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Arrestation et prison pour un journaliste et un militant au Liban

mardi 13 octobre 2015 à 14:50
Un tableau de l'humoriste jordanien Wael Shateely critiquant la répression de la liberté d'expression dans la région. Les citations disent: "Il est préférable de garder le silence", "opprimez-vous vous-memes  avant que vous soyez opprimé", "Laissez la responsabilité aux fonctionnaires," et "Les pensées éclairées causent des maux de tête." Source: www.sha3teely.com

Un tableau de l'humoriste jordanien Wael Shateely critiquant la répression de la liberté d'expression dans la région. Les citations disent: “Il est préférable de garder le silence”, “Opprimez-vous vous-mêmes avant que vous soyez opprimé”, “Laissez la responsabilité aux fonctionnaires,” et “Les idées brillantes causent des maux de tête.” Source: www.sha3teely.com

Deux utilisateurs libanais de Facebook se sont retrouvés condamnés à des peines de prison pour les commentaires qu'ils ont publiés sur le site.

Le 6 octobre 2015, le militant politique M. Michel Douaihy a été libéré après une détention de neuf jours pour une publication sur Facebook. Dans son billet, il avait critiqué ce qu'il a décrit comme un traitement de faveur accordé au salafiste M. Ahmad Al-Assir lors de son arrestation. Le libanais Ahmad Al-Assir [fr] a été arrêté à l'aéroport international de Beyrouth, le 15 août, après une cavale de deux ans. Il est entré dans la clandestinité après avoir créé une milice armée à Saïda, dans le sud du Liban en ordonnant à ses hommes d'ouvrir le feu sur un poste de contrôle de l'armée libanaise en juin 2013. Il essayait d'aller au Nigeria via le Caire, en utilisant de faux papiers d'identité palestiniens. La façon dont M. Al-Assir avait été “choyé” lors de son arrestation a été critiquée, parce qu'il n'avait pas été battu, comme les autres militants qui sont parfois maltraités.

Douaihy (à gauche) et Nazzal. Les deux images prises à partir de Facebook.

Douaihy (à gauche) et Nazzal. Les deux images prises à partir de Facebook.

Le bureau de la Sécurité générale est l'organe officiel du gouvernement qui a arrêté M. Douaihy, en l'accusant d'incitation aux tensions inter religieuses et de diffamation. Ce sont les mêmes accusations qui ont provoqué la condamnation du journaliste M. Mohammad Nazzal du journal Al-Akhbar. Ce journaliste a été condamné à six mois de prison et au paiement d'une amende de 633 dollars.

Bien que M. Douaihy ait été libéré, il a été inculpé en vertu de l'article 386 du code pénal libanais qui criminalise la diffamation contre le président, les fonctionnaires et des particuliers. M. Douaihy a été condamné à deux mois de prison. Toutefois, cette peine a été effacée par les neuf jours de détention préventive qu'il avait déjà passés en prison et par une amende de 200 USD.

 

Une copie de l'acte d'accusation de M. Michel Douaihy

Une copie de l'acte d'accusation de M. Michel Douaihy

 

Les utilisateurs de Twitter ont lancé le hashtag #FreeMichelDouaihy pour attirer l'attention sur son cas. Ses partisans ont également utilisé le hashtag Article 13 [fr], en référence à l'article 13 de la Constitution libanaise qui garantit la liberté d'expression et la liberté de presse “dans les limites fixées par la loi.” La loi libanaise sur la presse (écrite en 1962) n'octroie aucune protection explicite aux journalistes ou blogueurs. Parallèlement à  cette campagne en ligne, les amis et la famille de M. Douaihy ont protesté dans sa ville natale Zogherta, au nord du Liban.

“En images, les protestations à Zogherta contre l'arrestation de Michel Douaihy.””

