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France : Des ONG condamnent la privatisation du domaine public

jeudi 24 janvier 2013 à 21:12

Sept associations européennes défendant la culture libre ont émis une déclaration contre le partenariat entre la Bibliothèque nationale de France et la base de données privée Proquest qui vise à numériser un grand nombre de travaux appartenant au domaine public et à les privatiser durant une période de commercialisation exclusive de 10 ans. L’activiste Philippe Aigrain explique « la généalogie de ce désastre » sur son blog.

Espagne : Propositions sur Twitter pour un aéroport sans avions

jeudi 24 janvier 2013 à 21:09

[Sauf mention contraire, tous les liens de ce billet renvoient à des pages web en espagnol.]

Il est peu commun que les aéroports fassent la Une, si ce n’est lors d’une catastrophe aérienne ou quand les grèves du personnel les convertissent en purgatoire pour les usagers. Il y en a un pourtant, en Espagne, qui depuis son inauguration a fait couler beaucoup d’encre, aussi bien liquide qu’électronique : l’aéroport de Castellón.

El aeropuerto de Castellón al atardecer. Foto del blog #La Campana de la Vela

L’aéroport de Castellón à la tombée du jour. Photo du blog #La Campana de la Vela.

Cet aéroport fut conçu, comme tant d’autres chantiers publics absurdes, dans la décennie précédant le début de la crise. En mars 2011, il eut droit à une inauguration en grandes pompes par Carlos Fabra, président de la province de Castellón à ce moment, une semaine avant les élections municipales, même si aucun vol n’était prévu. En fait, les installations n’avaient même pas obtenu les licences autorisant le trafic aérien. 1500 personnes étaient présentes à l’inauguration, parmi elles Francisco Camps, alors président du gouvernement de la Communauté valencienne, qui a depuis démissionné après avoir été accusé de corruption. Les festivités ont été marquées par des moments frisant le grotesque, compilés dans cette vidéo réalisée par El Intermedio, le programme de La Sexta.

 

À la liste d’absurdités concernant cet aéroport, nous pouvons ajouter une erreur de construction qui rend la piste de décollage et d’atterrissage inutilisable, nécessitant une réparation avant de pouvoir s’en servir, ainsi que la sculpture pharaonique, érigée en hommage à Carlos Fabra, selon son auteur, se dressant au milieu du rond-point d’accès, qui a coûté 30 000 euros et n’a pas supporté l’humidité de la région.

Manchas de óxido en la estatua que preside la entrada al aeropuerto. Foto del blog Hits Book.

Tâches de rouille sur la sculpture qui orne l’entrée de l’aéroport. Photo du blog Hits Book.

Bien qu’elles ne soient pas opérationnelles, les infrastructures de l’aéroport représentent un coût annuel considérable, comme le détaille cet article d’Elplural.com :

Juan García Salas, directeur général d'Aerocas [la société publique chargée de la gestion de l’aéroport] a gagné, en 2011, 88 104 euros, à savoir bien plus qu’en 2012 où il avait touché 84 200. (…). Mais ce n’est pas tout. Les frais d’exploitation de l’aéroport de Castellón se sont élevé en 2011 à 6 484 935 euros. De cette somme, 5 092 596,22 euros (soit 78 %) ont été dépensés en publicité et relations publiques. Le reste a été utilisé pour des services professionnels indépendants (918 663 euros), pour payer le salaire des sept employés (368 865,49 euros), pour des travaux réalisés par d’autres sociétés (223 074 euros), pour d’autres services (129 430 euros), pour des loyers et taxes (23 412 euros), pour des services bancaires (23 006 euros), entre autres.

Carlos Fabra, politicien du Parti populaire et principal promoteur de l’aéroport, appartient à une famille de longue tradition politique de la région. Il a été président de la province entre 1995 et 2011. Il a démissionné de ce poste après avoir été assigné en justice en 2010 pour délits de corruption et trafic d’influence. Sa fille, Andrea Fabra, députée du PP, est devenue tristement célèbre l’été dernier, en criant « Qu’ils aillent se faire voir ! » [FR], quand le président Rajoy annonçait les nouvelles coupes budgétaires touchant les aides des chômeurs.

