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Mashrou’ Leila de retour sur la scène pour #OccupyArabPop

lundi 14 octobre 2013 à 22:33
Mashrou’ Leila on stage in Metropolis, Montreal. Photo credit: Mashrou’ Leila's Facebook page.

Mashrou’ Leila sur la scène du Metropolis, à Montréal.
Crédit photo: page facebook de Mashrou’ Leila

Connaissez-vous Mashrou’ Leila ou #Mashrouleila? C'est un groupe de musique alternative libanais, créé en 2008, qui a démarré en juillet dernier son propre mouvement #occupy et une nouvelle façon d'utiliser les plateformes de réseaux sociaux pour réunir les fonds nécessaires à la sortie de son troisième album Raasük. Impressionnant.

Ses membres sont des gourous des médias sociaux et des acteurs du changement. En juillet, ils ont démarré une campagne pour réunir les fonds nécessaires à leur troisième album. Ils voulaient en faire la sortie d'album la plus remarquée du monde arabe. Leur mot d'ordre était #OccupyArabPop. Entre juillet et août le mot-clic est devenu viral. Mashrou’ Leila a réuni plus de 60.000 dollars pour boucler son budget prévisionnel.

Le succès de cette campagne de Zoomal est à l'origine d'une nouvelle expérience arabe et d'une nouvelle campagne sur Twitter #supportArabcreativity (soutenez la création arabe). Le projet compte identifier les artistes underground arabes tels que Mashrou’ Leila et leur donner une plus grande reconnaissance auprès d'un public plus vaste.

Mashrou’ Leila affiche sa différence avec la musique pop arabe grand public, et revendique son caractère alternatif. Ses membres sont jeunes et cosmopolites. Ils ne ressemblent à aucun  autre groupe et sont audacieux et innovants.

Le groupe est actif sur les réseaux sociaux et est pour le changement. Il publie régulièrement sur sa page Facebook et sur Twitter. Il a plus de 120.000 fans sur Facebook, 14.000 personnes le suivent sur Twitter et sa chaîne YouTube a plus de 16.000 abonnés.

Encore maintenant, un ou deux tweets par minute arrivent sur le mot-clic #occupyArabpop pour soutenir la campagne réussie de collecte de fonds ou féliciter le groupe qui a changé la scène de la musique “alternative” du monde arabe. Son expérience de collecte de fonds est unique et innovante. Le groupe a de l'avance.

Un fan de Paris a récemment twitté :

Avec @mashrou3leila j'ai redécouvert ce que c'est que d'être un fan. A la semaine prochaine à Paris #occupyarabpop

Randy, du Texas, et fondateur de @The_gay_agenda, compare Leila à U2 en Irlande:

C'est vrai que @mashrou3leila est le U2 de la pop arabe ; sans doute parce que le Liban est l'Irlande du Moyen Orient #occupyarabpop

La vidéo suivante était en téléchargement pour la campagne. Elle présente des impressions de journalistes libanais et de collaborateurs de Leila production ainsi que les histoires du nouvel album vues par les membres du groupe.

Ibrahim Nehme, qui écrit dans Outpost magazine et est basé à Beyrouth parle du groupe dans la vidéo [arabe] :

بالعالم العربي هلا ,هن من الأصوات التي أكثر عم بيمثلوا شباب و عم يقدروا يوصلوا الصوت التغييري هن الشباب بدهن إياه

Le groupe Mashrou'Leila est l'une des voix les plus représentatives de la jeunesse du monde arabe. Ils savent exprimer le besoin de changement qui habite les jeunes.

Ils chantent le statu quo inquiétant du monde arabe, l'identité de genre, la sexualité, le flou politique. Ils se sont produits de Tunis à Montréal.

Leur dernier album est intitulé Raasük Arabic, qui se traduit littéralement par “chorégraphié” ou au sens figuré par “manipulé”. Le premier titre “Lil Watan” ou “Pour ma terre natale” est sorti sur YouTube le 2 septembre. Il a été vu 74.919 fois et approuvé 1.064 fois.

Voici les paroles de la chanson :

وبس تتجرأ بسؤال عن تدهور الأحوال
بسكتوك بشعارات عن كل المؤامرات
خونوك القطيع كل ما طالبت بتغيير الوطن
يأسوك حتى تبيع حرياتك لما يضيع الوطن

Si tu oses poser une question sur la dégradation de la situation
Ils te font taire avec des slogans sur la conspiration
La foule te traite de traitre chaque fois que tu réclames le changement
Ils te poussent dans tes retranchements jusqu'à ce que tu abandonnes ta liberté
Jusqu'à ce que la nation soit perdue…

Un magazine étudiant de l'université Américaine de Beyrouth fait référence à la chanson qui “dépeint le gouvernement libanais qui exploite le patriotisme du peuple sans vraiment réparer le pays.”

Ils utilisent aussi les symboles nationaux du Liban pour montrer comment le gouvernement se cache derrière eux. Le refrain exprime une forte exaspération en demandant: “Arrêtez de faire la morale, faites-moi un peu danser.” Ceci reflète directement le ras-le-bol devant l'échec du gouvernement et le besoin constant de faire la fête.

Mashrou’ Leila écrit et produit sa propre musique. Ils fuient les majors. Ils n'ont pas de contrat avec les maisons de disques arabes, grandes ou petites. Au contraire, le premier medium de Mashrou’ Leila est YouTube. Les membres du groupe dirigent et éditent eux-mêmes leurs vidéos. Ils filment avec une seule caméra, souvent au Liban. Ils ne sont pas trop sophistiqués. Ils sont très présents sur les médias sociaux et on relève peu de commentaires négatifs sur le groupe et sa musique. L'exemple le plus frappant est celui de “El Hal Romancy” (“la solution est romantique”), la seule vidéo de leur deuxième album :

Sur son site le groupe écrit:

Habibis 

Vous nous manquez, mais on peut encore attendre sept jours.

