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Brésil : les habitants de Rio demandent une amélioration de l'assainissement

mercredi 7 novembre 2012 à 19:44

[Les liens mènent à des pages en portugais]

Une des questions principales qui sera abordée lors du hackathon régional Développer l'Amérique Latine des 1 et 2 décembre 2012 est celle de l'assainissement. Il existe un projet au Brésil qui peut servir d'inspiration au développement de nouvelles plateformes.

L'initiative Saneamentro é Básico [L'assainissement c'est basique] a été lancée par l'association Meu Rio, dédiée à la participation des citoyens à la vie civique grâce aux technologies. D'après l'organisation : “La moitié de la population de Rio de Janeiro n'est pas encore raccordée aux réseaux d'eau et d'assainissement”, ce qui représente environ 3 millions de citoyens qui sont dès lors obligés de boire de l'eau sale ou de jeter les eaux usées directement dans les rivières, les lacs ou sur les plages de la Ville Merveilleuse”.

Meu Rio a lancé une pétition en ligne, accompagnée d'une vidéo “Eu quero 100% de #saneamentoparaorio” [je veux 100% d'assainissement pour Rio], qui présente les problèmes quotidiens auxquels sont confrontés les Cariocas.

 

L'effet “cocotte minute”

Une des plateformes de Meu Rio, a Panela de Pressão (Cocotte minute) donne la possibilité à tout citoyen ou à tout mouvement social de créer sa propre campagne de pression populaire, comme l'explique le site internet :

La recette est simple: vous désignez un problème, vous invitez d'autres personnes partageant les mêmes objectifs, et vous faites directement pression sur les politiques, les chefs d'entreprises, les fonctionnaires, par email, Twitter ou Facebook.

Les campagnes sur les problèmes d'assainissement à Rio de Janeiro ne font pas exception. L'une d'entre elles met en évidence le problème de débordement des égouts à la plage de São Conrado. La campagne, lancée par le mouvement Salvemos São Conrado [Sauvons Saint Conrad] qui a son propre blog et sa page Facebook avec 2 500 inscrits, s'appuie sur une analyse de la qualité des eaux des plages de Rio, faite par l'INEA (Instituto Estadual do Ambiente) [Institut régional pour l'environnement]. Cette analyse révèle:

Le Secrétaire de l'Etat de Rio de Janeiro à l'Environnement, Carlos Minc Sr est à l'origine de la Loi 2661/96 du 27 décembre 1996, qui exige un seuil minimum de traitement des eaux usées domestiques avant leur rejet dans les plans d'eau, afin de ne pas créer de risques pour la santé humaine et l'environnement. Mais le même autorise les institutions à contourner les normes, et ferme les yeux sur le mépris que cela représente pour le peuple carioca et l'environnement”.

Malgré la promesse du Secrétaire de l'Etat de Rio de Janeiro à l'Environnement de dépolluer la plage, Salvemos São Conrado dresse un état préoccupant de la situation actuelle:

Campanha "Salvemos São Conrado"

Campagne “Salvemos São Conrado”

Il y a plusieurs langues noires qui envahissent le sable en période de pluie, mais ce qui est le plus révoltant, c'est le rejet volontaire de toutes les eaux usées de la favela  de la Rocinha (…) depuis l'époque du gouverneur Garotinho. (…) A la même époque une station d'épuration a été créée, qui devait traiter des eaux usées avant leur rejet à la plage, mais Rio Aguas, qui est responsable de la station, ne fait pas son travail et rejette toutes les eaux sales dans la nature.”

 

Grâce à Panela de Pressão, 141 messages directs ont déjà été envoyés, exigeant “un accès au projet technique complet envisagé pour la dépollution de la Plage de São Conrado, et [la garantie que] les travaux commencent immédiatement”. Les messages ont été adressés aux responsables suivants :  Wagner Victer, Président de la CEDAE (Companhia Estadual de Águas e Esgotos) [Compagnie de l'Etat de Rio de Janeiro des Eaux et Eaux Usées], Carlos Alberto Muniz, adjoint municipal en charge de l'Environnement, à Carlos Minc, Secrétaire de l'Etat de Rio de Janeiro à l'Environnement, et à Rio Aguas, Fundação Instituto das Águas do Município do Rio de Janeiro [Fondation Institut des Eaux de la Ville de Rio de Janeiro].

