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Les causes du déclin économique à Madagascar

vendredi 6 septembre 2013 à 15:02

A moins de deux mois de la date prévue des élections, plusieurs questions se posent sur l'avenir de Madagascar. Dans la première partie de l'analyse de la crise malgache, nous avons passé en revue les obstacles politiques à une sortie de crise durable. Dans cette deuxième partie, nous traitons du déclin socio-économique de l'île, les causes (qui ne sont pas forcément celles que l'on croit) et les solutions à envisager.

Le marché de Toliara - via wikimédia CC-NC-BY 3.0

Le marché de Toliara – via wikimédia CC-NC-BY 3.0

Impasse politique, Déclin économique

Dans la première partie, les évènements ont montré que la crise politique et l'abrupt déclin économique de Madagascar sont intrinsèquement liés. Cependant, ces 4 années d'impasse n'expliquent pas à elles seules la pauvreté chronique du pays mais nous examinerons cela plus tard dans cet article. Les conséquences de la crise politique sur la population sont indéniables. Madagascar est maintenant le pays pauvre au monde avec 90% de sa population qui vit avec moins de deux dollars par jour. Cette transition est déjà longue de 4 ans et elle s'éternise au détriment d'une population qui a hâte que le débat passe de “qui va gouverner” à “comment vous aller nous sortir de cette crise”, comme l'atteste cette vidéo :

Les statistiques sont irréfutables : les conséquences de la crise politique sur la population malgache sont tragiques et ont plongé la majeure partie de la population dans une misère sans nom. Le rapport de la banque mondiale détaille les différents secteurs frappés par cette crise:

Le nombre d'enfants non scolarisés a peut-être augmenté de plus de 600.000. La malnutrition aiguë des enfants reste un problème critique. Dans certaines zones, elle a augmenté de plus de 50%. De nombreux centres de soins de santé ont été fermés [..] es recettes fiscales sont en baisse, la fraude fiscale a augmenté, et la capacité à maintenir le niveau des dépenses globales est remise en cause [..] 60% de la récolte de riz est menacée. La crise politique représente un obstacle à la mise en place d'une réponse appropriée.

La crise (et ses responsables) a certes été nocive au pays mais les causes profondes du déclin de l'économie et de la pauvreté du pays ne se trouvent pas dans cet imbroglio. Après tout, la pauvreté chronique du pays date de bien avant 2009.

Les causes  de la crise et solutions à envisager 

Une étude menée par  Mireille Razafindrakoto, François Roubaud et Jean-Michel Wachsberger revient sur environ 50 ans d'histoire économique de Madagascar et tente d'en extirper les raisons d'un malaise économique permanent. L'article intitulé  “L'énigme et le paradoxe” (PDF complet de l'étude ici stipule qu'il n'existe pas de causes uniques identifiables pour expliquer ce déclin mais plutôt que l'instabilité sociale cyclique est dû à une fragmentation des classes et une inertie quant à une évolution vers une société plus inclusive.

Courbe de croissance du PIB de différents pays africains via la présentation publique de l'étude

Courbe de croissance du PIB de différents pays africains via la présentation publique de l'étude

En effet, l'étude met en avant la tendance naturelle à la centralisation et la personnalisation du pouvoir par les différentes instances dirigeantes dans la société malgache. Cette appropriation des pouvoirs combinée avec une isolation croissante des élites par rapport au reste du pays tend à favoriser l'instabilité politique et à “délégitimiser” les institutions. Ainsi l'étude stipule que :

Il résulte de ces éléments une coupure abyssale entre les élites et la population. Dans les grandes villes,
un tout petit groupe de privilégiés bénéficie de conditions de vie qui les rapprochent des citoyens des pays
développés (les “élites globalisées”) alors qu'une immense majorité de la population vit à un niveau de
subsistance et reste enfermée dans des trappes de pauvreté. [..]Les paysans malgaches et bien des travailleurs du secteur informel ne sont en effet véritablement « capturés » ni par le système politique – en dépit de la légitimité (ou du soutien de façade) qu’ils accordent a priori au détenteur du Fanjakana, ni par le système économique.[..] Parmi les pays où les mêmes questions ont été posées, Madagascar est celui où la légitimité des institutions (justice, police, administration fiscale) apparaît la plus faible. Cette situation, particulièrement inquiétante, témoigne de l’ampleur de la détérioration de la confiance dans l’Etat.

