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“Yasmine”, le premier long métrage du Brunei

mercredi 20 août 2014 à 09:09

Le film Yasmine est à remarquer, car il s'agit du premier long métrage produit au sultanat de Brunei. Le sujet en est une jeune femme qui veut devenir championne de silat, un art martial local. Le film a été bien accueilli dans différents festivals.

Brésil : Une nouvelle arme contre la dengue, des millions de moustiques transgéniques dans le ciel du Sertão

mardi 19 août 2014 à 20:51
Na cidade de Juazeiro, nos limites entre Pernambuco e Bahia, a Moscamed experimenta técnica de mosquitos transgênicos. Foto: Coletivo Nigéria/Agência Pública

Dans la ville de Juazeiro, à la limite entre l'Etat de Pernambouc et celui de Bahia, Moscamed expérimente le moustique transgénique. Photo: Collectif Nigéria/Agência Pública

Ce reportage du Collectif Nigeria a été publié le 8 octobre 2013 sur le site internet de Agencia publica. Global Voices ‘republie ici le premier de cette enquête en trois volets.

Sur les rives du rio São Francisco, à la frontière entre l'Etat du Penambouc et celui de Bahia, au Brésil, Juazeiro est une ville traversée par de nombreux ruisseaux, affluents d'un des fleuves les plus importants du pays. Cette ville compte aujourd'hui plus de 200 000 habitants, c'est la plus grande agglomération urbaine de cette zone semi- aride du nord-est du Brésil. Avec Petrolina, la population arrive à un demi-million de personnes dans une zone infestée de moustiques. Tous les cours d'eau qui drainent ces petits ruisseaux se transforment en égouts à ciel ouvert, incubateurs de larves de ces moustiques qui sont traditionnellement combattus par les insecticides, les raquettes électriques, les fenêtres avec moustiquaire, ou l'air conditionné pour les plus riches.

Juazeiro est également un centre d'expérimentation d'une nouvelle technique scientifique utilisant des moustiques Aedes aegypti transgéniques pour combattre la fièvre transmise par cette espèce : la dengue. Cette méthode développée par l'entreprise britannique de biotechnologie Oxitec consiste à insérer un gène létal sur l'ADN de moustiques mâles qui, libérés en grande quantité dans le milieu ambiant, copuleront avec les femelles sauvages, donnant une descendance appelée à mourir avant d'arriver à l'état adulte.  De cette manière, si l'expérience fonctionne, la mort prématurée des larves réduira progressivement la population de moustiques de cette espèce.

Laboratório de criação de mosquitos transgênicos da Moscamed. Foto:Coletivo Nigéria/Agência Pública

Unité de production de moustiques transgéniques de l'entreprise Moscamed. Photo:Collectif Nigéria/Agência Pública

 Cette technique est une arme nouvelle pour combattre la dengue, cette maladie qui non seulement résiste mais progresse malgré les méthodes utilisées jusqu'à maintenant pour la contrôler. L”Organisation Mondiale de la Santé estime qu'il pourrait y avoir environ 100 millions de cas de dengue par an dans le monde. Au Brésil la maladie est endémique, avec des poussées épidémiques annuelles,  principalement dans les grandes villes.  En 2012, entre le 1er janvier et le 16 février on a enregistré plus de 70 000 cas dans le pays.  En 2013, sur cette même période, le nombre a triplé. En 2014, jusqu'à aujourd'hui 400 personnes sont mortes de la dengue au Brésil

A Juazeiro, le protocole d'expérimentation de cette licence britannique est mis en oeuvre par l'organisme Moscamed qui gère la reproduction et le largage à l'air libre des moustiques transgéniques depuis 2011. Dans ce centre installée sur la commune, qui a la capacité de produire jusqu'à 4 millions de moustiques par semaine, a lieu toute la chaîne de production de la souche transgénique,  à l'exception de la modification génétique proprement dite qui est réalisée dans les laboratoires Oxitec à Oxford. Les larves transgéniques sont importées par Moscamed et mises en reproduction dans les laboratoires de l'institution.