Il y a quelques jours, Carlos Fabra, qui préside Aerocas, a annoncé qu’un groupe d’entreprises de capital-risque avait fait une offre pour acheter l’aéroport pour 200 millions d’euros. Si l’opération n’est de loin pas aussi avantageuse que ce que les gestionnaires d’Aerocas veulent faire croire, elle reste une bonne nouvelle, vu le coût de maintenance des installations. Toutefois, cette information a surpris beaucoup de gens, puisqu’il semble que l’aéroport soit complètement inutile, soulevant des interrogations quant aux raisons pouvant pousser quelqu’un à le racheter.

Inauguración del aeropuerto de Castellón, con la asistencia de 1500 personas y la plana mayor del gobierno valenciano. Foto del blog La Mesa De Luz

Inauguration de l’aéroport de Castellón, à laquelle ont assistée 1500 personnes, dont le gouvernement de la Communauté de Valence. Photo du blog La Mesa De Luz

Voilà pourquoi, sur Twitter, le mot-clic #NuevosUsosAeropuertoDeCastellón [« Nouvelles fonctions de l’aéroport de Castellón »], s’est placé parmi les plus populaires le 10 janvier dernier. Les internautes l’ont utilisé pour proposer des idées innovantes. Eiryah Udhen et Eva considèrent de le consacrer au sport :

@Eiryah : Enceinte de qualité extraordinaire pour accueillir la Ligue des Champions de pétanque.

@evitalunera : Dès le 7 juillet, pour les fêtes de la San Fermín. [Tenues à Pampelune, dont le point d’orgue est un lâcher de taureaux.]

Marina Segovia et David Antonio Tomico se tournent plutôt vers l’art :

@marinuxy_94 : Une école destinée aux scuplteurs de figures d’aéroport

@DTomico : Un monument en hommage à la solitude

Jose Melchor Valero et Magnes proposent d’en faire un lieu récréatif :

@josemelchor1 : Lieu officiel de la Province pour l’organisation de botellón. [Grand rassemblement de jeunes amenant leurs bouteilles d’alcool pour faire un apéro géant.]

@ValNyx : Fumoir de cannabis, pour qu’au moins il y ait quelqu’un qui plane.

Marte con más tráfico aéreo que el aeropuerto de Castellón. Imagen de Cuánta Razón.

Mars - Plus de trafic aérien que l’aéroport de Castellón. Image de Cuánta Razón.

Javier Etxarri, Tanya G et ElNinjaDeLasGalletas penchent plutôt pour la faune :

@jetxarri : Il en faudrait un pour chaque province ! RT@quiquepeinado : Zoorruptacle, lieu d’élevage de personnes responsables de délits de corruption.

@TanyGomez : Escargodrome

@Chinobi_Ninja: et si à défaut d’avion on créait un Angry Birds à taille réelle ? Nous ne manquons pas de cochons à prendre pour cible…

Gorka Zumalabe et ManuMillán ajoutent une pointe de sarcasme :

@tormentad : Cela paralyserait l’activité habituelle de l’aéroport, vous êtes fous ! XD XD

@Manu_Millan :  Un cimetière de valises

DiQuijorna tient peut-être l’idée la plus révolutionnaire :

@JordiDiaz71 : On pourrait peut-être l’utiliser comme aéroport, puisqu’il semblerait que c’est bien la dernière chose qui soit prévue…

Cuba: La réforme de la loi migratoire enfin mise en place

jeudi 24 janvier 2013 à 15:06

[liens en espagnol, sauf mention contraire] Le 14 janvier 2013, est entrée en vigueur la réforme historique du système de migration [en anglais] qui devrait faciliter les entrées et sorties de Cuba.

D’après le journal en ligne Havana Times [en anglais], les citoyens cubains peuvent désormais faire une demande de passeport pour voyager hors du pays pendant deux ans, sans solliciter d’autorisation spéciale. La nouvelle réglementation supprime le “permis de sortie” et la “lettre d'invitation”,  préalablement requises, et assouplit les règles pour les professionnels de la santé et du sport et de ceux qui ont émigré illégalement. En outre, les motifs de rapatriement ont été élargis.