Une étude de la chercheuse américaine Charlotte McDonald appuie la notion que la séparation entre l'élite et la majorité de la population ne cesse de croître  L'étude sur le recensement à Madagascar suggère qu'une partie importante la population malgache n’apparaît pas dans les rapports de population. Cette situation ne peut qu’impacter négativement les actions de développement :

un vaste nombre de Malgaches est inconnu par l’Etat et ces gens sont forcément desservis. Ce n’est pas une exagération de dire que sans un recensement régulier, Madagascar ne pourrait jamais atteindre son potentiel

Un exemple symptomatique de cette appropriation par l'élite et du manque de considération de la population se trouve dans la gestion récente des exploitations minières.  Jean-Luc Hariniaina et Serge Zafimahova donnent le contexte du projet  d’exploitation d'ilménite dans la région de Manakara par Mainland mining Ltd:

La société MAINLAND a commis d’énormes irrégularités suite aux manquements constatés quant à l’application des Cahiers de Charges Environnementales (CCE) du projet et certainement à certains dispositifs des lois et textes réglementaires malagasy en matière d’environnement et d’exploitation minière [..] Suite à l’implantation de la société MAINLAND, la population de Manakara a tiré la sonnette d’alarme. Il existe une mobilisation du peuple Antemoro dont les pouvoirs traditionnels ou coutumiers et des entités et personnes de bonne volonté à lutter contre les fraudes à l’endroit des richesses du peuple malagasy et de la région de Vatovavy Fito Vinagny. Cette opposition a été déjà adressée aux dirigeants du régime actuel de transition en forme de résolutions écrites. Cependant, elle n’est pas reçu favorablement par les tenants du pouvoir actuel.

Un mécanisme pour une meilleure prise en compte des intérêts régionaux est donc à mettre en place de manière urgente.

Dans une étude sur le lien entre l'emploi et la pauvreté à Madagascar, Epstein et al. argumentent que l'accès à un emploi stable (hors du secteur informel) est une des clés d'un développement durable [en anglais] :

The study stresses the impacts on employment and incomes of improved access to credit by households, and by infrastructure investments in key sectors that can improve domestic linkages in the Madagascar economy. The study outlines policies that can be undertaken by the government and central banks, including loan guarantees, direct lending, and asset backed reserve requirements that can make financial assets more directly available to small producers and businesses.

L'étude souligne l'impact sur l'emploi et les revenus d'un meilleur accès au crédit pour les familles ainsi que des investissements structurels ciblés vers des secteurs spécifiques pour améliorer le lien entre les classes dans l'économie malgache. L'étude suggère les actions à mener par le gouvernement et la banque centrale qui comportent les conditions à poser pour les prêts, le crédit direct et la consolidation des actifs afin de rendre des ressources financières plus accessibles aux petites entreprises et agriculteurs.

L'étude de Mireille Razafindrakoto et al. met aussi l'emphase sur les liens à consolider entre l'Etat et la base pour les solutions à envisager en conclusion de leurs recherches :

L'usage de la violence par les factions d'élites assurerait la stabilité de leur pouvoir. Un tel schéma permettrait l'instauration progressive d'un ordre social stable, mais signifierait un abandon du processus démocratique. La seconde voie consiste en revanche à consolider les institutions citoyenne et stimuler la formation de corps intermédiaires pour (r)établir le chaînon manquant entre le sommet de l'Etat et la base [..] Cette seconde voie est selon nous possible, évidemment plus désirable, mais aussi plus difficile à emprunter et surtout nécessite du temps. Elle exige l'instauration d'un nouveau contrat social entre les acteurs en présence sur la scène malgache.

 

Colombie : Préparatifs pour un concert de casseroles national

vendredi 6 septembre 2013 à 12:19

(Tous les liens de ce billet sont en espagnol)
Un “cacerolazo” national était prévu à 18h (heure colombienne) ce mercredi 4 septembre 2013. Un cacerolazo est une forme de protestation populaire dans laquelle les personnes expriment leurs revendications en tapant dans des casseroles, poëles et autres ustensiles de cuisine dans le but de faire le plus de bruit possible.