Ces expériences sont financées par le secrétariat la Santé de Bahía et soutenues par la municipalité de Juazeiro.  Au mois de juillet, elles ont été étendues à la commune de Jacobina, dans l'extrême nord de la Meseta Diamantina. Dans cette ville en zone montagneuse d'environ 80 000 habitants, Moscamed  a testé la possibilité de supprimer (terme utilisé par les scientifiques pour l'extermination de toute une population de moustiques) Aedes aegypti dans toute la ville. A Juazeiro,  cette stratégie semble efficace mais elle est limitée à deux quartiers seulement pour l'instant.

Aldo Malavasi, actuel président de Moscamed,  professeur retraité du département de génétique de l'institut des BioSciences de l'université de São Paulo (USP), partenaire du projet, s'exprime sur le sujet : 

 Les résultats de 2011 et  2012 ont montré que la technique fonctionnait bien . A l'invitation et avec l'aide financière du gouvernement de l”Etat de Bahia, nous avons décidé d'aller à Jacobina  pour faire un test visant à éliminer totalement la population de ce moustique.

Aldo Malavasi  travaille sur cette zone depuis 2006,  lorsque Moscamed  a été créé pour combattre un parasite agricole, la “mouche des fruits”, avec une technique similaire, celle de l'insecte stérile.  La procédure est  la même :  fabriquer des insectes stériles qui copuleront avec des femelles sauvages et ainsi réduiront progressivement la population visée. Il y a une différence au niveau de la méthode de stérilisation. Au lieu d'une modification génétique, on utilise l'irradiation. C'est La TIE, très utilisée depuis les années 1970, principalement contre les espèces considérées comme menaçantes pour l'agriculture. Le problème est que jusqu'à maintenant cette technologie ne convient pas à des moustiques du type Aedes aegypti,  qui ne résistent pas à l'irradiation de manière satisfaisante. 

Antes de cidade brasileira, testes com mosquitos soltos em cidades já haviam sido realizados na América Central. Foto: Reprodução/Coletivo Nigéria

 Avant les villes brésiliennes, des expériences ont été menées avec des lâchers de moustique dans des villes d'Amérique centrale. Photo: Collectif Nigéria  

Les première lâchers dans la nature de l’Aedes transgénique ont été réalisés dans les îles Caiman, entre 2009 et 2010.  Ce territoire britannique dans les Caraïbes n'est pas seulement un paradis fiscal,  mais également un “endroit favorable” aux tests de moustiques transgéniques du fait de l'absence de loi sur la sécurité biologique. Les îles Caiman ne sont pas signataires du Protocole de Cartagène, principal document international sur ce thème, elles ne sont pas non plus protégées par la Convention de Aarhus, approuvée par l'Union européenne, qui traite de l'accès à l'information, de la participation et de la protection juridique lors des prises de décisions concernant le milieu ambiant.

Ainsi, au lieu de publier et d'organiser une consultation publique sur les risques de cette expérimentation, comme l'exigent les accords internationaux mentionnés ci-dessus, 3 millions de moustiques libérés dans la nature tropicale de ces îles se sont faits connaître au monde sans le moindre débat public.  L'autorisation a été accordée exclusivement par le ministère de l'Agriculture de ces îles. 

Ce nombre est insignifiant par rapport à la quantité de moustiques qui ont été largués à Juazeiro de Bahía à partir de février 201.  Cette ville, ainsi que Jacobina,  ont été transformées en un grand champ d'expérimentation avec plus de 18 millions de moustiques déjà largués selon les chiffres de Moscamed.  Cet organisme se différencie de Oxitec car son but dans les tests avec l’Aedes aegypti transgénique a pour objectif de vérifier l'efficacité ou la non efficacité de cette technique dans le combat contre la dengue. 

Aldo Malavasi  insiste sur le fait qu'ils n'ont accepté aucun financement de Oxitec afin de garantir leur impartialité dans l'évaluation de cette technologie. 

Au niveau institutionnel, outre les dépenses prises en charge par le secrétariat de la Santé de l'état de Bahia,  le programme a également obtenu l'appui du secrétariat de la Santé de la municipalité de Juazeiro de Bahía.  Obtenir l'approbation de la population n'a pas été aussi facile, comme le raconte un l'infirmier, Mario Machado,  directeur de la promotion de la santé au niveau municipal :

 Au début il y a eu des réticences. Les gens ne voulaient pas des pièges à moustique dans leur maison, mais au bout d'un moment ils ont bien compris le projet et les résistances sont devenues plus faibles. 