Pendant des années, la décision de quitter le pays, que ce soit temporairement ou de façon permanente, a fait l'objet de dizaines de billets dans la blogosphère cubaine. La mise en place de la réforme migratoire tant attendue pourrait mettre un terme à la décision déchirante de rester ou de quitter Cuba.

En août 2012, l'auteur de « Los otros ojos de Eva “ [les autres yeux d'Eva] évoquait les «missions internationalistes», les projets du gouvernement pour fournir une aide à d'autres pays, principalement  dans les secteurs de l'éducation et de la santé, lesquels représentaient aussi  un coup de pouce économique aux professionnels cubains. Cependant, Melissa Cordero (l'auteur du livre) nous rappelle aussi l'énorme coût humain de la séparation des familles pendant des années :

La niña apenas tiene cinco años y tú te asomas en la cuna a las tres de la madrugada e intentas grabarte sus detalles. El viaje será pronto. Cruzarás en Atlántico y la extrañarás de inmediato, a cada segundo y hasta en los sueños, y te parecerá verla cada vez que un niño africano, negrito y sucio, se te acerque en una consulta. (…) Las dudas te corren el cuerpo, estás indecisa y tu familia: sí muchacha, vete, nosotros te la cuidamos, y tu marido con el rostro compungido y sin decir palabra y el refrigerador medio vacío y las necesidades golpeándote la conciencia. El viaje será pronto. La comisión médica es sabia, pero tú no sabes si, cuando la niña crezca, te agradecerá los juguetes y el televisor de plasma y elmicrowave y la ropa que tiene de más, o te reprochará todas las horas de ausencias.

La fillette a à peine cinq ans et tu t’approches de son petit lit à trois heures du matin et essaies d'enregistrer ses traits dans ta mémoire. Le voyage approche. Tu traverseras l'Atlantique et elle te manquera tout de suite, à chaque seconde et même dans tes  rêves, et tu la croiras la voir chaque fois qu’un enfant africain, à la peau noire et sale, s'approchera de toi lors d'une consultation. (…) Le doute te court dans le corps, tu es hésitante et ta famille semble te dire: oui ma fille, vas-y, on va s'occuper d'elle et tu regardes ton mari, avec son visage triste et sans un mot à dire, et le réfrigerateur presque vide et leurs besoins tourmentant ta conscience. Le voyage approche. Le comité médical est sage, mais tu ne sais pas si, quand la petite fille grandira, elle te remerciera pour les jouets, la téléviseur à écran plasma, le micro-ondes et les vêtements qu'elle aura en plus, ou si elle te reprochera toutes les heures d'absence.

Dans un autre article douloureux, l'auteur se souvient du départ de son père à partir du port de Mariel:

Mi padre se fue en una balsa, una balsa construida con poliespuma y corcho, con lágrimas de noche, después de la comida, cuando era difícil conciliar el sueño con unos pocos granos de arroz en el estómago. Mi padre se fue por el Mariel, arrastró el bote por la acera y después por la calle de la escuela y pasó enfrente de la carnicería que estaba en huelga. Mi padre se tiró al mar, se empujó él mismo sobre las olas y se perdió en el horizonte dejándonos un puesto vacío en la mesa y las esperanzas de volver a llenar, muy pronto, las cazuelas. Mi padre se fue una tarde, hace algún tiempo, quizá un poco más y aún no hemos descubierto, exactamente, en qué lugar del Caribe lanzarle las flores.

Mon père est parti sur un radeau, un radeau construit avec de la mousse de polystyrène et du liège, les larmes aux yeux, après le dîner, quand il était difficile de dormir avec juste quelques grains de riz dans l'estomac. Mon père est parti de Mariel; il a tiré le bateau vers le trottoir et puis il l'a traîné le long de la rue de l'école et devant la boucherie, qui était en grève. Mon père s’est jeté en mer, a été bousculé par les vagues et s’est perdu dans l'horizon, nous  laissant une place vide à la table et l’espoir que les casseroles seraient très bientôt, remplies à nouveau. Mon père est parti  un après-midi, il y a quelque temps, peut-être un peu plus et nous n'avons pas encore découvert, exactement, dans quelle partie de la mer des Caraïbes, déposer des fleurs.

