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Le #30 juin en Egypte contre le pouvoir des Frères musulmans ?

vendredi 21 juin 2013 à 23:35

Ce billet fait partie du dossier de Global Voices sur la révolution en Egypte.

Les Egyptiens se sont remis à planifier des manifestations pour “faire tomber le régime”, cette fois le 30 juin. La date, diffusée sur les médias sociaux sous le mot-dièse #June30, est celle du premier anniversaire au pouvoir pour le Président Mohamed Morsi, le candidat des Frères Musulmans, élu après les manifestations de masse commencées le 25 juin 2011 pour aboutir au renversement de Hosni Moubarak.

De l'avis de nombreux Egyptiens, cette année de gouvernement Morsi a ajouté aux plaies de l'Egypte. La complète détérioration sous tous les aspects du pays entretient la colère montante, toile de fond des manifestations du #30Juin, prévues dans tout le pays. La principale revendication : “à bas le président et le pouvoir des Frères Musulmans.”

Malgré les appels forts et l'aspect rassembleur de la cause, le paysage est obscurci par un égal sentiment d'inconfort et d'incertitude.

Une des questions la plus partagée et la plus importante à être soulevée est : avons-nous un plan ? M.J.Y la pose sans ambages [anglais] :

@sotsoy: Alors quel est le plan pour #june30 ? L'opposition a-t-elle quelque chose en place si elle réussit ? #tamarod

En réponse à cette même question, Ziad M a dit [arabe] :

@ZiadM: يعنى فى الفتره اللى فاتت مفيش ولا حزب سياسى نجح انه يقدم كيان قادر انه يقدم حلول بديله لمشاكل اداره البلد !! كله كلام عايم

Pendant la période passée pas un seul parti politique ne s'est montré capable de proposer une alternative pour diriger le pays, ils ne font que parler.

La blogueuse Zeinab Samir est convaincue que participer et encourager la rue à dire non est un devoir. Elle a écrit dans son billet de blog [arabe] :

إنت نازل عشان البنزين أو العيش أو الكهربا أو النيل أو قناة السويس أو الديون أو الجنود اللي بتتخطف أو العيال اللي بتموت في حوادث أتوبيسات أو عشان نازل تقول لأ للإسلاميين اللي صدموك

Vous allez manifester à cause du manque de combustible, d'électricité, du litige pour le Nil, du canal de Suez, de nos dettes, de nos soldats enlevés dans le Sinaï, et de ceux qui meurent chaque jour dans des accidents de bus, ou est-ce pour dire non aux islamistes

D'autres évoquent la grosse participation des “feloul” ou partisans de l'ancien régime, que l'on dit favorables au retour du pouvoir militaire. Une perspectives qui n'est pas non plus la bienvenue pour les masses restées dans les rues pendant un an et demi pour mettre fin au gouvernement de l'armée, confirme le poète égyptien Amin Haddad [arabe] :

@AminFHaddad: نطالب بانتهاء حكم الإخوان لا بانتهاء الإخوان ونطالب بأهداف الثورة لا بعودة حكم مبارك والعسكر.

Notre revendication est la fin du pouvoir des Frères Musulmans et la réalisation des objectifs de la révolution et non le retour de Moubarak ou du Conseil Supérieur des forces Armées (SCAF).

Wael Eskandar a une vision positive [anglais] :

@weskandar: Les feloul sont fidèles à leurs hommes d'affaires et les islamistes sont fidèles à leurs chefs mais la plupart des révolutionnaires sont fidèles à leurs valeurs.

Perplexité et hésitation ont cependant disparu ; révolutionnaire ou feloul, décidé ou indécis, ils ont changé leur position peu après un discours provocateur du Président égyptien en solidarité avec la Syrie. Fathy Saad, qui hésitait sur sa participation, a écrit :

@fathysaad: شكرًا #مرسي فقد كنت متردد في النزول يوم ٣٠ يونيو ولكن بعد سماعي لخطابك الغبي حسمت امري وسوف انزل بإذن الله

Merci Morsi, je ne savais pas si j'allais descendre dans la rue ou non le 30 juin, mais après ce discours stupide, j'ai pris ma décision, et je participerai.