Armadilha da dengue. Foto: Coletivo Nigéria/Agência Pública

Piège pour les moustiques. Photo: Collectif Nigéria/Agência Pública

 Ces dispositifs dont parle Aldo Machado sont de simples pièges installés dans les maisons de certains habitants de la zone traitée. Il permettent de vérifier la réduction de la population d’Aedes aegypti sauvages, qui a atteint 96% à Mandacaru. Le test dans cette exploitation agricole située à quelques  kilomètres du centre commercial de Juazeiro, a donné les meilleurs résultats . 

L'accueil a été bien différent dans le quartier de Itaberaba,  le premier à avoir reçu des moustiques transgéniques début 2011.  Même l'indice élevé d'infection par le moustique Aedes aegypti  n'avait pas réussi à persuader  la population. Aldo Machado expose ce problème.

 Malgré nos tentatives d'informer de maison en maison, de bar en bar,  beaucoup de gens restaient sceptiques :  ”Non non vous mentez ! Ces moustiques  continuent à nous piquer !”

 Bien que peu de personnes du quartier se souviennent de cette expérience,  un an après la fin des largages,  le nom de la commune de Itaberaba  a fait le tour du monde quand Oxitec  a annoncé que la première expérimentation dans la nature au Brésil avait permis d'atteindre une réduction de 80% de la population de moustiques sauvages !

Contrôleuse de terrain pour Moscamed, la biologiste Luiza Garziera a été parmi les personnes qui ont fait du porte-à-porte pour expliquer le processus, en évitant un discours souvent trop scientifique pour mieux se faire comprendre.

 J'ai expliqué que nous allions libérer des moustiques mais uniquement des moustiques mâles qui ne piquent jamais.  Seul le moustique femelle pique les humains.  J'ai également expliqué que lorsque ces moustiques mâles s'accouplent avec  des moustiques femelles, ils produisent une descendance qui meurt avant d'arriver à l'âge adulte.

C'est un des aspects les plus importants de cette nouvelle technique. Lorsque Moscamed libère seulement des moustiques mâles, au taux de 10 moustiques transgéniques pour un sauvage, elle immerge  la population locale dans une nuée de moustiques en garantissant qu'ils ne vont pas les piquer.  Et ceci parce que seule la femelle s'alimente de sang humain liquide, qui lui apporte les protéines nécessaires pour son ovulation

Vous pouvez lire la deuxième partie ici: Evaluation des risques pour la population du Brésil
Vous pouvez lire la troisième partie ici : Moustiques transgéniques à vendre, le marché de la dengue au Brésil

La junte militaire thaïlandaise consolide son pouvoir par une constitution intérimaire anti-démocratique

mardi 19 août 2014 à 19:00
Infographics from Prachatai

Infographie de Prachatai

Le gouvernement militaire Thaïlandais, ou Conseil National pour la Paix et l'Ordre (NCPO), a promulgué une constitution intérimaire qui devrait mener à des réformes démocratiques dans le pays, mais ses critiques soulignent que ce nouveau texte est destiné à faire durer la dictature militaire.

Comme le montre l'infographie ci-dessus, tirée du journal en ligne indépendant Prachatai, la constitution valide la création des différents organes qui devraient gouverner le pays, à savoir l'Assemblée Nationale Législative (220 membres), le Conseil National pour les Réformes (250 membres), le Comité de Rédaction de la Constitution (36 membres) et le NCPO. C'est le Conseil National pour la Paix et l'Ordre, ou le pouvoir militaire, qui choisira les membres de ces corps d'état. Alors que le premier ministre et le cabinet (35 membres) seront choisi par l'assemblée législative.

Le Roi Bhumibol Adulyadej a déjà ratifié la constitution, ce qui renforce la légitimité du gouvernement militaire étant donné que le roi reste la personne publique la plus respectée de Thaïlande.

Ce soir, le chef de la junte, le Général Prayuth, a reçu la constitution intérimaire ratifiée par la roi des mains de Sa Majesté le Roi

L'Armée Royale Thaïlandaise a pris le pouvoir par un coup d'état le 22 mai 2014 afin de mettre fin aux violentes altercations entre les principaux partis politiques. L'armée s'est engagée à mettre en place des réformes politiques et électorales avant de remettre le pouvoir à un gouvernement civil.