Leila est super enthousiaste pour celle-là. El Hal Romancy – une vidéo… Cette fois… elle a voulu tenir la caméra – elle n'a pas voulu être devant la caméra, c'est tout.

Elle a attrapé la caméra avec quelques uns de ses amis, quelques amoureux et une mariée et s'est attaquée à Beyrouth. Beyrouth ne lui a pas suffit, elle s'est attaquée à Trablous. Trablous ne lui a pas suffit, mais il n'y avait plus d'argent et plus de temps. Alors elle est revenue avec cela.

Areej Mahmoud, directrice de création pour l'agence Leo Burnett au Moyen Orient et en Afrique du Nord, qui a dirigé la nouvelle vidéo de Leila “Lil Watan” (“Pour ma terre natale”), partage ce point de vue. Dans la vidéo promotionnelle elle dit :

ما في كثير ناس عام بجرب يخلقوا صوت فريد بالعالم العربي، للشباب تبع العالم العربي – الشباب الذي ما بدوا يكون غربي وما بدوا يكون تقليدي

Il n'y a pas beaucoup de gens qui essaient de créer une identité originale du monde arabe, pour la jeunesse arabe – une identité qui ne soit ni occidentalisée ni traditionnelle.

Banksy se lance dans la vidéo et cible la rébellion syrienne

lundi 14 octobre 2013 à 15:02

[Liens en anglais] La vidéo de Banksy qui satirise la guerre civile syrienne, sous le titre “Rebel Rocket Attack,” [Attaque rebelle au missile], a provoqué stupeur et déception auprès des Syriens et des fins observateurs de la guerre civile.

Publiée le 6 octobre, elle a déjà dépassé 5 millions de vues sur YouTube avec plus de 25.000 ‘j'aime’ et environ 5.000 ‘je n'aime pas'. Pour promouvoir la vidéo, l'artiste graffeur britannique anonyme a publié une bande-annonce sur Instagram avec cette note :

Je ne publie aucune photo aujourd'hui. Pas après que ces images choquantes ont émergé. Allez sur banksy.co.uk pour la vidéo complète

La bande annonce a reçu plus de 3.000 ‘j'aime’ et quelque 300 commentaires débordant d'émotions contradictoires.

Dans ce qui ressemble à des images d'amateur venant du côté de la rébellion, la parodie commence avec deux rebelles pointant un lance-missile portable vers un objet dans le ciel. La bande son est reprise d'une vidéo de la base aérienne de Mennegh à Alep en pleine guerre civile et mise en ligne le 23 février, comme signalé par Nader. Une voix hors champ hurle “Reculez, reculez,” et une autre documente la prise de vue par “Dieu est grand ; bataillon de défense aérienne du conseil militaire d'Alep.” Quelques instants après la mise à feu, Dumbo de Disney tombe du ciel, cabossé et contusionné. Les rebelles cagoulés, vêtus de shalwar kameez, dansent de joie autour et sur le personnage de dessin animé qui a rendu l'âme. Un enfant, vêtu du même attirail que les adultes, entre en scène, regarde Dumbo puis donne un coup de pied au rebelle tenant le lance-missile. Pendant toute la vidéo, on entend les rebelles crier le tristement célèbre Takbir, un slogan souvent utilisé par les islamistes lors des manifestations et les musulmans modérés pour louer Dieu, “Allahou Akbar,” Dieu est le plus grand.

Tandis que la vidéo a fait s'interroger beaucoup sur le sens de “Allahou Akbar”, elle a aussi éveillé les critiques contre les idées de gauche de Banksy. Max Fisher du Washington Post écrit de la signification politique malencontreuse de l'oeuvre :

A la différence de son oeuvre sur la Cisjordanie, ça ne traite pas vraiment du conflit armé ou de ses aspects plus vastes, même depuis un point de vue idéologique unilatéral. Ça ne ne touche pas les problèmes de fond, mais reste plutôt arrêté à l'un des rares aspects avec lesquels les gauches européennes et arabes se sentent à l'aise, et ignore tout le reste. Ce qui ne veut pas dire que la vidéo est mauvaise ou erronée en tant que morceau d'art politique, bien entendu

De même, le blogueur syrien Darthnader regarde l'oeuvre à travers les yeux d'Edward Saïd, ajoutant que l'imagerie comme le contexte sont injurieux. Il demande :

Alors quel est au juste le message ? Que les avions de combat du régime syrien sont comparables à de pauvres éléphants volants ? Que les rebelles en Syrie sont une bande de bouffons hétéroclites qui vont et viennent en essayant de tuer les créatures les plus inoffensives ?

Sur Twitter, MadeInNablus abonde en son sens :

Complètement dérouté par la nouvelle petite vidéo de Banksy sur la Syrie. J'y sens une odeur d'orientalisme.. des rebelles qui hurlent des allahu-akbar de sauvages etc

Certains ont même questionné les intentions de la vidéo, pour conclure que Banksy a abordé un sujet qu'il “ne comprend pas suffisamment,” estime le comique libanais Karl Sharro sur PRI. Evidemment, Paul Woodward de War in Context dit lui aussi que le clip est dépourvu de toute signification :

Le dernier coup de pub de Banksy est précisément cela : un coup de pub qui réclame l'attention mais ne dit pas grand chose de plus que le désir universel d'être remarqué. C'est un cri pour être entendu lancé par quelqu'un qui n'a rien à dire — et non une pièce affûtée d'analyse politique.