A dix jours du #June30, la plupart des gouvernorats ont déjà commencé les manifestations quotidiennes, et la vague de colère semble plus proche que prévu.

Pour plus de réactions sur Twitter, suivez le mot-dièse #June30.

Le nouveau gouvernement bulgare bousculé par les manifestations

vendredi 21 juin 2013 à 21:06

(Billet d'origine publié le 19 juin 2013)

La désignation d'un député controversé du parti de la minorité musulmane turque à la tête de l'Agence de Sécurité de Bulgarie a déclenché une énorme vague de manifestations dans tout le pays contre un gouvernement en place depuis seulement deux semaines.

Plus de 10.000 personnes se sont rassemblées dans la capitale Sofia le 14 juin 2013 lorsque Delian Peevski, un magnat des média et membre du Mouvement pour les droits et des libertés (MDL), impliqué dans plusieurs scandales de corruption ces dernières années, a été confirmé à ce poste-clé après un vote en un quart d'heure et sans débat à l'Assemblée nationale.

La manifestation géante a été organisée en quelques heures à l'aide des réseaux sociaux et, malgré une pluie diluvienne, des milliers de personnes se sont massées [anglais] devant les bureaux du gouvernement. La province a aussi connu des manifestations. Et depuis, elles n'ont pas discontinué.

Thousands gather to protests in the streets of Sofia. (Photo used with permission)

Des milliers de personnes se sont rassemblées dans les rues de Sofia pour manifester. Photo du site web Saprotiva (Résistance). Avec permission.

Après le premier jour de ces manifestations inattendues, Peevski a annoncé être prêt à renoncer au poste [NdT : sa démission est intervenue le 16 juin].

Ce qui n'a pas empêché les manifestations de prendre encore plus d'ampleur les jours suivants. Le 16 juin, 15.000 personnes ont participé à un rassemblement contre le gouvernement du Parti socialiste bulgare et de son allié le MDL de la minorité turque, qui avait précédemment appuyé la nomination de Peevski.

Les manifestants mettent la pression sur le nouveau gouvernement, dont l'arrivée au pouvoir ne date que des élections du 12 mai 2013, qui ont suivi la démission du Premier Ministre bulgare Boïko Borissov en février. La chute de son cabinet résultait de la contestation généralisée contre les prix élevés de l'électricité, le faible niveau de vie et les multiples scandales de corruption. Ce mouvement encore frais, sans précédent en son temps, semble déjà éclipsé par l'immensité, encore plus grande, des manifestations actuelles.

Le blogueur et journaliste bulgare (et auteur pour GV) Ruslan Trad a confié [bulgare] sur Facebook ses observations sur les manifestants de cette nouvelle série :

Не мога да отрека едно много важно нещо за сегашните протести – профилът на недоволните е различен. Видях много мои любими хора, приятели, познати, някои от които никога не са протестирали. Представете си колко мотивация им дава правителството, за да излязат на улицата?

Je ne peux pas nier une caractéristique très importante des manifestations d'aujourd'hui : le profil des mécontents a changé. J'ai vu beaucoup de mes amis, de mes connaissances, dont certains n'avaient jamais manifesté. Imaginez quelle motivation leur a donné le gouvernement, pour qu'ils sortent dans les rues ?

La journaliste Louboslava Rousseva a donné son explication [bulgare] des événements et du passé de Peevski, marqué par une litanie de scandales et de polémiques :

Да се коментира този чудовищен цинизъм изглежда трудна задача, така че ще пробвам да загрея с някои факти от възходящата кариера на „силната ръка“.

„Капитал“ припомня, че най-големият скандал, в който е замесено името му към онзи момент, е свързан с приватизацията на столичната зала „Универсиада“ и спортния комплекс „Тотошанс“ в Златни пясъци.