La rédaction d'une nouvelle constitution devait être le point de départ d'une transition du pays vers un gouvernement civil. Mais à en croire les 48 articles du document, il semblerait que les militaires vont garder un pouvoir considérable dans le prochain gouvernement.

L'association des Citoyens Thaïlandais Contre la Dictature qualifie la constitution de “constitution la plus anti-démocratique des cinquante dernières années en Thaïlande”.  Elle se demande pourquoi la constitution ne peut pas être approuvée par référendum:

La population va être forcée d'accepter une constitution qui légalise l'autorité de la junte de façon permanente. Ce qu'il y a d'affreux c'est que cela se passe au nom d'une “réforme” pour une meilleure “démocratie”.

Khemthong Tonsakulrungruang, universitaire en droit, critique les “caractéristiques anti-démocratiques” de la constitution :

Le rédacteur avait pour objectif que la constitution soit “démocratique, c'est-à-dire compatible avec le contexte thaïlandais”. Que signifie contexte thaïlandais ? Devons-nous construire une démocratie hypocrite, moralement surréaliste, ultra nationaliste, formellement hiérarchique ? Le nouveau vocabulaire donne la possibilité à la constitution de comporter des caractéristiques anti-démocratiques sous prétexte de particularités thaïlandaises spécifiques.

La constitution émet plusieurs restrictions dans le choix des membres de l'assemblée législative. Par exemple, quelqu'un qui a été membre d'un parti politique au cours des trois dernières années ne peut pas en faire partie. Khaosod English, un quotidien thaïlandais, attire l'attention sur le fait que cela permet aux responsables militaires et à leurs amis de garder la main mise sur le gouvernement intérimaire :

Avec tous les hommes politiques récents et empêchés de se présenter, il est certain que le gouvernement intérimaire restera aux mains des militaires et de de leurs fidèles alliés.

Le président du Parti Démocrate et ancien Premier Ministre, Abhisit Vejjajiva, s'interroge sur l'article 44 de la constitution qui donne tous les pouvoirs au NCPO pour intervenir dans presque tous les aspects de la gouvernance :

L'article 44 indique clairement que le pouvoir peut contraindre le pouvoir législatif et judiciaire, sans avoir recours à une procédure de remise en question ou d'examen. Cela veut dire qu'il a la possibilité de faire une loi ou de contredire un jugement.

Human Right Watch traite la constitution de “charte pour la dictature” car elle donne des pouvoirs énormes au NCPO.

En réponse à ces critiques, le chef de la junte thaïlandaise et Général en Chef des Armées Prayuth Chan-ocha explique ainsi le rôle des militaires dans le renforcement de la démocratie dans le pays : “Tant que le pouvoir est utilisé à bon escient, il n'y a pas lieu de s'inquiéter.”

Après la promulgation de la constitution, le NPCO a nommé les membres de l'assemblée législative. Des discussions ont par ailleurs débuté sur les réformes que la Thaïlande doit entreprendre dans les prochains mois. En dépit de ces initiatives, il reste encore bon nombres d'obstacles à surmonter avant que la Thaïlande puisse prétendre à la démocratie.

Les guérilleros séparatistes de Donetsk kidnappent le guérillero graffeur ukrainien qui a osé se moquer d'eux

mardi 19 août 2014 à 18:53
This is Sergey Zakharov's latest artwork critical of DNR and its former commander Strelkov. Image from Facebook.

La dernière oeuvre de Sergueï Zakharov, critique de la RPD et de son ex-commandant Strelkov. Source image : Facebook.

La chance a tourné pour le guérillero-artiste ukrainien qui accrochait subrepticement dans toute la ville occupée de Donetsk des illustrations se payant la tête des séparatistes de la République Populaire de Donetsk : il y a une semaine il a été capturé par les rebelles et n'a pas reparu depuis.

C'est en juillet que Sergueï Zakharov a commencé à créer des oeuvres ridiculisant la République populaire de Donetsk auto-proclamée, et les premières figures en contreplaqué de séparatistes en tenue de camouflage et maquillés comme des clowns ont rapidement fait leur apparition dans les rues de la ville. Fixées aux clôtures et aux bâtiments, les silhouettes grotesques ont aussitôt été remarquées et leurs photos se sont multipliées sur les réseaux sociaux.