A compter du 14 Janvier 2013, les citoyens cubains pourront demander leurs passeports dans les bureaux de services des cartes d’identité et des registres de population, ainsi que dans ceux de la DIE (services d’Immigration et des étrangers), en cas de voyage hors de l’île sans qu'il soit nécessaire d'obtenir la permission du gouvernement.

Offices of Immigration and Naturalisation during the first day of the migration reform. Photo: courtesy of Jorge Luis Baños

Bureaux de services de l'immigration et de la naturalisation lors de la première journée de la réforme de l'immigration. Photo: courtoisie de Jorge Luis Baños

 

 

 

D'après un article du Havana Times, que cite le Bureau de services de l'immigration et de la naturalisation, un total de 195 sites ont été mis en place à cet effet.

Selon ce magazine numérique, “on estime que la réforme historique bénéficiera à un grand nombre de Cubains, qui, tant qu’ils peuvent financer leur voyage et obtenir un visa pour le pays de destination, pourront voyager à l'étranger avec beaucoup plus de facilité.” Toutefois, “cela ne signifie pas un exode massif de l'île. La grande majorité des pays exigent un visa d'entrée aux citoyens de la plus grande île des grandes Antilles.”

Quant à voyager aux États-Unis, un article publié sur le site Café Fuerte souligne :

 

Cuba permitirá que sus ciudadanos puedan viajar como emigrados y acogerse incluso a la Ley de Ajuste Cubano (CAA) en Estados Unidos sin perder sus derechos como residentes de la isla en un plazo de dos años, anunció un alto funcionario gubernamental.

Cuba permettra à ses citoyens de voyager comme émigrés et même de faire usage de la loi d'Ajustement cubain (CAA) aux États-Unis sans perdre leurs droits en tant que résidents de l'île pour une période de deux ans, a annoncé un haut responsable du gouvernement.

Mais, certains citoyens, parmi eux les athlètes de haut niveau, devront  toujours demander la permission de quitter le pays.

En outre, la loi comporte une sous-section qui a été contestée par plusieurs blogueurs. Fernando Ravsberg, auteur de Cartas desde Cuba (Lettres depuis Cuba, en espagnol), souligne :

El inciso “H” sin embargo, informa que tampoco podrán viajar “cuando por otras razones de interés público, lo determinen las autoridades facultadas”. Una curiosidad legal que no establece claramente cuáles pueden ser las “razones” ni cuáles son las “autoridades” (…) Semejante vaguedad da un poder absoluto a los funcionarios sobre el ciudadano. La escasez de maestros podría ser considerada una razón de interés público y el Ministerio del ramo puede sentirse la autoridad facultada para impedir el viaje de un educador.

La sous-section «H»,  cependant, déclare qu'il ne sera pas possible non plus de voyager “quand,  pour d'autres raisons d'intérêt public, les autorités compétentes l'ordonnent .” Une curiosité juridique qui n’établit pas clairement ce qui signifient les mots «raisons» ou “autorités” (…) Un tel vague donne un pouvoir absolu aux fonctionnaires sur le citoyen. La pénurie d'enseignants pourrait être considérée comme une raison d'intérêt public, ce qui permetrait au ministère compétent d'empêcher le voyage d'un éducateur.

Cependant, l'agence AP a publié un article [en anglais] révélant que «selon un informateur anonyme, différents directeurs d'hôpitaux ont tenu une réunion le samedi avec le Ministère de la santé, et ont été informés d'une résolution qui permettra une normalisation des voyages pour tous les fonctionnaires du secteur.”

Manoel Henrique Lagarde, à son tour, a commenté la situation de la blogueuse cubaine Yoani Sanchez :

A la salida de las Oficinas de Departamento de Inmigración y Extranjería del municipio Plaza de la Revolución en 17 y K en el Vedado, la bloguera, en declaraciones a la prensa extranjera, afirmó que había solicitado la confección de un pasaporte nuevo y que se le había informado que luego de 15 días laborables, el tiempo que demoraba la confección del documento, podría salir del país.

A la sortie des bureaux des services de l'Immigration et des Etrangers dans la municipalité de Plaza de la Revolución, 17 et K, El Vedado, la blogueuse, dans des déclarations faites à la presse étrangère, a confirmé qu'elle avait demandé un nouveau passeport et qu’elle avait été informée que, après 15 jours ouvrables, le temps nécessaire à la confection du document, elle pourrait sortir du pays.