Историята е следната:
Майката на Пеевски – Ирена Кръстева, е шеф на Българския спортен тотализатор. Покрай нея, синът се сближава със спортния министър Васил Иванов-Лучано. Така имотите се оказват апортирани от държавната фирма „Олимпика“ ЕАД в смесено дружество, в което участва частна фирма, свързвана със самия Лучано.

C'est un exercice difficile que de commenter ce monstrueux cynisme, je commencerai donc par un tour de chauffe avec quelques faits de la carrière de “Gros Bras”.

L'hebdomadaire bulgare Capital nous rappelle le plus gros scandale auquel Peevski a attaché son nom, celui de la privatisation de la salle Universiada à Sofia et un complexe sportif dans la station balnéaire des Sables d'Or.

L'histoire est la suivante :
La mère de Peevski est Irena Krasteva, la chef du Totalisateur sportif bulgare [la loterie nationale de Bulgarie]. Avec elle, Peevski est devenu un proche du Ministre des sports d'alors, Vasil Ivanov-Loutchano. Et voilà comment ces biens immobiliers se sont retrouvés séparés d'une entreprise d'Etat en faveur d'un partenariat public-privé, auquel participe une entreprise privée, avec le nom de Loutchano.

Ces dernières années, les scandales de corruption tels celui décrit plus haut par Rousseva sont devenus banals pour les Bulgares. Entre autres affaires du même genre, Delyan Peevski a été renvoyé en 2007 de son poste d'alors de vice-ministre de la gestion des catastrophes après une querelle de corruption. Comme l'avait alors rapporté Sofia Echo, Peevski avait été rétabli à son poste de juge d'instruction à Sofia par décision du Conseil supérieur de la magistrature le 14 novembre 2007. De quoi compendre les virulentes réactions des internautes à la nomination de Peevski à la direction de l'Agence de Sécurité Nationale.

A protester in Sofia carries a sign saying: "The lack of evolution in you leads to a revolution in us!" (Photo used with permission)

Sur la pancarte : “L'absence d'évolution chez vous mène à la révolution chez nous !” Photo de Ivaylo Nenov. Avec permission.

Une autre journaliste bulgare, Svetlana Georgieva, a déploré la nomination [bulgare] de Peevski dans un éditorial du quotidien Sega :

Най-тежките ни кошмари се сбъднаха. България вече не е демократична парламентарна република. След избора на Делян Пеевски за председател на Държавната агенция “Национална сигурност” (ДАНС), след най-вонящата сделка на века, България е с олигархично държавно устройство.

Un de nos pires cauchemars est devenu réalité. La Bulgarie n'est plus une république parlementaire démocratique. Après la nomination de Delyan Peevski comme chef de l'Agence de Sécurité Nationale de Bulgarie, après l'accord le plus répugnant du siècle, la Bulgarie est une structure oligarchique.

Christo Komartnitski, un des plus célèbres caricaturistes bulgares, a écrit [bulgare] sur Facebook:

Добре де, като се замислих, каква новина е, че мафията си има държава?

Eh oui, quand on y pense, ça c'est une nouvelle : la mafia a son pays.

Ivan Bakalov, rédacteur en chef de E-vestnik.bg, un organe alternatif de presse en ligne, a commenté [bulgare] dans un éditorial sur la classe dirigeante :

Те напълно изпариха впечатлението, че има нещо експертно в този кабинет. Дори някои министри заради избора на Пеевски станаха смешни и търпят негативи, че участват в този кабинет.
Умряха надеждите, че България има що-годе разумно правителство, което ще спасява страната след управлението на ГЕРБ.

Ils [les hommes politiques au pouvoir] ont totalement détruit l'impression qu'il y a la moindre compétence dans ce cabinet. Et même des ministres se sont ridiculisés avec la nomination de Peevski et souffrent du négatif auquel il participent dans ce gouvernement particulier.
L'espoir que la Bulgarie ait un gouvernement relativement sensé, qui sauve le pays après la direction par le GERB [le parti précédemment au pouvoir], est mort.