Le journaliste Guilherme Ramalho nous rapporte un autre cas similaire à propos de la pollution de la baie de Guanabara.

Campanha "Poluição na Baía de Guanabara, nunca mais!" na Panela de Pressão

Campagne “Pollution de la baie de Guanabar, plus jamais!” sur le site Panela de Pressão

Le Programme de Dépollution de la Baie de Guanabara (PDBG) a été lancé lors de Eco+92. Sa mise en œuvre a commencé en 1994 mais le projet ne s'est jamais terminé. En vingt ans, la propreté de la baie de Guanabara est déjà passée entre les mains de six gouverneurs et a déjà coûté 1,5 milliard de Reais. Les eaux sales continuent d'être rejetées dans la baie sans pratiquement aucun traitement.

Maintenant le nouveau projet PSAM, programme d'assainissement environnemental des villes riveraines de la baie de Guanabara (Programa de Saneamento Ambiental dos Municípios do Entorno da Baía de Guanabara) prévoit un budget de 1,13 milliard de Reais pour la réalisation des travaux de traitement des eaux usées domestiques et pour des projets d'assainissement dans 15 villes riveraines de la baie.

Cherchant surtout à garantir que les solutions mises en œuvre permettront une “dépollution qui dure plus de 20 ans”, et qu'elles seront achevées en 2016, année des Jeux Olympiques à Rio, la campagne fait pression sur Carlos Minc, Secrétaire de l'Etat de Rio de Janeiro à l'Environnement, qui a reçu dans sa boîte 99 exemplaires du message suivant :

Nous souhaitons que le Secrétaire de l'Etat à l'Environnement diffuse le calendrier de mise en œuvre et les moyens annuels du programme PSAM, afin que la population, les universités et les médias puissent contrôler et garantir la réussite de cette dépollution.

Campanha "Não queremos aumento da tarifa da água!" criada por Nalva Pinheiro, moradora do Colégio

Campagne “Nous ne voulons pas d'augmentation du tarif de l'eau!” créée par Nalva Pinheiro, habitante du quartier du Colégio.

Bien que n'ayant pas atteint son objectif initial, une campagne qui vient de s'achever a retenu toute l'attention des médias. Cette campagne dénonce dans une vidéo une série de problèmes concernant les prestations de la CEDEA, et exige l'annulation de l'augmentation de 10 à 14% du tarif de l'eau, “tant que les problèmes ne sont pas résolus”:

C'est abusif de payer chaque jour plus cher, alors que la qualité du service diminue. Les factures sont erronées, ils nous coupent l'eau sans explication, souvent l'eau est sale, et c'est très difficile de parler avec eux au téléphone pour trouver une solution aux problèmes. Nous sommes mal traités à chaque fois que nous essayons. Sans parler des gens qui reçoivent des factures alors que l'eau n'arrive même pas chez eux, et qu'il faut payer quand même pour ne pas figurer sur une liste noire”.

Pratiquement 2 200 messages ont été envoyés à Ouvidoria et au Président de la CEDAE, mais, d'après le texte de la pétition ci-dessus, celui-ci a répondu que “il ne va pas revenir sur l'augmentation du tarif puisqu'il existe un décret signé il y a 12 ans autorisant la CEDAE à augmenter le tarif de l'eau sans passer par le contrôle d'une agence garantissant la qualité de service et la nécessité de réajuster le tarif”.

La pétition lancée par Meu Rio cite la campagne d'une citoyenne carioca. Cette campagne s'adresse au Gouverneur de l'Etat de Rio de Janeiro, Sérgio Cabral, et exige l'annulation du décret 25.997/200 [pdf] qui confère des pouvoirs au Président de la CEDAE considérés comme abusifs par l'organisation.