Des centaines de médias étrangers ont rapporté l'information et certains utilisateurs d'autres pays ont célébré la réforme de l’immigration cubaine, tout en affirmant :

La tan esperada eliminación de las trabas impuestas durante décadas a los cubanos para salir de su país entró hoy en vigor, pero con un alto precio, cien dólares por pasaporte, el más caro de la región después de Chile.

Longtemps attendue, la suppression des obstacles bureaucratiques imposés pendant des décennies aux Cubains qui tentent de sortir du pays est entrée en vigueur le 14 janvier, mais avec un prix élevé, 100 dollars par passeport, le plus cher de la région après le Chili.

La télévision d'Etat cubaine a diffusé une émission avec plus de détails sur la réforme de l’immigration.

Rentrée politique mouvementée pour le porte-parole du gouvernement au Sénégal

jeudi 24 janvier 2013 à 14:06

Le mythe Abdou Latif Coulibaly s’est effondré.

Le nom du célèbre journaliste d’investigation sénégalais, devenu ministre de la Bonne Gouvernance et Porte-parole du Gouvernement du Sénégal, est sur toutes les lèvres. Sa récente sortie a suscité plus d’une centaine de commentaires sur Facebook. Il est reproché à cet ancien directeur de publication du magazine La Gazette d’avoir retourné sa veste de journaliste pour le bénéfice du pouvoir en place.

En effet, effectuant sa rentrée politique le 19 janvier 2012 à Sokone, sa ville natale située dans la région de Fatick, Coulibaly a rejoint par la même occasion le parti au pouvoir, l’Alliance pour la République (APR).  Pour sa rentrée politique, Coulibaly s’est attaqué au Mouvement du 23 juin (M23) et Y’en a Marre dont il s’est démarqué avec vigueur:

Je n’ai jamais été membre du M23. Jamais. J’ai combattu des idées sur la base d’un idéal bien avant le 23 juin. Des gens spontanément, à cause de l’évènement important, ont fait un travail remarquable au sein du mouvement du M23. Ils sont venus me trouver sur le champ de bataille. Je me suis lié avec eux dans une alliance. Personne ne peut prouver ma présence dans une réunion du M23.

Mouvement Y'en à marre - photo de l'auteur avec son autorisation

Mouvement Y'en à marre - photo de l'auteur avec son autorisation

Ce désaveu du mouvement citoyen n’a pas plus à bon nombre d’activistes politiques qui ont vigoureusement réagi sur Facebook. Les commentaires ne sont pas tendres avec le célèbre journaliste d’investigation qui a dénoncé plusieurs complots politiques du régime de Wade. C'est le cas du coup de gueule émis par Françoise Hélène Gaye, sur la page Facebook « Réhabilitons notre Sénégal » (RNS):

Le Sénégal est malade de ses “intellectuels” nous nous en sortirons le jour ou nous auront des concitoyens qui descendent en politique pour SERVIR et non POUR SE SERVIR. Triste scenario, triste argumentaire, je suis quand même déçue que vous soyez finalement comme tous les autres M. Coulibaly, votre silence depuis l'élection de Macky Sall, puis vous avez rué dans les brancards face aux dérives du nouvel homme fort, votre promotion et votre “sopalelikou” (changement)! Il y a tellement de choses à dire à M. le président ! Il y a tant de mauvais signes précurseurs et vous décidez de vous taire ? Êtes-vous déjà fatigué ? Je demeure convaincue que vous faites erreur M. Coulibaly avec toute l'admiration et le respect que je vous dois, et surtout ne crachez pas sur la soupe. Le M23, c'est l'ensemble du peuple sénégalais en réalité pas une poignée d'individus.