Et Bakalov d'ajouter :

Орешарски и БСП имаха звезден миг, който изпуснаха – можеха да се опънат на натиска на ДПС за Пеевски, с цената на отказ от правителство, нови избори наесен и т н. И щяха да оберат овациите и да получат подкрепа от избиратели извън своята периферия… Сега правителството е под въпрос. Не може да се предвиди кога ще има избори.

Le Premier Ministre Plamen Orecharski et le Parti socialiste bulgare ont eu leur moment de célébrité, et l'ont perdu : ils auraient pu résister aux pressions du MDL pour le choix de Peevski, au prix de leur démission et de nouvelles élections à l'automne. Et ils auraient pu être acclamés pour cela et en retirer un soutien d'électeurs hors de leur périmètre. A présent l'existence du gouvernement est mise en doute. Et impossible de prédire quand il y aura les élections.

De même que le gouvernement précédent avait démissionné et avait lancé des élections anticipées après des manifestations, la présente équipe, ou plutôt une partie de la majorité, le parti socialiste, semble faire l'objet d'une attente similaire. Certains, comme Bakalov déjà cité, sont révoltés que le parti socialiste semble céder à la pression du MDL, son partenaire de coalition, pour sauver le nouveau gouvernement. Les manifestations et le mécontentement massif contre le pouvoir ne sont pas près de cesser en Bulgarie.

Quelque chose de pourri au royaume des pétitions en ligne russes ?

vendredi 21 juin 2013 à 16:02

[Les liens renvoient vers des pages en russe, sauf mention contraire]

L’initiative soutenue par le gouvernement russe d'augmenter la participation aux décisions publiques à travers une procédure de pétitions en ligne [GV, en anglais], a été accueillie avec méfiance avant même son lancement en avril. Maintenant, près de deux mois plus tard, les blogueurs de l'opposition crient au scandale, affirmant que le processus a déjà été corrompu.

Les utilisateurs anonymes des forums de l’Initiative Publique Russe (RPI) ont d'abord attiré l'attention sur des falsifications présumées, des accusations reprises par le spécialiste de la e-démocratie Leonid Volkov, son ami Alexeï Navalny, et les principaux médias en ligne. Les utilisateurs du forum ont notamment remarqué une bizarrerie dans la manière dont les votes étaient attribués à une initiative publique populaire. Avec 48 000 votes, l'initiative qui prône la fin de la tolérance zéro du taux d'alcool dans le sang vient actuellement en second après celle d'Alexeï Navalny pour l'interdiction d'achat de voitures de luxe par les bureaucrates. Même si le projet occupe cette place depuis le tout début du processus, les blogueurs affirment que cette popularité est, au moins en partie, artificielle.

Volkov and Navalny at a 2011 rally. YouTube screenshot. May 29, 2013.

Volkov et Navalny au rassemblement de 2011. Capture d'écran de YouTube. 29 mai 2013.

La question atout d'abord était formulée sur les forums de RPI. Un utilisateur invité a écrit le 26 mai 2013 :

Между прочим, на сайте roi.f1p.net видно накрутку голосов по инициативе с отменой нулевого промилле (по моему предположению). Там видны очень четкие ступеньки, чередующиеся с ровными участками. [...] Ступеньки идут достаточно периодично, чтобы средняя скорость добавления голосов за час была без резких скачков.

Par ailleurs, sur le site roi.f1p.net on peut voir la falsification de l'initiative visant à abroger le taux d'alcool zéro (d'après moi) [note: "d'après moi" a été ajouté par l'administrateur du forum]. On peut clairement distinguer des hausses nettes suivies par des phases plus calmes. [...] Les hausses sont assez périodiques, de sorte que la vitesse moyenne de vote par heure n'explose pas.