Donetsk occupé a été envahi de graffitis de terroristes sous forme de mort, de clowns et de Charikovs.

L'écrivain et confrère artiste Sergii Mazurkevych, que Zakharov a invité à rejoindre son collectif artistique en herbe baptisé Murzilka (d'après le personnage de fiction d'un journal pour enfants), a dit que les oeuvres de son amis étaient souvent une réaction aux événements du conflit en Ukraine de l'Est.

Сергей реагировал на сбитый “Боинг”, а потом появился портрет Стрелкова-Гиркина, который приставляет пистолет к виску. Он был прикреплен к стене кинотеатра “Комсомолец” в центре Донецка. Эта инсталляция провисела, наверное, часа два и сразу попала в интернет. Я даже у некоторых людей видел такие аватарки. Последняя работа – 30 июля.

Sergueï a réagi au Boeing abattu, ensuite est apparu le portrait de Strelkov-Guirkine le pistolet sur la tempe, fixé sur le mur du cinéma “Komsomolets” dans le centre de Donetsk. Cette installation est probablement restée accrochée deux heures et a aussitôt été sur Internet. J'ai même vu plusieurs personnes en faire leur avatar. Sa dernière oeuvre [avant sa capture]—du 30 juillet.

Zakharov himself, attaching a new artwork to a fence in Donetsk. Image from Facebook.

Zakharov lui-même accrochant une nouvelle oeuvre à une clôture à Donetsk. Source image : Facebook.

Parmi les autres installations de Zakharov sur le thème des rebelles, il y a des insurgés anonymes à visages de clowns avec des fusils, des têtes de mort ricanantes en treillis avec le drapeau de la RPD et autres personnages pittoresques. Une de ses oeuvres les plus connues est le portrait d'un des commandants rebelles surnommé Motorola (notoirement courtaud, portraituré par Zakharov en faune) et sa nouvelle épousée, beaucoup plus grande que lui ; cette oeuvre était accrochée à une barrière juste devant le bureau des mariages de la ville, et elle est aussi devenue virale en ligne.

Les peintres de Donetsk continuent à combattre le terrorisme en utilisant l'art.

Les rebelles ont évidemment aussi remarqué les oeuvres d'art et elles ne leur ont pas plu. Mazurkevych indique que la page internet de leur collectif artistique a été piratée et détruite deux fois début août, et reste indisponible, même si leur page Facebook est active. Puis, tard dans la soirée du 6 août, Zakharov a reçu dans son atelier la visite de quatre hommes armés et un civil. Ils l'ont emmené au siège des Services de Sécurité de Donetsk (un des bastions de la RPD), avec son ordinateur et ses croquis, dit son voisin. Il est porté disparu depuis plus d'une semaine. Ses amis disent ignorer pourquoi il est ainsi passé au crible par les rebelles, puisque son seul crime a été “d'exposer son travail dans les rues du centre de Donetsk, ce qui peut au plus être considéré comme une contravention. Il n'y a pas motif à le détenir dans une prison de fait.”

Les confrères de Zakharov se sont rassemblés pour sa libération : un collectif d'artistes russes a installé une silhouette semblable à celles réalisées par Zakharov dans un parc de Saint-Pétersbourg pour protester contre son enlèvement. Le collectif a dit se sentir le droit de s'exprimer car c'est leur gouvernement qui mène “une politique  agressive et interventionniste qu'aucune personne pacifique ne peut cautionner.”

An installation in Zakharov's honour put up by Russian artists in Saint Petersburg. Sign reads:

Une installation en l'honneur de Zakharov réalisée par des artistes russes à Saint-Pétersbourg. Inscription : “Liberté pour les Murzilkas !” Source image : Facebook.

Des usagers de Facebook commentant les photos de l'installation, comme Sergueï Stortchouk, ont écrit que Zakharov et ses confrères étaient très courageux de rendre publiques leurs oeuvres :

Мурзилки герои! Это надо иметь стальные яйца и большой талант чтобы в оккупированном городе так творчески тролить рашистских-оккупантов! Ждем освобождения, держу кулаки, пусть вернуться живыми и здоровыми.

Les Mourzilkas sont des héros ! Il faut avoir des couilles d'acier et un grand talent pour troller de façon aussi créative les occupants Rachistes dans une ville assiégée ! Nous attendons votre libération, doigts croisés, pour que vous reveniez sain et sauf.