Sous le mot-clic #CacerolazoPor, sur Twitter, les internautes expliquent pourquoi ils descendent dans la rue :

Paola Ochoa Rivera invite le mouvement à passer de sa forme virtuelle à une forme physique :

#CacerolazoPor manifester plus dans la rue et moins sur Twitter.

Tefy exprime ses espoirs pour une nation plus équitable :

#CacerolazoPor pour un pays plus juste.

Pendant ce temps, Tatu García invoque la dignité des Colombiens :

#CacerolazoPor la dignité de mon Peuple

Santiago évoque son désaccord avec les actions et les stratégies du gouvernement :

#CacerolazoPor le mauvais gouvernement de Santos et pour son abaissement face à l'empire et aux multinationales.

En outre, Stephanie affirme que la participation au “cacerolazo” est un acte de solidarité avec les paysans colombiens qui sont en grève depuis le 19 août :

#CacerolazoPor #YaEsHora Il est temps de montrer notre solidarité envers les paysans et leurs luttes légitimes, sortir des écrans et entrer dans la réalité VIVE LA GRÈVE AGRAIRE

Pour Camila Andrea, le mouvement appelle à travailler en vue d'un meilleur pays :

#CacerolazoPor avoir un meilleur pays pour tous et pour les générations futures !!

Enfin selon Catalina Gualdron, la manifestation se justifie par la réalité difficile de la vie quotidienne en Colombie :

#CacerolazoPor Un pays plein de mauvais services, dans la santé, l'éducation,l’ agriculture… #YaEsHora Il est temps que ça change !

Cependant, Juan Sebastián pense que tant de personnes utilisent le mot-clic “cacerolazo” uniquement pour que leurs tweets apparaissent en tant que favoris :

#CacerolazoPor En manque de favoris (?).

Et pour finir, le compte de Fuerza Común publie ce message :

#CacerolazoPor les rues, pour les trottoirs. Allons tous à l'encontre des politiques qui ont dépouillé la Colombie.  @PaisComun pic.twitter.com/VPDZuoE3gM

Restez connectés pour plus de billets concernant la grève agraire en Colombie, qui est active depuis déjà 19 jours.

Espagne : La police autorisée à utiliser des matraques extensibles

vendredi 6 septembre 2013 à 12:04
Tomado de la página web del Sindicato de la Policía de España.

Image tirée de la page web du syndicat de la police espagnole

[Les liens de ce billet renvoient vers des pages web en espagnol.]

La demande [PDF en espagnol], déposée en 2009 par le syndicat de la police, de disposer d’une nouvelle arme de défense vient d’être aprouvée par le Conseil de police espagnol. Elle réclamait d'ajouter à l’équipement des policiers une barre de fer dépliante (matraque).

Sur la page web du syndicat, nous pouvons lire qu’il s’agit d’une « arme mortelle » dont « tous les fonctionnaires de police connaissent les bénéfices ». Des bénéfices largement discutables puisque l’utilisation de la matraque peut entraîner de graves blessures si elle n’est pas contrôlée, raison pour laquelle le communiqué annonce que les agents recevront une formation spécifique au maniement de cette arme.

Selon les affirmations du syndicat, les agents anti-émeutes n’utiliseront pas ce type d’arme, car cette division emploie d’autre techniques de défense spéciale pour ces situations, comme nous pouvons le voir dans la vidéo suivante :

En Espagne, le budget alloué à la vente de matériel anti-émeute a été multiplié par 18 en une année, passant de 173,670 euros en 2012 à 3,26 millions euros en 2013, comme l’indique le détail des achats sur le site web El BOE nuestro de cada día, où sont publiées et analysées les annonces quotidiennes les plus intéressantes du Bulletin officiel de l’État [BOE en espagnol].

Sur les réseaux sociaux, les citoyens expriment leur doutes :

La police va acheter des matraques extensibles pour augmenter la sécurité des agents. De quoi ont-ils peur ? via @publico_es

Voilà comment le gouvernement utilise notre argent, en ajoutant ironiquement que c’est pour une meilleure sécurité des agents. Pour frapper…http://t.co/hH677XVYB6

Les policiers reçoivent des matraques extensibles pour leur sécurité… Et que reçoivent les citoyens pour la leur ? Des policiers ?