Le site en question, roi.f1p.net, est est une tentative publique pour surveiller le processus de vote RPI, et assurer le suivi des principales initiatives en enregistrant les données de vote toutes les 10 minutes. Il permet aux utilisateurs de suivre ces données grâce à des graphiques dont ils peuvent déterminer le degré de détails, et en effet, si l'on regarde de près une période de 24 heures pour l'initiative anti zéro alcoolémie, la courbe présente parfois des motifs étranges :

A look at what the anti-BAC vote accrual looked like on May 4, 2013.

Vue des votes pour l'initiative zéro alcoolémie. 4 mai 2013. Sur roi.f1p.net

Les “escaliers” clairement visibles ci-dessus ne sont pas présents dans le graphique de vote pour le projet anti-voitures de luxe de Navalny, pour la même période :

May 4, 2013 votes for luxury car ban petition.

4 mai 2013 votes pour la pétition contre les voitures de luxe. Sur roi.f1p.net

D'où proviennent ces hausses mystérieuses? Elles perdent tout leur mystère quand les données sont analysées dans des graphiques par 10 minutes. Ce qui est précisément ce que Svetlana S. (probablement le même utilisateur invité que le premier à attirer l'attention sur le problème dans les forums RPI) a fait en envoyant ses résultats à Leonid Volkov, qui a publié un article sur son blog à ce propos le 28 mai :

Capture d'écran d'un graphique du 4 mai publié par Volkov sur son blog. Les barres bleues représentent les votes pour le projet de Navalny, les barres rouges sont des votes pour l'initiative zéro alcolémie. L'abscisse représente une périodicité de 10 minutes.

Ce tableau montre clairement que les fortes hausses dans le graphique de roi.f1p.net sont associées à un nombre relativement important de votes “supplémentaires” pour la mesure sur le taux d'alcool dans le sang, tous concomittants, presque une fois par heure. (Ce qui est moins clair en revanche, c'est la raison pour laquelle Volkov a oublié de mentionner l'axe permettant de déterminer le nombre de votes que les barres représentent. Les données disponibles ici, corroborent ceci et les autres graphiques publiés par Volkov. Le 26 mai, le pic de vote le plus haut était de 26 votes. De manière générale, lorsque des votes sont ajoutés, leur nombre est de 20. On observe la même chose pour une période de deux semaines correspondant aux “vacances de mai” en Russie, dont la période qui va du 1er au 9 mai, jour de la victoire. La dernière semaine de mai, les fortes hausses ont disparu du projet zéro alcoolémie, même si les données continuent à montrer une variation plus importante que pour les données du projet anti voitures de luxe.)

Il semble évident que quelque chose de louche se trame avec les votes du projet sur le taux d'alcool dans le sang. La véritable question est pourquoi. Tant Volkov que Navalny  sont généralement d'accord avec les dénonciations sur les forums RPI, où l'un des utilisateurs écrit :

Вероятно, хотят побыстрее продвинуть эту инициативу, т.к. вопрос по отмене уже решен и можно безболезненно показать, как они учитывают мнение народа (по моему предположению). А заодно уязвить Навального, который хочет, чтобы именно его инициатива первая набрала 100000 (по моему предположению).

Ils veulent probablement pousser cette initiative, puisque la question de l'abrogation est déjà réglée et ils peuvent montrer qu'ils sont à l'écoute du peuple (à mon avis). Et en même temps atteindre Navalny, qui voudrait que son initiative soit la première à récolter 100000 votes (à mon avis).

Volkov est d'avis que falsification qui a eu lieu après que le président Poutine eut signalé sa volonté d'aborder la question dans sa prestation du 25 avril 2013. Volkov a également déclaré que la pétition zéro alcoolémie rattrapait  la pétition des voitures de luxe, en termes de pourcentage, faisant paraître l'initiative de Navalny comme en danger d'être dépassée. Volkov et Navalny ont tous deux utilisé ce fait comme un moyen de susciter plus d'intérêt pour l'initiative de Navalny.

