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L'activisme numérique génère un élan pour la langue kaqchikel et d'autres langues guatémaltèques

vendredi 26 mai 2017 à 18:59

Rencontre d'activisme numérique pour la langue kaqchikel. Photo de Pueblo Click (Village Click) et utilisée avec autorisation.

Le Guatemala ou Quauhtlemallan, ce qui veut dire “lieu de nombreux arbres” en langue nahuatl, est un pays d'une grande diversité ethnique, culturelle et linguistique. Selon les données officielles du recensement national XI de la population et VI du logement de l'année 2002, 41% de la population s'identifie comme indigène, ce qui fait du Guatemala un pays composé des peuples maya, garifuna, xinca et latino ou métis.

Au Guatemala, on parle 25 langues, parmi lesquelles 22 sont des langues mayas avec une structure et une évolution propre. Les différences entre ces langues sont visibles dans les différentes tendances grammaticales, les utilisations phonétiques et un vocabulaire croissant, mais elles ont un tronc commun : la langue maya fondatrice connue comme proto-maya.

Les langues mayas ont aussi la faculté de soutenir la culture des villages qui les parlent. C'est grâce à elles que les connaissances et les valeurs communautaires sont acquises et transmises. De même, à travers la tradition orale, les générations les plus jeunes héritent des principes moraux de la pensée maya et cela permet d'en réaffirmer la philosophie avec un patrimoine de connaissances scientifiques et cosmologiques.

“L'activisme numérique en langues indigènes” : Actions en faveur des langues mayas

Dans le cadre du projet “Activisme numérique en langues indigènes” promu par Rising Voices et en coopération avec Pueblo Click (Village Click), une rencontre d'activisme numérique de langues indigènes, plus particulièrement en langue kaqchikel, s'est tenue les 11 et 12 avril dans les installations du centre éducatif Pavarotti à San Lucas Tolimán, département de Sololá, et qui a réussi à réunir plus de 30 activistes venant de différentes régions du Guatemala.

Image : Rencontre d'activisme numérique de langues indigènes – San Lucas Tolimán, département de Sololá, Guatemala – 11 et 12 avril 2017
Image de diffusion de la rencontre. Utilisée avec autorisation.

Au Guatemala, la langue kaqchikel est une des quatre langues les plus parlées. Elle est parlée dans 54 communes de sept départements : une commune de Baja Verapaz, seize communes de Chimaltenango, une commune d'Escuintla, sept communes du département de Guatemala, quatorze communes de Sacatepéquez, onze communes de Sololá et quatre communes de Suchitepéquez.

Des journées qui aident à la construction d'objectifs

La rencontre s'est déroulée en prenant en compte les calendriers grégorien et maya. C'est à dire qu'elle a eu lieu les 11 et 12 avril et les jours correspondants à Oxi´E et Kaji´Aj, symbolisant le chemin qui conduit à un objectif précis : que ces langues agissent en faveur d'une société plurilingue et pluriculturelle. Ainsi, la rencontre a été vue, de façon symbolique, comme un grain de maïs semé dans une terre fertile et dans l'attente d'avoir un champ de maïs. On espère que cela croisse, que cela produise du maïs, que cela se convertisse en épis et que cela alimente les générations.

Thématique de la rencontre

Le but principal de la rencontre a été de réunir les personnes pertinentes et avec une incidence culturelle dans le monde de l'éducation, la politique, la technologie, les médias et l'art. Les échanges ont eu lieu à travers de forums où l'importance d'unifier les efforts pour la préservation et la diffusion des langues maternelles à travers des technologies de l'information et de la communication (TIC) a été soulignée. L'objectif est de donner les moyens aux jeunes générations et de rendre accessibles les connaissances. Quelques participants ont mentionné l'importance de “développer la fierté, le respect et l'utilisation des langues indigènes” qu'ils ont considérées comme la “clef pour éliminer tout type de discrimination”. En accord avec les participants, les langues indigènes doivent maitriser internet et se rendre visibles : “Personne ne peut aimer et valoriser ce qu'il ne connaît pas”.

Au travail !

Lors de la rencontre ont été présentés les efforts de l'universitaire Walter Cuc de la Fédération Guatémaltèque des Ecoles de Radio (FGER) qui se veut un ensemble de radios alternatives, plurilingues, durables, avec une couverture nationale et de premier plan. Tout ceci est fait en coopération avec des entités à visée locale et internationale pour pouvoir contribuer efficacement au développement humain global, à la participation citoyenne et à la démocratisation de la société.

Walter Cuc, Directeur de la Fédération Guatémaltèque des Écoles de Radio. Photo de Pueblo Click et utilisée avec autorisation.

De son côté, Israel Quic de Monde Possible a présenté le projet RACHEL, un nœud communautaire pour l'éducation et l'apprentissage dans les zones rurales, avec un programme conçu pour les communautés qui manquent de connexion stable à internet ou qui n'ont pas accès à internet à haut débit.

Un autre projet présenté lors de la rencontre a été celui de Mozilla Firefox en kaqchikel, présenté par Juan Esteban Ajsivinac Sián et disponible pour PC et Android. Le projet se focalise sur le grand défi de traduire les 5000 liens qui constituent les références de ce navigateur en langue kaqchikel.