Depuis 2009 [fr], plus de 15 blogueurs et / ou militants ont été arrêtés au Liban, interrogés et menacés à cause de leurs écrits en ligne. Mohamad Najem, un défenseur des droits humains et co-fondateur libanais de Social Media Exchange de Beyrouth, a tweeté en soutien à Michel Douaihi:

Je ne connais pas Michel, mais tout le monde a le droit d'exprimer librement ses opinions sur Facebook ou par tout autre canal #Free_Michel_Douaihi #Beirut

La journaliste Lara Saker a tweeté:

Aujourd'hui, c'est Douaihi Michel, à qui le tour demain?

De même que M. Douaihy, le journaliste Mohammad Nazzal [fr] a été condamné par contumace à six mois de prison assorti d'une amende de 633 dollars pour un billet qu'il a publié sur Facebook il y a deux ans qui contenait la phrase: “le niveau du système judiciaire est aussi bas que mes chaussures” ( #  (‫#‏القضاء_وصرمايتي_سوا‬) ce qui a été interprété comme une calomnie et une diffamation. M. Nazzal a tweeté à propos de la condamnation:

Mon avocat m'a dit, aujourd'hui, que le tribunal pénal de Beyrouth m'avait condamné à 6 mois de prison par contumace … PARFAIT! :)

Les journalistes et les blogueurs du Liban et du Moyen-Orient ont exprimé leur soutien à Nazzal sur les médias sociaux:

أنا لست صحافية، وبغض النظر عن موافقتي أو رفضي للعبارة التي أوردها الزميل محمد نزال، أرفض تكميم الأفواه، وأطالب بإسقاط الدعوى المرفوعة عليه. وأؤكد على حريته الكاملة في التعبير عن رأيه، من دون تعريضه لأي ملاحقة أو سجن. فإذا كان هاشتاغ ‫#‏القضاء_وصرمايتي_سوا‬ عقابه السجن، فلنسجن كلنا معاً. ‫#‏كلنا_محمد_نزال‬‫#‏القضاء_مش_قدر‬‫#‏مع_حرية_التعبير‬

Je suis journaliste, indépendamment de mon opinion sur le status de mon collègue Mohammed Nazzal, je refuse toute limitation à la liberté de parole et je demande que la plainte déposée contre lui soit abandonnée dès que possible. Et l'assurance de sa liberté d'exprimer son opinion, sans s'exposer à des poursuites. Si un simple billet sur les médias sociaux peut conduire à des poursuites contre son auteur, poursuivez-nous tous. .#We_All_Are_Mohammd_Nazzal #With_FreeSpeech

Le journaliste Ramez El Kadi a tweeté cette déclaration qui a été largement partagée:

Je suis journaliste, indépendamment de mon opinion sur le status de mon collègue Mohammed Nazzal, je refuse toute limitation à la liberté de parole, et je demande que la plainte déposée contre lui soit abandonnée dès que possible

Le journaliste Ghassan Saoud a publié sur sa page Facebook une déclaration en soutien à M. Nazzal, qu'il a décrit comme un journaliste qui n'a jamais été corrompu ou compromis. M. Saoud a souligné que cette attaque contre M. Nazzal allait au-delà d'une attaque contre la liberté d'expression, c'est une attaque personnelle et politiquement orchestrée contre lui et le genre de journaliste qu'il est.<script>// < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ // < ![CDATA[ (function(d, s, id) { var js, fjs = d.getElementsByTagName(s)[0]; if (d.getElementById(id)) return; js = d.createElement(s); js.id = id; js.src = "//connect.facebook.net/en_US/all.js#xfbml=1&version=v2.3"; fjs.parentNode.insertBefore(js, fjs);}(document, 'script', 'facebook-jssdk')); // ]]>

محمد نزال صحافي لم يرتشي يوماً، ولو بكرافات أو كارت حفلة فنية أو حسم هون أو هونيك..محمد نزال صحافي لم يكتب يوماً مقال ت…

Posted by Ghassan Saoud on Wednesday, October 7, 2015

Mohammed Nazzal est un journaliste qui ne s'est jamais vendu ou compromis.