Guinée-Bissau : Frustration et perte de confiance de la population face aux désordres

mercredi 7 novembre 2012 à 19:27
Le 21 octobre, un violent incident est survenu dans une base militaire aérienne à l'extérieur de Bissau, la capitale de ce petit pays ouest-africain qu'est la Guinée-Bissau. Six personnes ont été tuées, et les images horribles de cadavres d'assaillants présumés ont circulé sur Internet.
Le lendemain deux hommes politiques critiques envers le gouvernement de transition du pays et des militaires ont été enlevés et battus. (Le gouvernement de transition est arrivé au pouvoir après un coup d'Etat militaire cette année. Ces violences ont eu lieu dans un contexte de doutes latents sur la transition négociée par la Communauté économique des états de l'Afrique de l'ouest (CEDEAO). (Pour plus d'informations, voir  le document de l'International Crisis Group ”Au-delà des luttes intestines : gérer la transition après le coup d’Etat en Guinée-Bissau” [en anglais].

Le gouvernement de transition n'a pas tardé à attribuer l'incident - qu'il a traité de tentative de coup d'Etat [en anglais] - à un ex-officier, Pansau N'Tchama, et à l'ingérence du Portugal. Cette photo supposée de son arrestation, sur laquelle il apparaît enveloppé dans le drapeau portugais et avec une corde autour du cou, a été partagée par les administrateurs de la page de l'hôpital national Simão Mendes. Le transfert humiliant de N'Tchama à Bissau, après son arrestation dans les îles Bijagos, a été prise sur vidéo par José Mussuaili.

Il est difficile de donner un sens à la situation sur le terrain, en particulier pour les médias traditionnels nord-américains, qui ont utilisé l'occasion pour ressortir le cliché de la Guinée-Bissau narco-Etat [en anglais].

Frustration et méfiance

Alors que les institutions internationales - l'UA (Union africaine), l'ONU et la CEDEAO, expriment leur “préoccupation” et organisent des réunions, il y a peu d'attention pour les préoccupations et les frustrations du peuple de Guinée-Bissau.

Fernando Casimiro, soutient sur son site web Didinho que:

"Symbolic burning of arms following Guinea-Bissau's civil war: Reform of the country's military remains vital for achieving political stability." UN Photo / Tim McKulka shared on Flickr by Africa Renewal (CC BY-NC-SA 2.0)

“Brûlage symbolique d'armes après la guerre civile de Guinée-Bissau : réformer l'armée du pays reste vital pour atteindre la stabilité politique.”
UN Photo / Tim McKulka sur Flickr par Africa Renewal (CC BY-NC-SA 2.0)

No caso da Guiné-Bissau, se não houvesse, ou se não houver Forças Armadas, haverá sempre outras “FORÇAS”, que estarão sempre armadas, com ou sem uniforme, ao serviço de quem se julga legitimado pelo poder. Não, a democracia na Guiné-Bissau, ainda não está preparada suficientemente, para “dispensar” quer seja o serviço das Forças Armadas Republicanas, quer de outras “FORÇAS” armadas que representam a salvaguarda dos interesses e do poder que políticos e governantes julgam pertencer-lhes pela legitimação através do voto popular.

Dans le cas de la Guinée-Bissau, même s'il n'y avait pas de forces armées, il y aurait toujours eu d'autres “FORCES”, qui seraient toujours armées, avec ou sans uniforme, pour servir quiconque se croirait être légitimé par le pouvoir. Non, la démocratie en Guinée-Bissau n'est pas encore suffisamment mûre pour être à l'abri des forces armées républicaines ou d'autres “forces” armées qui assurent la protection des intérêts et du pouvoir que les politiciens et les gouverneurs croient leur appartenir, par la légitimité que leur confère le vote populaire.