Projets en dévelopement

Jorge López-Bachiller Fernández, sociologue espagnol vivant depuis plus de dix ans à Patzún, département de Chimaltenango, a mis ses efforts dans des actions pour réduire la brèche numérique existante. L'objectif est de viser le développement des communautés indigènes du Guatemala à travers des connaissances et des stratégies qui permettent de rendre plus visibles leur grandeur culturelle.

Des participants à la rencontre de l'activisme numérique de la langue kaqchikel. Photo de Pueblo Click et utilisée avec autorisation.

Une de ces stratégies est le projet Kaqchikel Wikipetya, qui a surgi à l'initiative d'un groupe de personnes de différents pays, avec formation et expériences professionnelles dans un but commun : la conservation et la diffusion du kaqchikel comme langue maya à travers l'utilisation des technologies.

Pour atteindre l'objectif, il a été décidé d'incorporer la langue kaqchikel à Wikipedia, l'encyclopédie libre et polyglotte de la fondation Wikimedia, avec plus de 17 millions d'articles en 278 langues qui ont été rédigés conjointement par des volontaires du monde entier.

Pour personnaliser le projet, il a été évoqué les différentes alternatives pour lui trouver un nom, de sorte qu'il soit reconnaissable et distinct et qu'il prenne autant en compte l'identité kaqchikel et le nom de la fondation Wikimedia. Après analyse des possibilités, il a été décidé que le projet s'appellerait “Kaqchikel Wikipetya”. En accord avec Jorge, des avancées dans le projet incluent des tutoriels élaborés, des cartes de visite et des politiques d'édition.

Les défis sont nombreux, parmi lesquels attirer ceux qui s'investissent activement comme volontaires. Cependant, Jorge est optimiste et déclare que ce projet sera un grand apport pour l'humanité.

Une coopération potentielle avec l’université maya kaqchikel apporte également de nombreuses opportunités, plus particulièrement pour le projet avec Wikimedia grâce à son corps d'étudiants intéressés par la technologie et parlant le kaqchikel.

En résumé, la rencontre de San Lucas Tolimán a constitué un premier pas significatif pour une ouverture de possibilités qui peuvent se présenter sur internet pour revitaliser la langue kaqchikel et aussi pour apprendre des expériences des autres communautés dans tout le pays. Ces journées ont été le témoin de nouveaux réseaux émergents qui continueront de se développer tout en collaborant sur internet, et ils espèrent se réunir à nouveau grâce au soutien du projet Qatzij.

La “Nouvelle Route de la Soie” solution aux maux économiques de la Chine ? Pas sûr

vendredi 26 mai 2017 à 18:43

La carte de projet de nouvelle Route de la Soie. Image de l'agence d'information d'Etat Xinhua.

La Chine a frappé les esprits avec le forum mondial très médiatisé qu'elle a consacré à son projet “One Belt, One Road” ou nouvelle Route de la soie, tenu à Pékin les 14 et 15 mai 2017. Le schéma d'investissements, intéressant quelque 65 pays, se propose de réaliser une collection d'infrastructures et d'échanges commerciaux qui stimuleront la croissance économique mondiale et relieront les continents asiatique, africain et européen.

Le Président chinois Xi Jinping s'est engagé pour 124 milliards de dollars US lors du forum pour asseoir le rôle moteur de la Chine dans cette nouvelle mondialisation.

Malgré le battage de la presse et de la télévision, les censeurs ont commencé au lendemain du forum à empêcher les Chinois de commenter le plan sur les médias sociaux. Bon nombre d'internautes avaient exprimé leur scepticisme sur ce projet pharaonique au moment où l'économie se débat avec les surcapacités, la hausse vertigineuse des prix de l'immobilier et la bulle du crédit.

Capture d'écran de Weibo le 22 mai 2017. Lorsqu'on poste un commentaire sur l'information relative à “Belt and Road” sur Weibo, apparaît un avertissement selon lequel le commentaire enfreint la réglementation et les conditions d'utilisation.

A part les réactions sceptiques, de nombreux blogueurs chinois ont discuté du projet de manière positive. Ainsi, “Lucky Star No. 1”, écrivant sur le forum en ligne Tianya, a expliqué en mots simples comment la Chine pouvait redémarrer l'ordre économique mondial et devenir le patron grâce au projet de Nouvelle Route de la Soie (aussi appelé “One Belt, One Road”) :

“一带一路”的核心,无非就是投资周边国家的基础设施,使周边国家成为自己的资源供应地和产品市场,而自己本身由于在这一进程中占据主导地位和合理的“剪刀差”,从而获得巨额的经济利益。
看的出来,这是一种投资非常大,风险也非常大,收益也超级大的“项目”,显然只有同时具有超级强大的经济(必要条件)以及政治和军事实力,才有资格去实施。如果你经济实力不够,光是前期的投资就能把你压垮…同样,如果你的政治军事实力不强,拳头不够硬,那就根本别想去干这事,历史证明,你强大,你周边甚至万里之外,都是“友好国家”,你弱小,那你就得小心你的卧榻之侧了。
实施这样的战略,就相当于在地球村,自己开店当老板了,而不是帮别人打工。

Le principe de “One Belt, One Road” est d'investir dans les infrastructures des pays environnants et de les transformer en fournisseurs de matières premières et de marchés pour nos produits. Il y a un énorme gain économique généré par ce rôle moteur dans le projet et un retour sur investissement raisonnable.