 

Au secours ! Je ne peux pas communiquer avec mon grand-père en mandarin

lundi 12 octobre 2015 à 22:24
Yowei Shaw and her grandpa Credit: Chris Shaw. Used with PRI's permission

Yowei Shaw et son grand-père. Crédit: Chris Shaw. Utilisée avec la permission de PRI.

Cet article et reportage radiophonique de la productrice Yowei Shaw pour The World in Words sont initialement parus sur PRI.org le 30 septembre 2015, et sont ici reproduits dans le cadre d'un accord de partage de contenus.

J'ai eu récemment un problème que la radio m'a permis d'affronter.

J'ai pris conscience que, durant toutes ces années où j'ai passé du temps avec mon grand-père adoré, YeYe — quand il me conduisait à mes cours de tennis, m'apprenait à faire des ravioli chinois et m'emmenait très souvent manger au McDonald's après l'école (son gueuleton favori est le Big Mac avec soda, le mien le sandwich au poulet du menu à petit prix) — nous n'avions jamais eu de véritable conversation.

YeYe est originaire de Taïwan et parle uniquement mandarin. Mes parents sont également de Taïwan mais je suis née et ai été élevée aux Etats-Unis. Même si je comprends un tout petit peu le chinois, je ne parle pratiquement que l'anglais. Qualifier nos conversations de simples serait un énorme euphémisme. Cela se résume à : bonjour, comment vas-tu, as-tu faim, en boucle.

Je ne sais pas pourquoi il m'a fallu si longtemps pour réaliser tout cela, mais j'ai enfin décidé d'essayer d'avoir ma première conversation profonde avec YeYe, et aussi de faire une émission de radio à ce sujet. Et, chemin faisant, j'en suis venue à croire avec ferveur dans le pouvoir de la radio à réellement aider à résoudre ses problèmes.

Yowei Shaw and her grandparents. Credit: Emily Yao. Used with PRI's permission

Yowei Shaw et ses grands-parents. Crédit: Emily Yao. Utilisée avec la permission de PRI.

OK, je sais que cela peut paraître étrange de vouloir régler un problème personnel en faisant une émission de radio, mais cela m'a vraiment aidée. D'abord, cela m'a obligée à affronter le problème et à ne pas perdre davantage de temps. Et cela m'a aidée à élaborer un plan d'attaque. Par exemple, parce que c'était un reportage, la journaliste en moi voulait mener l'enquête, donc j'ai parlé à d'autres enfants d'immigrés, des inconnus, de vieux et des nouveaux amis, des collègues et des experts. Je ne le savais pas lorsque j'ai commencé, mais il s'avère que je ne suis pas la seule. En fait, des recherches montrent que les enfants de troisième génération ne parlent plus du tout la langue d'origine de leur famille. Ce qui signifie que ce problème de communication intergénérationnelle est un drame qui se joue sans bruit dans la vie des familles d'immigrés à travers les Etats-Unis.

Credit: Emily Yao. Used with PRI's permission

Crédit: Emily Yao. Utilisée avec la permission de PRI.

Le reportage m'a également permis de me confronter à mes sentiments de honte et de culpabilité. Pourquoi n'avais-je pas travaillé plus dur dans les écoles chinoises en grandissant ? Pourquoi ne m'étais-je pas aperçue que mon grand-père et moi avions un problème de communication, jusqu'à une date récente seulement ? Je me sens toujours un peu stupide mais, au moins,  j'ai fait quelque chose à ce sujet. J'ai l'impression de mieux comprendre ce mystère.

