteur condamné.

Itinéraire d'évasion encore inconnu

Bon nombre d'aspects de l'affaire restent encore obscurs. Étant donnés les liens étroits qu'entretiennent Gruevski comme Orban avec le président serbe Aleksandar Vucic, dont le parti SPS est également membre du PPE, beaucoup ont supposé que Gruevski est passé par la Serbie. Et ironisé sur la possibilité qu'il ait emprunté la route des Balkans suivie par les réfugiés et qu'il avait raillée par le passé.

La dernière information officielle en date indique que Gruevski a fui par l'Albanie, traversant ensuite le Monténégro, avec l'aide de diplomates hongrois, mais les détails de son itinéraire complet restent inconnus du public.

Communiqué officiel de la police nationale d'Albanie :
Gruevski est sorti d'Albanie le 11 novembre à 19h01 et est entré au Monténégro par Hant Hotit dans la voiture diplomatique CD1013A appartenant à l'ambassade de Hongrie à Tirana.
Interpol Skopje a informé Interpol Tirana le 13 novembre à 19h35 qu'il est recherché.

Asile en Hongrie

La demande d'asile de Gruevski est examinée en ce moment par les autorités hongroises. Autre ironie de l'histoire, le parti au pouvoir en Hongrie a dans les années récentes modifié ses lois pour durcir les conditions d'admission des demandeurs d'asile dans le pays.

La Macédoine est considérée pays d'origine sûr par la loi hongroise. Il en découle qu'une demande d'asile ne sera pas considérée selon ses mérites à moins que le demandeur ne prouve que son pays d'origine est dangereux pour lui.

Un professeur de l'Université d'Europe centrale, contrainte à cesser progressivement ses activités à Budapest sous les pressions du gouvernement Orban, a décidé de tirer profit de la présence de Gruevski en ville, et a lancé une invitation ouverte pour qu'il participe à un événement public.

Cher Monsieur Gruevski, je vous prie par la présente d'accepter mon invitation à mon cours sur la Justice transitionnelle, mercredi 5 décembre à l'Université d'Europe centrale à Budapest. Nous sommes un lieu de débats ouverts, dans l'esprit d'une société ouverte [l'#OpenSociety de George Soros, fondateur de l'UEc et bête noire d'Orban]. #RéfugiésBienvenus #JeSoutiensUEC

Les autorités macédoniennes ont annoncé qu'elles vont déposer une demande d'extradition.