 

“Le calme règne à Damas” : la Syrie vue par les Russes

jeudi 5 septembre 2013 à 16:35
A video of a Syrian market shown on Russian news channel NTV on September 3, 2013. The footage was presumably taken by Anhar Kochneva. YouTube screenshot.

Un marché en Syrie, montré par la chaîne russe d'information NTV le 3 septembre 2013. Probablement filmé par Anhar Kochneva. Capture d'écran de YouTube.

En Russie, le soutien au régime de Bachar al-Assad transcende les lignes politiques. La profonde méfiance envers les motivations d'une intervention militaire occidentale, se combinant à une histoire intérieure de mouvements rebelles Islamistes, conduisent même les opposants les plus invétérés du Kremlin à voir le conflit syrien avec les yeux de Vladimir Poutine. Ainsi Maria Baronova, une militante d'opposition actuellement jugée pour sa participation l'an dernier à un rassemblement qui a dégénéré en violences, a tweeté ceci sur les attaques chimiques du 21 août à proximité de Damas :

Messieurs, je l'espère, tout le monde se rend compte que l'histoire d'utilisation d'armes chimiques est une sorte d'obscur montage américain ?

Baronova tenait probablement ses informations du photographe Sergueï Ponomarev, qui se trouvait à Damas pendant les attaques et a tweeté peu après, en contestant les mentions par MSF de victimes de gaz toxiques :

@AltePute @ponny1 J'ai été dans trois hôpitaux, on m'y a dit qu'il n'y avait pas de victimes. si quelqu'un sait avec quels hôpitaux MSF travaille, j'irai voir

Autre Russe tweetant de Damas, la journaliste de la Komsomolskaïa Pravda Nigina Beroeva doute également de l'usage d'armes chimiques :

@madoleroyer nous y étions, si l'attaque était assez forte pour que 1300 personnes périssent, le gaz serait arrivé jusqu'à nous

Beroeva a ensuite cité une source locale :

J'ai parlé à un homme qui habite avec sa famille à côté de la zone de combats. Il dit qu'il n'y a pas eu d'armes chimiques, ils l'auraient ressenti.

A côté des journalistes comme Beroeva et Ponomarev, qui font d'assez courts séjours en Syrie pour leurs reportages, il y a des blogueurs russes qui vivent et bloguent réellement dans le pays. A l'instar de l'opinion russe, ces blogueurs soutiennent le pouvoir d'Assad. La plus en vue est sans doute Anhar Kochneva, une Russo-Palestinienne qui habite Damas. Elle travaillait dans le tourisme avant le début du conflit, mais n'a pas tardé à écrire sur la guerre civile pour un lectorat russe. Elle a gagné une notoriété particulière l'an dernier, lorsqu'elle a été enlevée par des rebelles supposés [russe], passé 152 jours en captivité, avant de réussir à s'échapper par ses propres moyens.

Malgré son expérience plutôt négative du conflit syrien, Anhar Kochneva tient à rassurer [russe] ses lecteurs sur la stabilité du régime :

Ничего плохого не происходит. Люди ходят в кафе и рестораны, шастают по магазинчикам и даже посещают достопримечательности. Давайте, будем показывать ПРАВДУ. А не делать все, чтобы во всем мире сложилось впечатление. что в Сирии камня на камне не осталось!

Il ne se passe rien de mal. Les gens vont dans les cafés et restaurants, font les magasins et même du tourisme local. On doit dire la VÉRITÉ. Et pas faire tout, pour que le monde entier ait l'impression qu'en Syrie il ne reste plus pierre sur pierre !

Le 29 août, lorsque le monde s'attendait à des bombardements imminents contre Assad, elle écrivait [russe] :

Хомс, Хама, Тель-Калях, Месьяф, Беньяс, Джебла, Латакия, Тартус… ВЕЗДЕ ВСЕ ПОД КОНТРОЛЕМ ГОСУДАРСТВА. В Дамаске все тоже спокойно.

Homs, Hama, Tell Kalyah, Masyaf, Banias, Jableh, Lattaquié, Tartous… TOUT EST SOUS CONTRÔLE DU GOUVERNEMENT. A Damas aussi tout est calme.