On peut voir que l'investissement est énorme, le risque est énorme, et le retour est super-énorme. Seule une entité économique super forte (condition nécessaire) équipée de la puissance politique et militaire peut entreprendre ce projet. Si vous n'avez pas la puissance économique, l'investissement de départ vous entraîne au fond…De même, si vous n'avez pas la force politique et militaire, et que votre main n'est pas assez ferme, vous ne pouvez pas entreprendre le projet. L'Histoire a prouvé que seul le pays fort a des “amis”. Si vous êtes faible, quelqu'un d'autre prend les commandes.

La stratégie est de se transformer en patron du village global plutôt qu'en ouvrier.

Si beaucoup d'utilisateurs du forum Tianya ont répété le rêve ci-dessus de dépasser les USA et l'Europe dans l'ordre économique mondial grâce au projet Belt and Road, certains ont souligné dans le fil  de discussion les problèmes économiques intérieurs non résolus. Pendant l'écriture de cet article, le fil de commentaires a été rendu inaccessible à ceux qui n'étaient pas enregistrés, signe peut-être que le sujet est sensible.

Une personne a écrit :

中国制造业还没解绑,钱都困在房地产,产业升级八字没一撇,面临海外产业发展带来的国内失业,先别吹牛逼好么。美国为什么减税回笼实体,当人家傻子?美国佬早就先行一步了,这个世界怕的就是比你有实力还比你努力。
一会从股市圈钱,一会从房市圈钱,老百姓的钱都圈完了拿什么一带一路。人民币走出去之前自由兑换解决了吗,狂印钱造出来的水份敢放开么?

La Chine n'a pas réglé les problèmes de son secteur productif. Tout l'argent est piégé dans l'immobilier, et la restructuration industrielle marque le pas. Les projets d'investissement à l'étranger ne peuvent pas résoudre le problème du chômage interne, cessons de nous vanter. Pourquoi les États-Unis doivent-ils baisser les impôts et développer un secteur productif ? Est-ce qu'ils sont idiots ? Ils ont une longueur d'avance. Ce dont il faut avoir peur, c'est d'un concurrent plus fort et plus travailleur que soi.

L'argent est gelé sur le marché des actions, dans l'immobilier, l'argent des gens ordinaires est gelé et d'où à part cela peut venir l'argent pour One Bell One Road ? La promesse de la convertibilité du yuan a-t-elle été tenue ? Si la planche à billets continue à fonctionner, comment la libre circulation du yuan sera-t-elle possible ?

Un autre utilisateur a commenté :

一,中国现在是L型经济,L的原因很多,关键是产业还没有升级…
二,想要发展实现中国梦,唯一的道路就是产业升级,说白了,就是走高端产品高技术路线,只有这样才能摆脱高耗能高污染低利润的怪圈
三,很遗憾,我们现在的方向却还是搞基建投资,国内基建饱和,债务上天,于是在国外画了一个圈,继续输出水泥,呵呵,先不说投资安全,单单靠搞基建就能成为发达国家?…
四,大规模对外投资基建,给人家修桥修路修电站,造成的后果很可能,人家凭着你的基建过来和你强低端制造的市场,毕竟人家穷,有人力成本优势,比如越南,比如印尼,届时,你培养的朋友会成为你的有利竞争对手,大家一起争夺低端市场

L'économie de la Chine est maintenant “en forme de L”, la principale raison en est qu'elle n'a pas modernisé ses industries…

La seule route conduisant à la réalisation du rêve chinois est la modernisation industrielle, la concentration des efforts sur les produits de technologie avancée de façon à pouvoir nous extraire du cercle vicieux de la forte consommation énergétique, de la grave pollution, et de la faible rentabilité.

Malheureusement, c'est toujours le chemin de l'investissement dans les infrastructures que nous prenons. la construction d'infrastructures est saturée, avec pour résultat une dette intérieure stratosphérique, nous dessinons alors un cercle hors du pays pour exporter du béton. Sans parler du risque dans l'investissement, pouvons-nous accéder au stade de pays avancé avec des projets de travaux publics ? … Le résultat le plus probable de l'investissement en infrastructures à l'étranger est que le projet les rendra compétitifs sur le marché manufacturier de bas de gamme. Ces pays sont pauvres et ils ont une main d’œuvre abondante. Comme le Vietnam et l'Indonésie. Quand le temps est venu, vos amis deviennent vos ennemis sur le marché du bas de gamme.

Le gouvernement dit avancer de puis des années dans la restructuration de son modèle économique obsolète et la réduction des surcapacités et de l'endettement, mais selon toutes apparences la croissance chinoise reste tirée par le boom de l'immobilier.