Je ne vais pas dévoiler ce qui s'est passé au cours de mon enquête – vous devrez écouter l'émission [en anglais] – mais je dirais que j'ai dû faire preuve de créativité pour trouver une solution à notre barrière linguistique. Comme convaincre mes parents de traduire et utiliser d'autres ressources pour m'aider à établir un contact, avec mes autres grands-parents également…

Credit: Emily Yao. Used with PRI's permission

Crédit: Emily Yao.Utilisée avec la permission de PRI.

A présent, je dispose aussi d'enregistrements audio de ces précieuses conversations — une cassette qui nous est très chère à ma famille et moi. Il se pourrait même que l'on se demande un jour, pourquoi n'en ai-je pas recueilli davantage? Il n'y a rien à ajouter, si vous n'êtes pas producteur/productrice radio et même si vous parlez la même langue que vos grands-parents, vous pouvez (et devriez !) quand même enregistrer des entretiens avec ceux que vous aimez — les personnes dans votre vie à qui vous ne parlez pas assez ou parlez tout le temps. Quel que soit votre cas, les avez-vous sur une cassette ?

Télécharger une application d'enregistrements gratuits sur votre smartphone (j'apprécie PCM Recorder) et obtenir des enregistrements tout à fait corrects est incroyablement facile au point que vous voudrez réaliser une copie de sauvegarde à au moins trois endroits. Vous pouvez utilisez « l'entretien » comme prétexte pour poser toutes sortes de questions, recevoir des conseils en cas de problème, et rassembler tant les meilleurs anecdotes que celles que vous n'avez jamais entendues. Croyez-en mon expérience — vous devriez probablement le faire avant qu'il ne soit trop tard.

Alex Lewis a composé la musique que l'on entend dans ce podcast. Elle a été enregistrée par Kyle Pulley à la Headroom de Philadelphie. Vous pouvez découvrir d'autres œuvres d'Emily Yao ici.

Vous pouvez suivre les récits de World in Words [le monde en mots] sur Facebook ou vous abonner au podcast sur iTunes.

Pourquoi les jeunes nord-coréens osent le jean moulant

lundi 12 octobre 2015 à 18:49
24-year old North Korean refugee Danbi was a smuggler in North Korea's black markets.  Here she gives us a tour of a market in South Korea, which reminds her of the markets in the North. Credit: Heidi Shin. Used with PRI's permission

Danbi, réfugiée nord-coréenne de 24 ans, travaillait dans les marchés noirs en Corée du Nord. Elle nous fait visiter un marché sud-coréen, et se rappelle de ceux qu'elle a connu au nord. Crédits : Heidi Shin. Avec la permission de PRI.

Cet article et reportage radio par Heidi Shin pour The World ont été publiés à l'origine sur PRI.org le 29 septembre 2015 et sont reproduits ici dans le cadre de notre partenariat.

Porteriez-vous des jeans moulants si c'était interdit ? Il semblerait que la réponse soit oui, du moins pour une jeune femme nord-coréenne.

Listen to this story on PRI.org »

Danbi et moi faisons le tour d'un marché en Corée du Sud quand elle s'arrête pour contempler une paire de jeans moulants. « Les filles adorent ces pantalons chez moi ! » déclare-t-elle. Chez elle, c'est une ville lointaine de l'autre Corée, celle du Nord.

Elle passe sa main dans ses cheveux d'un air théâtral et éclate de rire, tout en essayant une barrette scintillante. Elle se souvient : « On voulait toutes passer nos doigts dans nos cheveux comme ça. Comme les filles faisaient dans les séries sud-coréennes. Mais on ne pouvait pas parce qu'on n'avait pas assez de shampooing en Corée du Nord, nos doigts restaient coincés ! »

Danbi est une réfugiée de 24 ans et sa description du régime totalitaire est assez différente de celle que nous avons l'habitude d'entendre, bien qu'elle soit confirmée par d'autres transfuges et par ceux qui travaillent en relation avec des Nord-Coréens. Oui, le pays est gangrené par des atteintes aux droits de l'homme et par une misère noire. Pourtant Danbi, qui a choisi son nouveau prénom après sa fuite, vient d'une ville à frontière chinoise devenue étonnamment poreuse. Elle a ainsi grandi dans cette nation  fermée avec une fenêtre sur le monde extérieur.