D'autres croient que Banksy s'est mis du côté d'Assad, et l'ont condamné de dauber sur une résistance qui a commencé avec des tags de liberté. Rana Kabbani tweete :

#Banksy est du côté d'Assad. Il oublie que la révolution syrienne a commencé avec des tags pour la liberté, pour lesquels des jeunes garçons se sont fait arracher les ongles.

Les uns ont rejeté la vidéo comme un canular, les autres ont souligné qu'elle n'avait obtenu l'attention que grâce à la réputation internationale acquise par Banksy au fil des années. Mais beaucoup d'autres, surtout des Syriens, sont restés indifférents, comme l'a souligné Donatella sur Twitter :

La vidéo de Banksy : tous mes amis (non-syriens) l'adorent ; aucun de mes amis syriens ne l'a vue et ils se foutent de la voir..  

Fortaleza (Brésil) : “Quelles leçons du mouvement de protestation pour les média ?”

lundi 14 octobre 2013 à 12:20

Ce billet fait partie de notre dossier central la Révolte du Vinaigre.

[Tous les liens mènent à des pages en portugais, sauf indication contraire.]

Lorsque des manifestations surgirent dans tout le Brésil en début d'année, le média participatif Coletivo Nigéria de Fortaleza est aussi descendu dans les rues, caméras à la main. Le cinéaste Pedro Rocha explique :

"Nous ne savions pas ce qu'il adviendrait de notre couverture des manifestations, mais nous savions que nous devions être là", explique Pedro Rocha à propos du documentaire Com vandalismo. Regarder le film publié avec l'article de Global Voices en août 2013.

“Nous ne savions pas ce qu'il adviendrait de notre couverture des manifestations, mais nous savions que nous devions être là”, explique Pedro Rocha à propos du documentaire Com vandalismo. Regarder le film publié avec l'article de Global Voices en août 2013.

 Começamos filmando pelo dever de registrar o que estava acontecendo. Não fazíamos a menor ideia no que aquilo ia dar.

Nous avons commencé le tournage en raison de la nécessité d'enregistrer ce qui se passait. Nous n'avions pas la moindre idée de ce qui allait se passer.

Ce fut le début de leur récent projet, selon Pedro Rocha, l'un des quatre journalistes qui ont obtenu leur diplôme il y a deux ans et ont formé le collectif, avec Roger Quentin, Yargo Gurjão et Bruno Xavier. Le résultat a été le documentaire “Com vandalismo“ (Vandalisme) [fr], qui raconte les événements de cette période dans la ville de Fortaleza, avec une attention critique sur le discours des médias traditionnels construits autour du “vandalisme”.

Dans une interview par courriel avec Global Voices, Pedro Rocha explique plus en détail cette expérience et analyse les orientations possibles que peuvent prendre les communications en ligne dans le pays après les manifestations.

Global Voices (GV): Pensez-vous qu'avec les manifestations et l'utilisation intensive des outils de réseautage social, les médias citoyens brésiliens ont fait un pas en avant?

Pedro Rocha (PR): Talvez a gente precise esperar um pouco mais. Ver como isso vai funcionar na Copa, por exemplo. Para usar uma palavrinha mágica sempre que se fala de megaeventos: precisamos ver qual será o “legado” desses protestos para a comunicação. De todo modo, se o ditado que diz que “a necessidade faz o homem” estiver certo, provavelmente esse amadurecimento irá se concretizar.

Até agora, o que vimos foram as pessoas correndo para as redes sociais em busca de informação, porque só com a grande mídia não dá – ainda mais agora que a relação entre essa mídia e os manifestantes está cada vez mais desgastada. Muitos manifestantes não concedem entrevistas a eles (se é que um dia essas entrevistas foram solicitadas) e hostilizam os repórteres de algumas emissoras. Por outro lado, a mídia alternativa, independente ou cidadã, seja qual for o nome, é quem está criando e ocupando esse espaço.

Peut-être que nous devrons attendre encore un peu. Pour voir comment cela va fonctionner pendant la Coupe du Monde, par exemple. Pour utiliser le mot magique qui est toujours présent lorsque l'on parle de méga-événements : nous avons besoin de voir ce que sera l’ “héritage” de ces manifestations pour les médias. Quelle que soit la façon dont ça se passera, si l'adage “nécessité fait l'homme” se révèle vrai, ce progrès va probablement se concrétiser.

Jusqu'à présent, ce que nous avons vu c'était des gens qui se ruent vers les réseaux sociaux à la recherche d'informations, parce que suivre les médias traditionnels ne suffit pas – encore plus maintenant que la relation entre ces médias et les manifestants est devenue tendue. De nombreux manifestants ne leur donnent pas d'interviews (si de tels entretiens devaient être demandés) et sont hostiles envers les journalistes de ces grands réseaux. D'autre part, les médias alternatifs, indépendants ou citoyens ou quelque soit le nom, sont ce qui crée et qui occupe cet espace.

GV: Comment ces changements dans le paysage politique et médiatique influent sur ​​l'avenir de ce que vous faites en tant que collectif ?

Bruno Xavier, l'un des membres du collectif Nigeria, en action lors de la projection  de l'un des documentaires réalisés par le collectif dans un restaurant du quartier. Photo utilisée avec permission.

Bruno Xavier, l'un des membres du collectif Nigeria, en action lors de la projection de l'un des documentaires réalisés par le collectif dans un restaurant du quartier. Photo utilisée avec permission.

PR: Primeiro, estamos nos questionando mais do que nunca sobre o nosso trabalho, sobre as ideias que nos orientam, sobre como devemos nos posicionar nessa história. Em segundo lugar, vem a forma como nos organizamos como produtora e/ou coletivo.