 

La critique de Françoise Hélène Gaye a aussitôt suscité plusieurs commentaires sur le page facebook du RNS. En deux jours (lundi 21 et mardi 22 janvier 2013), plus de 150 réactions ont été enregistrées sur ce que d’aucuns ont appelé un « lynchage médiatique » contre le porte parole du gouvernement, auteur de plusieurs livres dont le brulot « Wade, un opposant au pouvoir : l’alternance piégée » publiée en 2003. Fabienne Diop remarque que :

L’alternance piégée fut un chef d’œuvre mais je ne m’attendais pas à ce qu’il vienne à son tour, lui Latif, piéger notre nouvelle alternance,

 

Ibrahima Badiane est pour sa part plus acerbe, selon lui, Abdou Latif Coulibaly n’a aucune conviction en rappelant que l’an 2017 n’est pas loin, pour la prochaine présidentielle au Sénégal:

 Latif geumoul dara (pour dire en Wolof, il ne croit en rien). Tout ce qu’il faisait, c’était juste se construire un nom auprès des Sénégalais et se victimiser… Mais on a tout compris, 2017 soriwoul

 

Les internautes sénégalais qui ont réagi à ce forum reprochent à Abdou Latif Coulibaly d’avoir rejoint l’Alliance pour la République (Apr), parti du Président Macky Sall et « tourné le dos à la cause populaire » qu’il avait toujours défendu à l’époque du régime de Wade. Connu pour son combat d’alors pour la bonne gouvernance, Abdou Latif Coulibaly partage aujourd’hui le même gouvernement avec des gens qu’il avait indexé de malversations financières et de détournement de deniers publics lors de la troisième république.

Cependant quelques voix défendent le porte-parole, comme Ousseynou Diakhaté qui affirme :

Gueumoul dara (il n’a aucune conviction) parce qu’il est dans le Gouvernement, puis a choisi son camp politique ? Un larbin parce qu’il est porte-parole du Gouvernement ? Franchement Sénégal métina (il est dure de vivre au Sénégal)… Cela me fait penser à la chanson de Youssou Ndour, Woomat (Conduite) ».

 

La Sibérie du gaz, un Etat dans l'Etat

jeudi 24 janvier 2013 à 12:29

Quelque 90% [en russe, comme tous les liens sauf mention contraire] du gaz produit en Russie (et 22% de la production mondiale) provient de l'Okroug (district autonome) de Iamalo-Nenets (YaNAO) [fr], dans la partie Nord-Ouest de la Sibérie. Ces derniers mois, blogeurs et internautes russes se sont élevés contre les derniers en date d'une série de changements dans la réglementation des migrations internes à l'intérieur du YaNAO. Des endroits de l'Okroug (district) tels Novy Ourengoy et Salekhard, où se trouvent les grands gisements de gaz maintenant possédés par Gazprom, étaient des “villes fermées” durant l'ère soviétique, c'est à dire qu'il fallait une autorisation spéciale ne serait-ce que pour traverser la région.

Ces restrictions sont de retour. En réalité, de strictes limitations aux migrations étaient en place entre 2006 et 2012, mais les services locaux de la police fédérale ne les appliquaient pas. L'an dernier, le FSB a brièvement abrogé le code qui fixe les règles des “régimes frontières.” Mais en même temps, la police locale a créé un poste-frontière ouvert 24 heures sur 24 à côté de Novy Ourengoy, exigeant de ceux dépourvus de permis de travail ou d'invitation d'un résident qu'ils demandent une autorisation spéciale (dont l'obtention prend un mois).

Face à ces contradictions apparentes dse politiques locales, Vladimir Poutine a été appelé à la rescousse le mois dernier, lors de sa conférence de presse-fleuve à Moscou. Poutine a déclaré à un journaliste de Vologda qu'un afflux ingérable de travailleurs migrants et de drogues interdites avait nécessité des mesures plus strictes de contrôle frontalier. Le Président russe a alors souligné que la population locale est elle aussi en faveur du retour à une migration contrôlée vers et dans le YaNAO.

Péninsule de Yamal, Sibérie, 21 July 2009, photo Cliff Hellis, CC 2.0.

Au courant du mois, le Premier Ministre Dmitri Medvedev s'est rendu dans l'Okroug et  a réitéré l'appui de Moscou à ce confinement, suscitant un article dans le journal en ligne d'Ekaterinbourg Znak.com. Le texte a retenu l'attention de l'utilisateur de LiveJournal anti-Kremlin svobodoff, qui a blogué avec une certaine emphase que “le FSB  ferme Yamal à tous les Russes !” Svobodoff argue que l'appui de Poutine à la mesure est illégal, car le régime frontalier spécial du YaNAO enfreint l'article 27 de la constitution russe (qui garantit aux citoyens la liberté de circuler à l'intérieur du pays).