Le plan One Belt, One Road pourrait aussi compliquer les efforts de Pékin pour juguler la fuite des capitaux qui pèse sur l'économie. De nombreux internautes ont rappelé l'article d'un organe de presse officiel écrit en 2015, selon lequel 90 % des compagnies chinoises qui investissent à l'étranger perdent de l'argent au lieu de faire des profits. Citant l'article, l'utilisateur de Twitter @szeyan1220 pense que les investissements à l'étranger sont utilisés par les fonctionnaires corrompus pour transférer une immense part de leur richesse hors de Chine :

中国经济贸易促进会副会长王文利就曾这样说过:“中国企业在海外投资总体来讲是不成功的。中国有2万多家企业在海外投资,90%以上是亏损的。” 既然大多数海外投资都是亏损的,那为何还要投呢?难道为了洗钱?向海外转移资产?“一带一路”钱一带就是一路,反正钱都是从老百姓身上搜刮去的。

Wang Wenli, le vice-président de l'Association de Promotion de l'économie et du commerce de la Chine a dit que, “Dans l'ensemble, les investissements à l'étranger des compagnies chinoises sont infructueux. Il y a environ 20.000 compagnies chinoises qui investissent à l'étranger, et 90 % d'entre elles perdent de l'argent”. Si la majeure partie de l'investissement à l'étranger est à perte, pourquoi continuer ? A des fins de blanchiment ? Pour transférer ses actifs hors de Chine ? Nouvelle Route de la Soie. Ceux qui prennent l'argent trouvent leur route, et l'argent est pris aux gens ordinaires.

L'énormité des investissements et le flux continu des sorties de capitaux auront pour résultat l'inflation, a déclaré l'universitaire chinois Zhang Lifan à Voice of America, média financé par les USA :

Zhang Lifan : L'effet négatif de Belt and Road c'est la dépense. Depuis de longues années, le pays est riche et les gens sont pauvres. L'inégale distribution de la richesse conduit à un très grave problème de disparité. Sur l'internet, les gens se plaignent constamment que l'argent dépensé est celui des contribuables et qu'il devrait servir à la santé. Beaucoup d'économistes doutent de la viabilité de la Nouvelle Route de la Soie et prédisent les divers risques potentiels. Mon avis est que cela ressemble à dépenser de l'argent.

Zhang a ensuite explicité sur Twitter ce qu'il entendait par “dépenser de l'argent” :

Je suis un simple observateur, plutôt qu'un opposant [au projet]. Le spectacle ressemble trop au gala annuel de la Fête du Printemps [càd trop idéologique] et je donne un avis négatif. En disant “dépense de l'argent” je ne vise pas la dette étasunienne détenue par la Chine mais l'impression excessive de yuans. Le bloc de l'élite au pouvoir dévalue le yuan, d'où l'inflation et la disparité entre riches et pauvres. La richesse confisquée au peuple sera changée en monnaie étrangère, investie hors frontières ou déposée dans des comptes bancaires de paradis fiscaux aux Caraïbes, au Panama ou en Suisse. Le projet de Nouvelle Route de la Soie offre une nouvelle opportunité de dépenser de l'argent.

De fait, le projet promet de dépenser 5.000 milliards de dollars US rien que dans les cinq prochaines années, et en Asie, l'investissement atteindra 2.5000 milliards de dollars US dans la prochaine décennie. Mais selon certaines estimations, plus de la moitié des pays qui ont accepté chez eux des infrastructures de la nouvelle Route de la Soie ont de mauvaises notes de crédit et le risque de défaillances est très élevé. Si les pays partenaires peuvent aisément reculer, la Chine, en tant qu'initiatrice du projet, devra rester en piste jusqu'au bout.

Journalistes et reporters indépendants : informer au prix de sa liberté, voire de sa vie

jeudi 25 mai 2017 à 22:58
Certains des orateurs au Festival des droits de l'homme à Milan portraits par Gianluca Costantini. Source: page Facebook du festival.

Certains des orateurs au Festival des droits de l'homme à Milan, portraits par Gianluca Costantini. Source: page Facebook du festival.

À propos des reporters qui ont perdu la vie au cours de leurs missions, il arrive de tomber sur des commentaires cyniques, tels que: “Que faisaient Andrea Rocchelli et Andrej Mironov au milieu des querelles entre les Russes et les Ukrainiens?”, « Qui a forcé Ilaria Alpi et Miran Hrovatin à fourrer leur nez dans les affaires somaliennes?”, “Qui sait ce que faisait réellement Giulio Regeni [fr] en Egypte … et Gabriele Del Grande en Syrie?” Comme pour dire, entre les lignes, qu'ils ont cherché ce qui leur est arrivé.

Pourtant, il y a bien des gens qui savent qu'être un reporter peut être un travail noble, mais dangereux. Il le sait très bien Danilo De Blasio Knows, directeur du Festival des droits de l'homme, en accueillant avec émotion le public qui a rempli la salle d'honneur de la Triennale de Milan pour l'événement du 3 mai, consacré aux conditions dans lesquelles les journalistes sont contraints de travailler quand il s'agit de faire la lumière sur les vérités les plus gênantes. Ils le savent bien eux aussi, Gabriele Dossena, Président de l'Ordre des journalistes de la Lombardie, qui, dans une réflexion pour la Journée mondiale de la liberté de la presse [fr] a fait remarquer qu'au cours de la dernière décennie, environ 900 journalistes ont été tués dans le monde entier, dont les deux tiers étaient indépendants.

Journalisme freelance est synonyme de précarité. Moins de protection juridique, aucune couverture d'assurance en cas de poursuites en diffamation infondées, peu de protection contre les menaces et les agressions (on estime qu'entre trente et cinquante journalistes italiens sont contraints de vivre sous la protection de la police), et tout ça pour des revenus ridiculement bas : la rémunération minimale pour un article s'élève à 3,10 euros brut, dit Paul Borrometi, [fr], journaliste d'investigation lauréat de plusieurs prix, qui vit sous protection policière.