A “produtora” Nigéria trabalha com comunicação institucional pra movimentos sociais e terceiro setor principalmente. Nós sempre guiamos politicamente nosso trabalho. Porém, isso às vezes pode entrar em conflito com as exigências da cobertura das manifestações, quando atuamos mais como “coletivo” – de forma voluntária, por assim dizer. Quer dizer, às vezes temos que priorizar uma coisa ou outra ou nos dividir e sacrificar um pouco cada lado. Além disso, temos nossa produção jornalística propriamente dita, que requer um tratamento diferente dos vídeos institucionais ou mesmo dos vídeos das manifestações.

Na nossa opinião, todas estas diferentes formas de comunicação são importantes e se complementam, mas precisaremos cada vez mais pensar na forma como sustentar esses trabalhos. Por exemplo, a partir da repercussão Com Vandalismo – realizado sem nenhum financiamento e com a colaboração de várias outras pessoas além dos integrantes da Nigéria – estamos planejando uma forma de financiar a cobertura da Copa no próximo ano.

Tout d'abord, nous nous interrogeons plus que jamais sur la nature de notre travail, sur les idées qui nous guident et comment nous positionner dans cette histoire. Deuxièmement, nous nous interrogeons sur la façon dont nous nous organisons en tant que producteurs et/ou en tant que collectif.

Le collectif de production médiatique Nigéria travaille principalement dans la communication institutionnelle pour les mouvements sociaux et le secteur sans but lucratif. Nous sommes toujours politiquement guidés dans notre travail. Cependant, il est parfois possible d'être en conflit avec les exigences de couverture de manifestations, quand nous agissons plus comme un “collectif” – de manière volontaire, en quelque sorte. En d'autres termes, nous devons donner la priorité à l'une ou l'autre chose, ou nous choisissons de sacrifier un peu de chaque côté. En outre, nous avons la production journalistique elle-même, ce qui nécessite un traitement différent des vidéos institutionnelles ou des vidéos des manifestations.

À notre avis, toutes ces différentes formes de communication sont importantes et se complètent les unes les autres, mais nous devons penser de plus en plus à la façon de soutenir ces efforts. Par exemple, en raison de la réponse à “Com vandalismo» – filmé sans aucun soutien financier et avec la collaboration de plusieurs autres personnes en dehors du groupe Nigeria – nous projetons de trouver un moyen de financer la couverture de la Coupe du Monde l'année prochaine.

GV: Dans le documentaire, vous apparaissez un moment avec des étudiants d'un programme de communication sociale. Y a-t-il eu des échanges entre le programme et Nigéria?

PR: Sou professor do curso de jornalismo de uma faculdade particular aqui de Fortaleza. E já tinha convidado dois estudantes de lá, o Franzé e o Leandro, para serem bolsistas em um outro projeto da Nigéria sobre Direito à Moradia. Nós estávamos mapeando as ocupações irregulares em Fortaleza quando os protestos estouraram no país. Nessa história, eles acabaram compondo a equipe. Estiveram em todos os quatro dias que o documentário registrou e, no último, o Leandro acabou sendo detido comigo, depois de sermos encurralados pelo Batalhão de Choque. Não fomos para a delegacia porque a presidente do Sindicato dos Jornalistas do Ceará passou no local exatamente na hora.

Je suis professeur au département de journalisme d'une faculté privée ici à Fortaleza. Et j'ai déjà invité deux élèves, Franzé et Leandro, à devenir boursiers dans un autre projet de Nigéria sur le mouvement pour les droits à un logement convenable. Nous élaborions la carte des occupations irrégulières à Fortaleza lorsque les manifestations ont éclaté dans le pays. En couvrant cette histoire, ils ont fini par devenir une partie de l'équipe. Ils étaient avec nous tout le temps pendant les quatre jours où le documentaire a été tourné, et Leandro a fini par se faire arrêter avec moi, après avoir été bloqué par la police anti-émeute. Nous ne sommes pas allés au poste de police parce que le président de l'Union des journalistes de Ceará passait par là à ce moment précis.

GV: Quelles sont les différences entre le travail avec Nigéria et vos autres expériences professionnelles dans les médias?

PR: Os quatro integrantes da Nigéria têm percursos profissionais diferentes, mas, com exceção de um, tivemos passagens mais curtas ou mais longas pelos maiores grupos de comunicação do Ceará. E existe uma primeira grande diferença, que é a diferença entre ser empregado de uma grande empresa e ser sócio de seus amigos numa produtora. É verdade que isso impacta também na sua estabilidade financeira, mas isso é compensado por outros ganhos, como a ausência de hierarquia.

De gauche à droite: Pedro Rocha, Yargo Gurjão, Bruno Xavier et Roger Quentin. Photo utilisée avec permission.

De gauche à droite: Pedro Rocha, Yargo Gurjão, Bruno Xavier et Roger Quentin. Photo utilisée avec permission.

Por exemplo, a falta de hierarquia faz com que estejamos a todo momento debatendo – agora mesmo estamos tendo que encarar na prática conceitos como o “equilíbrio” em nossa produção jornalística, já que nos identificamos com as posições dos manifestantes, mas também queremos nos manter como um espaço em que o diálogo e o debate sejam possíveis. Esse tipo de organização nos dá também a liberdade de escolhermos no que queremos apostar e a responsabilidade de assumirmos esse risco. O Com Vandalismo foi um caso desses. Depois de tudo, alguns outros projetos atrasaram, foram deixados temporariamente de lado, mas valeu a pena.