Another of Sergey Zakharov's creations on a wall in Donetsk. Hopefully we'll be seeing more of his art soon. Image from Facebook.

Une autre création de Sergueï sur un mur à Donetsk. Espérons que nous en verrons bientôt de nouvelles. Source image : Facebook.

Mon super-héros portait des bretelles : une vie avec Robin Williams

mardi 19 août 2014 à 17:05
 Robin Williams performing for US troops in the Middle East in 2003. Photo by Milosz Reterski. CC-Public Domain

Robin Williams jouant pour les troupes américaines au Moyen-Orient en 2003. Photo par Milosz Reterski. CC-Domaine public

Dans cet article spécial, l'invitée Christina Noyes de San Francisco rend hommage à son héros, le comédien oscarisé Robin Williams, qui a changé sa vie à plusieurs reprises. Robin Williams est décédé suite à une tentative de suicide supposée, chez lui à Tiburon, à quelques 30 km de la maison de Christina. Il avait 63 ans.

La plupart des enfants ont une cape ou un masque et courent partout, prétendant être Batman ou Superman ; eh bien, ce n'était pas le cas pour moi. Mon super-héros portait des bretelles.

Christina and her brother with Mork & Mindy pins on their suspenders.  September 1979. Photo from author. Used with permission.

Christina et son frère avec des pin's de Mork aux bretelles, septembre 1979.

À 8 ans, j'étais profondément amoureuse d'un extra-terrestre appelé Mork. Il était gentil, enfantin et se mettait dans l'embarras parce qu'il ne savait pas toujours faire les choses. Il était drôle, vraiment drôle. Il pouvait s'assoir sur sa tête, porter ses vêtements à l'envers, parler très vite, et il avait une façon spéciale de serrer la main qu'il m'a fallu des années pour l'imiter. D'où venait-il ? De la planète Ork bien sur. À 8 ans, j'étais encore mystifiée par ce que je voyais à la télé. Est-ce que c'était vrai ?

Quand Mork est apparu pour la première fois dans Happy Days (Les Jours Heureux), je n'ai pas compris. Il était si différent des personnages et de la période dont nous avions l'habitude. J'ai fini par comprendre quand Mork a eu sa propre série. Mon frère et moi avons passé une bonne partie de notre enfance en courant partout avec nos bretelles et pins Mork, disant « Nanu Nanu » et répétant ses drôles d'expressions.

Robin Williams, l'acteur

En grandissant, Mork n'existait plus, mais il était devenu Robin Williams, un acteur qui a touché mon cœur dans Le Monde Selon Garp, Le Cercle des Poètes Disparus, Madame Doubtfire, Docteur Patch, et mon préféré, « Goooooooood Morning Vietnam. » Il n'était plus simplement drôle. Il était vraiment bon acteur. Il était toujours amusant, mais en ralentissant et prenant cette douce et mélodieuse voix, il vous laissait entrer dans son coeur. Et c'est dans ces moments que je l'aimais le plus.

À l'adolescence, j'en suis venue à bien le connaître, pas officiellement, mais d'une façon que lui seul aurait pu comprendre. J'ai retenu les monologues les plus drôles de Good Morning Vietnam. Pas juste par cœur, j'ai appris son rythme, son timing, ses multiples voix. J'ai incarné son personnage. Je l'ai fait pour mon cours de médecine légale. Je n'étais pas douée en débat. Personne ne me prenait au sérieux. Alors quand j'ai appris pour les divisions de l'Interprétation Humoristique (concours de performance humoristique américain), où les élèves jouaient les uns contre les autres, j'ai décidé que c'était ce que je devais jouer.

Le jour où j'ai interprété les monologues de Good Morning Vietnam, ma vie à changé. Plus personne ne me regardait comme le clown de la classe. Je gagnais maintenant les trophées pour la classe. Mais plus important encore, j'ai commencé à comprendre Robin Williams à un niveau plus profond. Je comprenais comment il pouvait aller dans dix direction à la fois, à quelle vitesse son cerveau fonctionnait.