Ce n'est pas un hasard que les Guinéens aient partagé en ligne la chanson “Nkana Medi” ([nous ne sommes] pas effrayés) de Masta Tito, un rappeur guinéen [en portugais] qui a été catégorique dans sa demande de réforme de l'armée. Un article [en portugais] du sociologue Miguel Barros sur Buala en a partiellement traduit les paroles :

No ka na medi (…) / no karmusa no kansa / gosi i pa kada kin mara si kalsa / anós tudu i guiniensi / (…) bo gosta ó bo ka gosta n ka na para kanta pa nha povu [Nós não temos medo / Cansámo-nos de nos pavonear / Agora que cada um amarre as calças / Somos todos guineenses / (…) [Gostem] ou não [gostem], não vou parar de cantar para o meu povo] (Masta Tito, Nka Na Medi, registo sonoro, Bissau, 2012)

 Nous n'avons pas peur / nous sommes fatigués d'”attendre”/ maintenant chacun de nous se resserre la ceinture / nous sommes tous des guinéens / (…) Que vous le vouliez ou non, je n'arrêterai pas de chanter pour mon peuple

Dans les semaines qui ont suivi l'agression sanglante, le blogueur et journaliste Aly Silva a été, une fois de plus, une source essentielle d'information et d'analyse. Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) a signalé [en anglais] que Aly Silva avait été menacé par l'armée et était entré en clandestinité, et que le correspondant d'un média public portugais, Fernando Teixeira Gomes, avait été contraint de quitter le pays par un décret officiel du gouvernement de transition.

Aly Silva continue à écrire [en portugais] avec un ton de défi sur son blog, qui, dit-il, vient de franchir le cap des 5 millions de vues :

Olho e registo tudo. Depois escrevo, na certeza de que alguém me vai ler e comungar dos mesmos sentimentos. O meu blogue, tem sido acessado diariamente por milhares de pessoas. Ficará para a estatística. Teria preferido uma visita por dia, a ter de suportar milhares de pares de olhos tristes e enevoados: estão a matar-nos, estão a destruir as famílias, a tornar as crianças violentas.

Je regarde et enregistre tout. Par la suite, j'écris, dans la certitude que quelqu'un va lire et partager les mêmes sentiments. Mon blog a été visité quotidiennement par des milliers de personnes. C'est seulement quelques statistiques. J'aurais préféré avoir une visite par jour, que d'avoir à faire face à des milliers d'yeux tristes et embués : ils nous tuent, ils détruisent nos familles, ils rendent les enfants violents.

 Aly Silva a également publié un billet d'un invité sur son blog “Ditadura do Consenso”, qui réclame l'anonymat [en portugais] par peur - une sorte d'”Oscars” pour les meilleures performances des politiciens et des militaires, une analyse comique et triste de la situation.

Sur le blog Domadora Camalões la blogueuse Helena Ferro de Gouveia a écrit dans un billet le “sang versé (à nouveau) dans les rues de Bissau” [en portugais] [attention : images choquantes]

Os guineenses são pessoas e não uma abstração, ou uns “gajos habituados à violência”, num país tropical. Os guineenses merecem qualquer coisa chamada dignidade. Correndo o risco de me repetir: o mundo devia vir com uma errata.

Les guinéens sont des gens et pas une abstraction ou des “gars habitués à la violence”, dans un pays tropical. Les guinéens méritent tout ce qui s'appelle dignité. Au risque de me répéter: le monde devrait venir avec errata.

Un nouveau départ pour Barack Obama en Afrique ?

mercredi 7 novembre 2012 à 15:58

Alors que Barack Obama a été réélu pour 4 ans à la présidence des Etats-Unis, l'Afrique dresse le bilan africain de ses 4 ans à la tête d'une Amérique plus concernée par la crise économique que par ses relations internationales, surtout avec le continent africain. Les attentes des Africains étaient pourtant grandes, mais beaucoup pensent que le deuxième mandat du président Obama lui permettra d'avoir une marge de manoeuvre plus élargie sur les questions africaines.