Les quatre membres de Nigéria ont des parcours professionnels différents, à l'exception d'un seul, nous avons eu des périodes plus ou moins longues de travail pour les grandes entreprises de médias au Ceará. Mais il existe une différence majeure, qui est celle d'être employé par une grande entreprise et d'être associé à vos amis en tant que producteur. Il est vrai que cela a des implications financières sur chacun, mais c'est compensé par d'autres avantages, comme l'absence de hiérarchie.

Par exemple, l'absence de hiérarchie signifie que nous discutons tout le temps – en ce moment meme, nous débattons de concepts tels que “l'équilibre” dans la pratique de notre production journalistique. Nous nous sommes déjà identifiés avec la position des manifestants, mais nous voulons aussi maintenir un espace où le dialogue et le débat sont possibles. Ce type d'organisation nous donne également la liberté de choisir ce que nous voulons risquer et la responsabilité d'assumer ce risque. ”Com vandalism” a été l'un de ces cas. Après tout cela, d'autres projets ont été retardés et mis temporairement de côté, mais ça valait le coup.

GV: Quels sont les principaux défis dans la couverture des manifestations?

PR: Tirando o fato de que não conhecíamos gás lacrimogênio e bala de borracha, nem exatamente sabíamos como se portar diante daquele tipo de situação de confronto, o maior desafio a meu ver foi se orientar naquela revolta. Saber o que filmar, quem entrevistar, perceber o que estava em jogo – basicamente entender o que estava acontecendo no país. Se ainda hoje é difícil entender isso, não pense que foi mais fácil para quem estava lá na Alberto Craveiro, sob um sol infernal, no meio de um mar de gente correndo e tossindo gás lacrimogênio. Talvez por isso a repressão policial tenha se transformado numa pauta por si só, por ser um elemento imediato, inquestionável e, no final das contas, aglutinador, apesar de o objetivo ter sido a “dispersão” dos manifestantes. Talvez por isso também escolhemos nos apoiar num ponto específico, o “vandalismo”, para seguirmos documentando, sem nos perdermos em julgamentos sobre a história.

Outre le fait que nous n'étions pas familiers des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc, ni ne savions exactement comment se comporter face à ce genre de confrontation, le plus grand défi de mon point de vue était de s'orienter au cours de la révolte. Savoir quoi filmer, qui interviewer, comprendre ce qui était en jeu – essentiellement saisir ce qui se passait dans le pays. Si, aujourd'hui encore, il est difficile de comprendre cela, ne pensez pas que c'était plus facile pour ceux qui étaient là à Alberto Craveiro sous un soleil infernal, au milieu d'une marée humaine courant et toussant sous les grenades lacrymogènes. Peut-être que c'est pour ça que la répression policière est devenue un sujet en soi, si ce n'est que parce que c'est un élément sans doute immédiat et, après tout, unificateur en dépit de son objectif de “disperser” les manifestants. C'est peut-être aussi pourquoi nous avons choisi de soutenir un point de vue précis, celui du “vandalisme”, pour continuer à documenter sans se perdre dans le jugement de l'histoire.

GV: Que pensez-vous en tant que groupe, des collectifs qui ont émergé au cours des manifestations, comme Midia Ninja ["Un phénomène de journalisme alternatif issu des protestations au Brésil", comme rapporté par le blog Le journalisme dans les Amériques] ?

PR: A Mídia Ninja é, sem dúvida, o maior fenômeno dessa comunicação que ganhou força com os protestos. As transmissões ao vivo, pra mim, são o elemento mais revolucionário nessa história toda. Em junho, você podia assistir o helicóptero da Record News sobrevoando São Paulo ou o Rio de Janeiro, ao mesmo tempo em que acompanhava um cara correndo pelas ruas com um celular entrevistando os manifestantes. Se você demorasse um pouco mais nessa dupla cobertura, iria perceber que algumas coisas na transmissão da TV estavam equivocadas.

Hoje nós temos transmissão ao vivo pela Internet aqui em Fortaleza e imagino que em quase toda cidade em que o 3G dê conta do serviço. Particularmente gosto de acreditar que os ninjas viraram uma espécie de confraria ou, simplesmente, uma rede, independente do grupo Mídia Ninja até. Por outro lado, existem coletivos, como a Nigéria, que não fazem cobertura ao vivo, mas registram e postam no mesmo dia ou no dia seguinte alguns vídeos, já com alguma edição e com uma qualidade melhor de imagem. Esse é outro tipo de cobertura que se junta às transmissões, aos relatos pessoais no Facebook, às charges de ilustradores independentes etc.

Se o Brasil tivesse uma TV pública de qualidade e um sistema de comunicação realmente democrático, ainda assim esse tipo de ação seria necessário. Ou seja, diante do monopólio comercial da comunicação brasileira, essa comunicação dos ninjas e dos coletivos é questão de sobrevivência e esperamos que só se fortaleça daqui pra frente.

Midia Ninja est, sans aucun doute, le plus grand phénomène de ces formes de communication qui ont pris de la vigueur avec les manifestations. Les retransmissions en direct, pour moi, étaient l'élément le plus révolutionnaire dans toute cette histoire. En juin, vous pouviez voir l'hélicoptère de Record News survoler São Paulo ou Rio de Janeiro, et en même temps un gars courir dans les rues avec un téléphone interviewer des manifestants. Si vous avez regardé ne serait-ce qu'un peu de cette double couverture, vous avez pu voir que certaines choses étaient inexactes dans la couverture de la télévision.