Robin Williams, le mentor

À 17 ans, celui qui avait été mon héros d'enfance n'était plus un extraterrestre amusant, mais le génie des mots et des nuances que mes yeux commençaient à entrevoir. Les monologues de Good Morning Vietnam sont devenus mes textes d'audition. J'ai été prise dans ma première pièce. Pourquoi c'est important ? Parce que j'étais une fille très timide ou mal dans ma peau. J'aimais me produire, mais pas face aux autres. À ce moment, ma vie a changé et j'ai finalement commencé à m'ouvrir au monde. J'étais en train de trouver ma voix.

Plus tard, je suis devenue professeure de théâtre dans une école publique de San Francisco. Je n'ai pas appris beaucoup durant le stage de formation. Le genre de professeur que je voulais devenir était John Keating, « Ô Capitaine ! Mon Capitaine. » Il comprenait vraiment ses élèves et il voulait qu'ils ressentent ce que c'est d'être humain et d'être vivant. J'ai appelé mon cours Arts Expressifs. Mon héros m'avait aidé à me transformer encore une fois.

Un jour en classe, j'ai partagé avec mes élèves deux points de ma liste de choses à faire avant de mourir. Il n'y avait rien de grandiose comme sauter d'un avion ou voyager à travers le monde. Je voulais simplement voir une aurore boréale et rencontrer Robin Williams. J'étais loin de me douter que je disais mes rêves à un ami qui pouvait réaliser mon second souhait.

Robin Williams, le rêve

Plusieurs jours passèrent et mon ami Peter Sloss l'a rendu réalité. C'était top secret : Robin devait essayer de nouveaux sketchs avant son show à New York. Il avait prévu de venir secrètement près d'une entrée du théâtre, le Marsh. Il devait voir le premier acte, joué par un comédien inconnu, et si le public lui plaisait, il ferait une performance surprise. J'ai eu l'impression d'avoir gagné au loto.

Mon mari, qui était mon petit ami à cette époque, est venu avec moi. Nous avons vu l'autre comédien jouer sa pièce. J'étais incroyablement anxieuse. Je ne pouvais pas rester assise en place. J'ai décidé d'aller aux toilettes pour tenter de trouver Robin Williams. Je l'ai aperçu au bar. Au lieu d'être audacieuse, j'ai foncé aux toilettes. J'ai arrangé mon rouge à lèvres, pris une grande inspiration et me suis préparée à rencontrer mon héros ! Mais le temps que je revienne dans le bar, il n'était plus là. J'étais dévastée. Est-ce qu'il n'avait pas aimé le public ? Était-t-il parti ? Avais-je perdu ma chance ? Pourquoi étais-je allée aux toilettes ? Bon dieu !

Déçue, je suis retournée à mon siège et j'ai regardé le comédien finir son show. À ce moment, le propriétaire du Marsh est venu sur scène et a annoncé que Robin Williams était ici. Mon cœur a fait un bond. Il y avait littéralement cinquante personnes dans le public, peut être soixante-quinze. C'était peu. En quelques secondes, j'ai su que je devais me faire remarquer ou je ne pourrais jamais avoir une autre chance. À quoi ai-je pensé ? Je n'ai pas réfléchi. Il avait été mon héros depuis vingt ans. Il était là en chair et en os. Il était juste en face de moi, à quelques centimètres.

Alors que les acclamations du public en état de choc s'arrêtaient lentement, j'ai su qu'il fallait que ça soit maintenant ou jamais. Je l'ai fait. J'ai crié, « JE T'AIME ! » et tout le monde s'est arrêté. Il m'a regardé et a dit, « Je t'aime ? » Mais avec une de ses voix ridicules. Son visage était déformé. Ses yeux étaient fous et il répétait en bredouillant, « Je t'aiiiiiiime. » Il a ensuite passé vingt minutes à improviser une histoire autour mon petit ami qui m'emmène en rendez-vous, d'abord au thaïlandais, ensuite venir ici, espérant être chanceux, pour m'entendre crier « Je t'aime » à un type sur scène. Robin fit remarquer qu'il aurait pu être furieux. Mais évidemment il l'avait fait de la façon la plus drôle qui soit. Mes yeux étaient remplis de larmes parce que je riais tellement fort.

Une expérience unique. Moi, Christina Noyes, était le centre d'attention d'une performance de Robin Williams. À plusieurs reprises durant l'heure, il arrêtait le cours de ses pensées, me regardait et disait « je t'aiiiiiiime » avant de reprendre son rôle.