Beroeva et Ponomarev semblent d'accord sur tout. Beroeva a tweeté peu après les attaques au gaz :

Vous ne le croirez pas, mais le calme règne à Damas. Les gens sont assis dans les cafés, marchent dans les rues, loin de l'hystérie du reste du monde

Ponomarev dit aussi que le pays est pratiquement “inchangé” depuis 2009, tout en plaisantant sur les vertus de la guerre qui font chuter les prix des chambres d'hôtel sur place :

Les hôtels à 300€ la nuit du centre-ville coûtent maintenant  50 à 70$, un dîner à trois avec le vin 20$

Un récit qui sonne familièrement à des oreilles russes : le conflit, dépeint de cette manière, évoque moins une guerre totale que la violence à bas bruit du Daghestan et de l'Ingouchie. Certes il y a des bandits/terroristes/rebelles/djihadistes, mais ils sont loin, isolés géographiquement. Il y a effectivement des morts, mais 90% de la population n'est pas touchée, ou seulement dans ses projets de vacances par une opération militaire près d'une station de villégiature. Cela, les Russes connaissent et compatissent.

La campagne ‘Dark is beautiful’ contre les préjugés liés à la couleur de peau en Inde

jeudi 5 septembre 2013 à 12:10

[Billet d'origine publié le 28 août 2013 - Les liens renvoient vers des pages en anglais]

En Inde, un mouvement promouvant la beauté de toutes les couleurs de peau s'en prend à l’obsession de la peau claire qui règne dans le pays.

Dark is beautiful [Sombre, c'est beau] créé par un groupe de femmes en 2009, a repris son élan en 2013 particulièrement depuis que l'actrice et réalisatrice Nandita Das [fr] est devenue l'ambassadrice de la campagne. Nandita Das, qui a critiqué les préjugés contre la peau sombre au cours des dernières années, promeut activement cette cause à travers des entretiens sur les médias sociaux et avec les principaux médias.

Le désir en Inde d'une peau plus claire est nourri par une perception diffuse qu'une peau mate est repoussante et “inférieure”. Non seulement une peau claire est perçue comme un marqueur de beauté mais aussi comme un élément essentiel de confiance en soi, réussite et bonheur.

Et les marques ont été promptes à exploiter cette ferveur, vendant crèmes, lotions, savons, cosmétiques, et produits d'hygiène personnelle promettant de blanchir la peau. Cette industrie rapporte plus de 400 millions de dollars par an, plus que la vente de Coca-Cola et thé en Inde, d'après le magazine The Atlantic. Une application Facebook promouvant un produit éclaircissant la peau à provoqué des controverses il y a quelques années (voir l'article de Global Voices).

La communauté bengali en Inde en est venue à calibrer précisément la gamme des teints, et peu importe que le reste du monde considère la plupart des Indiens comme ayant une peau mate. Aussi, on peut trouver des mentions comme ‘très clair', ‘clair pâle', ‘doodhe-aalta’ (un terme bengali particulier utilisé pour décrire un teint rosâtre, un rose obtenu quand une goutte de teinture rouge est ajoutée dans le lait), ‘teint couleur blé', ‘teint clair brillant et éclatant', jusqu'à sombre, ‘ujjwal shyambarna’ (encore un terme particulier, faisant référence à la peau mate gris bleutée, généralement vue dans l'iconographie Vishnu/Krishna) jusqu'à ‘koochkooche kaalo’ ou peau de couleur très noire.

Récemment cependant, des appels ont été lancés pour abolir les préjugés liés à la couleur de la peau, pour tendre vers une conception plus inclusive de la beauté, sans liens grossiers avec la confiance en soi et  la réussite. La campagne ‘Dark is beautiful, explique pourquoi un changement est nécessaire :

Dark is beautiful est une campagne de prise de conscience visant à attirer l'attention sur les effets injustes des préjugés liés à la couleur de peau et qui célèbre aussi la beauté et la diversité de toutes les couleurs de peau.
Lancée en 2009 par Women of Worth [Femmes de valeur], la campagne défie le stigmate qui lie valeur et beauté  (en Inde et de par le monde) à la blancheur de peau. Cette croyance, nourrie par des comportements sociétaux et renforcée par les messages des médias, ronge la confiance en elles mêmes d'innombrables personnes, jeunes et plus âgées.