Le Président américain Barack Obama marche avec sa fille Malia, et Michelle et Sasha Obama derrière eux durant leur visite de Cape Coast Castle au Ghana via pd2020@sbcglobal.net sur FlickR (CC license-NC-BY)

Adrien Hart, sur Slate Afrique écrit que le bilan africain du président Obama est plutôt mitigé. Il explique :

Visiblement peu à l’aise pour endosser l’habit du « gendarme du monde », il a géré les affaires du monde en bon père de famille, sans faire de vague.  Ses détracteurs lui reprochent un manque flagrant de leadership, ses partisans mettent en avant son humanité et rappellent que Ben Laden a été éliminé sous son mandat.

Avec lui, l’Amérique est devenue moins arrogante. Mais a-t-elle gagné en popularité dans le monde musulman et en Afrique? Pas sûr.

Bien sûr, concernant l’Afrique, Obama a essayé de se rattraper. En août 2010, il a reçu à la Maison blanche plus d’une centaine de jeunes Africains pour discuter de leur « vision de l’Afrique pour les 50 ans à venir », critiquant implicitement la génération des indépendances.

Cependant, beaucoup lui trouvent des circonstances atténuantes.  RFI rapporte que Nadine Gordimer, le prix Nobel de littérature sud-africain, pense qu'un mandat ne suffisait pas pour régler les problèmes du monde entier:

Dans un grand pays avec autant de problèmes, difficile de les régler tous en un mandat. Mais je pense qu'il a eu la bonne approche. Sa philosophie et son énergie vont globalement dans le bon sens. Et bien sûr, les Etats-Unis sont très importants pour le reste du monde. S'ils éternuent, c'est le monde entier, nous autres, qui attrapons une pneumonie. Je pense aussi qu'il a les bonnes idées en matière d'égalité, matérielle et dans les esprits.


Le discours d'Obama à Accra, Ghana en 2009 par L'expressmu

Ces critiques sont plus acerbes sur la stratégie d'Obama en Afrique. Gene Healy du Cato Institute (un thinktank libertarien) décrit ainsi l'action militarisée de l'administration américaine en Afrique:

Il y a quatre ans, peu de personnes auraient pu prévoir que l’un des héritages du président Obama serait une militarisation croissante de la politique étrangère américaine en Afrique – mais cela semble s’être réalisé. [..]

Faire la guerre de façon excessive est une stratégie qui conduit à des conséquences inattendues. Par exemple, l’intervention militaire américaine en Libye a nourri la guerre civile au Mali, les Touareg servant dans l’armée de Kadhafi ayant rejoint les combats après la chute du dictateur. Il n’est pas certain que la présence militaire américaine élargie en Afrique serve d’une quelconque façon les besoins de la Défense nationale américaine.

L'ambassadeur de la République du Congo, Henri Lopès, pense que les attentes placées par les Africains sur la politique d'Obama étaient injustifiées. Sur RFI, il affirme:

Il ne faut pas se faire d'illusions. Obama est le fils d'un Africain, mais Obama est américain. Son élection est historique dans un pays qui a connu l'esclavage et la ségrégation. Mais sur le plan de la politique, il s'agit de grands calculs d'intérêts.

A Kogelo au Kenya, Mama Sarah que Barack Obama considère comme sa grand-mère n'en a cure de ces critiques. Stéphanie Braquehais raconte comment elle a vécu la victoire de son “petit-fils”:

Sourire en coin, elle répond aux questions avec vivacité et humour. A chaque déclaration, elle plisse les yeux et donne parfois un coup de coude à son voisin. A aucun moment, elle ne dérive de son propos. C’est Dieu qui a permis cette victoire, elle refuse de parler « politique » et compte bien se rendre aux Etats Unis pour l’investiture.