Malheureusement, ces arguments sont faux. Tout d'abord, s'il y a une tentative de gonfler le nombre de votes pour la pétition zéro alcoolémie, elle semble poursuivre l'objectif de faire correspondre le taux de croissance de l'initiative sur les voitures de luxe, plutôt que de ses effectifs globaux. En fait, comme on peut le voir sur le graphique ci-dessous, la relation entre les deux semble être assez constante dès avant le 25 avril, avec un écart d'environ 15000 voix  (le point sur ​​le rétrécissement de l'écart de Volkov est donc trompeur. Dans ce cas, le plus petit pourcentage d'un écart de 15.000 voix est de 15%) d'une part, la relation est presque trop constante – les deux courbes se succèdent avec une précision déconcertante, même compte tenu du fait que certaines personnes qui votent pour la pétition de Navalny votent aussi pour d'autres pétitions – mais d'autre part, il n'existe aucune preuve d'une tentative de battre Navalny à plate couture :

Graph of initiatives to ban luxury cars (orange) and repeal BAC laws (blue). From  roi.f1p.net.

Graphique des votes pour l'initiative visant à interdire les voitures de luxe (orange) et celle demandant l'arrêt de la loi zéro alcolémie (bleu) qui suivent la même tendance. Source: roi.f1p.net.

En réponse à un commentaire sur Twitter, Volkov a déclaré que les auteurs tentaient «peut-être» de garder la marge étroite en vue d'une hausse de dernière minute.

L'autre problème avec l'argument de Volkov est également lié aux données. Il se trouve que l'initiative visant à abroger les lois sur le taux d'alcool autorisé n'est pas le seul qui présente les mêmes courbes de progression étranges, comme nous l'avons vu ci-dessus. En effet, sur les neuf premières initiatives que le site roi.f1p.net ne mentionne pas, toutes (comme celle de Navalny) ont le même problème. Ces initiatives comprennent des causes bien disparates comme enterrer Lénine:

bury lenin

4 mai, projet visant à enterrer Lénine

et l'interdiction d'utiliser des gyrophares pour tous les véhicules sauf ceux des services d'urgence :

May 4 data for initiative to ban bureaucrats from using sirens on their cars.

4 mai, initiatives visant à interdire aux fonctionnaires d'utiliser leur gyrophare

En supposant que les données de roi.f1p.net soient correctes, le fait que toutes les grandes initiatives (à l'exception de celle de Navalny) partagent cette caractéristique rend moins probable le fait que les falsifications aient été effectuées en raison de l'accord tacite de Vladimir Poutine sur l'abrogation du degré zéro d'alcool dans le sang. Bien sûr, on pourrait dire que les autres initiatives sont simplement là pour faire entrer l'initiative de l'abrogation du zéro alcoolémie dans la tendance générale. Ce raisonnement est probablement plus proche de la vérité – le scénario le plus probable est que Initiative Publique Russe (un sous-traitant du gouvernement), face à un manque relatif d'intérêt pour son projet, ait tenté de truquer ses propres statistiques afin de s'attribuer plus de succès. L'initiative de Navalny leur fournit une ligne de base qu'ils peuvent utiliser pour simuler la croissance organique pour d'autres initiatives, et c'est ce qu'ils ont fait. La question qui demeure : pourquoi avec autant de nonchalance ?

Des équipements brésiliens pour mater les manifestants en Turquie

vendredi 21 juin 2013 à 15:39

Ce billet écrit par Bruno Fonseca et Natalia Viana, de Agência Pública, a été publié à l'origine sous le titre “Bomba brasileira na pele turca” (des grenades brésiliennes contre des Turcs), il fait partie d'une enquête spéciale sur le lobby et l'industrie des armes au Brésil #IndústriaBrasileiraDeArmas. Ce reportage fera l'objet de trois articles publiés sur Global Voices. Voici le dernier article de la série.