Aujourd'hui, nous avons une transmission en direct par le biais d'Internet ici à Fortaleza, et j'imagine qu'il en est de même dans chaque ville qui dispose d'une couverture 3G. J'aime particulièrement à croire que les ninjas sont devenus leur propre genre de fraternité, ou simplement un réseau indépendant de Midia Ninja même. D'une part, des collectifs existent, tels que Nigéria, qui ne font pas de couverture en direct, mais plutôt des films et publient des vidéos le jour même ou le lendemain, avec la possibilité de les éditer et d'avoir une meilleure qualité d'images. C'est là un autre mode de couverture qui rassemble toutes les transmissions, à partir de comptes personnels sur Facebook aux dessins d'illustrateurs indépendants, etc.

Si le Brésil avait une télévision publique de qualité et un système de communication véritablement démocratique, ce type d'action resterait nécessaire. En d'autres termes, face au monopole commercial des communications du Brésil, ce type de couverture par les ninjas et les collectifs est une question de survie, et nous espérons qu'elle continuera à se renforcer.

Ce billet fait partie de notre dossier central la Révolte du Vinaigre.

Amnesty Brésil dénonce les conditions des expulsions pour les chantiers de la Coupe du monde

lundi 14 octobre 2013 à 10:27

 Alors que beaucoup de Cariocas, nom donné aux habitants de Rio de Janeiro, attendent  impatiemment l'ouverture des Jeux, les bannières multicolores et les grands stades rénovés pour la Coupe du monde de 2014 puis les Olympiades de 2016, d'autres, moins chanceux , garderont pour toujours en mémoire l”indignation et la tristesse ressenties devant leurs maisons détruites pour laisser place aux chantiers.

Selon Amnesty International Brésil, 19 200 familles ont déjà été déplacées à Rio de Janeiro depuis 2009, quand le gouvernement a commencé à sélectionner des terrains pour les chantiers de grandes infrastructures (routes, zones de stationnement, équipements du port) jugées nécessaires en vue de la Coupe du monde et des Olympiades.

En réponse à ces expulsions, Amnesty international Brésil a lancé une campagne: Assez d'expropriations forcées. La conseillère en droit humain de cette ONG, Renata Neder, a fait la déclaration suivante sur ce problème :

Il existe des preuves de violations du droit au logement et des expropriations forcées dans la ville de Rio de Janeiro dans le cadre des grands chantiers urbains  pour la préparation aux grands événements sportifs. Cette campagne vise à attirer l'attention des autorités locales sur les violations qui ont déjà eu lieu et éviter qu'elles se reproduisent.

Mais de 19 mil famílias foram removidas de suas casas desde 2009 no Rio de Janeiro segundo o governo municipal. Uma audiência pública a respeito das "Remoções por megaeventos no Rio de Janeiro" foi realizada em 27 de setembro na Câmara Municipal da cidade. Imagem compartilhada por Racismo Ambiental (CC BY-NC 2.5 br)

Plus de 19 000 familles ont été expulsées de leur maisons depuis 2009 à Rio de Janeiro selon la municipalité. Une enquête publique que sur les expulsions liées aux  méga-événements à rio de Janeiro a été réalisée le 27 septembre à la mairie de la ville. Image partagée par  Racisme environnemental C 2.5 br)

La campagne d'Amnesty international concerne principalement les communes de Providência et de Vila Autódromo, qui sont directement touchées par la construction de la Transoeste [en anglais], une voie express pour les autobus. Cette route reliera la zone portuaire, au nord  de Rio de Janeiro, au quartier de Barra da Tijuca dans l'est de la ville où se trouveront la majeure partie des infrastructures destinées aux jeux Olympiques. 

Il ressort de ce rapport que les familles déplacées pour la construction de la Transoeste n'ont pas été correctement informées de ce qui se passait, elle auraient reçu leurs avis d'expulsion officiel  peu de temps avant leurs transferts vers des lieux extrêmement lointains ou auraient reçu une compensation financière inadéquate (pour ceux qui l'ont réellement reçue…) 

Une pétition destiné au maire de Rio de Janeiro, Eduardo Paes, a été réalisée exigeant l'application des procédures légales pour les familles concernées et l'arrêt des toutes les expulsions en cours.

La campagne a pris son essor sur la page Facebook Acorda Brasil (réveille-toi Brésil).

Et si c'était ta maison ?

Des habitants du quartier de #Providência,  dans la zone portuaire de Rio de Janeiro, se plaignent de l'absence de transparence et de projets imposés sans négociation préalable : “ils sont juste arrivés et ont montré ce qu'il voulaient: “voila, c'est ce que nous avons, c'est le projet qui va être fait, que vous vouliez ou non”. Il n'y a eu aucune discussion, le projet était déjà prêt. La #communauté n'a pas eu son mot à dire.

Amnesty international a publié également des témoignages anonymes de propriétaires sur sa page Facebook. Vous pouvez en lire ci- dessous quelques-unes :

J'ai perdu ma maison à cause de la Coupe, depuis  je ne peux plus m'en réjouir.. (Jorge Santos, ex-propriétaire dans Vila Recreio II, habitait là depuis 16 ans).  Jorge a été le dernier propriétaire du secteur à  être expulsé. Lui et onze autres familles n'ont reçu une indemnisation qu'à la fin de 2012, plus d'un an après les expulsions.

Comunidade removida da zona oeste do Rio para a construção de obras dos Jogos Olímpicos de 2016. Foto no Flickr da Relatoria Especial da ONU para o Direito à Moradia Adequada (CC BY-NC-SA 2.0)

Expulsion dans la zone ouest de Rio pour la construction d'ouvrages destinés aux jeux Olympiques de 2016. Photo sur Flickr du rapport spécial à l'ONU pour le droit à un logement adapté  (CC BY-NC-SA 2.0)

Le débat sur les expulsions forcées peut être suivi sur Twitter sous les hashtags #direitoamoradia (droit au logement) et #expulsions.