Elle raconte avoir troqué des produits de contrebande sur les marchés noirs et regardé des séries télévisées américaines et sud-coréennes grâce à des clés USB clandestines depuis son enfance. Lorsqu'elle est entrée au lycée, Danbi explique avoir douté de la véracité de ce qu'on lui apprenait : que les Américains n'étaient pas dignes de confiance et que les sud-coréens étaient pauvres.

A police officer browses a South Korean market.  Danbi says many of the goods sold here can also be found in North Korean markets.   Credit: Heidi Shin. Used with PRI's permission

Un officier de police fait le tour du marché sud-coréen. Danbi affirme que beaucoup des objets vendus là se trouvent également au nord. Crédits : Heidi Shin. Avec la permission de PRI.

C'est ainsi qu'elle a commencé à sécher les cours et à faire passer des marchandises à travers la frontière chinoise. Elle vendait des champignons nord-coréens à des marchands chinois et ramenait des caisses de riz, de farine et d'autres biens.

Danbi avait sûrement beaucoup plus d'esprit d'initiative et de courage que la plupart des adolescents nord-coréens. Elle fait cependant partie de la génération de ceux qui étaient enfants lors de la famine dévastatrice des années 90. Les jeunes comme Danbi n'ont donc pas eu les mêmes attentes envers le gouvernement que leurs parents, et ils ont moins de respect pour les règles qui leur sont imposées.

Elle est confiante et garde la tête froide, mais son ton monte tout à coup à l'évocation du régime. « On voit leur gros ventre, tandis qu'on meurt de faim. On sait que c'est injuste, » déclare-t-elle sèchement, un accent nord-coréen teintant son discours.

North Korean refugee Danbi in her South Korean apartment, getting ready to go out.  In North Korea, youth informants patrol the streets, to report young people who violate the country's dress codes.  Jeans, which are popular in South Korea, were seen as a symbol of American imperialism in the North.   Credit: Heidi Shin. Used with PRI's permission

Danbi dans son appartement en Corée du Sud, alors qu'elle se prépare pour sortir. En Corée du Nord, des informateurs parcourent les rues pour dénoncer les jeunes qui ne respectent pas les codes vestimentaires. Les jeans, à la mode en Corée du Sud, étaient considérés comme un symbole de l'impérialisme américain. Crédits : Heidi Shin. Avec la permission de PRI.

Je réalise à quel point Danbi ressemble à une adolescente américaine. Elle remet l'autorité en cause et se vante d'avoir défié les codes vestimentaires dans sa jeunesse en Corée du Nord. Elle me raconte le jour où elle a été arrêtée par un informateur parce qu'elle portait des vêtements moulants importés clandestinement du sud.

« Ils dessinent une ligne dans la rue et vous ordonne de vous tenir là pendant qu'ils arrachent vos vêtements devant les passants. Ils vous prennent en exemple. » Les jeans étaient considérés comme un symbole de l'impérialisme américain, et les filles prisent vêtues ainsi voyaient leur vêtement déchiré pour qu'elles ne puissent pas le porter de nouveau. On leur coupait également les cheveux sur-le-champ s'ils étaient trop longs.

Danbi ajoute qu'après cinq ou six interpellations, on vous condamne au travail forcé, à moins que vous ayez les relations et l'argent pour payer des pots-de-vin.