 

Car l'élection de Barack Obama pour un second mandat interpelle toujours autant les jeunes Africains.  A Madagascar, des blogueurs se sont levés aux aurores pour suivre le verdict des élections en direct ensemble sur leurs écrans. Voici la vidéo de cette réunion par jiviard:

Car même si la déception envers le bilan africain d'Obama est bien réelle, les convictions politiques d'Obama semblent converger avec celle de la majorité des Africains. Les atomes crochus ne sont plus dus à ses liens familiaux avec le Kenya mais plutôt à un pragmatisme géopolitique et à des intérêts communs à défendre, comme le souligne Adrien Hart:

Obama, comme les Bush avant lui, n’a pas vu venir en Afrique l’«ogre chinois». Les Américains, tout comme les Européens, n’ont pas anticipé non plus la menace croissante des «fous de Dieu» en Afrique [..]Obama n’a rien pu faire pour contrer l’avancée des Chinois et des islamistes. Mais l’Afrique votera-t-elle en novembre pour son adversaire Mitt Romney, républicain, mormon et surtout immensément riche, sûrement trop riche? Sûrement pas. Oui, Obama a déçu. Mais l’Afrique ne veut pas qu’il parte. Sans lui, cela serait pire.

Brésil : Enseignante renvoyée pour avoir dénoncé la précarité des locaux scolaires sur Facebook

mardi 6 novembre 2012 à 23:18
Photo by teacher Uiliene Rosa shared 1,140 times on Facebook.

Élèves avec leur parapluie dans une salle de classe (12 octobre 2012). Photo de l’enseignante Uiliene Rosa partagée 1140 fois sur Facebook.

 

Uiliene Rosa a été congédiée après avoir utilisé les réseaux sociaux afin de dénoncer la précarité des salles de classe à Imperatriz au Brésil. Quelques jours plus tard, le maire a annoncé annuler la décision. [liens en portugais]

Chine : Un débat d'intellectuels sur Politique et Nobel de Littérature

mardi 6 novembre 2012 à 23:15

Conquête de l'espace, médailles d'or olympiques et développement économique ont propulsé à travers le monde l'image de la Chine pays puissant. Le fait pour la Chine d'avoir dépassé le Japon pour devenir la deuxième plus grande économie mondiale a donnné confiance au gouvernement chinois. Mais, dans le domaine de la culture et des arts, le pays restait à la traîne.

Beaucoup déploraient son incapacité à obtenir le Prix Nobel de Littérature malgré ses 5.000 ans de civilisation et d'histoire. Si les intellectuels favorables au pouvoir contestaient le jugement du comité Nobel, ils étaient aussi en quête de reconnaissance pour les arts et la culture chinoises de la part de l'ennemi occidental. Aussi, lorsque le comité a honoré cette année l'écrivain chinois Mo Yan, leurs coeurs, durcis par le long dédain du Nobel, se sont adoucis. Enfin le printemps ! [en anglais]

Mo Yan

Mo Yan. Photo par Isaac Mao sur Flickr. (CC: BY)

De nombreux commentateurs ont dit croire que le comité Nobel de Littérature n'avait été mu par aucune considération de politique internationale en prenant sa décision. L'écrivain chinois Guangdi a réaffirmé [en chinois] l'exploit littéraire de Mo Yan :

Mo Yan est probablement l'écrivain le mieux documenté et le plus travailleur de Chine. Il a expérimenté de nombreux genres différents. Son écriture est délirante, puissante, luxuriante et candide. Il est encore trop tôt pour dire si son oeuvre est profonde, c'est l'histoire qui jugera. Quoi qu'il en soit, il est prolifique et ses oeuvres sont de bonne qualité. Il continue à explorer de nouveaux thèmes et genres. En ce sens, aucun autre écrivain contemporain ne peut se mesurer à lui. Un grand écrivain doit intervenir dans la société et explorer la nature humaine. Le travail de Mo Yan et sa maîtrise de la langue sont pleinement reconnus.

Certains estiment cependant que Mo Yan est loin d'être un grand écrivain. Ainsi, le professionnel des média Kai Feng soulignait [en chinois] :

La littérature peut n'avoir rien à voir avec la politique, mais la politique envahit toujours la littérature. Nous sommes dans un pays qui mettait autrefois en avant que “la littérature doit servir l'ouvrier, le paysan et l'armée du peuple” et exerce toujours un contrôle total sur l'activité littéraire, comment la littérature peut-elle être détachée de la politique ?