L'émission Rádio Debate (@radiodebate), de Rádio Universitária FM, de l'université fédérale du Ceará, tweete :

Un compte twitter qui fait circuler des nouvelles sur les droits humains au Brésil (@direitoshumanos) a publié ce lien vers une vídéo du Comitê Popular Rio Copa e Olimpíadas :

La modernisation des infrastructures de la ville de Rio de Janeiro est nécessaire pour pouvoir accueillir ces événements internationaux. Ce qui pose problème c'est la manière extrêmement discutable avec laquelle ce processus est conduit, souvent sans le consentement des personnes, sans les protections prévues par la loi, comme des compensations adéquates, et parfois sans aucun avertissement préalable. Le défi n'est pas pour le Brésil de se préparer à accueillir ces grands événements. Le plus grand défi est d'éviter d'être considéré comme un pays aux pratiques démocratiques ambigus, qui traite ses citoyens de façon différente en fonction de leur statut économique et qui ne garantit pas un droit élémentaire à la propriété pour ceux qui ont le plus besoin d'une protection.

 

D'autres articles de Global Voices sur les expulsions liées à la Coupe du monde FIFA de 2014 et aux Olympiades de 2016 : 

18 Fev: Belo Horizonte: le carnaval et la Coupe, y aura-t-il de la samba?
20 Fev: Rio de Janeiro: Elisângela est arrivé à temps pour voir détruire sa maison
  21 Fev: Rio de Janeiro: Francisca à tout perdu car elle était sur le passage de laTransoeste
22 Fev: La FIFA s'inquiète! Andrew Jennings rencontre le Mouvement Populaire brésilien 
  23 Mars: Le village Maracaña sur le chemin de la Coupe: Des indiens expulsés avec violence 
  26 Mars: Brésil: A Porto Alegre, une révolte contre des abattages d'arbres. 
  27 Mars: Une interview de Carlos Latuff: Des caricatures contre les expulsions de la Coupe
  10 Mai: Brésil: Des Indiens s'opposent au modèle de développement prôné par l'état

Un prix Nobel qui ne fait pas la Paix

lundi 14 octobre 2013 à 09:53

[Les liens renvoient vers des pages en anglais]

Le prestigieux Prix Nobel de la Paix 2013 vient d'être attribué à l'Organisation pour l'Interdiction des Armes Chimiques (OIAC). Le Comité Nobel a déclaré : 

[L'OIAC et ses conventions apparentées] ont défini l'usage d'armes chimiques comme tabou en droit international. Les récents événements en Syrie, où les armes chimiques ont été remises en usage, ont souligné la nécessité de mettre en valeur les actions pour se débarrasser de telles armes.

Les réseaux sociaux ont été stupéfaits de ce qui a suivi quand le Comité a été dans l'incapacité de contacter le lauréat :

@OPCW [OIAC], veuillez nous contacter @Nobelprize_org, nous essayons de joindre vos bureaux.

Cette situation ubuesque, apparue avant-hier (11 octobre) a été soulignée par The Next Web qui a salué l'OIAC :

C'est bien, les gens du Prix Nobel sont allés sur Twitter — devenu le lieu où dire au monde de quoi vous avez déjeuné et autres futilités du genre – pour faire savoir à l'OIAC qu'il lui fallait prendre contact.

Pénétrons-nous un moment de cette réalité.

Le Washington Post récapitule les appels manqués des lauréats du Nobel 2013.

Comme celle de l'an dernier, la décision du Comité Nobel norvégien a attiré une très large attention et engendré des déceptions puisque la liste des sélectionnés comptait bon nombre d'individus très méritants, comme la Pakistanaise de 16 ans Malala Yousafzai.

De fait la récompense allée à l'OIAC a même surpris des observateurs du Nobel. Ces derniers jours, Malala Yousafzai, l'écolière qui a défendu l'éducation des filles au péril de sa vie, était considérée comme candidate au Nobel de la Paix de cette année. Les sympathisants de Malala étaient consternés lorsque le Comité a publié sa décision, et la déception s'est déversée sur les réseaux sociaux [NdT : Le prix Sakharov lui a été décerné].

Coïncidence ironique, avant-hier était aussi la Journée internationale [des droits] de la fille [fr], créée par l'ONU pour promouvoir l'éducation des filles. Avant l'annonce du Comité, Curt Rice, un commentateur qui promeut sans mâcher ses mots l'égalité hommes-femmes surtout, entre autres, dans la science et la technologie, avait un espoir :

J'espère que le comité du Prix Nobel démentira ces propos sur son problème avec les femmes : http://t.co/HLbGZJ9Zw4

De fait, sur 44 femmes nobélisées depuis 1901, 15 seulement l'ont été au titre de la Paix, et souvent un prix était partagé entre deux lauréates au moins. Les hommes l'emportent donc largement en nombre de Prix Nobel obtenus. Le Comité a beau se défendre que le genre n'est pas en cause, Curt Rice l’engage à le prendre en compte et ceci, de façon respectueuse :

On ne peut pas avoir un nombre disproportionné de lauréats masculins uniques, que l'on compense ensuite en divisant une année une récompense dépréciée entre plusieurs femmes. Le comité ne devrait pas améliorer l'équilibre entre les sexes en faisant une braderie de militantes féminines.

Certes, Malala Yousafzai sans Prix Nobel a aussi fait des heureux :

Les talibans pakistanais “ravis” que Malala Yousoufzai ait manqué le Prix Nobel de la Paix

Autre pierre d'achoppement, la nature du lauréat. Pour la deuxième année de suite, la prestigieuse récompense va à une organisation plutôt qu'à des individus, succédant au prix de la Paix 2012 allé à l'Union Européenne, ce qui conduit beaucoup à s'interroger sur les raisons du Comité :

Le Prix Nobel de la Paix semble un peu intéressé ces temps-ci. L'UE, Obama, maintenant l'OIAC. Idéaliste. 