Indian Actor-Director Nandita Das has spoken up against skin colour bias in the Indian society. Image from the Facebook Page of the Dark Is Beautiful Campaign

L'actrice-réalisatrice indienne Nandita Das s'est engagée contre les préjugés liés à la couleur de la peau dans la société indienne. Image de la page Facebook de la campagne

La campagne est activement promue à travers les médias sociaux et a attiré l'attention des principaux médias.

Sur Twitter, leur message était fort et précis :

Dites NON à la stupidité et à la coloration…

Une vidéo a été diffusée le 15 août 2013 appelant les Indiens à “célébrer la fête de l'Indépendance avec 1,2 millions de nuances de beauté”.

Voici la vidéo téléchargée par la campagne “Dark is beautiful” célébrant la diversité des couleur de peau en Inde :

La campagne a produit beaucoup de discussions en ligne. Des tweets montraient certaines des pensées – allant de débats concernant les comportements à l'égard de la blancheur et des produits blanchissant la peau aux espoirs que la campagne puisse améliorer la façon dont les gens voient la beauté et engagent une discussion qui aidera à soulager les atteintes liées à la couleur de peau.

Depuis Kolkata, Sandip Roy (@sandipr), rédacteur culturel au Firstpost.com, écrivait :

66 ans après l'Indépendance l'Inde est toujours avide du Claire et jolie, pas du Sombre et beau. David contre Goliath

L'ingénieur informaticien, consultant en gestion et spécialiste de la santé Parul Batra (@parul_batra) rappelait sur Twitter que les produits éclaircissants sont de juteuses affaires lucratives :

Le marché de la crème blanchissante est de 432 millions de dollars en Inde, plus important que le coca cola et le thé. Abandonnons cette obsession stupide. Soutenez http://t.co/A4fZGZDK8h

Depuis Mumbai, le réalisateur de film Shekhar Kapur (@shekharkapur) accusait aussi les publicités :

Les crèmes blanchissantes répondent-elles seulement à une demande ? Pourquoi leurs publicités essaient-elles ensuite de nous faire sentir mal par rapport à notre couleur de peau ? Elles créent la demande

Depuis Delhi, le journaliste et spécialiste des technologies Madhavan Narayanan (@madversity) publiait le tweet :

Les crèmes bronzantes encourent une juste critique. Les crèmes blanchissantes méritent au mieux de l'humour noir

Cognitive Dissonance (@_HJ86) résidant à Mumbai mettait en évidence l'hypocrisie des publicités de crèmes blanchissantes :

Nous vivons dans un monde où la crème blanchissante est commercialisée de manière agressive et l'on attend des gens qu'ils ne soient pas racistes sur la couleur @madversity

Depuis Trivandrum, Lilly (@lillyvgp) nourrit de grands espoirs :

J'espère sincèrement que la campagne de Nandita Das “Dark is beautiful. Stay unfair campaign” deviendra une grande réussite pour qu'au moins mes petits-enfants ne soient pas confronté au racisme.

Skin color bias is an issue in India. Image by Zippora Madhukar Photography for Dark Is Beautiful Campaign.

Les préjugés liés à la couleur de peau sont un problème en Inde. Image de Zippora Madhukar Photographie. CC BY-NC-ND 3.0

La campagne  tente aussi activement d'interpeller les ambassadeurs et les marques commerciales des produits de blanchissement, les appelant à abandonner les publicités avec l'argument que la peau de couleur claire est une nécessité pour réussir. Une pétition en ligne a été lancée pour appeler l'entreprise de cosmétiques Emami à retirer leur dernier produit commercial pour la crème Fair & Handsome dont l'ambassadeur est la superstar de Bollywood Shahrukh Khan. D'après les responsables de la campagne :

Cette pétition est la dernière initiative de la campagne Dark is beautiful. Depuis 2009, la campagne encourage les femmes et les filles à voir “La beauté au-delà de la couleur”. Désormais, avec cette pétition sur change.org, nous nous adressons aux hommes et aux garçons, qui sont aussi les cibles de la publicité “peau pas blanche”.

Vous pouvez trouver plus de détails concernant la pétition ici. Suivez le blog, le compte Twitter et la page Facebook de la campagne.