Le silence, unique alternative ?

A écouter les histoires de Amalia De Simone [fr] et Paolo Borrometi [fr] on dirait que la réponse à cette question dépend de l'attitude de ceux qui doivent veiller à ce que le travail des journalistes soit mené de manière libre et sûre, à savoir les rédacteurs en chef et les syndicats. De Simone et Borrometi ont beaucoup en commun: journalistes d'investigation, principalement dédiés à débusquer les malfrats en Sicile et en Campanie, sans crainte d'aller déranger les puissants patrons et gangsters. Mais quand Borrometi doit se défendre contre la violence du patron de Vittoria (Ragusa), la Fédération nationale de la presse italienne se constitue  partie civile à ses côtés, De Simone doit regarder derrière son dos pas seulement à cause des malfaiteurs, mais aussi par rapport à ses rédacteurs en chef eux-mêmes, qui lui demandent une indemnisation.

Nadia Azhghikina: Une solidarité qui peut et doit franchir les frontières nationales

En plus des menaces et de la violence physique, ceux qui veulent empêcher que leurs affaires privées soient mises en lumière disposent d'un outil très efficace : le procès téméraire (selon des journalistes présents au festival, il serait préférable de l'appeler “de mauvaise foi”). S'en prendre à un journaliste ne coûte rien au demandeur, mais beaucoup au défendeur qui, même lorsqu'il a raison, devra faire face à toutes les conséquences et aux coûts de sa défense. Un journaliste peut décider de ne prendre un tel risque que s'il sait qu'il peut compter sur le soutien de son rédacteur en chef, tout d'abord, mais aussi sur celui de l’ordre des journalistes [Note : en Italie]. L'alternative n'est donc pas de garder le silence, mais l'esprit équipe.

Giardino Anna Politkovskaja

Le jardin dédié à Anna Politkovskaïa au centre-ville de Milan. Photo de l'auteur

La première chose que Nadia Azhghikina, vice-présidente de la Fédération européenne des journalistes, tient à raconter est sa visite au jardin, dans le centre de Milan, dédié à Anna Politkovskaïa [fr], la journaliste russe assassinée, probablement à cause de ses reportages défavorables au pouvoir. En Russie, il n'y a pas de jardins ou carrés qui lui soient consacrés, et l'enquête sur son assassinat est au point mort, comme beaucoup d'autres meurtres de journalistes russes (plus de 350 depuis 2009), restés sans coupables.

“C'est seulement dans un effort commun”, dit Azhghikina, que nous pouvons arriver à rétablir la liberté qui ne peut se construire uniquement avec les luttes et les barricades, mais par de simples actions quotidiennes”. En Russie, la liberté de presse laborieusement obtenue au début des années 90, se perd graduellement au fur et à mesure que les médias deviennent un outil utile aux mains des puissances économiques, ainsi que des politiciens et des journalistes qui ont commencé à écrire pour l'argent, beaucoup d'argent, dans l'illusion d'être en mesure de confier l'information au seul marché libéral et non aux syndicats.

Mais ils paient un prix élevé pour cette illusion. Il y a des lois pour protéger les journalistes, mais personne ne demande leur application, parce que le public ne considère pas la liberté des journalistes comme un problème. Pas même entre collègues il n(y a de solidarité, pourtant Azhghikina estime que la solidarité entre les journalistes italiens – pensons à la mobilisation lors de l'enlèvement de Giuliana Sgrena, mais également à la solidarité démontrée avec ceux qui sont confrontés à la mafia – représente un exemple qui peut être source d'inspiration pour nos collègues russes.

Ahmet Insel: être journaliste aujourd'hui en Turquie c'est jouer à la roulette russe

Le journaliste turc Ahmet Insel a lui aussi participé au festival:

En Turquie, j'ai connu la dictature militaire. Et, dans les années 90, également “les années dites de plomb”, semblables à celles des années 70 en Italie, au cours desquelles de nombreux journalistes ont été tués. Aujourd'hui, nous vivons dans un”État arbitraire”. Honnêtement, je ne pourrais dire lesquelles je préfère.

Insel a déclaré qu'en Turquie 158 médias ont été fermés, dont 60 chaînes de télévision, 19 journaux, 29 maisons d'édition et cinq agences de presse. Les journalistes en prison, à ce jour, sont 150. Mais le plus inquiétant est que, dans la plupart des cas, on ne sait pas pourquoi. Cela peut être parce que la Turquie est un “État arbitraire”. Ce n'est pas une dictature, connue pour censurer toutes les formes de liberté, mais qui devrait être renversée tôt ou tard. Ce n'est pas un État de droit, qui pourrait ne pas être aussi une démocratie, mais qui dispose de lois limitant les tentatives d'abus et restrictions injustifiées de la liberté d'expression. Un État arbitraire donne l'illusion de vivre, travailler, étudier et faire du journalisme de manière normale et libre, mais sans jamais savoir ce qui sera considéré comme illégal.