Voir les billets précédents : Des genades brésiliennes contre des Turcs et Le Brésil, un nouveau grand des armes non létales

Si l'on en croit son service de presse, Condor est la seule entreprise brésilienne qui vende des armes au gouvernement turc. Outre les projectiles à longue portée et la grenade “danseuse”, Condor propose des sprays de gaz lacrymogènes et poivrés, des bombes fumigènes, des balles en caoutchouc et des pistolets électriques incapacitants connus sous le nom de “tasers”. En 2011, elle avait confirmé des ventes d'armements pour des pays arabes tout en niant des ventes directes vers le Barheïn. On trouve parmi ses clients le gouvernement des Emirats Arabes Unis qui a envoyé ses troupes en appui à celui Bahreïn.

En avril cette année, Condor a signé un contrat d'une valeur de plus de 12 millions de dollars avec le gouvernement des Emirats pour la fourniture de 600 000 unités de munitions non létales. L'accord a été rendu public pendant l'exposition internationale défense et sécurité ( LAAD) à Rio de Janeiro en avril.

Moins d'un mois avant le début des troubles en Turquie, le gouvernement brésilien a organisé une rencontre d'entreprises nationales d'armement avec des acheteurs étrangers à Istanbul. Pendant l'exposition internationale sur la défense IDEF 2013, du 7 au 10 mai, l'agence brésilienne de promotion des exportations et des investissements (Apex Brasil) et l'association brésilienne des industries du matériel de défense et de sécurité (Abimde), dont le vice-président  Carlos Frederico Queiroz de Aguiar, est le président de Condor, ont occupé un stand de prestige dans le pavillon du Brésil.

Dans la zone réservée à Condor, on pouvait voir différents projectiles métalliques, des grenades et des boites de sprays colorés identiques à ceux qui seront utilisés, deux semaines après dans les rues de ce même pays. Sous le nom de l'entreprise en lettres rouges ont été exposées également les grenades “danseuses” et diverses “options de défense” (selon le jargon de cette industrie) comme 13 types de munitions incapacitantes de 40/46mm pour les lanceurs.

Estande da empresa Condor em pavilhão brasileiro na Turquia em maio de 2013. Alguns dos itens expostos são os mesmos que seriam utilizados contra a população em menos de mês depois/Agência Pública/Sob licença Creative Commons

Le stand de Condor dans le pavillon brésilien en Turquie en mai 2013. Des armes exposées ici seront employées contre la population moins d'un mois après. /Agence Publique/Sous licence Creative Commons

A une question portant sur des conditions spéciales octroyées en Turquie à Condor et aux autres entreprises brésiliennes, l'Apex n'avait pas donné de réponse au moment de la publication de ce reportage. Selon le journal turc Sozcu, le ministre du commerce Hayati Yazici aurait déclaré que pour les 12 dernières années, le pays aurait importé 628 tonnes de gaz lacrymogène et de spray au poivre provenant du Brésil et des Etats-Unis pour une valeur de 21 millions de dollars US.

En février de cette année, l'Abimde avait déjà participé à une autre foire d'armement, cette fois-ci à Abou Dhabi dans les Émirats Arabes Unis. Condor y avait de nouveau participé au titre d'unique entreprise brésilienne fabriquant des armes non létales.

L'usage des armes non létale remis en question au Brésil

Le Brésil a signé le 3 juin dernier un traité sur le commerce des armes (ATT, en anglais) devant l'organisation des Nations unies (ONU). Selon ce texte qui vise à l'élimination du commerce des armes aux fins de génocide, de terrorisme, ou de crime organisé international, “le commerce des armes conventionnelles à l'exportation devrait être réglé selon des critères rendant les tranferts plus transparents”.

Cette approche est une attitude nouvelle pour un pays qui évite la transparence quand il s'agit de vente d'armes brésiliennes… Le ministre du développement de l'industrie et du commerce extérieur a refusé de donner les nom des entreprises qui exportent des armes (il est vrai que le traité n'a pas de disposition spécifique sur le commerce des armes non létales).