Après le spectacle, j'étais déterminée à le rencontrer. Mon ami m'avait dit qu'il n'y avait pas d'entrée des artistes au Marsh, et qu'il n'aurait pas d'autre choix que de sortir par l'entrée principale. Mon petit ami est parti chercher la voiture et m'a dit de prendre mon temps. C'est ce que j'ai fait. Lentement l'endroit s'est vidé. Je suis restée au bar avec une autre extravagante plus âgée et ai bavardé nerveusement avec elle. J'avais imaginé notre rencontre de multiples fois. J'ai pensé que je pourrais peut être faire le salut de Mork, un petit « Nanu Nanu » ou mieux un rapide Good Morning Vietnam ! Alors que le temps passait, j'ai commencé à me sentir ridicule d'attendre ici comme une groupie idiote. Allait-il sortir un jour ? J'ai finalement demandé au barman s'il y avait des portes de service. Il a rit en me disant qu'il y en avait trois. Comment mon ami avait pu se tromper ? Devais-je renoncer ? L'autre femme et moi avons lentement abandonné l'idée de le rencontrer.

En marchant vers la sortie, je disais au revoir à un rêve. J'ai traversé la route et marché vers mon petit ami qui était dans la voiture. J'étais triste et aussi reconnaissante, mais je ne voulais pas monter dans la voiture non plus. Et c'est arrivé, Robin Williams sortait par l'entrée principale. Ha, il n'y avait pas de porte de service ! J'ai demandé à mon petit ami si je devais y aller ? Je me suis sentie ridicule, mais je me suis forcée à traverser la rue.

Robin Williams, le super-héros

J'y était, sur Valencia Street, à San Francisco, à 11 heures du soir. J'ai rencontré mon héros. Il était tellement gentil. Il m'a baisé la main. Il m'a parlé avec sa voix douce et délicate. Il essayait de détourner l'attention que je lui portais sur l'autre comédien qui l'accompagnait. Arrivée à ce moment, je savais ce que j'avais besoin de faire. J'avais besoin de le remercier pour avoir changé ma vie. C'est exactement ce que j'ai fait. J'ai partagé avec lui ce moment charnière avec Good Morning Vietnam. Je suis repartie me sentant plus forte que tout. Mon héros savait maintenant qu'il était mon héros.

Des années plus tard, on m'a renseignée sur deux performances surprises auxquelles j'ai eu la chance d'assister. Mais rien d'aussi réduit et intime que cette soirée au Marsh. Il a tout de même réussi à me faire pleurer de rire ces soirs là. La dernière fois que je l'ai vu sur scène était à Broadway en 2011, dans le Bengal Tiger at the Baghdad Zoo (Le Tigre du Bengale au Zoo de Bagdad), pièce se déroulant durant l'invasion américaine en Irak.

De temps en temps, j'emmenais mon fils à la maison de Robin pour Halloween en espérant de le voir, sans jamais avoir de chance. Depuis deux ans ma fille de quatre ans et moi chantons « Prince Ali, Fabulous he, Ali Babwa. » Je dois l'avouer, il est  difficile de chanter aujourd'hui. Quand elle grandira, je partagerai un jour avec elle un peu plus de mon héros. Mais aujourd'hui, je pleure, pas des larmes de joie, mais des larmes d'une tristesse profonde de savoir que quelqu'un que je chérissais tellement, quelqu'un qui a tant influencé ma vie, a pu être si dépressif et profondément malheureux. J'aurais aimé l'avoir aidé de la façon dont il m'a aidé.

Je serai toujours reconnaissante de ne pas avoir abandonné, d'avoir traversé cette rue, et fait savoir à mon héros qu'il était mon héros.

Christina Noyes est une ingénieure pédagogique et une spécialiste des médias numériques. Depuis les années 90, Christina a partagé sa passion pour les arts visuels et théâtraux en dirigeant des formations pour les enfants et familles vivant dans le quartier Mission District de San Francisco. On retrouve son blog ici.

La première cause de suicide est la dépression non traitée. La dépression peut être traitée et le suicide prévenu. Vous pouvez obtenir de l'aide de la part de lignes de soutient confidentiel pour les personnes suicidaires et les personnes en crise émotionnelle. Visitez  Befrienders.org pour trouver une ligne téléphonique de prévention du suicide dans votre pays.