La seule façon de lutter contre l'autoritarisme est l'indépendance de la justice

Insel poursuit son analyse en notant que la tendance à l'autoritarisme existe partout et que tous les autoritarismes modernes ont comme principal objectif de dominer la justice, parce que ce faisant ils obtiennent le contrôle de la société sans tuer personne. C'est ici, dit-il, que se trouve la différence entre l'autoritarisme “burlesque”, comme celui de Berlusconi [fr] en Italie, où la justice a réussi à maintenir son indépendance, et l'autoritarisme despotique, comme le turc, qui contrôle pleinement la justice et ne laisse aucune possibilité d'utiliser des moyens pacifiques pour restaurer la démocratie. Aujourd'hui, d'après Insel, la justice turque est totalement inféodée au pouvoir, et l'accusation de propagande en faveur du terrorisme est une excuse pour mettre en œuvre la répression, non seulement contre les personnes arrêtées, ainsi aussi sur les 1 500 journalistes chômeurs, licenciés en raison de la pression exercée sur les rédactions par le Président de la République, qui décide arbitrairement qui sont les journalistes “indésirables” qui doivent être écartés. Cela peut avoir lieu parce que, vers la fin des années 80, les rédactions des journaux ont éliminé toute forme de protection syndicale pour les journalistes.

Les journalistes turcs en danger. Illustration de Gianluca Costantini pour FDU Milan. Source: page Facebook du Festival droits de l'homme.

Les journalistes turcs en danger. Illustration de Gianluca Costantini pour FDU Milan. Source: page Facebook du Festival des droits de l'homme.

Le journalisme, pour être de qualité, ne devrait pas être militant. Mais l'état de exception [fr] dans lequel se trouve maintenant la Turquie a rendu nécessaire de faire du journalisme de mobilisation, qui mette l'accent sur la contestation au détriment de l'information pure. Ce n'est pas du bon journalisme, reconnaît Insel, mais il n'y a pas d'autre choix. A partir de 2015, année des élections, la Turquie est devenue un pays toujours plus violent : attentats, affrontements entre les forces de sécurité et le PKK, ainsi qu'actes de violence généralisée entre militaires et civils qui ont tué plus de 2.000 personnes. Parmi les plus ciblés et les plus vulnérables sont les journalistes locaux, dont les vicissitudes ne sont pas nouvelles au niveau national ou international. Insel ajoute :

On me demande comment je peux exercer le métier de journaliste dans ces conditions. Moi, je ne me considère pas comme un journaliste. je suis plus un chromiste, une personne qui va de l'avant. Pendant que je continue, des bombes me tombent à côté. Quelqu'un meurt, un autre est arrêté, mais je vais aller de l'avant. D'autres bombes, d'autres victimes, mais, moi, je continue. Nous savons qu'un jour que ce sera notre tour, mais tant que nous ne serons pas ceux touchés, nous aurons le pouvoir de parler pour ceux qui sont tombés. Le droit et le devoir d'aller de l'avant.

Les journalistes provoquent-ils leur sort?

Beppe Giulietti, Président de la Fédération nationale de la presse Italienne, s'énerve quand on parle des responsabilités des journalistes par rapport aux dangers auxquels ils sont et confrontés et souligne combien l'ombre et le silence sont nécessaires pour la criminalité qui, de façon compréhensible, déteste l'exposition médiatique. C'est la tension pour la découverte qui fait le journaliste (pas la carte de membre), et lorsque celle-ci l'expose à des situations de risques ce sont les collègues qui ont l'opportunité de le protéger comme une sorte ‘d'escorte médiatique‘: si pour chaque journaliste menacé pour avoir soulevé le voile sur sur des affaires douteuses, il y avait d'autres collègues pour continuer son action pour dévoiler encore plus, avec plus de questions, une autre caméra, un autre microphone, les criminels sauraient que plus ils menacent plus ils seront exposés pour qui cherche la vérité.

Ci-dessus: Andrea Rocchelli et Andrej Mironov dans l'illustration de Gianluca Costantini. Source: festivaldirittiumani.it - Ci-dessous: Les parents racontentde Andrea Rocchelli leur lutte pour arriver à la vérité. Source: festivaldirittiumani.it

Ci-dessus: Andrea Rocchelli et Andrej Mironov dans l'illustration de Gianluca Costantini. Source: festivaldirittiumani.it – Ci-dessous: Les parents d'Andrea Rocchelli racontent leur lutte pour arriver à la vérité. Source: festivaldirittiumani.it

L'histoire d‘Andrea Rocchelli, racontée au Festival par ses parents, pourrait nous servir de paradigme pour comprendre beaucoup d'histoires, malheureusement semblables, comme celles de Giulio Regeni, Ilaria Alpi et Miran Hrovatin, Enzo Baldoni [fr] Raffaele Ciriello, Antonio Russo.

Rocchelli était particulièrement intéressé par le processus de dissolution de l'expérience soviétique, et après l'avoir suivi et documenté dans des régions comme le Daghestan et la Tchétchénie, il avait débarqué en Ukraine, où il avait raconté les journées de l‘Euromaidan [fr] en 2013.

Peu de temps après son retour en Italie, il était à nouveau reparti, à ses frais, pour l'Ukraine, avec son homologue russe Andrei Mironov. Tombés au milieu d'un échange de tirs pour ce qui semblait être un hasard, le 24 mai 2014, les deux journalistes ont été tués. Mais grâce à la ténacité des parents et des collègues journalistes de Rocchelli et la découverte de quelques photos prises par le journaliste dans les derniers moments de sa vie, le procureur de Milan a ouvert une nouvelle enquête: En dépit d'une enquête initiale (intentionnellement) sommaire, en Ukraine, ayant confirmé l'hypothèse d'un accident, il semble au contraire que les journalistes avaient été la cible d'une attaque.