Ministério do Desenvolvimento, Indústria e Comércio Exterior se nega a divulgar dados de empresas brasileiras que exportam armas/Agência Pública/Usado sob licença Creative Commons

Le ministre du développement de l'industrie et du commerce extérieur refuse de diffuser la liste des entreprises brésiliennes qui exportent des armes/Agence publique/ Photo utilisée sous licence Creative Commons

L'Inde met fin à son service de télégramme vieux de 160 ans

vendredi 21 juin 2013 à 12:38

(Tous les liens mènent à des pages en anglais)

La compagnie publique indienne de télécommunications Bharat Sanchar Nigam Limited (BSNL) a annoncé qu'elle cessait son service de télégramme vieux de 160 ans.

Malgré l'envoi quotidien de milliers de télégrammes, le service de télégraphe de BSNL enregistrait d'énormes pertes. L'année dernière les frais des télégrammes ont été révisés à la baisse afin de répondre aux baisses de revenus, mais cela n'a pas suffi.

Le service, qui est le dernier service de télégraphe à large échelle opérant dans le monde, s'arrêtera le 15 juillet 2013.

L'histoire du télégramme dans le pays remonte à 1850 lorsque le premier message télégraphique fut transmis entre Calcutta (maintenant Kolkata) et Diamond Harbour, une distance de quelque 50 km.

Le blogueur et journaliste Shivam VJ décrit l'état de quasi-mort du service :

À leur apogée en 1985, 60 millions de télégrammes étaient envoyés et reçus par an en Inde depuis 45 000 bureaux. Aujourd'hui, seuls 75 bureaux existent encore, même s'il y en a dans chacun des 671 districts d'Inde à travers des franchises. Et une activité qui jadis employait 12 500 personnes, n'en compte plus aujourd'hui que 998.

Indian Telegraph receipt dated somewhere around 1900-1904. Image from public domain via Wikimedia Commons.

Reçus de télégraphe indien datant de 1900-1904. Image du domaine public via Wikimedia Commons.

Il y a cinq ans, le blogueur et journaliste Sidin Vadukut avait prédit sur Live Mint le sombre avenir de cette activité. Comme les nouvelles technologies ont rendu les télégrammes redondants, le service court à une mort certaine.

De nombreuses personnes dans les médias sociaux se remémorent la riche histoire du télégramme.

Asha Perinchery se souvient de ces jours glorieux sur son blog :

Même pour mon mariage en 1983, je me rappelle n'avoir reçu que des télégrammes pour les vœux de la part de mes proches qui ne pouvaient pas assister à la cérémonie.

Michael sur Mobile Marketing Watch a affirmé que les SMS et les téléphones portables ont officiellement tué le télégramme. Plus de 900 000 Indiens utilisent désormais leur propre téléphone portable et 120 millions de personnes, Internet.

La compagnie de média MXM India écrit :

Les avancées technologiques ont vu la disparition des divers services commençant par T. D'abord le téléphone (non automatique) longue distance. Le télex et télétype, et maintenant le télégraphe.

D'autres réactions sont apparues sur Twitter. @TeeKay_Inc écrit :

@TeeKay_Inc : Fin d'une ère. Stop. L'Inde jette le télégramme au rebut. Stop.

Le journaliste de l'Hindustan Times Madhavan Narayan (@madversity) compare le coût des télégrammes et des smartphones :

@madversity : Dans les années 1960/70, cela coûtait 10 roupies pour un télégramme de deux mots du nord au sud de l'Inde. Maintenant, nous passons des appels vidéo presque gratuitement.

Le spécialiste de technologies ManasRM (@ManasRM) fait l'éloge du service :

@ManasRM : In memoriam du service de télégrammes de la Poste indienne – un porteur de bonnes ou mauvaises nouvelles dans mes années d'études.

Le statut des services de télégramme autour du monde est disponible ici.