De fait, à l'annonce du Prix Nobel de Littérature, le numéro huit de la hiérarchie chinoise Li Changchun, membre dirigeant du Comité central du Parti communiste chinois (PCC), a adressé une lettre de félicitations à l'Union des Ecrivains Chinois. D'où la question [en chinois] de Kai Feng :

Peut-on évaluer une oeuvre littéraire seulement par sa structure et syntaxe ? Ce qu'on appelle le “réalisme magique “? Qu'en est-il de son âme ? Sa relation avec la société ? Son humanisme et son aspiration à une société idéale ?

Les réticences de l'opinion envers Mo Yan viennent de ce qu'il est membre du PCC et de son passé de vice-président de l'Union des Ecrivains chinois. Ajoutez à cela le mécontentement provoqué par son refus d'assister à une réception à Francfort en 2005, pour la simple raison qu'y avait aussi été invitée l'écrivain dissidente Dai Qing. Et beaucoup trouvent la participation de Mo Yan à la recopie à la main du texte de Mao Tsé-toung “Causeries du Yan'an sur la Littérature et l'Art” [en anglais] en mai 2012, une action indigne.

Certains comparent même Mo Yan à Haruki Murakami, le célèbre écrivain japonais et autre candidat éminent au Nobel de Littérature, et soulignent le choix de Murakami de “se tenir du côté des oeufs plutôt que du mur” [c'est-à-dire du côté des opprimés].

L'éditorialiste de My1510.cn Zhu Zhenqiang défend [en chinois] la position de Mo Yan :

Mo Yan a été contraint de vivre dans une société politique fortement répressive et rigide. Pour survivre il lui faut être malin. Il est un reflet vivant de ceux qui nagent dans l'eau boueuse de ce système boueux.

Chen Geng, autre auteur sur my1510.cn est du même avis [en chinois] :

Ne soyons pas trop sévères avec Mo Yan. Tous les grands hommes ne sont que des hommes ordinaires et ont leurs faiblesses. Mo Yan est juste l'un d'entre eux.

Chen croit que le Prix Nobel de Littérature de Mo Yan mettra fin au débat entre Hu Shih, sous l'influence de la littérature occidentale, et Lu Xun, convaincu que la littérature doit être au service des opprimés, débat qui régit le développement de la culture chinoise contemporaine.

Quel genre de personne est Mo Yan ? Xi Wai, qui le connaît depuis que celui-ci était un jeune écrivain, a dit que si Mo Yan est très timide et n'aime pas parler, ce qui est exactement la signification de son nom Mo [Ne pas] Yan [Parler], il est aussi un grand frère qui fait rire ses amis, et se souvient [en chinois] du temps de leur jeunesse dans un village de la campagne :

Le Parti nous a envoyés partager la vie des paysans à Kuan Dian. Nous logions dans un foyer pour paysans, garçons et filles dans des dortoirs séparés. Avant de nous endormir, les garçons ont dit que Mo Yan prétendait que pour empêcher les puces de s'installer sur eux, ils devaient dormir nus et se balayer le corps le matin avant de s'habiller. Quel fou-rire ce soir-là dans la chambre des filles.

Que vous aimiez Mo Yan ou non, il est le premier Chinois à obtenir le Prix Nobel avec l'approbation du gouvernement chinois. Les informations selon lesquelles les écrits de Mo Yan vont entrer dans les manuels de l'école primaire, ou que la circonscription natale de Mo Yan va construire un parc à thème “Sorgho Rouge”, d'après un de ses romans pour attirer les touristes vont continuer à fleurir. Mo Yan et son Prix Nobel sont devenus une affaire publique qui continuera à alimenter des discussions passionnées dans les cercles tant de la politique que de la société.

My1510.cn a réuni les discussions sans précédent sur Mo Yan à partir du site web my1510.cn et les présente sur une page spéciale intitulée le Complexe du Prix Nobel [en chinois].