L'intervention d'Alessandra Ballerini, l'avocate de la famille Rocchelli, a clos la conférence avec ces mots :

Quand on défend les droits humains et la liberté d'expression qui est l'un des principaux droits de l'homme, on le fait pour soi-même d'abord. Si on le fait pour d'autres, à savoir en protégeant ceux d'autrui, on le fait de toute façon pour exiger ses propres droits. Et c'est là la magie de l'universalité des droits de l'homme.

Des bénévoles rendent Diaspora* et d'autres logiciels libres disponibles en occitan

jeudi 25 mai 2017 à 22:40

Photographie de l'utilisatrice de Flickr she_who_must et reproduite sous licence CC BY-NC-ND 2.0.

Sauf mention contraire, les liens de cet article renvoient vers des pages en anglais.

Grâce à des traducteurs bénévoles, le réseau social libre Diaspora* est maintenant disponible dans quelques unes des langues les plus utilisées au monde : le chinois, le japonais, l'espagnol, le portugais… Mais si l'on examine la liste des langues dans lesquelles la totalité du site a été traduite, une en particulier saute aux yeux. C'est l'occitan [fr].

L'occitan est une langue romane parlée dans le sud de la France et dans certaines parties de l'Espagne, de Monaco et de l'Italie. Le nombre de locuteurs varie selon les sources, mais une chose est claire : ce nombre diminue. L'occitan a plusieurs variantes, mais un “occitan standard” prenant en compte leurs différences est en train d'émerger. D'après l'Atlas mondial des langues en danger de l'UNESCO, le provençal, l'auvergnat, le limousin et le languedocien sont “en danger sérieux” d'extinction, et le gascon et le vivaro-alpin sont “en danger”.

Une petite équipe de traducteurs, convaincue que Diaspora* pourrait devenir un important moyen de promouvoir leur langue, a ainsi entrepris de créer une version occitane du réseau social.

Quentin Pagès parle languedocien et est l'un de ces traducteurs. Il a également collaboré sur la traduction occitane d'autres plate-formes telles que Jitsi Meet, Wallabag [fr], Framadate et Mastodon. Il fait part de son expérience dans un court entretien avec Rising Voices.

Rising Voices (RV) : Pourquoi vous est-il important que Diaspora* existe en occitan ?

Quentin Pagès (QP): So people can start using it and it gives visibility to the language. I don’t like when people decide that one language has more value than another. In my opinion, every language is as equal as the next. That is why it is important to me that Occitan is available as a complete language. Even though the Occitan language is not one of the most used languages on Diaspora*, by being an open-source project, the translation work can be reused for other projects that may use the same terminology and phrasing.

Quentin Pagès (QP) : Pour que les gens se mettent à l'utiliser et que cela donne de la visibilité à la langue. Je n'apprécie pas que certains décident qu'une langue a plus de valeur qu'une autre. Pour moi, toutes les langues sont égales. C'est pour cette raison qu'il est important pour moi que l'occitan soit disponible [sur Diaspora*] dans une traduction complète. Même si l'occitan n'est pas la langue la plus utilisée sur Diaspora*, le fait d'être un projet libre permet de reprendre les traductions sur d'autres projets qui peuvent utiliser les mêmes terminologie et expressions.

RV : Comment avez-vous démarré ce projet de localisation ?

QP: I decided to start the translation of Diaspora* because it was included in a list of alternative open-source platforms compiled by a French association called Framasoft through its campaign called “De-Google-ify the Internet”. From that list, I also helped to translate Jitsi Meet, Wallabag, Framadate, and now the new social network platform called Mastodon. For the translation of Diaspora, the team consisted of three people and we primarily communicated via email.

QP : J'ai décidé de commencer à traduire Diaspora* parce qu'il faisait partie d'une liste de plate-formes alternatives libres compilée par une association française appelée Framasoft, dans le cadre de sa campagne “Dégooglisons Internet”. À partir de cette liste, j'ai aussi aidé à traduire Jitsi Meet, Wallabag, Framadate, et maintenant la nouvelle plate-forme de réseau social Mastodon. Pour la traduction de Diaspora*, nous étions une équipe de trois personnes et nous avons communiqué essentiellement par e-mail.

RV : Quelles difficultés majeures avez-vous rencontré en traduisant Diaspora* en occitan ?

QP: You might expect that a challenge for translation would be a lack of vocabulary or something like that. But it wasn’t about that, it was about finding people to review the translated texts and to help collaborate with the work. The Occitan language has good flexibility to create new words. So on the one hand, I wish there were more of us to translate, but on the other hand, there was just a few of us, so we could check that a word was translated in the same way everywhere. For the word “reshare,” you may find some instances where it is displayed as “repartejar” and other places as “tornar partejar.” I could change them, but as they both mean the same and both are correct, I decided to leave both.