Le Prix Nobel de la Paix devrait plutôt être donné à des individus qui font vraiment une différence, et pas seulement à des organisations et chefs d'Etat.

Je me fiche vraiment de qui a le Prix Nobel de la Paix cette année. Ils ne pourront jamais se racheter de l'avoir donné à Obama et à l'UE de l'austérité

Le Nobel de la Paix ne mérite sans doute pas Malala. Il semble s'obstiner à faire des gestes politiques creux

En toute franchise le Prix Nobel de la Paix est plutôt descendu dans l'ironie depuis que Kissinger l'a eu.

Zeynep Tufekci, professeur-assistant à l'University of North Carolina, Chapel Hill, s'est cependant fermement prononcée en faveur du Prix allant à l'OIAC :

Ce dont le monde manque désespérément, et que le Comité a pour une fois récompensé, c'est la sorte de travail de paix ennuyeux et institutionnel de paix qui fait avancer les vies des gens. Jour après jour. Petit à petit. Mais sans lequel les vies sont brisées et les pays tombent en morceaux (comme en ce moment).
[...]
La célébrité est allée ailleurs, les caméras sont parties, et ces bureaucrates et techniciens sous-estimés, les organisateurs, les institutions qui améliorent les vies de millions de personnes, chaque jour, se font licencier, sont sous-financés, voire moqués. Oui, ce ne sont que des bureaucrates et technocrates ! Certes, individuellement, ils ne sont que cela. Mais comme institution ils sont ce dont le monde a grand besoin, et beaucoup plus nombreux.

Certains trouvent que le Comité a manqué le bon moment pour décerner le prix de la Paix à l'OIAC :

L'OIAC aurait dû obtenir le Prix Nobel de la Paix en 2003, quand elle a défié Bush en proposant une alternative à la guerre d'Irak.

Des commentaires ouvertement sarcastiques sur le choix du Comité ont aussi fleuri, imaginant que l'OIAC a obtenu le prix “parce que son directeur [M. Üzümcü] a trois trémas dans son nom,” ou expliquant que le ”comité de sélection qui choisit le candidat officiel de l'Inde aux Oscars et le Comité du Prix Nobel de la Paix pensent de la même façon.”

Au-delà des sarcasmes et du choix des institutions plutôt que des individus, il y a une considération de fond : l'OIAC a-t-elle été récompensée pour son travail discret depuis 1997, ou bien le Nobel de la Paix était-il une tentative de subtile communication politique ? D'aucuns pensent que l'OIAC n'a pas fait sérieusement son travail. Plus important, un grand nombre de commentateurs, dans les médias tant sociaux que généraux, ont fait le rapport entre le prix prestigieux décerné à l'OIAC et les récents massacres en Syrie dont il a été prouvé qu'ils ont été causés par des armes chimiques, un arsenal dont l'OIAC supervise la destruction. Le Comité Nobel a réfuté (sans convaincre) de telles allégations :

Absurde RT @Nobelprize_org : L'OIAC n'a pas reçu le Prix Nobel de la Paix à cause de la Syrie mais à cause de son travail de longue date.

De même que Jenan Moussa, une journaliste renommée qui a couvert la Syrie en long et en large, d'autres doutent également de l'absence affichée de lien entre le Prix de la Paix et le processus de désarmement chimique de la Syrie mené par l'OIAC :

@PTI_FATA la décision était purement politique pour ce qui se passe en Syrie… personne ne connaît même le sens de cette organisation

Les protestataires syriens de Kafranbel, connus pour leurs caricatures pleines d'esprit et leurs poses à visage découvert pour des photos, ont publié leur opinion, qui dénonce la décision du Comité Nobel :

#OIAC#ONU a reçu le #PrixNobel !! #USA#Syrie#Mort#Kafranbel

Face aux réactions négatives, le directeur de l'OIAC a annoncé que la Syrie y entrera comme 190ème pays membre, une déclaration qui, étonnamment, est passée presque inaperçue. L'OIAC n'a cependant pas répondu à ceux qui saluaient le rôle du Président russe Vladimir Poutine pour introduire l'OIAC en Syrie. Si certains considèrent que récompenser l'OIAC du Nobel de la Paix est “dans la ligne du discours vicié selon lequel Obama & Poutine ont ‘évité la guerre’ en Syrie,” des internautes ont sérieusement souligné l'implication de Poutine dans l'opération en cours de démantèlement des armes chimiques de la Syrie :

Si quelqu'un a mérité un prix Nobel pour l'éradication des armes chimiques en Syrie, c'était le président russe Vladimir Poutine, et pas un extra-terrestre #OIAC

“Poutine aurait dû recevoir le Prix Nobel de la Paix et NON PAS l'OIAC. Sans l'aval de Poutine, ils n'auraient pas pu entrer [investiguer] en Syrie”

Ces réactions font suite à une initiative annoncée par des personnalités publiques russes de présenter la candidature du Président Poutine au Prix Nobel de la Paix 2014. Mesdames et messieurs, faites vos jeux pour parier sur le lauréat l'an prochain du prix (avec encore moins de prestige, et encore plus de dissensions) :

Ce sera le tour de Poutine “@omarsyria : Assad Prix Nobel de la Paix 2014″

Ne soyez pas étonné si l'an prochain le Prix Nobel de la Paix est décerné à Nétanyahou ou Lavrov.