« En Corée du Nord, tellement de choses peuvent être résolues avec assez d'argent de nos jours, continue-t-elle. On dépend des marchés noirs pour survivre. Faire importer des produits, les vendre, convaincre les employés du gouvernement de fermer les yeux, tout ça se fait grâce à l'argent. »

24-year old North Korean refugee Danbi swipes through photos on her mobile phone.  She has no contact with family back home, she says.  But some North Korean refugees continue to communicate with their families in the North, via care packages and smuggled Chinese cell phones.   Credit: Heidi Shin. Used with PRI's permission

Danbi fait défiler des photos sur son téléphone. Elle n'a aucun contact avec sa famille, dit-elle. Certains réfugiés continuent de communiquer avec leur famille au nord, grâce à des colis et des téléphones de contrebande chinois. Crédits : Heidi Shin. Avec la permission de PRI.

Malgré tout, la plupart des Nord-Coréens vivent dans une pauvreté extrême. L'électricité ne fonctionne que quelques heures par jour, la nourriture et l'eau courante se font parfois rares, et la menace quotidienne des camps de travaux forcés, ou pire, est bien réelle. Danbi note pourtant la différence que fait l'accès au monde extérieur.

« On avait des voisins avec de la famille au sud, et tout à coup ils ont pu vivre beaucoup mieux grâce à l'argent que leurs parents leur envoyaient. Un jour ma mère m'a même proposé, pour rire, de disparaître et de leur envoyer de l'argent à eux aussi. »

D'après l'ONG Liberty in North Korea, les réfugiés nord-coréens envoient souvent de l'argent vers leur pays d'origine. Ceux qui le peuvent communiquent également avec leur famille régulièrement, grâce à des colis et à des téléphones clandestins.

Danbi s'est enfuie il y a quatre ans, après avoir appris qu'elle faisait l'objet d'une enquête du gouvernement, alors qu'elle n'avait pas de quoi payer pour qu'on la laisse tranquille. Elle est désormais mariée à un sud-coréen et ce qui lui manque le plus, dit-elle, c'est son travail sur les marchés noirs et la famille qu'elle a laissé.

Un village orthodoxe serbe ‘menace’ de se convertir à l'islam si son église n'est pas restaurée

lundi 12 octobre 2015 à 17:13
A street in the village of Šopić. Photo by Dungodung, used under CC BY-SA 3.0 license.

Une rue du village de Šopić. Photo Dungodung, utilisée sous licence CC BY-SA 3.0.

Les habitants de Šopić, un village aux portes de Belgrade, ont menacé de “se convertir collectivement à l'islam” si leur église orthodoxe menaçant ruine n'est pas réparée par la paroisse d'ici octobre 2015. Dans une lettre au Patriarche de l'Eglise orthodoxe serbe, Irinej, les paroissiens ont fait demandé à leur chef de participer à la reconstruction de la petite église de Šopić, 150 ans d'âge, endommagée par une catastrophe naturelle l'été dernier.

Selon le quotidien serbe Alo!, les ennuis ont commencé avec la tornade qui, en juillet 2014, a sévèrement endommagé l'édifice en quelques minutes, arraché le toit, abîmé les cloches et fragilisé la structure. Entre temps, le curé de la paroisse a pris la décision de faire démolir l'église et d'en construire une neuve à la place, sans écouter les protestations des villageois désireux de préserver l'édifice vieux d'un siècle et demi. Dans leur lettre adressée au primat de l'Eglise orthodoxe serbe, les paroissiens écrivent :

Ako ne dobijemo vašu podršku, koju očekujemo kao vernici i vaši ikreni mirjani, bićemo prinuđeni da, bože me prosti, pređemo kolektivno u islam kako bismo po pozitivnim zakonima Republike Srbije dobili bolju zaštitu za naše objekte i da kao naši stari mučenici na taj način čpuvamo našeg Gospoda Isusa Hrista u srcu, a na glavu stavimo bilo koju kapu koja će nam omogućiti da od bahatosti i bilo čije samovolje zaštitimo naše svetinje.