Selon svobodoff, le soutien du Kremlin aux restrictions migratoires est lié à la prédominance de l'activité gazière dans le YaNAO. Il cite en particulier un récent accord de coproduction de gaz liquéfié entre Alexey Miller de Gazprom et Leonid Michelson de Novatek par l'entremise de Poutine :

Кремлядь считает этот газ своим, а не граждан РФ. Поэтому Путин, Миллер и Михельсон обо всём договорились и газ уже поделили, не спрашивая граждан. Путин обеспечит закрытие региона-кормушки от лишних любопытных глаз, а Миллер и Михельсон обеспечат наращивание добычи.

Ces putes du Kremlin [kremliad] pensent que le gaz leur appartient, et non aux citoyens de la Fédération de Russie. Voilà pourquoi Poutine, Miller et Michelson se sont mis d'accord sur tout ça et se sont déjà partagé le gaz, sans demander [leur avis] aux citoyens. Poutine garantit la région fermée-mangeoire contre les yeux indiscrets, et Miller et Michelson fournissent l'intensification de la production.

Echo de Moscou a republié l'article de Znak.com article, attirant de nombreux commentaires de lecteurs qui font écho aux doutes de svobodoff sur les mesures frontalières. Vladimir Shilak, a ainsi proclamé que le Kremlin prépare un “embargo” national à fins de couper les relations avec les Etats-Unis et l'Union Européenne et instituer un nouveau “rideau de fer.”

Début décembre, cependant, les commentaires des lecteurs étaient beaucoup plus favorables à la suite d'un article de la Komsomolskaia Pravda  sur le régime frontalier de Novy Ourengoy, resserré après la révélation par un rapport du MVD local (la police) que la criminalité avait grimpé de 64% en un an dans la région. Les lecteurs du journal, par nature moins portés au libéralisme, soutenaient souvent avec enthousiasme la démarche des autorités, allant jusqu'à donner libre cours à des réflexions racistes à l'égard des travailleurs migrants d'Asie Centrale.

Un commentateur modérément raciste, par exemple, écrivait, avec une orthographe incertaine :

В Москве тоже надо так сделать. От приезжих только проблемы, и не только от кавказцев и азиатов, но и от русских из других регионов проблем не меньше. А пускать правелно толко по преглошению работодателя [sic].

Il faut faire pareil à Moscou. Avec les migrants on n'a que des problèmes, et pas seulement les Caucasiens et les Asiatiques — les Russes des autres régions ne font pas moins de problèmes. On ne devrait laisser venir les gens que sur invitations des employeurs.

A quoi, fidèle au chauvinisme russe, l'utilisateur Vasya a rétorqué sans égards :

Судя по грамотности вы сами из гастарбайтеров. А кто у нас громче всех кричит «Держи вора»?!

A juger par votre instruction, vous êtes un travailleur migrant vous-même. Et qui chez nous crie le plus fort “au voleur” ?

Commentant le billet de svobodoff, l'utilisateur de LJ Igor Eidelman a écrit qu'il s'est rendu récemment dans le YaNAO. A ce qu'il y a vu, les seuls étrangers là-bas sont hautement qualifiés : “foreurs,” “installateurs,” et “soudeurs.” Parce que l'industrie gazière peut se permettre de payer des salaires au-dessus de la moyenne pour les tâches subalternes, le besoin en travailleurs migrants bon marché est moindre dans le YaNAO, selon Eidelman, et les entreprises préfèrent embaucher des Russes.

Quoi qu'il en soit de la légalité des frontières intérieures ou de la réalité de la “menace toxicomane” des travailleurs migrants, une chose est sûre : l'indignation de RuNet contre une répression potentiellement anticonstitutionnelle de la liberté de circulation partage la scène avec une phobie tout aussi (sinon plus encore) virulente des travailleurs basanés du Sud. Que les travailleurs migrants soient ou non responsables de l'augmentation de la criminalité, la tendance populiste à accuser les étrangers est indéniable. Et c'est peut-être cela, bien plus que les gisements de gaz, que les autorités locales espèrent le plus exploiter.