QP : On pourrait s'attendre à ce que la difficulté d'une traduction réside dans l'absence de vocabulaire, ou quelque chose comme ça. Mais ça n'a pas été ça. Ça a été de trouver des gens pour relire les textes traduits et prêts à collaborer. La langue occitane est flexible, elle peut créer de nouveaux mots. Donc d'un coté, j'aimerais qu'on soit plus nombreux à traduire, mais de l'autre, comme nous étions une petite équipe, nous pouvions vérifier qu'un mot était bien traduit de la même façon partout. Pour le mot “re-partager”, vous trouverez des instances avec “repartejar” et d'autres avec “tornar partejar”. Je pourrais les changer, mais comme les deux signifient la même chose et sont tous les deux corrects, j'ai décidé de laisser les deux mots.

RV : Pensez-vous que les gens se mettent sur Diaspora* en occitan ?

QP: Somehow people still haven’t tried this social network. I wish people used tools that are available in Occitan, but at the moment it seems that only a few people value the availability of the language as a strong draw. In the case of Diaspora* in Occitan, it would be a really good way to gather people that want to support the language and so we can collaborate in other projects together. In my opinion “working for the language” has to be done in Occitan so as to be coherent. That is why I prefer to use open-source software because I know that if I have some time, I can contribute and give my language other chances to be seen and used by people.

QP : Les gens n'ont pas encore vraiment essayé ce réseau social. J'aimerais qu'ils utilisent les outils disponibles en occitan, mais pour le moment on dirait que la présence de leur langue n'est un argument que pour un petit nombre d'utilisateurs. Dans le cas de Diaspora* en occitan, ce serait vraiment une bonne manière de rassembler les gens qui veulent soutenir la langue et de collaborer ensemble sur d'autres projets. Pour moi, “travailler sur une langue” doit être fait en occitan si on veut être cohérent. C'est pour ça que je préfère utiliser des logiciels libres, parce que je sais que si j'ai du temps, je peux y contribuer et donner à ma langue d'autres chances d'être vue et utilisée.

Avez-vous déjà lu l'article le plus populaire de Global Voices ?

jeudi 25 mai 2017 à 20:49

Un monument important de Singapour. Source: Flickr / Leonid Yaitskiy (CC BY-SA 2.0)

Chaque semaine, lorsque nous établissons le compte des publications les plus lues sur le site Global Voices, un article sort toujours du lot : “Singapour : ville ou pays ?” (tout récemment traduit en français)

Il figure toujours sur notre liste hebdomadaire à cause du nombre élevé de visiteurs uniques qui le consultent. En mars 2017, c'était le second article le plus lu sur notre site web [en anglais]. Cela est d'autant plus surprenant que l'article a été écrit et publié en 2009.

En matière de trafic, depuis les débuts de Global Voices, cet article arrive à la seconde place.

Alors quelles sont les raisons de cette popularité ?
Serait-ce à cause de son titre optimisé pour les moteurs de recherche ? Certes, l'article figure dans les résultats de recherches pour “Singapour Pays” (“Singapore Country”). Et il atteint même la première position si l'internaute désire en savoir davantage avec une recherche “Singapour ville pays” (“Singapore City Country”).

Selon mes amis singapouriens, la question que pose l'article n'est que rarement traitée par la politique du pays, dans les débats dans les médias ou dans la recherche universitaire. Les habitants de Singapour étant bien conscients qu'ils habitent dans une ville-pays, je suppose donc que le trafic vers cet article est plutôt dû aux touristes, à ceux qui travaillent à l'étranger ou à de simples citoyens du monde entier désirant y voir plus clair sur le statut de ville ou de pays de Singapour.

Quand j'ai écrit l'article en 2009, mon objectif n'était pas tant de traiter directement du fond du sujet que de souligner combien une remarque polémique formulée par un ministre du gouvernement d'alors avait entraîné d'âpres débats en ligne. Répondant à une critique disant que la démocratie de Singapour est dominée par un parti unique (Le parti d'action populaire, ou People's Action Party), le ministre avait pris le public par surprise lorsqu'il a soutenu que son pays devait être considéré comme une ville. Quelques blogueurs et d'autres citoyens l'ont évidemment accusé de recourir à une “logique bancale” et de procéder à de fausses analogies afin de justifier la domination du parti unique à Singapour.

A l'époque, j'avais simplement veillé à ce que soient représentées l'ensemble des opinions débattues sur ce sujet, sans escompter le moins du monde qu'il rencontrerait un si grand succès sur notre site.

À chaque fois que je relis cet article, ce qui me frappe est que les liens vers les blogs et les sites ne soient plus disponibles. Dans la mesure où il est toujours lu aujourd'hui, dois-je le mettre à jour en supprimant les liens morts et les remplacer par de meilleures sources plus récentes ? Dois-je livrer des points de vue supplémentaires et répondre plus clairement à la question posée par le titre ?

En définitive, nous avons conservé l'article en l'état (à peine avons-nous ajouté une photo pour nous conformer au style de la nouvelle interface). Les citations des anciens blogs ont été conservés, ce qui reflète à mon avis la mission de Global Voices de publier des opinions absentes des médias traditionnels.

J'ignore si tous ceux ayant cliqué vers l'article voulaient en savoir davantage sur la politique locale de Singapour, mais j'espère du moins que cela a aiguisé leur intérêt pour le système politique et électoral de Singapour, et que cela les a encouragés à découvrir davantage d'histoires liées à ce pays sur Global Voices.