Si nous n'obtenons pas votre soutien, que nous attendons en tant que membres de la foi et vos fidèles disciples, nous nous verrons contraints, Dieu nous pardonne, de nous convertir collectivement à l'islam de manière à pouvoir, en application du droit positif de la République de Serbie, bénéficier d'une meilleure défense de nos temples et garder Notre Seigneur Jésus-Christ dans nos coeurs comme l'ont fait nos anciens martyrs, et mettre sur nos têtes n'importe quelle calotte qui nous permettra de défendre nos sanctuaires de toute arrogance et tyrannie.

Les paroissiens de Šopić ont précisé dans des déclarations aux médias qu'ils n'étaient pas totalement opposés à la construction d'une nouvelle église, pourvu que l'ancienne soit préservée et restaurée, soulignant leur sentiment que leur foi est moins protégée que celle d'autres religions minoritaires en Serbie.

L'énergie solaire en plein essor en Inde, mais pourra-t-elle atteindre ceux qui en ont le plus besoin ?

dimanche 11 octobre 2015 à 19:24
Meenakshi Dewan brings something very special to her home in Orissa, India: electricity. Photo by Flickr user DFID - UK Department for International Development. CC-BY-NC-SA 2.0

Meenakshi Dewan apporte quelque chose de très spécial chez elle à Orissa. Photo sur Flickr de DFID – UK Department for International Development. CC-BY-NC-SA 2.0

Cet article de Didem Tali a été publié sur Ensia.com, un magazine qui met en lumière des solutions environnementales à international et est republié ici en vertu d'un accord de partage de contenu.

Le soleil brille en Inde, et l'Inde est prête à en profiter, en investissant massivement dans l'énergie solaire, pour subvenir aux besoins d'une population qui tendra à devenir la nation la plus peuplée de la planète d'ici 2022. Mais l'électricité sera-t-elle distribuée aux populations qui en ont le plus besoin?

Avec sa forte superficie et sa localisation tropicale, bon nombre d'experts considèrent le pays particulièrement adapté pour produire de l'énergie solaire. En fait, une recente étude de Deloitte et de la Confédération de l'Industrie Indienne  estime le potentiel de l'Inde en énergie solaire à 749 gigawatts —près de trois fois la capacité de toutes les installations éléctriques en 2012 — Et rapporte que pas même un pour cent de ce potentiel n'est actuellement exploité.

Le gouvernement Indien fait beaucoup pour accroître les ressources en énergie solaire du pays. Selon “Bridge to India”, une firme spécialisée dans l'énergie solaire et basée à Delhi, l'industrie de l'énergie solaire en Inde est sur le point de croitre de 250 pour cent cette année, ce qui mettrait le pays dans la course pour devenir un des cinq premiers pays au monde producteur de solaire. Le gouvernement du premier ministre indien Narendra Modi, vient d’approuver un plan d'action pour développer 50 ‘villes solaires’. Le  premier aéroport au monde fonctionnant entièrement sur l'énergie solaire a été construit récemment dans l'état de Cochin, au sud-ouest de l'Inde. Et l'Inde abritera bientôt la plus grosse gare à énergie solaire du monde. En décrivant l'énergie solaire comme  la “meilleure solution” Modi promet de donner à tous les Indiens l'accès à l’électricité et appelle les scientifiques du pays à développer des équipements de production d’énergie solaire plus efficaces.

‘Une chance unique pour l'Inde’

“L'énergie solaire est une chance unique pour l'Inde. Elle a le pouvoir, non seulement de combattre les problèmes de développement que connaît l'Inde, mais aussi de changer la donne pour le climat planétaire,” affirme Tobias Engelmeier, directeur de Bridge to India. “ Atteindre une capacité de production de 100 gigawatts en 15 ans est tout-à-fait réaliste,” dit-il.

Selon l'Institut de l’Énergie et des Ressources, groupe d'experts basé à Delhi, 300 millions de personnes en Inde n'ont pas accès à l’électricité. L'énergie solaire pourrait permettre à des écoliers de faire leurs devoirs une fois la nuit tombée,  ou encore à des  habitants d'entrer en contact avec le monde grâce aux téléphones portables, et bien plus encore. Cependant, Engelmeier affirme que ce sera un défi considérable de faire parvenir l'énergie solaire chez les populations urbaines et pauvres.

A volunteer shows local residents a Polllinate Energy solar power system. Photo by Didem Tali.

A volunteer shows local residents a Polllinate Energy solar power system. Photo by Didem Tali.

Les décisions concernant l'investissement dans le solaire, sont très politisées et changeantes. Même ceux qui ont accès à l'électricité dans les villes subissent régulièrement des coupures d’électricité. Notamment en l'absence d'un système de distribution de l'électricité centralisé, et à cause du caractère imprévisible des politiques, il est difficile d'anticiper ce qui va se passer.

Ceci étant, beaucoup d'initiatives ont l'intention de faire bénéficier les population urbaines et défavorisées de l'essor de l'énergie solaire. Au travers du projet “Lighting a Billion Lives” (“Éclairer des milliards de vie), l'Institut de l’Énergie et des Ressources a déjà permis d'éclairer plus d'un demi-million de foyers, pas seulement en Inde, mais aussi dans 11 autres pays en développement. De même, le  Fonds de développement des infrastuctures durables à petite échelle apporte une aide financière, technique et commerciale aux petites entreprises qui procurent des installations solaires. Créé en 2012, Pollinate Energy, une entreprise sociale basée en Australie et en Inde, a vendu des micro réseaux électriques solaires dans plus de 1 000 communautés.

“ Ce seront le secteur [non-marchanf] et les membres de communautés qui vont appuyer l'acheminement de l'énergie solaire jusque dans les bidonvilles,” dit  Katerina Kimmorley, directrice et fondatrice de Pollinate Energy.

Le futur de l'énergie solaire

Cependant, même en étant subventionnée par des entreprises sociales telles que Pollinate Energy, une unité d'énergie solaire coûte 5 500 Roupies (soit 83$), tandis que le salaire d'un ouvrier maçon n'excède pas 200 Roupies (soit 3 $). Beaucoup de citadins travaillent dans des secteurs à emplois précaires, tels que la construction, où les emplois sont suspendus pendant la saison des pluies, ce qui signifie que de nombreux ménages ne peuvent se permettre financièrement d'envisager une telle solution.

Par ailleurs, l’électricité n'est pas la modernisation énergétique dont les populations indiennes les plus pauvres ont le plus besoin. L'utilisation la plus importante d'énergie dans les bidonvilles est de loin consacrée à la cuisine et la stérilisation de l'eau — un besoin actuellement comblé par les combustibles de biomasse, ce qui pollue l'air, pose des problèmes de santé, et ne peut être remplacés par des micro panneaux photovoltaïques en raison de la faible quantité d’électricité que ceux-ci produisent. Néanmoins, les réseaux d’électricité solaire peuvent bénéficier aux ménages dans une certaine mesure, en particulier lorsqu'il s'agit de subvenir à des besoins quotidiens de moindre importance, tels que l'éclairage des maisons et le chargement des téléphones portables.

Il y de fortes chances que cela prenne plusieurs années, voire plusieurs décennies, pour que la demande du consommateur indien et la compétition entre opérateurs fasse devenir l'énergie solaire abordable pour tous. Cependant, grâce aux bonnes démarches, aux politiques et à un fort engagement du secteur non-marchand, le solaire pourrait en effet jouer un rôle important pour aider 300 millions d'indiens dans le besoin énergétique à accéder à l’électricité.

Didem Tali est journaliste multimédia freelance, spécialisée dans les questions de développement international. Elle écrit sur les questions économiques, le genre et l'environnement en Afrique, Asie, Europe et au Moyen-Orient. Elle est diplômée de l’École d'économie de Londres, a un Master “Média, communication et développement.”  Son compte Twitter : @didem_tali.